E. BAEZA
I INRA
Station de RecherchesAvicoles,
i 37380 Nouzilly
La viande de
canard : production
et principales caractéristiques
La consommation de canards
aété multipliée par deux
au coursde la dernière décennie. Seule viande rouge de volaille,
sesfilets si
«
goûteux
»ont progressivement conquis les cartes de restaurants, puis
les tables familiales. A l’étranger, ils constituent
unedes cartes de visite de la gastronomie française.
Avec une
production
de 128 000 tonnes en1993,
le canard occupe la troisièmeplace parmi
les viandes de volaillesproduites
enFrance. La
production française
de canardscomprend
deuxtypes
deproduits :
- les canards élevés
uniquement
pour leurchair,
dénommés « canardsmaigres
» paropposition
auxsujets gavés,
sont pour laplu- part
des canards de Barbarie(76,2
% desabattages
contrôlés en1992)
- les canards
gavés
àpartir
essentielle- ment de mâles mulards(13,5
millions d’uni- tés en1992).
L’essor de cette
production
au cours de ladernière décennie est
comparable
à celui dela viande de dinde
(+
133 % pour le canard et+ 135 % pour la dinde entre 1982 et
1992).
Il est lié àl’importance
croissante de ladécoupe (70
% destonnages
abattus en1992)
et desproduits
élaborés. La filière canardmaigre
est concentrée dans les
Pays
de Loire et laBretagne (73,4
% des canetonsproduits
en1991, 47,8
% de la fabrication d’aliment pourcanard, 82,4
% desabattages
et33,1
% dutonnage découpé
en1990). L’Aquitaine,
avecses nombreux ateliers
spécialisés
dans le foiegras de
mulard,
occupe lapremière place
pour la
découpe (51,6
% dutonnage découpé
en
1990).
Alors
qu’entre
1980 et1990,
la consomma-tion individuelle de viande en France
n’aug-
mentait que de 1
%,
celle de l’ensemble des volaillesprogressait
de 36 % et la consomma-tion de
canards, quant
àelle,
doublait pour atteindre1,8 kg/habitant
en1990, puis
2
kg/habitant
en1992,
contre0,9 kg/habitant
en 1980
(Champagne 1992).
Enfin,
la viande de canard offre à la Franceune
position
de leader au sein de l’UnionEuropéenne (46
% de laproduction
commu-nautaire de canards en 1980 et 67 % en
1991).
Lesprincipaux
clients pour les expor- tationsfrançaises
sontl’Allemagne,
leRoyau-
me-Uni et la Suisse
(respectivement : 7 700,
1 050 et 450 tonnes en
1991).
Lesimporta-
tions
proviennent
deHongrie,
dePologne
etdu
Royaume-Uni (respectivement : 2 300, 900
et 790 tonnes en
1991).
Le solde deséchanges français
aprogressé
de 8 268 tonnes en 1988 à 13 108 tonnes en 1992(Champagne 1992).
Le
développement spectaculaire
de la pro- duction decanards,
surtout duBarbarie,
etl’engouement
du consommateur pour cette viande rouge, à caractèrefestif, peuvent
s’ex-pliquer
par lesprogrès techniques accomplis
par les différents acteurs de la
filière,
maisaussi par les
qualités intrinsèques
de la vian-de de canard. Dans cet
article,
nousprésente-
rons donc les
caractéristiques
de cette viande.Dans un
premier temps,
nous comparerons les différentesespèces
utilisées en France(Barbarie, Pékin, mulard)
sur leplan
de lacomposition anatomique.
Cepoint
estimpor-
tant à considérer car la
découpe
est le débou-Résumé
-Après
évaluation de l’importanceéconomique
de la viande de canard en France(production de 128 000 tonnes en 1993), les principales
caractéristiques
de cetteviande de volaille sont décrites. Le canard de Barbarie
représente
l’essentiel de cette production, du fait d’un fort développement de ses masses musculaires et d’unengraissement
moindre que le canard Pékin. La viande de canard estmaigre, comme celle du
poulet
(2 % delipides
dans le filet) et riche en acides graspolyinsaturés. Elle se distingue des autres viandes de volailles par sa couleur rouge. En effet, les muscles de canard sont constitués essentiellement de fibres musculaires rouges (70 à 90 % dans le filet). Cette
particularité
structurale déter- mine enpartie
lescaractéristiques technologiques
etorganoleptiques
de la vian- de (pH, couleur, tendreté, jutosité, flaveur).La croissance est
plus
lente etplus
tardive chez le canard de Barbarie que chez le canard Pékin.
ché
majeur
de laproduction
de canardset,
deplus,
ce facteur a été déterminant dans le choix du Barbarie par lesagents
de la filière.Puis nous aborderons les
aspects
structu-raux,
biochimiques, technologiques (pH,
pou- voir de rétention eneau)
etorganoleptiques (couleur, tendreté, jutosité, flaveur)
de laviande de canard.
1 / Composition anatomique
des canards de Barbarie,
Pékin et mulard
Ricard
(1986, 1987)
acomparé
lacomposi-
tion
anatomique
des troistypes
de canards élevés en France(Barbarie,
Pékin etmulard)
àl’âge
de8,
10 et 12 semaines(figure 1,
tableau1).
Le canard Pékinprésente
unecroissance
plus rapide
et undéveloppement plus précoce
que le canard de Barbarie. La différence est de trois àquatre
semaines. Soncycle
deproduction
est doncplus
court. Eneffet,
le canard de chair detype
Pékin est leplus
souvent abattu vers 7-8 semainesd’âge.
Comme chez le canard de
Barbarie,
on assisteà un
développement
tardif des musclespecto-
raux. Mais les
âges
usuelsd’abattage (8
et 10ou 12
semaines)
necorrespondant
pas auxmêmes stades de
développement,
lapart
desfilets
(en
% dupoids vif)
est moindre chez le canard Pékin. Le canard mulardprésente
une situation intermédiaire
(figure 1).
LeBarbarie se caractérise par un
dépôt
abdomi-nal
supérieur
à celui des autres canards(figure 1), mais,
avec lagénéralisation
de ladécoupe,
ce facteur ne constitueplus
un han-dicap.
C’est le canard Pékinqui présente
lesdépôts
gras sous-cutanés lesplus
abondants.Il faut remarquer que les résultats
présentés
dans le tableau 1 sont issus de travaux effec- tués par Ricard en 1985. Un des
objectifs
dessélectionneurs étant la réduction de
l’adiposi- té,
il serait intéressant de vérifier si la diffé-rence
d’engraissement
constatée par Ricard(1986)
entre le canard Pékin et le canard de Barbarie est la même en 1994. Lemulard, quant
àlui,
esttoujours plus maigre
que ses deuxparents. Toutefois,
lesproducteurs
decanards
maigres gardent
unepréférence
pour le canard de Barbarie dont lepoids
vif àl’abattage
est nettementplus
élevé chez lemâle,
ainsi que le rendement «prêt
à cuire »(PAC)
et en filets.Quel
que soit legénotype,
les femelles
présentent toujours
unengrais-
sement
supérieur (tableau 1).
Ces observa- tions sont confirmées par les résultats obte-nus par Paci et al
(1993)
avec des souchesitaliennes,
et lapart
desprincipaux
mor-ceaux
présentés
endécoupe (filets
sans peau, cuisses -pilons) représente
de 26 à 31 % dupoids
vif selon legénotype.
Enfin,
unepartie
de la viande de canard consomméeprovenant
d’animaux gras, il est intéressant deprésenter
lesconséquences
dugavage sur la
composition anatomique (tableau 2). Auvergne (1992)
sur des canards deBarbarie,
abattus à 14semaines,
a montrél’accroissement de
l’engraissement corporel parallèlement
àl’augmentation
dupoids
dufoie. La
proportion
des filets sans peau(en
% dupoids vif)
décroît de4,5 points
chez lesanimaux
gavés
alors que celle des cuisses -pilons
resteinchangée.
Les
palmipèdes,
enparticulier
leBarbarie,
ont une croissance musculaire tardive et ils sont donc abattus à un
poids
vifplus proche
du
poids
mature que lesgallinacés (80
%contre 50 %
environ).
Ceci a pourconséquen-
ce un rendement en filets inférieur chez le
poulet,
de l’ordre de 11 % et un rendement encuisses-pilons supérieur,
de l’ordre de 23 %(Ricard
et al1993). Cependant,
le rendementen carcasse PAC du
canard,
de l’ordre de 60%,
estplus
faible que ceux dupoulet
et dela dinde
(72
et 78%1.
i.2 / Typologie des fibres
musculaires
L’étude de la structure des muscles
permet
d’établir un lien entre labiologie
de la crois-sance musculaire et la
qualité
de la viande.En
effet,
lesproportions
et la nature des dif-férentes fibres
qui
constituent un muscle déterminent lesquantités
de substrat et la nature dessystèmes enzymatiques qui
influencent l’évolution
post-mortem
et la maturation de la viande(Delmas
etOuhayoun 1990).
Chez lecanard,
peu de tra-vaux ont été effectués sur ce
sujet
et les com-paraisons
entre les divers travaux sont diffi- ciles carl’âge,
le sexe,l’espèce
et le nombred’individus ne sont pas
toujours précisés
etles
méthodologies
utilisées pour la classifi-cation des fibres
peuvent
être différentes(Brooke
et Kaiser1970,
Ashmore et Dcerr1971,
Ashmore1974,
Barnard et al1982).
Nous ne
présenterons
que les résultats concernant le Pectoralismajor (filet),
muscle leplus apprécié
des consommateurs et aussi leplus
étudié(tableau 3).
Il renferme essen-tiellement des fibres rouges
(70-90 %)
dont l’activitéoxydative
estimportante.
Le dia-mètre moyen des fibres rouges est de 25- 50 pm, celui des fibres blanches est
supé- rieur,
de l’ordre de 40-75 um. On trouve chez le Barbarie et le Rouen des fibres intermé- diaires en faibleproportion (4
à 8%).
SeulsFabiani et al
(1992)
ont utilisé la classifica- tion de Ashmore et Dœrr(1971)
pour déter- miner latypologie myofibrillaire
du P.major
chez le canard de Barbarie
âgé
de 6 mois : fibres aR etaW,
à vitesse de contractionrapi-
de
(a).
Chez lepoulet,
le P.major comporte uniquement
des fibres blanches detype
aW, présentant
une vitesse de contractionrapide
et une activité
glycolytique importante.
Le
filet
de canardcontient 70 à 90 % de
fibres
rouges.Concernant l’étude du
développement
mus-culaire,
nous ne pouvons citer que les travaux de Swatland(1980a, 1980b, 1981).
Cet auteurs’est intéressé à la croissance de deux
muscles,
leSupracoracoideus (muscle
situésous le
filet)
et le Sartorius(muscle
de lacuisse)
chez des canards de Barbarie et Pékin. La croissancevolumétrique
du muscleest due à la croissance radiale et à la crois-
sance
longitudinale.
Ces deux dernières sont maximales à la sixième semained’âge
pour leSupracoracoideus
et à laquatrième
et cin-quième
semained’âge respectivement
pour leSartorius
(figure 2).
Les musclespectoraux
sedéveloppant après
ceux descuisses, l’aug-
mentation de la taille des fibres en
longueur
et en
épaisseur
estplus
tardive. Chez le mâleBarbarie,
les muscles sontplus
lourds du faitd’une croissance
longitudinale
et radialesupérieure
sepoursuivant
au-delà de 10 semaines. Chez lePékin,
ces deux para- mètres croissentplus rapidement
etrégres-
sent
après l’âge
de 7 semaines(figure 3).
Cecijustifie
encorel’âge d’abattage plus précoce
pour le Pékin et la femelle Barbarie.
3 / Composition biochimique
de la viande
-! ---La
composition chimique
des filets et descuisses varie peu selon le sexe ou le
génotype (tableau 4).
La teneur enlipides
intramuscu-laires, paramètre
assezvariable,
est enmoyenne
plus
élevée dans les muscles de la cuisse. Lacomposition chimique
du filet aégalement
été étudiée chez des animauxgavés.
Le gavage a pourconséquence
unaccroissement de
l’engraissement corporel.
La teneur en
lipides
est donc accrue, au détri-ment de la teneur en eau
(tableau 5,
Auver-gne
1992).
Chez le
canard,
comme pour l’ensemble desvolailles,
lesdépôts lipidiques
se situent sousla peau et à l’intérieur de la cavité abdomi- nale. La teneur en
lipides
du filet sans peaucorrespond
à celle d’une viandemaigre.
Lesphospholipides, qui
sont deslipides
de struc-ture,
constituent la fraction laplus
abon-dante
(1,10
g pour 100 g de muscle dans le filet de canard de Barbarie abattu à 12 semai-nes).
Laproportion
destriglycérides, princi- pal
constituant desdépôts intramusculaires, représente
seulement le tiers deslipides
totaux
(0,52
g pour 100 g defilet).
Les autresconstituants,
pour 100 g defilet,
serépartis-
sent comme suit :
- 15,3
mg d’acides gras libres- 64,6
mg de cholestérol libre- 1,7
mg d’esters de cholestérol(Salichon
etal 1993).
Chez le canard de
Barbarie,
le gras du filet contient peu d’acides gras saturés : acidespal- mitique
etstéarique
essentiellement(tableau 6).
Parcontre,
il se montreparticuliè-
rement bien pourvu en acides gras
polyinsatu-
rés
(acides linoléique
etarachidonique),
del’ordre de 30-31
%, particularité qui répond
bien aux
préoccupations diététiques
desconsommateurs. Le filet de canard Pékin ren-
ferme
plus
d’acides gras saturés au détrimentChez le Barbarie
mâle,
lacroissance des
fibres
musculaires du Sartorius(muscle
de lacuisse)
sepoursuit
au-delà de 10 semaines alors
qu’elle
cesseà 7 semaines chez le Pékin.
Les
dépôts adipeux
ducanard sont essentiellement sous-cutanés et abdominaux. Le
filet
sans peau aune teneur en
lipides
totauxde2à3%.
des acides gras
polyinsaturés (Smith
et al1993).
Le gavage,qui
induit unesynthèse endogène importante
delipides,
a pour consé- quence d’accroître la teneur en acides grasmonoinsaturés
(acide oléïque)
au détrimentdes acides gras
polyinsaturés (tableau 6).
La teneur en acides gras saturés est peu modifiée.Le canard est donc souvent considéré à tort
comme une volaille grasse.
Certes,
les propor- tions de gras abdominal et de l’ensemble« peau + gras sous-cutané » sont
plus impor-
tantes chez les
palmipèdes,
mais la teneur enlipides
de la viande de canard estproche,
voire inférieure à celle du
poulet (2
% vs 1 à1,5
% dans le filet et 5 % vs5,5
à8,5
% dans l’ensemble «cuisses-pilons
»,Paquin 1988,
Gandemer et Kim1993).
Parailleurs,
ledegré
d’insaturation des acides gras entrant dans la fractionlipidique
du filet estsupé-
rieur chez le canard
maigre comparé
au pou- let standard(1,92
vs1,60
selon Girard et al1993)
et lerapport polyinsaturés/saturés
estplus
intéressant chez le canardmaigre
com-paré
aupoulet
standard(0,95
us0,61
selon Girard et al1993). Enfin,
le filet depoulet
de
type
standardprésente
une teneur enphospholipides
moindre(0,5
g pour 100 g demuscle)
et une teneur entriglycérides
inférieure
(0,4
g pour 100 g demuscle) (Gandemer
et Kim1993).
A volume musculai-re
égal,
le P.major
du canard contient unnombre de fibres
plus important
car le dia-mètre des fibres rouges est inférieur à celui des fibres blanches et il
présente
donc uneproportion
de membranes et delipides
destructure
supérieure.
4 / Caractéristiques technologiques et organoleptiques de la
viande
Nous ne
présenterons
dans ceparagraphe
que peu de résultats car, contrairement à celles du
poulet,
lescaractéristiques
technolo-giques
etorganoleptiques
de la viande de canard ont été à cejour
assez peu étudiées.4.
1 / pH
Dans les études
rapportées,
lepH
est mesu-ré,
soit in situgrâce
à uneélectrode,
soitaprès broyage
d’un échantillon de viande dans unesolution d’iodo-acétate. Le
pH
ultime moyen est de5,8
pour le filet et de6,2
pour la cuisse(tableau 7).
Dans le P.major,
lepH
décroît de6,25 (15
minutespost-mortem)
à5,66 (24
hpost-mortem) (Smith
et al1992a).
LepH
ulti-me du filet de canard est du même ordre que celui de
poulet (5,66
et5,62).
Parcontre,
lachute du
pH post-mortem
estplus rapide
dansle filet de canard (Smith et al
1992a).
Liu et Chen(1989)
et Chen et al(1991)
ont montréque la baisse du
pH
étaitplus
lentelorsque
ladurée du
jeûne
des animaux avantl’abattage
était
prolongée,
entraînant une diminution des réserves musculaires englycogène.
LepH
ulti-me du filet est
égal
à5,7
pour 4 h dejeûne
et à6,1
pour 24 h dejeûne.
Un stressthermique
des canards
(2
h à 40 IC avantl’abattage)
induit le même effet
(Pingel
et Knust1993).
4.
2 / Pouvoir de rétention
en eauLe
pouvoir
de rétention en eau est mesuré par laperte
dejus après
conservation de la viande au froid. Un stressthermique
avantl’abattage
accroît lacapacité
de rétention en eau des muscles car lepH post-mortem
reste élevé(Pingel
et Knust1993).
En cours d’abat-tage,
unetempérature d’échaudage
élevée(62
%C)
réduit lacapacité
de rétention en eau(Pingel
et Knust1993).
4.
3 / Couleur
De par sa structure
myofibrillaire,
la viandede canard est rouge. Les rares valeurs de cou-
leur
publiées
varientbeaucoup
selon lesauteurs
(tableau 8).
Plus l’animal estâgé
etplus
la coloration du filet est sombre. Lemagret (filet
de canardgavé),
riche enlipides, présente
une colorationplus
claire. Les valeurs desparamètres L * ,
a* et b* pour le filet depoulet, qui
est une viandeblanche,
sont :
48,71 - 1,10
et9,26 (Smith
et al1993).
Les valeurs de L*et b* sont
plus
élevées pour lepoulet,
celle de a* est très inférieure.D’après
Chen et al(1991),
la coloration des filets et des cuisses +pilons
estplus
sombrelorsque
la durée dujeûne
avantabattage
s’ac-croît. Les animaux mis en gavage
précocement (10 semaines)
ont des musclesplus
clairs etmoins rouges que les animaux
plus âgés (13 semaines) (Setiawan
etal 1993).
4.
4 / Tendreté
Ce facteur est soit mesuré par la force de
cisaillement,
soit estimé paranalyse
sensoriel-le. L’incidence des traitements
technologiques
a été
plus particulièrement
étudiée pour ceparamètre.
Smith et al(1992b)
etPingel
etKnust
(1993)
ont mis en évidence l’effetnégatif
du
désossage pratiqué juste après l’abattage
sur la tendreté du filet. En
effet,
les muscles nesont alors
plus
fixés aux ospendant
laphase
derigor
mortis et ilspeuvent
se contracter. La tendreté est aussi inversementproportionnelle
à la durée de
stockage
au froid(+
4° C ; - 18 °C) (Reddy 1990).
Un stressthermique
avantl’abattage
réduit la tendreté(Pingel
et Knust1993).
Les filets issus de canardsmaigres
seraient
jugés plus
tendres que ceux de canards grasqui
sont abattus à unâge plus
tardif
(Girard
et al1993).
Pour un mêmeâge
àl’abattage
(7semaines),
la viande de canard estplus
ferme que celle depoulet (Smith
et al1992b).
Eneffet,
le filet de canard est constitué surtout de fibres rouges dont le diamètre est inférieur à celui des fibres blanches. A volume musculaireégal,
le filet de canard contient donc un nombresupérieur
de fibres et il a uneteneur en
collagène plus
élevée(1,75 mg/g
us1,27 mg/g
chez lepoulet.
Smith et al1993).
4.
5 / Jutosité
Ce critère est estimé par
analyse
sensorielle.La
jutosité dépend
de lacapacité
de rétentionen eau du muscle. De par sa structure
myofi-
brillaire de
type oxydatif prédominant,
la vian-de de canard serait
plus juteuse
que celle depoulet.
Unjeûne prolongé
des canards ou unstress
thermique
avantl’abattage
diminue lajutosité
des filets(Liu
et Chen1989, Pingel
etKnust
1993).
En coursd’abattage,
unetempé-
rature
d’échaudage
élevée(62 ° C)
réduitégale-
ment la
jutosité (Pingel
et Knust1993).
Lesfilets de canards
maigres
seraientjugés plus juteux
que ceux de canards gras(Girard
et al1993).
La viande de canards élevés sur par-cours est
plus juteuse
que celle de canards éle- vés defaçon intensive,
en claustration(Pingel
et Knust
1993).
4.
6 / Flaveur
La viande de
canard,
dont la teneur enpig-
ments est élevée et la
part
dephospholipides importante, présenterait
une flaveurplus
intense que celle de
poulet.
Eneffet,
Mottramet Edwards
(1983)
ont montré que lesphos- pholipides
sont lesprécurseurs
descomposés
d’arôme de la viande cuite. Pour Monin(1991),
chez lesbovins,
les musclesoxydatifs
riches enphospholipides
ontplus
de flaveur que les musclesglycolytiques
pauvres enphospholi- pides.
La flaveur des filets de canards gras seraitjugée supérieure
à celle de canardsmaigres (Girard
et al1993). Pingel
et Knust(1993)
ont mis en évidence l’effetnégatif
dudésossage pratiqué juste après l’abattage
surla flaveur du filet. La viande de canards Pékins et mulards élevés sur parcours
présen-
terait une flaveur
plus
intense que ceux élevésen claustration de
façon
intensive(Pingel
etKnust
1993).
Les
caractéristiques technologiques
etorganoleptiques dépendent
d’un trèsgrand
nombre de facteurs :
génotype,
sexe,âge
desanimaux,
conditionsd’élevage
etd’abattage
des
canards,
traitementstechnologiques,...
Toutefois,
il ressort des résultatsprésentés
dans ce
paragraphe, qu’un
stress avantl’abattage (jeûne prolongé, température
éle-vée,
exerciceforcé...) peut jouer
un rôleparti-
culièrement
important.
Il se traduitgénérale-
ment par l’obtention d’une viande de
type
« DFD
» (dark, firm, dry).
Conclusion
--..--.-..-
Au sein des viandes de
volailles,
la viande de canard sedistingue
par sa couleur rouge.La différence de structure
myofibrillaire
entre muscles de canard et muscles de
poulet,
notamment pour le P
major, explique
en par-tie,
l’évolution différente des processus méta-boliques
de la viande dans cesespèces après abattage
ainsi que leurscaractéristiques technologiques
etorganoleptiques.
La viandede canard est
plus
ferme etplus juteuse.
Elleprésente
une flaveurplus
intense. Les traite- mentstechnologiques (conditions
de refroidis- sement et destockage,
délaiabattage-trans- formation,
mode deconditionnement, type
decuisson,...)
doivent donc tenircompte
desspé-
cificités de
chaque
viande. Bien desprogrès
ont été
accomplis
dans le domaine de la sélec- tion et destechniques d’élevage (nutrition
enparticulier)
pour améliorer lacomposition corporelle
des canards(diminution
de l’en-graissement, augmentation
des masses mus-culaires). Cependant,
l’état de nos connais-sances sur les
caractéristiques structurelles,
sensorielles et fonctionnelles de la viande de canard demeure insuffisant pour identifier
et,
par la
suite,
maîtriser tous les facteurs res-ponsables
de laqualité.
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Abstract
The meat
of
duck :production
and main cha- racteristics.After
reviewing
the economicimportance
of duckmeat in France
(128,000
tproduced
in 1993) somecharacteristics of this
type
of meat are then des- cribed. Duck meat isproduced mainly
from Mus-covy ducks which exhibit
greater
muscle deve-lopment
and have lessfatty
carcasses thanPeking
ducks. Like chickenmeat,
duck meat is lean(breast
meat containsonly
2 %lipid),
andrich in
polyunsaturated fatty
acids.However,
unlike chickenmeat,
duck meat is red. Duck muscles containmainly
red muscles fibers(bet-
ween 70 and 90 % in the
breast).
This structural characteristic determines inpart
thetechnologi-
cal and sensory
properties
of the meat(pH, colour, tenderness, juiciness, flavour).
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