R EVUE DE STATISTIQUE APPLIQUÉE
E. D UCLOS M. P ILLET A. C OURTOIS
Optimisation de la maîtrise statistique des procédés par une méthode de filtrage d’ordre
Revue de statistique appliquée, tome 44, n
o2 (1996), p. 61-79
<http://www.numdam.org/item?id=RSA_1996__44_2_61_0>
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OPTIMISATION DE LA MAÎTRISE STATISTIQUE
DES PROCÉDÉS PAR UNE MÉTHODE
DE FILTRAGE D’ORDRE
E.
Duclos1,
M. Pillet et A. Courtois LLP/CESALP - BP 806 74016Annecy
Cedex - FRANCE Tel (+33) 50.66.60.80 - Fax : (+33) 50.66.60.20Email :
duclos @ esia.univ-savoie.fr
RÉSUMÉ
L’objet
de cet article est deprésenter
une méthode defiltrage
dite « d’ ordre » permettant d’améliorer lesperformances
des cartes de contrôle, en terme de PériodeOpérationnelle Moyenne
(P.O.M.),lorsque
la loi derépartition
des mesures estsymétrique
mais nongaussienne.
Nous avons étudié ici une famille de filtres d’ordre : les L-Filtres
optimaux
selon le critère du minimum de variance. Nous démontrons à l’aide de simulationsinformatiques
que l’utilisation d’un filtre d’ordre, pourremplacer
la moyenneopérée
avec les cartesX/R,
apporte de nettes améliorations dans la détection d’undécentrage.
Les filtres d’ordre, ont laparticularité
deprendre
en compte la forme de la distribution des mesures. Pour ce faire, on calcule leurs coefficients, defaçon
à les rendreoptimaux
au sens du maximum de vraisemblance ou du minimum de variance des valeurs filtrées. Nous concluons cet article en proposant de nouvellesapplications
et en ouvrant delarges perspectives
pour les méthodes defiltrage
d’ordre enMaîtrise
Statistique
des Procédés.Mots-clés : Maîtrise
Statistique
des Procédés(M.S.P.), L-filtre Optimal,
L-estimateurs,Filtrage
d’ordre,Statistiques
d’ordre,Filtrage optimal.
SUMMARY
In this paper, we present a
filtering
method called «orderfiltering»
toimprove
theStatistical Process Control (S.P.C.)
performances
in terms of average RunLength
(A.R.L.), when measures are notnormally
distributed butsymmetrical.
We have studied a class of order filters :optimal
L-filters in terms of the minimum variance of the output. We proveby
computer simulation thatusing
an order filter instead of the mean,usually
used withX/R
charts,increases
significantly
therejection
of common causes. Order filters have theparticularity
totake into account the real
shape
of measured distributions. It is thenpossible
to calculateoptimal
coefficientsaccording
to a criteria of maximum likelihood or minimum variance of filtered measures. As a conclusion we propose newapplications
and describelarge perspectives
of order
filtering applied
to Statistical Process Control.1 Contrat CIFRE entre l’ANRT et ODS Europe SA - PAE des Glaisins-12 rue du Pré Paillard - 74940
Annecy le Vieux.
Keywords :
Statistical Process Control (S.P.C.),Optimal L- filter,
L-estimators,Order filtering,
Order statistics,
Optimal filtering.
1. Introduction
L’utilisation de cartes de contrôle
(X/R)
en MaîtriseStatistique
des Procédés(M.S.P.)
nécessitel’hypothèse
de normalité de la distribution des moyennes. Cettehypothèse,
bien que trèsrobuste,
n’est pastoujours
vérifiée. Eneffet,
pour la satisfaireau
mieux,
il faut ou bien que lapopulation
soit distribuée selon une loiproche
de la loinormale,
ou bien que la taille de l’échantillon soitgrande.
La deuxième solution n’est malheureusement pas recevable pour des raisons d’économie deprélèvements.
Parconséquent,
si lapopulation
n’est pasgaussienne,
la moyenne d’écarttype 03C3/n- (n
étant la taille de
l’échantillon)
n’estplus
une estimation à variance minimale[Cap 88].
Nous allons montrer dans ce
qui suit, qu’il
estpossible
de minimiser la variance de la distribution des valeursestimées,
oufiltrées,
en utilisant une famille destatistiques
d’ordre. Ceci dans le but d’améliorer la Période
Opérationnelle Moyenne (P.O.M.
ouA.R.L.)
des cartes decontrôle, qui
constitue un bon indicateur deperformances
deces cartes.
Tout d’abord nous
rappellerons
lesprincipes
de base de la Maîtrise Statisti- que des Procédés(M.S.P.)
pour l’élimination des causes communes. Ensuite nousprésenterons
une famille destatistiques d’ordre,
les L-Estimateurs(aussi appelés
L-Filtres en traitement du
signal)
que nous utiliserons pour améliorer lesperformances
de la M.S.P. Nous
justifierons
les améliorationsapportées
par les calculs de P.O.M.pour des cas
particuliers
de distributions.Enfin,
nousdévelopperons quelques
pers-pectives
intéressantesd’applications
desstatistiques
d’ordre à la MaîtriseStatistique
des Procédés.
2. Présentation de la M.S.P.
Le
principe
de base de la M.S.P. consiste à détecterl’apparition
d’une causespéciale (ou assignable)
àpartir
de données bruitées issues duprocédé.
Afin dedissocier les occurrences des causes
spéciales
de celles des causes communes,l’approche classique
consiste à effectuer un contrôle sur un échantillon de npièces
consécutives et à estimer la valeur des
paramètres
deposition (moyenne
oumédiane)
et d’échelle
(écart type
ouétendue)
de lapopulation.
Parallèlement àl’opération
d’estimation
qui
donne uneimage
de l’évolution duprocédé,
nécessaire à sa bonneconduite,
onopère
un testd’hypothèse
pour savoir si leprocédé
est ou n’est pas sous contrôle pour unrisque
donné. Toute estimationstatistique, comporte
desrisques
décisionnels a et
/3
caractérisant l’efficacité de la méthode. Différentesapproches
ontd’ailleurs été
proposées (CUSUM, EWMA,...)
dans le but de minimiser cesrisques.
Pour de
plus amples
informations on se référera à[Pil 94] [Mon 90] [Rya 89].
Afin de comparer les
performances
de différentes cartes de contrôle et de connaîtrel’importance
des deuxrisques
décisionnels a et3
on calcule leur PériodeOpérationnelle Moyenne (P.O.M.).
Cet indicateur rendcompte
dutemps
moyen queprend
une carte de contrôle pour détecter que leprocédé
est hors des limites d’intervention.Il est
important
derappeler
les notions derisque
a etf3
pour biencomprendre l’interprétation
des P.O.M et l’intérêt des L-estimateurs ou L-filtres parrapport
à la moyenne.Lorsqu’on pilote
unprocédé
avec une méthodestatistique,
il existe deuxrisques
décisionnels que l’on essaye de minimiser :
- Le
risque
de conclure à undécentrage
duprocédé
alors que celui-ci estparfaitement centré,
aussiappelé risque
depremière espèce
ourisque
oz(fig 1);
FIGURE 1 :
POMk=o - 1
- Le
risque
de ne pas déceler undécentrage
alors que celui-ciexiste,
aussiappelé risque
de secondeespèce
ourisque j3 (fig 2).
FIGURE 2 :
POMk = 1 10
Lorsque
leprocédé
est centré(k = 0)
laprobabilité
de détecter un état hors contrôlecorrespond
aurisque
a; la PériodeOpérationnelle Moyenne prend
donc lavaleur
POMk=o
=En revanche, lorsque
leprocédé
estdécentré,
laprobabilité
de détecter ce
décentrage
est de 1 -/3
d’oùPOMk = 1 1-03B2
Ces
risques conditionnent,
l’efficacité d’une carte de contrôle et définissent ainsi sacapacité
à détecter undérèglage
avec leplus
d’acuité et derapidité possible.
Les
statistiques
d’ordre que nous allons étudierplus
loin ont laparticularité
deprendre
encompte
la forme de la distribution du bruit. Ceci leurpermet
d’avoir de meilleuresperformances
que les filtreslinéaires,
tels que la moyenne, en terme de réduction de bruitlorsqu’il
n’est pasgaussien.
L’estimateur deposition
leplus
utiliséest
cependant
la moyenne, pour la mise en oeuvre de la carte de ShewhartX/R,
avecl’hypothèse implicite
de la normalité de la distribution.Notre idée est de
remplacer l’opérateur
de moyenne par unestatistique
d’ordrepour minimiser les
risques
a et/3
et donc les erreurs d’estimation de laposition
du
procédé lorsque
la densité deprobabilité
du bruit est de forme différente. Les estimateurs étudiés sont construits selon le critère du minimum de variance de la sortie. Onpeut
noter à ce propos que lastatistique
d’ordreoptimale
est la moyenne,lorsque
les mesures sont distribuées selon une loi normale[Bov83].
3.
Filtrage
d’ordre3.1. Introduction
Nous aborderons ce
problème
d’estimation d’unpoint
de vue traitement dusignal
enparlant
non pas destatistiques
d’ordre mais defiltrage
d’ordre. Leproblème
étudié est en effet
analogue
auxproblèmes
bien connus defiltrage optimal puisque
nous essayons d’extraire d’un
signal
bruité(mesures
sur leprocédé)
unsignal
informatif
qui
est laposition
réelle duprocédé.
Les
techniques
defiltrage
d’ordre ont initialement trouvé leursapplications
en traitement
numérique d’images.
Cesopérateurs apparaissent
comme des fonctionslinéaires et non linéaires de
statistiques
d’ordre. Ilspermettent
d’obtenir de meilleuresperformances
que les filtres linéaires en termes de réduction de bruit et depréservation
des transitions du
signal
informatif(estimation
de laposition
duprocédé).
Bienqu’étudiés
dans ce contexte, lesopérateurs
defiltrage
d’ordrepeuvent
être utiliséssur des
signaux
monodimensionnels entachés de bruits nongaussiens.
C’estpourquoi
nous allons les utiliser en M.S.P.
3.2. Notions
de filtrage
d’ordreSoit n le nombre de mesures
(taille
dufiltre).
Pour des raisons desymétrie,
n estgénéralement impair.
Ondésigne
parxi (i
= 1 ...n)
les mesures réalisées à l’instantk,
etXk
est l’ensemble des mesures effectuées à ce même instant k.On effectue localement un tri dans l’ordre croissant des mesures
disponibles
(xi)
dans le vecteurXk.
Onappelle jème statistique
d’ordre oustatistique d’ordre j,
la valeur
ayant
lerang j
dans le vecteur ordonnéX k .
avec
On
peut distinguer
deuxcatégories
de filtresparmi
les filtres d’ordre : les L- Filtres et les NL-Filtres. Ils se différencient par lafaçon
depondérer
lesstatistiques
d’ordre pour calculer la sortie du filtre. La sortie
Yk
d’un L-filtre est alors donnée par une combinaison linéaire desstatistiques
d’ordre avec des coefficients réels notésCj(j={1...n}).
Si on
généralise
cette notation en définissant unopérateur
à l’aide d’une fonction réelle4J,
on obtient desNL-filtres ;
lafonction 4J ayant
éventuellement un caractèrenon linéaire
(NL).
Dans notre
étude,
nous ne nous intéresseronsqu’aux
L-filtres dont voiciquelques exemples :
- filtre milieu
CI = Cn
=1/2
etCj =
0pour j
de 2 à n -1,
cequi
revient àprendre
la moyenne des valeurs extrêmes.- filtre moyenneur
C j
=1 /n pour j
de 1 à n, cequi
revient àprendre
la moyenne.- filtre médian
Cm
= 1 etCj
= 0 avec m =(n + 1)/2 et j =1-
m, cequi
revientà
prendre
la médiane.3.3.
Optimisation
descoefficients
des L-FiltresL’intérêt des L-Filtres est de
pouvoir
déterminer unjeu
de coefficientsoptimaux
au sens de l’erreur
quadratique
desortie,
en tenantcompte
de la forme de la distribution du bruit. On cherche donc à déterminer un estimateur non biaisé à variance minimale de laposition
duprocédé.
Si le
signal
d’entrée du filtre eststationnaire,
nous pouvons le modéliser par :Xk
= sk +Bk,
où Bk est une constante(position
duprocédé)
etBk
un bruit blanc centréayant
une densité deprobabilité symétrique.
Pour un ensemble de mesuresconsécutives,
lesstatistiques
d’ordre vérifient :où
B ( j )
est lajème statistique
d’ordre du bruit.On en déduit la sortie
Yk
On a alors :
Du fait de la
symétrie
de la distribution dubruit,
le filtreoptimal
estsymétrique :
Une condition suffisante pour obtenir un biais nul est :
La variance du filtre devient
Où
tc
=(C1,..., Cn )
est le vecteur coefficient et R =(Rjp)
est la matrice de covariance du bruit ordonné :Par une
technique
demultiplicateurs
deLagrange,
on obtient la solutionoptimale :
Le calcul du
jeu optimal
des coefficients estégalement possible
pour des distributions d’entrées nonsymétriques.
3.4. Stationnarité des données
Nous nous
placerons toujours
dansl’hypothèse
d’unsignal
utile stationnaireau sein d’un échantillon de mesures consécutives. Cette
hypothèse
est effectivement vérifiéelorsque
ses variations sont très lentes parrapport
à lapériode
surlaquelle
oneffectue les mesures
(ou
leprélèvement
depièces
dans le cas d’uneproduction
depièces mécaniques
ensérie).
Dans le cas d’échantillons de bruit
dépendants
ou dans celui designaux
nonstationnaires,
lefiltrage
d’ordre ne conduit pas engénéral
aux solutionsoptimales.
Celles-ci sont néanmoins très robustes
[Bol 93].
D’un
point
de vuepratique,
il est difficile de connaître avec exactitude la distri- butionstatistique
dusignal
d’entrée(distribution
instantanée desmesures). Cependant
le
problème
n’est pascritique
si onpeut
avoir une idée mêmeapproximative
de cetteloi. En
effet, d’après
la relation(1),
la variance de sortie est une fonction continue du vecteur des coefficientsC,
et si C est dans levoisinage
du vecteuroptimal,
la variance de sortie seraproche
de la variance minimale.4. Résultats de simulation
Pour
pouvoir apprécier
les améliorationsapportées
par les L-Filtres vis-à-vis d’une carte de contrôle standard detype Shewhart,
nous avons calculé les PériodesOpérationnelles Moyennes
de deuxtypes
de cartes. Lapremière
carte est une cartede Shewhart
«classique»,
tandis que la seconde consiste àappliquer
un L-filtre à laplace
del’opérateur
moyenne dans une carte de Shewhart. Nous avons intitulé cette dernièreprocédure
« Carte de Shewhart avecL- filtre ».
Pour calculer la P.O.M. d’une carte de contrôle
X/R,
il faut tout d’abord fixer les limites de contrôle. Celles-ci sont calculées pour unrisque
adonné,
àpartir
del’écart
type théorique 03C3/n
de la distribution des moyennes(03C3
étant l’écarttype
de lapopulation
et n la taille del’échantillon).
Les limites sontgénéralement
fixées à±3.
03C3/n.
cequi correspond
à unrisque
a de0,27%
pour une loi normale.Afin d’étudier les
risques engendrés
parchaque estimateur,
on compare leur P.O.M. pour undécentrage
nul(risque a)
et pour undécentrage k.
cr(risque {3).
D’unpoint
de vuepratique,
on cherche la carte de contrôlequi
va minimiser lesrisques
a et
/3,
c’est-à-dire que l’on attend une P.O.M. laplus grande possible lorsque
ledécentrage k
estégal
à zéro et une P.O.M.qui
tend vers 1 leplus rapidement possible lorsque
ledécentrage k
est non nul.Pour les deux
types
de cartesétudiées,
les calculs de P.O.M. ont été obtenus par simulationinformatique.
Pour ce faire nous avons, dans chacun des deux cas,généré
deux
types
de distributions(fig 3) :
une distribution uniforme et une distributiontriangulaire;
toutes deux centrées et d’écarttype
cr = 1.FIGURE 3 :
Distributions
uniforme
ettriangulaire générées
pour les simulationsL’intérêt de ces
expériences
est de comparer les améliorationsapportées
par les L-filtres pour une distribution trèsproche
de la loi normale - densité deprobabilité (ddp) triangulaire -
et pour une autre très différente -ddp
uniforme. Les résultats sontprésentés
sous formes degraphiques regroupant
les P.O.M. des deux cartes decontrôle,
calculées pour une taille d’échantillon donnée. Cecipermet
de confronter les résultats obtenus pour les mêmes limites de contrôlequelle
que soit la forme de lapopulation.
Il aurait bien sûr étépossible
d’établir les formules exactes des P.O.M. et en l’occurrence pour la carte deShewhart,
mais les calculs deviennent vite inextricableslorsqu’il s’agit
de lois nongaussiennes
et à fortiorilorsque
n estsupérieur
à 3.Pour atteindre une
précision
satisfaisante desrésultats,
nouscomptabilisons
le nombre de réalisations nécessaires pour obtenir 5000 détections d’un état hors contrôle du
procédé.
C’est à dire que pour une P.O.M. = 650 nous avons simulé leprélèvement
de 5000 * 650 =3, 25106
échantillons de npièces.
4.1. Cas d’une distribution uniforme 4.1.1. L-Filtre
Optimal
Le but de nos travaux est
d’intégrer
les cartes de contrôle avec L-filtres à unlogiciel
industriel de S.P.C. Ceciexplique pourquoi
nous avons choisi de calculer les coefficients des L-filtres et d’évaluer leursperformances
àpartir
de simulationsinformatiques.
Nous supposons eneffet, lorsque
nous abordons un nouveauprocédé,
que
l’expression mathématique
de la loi derépartition
des mesure n’est pas connue.Il faut donc être
capable
d’établir le L-filtreoptimal
àpartir
de la seule information que constituent les mesures.Ainsi,
lors descalculs,
nous utilisons unalgorithme
degénération
de nombresaléatoires pour simuler la
dispersion
duprocédé.
Ces données sont utilisées pour calculer la matrice R de covariance de bruit ordonné nécessaire à l’obtention des coefficients du L-filtreoptimal. Chaque
élément de la matrice est calculé de la manièrem
suivante :
Ri,j - -1 E (x(i) - x) (x(j) - x) où x
est la moyenne des mesuresk=l
établie sur la
période
d’essaispréliminaire
à la mise enplace
de la carte de contrôle.Contrairement à ce que l’on
pourrait
penser, R est différente de0’2.1 (où
1 est lamatrice
identité), malgré l’indépendance statistique
des données. Cecis’explique
parl’opération
de tri réalisée au sein de l’échantillon.Les résultats obtenus sont d’une
précision
trèsacceptable puisque,
parexemple,
pour le L-filtre
optimal
de taille n = 3 nous obtenons les coefficients du filtremilieu,
avec un erreur de l’ordre de
0,01%.
Nous pouvons, dans des cas
particuliers
dedistributions,
établir les coefficients du L-filtreoptimal,
au sens de lavariance,
en calculant les moments desstatistiques
d’ordre d’un échantillon. Nous montrons en annexe que les coefficients du L-filtre
optimal, parmi
lesL-filtres,
sont dans le cas d’uneddp uniforme,
ceux du filtre milieu.Nous établissons
également
que la variance du filtre milieu évolue en1/n2.
Par soucide
concision,
nous avons limité lesdéveloppements mathématiques,
c’estpourquoi
nous invitons le lecteur à se référer aux ouvrages de
[Dav 8 Il [Tas 89] [Lec 87]
où leproblème
est traité en détail.4.1.2. La P.O.M.
Les résultats des calculs de la P.O.M. obtenus pour une distribution
uniforme,
montrent que la P.O.M de la carte de Shewhart avec L-Filtre est
toujours supérieure
à celle de la carte de
Shewhart, quelle
que soit la valeur dudécentrage k,
si elleest inférieure à la limite de contrôle 3 ’
03C3/n.
Les améliorationsapportées
sontprincipalement portées
sur lerisque
a. Elles sont minimeslorsque n
estpetit (fig 4), cependant
l’écart entre les P.O.M. associées à la carte de Shewhart et la carte de«Shewhart avec L-filtre» s’accentue avec la taille n du filtre
(fig
5 et6).
LesL-filtres,
et en l’occurrence ici le filtre
milieu, permettent
de minimiser lerisque
de faussesalertes sur l’intervalle k E
[0,3 - 03C3/n].
FIGURE 4 :
P.O.M. de la carte de Shewhart avec L-Filtre et de la carte de Shewhart
Classique
pour un
décentrage
kcompris
entre 0 et 1 - n = 3.Pour k = 3.
03C3/n,
les courbes se croisent pour une valeur de la P.O.M. voisine de 2. Ladistribution, symétrique,
se trouvant à cheval sur une limite decontrôle,
letaux de détection est de 50%
(fig
7 à9).
D’unpoint
de vuenumérique,
les limites sesituent
respectivement
en k =1, 73 ; 1,34
et1, 13
pour n =3, 5
et 7.FIGURE 5 :
P.O.M. de la carte de Shewhart avec L-Filtre et de la carte de Shewhart
Classique
pour un
décentrage
kcompris
entre 0 et 1 - n = 5.FIGURE 6 :
P.O.M. de la carte de Shewhart avec L-Filtre et de la carte de Shewhart
Classique
pour un
décentrage
kcompris
entre 0 et 1 - n = 7.FIGURE 7 :
P.O.M. de la carte de Shewhart avec L-Filtre et de la carte de Shewhart
Classique
pour un
décentrage
kcompris
entre 1 et 2 - n = 3.FIGURE 8 :
P.O.M. de la carte de Shewhart avec L-Filtre et de la carte de Shewhart
Classique
pour un
décentrage
kcompris
entre 1 et 2 - n = 5.Lorsque
ledécentrage augmente (k
> 3 ·03C3/n),
la P.O.M de la carte de Shewhart avec L-filtre tendplus rapidement
vers 1 que la carte de Shewhart«classique»;
on limite donc lerisque /3 (fig
7 à9).
Ceci est très net pour n = 7(fig 9)
mais moins évident pour n = 3(fig 7)
car la différence entre la variance de l’estimateur moyenne et du L-estimateuroptimal
est très faible(fig 11).
D’autrepart,
on
peut
observer pour n = 3 que la P.O.M. tend vers l’infinilorsque k
tend verszéro,
cecis’explique
par le fait que les limites de contrôle se situent à l’extérieur du domaine[-3, 3]
de lapopulation,
et à fortiori en dehors de la distribution des valeursfiltrées,
d’où unrisque
a nul.FIGURE 9 :
P.O.M. de la carte de Shewhart avec L-Filtre et de la carte de Shewhart
Classique
pour un
décentrage
kcompris
entre 1 et 2 - n = 7.On constate sur l’ensemble de ces courbes que l’utilisation d’un L-filtre améliore sensiblement la P.O.M. Notamment en ce
qui
concerne la réduction desrisques
defausses alertes
lorsque
ledécentrage
est faible. D’autrepart,
on note que l’utilisation d’une carte de Shewhart avec L-filtre où n = 3 offre sensiblement les mêmesperformances qu’une
carte de Shewhart pour n = 4 d’où une réduction intéressante de la taille des échantillons.4.2. Cas d’une distribution
triangulaire
4.2.1. L-Filtre
optimal
Dans le cas d’une
ddp triangulaire
nous avons construit la matrice R de la même manière queprécédemment.
Elle est bien sûr différente de celle calculée dans le casd’une loi uniforme c’est
pourquoi
le L-filtreoptimal
n’est pas ici le filtre milieu.Nous ne démontrerons pas ici les
expressions
littérales des coefficients de R du fait de la lourdeur des calculs et du peu d’intérêtqu’ils
suscitent. Nous donnerons à titre indicatif les valeursnumériques,
calculées par la relation(2),
des coefficients du L-filtreoptimal
pour n =3,
5 et 7.FIGURE 10 :
Coefficients
duL-filtre optimal
pour uneddp triangulaire.
4.2.2. La P.O.M.
L’étude des
P.O.M.,
amène les mêmes remarques que dans le cas de distributionsuniformes, cependant
les améliorationsapportées
par la carte de Shewhart avec L- filtre sontbeaucoup
moinssignificatives
que dans le cas uniforme. Ceci est dû au fait que la variance du L-filtreoptimal
pour une distributiontriangulaire
est trèsproche
dela variance de sortie du filtre moyenne
(filtre optimal
pour une loinormale) (fig 9).
LesL-Filtres
apporteront
donc des améliorations d’autantplus significatives
que la forme des distributions des mesures seraéloignée
de la loi normale. Nousrappelons
dans letableau ci-dessous les variances de l’estimateur moyenne et celles des L-estimateurs
optimaux
en fonction de la taille n de l’échantillon. Ces dernières ont été calculées à l’aide de la relation(1).
FIGURE 11 :
Variance des
différents
estimateurs(Moyenne
et L-Filtre ouL-estimateur)
pour les deux DDP étudiées.Nous
rappelons
dans le tableau ci-dessous les valeursnumériques
des P.O.M.des différentes cartes de contrôle étudiées :
FIGURE 12 :
Valeurs
numériques
des P. O.M. pour la carte de Shewhartclassique
et avecL-filtre, en fonction
dudécentrage
k.Remarque :
Dans cet
article,
nous avons choisi deprendre
les limites de contrôleégales
à
3a Vii quels
que soient la forme de lapopulation
et letype
d’estimateur. On compare donc lesperformances
des cartes de contrôle à limites constantes. Nous aurionségalement
puadopter
une autreapproche,
consistant à travailler àrisque
aconstant.
Ainsi,
pour la carte de Shewhartclassique
on fixe les limites de contrôle à3a Vii
commeprécédemment.
Onpeut
calculer de nouvelles limites pour la carte de Shewhart avecL-filtre,
de manière à obtenir unrisque
cxéquivalent
à celui de la carte de Shewhartclassique.
Nous avons traité le cas où n = 7 avec une distribution uniforme
(Ligne grisée
du tableau
fig
12 etfig 13).
Les limites sont fixées à2,7603C3/n
pour obtenir uneP.O.Mk=o
= 650. Les calculs mettent en évidence que les L-estimateurs permettent de minimiser lesrisques
de fausses détectionslorsque
ledécentrage
est faible. Enrevanche,
si ledécentrage
estsignificatif (k
>0, 9),
la P.O.M. de la carte de contrôleavec L-filtre devient
plus
faible que celle de la carte de Shewhartclassique.
Onconstate par
exemple
pourk03C3/n
=3/7 = 1, 13,
queP.O.M.shewhart =
2 etPO.M.L-filtre = 1, 5 ;
on détecte donc lesdécentrages beaucoup plus rapidement
enutilisant la carte de Shewhart avec L-filtre.
5.
Perspectives
Cette méthode de
filtrage
offre desperspectives
intéressantes pour la M. S.P. car il existe de nombreusesapplications
industrielles pourlesquelles l’hypothèse
d’unerépartition
normale des mesures n’est pas vérifiée.Nous travaillons actuellement sur les
procédés multi-générateurs,
tels que lesmulti-empreintes
etmulti-broches,
pourlesquels
la distribution des mesures sur une cote est normale pour chacun des élémentsgénérateurs (broches
ouempreintes)
maispas pour l’ensemble des sources de
dispersion (fig 14).
FIGURE 13 :
P.O.M. de la carte de Shewhart avec L-Filtre et de la carte de Shewhart
Classique
pour un
risque a fixé,
undécentrage
kcompris
entre0, 7
et1, 4 -
n = 7.FIGURE 14
Dans de tels cas, il
faudrait,
pourappliquer
la M. S.P.prélever
des échantillons depièces
pour chacune des sources élémentaires dedispersion (chaque
broche ouchaque
moule pour
l’injection
deplastique).
Enpratique,
cela s’avère souventimpossible
dufait de la cadence de
production.
Ne connaissant pas apriori
la forme de ladispersion
des causes communes, on
peut imaginer qu’au
début de laprocédure
de contrôle duprocédé,
on attribue au vecteur coefficient dufiltre,
la valeur1/n
du filtre moyenneur.Ceci revient à
appliquer
une carte de Shewhart«classique».
Ensuite les coefficients du filtres’ajustent
au fur et à mesure que l’onacquiert
une connaissance du bruit. Il faut donc mettre en oeuvre un filtre à structureadaptative [Bov 85].
Par
ailleurs,
nous n’avons abordé ici que les cas de densités deprobabilité
debruit
symétriques.
Or c’est dans les cas nonsymétriques
que lefiltrage
d’ordrepeut apporter
les améliorations lesplus significatives
en terme de P.O.M.En effet d’un
point
de vuepratique,
on rencontre des distributions nonsymétriques
assezfréquemment.
Citons parexemple
les études de concentricité(nécessairement positive),
ou lessystèmes
multi-broches etmulti-empreintes lorsque
les distributions associées à
chaque
source dedispersion
élémentaire ne sont pas distribuées uniformément(fig 15).
FIGURE 15
6. Conclusion
Dans cet
article,
nous avons montré l’intérêtd’implanter
desopérateurs
defiltrage
d’ordre sur les cartes de contrôle. Nous avons en effet mis en évidence que l’utilisation de L-Filtrespermettait
d’améliorer lescaractéristiques
de la carte deShewhart en minimisant le
risque
alorsque
leprocédé
est centré et en diminuant lerisque {3 lorsque
leprocédé
est hors contrôle. Outre l’amélioration desperformances
de la carte de
Shewhart,
l’utilisation desstatistiques
d’ordre al’avantage
d’introduireune démarche
systématique
de mise enplace
des cartes decontrôle;
celle-ci étantindépendante
de la forme de lapopulation.
D’autre
part,
nous avonsexposé quelques concepts d’applications
de cartes decontrôle utilisant les
statistiques
d’ordre et leurs évolutions éventuelles.Nos travaux actuels consistent à
élargir
lechamp d’application
des filtres d’ordre dans la M.S.P. et àdévelopper
les outilsthéoriques permettant
leur mise en oeuvre dans un contexte industriel notamment dans le cas de distributions nonsymétriques.
Annexe Calcul des coefficients
optimaux
d’un L-filtreTout
d’abord, rappelons
que les coefficients d’un L-filtre sont obtenus par la relation(2) qui
nécessite le calcul de la matrice R. Cette dernièrepermet
deprendre
en
compte
la forme de la loi de distribution des mesures par le biais des moments centrés d’ordre 1 et 2 desstatistiques
d’ordre.L’espérance
d’unstatistique
d’ordre k dans un échantillon de taille n est donnée par la relation suivante.Supposons
le bruit distribué selon une loi uniformeU[O, 1].
Alors
l’espérance
s’écrit :On en déduit la variance de
x(k)
et la covariance dex(k)
etx(l) (Cf [LEC 87]).
avec
1 k l n.
Il est alors
possible
de construire la matrice R.Le calcul des coefficients du L-filtre étant très difficile à effectuer dans le cas
général
d’un échantillon de taille n, nous nous contenterons de traiterl’exemple
n = 3.
En
appliquant
les relations(3)
nous obtenonsLa matrice
R-1
a laparticularité
d’avoir la somme des coefficients de seslignes qui s’annule; excepté
pour leslignes
1 et n.Le calcul des coefficients
optimaux
du L-filtre nous donne :qui
est le filtre milieu.Par
construction,
ce filtre estoptimal parmi
lesL-filtres,
on nepeut
malheureusement pas démontrer s’il est l’estimateur à variance minimaleparmi
les estimateurs sansbiais. En
effet,
leshypothèses
de Fisher relatives à la dérivabilité de la loi n’étant passatisfaites,
on nepeut
calculer les bornes de Fréchet.Variance du filtre milieu
Bovik
[Bov 83]
a mis en évidence que l’intérêt des L-filtresoptimaux
était d’offrirune variance de sortie
toujours
inférieure ouégale
à celle de la moyenne. Onpeut
en effet montrer que la variance de sortie du filtre milieu évolueasymptotiquement
en1/n2
alors que celle de la moyenne varie en1/n.
Rappelons
tout d’abord que la variance de sortie d’un L-filtre se calcule àpartir
de larelation :
Nous avons donné
précédemment l’expression
de la variance et de la covariance destatistiques
d’ordre pour un loi uniformeU[o,1].
Nous pouvonsgénéraliser
cesexpressions
à des lois uniformesquelconques
avec le coefficient d’échelle120-2 [Llo
52].
Pour la suite des
calculs,
on ne s’intéressequ’aux
coefficientsplacés
dans lesangles
de la matrice
R,
car les autres seront annulés lors de lamultiplication
avec le vecteurC des coefficients du filtre milieu.
La matrice R est alors :
d’oi
La variance
asymptotique
du L-estimateur estdonc
évolue en
1/n2.
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