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Utilisation de l’opérateur-densité pour la détermination des énergies et des fonctions propres d’un ensemble
canonique
Pierre Smet, Jacques Tillieu
To cite this version:
Pierre Smet, Jacques Tillieu. Utilisation de l’opérateur-densité pour la détermination des énergies et des fonctions propres d’un ensemble canonique. J. Phys. Radium, 1962, 23 (5), pp.299-304.
�10.1051/jphysrad:01962002305029900�. �jpa-00236630�
299.
UTILISATION DE L’OPÉRATEUR-DENSITÉ POUR LA DÉTERMINATION DES ÉNERGIES
ET DES FONCTIONS PROPRES D’UN ENSEMBLE CANONIQUE
Par PIERRE SMET et JACQUES TILLIEU,
Institut de Physique, Faculté des Sciences de Lille.
Résumé. 2014 On développe deux méthodes pour calculer les énergies propres et les projecteurs correspondants d’un système quantique fermé à partir de l’opérateur-densité décrivant ce système
en équilibre thermodynamique et considéré comme solution de l’équation de Bloch. La première
méthode utilise la limite des températures nulles ; la seconde, les propriétés de la transformation de Laplace. L’exemple de l’oscillateur harmonique est traité.
Abstract. 2014 One indicates two methods for obtaining eigen-energies and corresponding pro-
jectors of a closed quantum system from the density-operator describing this system in thermo-
dynamic equilibrium and considered as a solution of Bloch’s equation. The first method uses the limit of null temperatures ; the second one, the properties of Laplace’s transform. Harmonic oscillator is treated as example.
23, 1962,
1 Introduction. - De plus en plus fréquemment,
on étudie les propriétés statistiques d’un ensemble de particules à l’aide de la technique des opérateurs
ou matrices-densité. Celle-ci a fait l’objet de revues
assez récentes, soit en mécanique statistique, soit
en chimie théorique [1, 2, 3]. Nous voulons exa-
miner ici un cas fréquent, celui d’un ensemble
canonique décrivant un système fermé et isotherme (au sens de la thermodynamique), et montrer com-
ment la connaissance de l’opérateur-densité corres- pondant permet de déterminer les énergies et les
fonctions propres du système supposé quantifié.
Nous envisageons un système dont l’opérateur
hamiltonien H possède les énergies propres dis- crètes Ex (,K = 0, 1, 2, ... ), soit
avec
II. Définitions et équations fondamentales. -
L’opérateur-densité qui décrit l’ensemble cano-
nique, en équilibre statistique à la température T,
est l’opérateur de Maxwell-Boltzmann, soit, en posant B = 1 /kT,
Cet opérateur n’est pas normé et nous consi-
dérerons également l’opérateur normé (Tr p = 1)
où nous avons introduit la fonction de partition
A partir de (2), on voit facilement que p(p)
obéit à l’équation de Bloch
et doit satisfaire à la condition « initiale », pour
qui n’est autre que la relation de fermeture pour les vecteurs propres de H. En portant p = Z p
dans (4), on obtient ce que l’on peut appeler l’équation de Bloch pour 1’,opérateur normé
d’où, en prenant les traces 1 -
Cette équation est bien vérifiée par Tr p(B) =1, quel que soit 3.
III. Détermination des niveaux d’énergie et des projecteurs associés. - Divers auteurs (par ex. [4]) signalent qu’il est possible de trouver la solution
convenable de (4) sans connaître les énergies
propres EK et les vecteurs propres IK >. Nous allons montrer qu’inversement ces grandeurs sont
déterminables si l’on suppose connu l’opérateur-
densité p(B) (ou l’une de ses représentations).,
1re MÉTHODE : UTILISATION DE LA LIMITE B ->00 ou T - 0) - a) On a évidemment
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300
Calculons la limite de l’opérateur normé
puisque nous rangeons les énergies par ordre crois- sant (.EK > Eo)
Nous obtenons ainsi le projecteur sur l’état fonda-
mental
L’énergie correspondante est fournie par la for- mule habituelle [5]
b) Définissons maintenant les grandeurs
Nous pouvons écrire
d’où, immédiatement
Nous obtenons ainsi le projecteur sur le 1er état excité
L’énergie du premier niveau excité est alors c) Pour le niveau E2, il faut poser
d’où, en procédant comme ci-dessus,
puis le projecteur sur le 2e état excité
d) On peut généraliser par récurrence en écrivant
et l’on obtient finalement le projecteur sur le n eme
état excité
et l’énergie correspondante est
Remarques - a) Nous avons raisonné sur des opérateurs ; si l’on se place dans une représentation,
la représentation q par exemple, on aura au lieu
de (16)
ou, en utilisant la notation des fonctions d’ondes
On peut alors, en utilisant l’élément diagonal,
déterminer la fonction d’onde, mais seulement à
un facteur de phase près, soit
La représentation q de p(p) peut alors s’écrire
et, d’après la forme des Pn obtenus à partir de P(p),
on voit qu’un élément non diagonal de p(p) peut
être exprimé à l’aide des éléments diagonaux seuls.
b) Nous avons supposé implicitement que les
énergies EK n’étaient pas dégénérées. Si .En présente
une dégénérescence d’ordre X, on voit facilement
que le raisonnement précédent conduit à la formule
c’est-à-dire que Pn est alors un projecteur sur un
sous-espace à À dimensions. Pn est uniquement déterminé, tandis que les projecteurs élémentaires
ln, oc > n, oci ne le sont qu’à une transformation unitaire près.
Un ensemble de fonctions d’onde peut être fourni
par les formules
mais l’indétermination est encore plus grande que dans le cas non dégénéré. L’énergie, À fois dégé- nérée, est donnée par
2e MÉTHODE : UTILISATION DE LA TRANSFOR- MATION DE LAPLACE. - Nous allons utiliser une méthode indiquée, dans un autre contexte, par March et Murray [4]. Introduisons l’opérateur Q(E), dépendant du paramètre continu E, par
Par intégration, nous obtenons, en choisissant
une origine des énergies de manière à avoir Eo > 0
où Y(x) est la fonction marche de Heaviside, dont
la fonction de Dirac d(x) peut être considérée
comme la dérivée.
A partir de l’opérateur Q(E), on peut retrouver l’op érateur-d ensité de Maxwell-Boltzmann intro- duit en (2) ; en effet, on a
c’est-à-dire que p(B) est la transformée de Laplace
de Q(E) [6].
Par une intégration par parties, on obtient
encore, à l’aide de (24),
En comparant (25) et (26), on voit que
c’est-à-dire que p(p) est la transformée de Carson-
Laplace de R(E) [7].
Ainsi Q(E) peut être définie comme la trans-
formée de Laplace inverse de l’opérateur-densité p(3), et R(E) comme la transformée de Carson-
Laplace inverse du même opérateur. La connais-
sance de p(p) peut donc permettre de déterminer Q(E) ou R(E). Dans le cas d’un spectre discret,
les Ex peuvent être obtenues par l’étude des dis- continuités de la trace de R(E), c’est-à-dire de la transformée de Carson-Laplace inverse de la fonc-
tion de partition.
Ensuite, si l’on pose de manière générale (avec
le projecteur In > ni est donné par
Remarques. - a) N(E) n’est autre que le
« nombre d’états » défini par Saenz et 0’Rourke [8].
b) Il est facile de voir qu’il existe des relations
entre les grandeurs introduites par les deux mé- thodes décrites. Ainsi, on a (en posant p = po)
et, réciproquement,
IV. Remarques générales sur la détermination de p(p). - Pour que les méthodes indiquées ci-
dessus aient un intérêt pratique, il faut que l’on
puisse déterminer l’op érat eur-d ensité de Maxwell-
Boltzmann p(B) sans connaître les EK ou, encore, il faut que l’ou puisse résoudre l’équation de
Bloch (4) par un autre moyen que la méthode de
séparation des variables qui ramène à l’équation
aux valeurs propres (1).
L’équation de Bloch présente une grande ana- logie tant avec des équations rencontrées dans la théorie du mouvement brownien [9], qu’avec l’équa-
tion d’évolution de la mécanique quantique [10].
Dans ce dernier cas, la fonction de Green (ou pro-
pagateur) G(t)» de l’équation de Schrôdinger est
semblable à l’opérateur p(3) (il suffit de remplacer
302
par it) et cette analogie est exploitée dans la re-
cherche de méthodes d’approximation pour le cal- cul de p(B) [1, 10]. Burton et de Borde [11] ont
d’ailleurs signalé que l’on pouvait déterminer les niveaux d’énergie à partir du propagateur G(t) de
manière très parallèle à notre deuxième méthode.
Feynman [12] a indiqué, pour la détermination des propagateurs, une méthode très différente de celle passant par la résolution de l’équation d’évo-
lution. On trouvera une revue des applications, à la physique statistique, de cette méthode des « inté- grales fonctionnelles » ou « intégrales de trajec-
toires » (« path-integral method ») dans un article
récent de Brush [13] (cf. également [1]). Nous dis-
posons donc, en principe, d’un moyen convenable d’obtenir l’opérateur p(B) pour pquvoir appliquer
ensuite les méthodes décrites ici, quoique le calcul
effectif ne puisse être achevé que dans des cas assez peu nombreux et souvent déjà résolus par ailleurs.
V. Exemple de l’oscillateur harmonique. - Le système est décrit par l’hamiltonien
et les énergies sont exprimées en unité hv.
En utilisant les méthodes mentionnées dans les remarques précédentes, on obtient, dans la repré- sentation q, la solution de l’équation de Bloch sous
la forme [9, 13]
On en déduit immédiatement la fonction de par- tition
Appliquons successivement les deux méthodes
indiquées.
1re MÉTHODE. - a) La matrice-densité normée s’écrit
et l’on trouve facilement sa limite pour p - oo.
On obtient ainsi la représentation q du projecteur Po sur l’état fondamental, soit
L’énergie de l’état fondamental est alors
(La notation [ ]q=q’ indique que l’on doit faire agir d’abord l’opérateur p .H
=1/2 (q2 - d2)
2q2’
dq2sur la variable q, et faire ensuite q’ = q dans
l’expression obtenue.)
b) Le résultat précédent permet d’appliquer les
formules (9) et (9’) pour écrire
Cette expression, pour -> oo, se présente sous
la forme indéterminée oo X 0. Pour calculer la
limite, il faut développer qlpl(B)lq’ > en fonc- tion des puissances de e-B et aller jusqu’au terme
du 1er ordre, soit
d’où la limite
En utilisant le résultat (35), on obtient la repré- sentation q du projecteur sur le 1er état excité, soit
et l’énergie correspondante
c) Un calcul semblable, où le développement de
q/ P2(B)lq > doit être fait jusqu’au terme en e-2B
conduit aux résultats suivants pour le 2e état excité
Remarque. - On retrouve ainsi les premiers
niveaux d’énergie de l’oscillateur harmonique. Si
l’on choisit les fonctions d’onde sous la forme habi- tuelle
les expressions (35), (37) et (39) redonnent bien les
valeurs connues des trois premiers polynômes
d’ H ermit e Ho, H1 et H2.
2e MÉTHODE. - Nous pouvons déterminer les niveaux d’énergie en utilisant (28) et (34), soit
Les tables de transformées [14] fournissent immé- diatement
résultat qui peut être représenté par le graphique
suivant
FiG. 1.
Les énergies propres correspondent bien aux dis-
continuités de N(E) et l’on retrouve, par exemple,
les valeurs (36), (38) et (40).
La détermination des projecteurs nécessite la
connaissance de R(E), c’est-à-dire de la transformée de Carson-Laplace inverse de (33) ; le calcul direct est plus ardu que celui de N(E) et nous le laisserons
de côté puisqu’il n’apporterait pas de résultats
nouveaux. Nous pouvons, au contraire, utiliser la
relation (29), les projecteurs fournis par la première
méthode et les niveaux d’énergie fournis par l’une des deux méthodes, pour écrire la transformée de
Carson-Laplace inverse de (33), soit [avec R(E) = 0 pour 0 E 1 /2]
Le passage de la 2e expression à la 3e utilise une
formule d’addition des polynômes d’Hermite [15].
VI. Conclusions. - Nous pouvons faire pour ter-
miner, quelques observations sur les mérites des deux méthodes :
a) Dans le cas d’un spectre discret, la 1re mé-
thode est d’une application beaucoup plus facile que la seconde puisque celle-ci nécessite le calcul de la transformée de Laplace inverse d’une fonction sou-
vent compliquée. 1’, l
b) Dans le cas d’un spectre continu (ou mixte),
que nous avons pratiquement laissé de côté, la pre- mière méthode devient inopérante puisque la notion
de niveau d’énergie perd sa signification et que Z(p)
définie par (3) devient infinie par suite de la
norme infinie des vecteurs propres. Par contre, la seconde méthode peut être appliquée et; en fait,
la plupart des auteurs l’utilisent souvent dans ce
cas [4].
Mentionnons enfin que divers auteurs [16, 17]
ont utilisé la fonction de partition Z(p) déterminée
à partir de données expérimentales (entropie), et
non plus comme solution de l’équation de Bloch,
pour calculer les niveaux d’énergie de manière plus
ou moins rigoureuse.
VII. Appendice. - On généralise facilement les résultats précédents à un système ouvert (nombre
variable de particules) décrit par un grand ensemble canonique. Considérons, par exemple, le cas de
deux espèces de particules ; les états propres du sys- tème peuvent être obtenus à l’aide des équations
aux valeurs propres de 3 opérateurs commu-
tables [18], les opérateurs-nombres N1 et N2, et
l’hamiltonien H, soit
Les énergies En1nk dépendent des nombres d’occu- pation nl et n2, et également de la nature parti-
304
culière du système. En ne faisant aucune . hypo-
thèse sur celle-ci, nous conservons ici toute la géné-
ralité possible.
Supposons connu l’opérateur-densité du grand
ensemble canonique défini par
Dans ces expressions ==1/A?B tandis que Àj = exp ai ( j = 1, 2) représente l’activité absolue du constituant j [19].
p(plnl, n2) est l’opérateur-densité de Maxwell-
Boltzmann pour un système comprenant nI parti-
cules du 1er constituant, et n2 du 2e.
On voit facilement que l’on a
Les énergies propres En1n2K et les projecteurs in,, n2, K > nl, n2, Ki peuvent ensuite être
obtenus à partir de (46) par les méthodes décrites.
On peut, si besoin est, définir intermédiairement des opérateurs-densité pour des systèmes où l’un
des constituants est constant et l’autre variable,
par exemple :
Manuscrit reçu le 22 mars 1962.
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