ÉVOLUTION DE LA PRODUCTION LAITIÈRE DE LA VACHE AU COURS DES DEUX PREMIERS MOIS DE LA LACTATION
II. — ANALYSE DE LA VARIATION DE LA
QUANTITÉ
DE LAITC. DECAEN, S. CALOMITI M. POUTOUS*
Henriette CHAVANNE
* Station de Recherches sur l’élevage des Ruminants,
Centre de Recherches de Clevmont-Fevvand, 63 - Saint- Genès-Champanelle
** Laboratoire de Génétique quantitative et appliquée,
Centre national de Recherches zootechniques, 78 - Jouy-en-Josas
Institut national de la Recherche agronomique
RÉSUMÉ
Sur un échantillon de 969 lactations, dont les résultats journaliers de production laitière ont
été recueillis sur deux troupeaux expérimentaux de Jouy-en-Josas entre 1951 et 1964, nous étu-
dierons les variations de 8 paramètres définissant l’évolution journalière de la quantité de lait produite par une vache au cours des deux premiers mois de lactation, sous l’influence du numéro de lactation, de la saison de vêlage, de l’année de lactation, du troupeau, de la race et du facteur animal proprement dit.
Le numéro de lactation est le facteur le plus important : nous avons calculé les coefficients d’accroissem;nt de la production journalière maximale au cours des lactations successives. La saison de vêlage agit également, non seulement par l’intermédiaire de l’alimentation, mais éga- lement, nous semble-t-il, directement sur l’organisme de l’animal. Les différences entre les deux troupeaux sont presque aussi importantes que les différences que nous observons entre les races
Normande et Frisonne. Nous suggérons l’utilisation par l’éleveur de la production journalière
au 5 jour de lactation comme base de sélection et attirons l’attention sur le fait que les résultats de la 2elactation peuvent être moins représentatifs du potentiel de l’animal que ceux des autres lactations, notamment de la première.
Par ailleurs, nous proposons des formules de prédiction individuelle de la production journa-
lière maximale et de la production au 6oejour de lactation à partir des résultats précocement
connus du 5ejour.
INTRODUCTION
Dans la
première partie
de cetteétude,
nous avons donné unedescription
del’évolution
journalière
moyenne de laquantité
de laitproduite
par la vache laitièreau cours des deux
premiers
mois de la lactation(D!Cn!rr, JOURN!T,
PouTOUS,i97o).
Or cette évolution varie en fonction des facteurs héréditaires ou de ceux liés au
milieu. De nombreux auteurs ont étudié les variations de la
production
maximale etde la durée de la
phase
ascendante avecl’âge (SA ND ERS, Ig28 ; SIxKA,
1950; RARES etal,
Ig59 ;Bï<AU, I96I
MAYMONE etMAI,OSS INI , I9 6I SuCHANEK, I g6 2 ;
DECAENet
P OUTOUS , 19 6 5 ),
les niveaux d’alimentation avant etaprès vêlage (FLUX,
Ig5o;F I ,U
X
etPATC H ELL,
1955;JARR I GË
etJOURN!T,
1959; SWANSON etHINTO N , 19 6 2 ),
la saison de
vêlage (cf.
revue de DECAENetJ OURN È T , I g66),
les facteurs héréditaires(R AK
ES et al,
1959;JO H ANSON, Ig6 I ;
DECAEN etPOUTO U S, 19 65).
Dans cette deu- xièmepartie
del’étude,
nous nous proposonsd’analyser
les variations de 8paramètres qui
semblent définir au mieux la forme de la courbe de lactation durant les deux pre- miers mois de la lactation. Les causes de variation étudiées seront : le numéro delactation,
letroupeau,
l’année et la saison devêlage
et le facteur animalproprement
dit.MATÉRIEL
ETMÉTHODE
Définition des symboles utilisés a) Paramètres numériques.
Les quatre premiers paramètres, exprimés en kg, caractérisent des productions à certains
stades de lactation, les 4 derniers étant plutôt des paramètres d’évolution, le jour de vêlage étant
considéré comme le jour de lactation numéro i.
1
. Pl, production initiale : moyenne journalière des quantités de lait produites au cours des
4, 5 et 6ejours de la lactation, c’est-à-dire la production laitière juste à la fin de la période colos-
trale.
2
. Pm, production journalière maximum : valeur la plus élevée observée des moyennes jour-
nalières mobiles des quantités de lait produites au cours de 3 jours consécutifs, la moyenne mobile du jour j étant la moyenne de production des jours ( j - r), j et (j -! i).
3
. l’’m. production journalière maximum : valeur la plus élevée des moyennes journalières
calculées sur les jours des différentes semaines de lactation.
4
. P6o, production au 6oejour de lactation : moyenne journalière des quantités de lait pro- duites les 59, 6o et 6iejours de la lactation.
5
. A, accroissement de la quantité de lait durant la phase ascendante de la courbe de lacta- tion : A = P! - PI.
6. Dm, durée de la phase ascendante : intervalle en jours entre le vêlage et le jour correspon- dant à la production maximum Pm.
. pl, vitesse initiale d’accroissement de la quantité de lait : exprimée en g /jour, p,
== (P
io - PI) X 200 (Pl et Ploétant les quantités moyennes de lait produites aux 5et ioejours
de la lactation).
8. P2’ vitesse de décroissance de la quantité de lait au cours du 2emois : exprimée en g /jour,
P2 ! (p4O- P!0) X 50 (p40et P60 étant les quantités de lait produites aux 40 et 60ejours de la lactation) .
Les courbes de fréquence présentées à la figure r, montrent des distributions nettement dissy- métriques pour tous les paramètres qui ne représentent pas des quantités ; de ce fait, les résultats des tests statistiques les concernant doivent être interprétés avec prudence.
b) Facteurs de vaviation.
Les 969 lactations analysées dans ce rapport font partie du même dossier que celles de la
première partie de l’étude (DECAEN, JouRNaT, PouTOUS, i9qo). Les données de base ont été recueil- lies de 1951 à rg64, dans les étables de Jouy et de la Minière sur les troupeaux expérimentaux de
la Station de Recherches sur
l’Élevage
des Ruminants : les vaches traites deux fois par jour ontété alimentées individuellement selon les normes.
Nous disposions d’un programme d’analyse de variance, ne permettant qu’un maximum de
2
6 niveaux élémentaires de classification, nous avons dû diviser chaque facteur de variation en
classes de la manière suivante :
E, étable : El, Jouy ; E2, la Minière.
L, numéro de lactation : Llà L4correspondant aux vêlages d’ordre 1, 2, 3,
4 et.plus.
S, saison de vêlage : SI à S6 correspondant aux vêlages de 2mois consécutifs (janvier-février, mars-avril, etc.).
A,année de vêlage : A55àAeq, A55correspondant aux vêlages groupés de 1951 à 1955 (les effec-
tifs par année étant faibles), A56 correspondant aux vêlages de 1956, etc. L’année de vêlage
débute en octobre, époque correspondant au début de la concentration des mises bas (surtout
pour les primipares) et où commençait la distribution à l’étable des fourrages de la récolte précé-
dente.
R, race des vaches : i : Française Frisonne Pie Noire, 2 : Normande ; nous n’avons pas retenu les quelques données de Pie Rouge de l’Est, vu les faibles effectifs.
La distribution des données par classes et sous-classes est très irrégulière (tabl. i et 2). Si la répartition par étables est globalement équilibrée, le troupeau de la Minière, plus tardivement constitué que celui de Jouy prend de plus en plus d’importance avec les années ; à la Minière, la
moyenne d’âge est également plus faible. On remarque que lorsque le numéro de lactation aug-
mente, les effectifs diminuent, fait résultant d’une réforme prématurée due à des causes acciden- telles ; les premières lactations sont plus nombreuses (34 p. 100) que dans les troupeaux français
en moyenne (20-25 p. 100). Les vêlages de novembre à avril représentent 83 p. 100 du total, l’objectif de concentrer les mises bas, et plus particulièrement celles des primipares d’octobre à décembre étant de mieux en mieux atteint au cours des années, surtout dans le troupeau de Jouy.
Par rapport à l’ensemble, les effectifs de Frisonnes sont plus importants (60 p. 100 du total)
que ceux des Normandes, ils représentent la plus grande part des lactations d’ordre égal ou supé-
rieur à 4 (73p. 100) et de celles du troupeau de Jouy (70p. 100).
Techniques d’étude
Après avoir établi les principales caractéristiques statistiques des distributions des 8 para- mètres (tabl. 3), nous avons calculé les coefficients de corrélation entre ces paramètres, puis testé
l’influence des facteurs de variation. Le calcul global des coefficients de corrélation des paramètres pris 2à 2(tabl. 4) a permis de fournir des méthodes d’estimation de Pmet P60à partir de PI (tabl. 5) Ensuite, la signification statistique de l’influence des facteurs de variation et de leurs interac- tions globales a été testée et les valeurs des effets ont été estimées pour chaque niveau. L’inégalité
de répartition des données nous a obligé à utiliser une méthode d’analyse de variance par les moindres carrés ; cette technique a le grand avantage de fournir l’estimation des effets de nature additive de chacun des facteurs concernés, en éliminant l’interférence des autres facteurs étudiés
simultanément ; elle permet donc d’interpréter nos données malgré leur répartition irrégulière.
Désirant étudier 5 facteurs, nous ne disposions que d’un programme, sur ordinateur IBM 1620, qui n’autorisait qu’un nombre maximum de 4 facteurs de classification ; nous avons donc effectué deux analyses distinctes, l’une avec les facteurs race, troupeau, numéro de lactation et saison de
vêlage, l’autre avec les facteurs numéro de lactation, saison et année de vêlage, troupeau. Bien que
portant sur des effectifs différents, les estimations des effets des facteurs étudiés en commun
(troupeau, numéro de lactation, saison de vêlage) étaient voisines dans chacune des analyses,
nous avons en conséquence rapporté une combinaison des deux séries de résultats dans un seul tableau (tabl. 6) afin d’en faciliter l’exposé.
Enfin les coefficients de répétabilité ont été calculés par une décomposition de la variance suivant un modèle hiérarchique (animal - lactations) pour différentes combinaisons de numéros
de lactation (tabl. 8). ’
RESULTATS
Relations entre les
différents paramètres (tabl. q.).
Les deux
paramètres qui
traduisent laproduction
maximalejournalière (P
m etP’&dquo;,)
sont extrêmement liés(r
= -f-0 , 995 ),
cequi
montre que la courbe de lactationse
présente
autour de son maximum de manière trèsrepérable,
nous neparlerons
plus
de Pm dansl’exposé
des résultats.Les
paramètres
deproduction P I ,
P etP 60 dépendent
très étroitement les uns des autres. L’accroissement de laquantité
de lait 0 varie dans le même sens que Pm et
P 6o ;
il est essentiellement fonction de la vitesse d’accroissement Pi et de la durée de laphase
ascendante D &dquo;!. Les valeurs des autres coefficients de corrélation sont peu différentes dezéro,
cequi signifie
que lesparamètres intéressés, pris
deuxpar
deux,
varientstatistiquement indépendamment;
cette remarque est valableparticulièrement
pour PI,P l ,
Dm et 0.Étant
donné la liaison linéaire existant entre Pr, Pm etP 6o ,
nous avons calculé deséquations
deprédiction
d’unepart
de P !&dquo;partir
deP I ,
d’autrepart de P 6 0
àpartir
de PI ouP,,, séparément
pour les lactations d’ordre i et celles d’ordresupé-
rieur ou
égal
à 2(les
intervalles de confiance(I)
et les coefficients de corrélation(r)
chiffrent la
précision
desestimations) :
Ires Lactations
( 329 données)
Lactations d’ordre
supérieur
ouégal
à 2(6qo données)
Ces résultats confirment que la forme de la courbe de lactation est différente pour les
primipares :
laquantité
de lait diminue moinsrapidement après
le maximum.Le niveau de
production
initial PI conditionne moins étroitement la forme de la courbe de lactation desprimipares.
Si onpeut
supposer, avec un faiblerisque
d’erreurque, chez les
primipares, lorsque
le niveau deproduction
initialvarie,
les courbes sedéduisent les unes des autres par
translation,
on doit reconnaître que pour les lacta- tions d’ordresupérieur
ouégal
à 2, il n’en est pas de même(la
convergence de la courbeaugmentant
avec le numéro delactation).
Dans les 2 cas,néanmoins,
il estpossible
deprévoir,
avec uneprécision
de 2à q p. 100, P àpartir
de Pi et P,,, àpartir
de
P I ,
ou depréférence
Pm. Ces méthodes d’estimations’appliquent
à des valeurs individuelles cequi
constitue un grosavantage
sur cellesproposées
dans lapremière partie
de cette étude(D!cn!rr, J OURNET , P OUTOUS , ig 7 o) qui
n’étaient utilisables que pour des moyennes de lots d’animaux. Pour une utilisationpratique,
nous avonsrapporté
autableau 5 les
valeursprédites
de P àpartir
de PIet deP,,
àpartir
dePi et
P m ,
avec leur intervalle de confiance.Analyse
des variationsTests
statistiques (tabl. 6).
Chacun
des 5 facteurs
de variation considérés a une influence hautementsigni-
ficative sur les
paramètres
deproduction P I , P&dquo;,, P., et à ,
s’ilsagissent
defaçon
additive sur Pi et P m
(interaction globale
nonsignificative),
il n’en est pas de mêmesur
P.,
et A.Étant
donné larépartition
non normale deD m ,
pi et p2, les testsqui
les concernent doivent être
interprétés
avecprudence :
tous lesfacteurs,
sauf la sai-son de
vêlage,
ont une influencesignificative
surD&dquo;6,
alors que pine variequ’avec
la race et le
troupeau
et p.qu’avec
le numéro de lactation.Valeurs estimées des
effets.
Pour
chaque facteur,
les valeurs estimées des effetscorrespondant
aux diffé-rents niveaux de classification se
rangent
dans un mêmeordre,
tout au moins en cequi
concerne lesparamètres
deproduction.
Ceci confirme la liaisonstatistique
de cesparamètres,
fait mis en évidence par le calcul des coefficients de corrélation.Avec le numéro de
lactation,
tous lesparamètres
sauf pivarient ;
laquantité
delait
produite augmente,
surtout entre lespremière
et deuxième lactations. Au coursde la
première lactation,
laproduction journalière
croîtplus longtemps, puis
diminuemoins
rapidement,
de sorte que les différences parrapport
aux lactations ultérieuressont
plus
faibles pourP,,
que pour Pi. En deuxièmelactation,
on remarque que laquantité
de laitaugmente
moins que pour les autres lactations etpendant
uneplus
courte durée. Par
ailleurs,
pour un même numéro delactation,
enparticulier
lenuméro un, nous avons obtenu des coefficients de corrélation
positifs,
mais peu éle- vés(r
-0 , 2 )
entrel’âge
auvêlage
et lesparamètres
deproduction
Pi, Pm, P6o.Bien que la
précision
des effets estimés pour les mois dejuillet
à octobre soit médiocre à cause desmaigres effectifs,
onpeut
avancer que la saison devêlagela plus
favorable pour lesparamètres
deproduction
de début de lactation(P I , P m > P 60
et
A)
s’étend dejanvier
àavril,
et laplus
défavorable dejuillet
àseptembre.
Eneffet, après
les mises bas d’hiver et de début deprintemps,
non seulement lesproductions
initiales
P I ,
mais aussi l’accroissement deproduction A présentent
des valeurssupé-
rieures à celles observées
après
lesvêlages
d’été. De même lapersistance,
estimée par(P
6o
-Pi)
est nettementplus
élevée en hiver(!- 1 ,8 kg) qu’en
été(6 0 ,5 kg).
Lespé-
riodes de
mai-juin
d’unepart
et deseptembre
à décembre d’autrepart, qui
donnentdes résultats
intermédiaires, apparaissent
comme des saisons de transition. Par ail-leurs, quoique
l’influence de la saison devêlage
ne soit passtatistiquement signifi-
cative sur
D m ,
piet p,, onpeut
remarquer que la durée de laphase
ascendante Dm est maximale pour lesvêlages
de mai àoctobre,
que la vitesse initiale d’accroissement de laproduction
plest minimaleaprès
ceux demai-juin
alors que la vitesse de décrois-sance p, est maximale
après
les mises bas dejuillet-août.
Entre 1955 et
19 63,
la durée de laphase
ascendante aaugmenté systématique-
ment,passant
de 20à 28jours (tabl. 6).
De 1955 àig6i,
les valeurs Pi, Pm et P60ont varié de manièreirrégulière
et avec une faibleamplitude ; cependant
en19 6 2
et1963,
PI et surtout P et P6o, s’élèvent très nettement. Au cours de cette décennie l’accroissement initial deproduction A augmente passant
de q.,4kg
en ig55 à 4.9k g
en
ig6i
et à 7,okg
enig6 3 ,
alors que simultanément la différence(P 6o
-P I ), qu’on peut
considérer comme un indice depersistance, présente
une évolutionanalogue :
- 0,5
kg
en 1955, -f-0 ,8 kg
enig6i,
2,7kg
en19 6 3 .
Ces valeurs estiméesayant
été obtenues par uneanalyse
n’incluant pas le facteur race, un certain biaispeut
existervu que la
proportion
de vaches de race Frisonne Pie Noire aaugmenté
entre195
etzg6
q ..
Les facteurs race et
troupeau
ont une action tout à faitanalogue
sur la courbede lactation. Les vaches de
Jouy présentent
non seulement un niveau deproduction
initiale
supérieur
à celui des animaux de laMinière,
maiségalement
des valeursplus
élevées pour l’accroissement de
production A,
la durée de laphase
ascendante Dmet la
persistance (P 60
-P!).
On observe les mêmes différences entre les deux racesétudiées,
avec un netavantage
pour les Frisonnes Pies Noires sur les Normandes.Il est intéressant de remarquer que la différence des
productions
maxima entre lesdeux
troupeaux ( 3 kg)
estégale
à 68 p. 100 de la même différence entre les deuxraces
( 4 , 4 kg).
Globalement,
dans le cas de nosdonnées,
le numéro de lactation est le facteur de variation leplus important
pour lesparamètres
deproduction,
surtout pour laproduction
initiale Pi, les autres facteursayant
des effets moindres maisd’ampli-
tude
comparable
entre eux(tabl. 7 ).
Coefficients
deré!étabilité
Les
paramètres
d’évolutionA, D m ,
piet P2 sont très peu stables d’une lacta- tion àl’autre,
pour un animaldonné ;
au contraire lesparamètres
deproduction P I , P m,
etP 60
sontplus répétables (tabl. 8).
Ces derniers se classentd’après
leurs coeffi- eients derépétabilité
en ordre inverse de l’état d’avancement de la lactation(P l . puis
Pm et enfinP 60) ’
On doit remarquer que les coefficients de
répétabilité
sontplus
élevéslorsqu’ils
sont calculés sur des échantillons ne
comprenant
pas de résultats de deuxième lacta- tion.Ainsi, d’après
nosdonnées,
lapremière
lactation d’un animal seraitplus repré-
sentative que la deuxième de son
potentiel
deproduction.
De l’ensemble de ces
résultats,
il semble que l’onpuisse
tirer la conclusiongéné-
rale suivante : les variations des
paramètres
deproduction
etplus particulièrement Pi,
seraient surtoutd’origine intrinsèque
alors que celles desparamètres
d’évolution etplus spécialement A,
seraientd’origine extrinsèque.
DISCUSSION
Remarques générales
Nos données
présentent
certainescaractéristiques qui peuvent
limiter laportée
des conclusions
auxquelles
nous aboutissons. Toutd’abord,
leurrépartition irrégulière
diminue la
précision
des estiméesstatistiques.
Deplus,
c’est dans destroupeaux expé-
rimentaux bien
suivis,
situés dans une mêmerégion
que nos données ont été recueil-lies ;
de cefait,
nos conclusions ne sont directementapplicables
que pour des vaches entretenues dans des conditions semblablesd’élevage
et declimat, qui correspondent
en
général
à celles de bonstroupeaux
de larégion parisienne ;
cette restriction sejustifie
surtout dans le cas de l’influence de la saison devêlage,
influence variable d’une année et d’unerégion
à l’autre.En
revanche,
laqualité
du recueil des donnéespeut
être considérée comme excel- lente(contrôles quotidiens
effectués dans une stationexpérimentale).
Parailleurs,
l’absence de sélection ou tout au moins sa faible
importance, permet
uneanalyse
correcte de certaines causes de
variation, principalement
le numéro delactation ;
en
effet,
les vachesayant
réalisé un nombre élevé de lactations n’avaient pas unpotentiel intrinsèque
deproduction
nettementsupérieur
aux autres(tabl. g). Enfin,
la méthode
d’analyse
de variance utiliséepermet
d’étudier l’influence d’un facteurindépendamment
des autres : parexemple
du numéro de lactationcompte
tenu du retardprogressif
dans la saison desvêlages
des vaches lesplus âgées.
Globalement,
nous pensons que lesavantages l’emportent largement
sur lesinconvénients et que les résultats et les conclusions que nous en tirons
peuvent
avoirun
champ d’application important,
sous réserved’adaptations régionales.
Facteurs de variation de la
Production
Numéro de lactation.
Ce facteur est celui dont l’action est la
plus importante.
Dans le tableau 10, enparallèle
avec les résultats d’autres auteurs, nousrapportons
les coefficients d’accrois- sement de laproduction journalière maximum,
au cours des 4premières lactations,
obtenusaprès
correction des données pour l’influence des facteurstroupeau,
saisonet année de
vêlage.
Cescoefficients,
assez voisins de ceuxproposés
par B!,nu(ig6i),
SuCxnrr!K
( 19 6 2 )
et certains d’entre nous(DEC A E N
etPO U TO U S, 19 65)
sontplus
éle-vés que ceux de SANDERS
( 192 8),
SIKKA( I950 ) ,
Rnx!s et al.(rg 5 g).
Ces différences tiennentpeut être,
en cequi
concerne nosdonnées,
à un certain effet de lasélection,
à un
premier vêlage plus précoce,
à des différences de race ou de conditionsd’élevage.
Des valeurs encore
plus
élevées seraient obtenues àpartir
des donnéesbrutes,
noncorrigées (tabl. ii).
Comme MAYMONE et MALOSSINI
( 1959
etI g6 I ),
VAN BRANDEN(1959),
RAKESet GIL.
(1959),
SUCHANEK(1962),
MAKELA(1963),
DECAEN et POUTOUS(1965),
nousmettons en évidence une durée de la
phase
ascendanteplus
courte en deuxièmelactation. Nous confirmons
également
que lesprimipares présentent
une meilleurepersistance (J OHAN SSO N
etHA N SSO N , 1940).
Troupeau.
Nos résultats mettent en évidence des différences
systématiques importantes
entre les deux
troupeaux
deJouy
et de la Minière.Compte
tenu de lafaçon
dont lecheptel
a étéconstitué,
ilparaît
peu vraisemblable que la totalité de ces différencesait une
origine génétique.
A notreavis,
l’écartd’origine génétique est,
aumaximum, égal
à l’écart entre lesproductions
initiales Pi, c’est-à-dire1 ,6 kg
en moyenne ; or la différence pour lesproductions
maxima P et lesproductions
au 6oejour
est de3 ,
0
kg.
Il reste donc une trèsimportante part
de la différence due à des facteurs du milieu.Étant
donné que la directiontechnique générale
des deuxtroupeaux
étaitassurée par les mêmes personnes, certaines conditions de conduite du
troupeau (habi-
tat,
qualité
des soins et surtout de latraite) paraissent
avoirjoué
le rôle leplus impor-
tant. On
peut
penser quel’augmentation
que nous observons au cours des annéessuccessives,
du niveau deproduction
etplus particulièrement
de l’accroissement initial deproduction 0,
résulteégalement
de l’amélioration des conditions de conduite dutroupeau.
!. -- !. -- --
Dans la
pratique,
les différences entretroupeaux
seraient encoreplus grandes,
par suite d’une
hétérogénéité
bienplus
élevée des conditions d’alimentation. Lapart
des facteurs non
génétiques
dans les variations deproduction
laitière entre les trou-peaux serait en
général
au moins de 80p. 100(BovAZOGt,u,
POLYetPouTous, I g6q.) ; rappelons
à cesujet
que BRUMBY( 19 6 1 )
estime que, dans les conditions relativementhomogènes d’élevage
laitier en Nouvelle Zélande 50p. 100des différences entre trou- peaux laitiers sontd’origine
nongénétique,
la traite étant alors un des facteurs lesplus importants d’hétérogénéité (SCOTT
etPHILLIPS, 1959 ).
Bienqu’elle
soitd’origine complexe
et difficile àanalyser,
la ressemblance entre les animaux d’un même trou- peau est une réalité dont il faut tenircompte
pour définir les méthodes de sélectionou
d’élevage
et pourinterpréter
les données recueillies dans des stationsexpérimen- tales,
où il est difficile destandardiser,
même dans ce cas, les conditions de milieu.Saison de
vêlage.
La
quantité
de laitproduite
durant les deuxpremiers
mois de la lactation varieavec la saison de
vêlage.
La saison laplus
défavorable estjuillet-août,
laplus
favo-rable mars-avril. Ce
phénomène,
observé par de nombreux auteurs(en particulier W
AI
TE,
WHITE et ROBI;RTSON,1956 ;
DECAEN etJOU R NTT, Ig66 ;
SPIKE etF R EE M AN, 19
6 7
)
est très souventexpliqué
par des variations dans l’alimentationqui
est, engénéral,
bonne auprintemps
au moment de la mise àl’herbe,
et médiocre en été.Cependant,
une telleexplication
ne semble pas entièrement satisfaisante dans notre cas, l’alimentationayant
étéajustée
aux besoins des animaux en toute saison. Deplus,
nos résultats montrent que les variations saisonnières de laproduction
ini-tiale
P I , paramètre qui dépend plutôt
des facteursintrinsèques,
sontplus grandes
que celles de l’accroissement initial de
production A qui
estplus sensible, quant
àlui,
à l’action des facteursextrinsèques.
Ainsi nous pensons que la saisonn’agit
pas
uniquement
par l’intermédiaire del’alimentation,
maispourrait
avoir une actiondirecte sur
l’organisme
de l’animal. Il ne semble pas que lestempératures estivales,
en
région parisienne, atteignent
des maxima suffisamment élevés pour provoquerun effet
dépressif
aussimarqué
sur laproduction
laitière que celui que nous obser-vons. Il se
pourrait
alors que le facteur leplus important
soit les variations de la durée dujour ;
eneffet,
la saison laplus
favorablecorrespond
à lapériode
de crois-sance de la durée du
jour (hiver, printemps),
laplus
défavorable à lapériode
dedécroissance
(été
surtout,automne) ;
le rendement du sens de variation de la durée dujour
au solstice d’été semblerait avoir un effetdépressif particulièrement marqué.
Chez les animaux
domestiques
et, enparticulier
chez lesRuminants,
il a été montréque la durée du
jour
intervient dans larégulation
de l’activitéhypophysaire (revue d’OxvnTer’r,
MAULÉON etT HIBAULT , 19 6 4 )
deplus,
certaines activités cellulaires mammaires semblent influencées par lerythme nycthéméral,
tout au moins chez la Souris(revue
de D!rrnMUx,19 6 0 ).
Mais aucuneexpérience
n’a mis en évidence unerelation entre la durée d’éclairement et la
production
laitière.Utilisation
pratique
des -résultatsNos
résultats,
obtenus sur des animaux nourris avecsoin,
notamment avantla
mise-bas,
fournissent des valeurs estimées de manièreobjective
pour les différents niveaux de facteursétudiés ;
ils offrent ainsi des bases decomparaison,
sous la réserveprécédemment
faited’adaptations régionales.
Ils montrentégalement l’importance
des facteurs
extrinsèques (et
enparticulier
de la conduite dutroupeau),
facteursdont l’éleveur est en
partie
maître.Nous fournissons une méthode d’estimation assez
précise
pourprédire,
àpartir
de la
production
du 5ejour,
laproduction
maximale et laproduction
à 60jours.
Par ce moyen, l’on pourra établir
plus
facilement unplan
de rationnementprévi-
sionnel pour le début de la
lactation, technique importante
dont la réussite condi- tionne non seulement un bondépart
enlactation,
mais un bon déroulement de l’ensemble ducycle
deproduction,
notamment chez les vaches fortesproductrices (F
L
ux
et PnTCH!t,t&dquo; ig54 ;1 J OURN E T ) .
Si cette méthode deprédiction
est enprogrès
sur celle
proposée
dans lapremière partie
de cette étude(DE CA E N , JouxN!’r,
Pou-’
rous,
1970 ),
elle nereprésente cependant qu’un
des moyensd’approche possibles ;
il serait utile cie
reprendre
ceproblème
de manièreplus approfondie
pour rechercher la meilleure formule deprédiction.
Comme base desélection,
laproduction
initiale PIIest,
parmi
lesparamètres
deproduction étudiés,
leplus
intéressant. Eneffet,
ilest le
plus répétable,
leplus
facile à estimer(moyenne
de 4, 5et 6ejours
delactation)
et celui connu le
plus
tôt(environ
3 semaines avantPm) ;
il est mêmemeilleur,
dece
point
de vue, que laproduction journalière
maximale Pm que certains d’entrenous avaient
précédemment proposée
comme critère de choix(DE CAEN
etP OUTOUS , zg6
5
). Rappelons
que P,n, étroitement lié àPi, permet
une bonne estimation de laproduction
totale par lactation(Br,nu, 10 6 1 ;
BxnrrTOrr etM ILL E R ,
zg59 ; DECAENet
P OU TOUS, I9 65 ;
LENNON etM IXN E R , I95 8 ;
RAK!S etal.,
Ig5g ; 1VIAYMON! etb7:
A r,oss INI
,
I959 ;S IKKA , 19 6 0 ).
Toutefois il nepeut s’agir
dans les conditions ac-tuelles que d’une sélection par
l’éleveur, l’organisation
actuelle du contrôle laitierne
permettant
pas de mesurer laproduction
à intervalle fixeaprès
levêlage.
Par
ailleurs,
pourjuger
unanimal,
iln’apparaît
pasopportun
d’attendre les résultats de la deuxième lactationqui
sont, dans le cas de notreéchantillon, beaucoup
moins
représentatifs
de la valeur de l’individu que ceux de lapremière
ou troisièmelactation. L’attente des
performances
en deuxième lactation accroît l’intervalle entregénérations
et diminue donc lesprogrès génétiques
annuels attendus.Reçu pour publication en mai 1970.
SUMMARY
MILK YIELD DEVELOPMENT IN THE COW DURING THE FIRST TWO MONTHS OF LACTATION
II. - ANALYSIS OF THE VARIATION IN THE QUANTITY OF MILK
The present study is based upon the daily milk production values from 969 lactations of
cows belonging to the experimental dairy herd of the C. N. R. Z. (National Center Animal Hus-
bandry Research) ; the characteristics of these data are given in tables I and 2.
The variations of 8 paramaters which accurately define the daily mean production curve during the two first months of lactation were analyzed (table 3). Using statistical methods (re- gression analysis, q way variance analysis hierarchical, variance analysis), we studied :
1
° the relationships between the different parameters (table q),
2
° the effects of variation factors such as lactation number, calving season, lactation year, herd and breed (table 6),
3
° repeatability of the parameters from one lactation to another (table 8).
Some formula are proposed in order to forecast maximum production Pmaxand production
on the 6oth day of lactation Psofrom the production on the 5 th day (of lactation) P, (table 5).
Transformation coefficients of the maximum production during successive lactations were cal- culated (table io).
Our results show the importance of environmental factors for the performances of cows
at the beginning of lactation ; the influence of factors such as season and herd, are discussed.
We suggest that cattle breeders use the 5th day production as a selection criterion and we recommend them not to estimate the production rate of an animal on the basis of the 2nd lac- tation values.
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