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Submitted on 1 Jan 1906
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Distribution de l’intensité du rayonnement des sources radioactives
E. Rutherford
To cite this version:
E. Rutherford. Distribution de l’intensité du rayonnement des sources radioactives. Radium (Paris), 1906, 3 (9), pp.257-260. �10.1051/radium:0190600309025700�. �jpa-00242197�
des sources radioactives
Par E. RUTHERFORD
Professeur de Physique, Mc. Gill University, Montréal.
LT cours de mes expériences sur la déviation magnétique des rayons 03B1 émis par les dépôt
radioactifs du radium, j’ai observé un effet photographique assez singulier. La disposition de l’ex- périence était analogue a celle décrite dans une note précédente 1. Le rayonnement d’un fil de 1,5 centi-
mètres de long et de 0,5 millimètres de diamètre,
rendu fortement radioactif par exposition dans l’éma- nation du radium, traverse une fente et tombe sur
une plaque photographique placée à uue petite dis-
tance de la fente. Tout l’appareil était purgé d’air, et
un champ magnétique intense fut appliqué comme
pour faire dévier le faisceau de rayons «. Avec une
Fig. 1.
fente large, comparable en lar-
geur au diamètre du fil activé,
la trace photographique des
rayons a, sur la plaque est indiquée par une bande noire
avec des bords nettement
arrêtés, et l’intensité de l’im-
pression photographique est approximativement uniforme
dans la partie intérieure. Avec
une fente très étroite, la trace
des rayons offre un tout autre aspect.
La figure 1 montre une très
belle épreuve d’une semblable trace. Les bords extérieurs de la bande sont nettement arrê- tés, et l’impression photogra- phique décroit rapidement du
bord vers le centre. La trace, à première vue, se présente comme si elle était
composée de deux bandes noires avec une bande inté- rieure blanche. Une photographie prise dans des
conditions analogues, en employant une tige de
5 millimètres de diamètre, donne des résultats
identiques.
Cette singularité dans la trace des rayons ne peut
être due au champ magnétique, car le phénomène est également observable nettement sans champ magné-
1. Voir Le Radium, t. III, p. 80.
tique.La même impression peut être également observée quand les rayons x passent à travers un écran absor- bant. On pouvait également penser que l’effet était dû à un renversement photographique, mais il fut aussi reproduit avec des effet photographiques extrê-
mement intenses. D’autres expériences faites avec des préparations très faibles conduisent au même résultat.
Dans une autre expériences, une sphère de 1 centi- mètre de diamètre, rcndue uniformément active par
exposition à l’émanation du radium, servit aux
mêmes expériences. Une feuille de métal fut placée à
2 centimètres au-dessus de la sphère, et les rayons émis par la sphère traversaient un petit trou percé
dans la plaque et tombaient normalement sur une
plaque photographique placée à 2 centimètres au-
dessus du trou. L’impression sur la plaque sensible
devait se comporter comme une photographie de la sphère prise a travers un trou d’épingle. Le résultat obtenu est le suivant : l’effet est intense sur les bords de la circonférence et diminue rapidement vers
le centre.
La distribution de l’intensité de la radiation par
une sphère radioactive ou un cylindre, est très différente de celle obtenue par une sphère ou un cylindre porté
au rouge blanc, par exemple. Dans une photographie
du soleil à travers un trou d’épinble, on sait
que l’intensité de la radiation est uniforme
sur tout le disque.
Cette différence
frappante entre la dis-
tribution de l’intensité de la radiation lumi-
neuse et celle des
sources radioactives
peut s’expliquer aisé-
ment.
Dans le cas d’un corps lumineux, le
soleil, par exemple,
l’intensité de la radia- Fig. 2.
tion émise par un point quelconque n’est pas uni-
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/radium:0190600309025700
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forme dans toutes les directions, mais elle suit la loi du cosinus ou loi de Lambert.
Ceci indique que l’intensité de la radiation d’un
point quelconque varie comme le cosinus de l’angle
entre la norlnale et la direction de la lumière émise.
Cettc loi de distribution, pour un corps lumineux par
lui-même, est, je suppose, communément expliquée
en supposant que la lumière ne vient pas entièrement de la surface mais d’une profondeur notable d’une
couche absorbante.
Soit P (fig. 2) le cercle qui représente la section transversale d’un cylindre rayonnant uniformément.
Les rayons passent au travcrs d’une fente rectangulaire
étroite CD, et tombent sur un écran SS. Les rayons
qui tombent sur le point 0 de l’image proviennent
d’une longueur AB du cercle, obtenue en traçant ,
deux droites partant de 0 et passant par C et D. I,es rayons qui atteignent 0’, un point du bord extrême
de la partie lumineuse, proviennent d’une longueur
A’il’ du cercle, bien plus grande que AB. Dans le cas d’un corps lumineux par lui-même, l’accroissement de la surface rayonnante â un point près du bord
est exactement compensé par la loi du cosinus de distribution et l’intensité de la radiation est, par
conséquent, uniforme au travers de la section de l’image.
Dans le cas des substances radioactives, la radia- tion provient d’une couche extr’êmentent mince de matière rarlcoactire, dans laquelle les rayons 03B1 sont à peine absorbés. Il n’y a pas de loi du cosinus, et l’intensité de la radiation est la même dans toutes
les directions. Nous voyons donc que, dans de telles
conditions, les rayons atteignant 0 sont proportionnels
â la longueur AB et celle en 0’ à la longueur A’ B’.
L’intensité est donc plus grande à l’extrémité de
l’image et diminue vers le centre.
Si les distances OC, CP sont très grandes par rap- port au rayon du cylindre et la fente très étroite, on peut voir quo la différence dans l’image sera peu
différente au bord et au centre. C’est le cas expéri-
mental considéré en figure 1.
La théorie mathématique de l’intensité de la distri- bution de la radiation pour le cas d’un cylindre ou
d’une sphère radiante, quand on ne prend pas la loi du cosinus, peut parfaitement être utilisée, mais elle
n’est pourtant pas nécessaire. Il suf6t de dire que la distribution observée de l’intensité de la radiation d’une sphère ou d’un cylindre actif reçoit une expli-
cation simple quand on considère que :
Il La cooche de substance active est si faible que les rayons x ne sont pas absorbés en la traversant ; donc, pas de loi du cosinus;
2° Que les particules oc sont projetées également
dans toutes les directions.
Les résultats expérimentaux obtenus apportent une preuve indirecte que les rayons x sont projetés égale-
ment dans toutes les directions de la source radioac- tive.
Notre habitude de la distribution de la radiation d’une source lumineuse est tellement liée à la loijdu
cosinus de l’émission, que nous ne regardons pas comment varierait cette différence si la loi n’existait pas. Nous avons vu, par exemple, que, si la radiation du soleil provenait d’une couche mince de matière
non absorbante, le soleil nous apparaî trait comme un disque circulaire, les bords marqués par un anneau brillant de lumière, la luminosité, tombant rapide-
ment des bords vers le centre.
Prenons un autre exemple. Si un disque plat émet
de la lumière suivant la loi du cosinus, l’intensité de la radiation en un point est plus grande quand la ligne qui joint le point au centre du disque est nor-
mal au disque. L’intensité décroît si le disque
est incliné, et est très faible si la ligne est dans
le plan du disque. Considérons maintenant un dis- que analogue recouvert d’une pellicule mince de
substance radioactive, et, afin d’éliminer l’absorption
des rayons 03B1 par l’air, supposons le tout dans le vide.
Puisque la loi du cosinus ne peut être appliquée,
l’intensité de la radiation à une distance quelconque
de la plaque est indépendante de l’orientation de la
plaque.
Considérons maintenant quelques autres cas, qui
illustrent ces points d’une manière frappante.
Une tige de fer à section carrée de 4 centimètres de long fut exposée quelques heures à l’émanation du radium dans le but d’obtenir une fine couche de substance active. Après éloignement, l’intensité de la radiation de la tige fut exanlinée dans différentes
positions silnultanément par une méthode optique et photographique. Dans le premier cas, l’échantillon fut
placé près d’un écran de willémitc ou de sulfure de
zinc.
Les résultats obtenus sont plus facilement explica-
bles en utilisant le diagramme de la figure 5. AB
C D est la section transversale de la tige carrée.
Les lignes pointillées représentent la continuation des côtés du carré. Supposons que l’écran phospho-
rescent soit placé en PQ parallèlement à la face supérieure de la tige. L’expérience montre d’abord que la partie R S est de beaucoup moins lumineuse que les parties RP, SQ, immédiatement voisines. Ceci fut confirmé en plaçant une plaque photographique dans
la même position. L’intensité de l’impression est plus
intense en Pll et SQ. Le négatif a l’apparence d’une
croix à bras sombre. Les bords des bandes ainsi déter- minées sont nettes, et il n’y a pas de transition dans l’intensité d’une région à une autre.
A première vue, il semble que l’effet photogra- phique doive diminuer rapidement avec la distance à la plaque. En y regardant de plus près, on se rend
vite compte du phénomène. La région RS est frappée
uniquement par les rayons de la face AD de la tige,
tandis que PR et SQ le sont par AD et AB et AD et DC.
Si la distance AR est grande par rapport à AB, l’in-
tensité de la radiation en R est celle de la face AB et de la face AD. Il en résulte que l’intensité en R est sensiblement douhle.
L’expérience est confirmée par une expérience déri-
yant de celle-ci. Deux feuilles de métal mince absor-
Fig. 3.
bant complètement les rayons oc furent placées en All
et en DS. Le rayonnement atteignant un point de la région RP est alors due entièrement aux rayons du côté AB. Dans de telles conditions, on observe que l’intensité de l’impression photographique dans la région RS est sensiblement la même que dans la
région RD près de R.
Des effets optiques très remarquables peuvent être
Fig. 4.
produits par différents dispositifs. La tige active est
mise sur l’écran phosphorescent, son axe étant normal à la surface. La surface éclairée est divisée par 4 bandes
noires à angle droit formant croix très nette. L’effet
observé est remarquable sur la photographie jointe
ici (fig. 4).
Dans la plupart des expériences, la tige fut chargée négativement et placée dans une enceinte renfermant
l’émanation du radium. Le dépôt n’était donc pas nécessairement distribué uniformément. On a pu constater que cette non-uniformité n’avait aucun effet
T’’lâ. 5.
sensible sur le phénomène. Avec un fil active for- tement, on obtient des photographies en quelques
minutes.
Enfin, on a pu examiner la distribution du rayon- nement dans deux autres cas. Dans une expérience, la
section transversale de la tige était un triangle équi-
1"ig. 6.
latéral de 6,5 millimètres de côté, et l’autre un hexa- gone régulier de 2,75 millimètres de côté. Les tiges
furent placées normalement sur la plaque, et les -
résultats obtenus sont reproduits sur les figures 5 et 6.
260
L’explication des résultats obtenus est nettement visible au moyen des diagrammes des figures 7 et 8.
ABC est la section de la tige triangulaire. Les ré- gions a, b et c, limitée par les prolongements des
côtés du triangle, sont nettement vues sur la photo- graphie, puisque la radiation agis5antc est duc u une
seule surface.
La photographie, obtenue avec une tige hexagonale,
Fig. 7, 8.
présente quelques points intéressants. On peut y
remarquer six petits triangles équilatéraux corres- pondant à chacune des six faces. Un changement brusque d’intensité a lieu toutes les fois que la radia-
tion tangentielle d’un autre côté commence a produire
son effet.
Un très grand nombre d’expériences analogues peuvent être reproduites, mais celles-ci suffisent pour montrer les phénomènes qui se passent lorsque la loi
du cosinus n’entre pas en jeu.
Il n’y a aucun doute que les rayons produiraient
des effets identiques. Mais, dans ce cas, la ligne de
dumarcation des ombres et de la lumièrc doit être beau- coup moins nette à cause du pouvoir pénétrant beau-
coup plus considérable des rayons 03B2.
Théoriquement, la distribution doit être différente si la radiation provient d’une couche très mince ou
d’une couche épaisse de matière radioactive. Il y a, dans ce dernier cas, des difficultés pour obtenir une couche ayant une forme géométrique bien définie.
Nous pouvons cependant supposer que, dans ce cas, le résultat obtenu sera analogue à celui qu’on observe
avec les sources lumineuses où la loi du cosinus est
appliquée.
Je remercie mon collègue, le professeur Cox, pour l’assistance qu’il m’a donnée dans l’explication de ces phénomènes.
État actuel de la radiumthérapie
Par P. OUDIN llédecin de Saint-Lazare.
Après les retentissantes découvertes de Becquerel et de Curie, quand on constata l’émission de rayons X par les corps radioactifs, quand on les vit provoquer la lumino- sité de l’écran au platino-cyanure de barvum, impressionner
la plaque photographique, enfin produire chez les premiers expérimentateurs des altérations des téguments analogues
a celles qu’amènent les rayons de Rüntgen; on crut que leur action en médecine devait ètre identique à celle du
tube à vide, que leur rôle se bornerait à n’ètre comme on
l’a dit n tort que celui d’une édition de poche de l’am- poule de Crookes.
Cette conception a jusqu’aujourd’hui régné presque exclusivement, et la grande majorité des actions thérapeu- tiques qu’on a cherché à réaliser avec le radium a porté sur
des affections antérieurement traitées avec succès par les rayons X.
S’il en était ainsi, l’avenir de la radiumthérapie serait
bien restreint, et une fois passée la curiosité scientifique
des premières années, on ne manquerait pas de délaisser cette sources de rayons X si pauvre quand on la compare à
l’ampoule de Crookes et d’une valeur marchande si élevée.
Son usage ne serait plus conservé* que pour agir sur des régions profondes que les rayons X atteindraient difficile- ment sans dommage pour les organes superficiels; ou il
faudrait, pour lui donner un renouveau, qu’on découvre un procédé produisant facilement, et à prix abordahle, les corps radioactifs.
Or, cette identité qu’on avait cru voir entre l’émission
des corps radioactifs et les rayons X est loin d’exister et je
crois que les progrès de la radiumthérapie seront d’autant plus grands qu’elle s’éloignera davantage de la voie tracée par la radiothérapie dont elle ne peut être qu’un succédané
de valeur tout à fait inférieure.
Les rayons X, ébranlement de l’éther analogue à la
lumière produit par le choc des particules cathodiques sur l’anticathode, sont toujours semblables à eux-mêmes. Ils sont plus ou moins abondants, mais leur faisceau est, en approximation, homogène. Leur degré de pénétration peut varier à l’infini, mais ils ne changent pas plus pour cela que ne change de l’eau lancée en jet plus ou moins puis-
sant. Leurs dérivés rayons secondaires ou tertiaires, ont
aussi des propriétés constantes.
Rien au contraire n’est plus complexe que l’émission d’un corps radioactif. La théorie de Rutherford, acceplée aujour-
d’hui par tous les phnsiciens, a éclairé d’une vive lumière l’histoire de ces radiations. Je crois qu’il est nécessaire à notre sujet de la résumer brièvement ici.
Les corps radioactifs sont composés d’atomes insta-