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Preprint submitted on 30 Oct 2016
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NOMINATION, FIGURE ET ACTE DE LANGAGE
Jean Robert Rakotomalala
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Jean Robert Rakotomalala. NOMINATION, FIGURE ET ACTE DE LANGAGE. 2016. �hal-
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FIGURE ET ACTE DE LANGAGERésumé
La généralisation de la performativité à tous les énoncés a pour conséquence d’imposer que les tropes en tant que changement de dénomination entrent dans le cadre de la préservation de la face. Nous tenons pour justification de cette position une analyse de la synecdoque, de la métonymie et de la métaphore en tant qu’acte de langage.
Mots clés : synecdoque, métonymie, métaphore, nomination, acte de langage Abstract
The generalization of performativity over all statement have as consequence that tropes as changment of naming accomplish a face work. We take as justification of this position an analysis of synecdoche, metonymy and metaphor to an langage act.
Key words : synecdoche, metonymy, metaphor, naming, speech act.
Dans cet article, nous proposons de fédérer la figure de sens ou trope et la nomination dans les actes de langage. Il est évident que nommer n’est pas adjoindre un composant linguistique aux choses en vue d’une communication sous prétexte qu’il est plus facile de manipuler les noms que les choses qu’ils désignent. Nommer, au contraire, est un acte de langage parce que le nom n’a pas pour mission exclusive de désigner la chose, mais c’est un geste d’appropriation déclenchant un parcours génératif.
Il faut entendre ici par parcours génératif le mouvement de connexion de signe à signes qui installe le nom à la base d’un parcours de désir. Cependant, il nous semble utile de préciser un préalable avant d’aller plus loin.
Que ce soit une fleur réelle, ou une fleur peinte dans un tableau, elle déclenche sensiblement les mêmes parcours de désir. Mais la fleur peinte dans un tableau a l’avantage immense de ne pas subir la censure du réel. Ce qui implique que les unités linguistiques sont plus riches que les objets qu’elles dénotent en plus de leur disponibilité immédiate. Robert de MUSIL précise à ce propos qu’il n’y a pas lieu de privilégier le réel par rapport au possible :
S’il y a un sens du réel, et personne ne doutera qu’il ait son droit à l’existence, il doit
bien y avoir quelque chose que l’on pourrait appeler le sens du possible. L’homme
qui en est doué, par exemple, ne dira pas : ici s’est produite, va se produire, doit se
produire telle ou telle chose ; mais il imaginera : ici pourrait, devrait se produire telle
ou telle chose et quand on lui dit d’une chose qu’elle est ce qu’elle est, il pense qu’elle
pourrait être aussi bien autre. Ainsi pourrait-on seulement définir le sens du possible
comme la faculté de penser tout ce qui pourrait être "aussi bien" et de ne pas
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accorder plus d’importance à ce qui est qu’à ce qui n’est pas. On voit que les conséquences de cette disposition créatrice peuvent être remarquables. (MUSIL, 1982, pp. 17-18)
Il y a bien lieu de parler de disposition créatrice, parce que métaphoriser, c’est tisser un nouveau lien de chose à choses, loin du langage ordinaire que l’on pense être un lien entre les mots et les choses. Métaphoriser, c’est poursuivre un but pragmatique au même titre que la fabrication d’un outil est en vue de son emploi.
Pour une approche empirique de la censure du réel, disons que les choses imaginées atteignent une perfection dont les choses réelles sont privées. Ainsi, une fleur réelle subira le poids néfaste du temps et des aléas climatiques, tandis que la fleur dans un roman est éternelle. C’est ce que nous montre sans jamais le dire le récit de La rose de Paracelse. En résumé, un disciple du savant Paracelse
1, Grisebach, voulait avoir la preuve que le maître peut faire resurgir des cendres que furent une rose, la fleur de nouveau. Il ne s’est pas soumis à la requête de Grisebach, mais quand celui-ci parti, nous continuons avec les mots précis du texte :
Paracelsus was then alone. Before putting out the lamp and returning to his weary chair, he poured the delicate fistful of ashes from one hand into the concave other, and he whispered a single word. The rose appeared again
2. (BORGES, 1983) (DECOTTIGNIES, 1988, p. 197)
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La légende, cette aurore posthume qui ne revient qu'aux êtres d'exception, s'est emparée de Paracelse.
Un homme, un jour, était venu trouver l'illustre guérisseur et, très humblement, lui avait demandé : – Est-ce bien vrai tout ce qui se dit sur toi ? Tes remèdes merveilleux, tes dons extraordinaires, ton pouvoir surnaturel? Est-il vrai qu'à partir de leurs cendres tu puisses rendre la vie aux choses ? On m'a dit que, brûlant une rose, tu pouvais la ressusciter !
Enveloppant l'étranger d'un regard calme, Paracelse lui avait alors répondu :
– Ami, il ne faut point accréditer de telles histoires. Non, vraiment, je ne suis rien qu'un très-pauvre homme, vivant dans les tribulations et la misère. Ce que je fais, je le fais de mon mieux, avec mon cœur.
Voilà tout. Mais toi, ne donne pas créance aux paroles insensées. Va ton chemin, oublie ce qu'on t'a dit et qui ne vaut pas qu'on s'y attarde !
Or, tandis qu'il s'exprimait ainsi, Paracelse remuait dans sa main un peu de cendre.
– Mais pourtant, insistait l'homme, ces témoignages qui courent de ville en ville : se peut-il que tant de choses se disent sans raison ? Ton nom est sur toutes les bouches avec celui de la guérison et celui du prodige !
– Cher visiteur, crois-moi : il n'en est rien. Les gens racontent, mais ne te trouble pas. Je le répète : va ta vie, fais ton devoir, aide et aime tes proches et n'oublie pas Dieu sans qui tu ne serais rien. Mais laisse cette fable que répandent les langues bavardes et crois bien que je ne suis rien d'autre que ton frère parmi les hommes, celui-là même qui est ici devant toi.
Alors l'inconnu se retira. Et Paracelse, toujours, remuait la cendre dans sa main. Il suivit des yeux l'homme qui s'éloignait et quand sa silhouette se fut évanouie dans la distance, il leva lentement cette main qu'il avait tenue cachée et dans laquelle une rose venait d'éclore.
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