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La sélection des offres en droit suisse et en droit communautaire

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La sélection des offres en droit suisse et en droit communautaire

BELLANGER, François

BELLANGER, François. La sélection des offres en droit suisse et en droit communautaire. In:

Michel, Nicolas. Aspects du droit des marchés publics : droit suisse, droit européen et droit comparé . Fribourg : Ed. universitaires, 1992. p. 87-102

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:41970

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LA SÉLECTION DES OFFRES EN DROIT SUISSE ET EN DROIT COMMUNAUTAIRE1

par

FRANÇOIS BELLANGER

Docteur en droit, chargé de cours à l'Université de Genève

Introduction

La sélection des offres constitue la troisième phase de la procédure de passa- tion d'un marché public, après l'avis de marché et le dépôt des offres et avant l'attribution du marché2La sélection des offres implique de nombreuses opé- rations pour l'autorité chargée du marché public en cause: ouverture, examen et, le cas échéant, exclusion d'offres, négociation éventuelle avec un ou plu- sieurs soumissionnaires et analyse des variantes.

Nous nous attacherons ici à trois éléments particuliers de la procédure. En premier lieu, l'examen des modalités de la procédure d'ouverture des offres permettra de mettre en évidence le degré de publicité assuré par les autorités ainsi que les possibilités éventuelles de négociation. En deuxième lieu, nous étudierons les problèmes relatifs à la sélection effective des offres par l'auto- rité, soit au moyen de l'exclusion d'offres ne répondant pas à des conditions déterminées, soit sur la base de critères moins précis relatifs à la capacité des soumissionnaires. Enfin, nous verrons la place laissée aux variantes qui pour- raient être éventuellement proposées.

Cette étude se situant dans une optique de droit comparé, nous procéderons d'abord à une brève présentation du droit suisse qui a fait déjà l'objet de très nombreuses études3, puis nous examinerons de manière plus approfondie les différentes directives communautaires relatives aux marchés publics, pour enfin mettre en évidence les convergences et, surtout, les divergences des droits suisse et européen.

1 Etat de la législation et de la jurisprudence au Je' juillet 1991.

2 MICHEL N., La conclusion des marchés publics, thèse, Genève 1979, p.9.

J Voir, notamment les auteurs suivants ainsi que les ouvrages cités par eux: Commission suisse des cartels, Les soumissions et les achats de la Confédération, des cantons et de certaines commu- nes, Berne 1988/2; DESCHENAUX H., «La mise en soumission de travaux de construction», in L'homme et son environnement, Fribourg 1980, pp. 149 ss; FlNSINGER J ., Der Submissionswett- bewerb, Berne 1986; GAUCH P., «Die Submission im Bauwesem>, in L'homme dans son environ- nement, Fribourg 1980, pp. 191 ss; MICHEL N., op. cit.; MANFRINI P., «Les contrats de marchés publics mis au service de la poursuite d'une politique publique», in Les instruments d'actions de l'Etat, Bâle 1991, pp. 127 SS ..

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I. La situation en droit suisse4 A. L'ouverture des offres

Dans la plupart des cantons, l'ouverture des offres se déroule selon une procé- dure formelle en présence des fonctionnaires compétents en raison de la nature du marché. Un procès-verbal est dressé afin de fixer le déroulement de l'opération5De nombreux cantons prévoient que l'ouverture des offres doit se dérouler en présence des soumissionnaires. Cette présence est censée assurer la publicité nécessaire afin de garantir la transparence del' opération. Elle est, notamment, importante au moment de l'examen des critères d'exclusion d'office des offrants en raison de la latitude d'appréciation laissée à l'autorité6

Lorsque la présence des soumissionnaires n'est pas prévue au moment de l'ouverture des offres, leur absence est généralement palliée par la possibilité d'avoir accès au procès-verbal pendant un certain délai après l'adjudication, la consultation du procès-verbal devant permettre aux entrepreneurs écartés ou exclus de connaître les motifs qui ont conduit à cette décision 7

Enfin, étonnamment, tant la Confédération que de rares cantons ne pré- voient pas de procédure particulière pour l'ouverture des offres8

S'agissant des négociations, la plupart des lois cantonales ne permettent pas au pouvoir adjudicateur de négocier avec les soumissionnaires. Une modifica- tion éventuelle de l'offre n'est, en principe, possible qu'au maximum jusqu'au délai fixé pour le dépôt des offres9Toutefois, lorsque les offres déposées sont similaires, l'ordonnance sur les soumissions10 et certaines lois cantonales don- nent au pouvoir adjudicateur la possibilité de négocier avec les soumissionnaires 11 Cependant, plusieurs cantons permettent au pouvoir adjudicateur de se renseigner auprès des soumissionnaires sur les modalités de formation des prix ou sur les modes d'exécution des travaux12

4 Les références complètes des législations fédérales ou cantonales citées ci-après figurent à la fin du présent rapport.

5 Les lois ou ordonnances sont désignées par l'initiale du canton, le libellé exact des textes figure en annexe. Voir, par exemple, art. 26 al. 2 AG, 17 BS, 13 al. 1 GE, 12 al. 1GR,15 al. 1JU,14 al.

3 LU, 20 al. 2 SH, 10 al. 1SO,16 SG.

6 Voir, notamment, art. 6 al. 3 BL, 17 BS, 12 al. 2 FR, 13 al. 2 GE, 12 al. 2 GR, 14 al. 2 LU, 12 al. 2 GR, 14 al. 2 LU, 12 al. 3 SZ.

7 Articles 17 AR et 25 al. 2 JU.

B Voir, par exemple, «Soumissions» et «Achats», ainsi que la loi bernoise.

9 Voir, par exemple, art. 12 al. 2 et 5 BE, 13 al. 2 FR, 20 al. 2 JU.

10 Selon l'art. 6 al. 3 «Soumission», des négociations sont possibles uniquement si les prix unitai- res ou le tableau des offres sont presque identiques ou bien s'il s'agit d'offres collectives.

11 Voir, par exemple, art. 28 AG selon lequel une négociation est possible en cas de différence de 10% environ entre deux offres similaires.

12 Art. 15 al. 2 FR, 16 al. 3 JU, 15 al. 1 LU, 21 al. 3 SH, 7 al. 4 TH.

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B. La sélection des offres 1. Principe

L'ordonnance fédérale sur les soumissions et la très grande majorité des lois cantonales prévoient des motifs d'exclusion automatique des offres présen- tées. En principe, les lois cantonales contiennent une liste exhaustive des critè- res d'exclusion13Toutefois, l'ordonnance argovienne est plus souple en pré- voyant la possibilité d'écarter les offres inopportunes et en donnant une liste exemplative de telles offres 14Enfin, trois cantons ont une législation som- maire qui ne règle pas de manière générale la sélection des offres: Glaris, Neu- châtel et Nidwald.

L'examen des critères d'exclusion est généralement effectué seulement au stade de la procédure d'adjudication15 Néanmoins, il peut avoir lieu dès l'ouverture des offres, avant l'établissement du tableau comparatif qui servira de base à la procédure d'adjudication16Les motifs d'exclusion des offres peu- vent être regroupés en trois catégories. Ils portent sur le respect des conditions légales ou de l'appel d'offre, sur la qualité ou le coût de l'offre, ou bien sur le respect des législations sociales et fiscales.

2. Le respect des conditions légales ou de l'appel d'offre

Sont éliminées d'office les offres qui sont déposées après le délai fixé dans l'appel d'offre17 ou qui ne répondent pas aux autres conditions posées par ce dernier ou la législation applicable18 Parmi ces conditions figure générale- ment l'obligation pour l'entreprise d'être établie dans le canton 19

3. La qualité et le coût de l'offre

Ne sont pas retenues les offres qui, par leur contenu ou par les échantillons présentés, n'apparaissent pas adaptées au but recherché20Dans le même sens, sont également rejetées les offres qui témoignent d'une compétence, d'une expérience insuffisante ou d'une intention de concurrence déloyale21Sont

13 F1NSINGER J., op.cil., pp. 16 s.

14 Art. 27 AG.

15 Voir, par exemple, art. 8 «Soumission>>, 22 à 24 AI, 21 ss AR, 7 BL, 19 ss BS, 12 ss BE, 16 ss GE, 13 SS GR, 18 SS JU, 18 SS LU, 16 SS SZ, 19 SS SG, 9 TH, 23 UR, 13 SS VD, 9 ZG.

16 Voir, par exemple, art. 26 à 28 AG, 12 ss FR, 4.2 s OW, 20 ss SH, 11SO,19 à 21 TI, 20 ss VS.

17 Voir, par exemple, art. 8 al. 3 «Soumission», 6 al. 2 BL, 20 litt. a BS, 13 litt. a BE, 14 litt. b FR, 18 litt. d GE, 21 litt. a JU, 20 litt. b LU, 4.21 litt. b OW, 18 al. 3 SZ, 20 litt. c 'SG, 9 al. 3 litt.

b TH, 25 ch. 1 UR, 22 al. 1 ch. 1 VS.

18 Voir, par exemple, art. 8 al. 3 «Soumission», 27 al. 1ch.1AG,24 litt. a Al, 21 litt. a AR, 7 al.

2 ch. 1 BL, 20 litt. b BS, 13 litt. a et b BE, 14 litt. a FR, 18 litt. a GE, 21 litt. b, cet j JU, 20 litt. a LU, 4.21 litt. a OW, 24 litt. b SH, 18 al. 1SZ,11 litt. b SO, 20 litt. b SG, 9 al. 3 litt. a TH, 25 ch. 2 UR, 13 litt. a VD, 22 ch. 2 à 4 VS, 9 al. 2 ZG.

19 Voir, par exemple, art. 14 litt. e et 5 litt. a FR.

20 Voir, par exemple, art. 8 al. 3 «Soumissions», 27 al. 1 ch. 3 et 4 AG, 21 litt. b AR, 14 litt. c FR, 4.21 litt. c OW, 18 al. 3 SZ, 20 litt. c SG, 9 al. 3 litt. c TH, 25 ch. 2 et 5 UR.

21 Voir, par exemple, art. 8 al. 3 «Soumission», 27 al. 1 ch. 3 et 4 AG, 24 litt. c Al, 21 litt. c AR, 7 al. 2 ch. 3 BL, 20 litt.cet d BS, 13 litt. c BE, 18 litt. c GE, 15 al. 1 litt. b GR, 21 litt. e et g JU, 20 litt. e LU, 4.21 litt. d OW, 24 litt. a etc SH, 18 al. 4 SZ, 11 litt. a SO, 9 al. 3 litt. d TH, 25 ch. 3 UR, 13 litt.b VD, 22 al. 1 ch. 6 s. VS.

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aussi exclues les offres dont les délais apparaissent en disproportion avec le travail en cause et ne pourront donc pas être respectés compte tenu de l'expé- rience normale des choses22 . Le pouvoir adjudicateur peut également, parfois, prendre en considération la qualité des travaux déjà effectués pour la collecti- vité par le soumissionnaire23 .

Certains cantons classent aussi parmi cette catégorie, les situations de sous- enchère24-25. Dans le canton d'Obwald, par exemple, une sous-enchère est pré- sumée lorsqu'une offre apurée est, pour une qualité analogue, de 150Jo infé- rieure à la moyenne des deux offres immédiatement supérieures et que le sou- missionnaire ne peut prouver qu'il présente des avantages particuliers pour le travail en cause. Dans un tel cas, le soumissionnaire dispose de 14 jours pour apporter la preuve que son offre couvre les coûts de l'entreprise26.

4. Le respect des législations sociales et fiscales

Dans la plupart des cantons, les soumissionnaires doivent respecter tant la législation en matière sociale que les conventions collectives en vigueur, sous peine de se voir exclus d'office27 . La preuve du respect de ces obligations peut être apportée au moyen d'attestations prévues par l'appel d'offre ou les dispo- sitions légales applicables28 . Cette exigence figure souvent expressément comme motif d'exclusion de l'offre, mais peut également découler de l'obliga- tion générale de respecter les dispositions légales applicables à la soumission29

De même, un soumissionnaire peut être écarté s'il ne remplit pas ses obliga- tions financières à l'égard de l'Etat30.

C. Le sort des variantes

L'ordonnance sur les soumissions autorise le dépôt de variantes31 au projet par le soumissionnaire32. Ce projet modifié doit se fonder sur un devis complet et vérifiable ainsi qu'un dossier de plan afin de permettre au pouvoir adjudica- teur de le vérifier et de le comparer au projet principal33. En effet, pour la

22 Voir, par exemple, art. 27 al. 1 ch. 2 AG, 24 litt. d AI, 21 litt. d AR, 7 al. 2 ch. 2 BL, 20 litt. f BS, 13 litt. d BE, 14 litt. d FR, 15 al. 1 litt. a GR, 21 litt. f JU, 20 litt. d LU, 4.21 litt. f OW, 20 litt. e SG, 22 al. 1 ch. 9 VS.

23 Voir, par exemple, art. 21 litt. j JU.

24 Commission suisse des cartels, op. cit., pp. 202 et 205 ss; DESCHENAUX H., op. cit., pp. 149, 164 ss; FINSINGER J., op. cit., pp. 17 s.; MICHEL N., op. cit., pp. 34 SS et 91 SS.

25 Voir, par exemple, art. 24 litt. f Al, 20 litt. d LU, 4.22 OW, 18 al. 6 SZ, 11 litt. c SO, 20 litt. d SG, 24 VS.

26 Art. 4.22 OW.

27 Voir, par exemple, art. 24 litt. e AI, 21 litt. e AR, 20 litt. e BS, 13 litt. e BE, 14 litt. e FR, 18 litt.

b. GE, 15 al. 1 litt. c GR, 21 litt. cet h JU, 20 litt. f LU, 18 al. 5 SZ, 11 litt. a SO, 20 litt. f SG, 13 litt. d VD.

28 Voir, par exemple, art. 10 à 12 GE et 13 litt. d VD.

29 Voir, supra, le point 1.

30 Voir, par exemple, art. 13 litt. f BE et 21 litt. i JU.

31 En général sur les variantes, voir GAUCH P., op. cit., pp. 191, 210 ss; MICHEL N., op. cit., p.

31.

32 Art. 5 al. 6 «Soumissions».

33 Art. 5 al. 7 «Soumissions».

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phase d'adjudication, il est nécessaire de transposer les offres comportant des variantes afin de les rendre comparables aux autres offres34. La situation apparaît similaire dans quelques cantons35 .

Dans les autres cantons, deux types de situation sont possibles. En premier lieu, certaines législations cantonales prévoient la possibilité de soumettre des variantes pour autant que l'appel d'offres l'autorise36 ou, à tout le moins, ne l'interdise pas37 . Les variantes doivent alors être présentées sur des documents distincts des offres principales et elles sont rendues comparables en vue de la procédure d'adjudication. En second lieu, plusieurs cantons excluent la pré- sentation de variantes par le soumissionnaire38. L'existence de différences entre l'offre et le descriptif des travaux figurant dans l'avis de marché peut même constituer un motif d'exclusion39 .

n.

Les directives communautaires40 A. Les travaux publics

1. Principe

En juillet 1989, le Conseil a adopté une directive ayant pour objet de coordon- ner les procédures en matière de passation de marchés publics de travaux41

Elle visait à pallier les carences de la directive du Conseil du 26 juillet 1971 qu'elle a très largement amendée42

La directive s'applique, en principe, aux marchés publics de travaux, définis comme:

34 Art. 6 al. 6 «Soumissions».

35 Voir, par exemple, art. 14 al. 2 Al, 15 al. 2 JU, Il al. 5 LU et 13 al. 2 SZ.

36 Voir, par exemple, art. 7 litt. f BS, 13 al. 2 SZ et 7 al. 4 SG.

37 Art. 5 al. 6 TH.

38 Voir, par exemple, AG, AR ou OW.

39 Art. 4.21 litt. e OW.

40 L'ensemble des directives communautaires citées dans le présent rapport figurent dans l'ouvrage suivant: Droit européen de la construction, Actes et documents de droit communau- taire, édité par le Séminaire pour le droit de la construction, Université de Fribourg, Zurich 1991.

En général sur les directives européennes en matière de marchés publics, voir, notamment, GAUCH P., «Die Baukoordinierungsrichtlinie der EG», Droit de la construction 199111 pp. 1 ss;

MICHEL N., «Le droit européen de la construction», in Journées du droit de la construction, Fri- bourg 1991, pp. 1 ss; MICHEL N., L'ouverture européenne des marchés publics suisses, Fribourg, 1991; NELL P .G., «Beschaffungwesen», in Beziehungen Schweiz-EG, Abkommen, Gesetze und Richtlinie, Kommentare, Zurich 1991, ch. 4.5, pp. 1 ss; SCHMIDHAUSER B.!LAUTERBURG M.,

«Recht des offentlichen Beschaffungswesens», in Le droit suisse et le droit communautaire: con- vergences et divergences, Zurich 1990, pp. 261 ss.

4I Directive 89/440/CEE; ci-après «directive "travaux publics"». Pour une présentation géné- rale du contenu et de la portée de cette directive, voir GoODALL P., «1992, Public Purchasing in the Single Market: strategic decisions cannot be left to the public sector supply managers», Euro- pean Access 1991/3 pp. 17 ss.

42 Directive 71/305/CEE. Sur les faiblesses de cette directive, voir BRECHON-MOULENE Chr.,

«L'échec des directives Travaux et Fournitures de 1971 et 1976», in Les marchés publics euro- péens (Droit communautaire, droit comparé), Paris 1989, pp. 8 ss.

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des contrats à titre onéreux, conclus par écrit entre, d'une part, un entrepreneur et, d'autre part, un pouvoir adjudicateur( ... ) et ayant pour objet soit l'exécution, soit conjointement l'exécution et la conception des travaux relatifs à une des acti- vités visées à l'annexe Il ou d'un ouvrage ...

(art. 1 litt. a directive 89/440/CEE). Ce dernier est

le résultat d'un ensemble de travaux de bâtiment ou de génie civil destiné à remplir par lui-même une fonction économique ou technique

(art. 1 litt. c. directive 89/440/CEE).

Les Etats membres devaient prendre les mesures nécessaires pour se confor- mer à la directive amendée au plus tard une année après sa publication, soit le 19 juillet 1990. Toutefois, la Grèce, l'Espagne et le Portugal bénéficient d'un délai d'adaptation prolongé au 1•' mars 199243

2. L'ouverture des offres

Lors de l'ouverture des offres, le pouvoir adjudicateur44 doit établir un procès-verbal ayant pour but d'assurer une publicité suffisante à la procédure de sélection des offres. En particulier, le procès-verbal contient:

les noms des candidats ou soumissionnaires retenus et la justification de leur choix;

les noms des candidats ou soumissionnaires exclus et les motifs de leur rejet;

le nom de l'adjudicataire et la justification du choix de son offre (art. 5 bis par. 3 directive 89/440/CEE).

Lorsqu'il a passé le marché, le pouvoir adjudicateur a l'obligation d'en faire connaître le résultat par la publication d'un avis dans le Journal officiel des Communautés européennes45 au plus tard dans les quarante-huit jours après la passation du marché en question (art. 12 par. 5 et 6 litt. b directive 89/440/CEE). Le contenu de l'avis est déterminé par l'annexe Ede la directive (art. 12 par. 7 directive 89/440/CEE). La publication a lieu également dans les journaux nationaux, mais uniquement après l'envoi de l'avis au Journal offi- ciel des Communautés européennes (art. 12 par. 11, directive 89/440/CEE).

Un candidat écarté de la procédure peut demander au pouvoir adjudicateur les motifs de rejet de sa candidature ou de la soumission de son offre ainsi que, le cas échéant, le nom de l'adjudicataire. Le pouvoir adjudicateur doit fournir ces informations dans un délai de quinze jours à compter de la récep- tion de la demande (art. 5 bis par. l directive 89/440/CEE).

La publication de l'avis et la communication des motifs assurent la transpa- rence ex post46 de la procédure de passation des marchés en fournissant des

43 Art. 3 directive 88/ 440/CEE.

44 Les pouvoirs adjudicateurs sont l'Etat, les collectivités territoriales et les personnes morales de droit public, ou dans les Etats membres qui ne connaissent pas cette notion, les entités équivalen- tes définies à l'annexe I (art. 1 par. 1 litt. b directive 89/440/CEE).

45 Ci-après JOCE.

46 Par opposition à la transparence ex ante qui vise la phase précédant la publication des mar- chés; voir dans ce sens BoNCOMPAGNI G., «Les nouvelles directives "Marchés publics"», in Les marchés publics européens (Droit communautaire, droit comparé), Paris 1989, p. 19.

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informations suffisantes aux candidats pour qu'ils puissent éventuellement intenter un recours47En revanche, la directive n'impose pas une procédure publique lors de l'ouverture des offres. La présence des candidats lors de l'ouverture dépend donc des solutions propres à chaque Etat.

3. Les critères de sélection des offres a) Principe

Les articles 23 à 28 directive 71/305/CEE contiennent une liste exhaustive des critères de sélection qualitative que peut appliquer le pouvoir adjudicateur. Il doit procéder en deux étapes pour examiner ces critères.

Dans un premier temps, le pouvoir adjudicateur vérifie si des motifs d'exclusion de candidats au sens de l'article 23 sont réalisés. Dans l'affirma- tive, l'entrepreneur en cause est exclu d'office.

Dans un second temps, le pouvoir adjudicateur contrôle la capacité profes- sionnelle générale, économique et financière ainsi que technique des candidats non exclus par rapport aux exigences du marché public en cause. Cette vérifi- cation doit toujours intervenir avant que le pouvoir adjudicateur ne puisse passer à l'examen des critères d'attribution du marché48

Il est important de relever qu'au stade de la sélection qualitative, le pouvoir adjudicateur n'a pas le droit de négocier avec les candidats. Il peut exclusive- ment inviter ces derniers à compléter ou expliciter les documents soumis et ce dans les limites des articles 23 à 26 (art. 27 directive 71/305/CEE). Cette inter- diction faite au pouvoir adjudicateur de poser ultérieurement des exigences qualitatives supplémentaires a pour but de garantir la transparence de la sélec- tion.

b) Les motifs d'exclusion

L'article 23 directive 71/305/CEE distingue deux groupes d'hypothèses qui justifient l'exclusion d'office d'un entrepreneur: soit l'entrepreneur a commis une faute grave, soit il n'a pas rempli certaines obligations ou se trouve dans une situation financière précaire.

1 ° La commission d'une faute grave

Peut être exclu l'entrepreneur qui, en matière professionnelle, a commis une faute grave constatée comme telle par tout moyen que le pouvoir adjudicateur pourrait faire valoir (art. 23 litt. d directive 71/305/CEE). Il en va de même si l'entrepreneur s'est rendu gravement coupable de fausses déclarations en fournissant les renseignement exigés par le pouvoir adjudicateur (art. 23 litt. g directive 71/305/CEE).

Dans ces deux cas, la preuve de la réalisation de ces conditions incombe au pouvoir adjudicateur. Il doit démontrer l'existence d'éléments justifiant l'exclusion du candidat ou soumissionnaire pour ces motifs49

47 BONCOMPAGNI G., op. cit., p. 19.

48 Art. 20 directive 89/440/CEE.

49 Commission des Communautés européennes, Vade-mecum sur les marchés publics de la Com- munauté (87 /C 358/01), p. 34, ci-après Vade-mecum.

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2° Les autres cas

En premier lieu, peut être écarté tout entrepreneur qui est en état de faillite, de cessation d'activité, de règlement judiciaire ou de concordat ainsi que tout entrepreneur qui fait l'objet d'une procédure devant aboutir à une telle situa- tion (art. 23 litt. a et b directive 71/305/CEE). En deuxième lieu, l'entrepre- neur ne doit pas avoir fait l'objet d'un jugement ayant force de chose jugée le condamnant pour un délit affectant sa moralité professionnelle (art. 23 litt. c directive 71/305/CEE). Enfin, l'entrepreneur doit avoir rempli toutes ses obli- gations relatives au paiement des cotisations de sécurité sociale et de ses impôts et taxes selon les règles légales du pays adjudicateur50 (art. 23 litt. e et f directive 71/305/CEE).

Pour ces hypothèses de l'article 23 directive 71/305/CEE, le fardeau de la preuve repose sur l'entrepreneur. A la demande du pouvoir adjudicateur, il doit fournir les documents attestant qu'il ne se trouve pas dans l'une des situa- tions justifiant son exclusion. Cependant, le pouvoir adjudicateur ne peut poser des exigences excessives pour l'apport de la preuve. En effet, l'article 23 paragraphes 2 à 4 directive 71/305/CEE définit les documents qui constituent une preuve suffisante51

c) La vérification de la capacité professionnelle générale

Le pouvoir adjudicateur peut exiger d'un entrepreneur qu'il apporte la preuve de sa capacité professionnelle en général. Il appartient alors à l'entrepreneur de justifier de son inscription au registre professionnel dans les conditions pré- vues par la législation de l'Etat membre où il est établi (art. 24 directive 71/305/CEE).

Sans que cela ne soit expressément mentionné à l'article 24 directive 71/305/CEE, le principe même de la libre prestation de services, fixé dans la directive 71/304/CEE52, interdit au pouvoir adjudicateur d'exiger que le can- didat ou soumissionnaire soit inscrit dans le registre professionnel de son pro- pre pays53 De même, le pouvoir adjudicateur ne peut exiger du candidat qu'outre son inscription au registre professionnel, il soit au bénéfice d'une autorisation d'établissement émanant du gouvernement de l'Etat membre ou l'adjudication est faite54

d) La vérification de la capacité financière et économique

L'article 25 lettres a à c directive 71/305/CEE énumère de manière non exhaustive les références qui peuvent être demandées à un entrepreneur pour

50 S'agissant des cotisations sociales, le pouvoir adjudicateur peut également prendre en considé- ration les dispositions légales du pays où est établi l'entrepreneur.

51 Vade-mecum, p. 34.

52 Directive du Conseil du 26 juillet 1971 concernant la suppression des restrictions à la libre pres- tation de service dans le domaine des marchés publics de travaux et à l'attribution de marchés publics de travaux par l'intermédiaire d'agences ou de succursales.

53 Art. 3 directive 71/304/CEE. Voir dans ce sens, Vade-mecum, p. 34, ainsi que l'arrêt de la Cour du 10 février 1982, Affaire n° 76/81 Transporoute (ci-après «Arrêt Transporoute»), consid.

7, Recueil 1982, p. 426.

54 Arrêt Transporoute, consid. 6, Recueil 1982, p. 426.

94

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démontrer qu'il dispose de la capacité financière et économique exigée par le marché en cause55Il s'agit, notamment, de déclarations bancaires ou d'élé- ments comptables de l'entreprise (bilan, extraits de bilan, chiffre d'affaire, etc.). Si l'entrepreneur démontre qu'un juste motif l'empêche de fournir les pièces requises, il peut alors prouver sa capacité par d'autres documents.

Mais, dans ce cas, le pouvoir adjudicateur dispose d'un pouvoir d'apprécia- tion pour déterminer si ces pièces sont appropriées (art. 25 par. 3 directive 71/305/CEE).

Le pouvoir adjudicateur ne peut exiger que des références probantes, soit des références

objectivement nécessaires pour prouver la capacité économico-financière exigée des entrepreneurs par rapport aux travaux à réaliser56•

En toute hypothèse, afin d'assurer la transparence de la sélection, le pou- voir adjudicateur doit faire figurer dans l'avis ou l'invitation à soumissionner les références qu'il entend obtenir (art. 23 par. 2 directive 71/305/CEE).

e) La vérification de la capacité technique

La vérification de la capacité technique se déroule selon des modalités équiva- lentes à celle de la capacité financière, mais avec une différence majeure. En effet, l'article 26 directive 71/305/CEE contient une liste exhaustive des moyens de preuve que le pouvoir adjudicateur peut exiger. A nouveau, il doit préciser dans l'avis ou l'invitation à soumissionner les références qu'il entend obtenir. En particulier, le pouvoir adjudicateur peut demander une expérience spécifique pour le travail à réaliser57Cependant, la Cour de justice a précisé que les Etats membres devaient interdire dans les clauses contractuelles d'un marché la mention de spécifications techniques ayant pour effet de favoriser ou d'éliminer certaines entreprises58

f) Les listes officielles d'entrepreneurs agréés

L'article 28 paragraphe 1 directive 71/305/CEE prévoit la possibilité pour les Etats membres d'établir et de gérer des listes officielles d'entrepreneurs agréés. Les entrepreneurs inscrits sur de telles listes peuvent présenter à l'occa- sion d'un marché un certificat délivré par l'autorité compétente. En principe, les renseignements résultant de cette attestation ne peuvent être remis en cause par le pouvoir adjudicateur (art. 28 par. 2 et 3 directive 71/305/CEE). Toute- fois, ce dernier reste compétent

pour fixer le niveau de la capacité financière et des capacités techniques pour par- ticiper à un marché déterminé59

55 Arrêt de la Cour du 9 juillet 1987, Affaires jointes n°5 27 à 29/86 SA Constructions et entrepri- ses industrielles (CE!) et autres (ci-après «Arrêt CEi»), consid. 9-10, Recueil 1987, p. 3372.

56 Vade-mecum, p.35.

57 Arrêt de la Cour du 20 septembre 1988, Affaire 31/87 Gebroeders Beentjes, consid. 24.

58 Arrêt de la Cour du 22 septembre 1988, Affaire 45/87 c./ l'Irlande, consid. 7.

59 Arrêt CE!, consid. 26, Recueil 1987, p. 3375.

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Il n'est tenu d'accepter la capacité fixée par le classement que si ce dernier se fonde sur des critères équivalents quant au niveau de capacité exigé60 •

4. Le sort des variantes

Les variantes font l'objet d'un examen lors de l'adjudication. Elles sont admi- ses si trois conditions sont réalisées. Le pouvoir adjudicateur ne doit pas avoir expressément exclu les variantes dans l'avis de marché. Les vàriantes vérifient les conditions minimales fixées dans le cahier des charges établi par le pouvoir adjudicateur. Enfin, les modalités de soumission des variantes sont respectées (art. 20 bis par. 1et2 directive 89/440/CEE).

B. Les fournitures publiques 1. Principe

En mars 1988, le Conseil a adopté une nouvelle directive ayant pour objet de coordonner les procédures en matière de passation de marchés publics de fournitures61 afin de renforcer les règles de la précédente directive du Conseil du 21 décembre 197662

Cette directive s'applique en principe aux marchés publics de fournitures, définis comme:

des contrats conclus par écrit à titre onéreux ayant pour objet l'achat, le crédit bail, la location ou la location vente, avec ou sans options d'achat, de produits entre un fournisseur (personne pyhsique ou morale), d'une part et, d'autre part, un des pouvoirs adjudicateurs;

La livraison des produits peut comporter, à titre accessoire, des travaux de pose et d'installation. Cette notion très large des marchés publics de fournitu- res a pour effet d'élargir fortement le champ d'application de cette directive63 Cette directive aurait dû être concrétisée dans les Etats membres au plus tard le 1er janvier 1989, avec des exceptions jusqu'au 1er mars 1992 pour la Grèce, l'Espagne et le Portugal64

2. L'ouverture des offres

Lors de l'ouverture des offres, le pouvoir adjudicateur65 .doit établir un procès-verbal dont le contenu respecte les exigences minimales posées par la directive (art. 6 par. 6 directive 88/295/CEE). Comme pour les travaux

60 Arrêt CE!, consid. 27, Recueil 1987, p. 3375.

61 Directive 88/295/CEE; ci-après «directive "fournitures"».

62 Ci-après directive 77 /62/CEE. Sur les défauts de cette directive, voir BRECHON-MOULENE Chr., op. CÎ(., pp. 8 SS.

63 DELVOLVÉ P., «Synthèse des travaux», in Les marchés publics européens (Droit communau- taire, droit comparé), Paris 1989, pp. 77, 79.

64 Art. 30 directive 88/295/CEE.

65 Les pouvoirs adjudicateurs sont l'Etat, les collectivités territoriales et les personnes morales de droit public, ou dans les Etats membres qui ne connaissent pas cette notion, les entités équivalen- tes définies à l'annexe I (art. 1 par. 1. litt. b directive 77 /62/CEE).

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publics, lorsqu'il a passé le marché, le pouvoir adjudicateur a l'obligation d'en faire connaître le résultat par la publication d'un avis dans le Journal officiel des Communautés européennes au plus tard dans les quarante-huit jours après la passation du marché en question en respectant le contenu mini- mal exigé par la directive (art. 9 par. 3 à 5 directive 88/295/CEE). A nouveau, la directive n'impose pas une procédure publique lors de l'ouverture des offres. La présence des candidats ou soumissionnaires lors de l'ouverture dépend donc des solutions propres à chaque Etat.

3. Les critères de sélection des offres

Les règles applicables aux marchés publics de fournitures sont similaires à cel- les régissant les travaux publics. Une fois l'examen des motifs d'exclusion des fournisseurs effectué conformément à l'article 20 directive 77 /62/CEE, le pouvoir adjudicateur procède à la vérification de la capacité professionnelle générale, économique et financière ainsi que technique du fournisseur (art. 21 à 23 directive 77/62/CEE).

Les critères de sélection des offres sont identiques à ceux de la directive

«travaux publics», sous réserve de la vérification de la capacité technique des entrepreneurs. Compte tenu de la nature particulière des marchés publics de fournitures, l'article 23 directive 77/62/CEE prévoit des types de références exigibles selon la nature, la quantité et l'utilisation des produits à fournir.

Enfin, la directive ne prévoit pas de listes d'entrepreneurs agréés.

4. Le sort des variantes

A teneur de l'article 8 directive 77 /62/CEE, les fournisseurs peuvent présenter des variantes si le pouvoir adjudicateur ne les a pas expressément exclues dans l'avis de marché et si l'offre reste compatible avec le cahier des charges. Au surplus, le fournisseur est tenu de fournir tous les justificatifs et explications nécessaires à la vérification de la variante.

C. Les secteurs exclus

Les directives «travaux publics» et «fournitures» ne couvrent pas les marchés publics dans certains domaines qualifiés de «secteurs exclus». Ce vide juridi- que est assez largement comblé par la directive du Conseil du 17 septembre 1990 relative aux procédures de passation de marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications66

Les Etats membres doivent, en principe, adopter les mesures nécessaires pour se conformer à la directive au plus tard le 1er juillet 1992. Toutefois, cette date est reportée au ter janvier 1993 pour l'Espagne et au 1er janvier 1998 pour la Grèce et le Portugal67

66 Directive 90/531/CEE; ci-après «directive "secteurs exclus"». Sur le champ d'application détaillé de cette directive et les nombreuses exceptions, voir art. 2 et 12 (principe) et art. 3 à 11 (déro- gations). Voir également le chapitre II de l'ouvrage Les marchés publics européens (Droit commu- nautaire et droit comparé), Paris 1989, pp. 23 ss, consacré aux secteurs traditionnellement exclus.

67 Art. 37 directive 90/531/CEE.

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1. L'ouverture des offres

La directive n'impose pas de procédure particulière pour l'ouverture des offres. Elle se limite à exiger du pouvoir adjudicateur68 qu'il communique à la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la passation d'un mar- ché, les résultats de la procédure en utilisant l'avis figurant à l'annexe XV de la directive qui définit les informations à fournir (art. 18 par. 1 directive

90/531/CEE). .

Les indications, prévues dans la section 1 de l'annexe XV, qui sont relatives, notamment, au pouvoir adjudicateur, à la nature du marché, au type de pro- cédure utilisée (ouverte, restreinte ou négociée), au nombre d'offres reçues et au candidat choisi (nom et adresse) font ensuite l'objet d'une publication dans le Journal officiel des Communautés européennes (art. 18 par. 2 directive 9015311 CEE). En revanche, les éléments contenus dans la section ll de l'annexe XV, qui portent en particulier sur la valeur du marché, les variantes et les critères d'attribution, sont destinés exclusivement à la Commission. Ces informations peuvent cependant être publiées sous une forme simplifiée à des fins statistiques (art. 18 par. 3 directive 90/531/CEE).

2. Les critères de sélection des offres a) Principe

La directive «secteurs exclus» ne reprend pas le système utilisé par les directi- ves «travaux publics» et «fournitures» de sélection en deux étapes. Elle a adopté une procédure plus souple qui permet au pouvoir adjudicateur d'éta- blir et de gérer un système de qualification des candidats (art. 24 par. 1 direc- tive 90/531/CEE).

La directive pose uniquement les grandes lignes du système en précisant qu'il peut comprendre plusieurs stades de qualification et en exigeant que les critères et règles utilisés soient objectifs (art. 24 par. 2 directive 90/531/CEE).

Ce dernier point est important, car il a pour but d'assurer la transparence de la procédure de la qualification tout en laissant une certaine marge de manœuvre au pouvoir adjudicateur.

De plus, la directive impose des limites au pouvoir d'appréciation de l'auto- rité lorsqu'elle prend une décision de qualification ou met à jour les critères et règles. Elle ne peut imposer des conditions administratives, techniques ou financières à certains candidats qui n'auraient pas été imposées à d'autres.

Elle ne peut pas plus exiger des essais ou des justifications qui feraient double emploi avec des preuves objectives déjà disponibles (art. 24 par. 5 directive 90/531/CEE).

Le système de qualification choisi par un pouvoir adjudicateur doit être publié dans le Journal officiel des Communautés européennes. L'avis doit res- pecter le contenu minimal fixé à l'annexe XIII de la directive et indiquer, notamment, l'objet et la durée du système, ainsi que les modalités d'accès aux règles et critères applicables (art. 24 par. 9 directive 90/531/CEE). En

68 Sur la notion très large de «pouvoir adjudicateur» au sens de cette directive, qui englobe égale- ment des organismes privés, voir DELVOLVÉ P., op. cil., pp. 77, 81.

(14)

l'absence de système de qualification, le pouvoir adjudicateur doit définir les règles et critères dans l'avis de marché qui doit être rédigé conformément à

!'Annexe XII, litt. A, B ou C, selon qu'il s'agisse d'une procédure ouverte, restreinte ou négociée, ou bien selon l'Annexe XIV pour les avis périodiques (art. 16 par. 1 et 2 directive 90/531/CEE).

b) La procédure de qualification

Les candidats peuvent obtenir du pouvoir adjudicateur les règles et critères de qualification appliqués par celui-ci ainsi que leurs modifications ultérieures (art. 24 par. 3 directive 90/531/CEE). Sur la base de ceux-ci, les candidats ont la faculté de déposer une demande de qualification auprès du pouvoir adjudi- cateur. L'article 24 paragraphe 4 directive 90/531/CEE impose à ce dernier de se prononcer dans un délai raisonnable sur cette demande. Toutefois, si la décision ne peut être prise avant six mois, le pouvoir adjudicateur doit infor- mer dans les deux mois le demandeur de la date et de la prise de décision et des motifs qui justifient un tel délai.

3. Le sort des variantes

Le cahier des charges établi par le pouvoir adjudicateur précise si des variantes sont admissibles et, dans l'affirmative, les conditions minimales qu'elles doi- vent respecter. Par la suite, il appartient à l'autorité de se prononcer sur les variantes, qui respectent les exigences requises, au moment de l'adjudication (art. 27 par. 3 directive 90/531/CEE).

D. Les services

La Commission a proposé au Conseil le 13 décembre 1990 un projet de direc- tive «services»69Ce projet de directive a un champ d'application très large et vise à couvrir tous les secteurs non visés par les directives «travaux publics»,

«fournitures» et «secteurs exclus».

S'agissant des critères de sélection qualitative, le projet reprend les principes posés dans les autres directives: les modalités d'exclusion et de vérification des offres sont similaires aux directives «travaux publics» et «fournitures».

HI. Convergences et divergences des droits suisses et communautaires A. L'ouverture des offres

Le droit communautaire, comme la majorité des cantons suisses, prévoit que l'ouverture des offres se déroule selon une procédure particulière et fait l'objet de la rédaction d'un procès-verbal. Toutefois, les directives communautaires

69 Proposition de directive du Conseil portant coordination des procédures de passation des mar- chés publics de services (Corn [90] 372 final, JOCE n° C 23/1, 31janvier1991).

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sont beaucoup plus précises quant au contenu minimum du procès-verbal, notamment avec l'obligation d'indiquer le nom des candidats retenus ou exclus ainsi que les motifs de cette décision comme le nom de l'adjudicataire.

Les directives européennes ne prévoient pas la présence obligatoire des sou- missionnaires. Cette apparente lacune se justifie par le degré de précision des directives aussi bien pour le déroulement de la procédure que pour la défini- tion des critères objectifs de sélection des offres. En effet, si la présence des soumissionnaires peut, le cas échéant, éviter un abus de pouvoir de la part d'un pouvoir adjudicateur disposant d'un très large pouvoir d'appréciation, comme c'est le cas dans la plupart des cantons, cette présence devient inutile dans le cadre d'une procédure transparente se fondant sur l'application de cri- tères objectifs. Ce d'autant plus que les directives assurent aux soumissionnai- res des voies de recours adéquates.

B. La sélection des offres

La question de la sélection des offres en droit suisse et européen est marquée par l'opposition fondamentale entre le pouvoir d'appréciation et la transpa- rence.

De nombreux critères d'exclusion des offres figurant dans l'ordonnance fédérale sur les soumissions et la plupart des lois cantonales sont peu précis et permettent aux pouvoirs adjudicateurs d'écarter des offres pour des motifs de pure opportunité70Ils sont révélateurs de la politique de nombreux cantons qui considèrent l'adjudication de travaux publics comme une part intégrante de leur politique économique71, le souci de la libre concurrence passant après celui de préserver les intérêts locaux72

Cette situation résulte largement des modalités de mise en œuvre de ces cri- tères par les pouvoirs adjudicateurs. En effet, l'exclusion pour manque de garantie dans l'exécution du contrat ou pour défaut de connaissances et d'expérience suffisante, est en soit admissible et même légitime. Les problè- mes surgissent lorsque de tels critères sont utilisés à des fins protectionnistes.

Dans ce sens, les directives européennes, qui fixent les lignes directrices dont le rôle premier est d'assurer une libre concurrence à l'échelle du grand marché européen, ont créé un mécanisme exemplaire73 L'élément moteur du fonc- tionnement du système est l'exigence d'objectivité des critères de sélection. Il doit exister un lien intrinsèque entre l'exigence posée et le marché en cause.

Simultanément, les directives circonscrivent les moyens de preuve exigibles par le pouvoir adjudicateur et garantissent simultanément que les soumission- naires puissent expliciter leur position.

Parmi les différences importantes entre les deux droits figure notamment l'interdiction fondamentale faite en droit européen au pouvoir adjudicateur d'exiger que le soumissionnaire soit établi ou inscrit dans le registre profes- sionnel de son pays. Cette exigence, qui découle du principe de la libre circula-

70 Commission des cartels, op. cit., pp. 272 ss.

71 MANFRINI P.L., op. cit., ch. 6.

72 NELL Ph.G., op.cil., p. 9; SCHMIDHAUSER B./LAUTERBRUG M., op. cit., pp. 284 S.

73 Voir, supra, le point Il. A. 3.

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tion des services, exclut la forme la plus sommaire du protectionnisme que l'on retrouve encore dans plusieurs cantons74Cet élément doit cependant être relativisé par le fait qu'à l'heure actuelle, seuls 2% des marchés publics de la Communauté sont attribués à des entreprises d'un Etat membre distinct de celui qui a fait l'appel d'offre 75

C. Le sort des variantes

Le traitement des variantes apparaît similaire dans les deux législations, dans la mesure où le droit cantonal les autorise. En effet, en principe, la possibilité de présenter des variantes résulte du cahier des charges qui fixe les conditions de celles-ci. Le sort des variantes dépend finalement de la procédure d'adjudi- cation.

Conclusion

En matière de sélection des offres, les ordonnances fédérales et les textes can- tonaux échouent à l'examen de l'eurocompatibilité. Si quelques critères de sélection, comme l'obligation de déposer les offres à une échéance déterminée, sont admissibles au regard de l'égalité de traitement des soumissionnaires, la majorité des critères posent des problèmes au regard des exigences de la libre concurrence, en raison, principalement, de leur mise en œuvre. Parallèlement, le degré de publicité assuré en Suisse à la procédure d'ouverture et de sélection des offres apparaît inférieur aux exigences européennes.

Dans l'optique du grand marché de 1993 et d'un espace économique euro- péen, la mise en œuvre du principe de libre concurrence dans les marchés publics remplit une fonction importante. Il implique non seulement des modi- fications législatives mais aussi et surtout un changement des mentalités. A l'heure actuelle, les pouvoirs publics qui utilisent les marchés publics comme un moyen d'action de l'Etat n'ont pas encore accepté d'être soumis aux exi- gences constitutionnelles applicables à l'administration de promotion76Dans le futur, ils devront admettre que les marchés publics soient régis par les prin- cipes de la libre concurrence et de liberté de circulation des services. Dans ce contexte, au lieu de servir à limiter la concurrence, les critères de sélection des offres auront pour fonction de garantir la transparence et l'efficacité du mar- ché.

74 Commission des cartels, op. cit., pp. 198 ss.

75 L'AGEFJ, le quotidien suisse des affaires et de la finance, mardi 29 octobre 1991, p. 3.

76 Dans ce sens, voir MANFRINI P.L., op. cit., ch. 11 ss.

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Liste des lois citées

«Achats»: Ordonnance fédérale du 8 décembre 1975 sur les achats de la Confédé- ration, RS 172.056.13.

«Soumissions»: Ordonnance fédérale du 31 mars 1971 sur la mise en soumission et l'adjudication de travaux et de fournitures du bâtiment et du génie civil par la Confédération, RS 172. 056. 12.

AG: Grossriitliche Verordnung vom 16. Juli 1940 über die Vergebung ôffentlicher Arbeiten und Lieferungen.

AI: Verordnung vom 28. November 1988 über die Vergebung von Arbeiten.

AH: Verordnung vom 21. August 1919 über die Vergebung von Arbeiten und Liefe- rungen für den Staat.

BL: Landratsbeschluss vom 22. August 1887 betreffend das Submissionswesen.

BS: Verordnung vom 23 Juni 1981 betreffend die Ausschreibung und Vergebung von Bauarbeiten und Lieferungen für bauliche Einrichtungen durch die ôffentliche Verwaltung.

BE: Submissionsverordnung vom 23. Dezember 1980.

FR: Règlement du 16 avril 1974 concernant les soumissions et les adjudications des travaux et fournitures de l'Etat.

GE: Règlement du 9 janvier 1985 concernant la mise en soumission et l'adjudication des travaux publics, des travaux en bâtiment et des fournitures qui s'y rappor- tent par l'Etat de Genève ...

GR: Verordnung vom 28. Mai 1919 über das Submissionswesen.

JU: Ordonnance du 16 mai 1989 concernant l'adjudication des travaux financés par l'Etat.

LU: Verordnung vom 9. Juli 1973 zum Submissionsgesetz.

OW: Provisorische Weisungen vom 13. April 1976 über die Ausschreibung und Verge- bung von Arbeiten oder Lieferungen.

SH: Verordnung vom 2. November 1976 des Regierungsrates des Kantons Schaff- hausen betreffend Vergebung von Arbeiten und Lieferungen für den Staat.

SZ: Verordnung vom 6. Februar 1976 über die Vergebung von Arbeiten und Liefe- rungen.

SO: Verordnung vom 19. Dezember 1980 über die Vergebung von Arbeiten und Lie- ferungen des Baugewerbes für den Staat.

SG: Verordnung vom 8. Juli 1931 über die Vergebung von staatlichen Bauarbeiten.

TH: Verordnung vom 21. Mai 1975 des Regierungsrates über die Ausschreibung und Vergebung von Arbeiten und Lieferungen bei Hoch- und Tiefbauten des Staates.

TI: Legge del 12 settembre 1978 sugli appalti.

UR: Verordnung vom 17. Februar 1960 über das Verfahren bei der Vergebung von Arbeiten und Lieferungen durch die offentliche Hand.

VD: Règlement du 2 février 1977 concernant !'adjudication des travaux publics de l'Etat et des fournitures qui s'y rapportent.

VS: Reglement vom 9. April 1976 über die Ausschreibung und die Vergebung von Arbeiten und Lieferungen.

ZG: Verordnung vom 20. November 1967 über die Vergebung von Arbeiten und Lie- ferungen.

ZH: Verordnung vom 19. Dezember 1968 über die Vergebung von Arbeiten und Lie- ferungen für den Staat.

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