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RÉFORME INSTITUTIONNELLE, VÉRIFICATION DES ANTÉCÉDENTS ET SÉLECTION, ET ÉTAT DE DROIT

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FÉVRIER 2021

SRI LANKA : NOTE D’INFORMATION 4

RÉFORME INSTITUTIONNELLE,

VÉRIFICATION DES ANTÉCÉDENTS ET SÉLECTION, ET ÉTAT DE DROIT

«…intègre tout l’éventail des mesures judiciaires et non judiciaires, y compris, entreautres, les poursuites individuelles, les réparations, la recherche de la vérité, la réforme des institutions, le contrôle des agents publics et des fonctionnaires, ou une combinaison judicieuse de ces mesures, en vue,

notamment, de garantir l’établissement des responsabilités, de servir la justice, d’offrir une réparation aux victimes, de promouvoir la concorde et la réconciliation, de mettre en place un contrôle indépendant du système de sécurité, de restaurer la confiance dans les institutions de l’État et de promouvoir l’état de droit … »

Résolution 30/1 du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies

RÉFORME INSTITUTIONNELLE: UN PAS EN AVANT, DEUX PAS EN ARRIÈRE

La justice transitionnelle recouvre « l’éventail complet des divers processus et mécanismes mis en œuvre par une société pour tenter de faire face à des exactions massives commises dans le passé, en vue d’établir les responsabilités, de rendre la justice et de permettre la réconciliatio ».1 Ces mécanismes incluent l’engagement de poursuites pénales, l’établissement de la vérité, les réparations et les garanties de non-répétition, telles que des réformes institutionnelles, y compris l’instauration de mécanismes de vérification des antécédents.2 Les enquêtes et les poursuites pour les crimes internationaux graves constituent une composante essentielle de la justice transitionnelle dans la mesure où elles contribuent à lutter contre l’impunité en envoyant un signal fort indiquant que ces crimes ne sont pas tolérés dans le cadre de l’État de droit. Par ailleurs, la réforme des institutions qui ne respectent pas les droits humains, en particulier dans les secteurs de la sécurité et de la justice, permet à la fois de démanteler les mécanismes structurels qui favorisent les violations tout en légitimant les institutions qui visent à prévenir la répétition des violations.3

Dans le contexte du Sri Lanka, les réformes institutionnelles, en particulier la mise en place de mécanismes de vérification des antécédents, constituent une composante essentielle du programme holistique de justice transitionnelle prévu par la Résolution 30/1 dans l’objectif de promouvoir les actions de prévention et les garanties de non-répétition. L’instauration de mécanismes de vérification des antécédents ne vise pas uniquement à établir les responsabilités pour les violations des droits humains commises dans le passé ; son objectif principal est de renforcer la confiance de la population et la légitimité des institutions publiques tout en neutralisant et en démantelant

les structures impliquées dans de graves violations des droits humains commises dans le passé. La résolution 30/1 a souligné le rôle fondamental que jouent les réformes institutionnelles pour renforcer l’État de droit, en mentionnant en particulier les réformes constitutionnelles, la réforme du secteur de la sécurité, et en soulignant notamment la nécessité de renforcer l’indépendance du pouvoir judiciaire et de la Commission nationale des droits de l’homme. La résolution précise également explicitement qu’il est nécessaire de faire en sorte que les responsables militaires et de la sécurité impliqués dans des violations flagrantes des droits humains, notamment la torture, le viol et les violences sexuelles, répondent de leurs actes en procédant à une vérification de leurs antécédents et en s’assurant qu’ils soient exclus de toute fonction dans le secteur de la sécurité et dans les opérations de maintien de la paix.

Le gouvernement de coalition a renié l’engagement qu’il avait pris en 2015 de contrôler et de vérifier les antécédents des agents de l’État et des membres des services de sécurité chargés de mettre en œuvre les politiques de réforme. Le Sri Lanka est un petit pays monopolisé par une élite politique anglophone dont les alliances partisanes de circonstance tendent à refléter des intérêts personnels plutôt que des convictions politiques

; il est, de ce fait, extrêmement difficile de démêler les réseaux de pouvoir, de corruption, de népotisme et de copinage. Le Gouvernement sri-lankais a accepté à contrecœur le processus de vérification des antécédents exigé par les Nations Unies pour tous les Casques bleus et ce processus, malgré certains obstacles, semble commencer à porter ses fruits.

NOMINATIONS PROBLÉMATIQUES

Le gouvernement de coalition dirigé par le président Sirisena a nommé, de façon éhontée, plusieurs membres des forces de sécurité à des postes de pouvoir clés alors qu’ils étaient les auteurs présumés de violations des droits humains. Le cas le plus emblématique est celui d’un policier à la retraite rappelé en service actif par le gouvernement de coalition alors qu’il avait été en charge de ce que les Nations Unies ont désigné comme le lieu de torture le plus notoire du pays (le quartier général de la Division des affaires criminelles (CID) également connu sous le nom de « quatrième étage ») ; cet homme a été nommé à un poste de responsabilité au sein des services de renseignement avant d’être intégré, en 2016, à la délégation gouvernementale qui a représenté le Sri Lanka à une session du Comité des Nations Unies contre la torture à Genève.4 Le tollé suscité par la présence de Sisira Mendis aurait pu faire supposer que le gouvernement de coalition chercherait à le mettre discrètement à la retraite, mais, bien au contraire, son mandat a été renouvelé.5

Cette décision désastreuse a été suivie entre 2015 et 2019 par de nombreuses autres nominations problématiques d’individus dont les antécédents n’ont manifestement pas été vérifiés - au sein de l’Autorité chargée de la protection des témoins, à des postes diplomatiques, au sein de l’armée, de la police et de la marine. Il convient de noter que Shavendra Silva - qui a été cité par Michelle Bachelet comme impliqué, selon certaines informations, dans des crimes de guerre présumés - a été promu

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à plusieurs reprises par le gouvernement de coalition ; de manière ironique, il a même été placé à la tête du service des droits humains de l’armée.

UNE NOUVELLE VAGUE DE NOMINATIONS PROBLÉMATIQUES

Les cas d’officiers militaires à la retraite rappelés en service actif pour être nommés à des postes de responsabilité au sein du gouvernement se sont multipliés suite à l’alternance politique de 2019. Un grand nombre d’anciens officiers militaires, d’homme politiques, d’anciens chefs paramilitaires et d’ex-policiers ont été nommés ou promus à des postes sans aucune vérification de leurs antécédents.6 Un grand nombre d’entre eux ont également joué un rôle actif dans la phase finale du conflit civil, sont accusés de crimes de guerre, font actuellement l’objet d’enquêtes et, dans certains cas, ont été inculpés.7

Un tiers des membres du gouvernement faisaient l’objet d’enquêtes ou de poursuites pénales au moment de leur nomination en 2020. On pourrait même affirmer que ce sont les individus qui risquaient le plus d’être écartés en raison de leur conduite passée qui ont été nommés en priorité à ces postes à responsabilité.

LES CONTRE-ARGUMENTS DES AUTORITÉS SRI- LANKAISES

Le Secrétaire à la Défense sri-lankais, le général Kamal Gunaratne (qui fait également l’objet, selon le HCDH, d’allégations de crimes de guerre), a défendu la décision de nommer au sein de l’administration des militaires, qui étaient comme lui à la retraite, au motif que ces personnes étaient disciplinées et efficaces ; il a ajouté que le refus de leur offrir un emploi après la retraite violerait les politiques d’égalité d’opportunités. Cet argument ignore l’ampleur de la militarisation actuelle de tous les secteurs clés du pays - aéroports, ports, agriculture, foncier, protection sociale, douanes, distribution alimentaire, police et services de renseignement. Il ne répond pas non plus aux allégations crédibles de crimes de guerre commis durant le conflit qui visent un grand nombre de ces individus, y compris le général Gunaratne lui- même.

Le gouvernement sri-lankais soutient qu’il s’agit de simples allégations et non de condamnations prononcées par un tribunal.

Bien que ces allégations n’aient pas été examinées dans le cadre d’une procédure judiciaire, elles constituent néanmoins des conclusions issues d’enquêtes indépendantes des Nations Unies.

Le gouvernement sri-lankais a lui-même reconnu qu’il n’avait pas mis en œuvre l’obligation de demander des comptes aux auteurs de crimes internationaux graves qu’il avait pourtant souscrite dans le cadre d’un engagement conjoint, en octobre 2015, envers la communauté internationale, aux termes de la résolution 30/1, au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. La création d’une Cour hybride a été considérée comme une mesure essentielle pour faire en sorte que les informations relatives à des crimes de guerre présumés soient examinées dans le cadre de procédures judiciaires. La résolution 30/1 prévoyait la nomination de juges et de procureurs internationaux afin de garantir l’indépendance et la crédibilité de ce processus et de répondre à la méfiance dont avaient fait preuve les victimes, les Nations Unies et la communauté internationale face aux processus précédents d’établissement des responsabilités pour les violations des droits humains commises par des agents de l’État sri-lankais. Par exemple, un ancien chef d’état-major de

l’armée, Jagath Jayasuriya, ciblé par des poursuites pénales au Brésil pour le rôle qu’il avait joué dans la perpétration de crimes de guerre a tout simplement regagné le Sri Lanka plutôt que de se défendre contre des accusations devant un tribunal impartial. Alors qu’il est impliqué dans une simple affaire de fraude électronique présumée qui fait l’objet de poursuites aux États-Unis, un ancien ambassadeur et parent de Rajapaksa tente maintenant de revendiquer son immunité et invoque la victimisation politique dont il serait l’objet pour se soustraire à la justice.8

Lorsque Shavendra Silva a été cité par le gouvernement des États-Unis en lien avec de graves violations présumées des droits humains, le Sri Lanka a rétorqué qu’il n’y avait aucune allégation avérée contre son chef d’état-major de l’armée9 et ceci, en dépit des recommandations de la commission d’enquête nationale du Sri Lanka, la Commission Paranagama, qui avait demandé l’ouverture d’une enquête judiciaire pour examiner les allégations relatives à l’incident du « drapeau blanc » au cours duquel des dirigeants politiques des LTTE ont été exécutés à la suite d’une reddition qui avait été négociée. Silva aurait été présent lors de la reddition de ces individus - ce qu’il n’a jamais nié. La Commission Paranagama a également noté l’existence d’allégations crédibles qui, si elles étaient prouvées selon les normes requises,

pourraient indiquer que certains membres des forces armées ont commis, au cours de la phase finale du conflit, des actes constitutifs de crimes de guerre engageant une responsabilité pénale individuelle.10 Ce constat a été fait il y a plus de 5 ans, et aucune mesure n’a été prise, depuis lors, par les autorités sri- lankaises, pour enquêter sur ces faits.

VÉRIFICATION DES ANTÉCÉDENTS ET OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES

À la fin de l’année 2020, 665 Casques bleus sri-lankais étaient déployés dans le cadre d’opérations de maintien de la paix des Nations Unies,11 principalement au Soudan du Sud, au Mali, en RCA et au Liban. Le Gouvernement sri-lankais n’a de cesse de souligner les bénéfices financiers apportés par la participation du pays à des opérations de maintien de la paix12 et d’exprimer sa satisfaction face à la « reconnaissance internationale »13 de sa contribution dans ce domaine. Malheureusement, des troupes sri-lankaises continuent à être déployées au sein de forces onusiennes, alors même que le gouvernement sri-lankais se vante de n’avoir demandé à aucun responsable des forces de sécurité de répondre de ses actes.14 Non seulement les autorités sri- lankaises ont renié, de ce fait, les engagements pris devant le Conseil des droits de l’homme mais elles ont, en outre, nommé, en août 2019, Shavendra Silva chef d’état-major de l’armée. Cette nomination controversée a conduit les Nations Unies à annoncer la suspension des déploiements de Casques bleus sri-lankais « sauf dans les cas où cette suspension exposerait les opérations des Nations Unies à de graves risques opérationnels ».15 En octobre 2019, le Département des opérations de maintien de la paix des Nations Unies a précisé que seuls 25% des militaires sri-lankais seraient remplacés - dont le contingent sri-lankais au Liban.16 Peu de temps après, des troupes sri-lankaises ont rejoint l’opération de maintien de la paix au Mali ; avant leur déploiement, ces troupes ont salué le chef d’état-major de l’armée, Shavendra Silva, non pas une mais deux fois, un geste qui a embarrassé les Nations Unies.17 La Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, s’est dite profondément préoccupée par la nomination de Shavendra Silva, qui remet en cause l’engagement du Sri Lanka à promouvoir la justice et l’établissement des responsabilités.18 Les gouvernements des

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États-Unis,19 du Canada20 et de l’Union européenne21 ont exprimé les mêmes préoccupations.

La décision annoncée par les Nations Unies de suspendre le déploiement de militaires sri-lankais n’a jamais été suivie d’effet.

Selon le journal d’État sri-lankais, cela serait dû à de « vives objections formulées par le ministère des Affaires étrangères».22

Les statistiques onusiennes - voir tableau ci-dessous - montrent que le nombre de militaires sri-lankais déployés dans les

opérations de maintien de la paix demeure constant depuis plusieurs années.

ABSENCE D’ÉTABLISSEMENT DE RESPONSABILITÉS POUR DES ALLÉGATIONS PASSÉES D’EXPLOITATION ET D’ABUS SEXUELS (EAS)

Les militaires sri-lankais affectés en Haïti en 2004-7 ont été impliqués dans des cas d’exploitation sexuelle systématique et à grande échelle d’enfants ; ces cas ont fait l’objet d’une enquête des Nations Unies.30 Certains militaires sri-lankais ont été rapatriés à la suite de cette enquête, mais aucun d’entre eux n’a été incarcéré ; les commandants de ces troupes qui, pendant de nombreuses années, n’avaient pris aucune mesure pour prévenir et empêcher l’exploitation sexuelle systématique d’enfants ont continué à bénéficier de promotions. En 2016, le Comité des Nations Unies contre la torture a demandé au Sri Lanka des informations sur l’état des enquêtes et des poursuites engagées contre les militaires rapatriés d’Haïti, mais le gouvernement n’a pas encore répondu.31 En 2017, une adolescente haïtienne a affirmé qu’un Casque bleu sri-lankais l’avait violée, mais l’armée a dépêché un général pour enquêter sur ce cas, alors que ce militaire faisait lui-même l’objet d’allégations de crimes de guerre.32

La décision de ne pas suspendre le déploiement des Casques bleus sri-lankais est contraire à la politique des Nations Unies de tolérance zéro à l’égard des cas d’EAS. Cette décision ne peut que surprendre, compte tenu de la déclaration du Sous- secrétaire général aux opérations de paix, qui a indiqué en janvier 2020 que « les Nations Unies s’engagent à lutter contre les abus sexuels commis par ses Casques bleus contre des femmes en Haïti »33 ; il convient, en outre, de souligner qu’en Haïti les allégations d’EAS impliquent également l’exploitation sexuelle d’enfants.

PROJET PILOTE AU SRI LANKA DE VÉRIFICATION DES ANTÉCÉDENTS DES MILITAIRES DÉPLOYÉS DANS LE CADRE D’OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE LA PAIX

En réponse au rapport d’enquête du HCDH et à ses conclusions concernant les forces de sécurité sri-lankaises, il a été décidé de modifier la politique de déploiement des militaires destinés à intégrer des d’opérations de maintien de la paix des Nations Unies afin d’inclure un mécanisme de vérification des antécédents. Il a été convenu, en 2016, que la Commission des droits de l’homme du Sri Lanka (HRCSL) examinerait, dans le cadre d’un projet pilote, les antécédents de ces individus avant leur déploiement éventuel au sein d’opérations de maintien de la paix des Nations Unies ; il était prévu que, s’il se révélait efficace, ce mécanisme serait ensuite adopté dans d’autres pays.34 Le processus consistait à vérifier les antécédents et à écarter les membres de l’armée ou de la police susceptibles d’avoir été impliqués dans des violations du droit international humanitaire et du droit relatif aux droits humains du fait de leur participation aux hostilités durant le conflit au Sri Lanka. Le HCDH à Genève était au départ impliqué, mais la responsabilité du processus de vérification a été ensuite confiée à la HRCSL qui a pris en charge le processus en faisant appel à des volontaires des Nations Unies. Les problèmes qui ont émergé quasiment dès le lancement de ce programme de vérification des antécédents ont affecté les conditions du premier déploiement de troupes concernées par ce processus.

Le 19 février 2018, l’armée sri-lankaise a envoyé des troupes au Liban sans attendre que la HRCSL ait terminé le processus de vérification des antécédents. Cela a entraîné la suspension de tous les déploiements jusqu’à la fin de l’année, lorsqu’un plan a été mis en place afin d’assurer une meilleure coordination en la matière.

RÉSULTATS POSITIFS OBTENUS PAR LE MÉCANISME DE VÉRIFICATION DES ANTÉCÉDENTS

Lorsque le processus de vérification des antécédents était effectué conjointement à Genève par le HCDH et à Colombo par la Commission sri-lankaise des droits de l’homme, cela semble avoir abouti à des résultats positifs car cela a permis d’écarter des individus impliqués dans des violations des droits humains ; si ces individus avaient été mis à la retraite ou renvoyés de l’armée, cela aurait pu permettre de favoriser progressivement des TABLEAU DES MILITAIRES

SRI-LANKAIS DÉPLOYÉS 23

MINUSCA - République centrafricaine

MINURSO – Sahara occidental MINUSMA - Mali

FINUL – Liban27

UNMISS – Soudan du Sud NOMBRE TOTAL DE MILITAIRES DÉPLOYÉS

Déc 2020

113

3 241 138 170 665

111

2 243 14328 169 669

111

2 250 149 170 684

116

4 203 149 173 65129

116

4 203 149 173 676

120

4 205 150 190 676

124

4 167 151 203 656

118

3

149 200 501 Nov

202024 Sep

2019 Jan

2019 Jan

2018 Jan 201726 Jan

202025 Août 2019 L’ONU annonce sa décision de «

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changements au sein de l’armée tout en contribuant à la réforme absolument nécessaire du secteur de la sécurité. En octobre 2018, le commandant du contingent sri-lankais au Mali a été rapatrié suite à la publication de nouvelles informations indiquant qu’il avait été impliqué dans des combats de première ligne en 2009 alors qu’il servait sous le commandement de Shavendra Silva qui dirigeait la 58e division.35 Cela a envoyé un signal clair à l’armée concernant la responsabilisation des commandants de tous grades.

LA CRISE ACTUELLE DU PROCESSUS DE VÉRIFICATION DES ANTÉCÉDENTS

Depuis le changement de gouvernement au Sri Lanka, le HCDH (§28) a indiqué que la HRCSL avait dorénavant perdu son indépendance et est désormais dirigée par un ancien ministre.

Cette commission est également maintenant principalement composée de Cinghalais.36 Le rapport de la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme confirme également que le Département des opérations de maintien de la paix n’est plus en mesure de certifier que les troupes sri-lankaises font l’objet d’une vérification des antécédents et d’une sélection adéquates.

Le HCDH doit maintenant prendre d’urgence des mesures pour rapatrier le processus de sélection à Genève.37 Le déploiement au sein de missions de maintien de la paix de militaires sri-lankais susceptibles d’être impliqués dans des crimes internationaux graves constitue une violation de la politique de diligence raisonnable adoptée par les Nations Unies en 2011 ; cette politique vise, en effet, à prévenir le risque d’exposer des civils à des Casques bleus pouvant commettre de graves violations du droit humanitaire international, du droit international relatif aux droits humains ou du droit des réfugiés dans le cadre de missions de maintien de la paix.

RÉFORME DU SECTEUR DE LA SÉCURITÉ

La réforme du secteur de la sécurité a été structurée autour des objectifs de « redimensionnement » et de « restructuration

» de l’armée plutôt qu’en termes de lutte contre l’impunité.38

La Banque mondiale a noté que le nombre de militaires en pourcentage de la population active avait, en réalité, augmenté après la fin du conflit,39 ce qui se reflète également dans le budget alloué au secteur militaire au Sri Lanka.40 Plus d’une décennie après la fin du conflit, la majorité des contingents des forces armées restent déployées dans le nord-est de l’île et ils proviennent pour l’essentiel de la communauté majoritaire cinghalaise. Après la fin du conflit, les militaires implantés dans les anciennes zones de conflit ont diversifié leurs activités en investissant dans des secteurs économiques comme l’agriculture et le tourisme, à la fois pour maintenir une forte présence militaire et pour retirer des bénéfices financiers41.

La police sri-lankaise a également bénéficié durant des décennies de programmes internationaux de formation et de renforcement des capacités dont le rythme s’est accéléré après la fin du conflit. Ces programmes portaient notamment sur le maintien de l’ordre au sein des communautés locales42 considéré comme faisant partie intégrante de la réforme du secteur de la sécurité.43

Des initiatives ont également été déployées pour favoriser le recrutement d’un plus grand nombre de policiers tamouls, y compris de femmes, et pour enseigner la langue tamoule.44

Une commission nationale de la police a été créée ainsi qu’une unité d’enquête anticorruption, dont le chef faisait lui-même, cependant, l’objet d’allégations de corruption. Aucun de ces projets de réforme n’a visé à lutter contre la culture de la torture

qui est enracinée au sein de la police et qui est notoirement généralisée au Sri Lanka.45 Le Sri Lanka constitue donc un cas d’école de l’échec d’initiatives de formation des forces de sécurité mises en œuvre sans s’attaquer aux causes systémiques et profondes des violations des droits humains, ce qui a contribué à favoriser l’impunité des tortionnaires ou de leurs supérieurs hiérarchiques. Cela s’ajoute au mandat problématique des organes de surveillance dont les capacités techniques risquent d’inhiber toute surveillance exhaustive – tout en soulevant de potentiels conflits d’intérêts pour le signalement de violations potentielles.

La démocratie et l’État de droit sont en péril au Sri Lanka ; la militarisation grandissante des autorités étatiques, combinée aux attaques déployées contre les libertés fondamentales et à l’impunité croissante dont bénéficient les forces militaires et de sécurité, est directement imputable à l’échec de la réforme institutionnelle. Les opérations de maintien de la paix des Nations Unies ont un rôle clé à jouer pour faire en sorte que la participation du Sri Lanka aux actions de maintien de la paix dans le monde soit conditionnée à la nécessité d’établir les responsabilités des militaires impliqués dans des crimes de guerre et des violations graves des droits humains et de les exclure de toute participation à une mission de maintien de la paix. La sécurité et l’intégrité des populations des pays affectés par un conflit ne doivent pas être exposées à des risques en raison de la présence de Casques bleus responsables de violations des droits humains.

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1 Nations Unies, Rétablissement de l’État de droit et administration de la justice pendant la période de transition dans les sociétés en proie à un conflit ou sortant d’un conflit, Rapport du Secrétaire général, S/2004/616, 23 août 2004, p 4.

2 Ibid.

3 Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, Les instruments de l’État de droit dans les sociétés sortant d’un conflit

Assainissement : cadre opérationnel, New York et Genève : Nations Unies, 2006 4 https://itjpsl.com/assets/press/Press-Release-Sisira-Mendis.pdf

5 https://itjpsl.com/assets/press/Press-release-24-July-2017-on-Sisira-Mendis-2.

pdf

6 Militarisation : au moins 28 depuis 2020 selon le HCDH, A / HRC / 46/20 ; 39 selon l’ITJP : https://itjpsl.com/assets/press/ENGLISH-Battlefield-to-Boardroom- copy.pdf. Un cas supplémentaire a été recensé depuis la publication de ce document, ce qui porte le nombre à 0.

7 Absence de processus de vérification d’antécédents, voir le document de l’ITJP : https://itjpsl.com/assets/press/Final-9-Dec-2020-ITJP-Infographic-press-release- copy.pdf

En ce qui concerne les commandants de district : https://itjpsl.com/assets/press/

Final-ITJP-JDS-press-release-6-January-2021.pdf

Sur la mise en place d’un État parallèle : https://itjpsl.com/assets/press/7-july-2020- OTJP-press-release-merged-2.pdf

https://itjpsl.com/assets/press/English-ITJP_COVID-19-press-release-Merged-copy.

pdfhttps://itjpsl.com/assets/press/English-press-release-22-May-2020.pdf

8 https://www.courtlistener.com/docket/8446817/united-states-v- wickramasuriya/#minute-entry-152128459

9 M. Aryasinha a défendu le Lieutenant général Silva contre les allégations de crimes de guerre, en affirmant qu’il n’y avait « aucune allégation factuelle ou avérée de violations des droits humains à son encontre », selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères.

https://www.un.int/srilanka/news/sunday-times-lanka-strongly-attacks-un-over- peacekeeping-troop-reduction

10 https://parliament.lk/uploads/documents/paperspresented/report-of- paranagama.pdf

11 https://peacekeeping.un.org/sites/default/files/01_summary_of_

contributions_32.pdf

12 Sirisena l’a qualifiée de « source majeure de revenus de devises ». http://www.

dailymirror.lk/breaking_news/Appointment-of-LTTE-member’s-relative-caused- several-problems:-MS/108-197841

Daily Mirror, 14 octobre 2020, Appointment of LTTE member’s relative caused several problems: MS

13 STF to gain UN deployment, 3 février 2017, Mirror Citizen, http://mirrorcitizen.

dailymirror.lk/2017/02/03/stf-to-gain-undeployment/

« Pour pouvoir porter un Casque bleu, les candidats ne doivent jamais avoir été impliqués dans des violations des droits humains », a affirmé l’armée en 2019 : http://www.defence.lk/Article/view_article/352

14 « Ce gouvernement a fait en sorte qu’aucun individu ne fasse l’objet d’une enquête pour sa conduite durant le conflit, malgré plusieurs fausses allégations indiquant le contraire. Cela démontre de manière éclatante notre détermination à nous tenir aux côtés des forces armées, et de ne pas nous contenter d’instrumentaliser nos courageux hommes et femmes en uniforme à des fins électorales. » Foreign Minister Tilak Marapana, Sri Lanka emerges proud – united with allies at UNHRC, 24 mars 2018, The Daily News, http://www.dailynews.lk/2018/03/24/local/146449/sri-lanka- emerges-proud-unitedallies-unhrc

15 Reuters, 25 Sep. 2019. U.N. suspends Sri Lankan troops from peacekeeping over army chief appointment

https://www.reuters.com/article/us-sri-lanka-un-peacekeepers/u-n-suspends-sri- lankan-troops-from-peacekeeping-over-army-chief-appointment-idUSKBN1WA2SL 16 « Seulement 25 pour cent des troupes sri-lankaises actuellement déployées dans des opérations de maintien de la paix seront remplacées à la fin de leur mandat au Liban, a déclaré M. Lacroix. Ces postes seront comblés grâce à un réajustement des soldats de la paix actuellement affectés au Liban et il n’y aura plus de réduction du nombre de soldats de la paix sri-lankais. »

https://www.un.int/srilanka/news/sunday-times-lanka-strongly-attacks-un-over-

peacekeeping-troop-reduction

https://www.un.int/srilanka/news/foreign-secretary-aryasinha-discusses-obstacles- placed-sri-lanka’s-peacekeeping-contribution-un

17 https://www.army.lk/news/mali-bound-next-ccc-salutes-commander-army 18 HCDH, 19 août 2019, Bachelet “deeply troubled” by appointment of new Sri Lankan army chief’

https://www.ohchr.org/en/NewsEvents/Pages/DisplayNews.

aspx?NewsID=24908&LangID=E

19 https://twitter.com/usembsl/status/1163400674643759104?lang=en

20 https://www.canadainternational.gc.ca/sri_lanka/highlights-faits/2019/2019-08- 21-statement-declaration.aspx?lang=eng

21 https://eeas.europa.eu/delegations/lebanon/66564/joint-statement_en 22 Daily News, 27 mai 2020, https://www.dailynews.lk/2020/05/27/

features/219411/time-pull-together-pm

23 Data at https://peacekeeping.un.org/en/troop-and-police-contributors 24 https://peacekeeping.un.org/sites/default/files/03_country_and_mission_32.pdf 25 https://peacekeeping.un.org/sites/default/files/4_mission_and_country_1.pdf 26 https://peacekeeping.un.org/sites/default/files/jan17_3.pdf

27 « 15 octobre 2020 : Des troupes sri-lankaises, issues majoritairement de l’armée sri-lankaise, ont été déployées au Liban (FINUL), au Soudan du Sud (MINUSS), au Mali (MINUSMA), à Abiyé (FISNUA), à New York (UNHQ), en République centrafricaine (MINUSCA) et dans le Sahara occidental (MINURSO), en qualité d’observateurs militaires, d’officiers d’état-major, d’assistants d’état-major ou ont été versés dans le contingent onusien »

https://www.army.lk/news/sri-lankan-troops-unifil-conduct-joint-exercise-apcs- mpmg-weapons

28 138 troupes sri-lankaises à la date du 20 décembre 2020 : https://unifil.

unmissions.org/unifil-troop-contributing-countries

29 Inclut 6 Sri-Lankais déployés au sein de la mission FISNUA.

30 https://itjpsl.com/assets/press/haiti-FINAL.pdf

https://apnews.com/article/e6ebc331460345c5abd4f57d77f535c1 31 https://itjpsl.com/assets/press/haiti-FINAL.pdf

https://itjpsl.com/assets/press/Press-Statement-haiti-f.pdf

32 https://apnews.com/article/5d2d63869e3740c69c3b9aef051f00ea 33 Catherine Pollard, Secrétaire générale adjointe chargée des stratégies et politiques de gestion et de la conformité, Jean-Pierre Lacroix, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix de l’ONU, 21 janvier 2020, Miami Herald opinion piece.

U.N. is committed to addressing its peacekeepers’ sexual abuse of women in Haiti;

https://www.miamiherald.com/opinion/op-ed/article239499293.html#storylink=cpy 34 https://www.hrcsl.lk/wp-content/uploads/2020/02/HRCSL-Press-release-on- vetting-_English.pdf

35 https://itjpsl.com/assets/press/UN-repatriates-Sri-Lankan-peacekeeper-for-his- role-in-2009-war.pdf

36 Tamil Guardian 26 Nov 2020 Sri Lankan Human Rights Commission staffed with all Sinhalese nominations by Gotabaya Rajapaksa

https://www.tamilguardian.com/content/sri-lankan-human-rights-commission-staffed- all-sinhalese-nominations-gotabaya-rajapaksa

37 https://www.ohchr.org/Documents/Countries/LK/Sri_LankaReportJan2021.

docx

38 http://www.dailymirror.lk/article/Army-to-be-restructured-not- downsizing-152906.html

« Le nombre de soldats et d’officiers servant l’armée ne sera pas du tout réduit », a déclaré le commandant de l’armée.

https://www.dailynews.lk/2018/09/10/local/162146/‘army’s-‘right-sizing’-programme- grossly-misinterpreted’

ENDNOTES

(6)

39 https://data.worldbank.org/indicator/MS.MIL.TOTL.TF.ZS?locations=LK 40 https://data.worldbank.org/indicator/MS.MIL.XPND.CN?locations=LK 41 Listes des entreprises dans lesquelles des militaires ont investi : https://www.

colombotelegraph.com/index.php/increasing-military-involvement-in-sri-lankan- business-ventures/ et aussi https://srilankabrief.org/2018/04/power-and-profit- investigating-sri-lankas-military-businesses/

The Guardian, 2011, The Sri Lankan army is selling vegetables

https://www.theguardian.com/commentisfree/2011/jan/28/sri-lanka-army-military 42 https://asiafoundation.org/2010/11/10/bringing-police-and-communities- together-in-post-war-sri-lanka/

https://asiafoundation.org/wp-content/uploads/2016/10/Security-Sector-Reform- in-Asia.pdf

43 L’un des résultats obtenus a été de « faciliter une plus grande consultation entre les unités militaires ou de police déployées dans les régions fragiles ou touchées par le conflit et les dirigeants communautaires ».

400 policiers formés à la langue tamoule avancée et 500 formés à la langue tamoule de base.

Policiers formés à la langue tamoule avancée - 94% d’hommes et 6% de femmes ; policiers formés à la langue tamoule de base - 97% d’hommes et 3% de femmes.

https://www.

googlecomurl?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwjspq6Uo ZbuAhVMTsAKHYs_B1MQFjAAegQIBRAC&url=https%3A%2F%2Fassets.

publishing.service.gov.

uk%2Fgovernment%2Fuploads%2Fsystem%2Fuploads%2Fattachment_

data%2Ffile%2F198728%2FHuman_rights_in_Countries_of_Concern_-_Sri_Lanka.

pdf&usg=AOvVaw0ckILSHDXLLsYvDuLNOIaR

44 https://www.bbc.co.uk/news/world-south-asia-12141070

« Le gouvernement sri-lankais a signalé que le recrutement de policiers de langue tamoule avait augmenté de 427 à 1 216 en 2012.»

https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/

attachment_data/file/198728/Human_rights_in_Countries_of_Concern_-_Sri_

Lanka.pdf

En 2016, le Royaume-Uni a déclaré : « Au Sri Lanka, 5 155 policiers parlant cinghalais ont été formés à la langue tamoule et 95% d’entre eux ont été redéployés dans les postes de police du nord et de l’est du pays ».

https://www.google.com/

url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwjspq6UoZbuAhVMTs AKHYs_B1MQFjAAegQIBRAC&url=https%3A%2F%2Fassets.publishing.service.gov.

uk%2Fgovernment%2Fuploads%2Fsystem%2Fuploads%2Fattachment_data%2Ffile

%2F198728%2FHuman_rights_in_Countries_of_Concern_-_Sri_Lanka.

pdf&usg=AOvVaw0ckILSHDXLLsYvDuLNOIaR

45 Comité des Nations Unies contre la torture (CAT), Observations finales concernant le cinquième rapport périodique de Sri Lanka, 27 janvier 2017, CAT/C/LKA/CO/5 Disponible sur : https://tbinternet.ohchr.org/_layouts/15/

treatybodyexternal/Download.aspx?symbolno=CAT/C/LKA/CO/5&Lang=En

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