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DES MICROPHONES SYMBOLES DE PARTICIPATION SOCIALE : LE CAS DES RADIOS COMMUNAUTAIRES EN COLOMBIE

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2008/1 n° 29 | pages 77 à 91 ISSN 1291-1941

ISBN 9782724631203

Article disponible en ligne à l'adresse :

--- http://www.cairn.info/revue-raisons-politiques-2008-1-page-77.htm

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!Pour citer cet article :

--- Erica Guevara, « Des microphones symboles de participation sociale : le cas des radios

communautaires en Colombie », Raisons politiques 2008/1 (n° 29), p. 77-91.

DOI 10.3917/rai.029.0077

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dossier

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RICA

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UEVARA

Des microphones symboles de participation sociale :

le cas des radios communautaires en Colombie

Many efforts to systematize participatory communication experiences are vowed to disappointment, which is good.

Alfonso Gumucio Dagron1

L

ES MEDIAS « ALTERNATIFS » inspirent le plus grand scepticisme, non seulement dans le monde acadé- mique, mais aussi de la part de leur éventuel public. La radio « participative » n’échappe pas à la règle : une radio à but non lucratif qui démocratiserait la parole publique grâce à une interaction entre producteurs et audiences semble tenir plus de l’utopie imaginée en 1927 par Bertolt Brecht2 que d’un projet

1. Alfonso Gumucio Dagron, « Call Me Impure : Myths and Paradigms of Participatory Communication », Washington, ICA Pre-conference on Alternative Media, « Our media, not theirs », 24 mai 2001, p. 5.

2. Bertolt Brecht avait imaginé la radio comme le plus formidable appareil de commu- nication qu’on puisse imaginer pour la vie publique, dans la mesure où elle serait capable non seulement de faire écouter l’auditeur, mais le faire parler, ne pas l’isoler

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réalisable. En effet, comment savoir si « ça marche3», si ces radios atteignent leurs propres objectifs, alors qu’il n’existe même pas d’accord pour qualifier ce type de radio ? Associatives en Europe, rurales en Afrique, publiques en Australie, éducatives en Bolivie, libres au Brésil, participatives à El Salvador, populaires en Equateur, indigènes au Mexique, communautaires en Colombie, locales, citoyennes ou alternatives ailleurs, la liste des adjectifs pour désigner cet objet flou est longue. Aussi est-il difficile d’évaluer l’impact que peuvent avoir ces radios sur les populations qu’elles ont pour cible.

On pourrait également en conclure que, engluées dans une sorte d’« état de nature » qui ne peut durer à l’ère de la convergence numérique, ces radios sont trop éphémères pour avoir un quel- conque intérêt scientifique.

Notre objectif est de questionner ce scepticisme à partir de l’exemple des radios participatives en Amérique latine, et plus par- ticulièrement en Colombie, en analysant la complexité et l’intérêt que cet objet d’étude peut avoir pour les recherches sur la partici- pation sociale. L’expérience des radios participatives en Colombie, appelées « communautaires4», est particulièrement riche, avec plus de 500 radios dans le pays5. Elle est également une des plus dura- bles, la première expérience radiophonique de ce type répertoriée en Amérique latine étant Radio Sutatenza, près de Bogota, en 1947.

D’autre part, institutionnellement, le cas colombien est intéressant car le mouvement social mobilisé pour la reconnaissance légale des radios communautaires pendant les années 1980 a réussi à atteindre ses objectifs, avec une des législations les plus avancées de l’Amé- rique latine en la matière.

Deux hypothèses vont nous permettre de développer notre raisonnement. La première s’oppose à l’idée de l’« état de nature des radios communautaires », en affirmant qu’il existe un secteur de « professionnels de la communication participative » en Colombie, qui a fait de la radiodiffusion communautaire un métier.

Ce qui s’oppose à l’idée selon laquelle les radios participatives

mais le mettre en relation avec les autres. Bertolt Brecht,Sur le cinéma, Paris, Travaux 7, L’Arche, 1970.

3. Peter Lewis, « Est-ce que ça marche ? L’observation et l’évaluation des radios commu- nautaires »,inJean-Jacques Cheval (dir.),Audience, publics et pratiques radiophoniques, Bordeaux, Éd. de la Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, 2003, p. 83-94.

4. Nous garderons à partir d’ici l’adjectif communautaire pour les désigner, pour plus de facilité.

5. Selon les chiffres officiels du ministère de la Communication colombien.

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seraient encore et toujours retranchées dans une logique de résis- tance à l’envahisseur, et par conséquent vouées à l’échec car repliées sur elles-mêmes (comme le laisse entendre l’adjectif « communau- taire »), refuges identitaires rigides au changement. Ainsi, Amparo Cadavid, chercheuse colombienne, affirme que c’est la création et le renforcement de réseaux de radios communautaires à tous les niveaux territoriaux qui représente « la meilleure stratégie pour sur- vivre des radios communautaires6». Ces réseaux cristallisent une multiplicité d’intérêts de différents types d’acteurs.

Ma deuxième hypothèse découle de la première en postulant que les radios communautaires colombiennes sont encadrées par un type d’acteurs déterminants dans cette activité : les « facilitateurs de processus » de communication participative. Comme leur nom l’indique, ceux-ci se donnent le rôle d’encadrer et de conduire les producteurs de radio communautaire à atteindre leur but. Nous verrons comment ce secteur a développé une identité propre qui résulte d’une lente évolution de leur rôle dans les radios, passant ainsi d’une conception très verticale à une conception horizontale de la communication qui devient participative. Une des caractéris- tiques principales de ces facilitateurs est le refus de labellisation de leur secteur, et la revendication de la particularité de chaque expé- rience radiale, ce qui contribue paradoxalement à alimenter le scep- ticisme qui existe autour des radios. À partir de ce raisonnement, se pose la question de l’étude de l’impact des médias participatifs en termes de participation sociale : pour comprendre les radios communautaires, il est préférable de se concentrer davantage sur les producteurs que sur les audiences.

Construction du secteur des professionnels en radio communautaire Les années 1980 voient naître des mouvements sociaux qui s’organisent pour défendre l’existence légale des radios communau- taires en Colombie. Bien que nous ne disposions pas de données chiffrées du nombre de radios de ce type au début des années 1990, nous savons que plus de 400 radios ont demandé une licence lors du premier appel d’offres en 1997, soit seulement deux ans après la mise en place du décret qui légalise l’existence des radios

6. Amparo Cadavid, « Emisoras Comunitarias en Colombia, Avances y retos », publica- tion de l’ouvrage collectif en cours, Washington, Banque Mondiale, 2007, p. 28.

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communautaires7. Ces mouvements, encadrés par les associations des communautés dont ils font partie, s’organisent progressivement en réseaux de radios, en fonction soit de critères territoriaux (Réseaux de Santander, Boyaca, Arauco...), soit de communautés d’intérêts (par exemple, les radios indigènes forment des réseaux, comme l’association de Moyens de Communication Indigènes, l’AMCIC).

Le pouvoir de mobilisation d’un réseau de producteurs organisé

Plus de 20 réseaux régionaux de radios communautaires exis- tent aujourd’hui en Colombie. Au niveau national, ces réseaux sont articulés par le SIPAZ, le Système de Communication pour la Paix.

Il réunit 370 stations appartenant à 24 réseaux de radio et de télé- vision communautaire, et des « nœuds » de coordination mis en cohérence au niveau national par la Fondation Colombia Multicolor, organisation à but non lucratif créée en 1996. Le président de cette fondation est le représentant de AMARC Colombie, la branche nationale de l’Association mondiale des radios communautaires qui compte environ 3 000 membres dispersés dans 110 pays. Les réseaux de radios colombiennes, certes très informels, couvrent donc tous les degrés territoriaux : local, régional, national, et international.

Tout autour et à l’intérieur de ces réseaux, des acteurs de toute sorte gravitent : organisations internationales, ONG, associations, universités, mais aussi le gouvernement colombien, les différents groupes armés, et les organisations de coopération internationale comme l’USAID et l’Union Européenne. Ces acteurs se font concurrence pour apporter leur soutien aux radios, souvent dans le cadre de projets plus larges, comme par exemple les Plans et les Laboratoires de Paix qui ont un lien marginal avec la radio commu- nautaire. Formations de toutes sortes, ateliers, soutiens financiers, logistiques, matériels, juridiques, mais aussi contrôles et limitation du pouvoir d’action des radios, ces acteurs interviennent de diverses manières. Chaque radio communautaire cristallise donc une mul- tiplicité d’intérêts, parfois contradictoires, qui s’enchevêtrent à l’intérieur des différents réseaux.

Ceux-ci ont néanmoins une réelle capacité d’action et d’influence, car ils disposent à la fois de ressources symboliques et

7. Ministerio de Comunicaciones de Colombia, « Politicas para la Radiodifusion en Colombia, Documento de politica sectorial », Bogotá, septembre 2004.

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matérielles et de la possibilité de les mobiliser relativement vite. En témoigne le cadre réglementaire adapté aux radios communautaires colombiennes qui est le fruit d’une mobilisation intense des acti- vistes de radios communautaires afin d’obtenir un statut légal pour celles-ci. Une fois leur existence légale reconnue en 1995, les radios communautaires colombiennes commencent à se consolider.

De l’Église à la citoyenneté, en passant par l’école de la résistance

Malgré le fait que l’histoire des radios communautaires colom- biennes n’est pas encore écrite, nous allons évoquer maintenant certaines pistes de réflexion qui explorent l’hypothèse selon laquelle, depuis les années 1970-1980, les acteurs impliqués en radio communautaire sont passés d’une conception verticale de la communication à l’intérieur de la radio, à une conception horizon- tale, participative, de celle-ci. C’est justement cette évolution qui a conduit le secteur à se professionnaliser progressivement, en faisant apparaitre ainsi la figure des « facilitateurs » de processus de commu- nication. Le type de communication qui s’établit aujourd’hui est lié à un triple processus, où se mélangent éducateurs, religieux et activistes de différents types de mouvements sociaux.

Dès ses origines, la radio communautaire est conçue comme une école. Ainsi, Radio Sutatenza, créée en 1947, se constitue en réseau de radios vouées à diffuser des programmes scolaires et édu- catifs permettant de former à distance les jeunes et les adultes des zones rurales. Le succès est tel que Radio Sutatenza s’élargit et donne naissance à l’Association d’Action Culturelle Populaire (ACPO) dont les activités vont se poursuivre jusqu’en 1989. Cette première expérience est imitée par 24 stations de radio latino-américaines qui adoptent dans les années 1960 le modèle des Écoles radiophoni- ques. Mais la radio n’est pas seulement née comme une école : dès le départ, elle est liée à l’Église. C’est le père Salcedo, catholique, qui crée Radio Sutatenza, et il n’est par rare de trouver les Pastorales sociales des diocèses à l’origine de différents projets de radio locale dans tout le pays. Les membres du clergé s’y impliquent afin de veiller au bien-être social et économique des paysans8. La radio reste avant tout un projet pédagogique et religieux. Elle n’implique pas vraiment ses audiences dans la production des messages diffusés.

8. Andres Geertset al.,La radio popular y comunitaria frente al nuevo siglo : la practica inspira, Quito, ALER et AMARC, 2004, p. 36-37.

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Les années 1970 marquent un tournant pour les radios « édu- catives » en Colombie. Plusieurs éléments ont contribué à rendre la communication plus horizontale. Tout d’abord, l’introduction de la méthode de l’« éducation libératrice » du brésilien Pablo Freire : fondée sur le principe de l’« action-réflexion-action », cette méthode d’éducation « populaire et participative » cherche à déve- lopper la conscience politique de l’individu, son organisation et la mobilisation pour la transformation sociale9. À ces idées se conjugue l’influence très forte au sein des universités de réflexions théoriques telles que celles de Jésus-Martin Barbero, qui pense les médias à partir des médiations. Il concentre son attention sur les processus locaux de la culture qui s’opèrent malgré la domination culturelle des médias traditionnels. Grâce à lui, entre autres, l’idée selon laquelle « les gens peuvent avoir leur propre voix », sans avoir recours à un médiateur, commence à percer dans l’université del Valle à Cali où on s’intéresse au développement de radios « popu- laires » dans le cadre de projets financés par l’UNICEF sur la côte ouest du pays.

En ce qui concerne l’Église, les changements qui touchent à son organisation sur le continent latino-américain ont certainement eu une répercussion sur les radios populaires. En effet, suite au concile de Vatican II et de la conférence épiscopale de Medellin, se développe la théologie de la libération qui établit un compromis avec les pauvres et les opprimés et met la foi chrétienne au service du changement des structures injustes. Dans un contexte de forte tension dans les zones rurales, où ont lieu les premières mobilisa- tions indigènes et paysannes autour de la lutte pour les terres, les radios à dominante religieuse se placent du coté des mouvements paysans. Par ailleurs, les radios non religieuses s’instituent peu à peu en instrument de résistance, comme en témoignent le cas des radios indigènes qui commencent à diffuser des messages en langues indigènes, sous l’influence en partie du M-19, le Mouvement armé du 19 avril, qui faisait des incursions éclair sur le spectre radiopho- nique afin de diffuser de la propagande.

Aussi ces éléments marquent-ils l’apparition du concept de communication participative en Colombie autour de la radio communautaire, son passage d’un rôle « éducatif » à un rôle « popu- laire », puis progressivement radical et « de résistance » : dorénavant,

9. Paulo Freire,Pedagogia del oprimido(1970), Mexico, Siglo XXI, 2005 (2eéd.).

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la radio communautaire dénonce les activités des entreprises inter- nationales et les menaces d’expropriation des terres aux agriculteurs.

Devenir citoyens et acteurs sociaux à part entière

Un autre tournant a lieu à la fin des années 1980 et au début des années 1990. En Amérique latine, c’est la fin des dictatures. En Colombie, une nouvelle constitution entre en vigueur ; les ethnies indigènes sont reconnues par le gouvernement. Il ne s’agit plus seulement de s’opposer au discours officiel, il faut désormais par- ticiper et s’impliquer dans les affaires publiques et politiques pour modifier leur fonctionnement de l’intérieur. En Colombie comme dans les autres pays latino-américains, les radios communautaires sont sensibles aux théories de la communication pour le dévelop- pement incarnées notamment par le rapport Mac Bride publié en 1980 qui donne naissance au Nouvel ordre mondial de l’informa- tion et de la communication (NOMIC), conduit par l’UNESCO.

La communication y est définie comme un processus de mise en relation des objectifs de développement et de la démocratisation d’un secteur donné. Il y a un retour au sujet qui est compris comme le producteur de sens ; la communication est un processus culturel, fondamental pour la construction d’une société à tous les niveaux10. En Colombie, la législation en faveur des radios communautaires conforte cette idée. Dans un contexte de conflit armé, la radio s’investit dans l’établissement d’une solution pacifique. Il ne s’agit plus seulement de « démocratiser la parole » ou de « rendre la voix à ceux qui ne l’ont pas » : les médias communautaires ont une « res- ponsabilité sociale » et veulent être des acteurs à part entière, capa- bles de conduire le changement social.

À partir des années 1990, la radio communautaire colom- bienne, financée par les programmes de paix des organisations inter- nationales, entame son action pour la paix. Elle est force de pro- position : suite au succès du mouvement pour la légalisation de la radio communautaire, les activistes qui l’ont réalisée sont en effet convaincus qu’ils peuvent avoir une véritable incidence en poli- tique. C’est dans ce contexte que la radio devient « citoyenne » : elle commence à abandonner son caractère « résistant ». Elle n’est

10. Sandra Liliana Osses Rivera, « Nuevos Sentidos de lo comunitario : la Radio Comuni- taria en Colombia », Mémoire de Master en Sciences Sociales, Mexico, FLACSO, 2002.

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plus une victime du système, elle veut être un acteur à part entière, son but étant de « démocratiser la communication pour démocra- tiser la société11».

La communication participative et ses activistes

Radio communautairevs« théorie des effets »

D’un point de vue théorique, la radio communautaire résulte d’un courant qui s’oppose à la « théorie des effets12». Celle-ci pro- pose un schéma classique de communication (émetteur-message- récepteur), développé par Lasswell puis par Lazarsfeld, qui synthé- tise, à partir des années 1950, la « peur des médias ». À l’en croire, les audiences seraient complètement passives, victimes de la

« seringue hypodermique » des médias : il a été en effet montré que le public conditionné répondait par des réponses automatiques aux stimulations. Il y a toutefois un paradoxe dans la théorie des effets et de ses conséquences pour la démocratie. Les partisans des mass media, qui les perçoivent comme une aubaine pour la démocratie, et ceux qui les voient comme des instruments maléfiques partagent la même représentation de la communication de masse : celle d’un public immense constitué de millions de récepteurs prêts à recevoir le Message qui est unstimuluspuissant pour l’action et qui produit une réaction immédiate13.

Les théories développées autour de la radio communautaire s’élèvent en réaction à ce courant, et il en va de même dans l’ensemble des médias participatifs. En Amérique latine, sous le filtre de la théorie de la dépendance, la communication des mass media est interprétée comme une propagande en faveur du statu quo dans le contexte du sous-développement14. On y perçoit un Message unique de la dépendance et du fatalisme du sous-dévelop- pement, éléments de l’« idéologie des dominants », qui chercherait

11. Andres Geertset al.,La radio popular y comunitaria frente al nuevo siglo...,op. cit.

12. Eric Maigret, Sociologie de la Communication et des Médias, Paris, Armand Colin, 2003, p. 59.

13. Elihu Katz et Paul Lazarsfeld, Personal Influence. The Part Played by People in the Flow of Mass Communications, Glencoe, Free Press, 1955.

14. S. L. Osses Rivera, « Nuevos Sentidos de lo comunitario : la Radio Comunitaria en Colombia »,op. cit., p. 53.

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à s’imposer sous la forme d’une hégémonie, selon Gramsci15. Les expériences de radios communautaires cherchent à se rapprocher de leurs audiences, et à prendre en compte leurs besoins afin de rompre avec ce modèle de domination. Peu à peu, on l’a vu, émerge l’idée qu’« on n’a pas besoin de parler pour les gens, alors qu’ils peuvent le faire eux-mêmes ».

La bataille politique autour des consommateurs/récepteurs

Se développent alors des approches comme celle de Jésus Martin-Barbero qui déplace le projecteur des médias vers les média- tions, en valorisant les « cultures populaires » et leurs pratiques culturelles. « La production des consommateurs » et « les procédures de créativité de la vie quotidienne », pour reprendre les termes de Michel De Certeau16lorsqu’il décrivait ce phénomène, deviennent importantes. Pour ce dernier, « les “manières de faire” constituent les mille pratiques par lesquelles des utilisateurs se réapproprient l’espace organisé par les techniques de la production sociocultu- relle17». Il souligne ainsi l’existence d’« une autre production, qua- lifiée de “consommation” : celle-ci est rusée, elle est dispersée, mais elle s’insinue partout, silencieuse et quasi invisible, puisqu’elle ne se signale pas avec des produits propres mais en manières d’employer les produits imposés par un ordre économique dominant18». Les consommateurs ne seraient donc pas passifs ni disciplinés, au contraire : « le quotidien s’invente avec mille manières de bra- conner19», de détourner de manière créative les messages des médias, ce qui ferait des consommateurs-récepteurs « des produc- teurs méconnus20».

Puisque leur production est silencieuse, mais si riche, puisqu’elle contient des dimensions symboliques du « sentiment d’appartenance à la communauté » dans un contexte où « les logi- ques de marché ne peuvent sédimenter des traditions », alors, pour Jésus Martin-Barbero, « la communication et la culture représentent

15. Antonio Gramsci,Gramsci dans le texte, recueil de texte réalisé sous la direction de François Ricci, Paris, Editions Sociales, 1975.

16. Michel de Certeau,L’invention du quotidien, t. 1 « Arts de Faire », Paris, Gallimard, 1990, p.XXXV.

17. Ibid., p.XL. 18. Ibid., p.XXXVII. 19. Ibid., p.XXXVI. 20. Ibid., p.XLV.

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aujourd’hui un champ primordial de bataille politique », pour affronter l’érosion de l’ordre social21. Dans cette bataille, les récep- teurs doivent devenir producteurs et s’approprier les médias : il faut

« démocratiser la parole22», ou « la redonner à ceux qui l’ont perdue ». Les acteurs qui travaillent dans des expériences de radio communautaires se mobilisent pour atteindre cet objectif.

Le paradoxe des acteurs de la communication participative des radios communautaires

Pourtant, et c’est ici que l’on peut déceler un grand paradoxe de la communication participative à l’intérieur des radios commu- nautaires : l’évolution du concept s’est faite dans un réseau de pro- ducteurs où, dès le départ, une grande partie des acteurs impliqués travaillent en croyant à la théorie des effets, mais appliquée à d’autres domaines que les médias. En effet, on constate, que parmi les individus à l’origine de nombreuses radios communautaires, ou qui influencent leur développement depuis les années 1950, certains cherchent à susciter une réaction chez leur public-cible à travers un processus de communication : l’Église catholique, l’École, les acti- vistes du mouvement social, et l’État.

Si l’on reprend la notion de « path dependence23» aux politi- ques publiques, il est possible de penser l’évolution du concept de communication participative dans l’histoire colombienne comme un processus de sédimentation, où différents éléments viennent se superposer les uns aux autres pour finalement créer un socle de croyances et de façons de faire difficile à changer.

Ainsi, malgré les efforts des acteurs qui cherchent à apprendre de nouvelles méthodes en passant de la radio « éducative » à une radio « communautaire », donc d’une vision de la communication verticale à celle d’une communication horizontale, il leur est très difficile, en raison de leur passé, de cesser de chercher à créer un effet sur leurs publics. En effet, la radio « communautaire », autant

21. Jesus Martin-Barbero, « Pistas para entrever medios y mediaciones »,Signos y Pensa- miento, vol.XXI, numéro 41, juillet-décembre 2002, p. 16.

22. José Ignacio Lopez Vigil,Manual Urgente para Radialistas Apasionados y Apasionadas, Peru, AMARC, 1997, p. 234-250 ; ALER et AMARC,Democratizando la Palabra, Quito, ALER, 2007.

23. Voir sur le path dependence : Paul Pierson, « When Effects Become Cause. Policy Feedback and Political Change », World Politics, vol. 45, no4, juillet 1993, p. 595-628.

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en Colombie qu’ailleurs, veut toujours créer des effets : créer de l’écoute en est un. Créer de la conscience sociale ou de la partici- pation de la communauté dans les affaires qui la concernent en est un autre, affiché dès le départ et pour lequel les ressources sont mobilisées.

« Malicia indigena »et stratégies de braconnage : l’authenticité et la spontanéité valorisées

Il résulte de cette situation une radio communautaire théori- quement hybride, changeante, paradoxale et contradictoire, qui cherche à se rebeller contre les médias hégémoniques et à créer une alternative, tout en reproduisant des techniques « hypodermiques » de travail. L’objectif de ses acteurs est de réussir à promouvoir ces publics « braconniers » et leur propre créativité, comme l’illustre le fait que la « malice indigène24» autant que la débrouillardise sont mises en avant par les activistes. Cette « malice indigène », supposée authentique, est valorisée au point que nombre de personnes tra- vaillant dans la périphérie des radios communautaires, ne veulent pas les encadrer, ni les classer, pour leur permettre de se développer de manière spontanée et « différente », en changeant les règles des médias traditionnels, dans une sorte de volonté de conservation de l’« état de nature » des radios communautaires (« pour vivre heureux vivons cachés »). « Le jour où [les médias participatifs] seront label- lisés et classés selon un système... ce jour-là [ils] deviendront faci- lement contrôlables25. » La classification leur enlèverait leur pouvoir créateur de « braconniers » inventifs qui sont obligés de s’adapter à leur propre milieu et qui sont donc à la base de nouveaux moyens de production culturelle.

Ceci est intéressant car il y a ici encore un paradoxe, cette fois entre la « publicité » qu’implique un média dans sa définition même, puisqu’un média a vocation de rendre des messages publics.

Or les radios communautaires veulent être publiques et secrètes à

24. Lamalicia indigena, en espagnol, fait référence à une ingéniosité supposée des cultures précolombiennes en Amérique latine, qui leur aurait permis de survivre et de s’adapter lors de la conquête de l’Amérique. Cette malice indigène se serait transmise de père en fils et est aujourd’hui synonyme de débrouillardise et de perspicacité dans un contexte adverse. Voir à ce sujet Jorge Morales, « Mestizaje, malicia indigena y vivenza en la construccion del caracter nacional »,Revista de Estudios Sociales, no1, Mexico, 1998.

25. A. G. Dagron, « Call Me Impure... »,op. cit., p. 3, notre traduction.

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la fois :Secreto a voces : Radio, Interactividad y NTICs 26est le nom d’une publication de l’Organisation des Nations Unies pour l’ali- mentation et l’agriculture (FAO) qui traite le sujet des radios communautaires en profondeur27. « Secreto a voces » est une expression qui fait référence à une rumeur dont tout le monde parle, dont tout le monde est au courant, mais qui n’est pas publiée, dans le sens de « rendre visible » : qui n’apparaît pas dans les médias

« traditionnels ».

Il faut d’autre part insister sur le fait que nous sommes en train d’étudier des réseaux de communicants, de personnes qui, soit ont fait des études de communication, soit se sont formés ou sont en train de se former par l’expérience pratique et professionnelle comme des communicants. Ils apprennent autant par la pratique qu’à travers des formations, ou tout simplement en regardant la télévision, et en retirent la conscience aigüe que « la communica- tion, c’est du pouvoir28».

« Call me impure »: le refus des étiquettes

Au niveau mondial, le fait qu’un réseau de communicants tel que celui des radios alternatives, participatives, communautaires, ou citoyennes, ne s’accorde pas sur un qualificatif précis pour son métier, est, à notre avis, très révélateur. En effet, un communicant travaille sur des langages, et la radio travaille avec la parole. Or la palabra, qui en espagnol signifie à la fois mot et parole, est binaire : le langage impose une étiquette quasi-mathématique à tout ce qu’il désigne. Si on désigne une chose par un mot A, forcément, tout le reste est non-A.

Les mots impliquent un découpage du réel que les commu- nicants de ces radios refusent, désireux de rester du coté des non-A, de tout ce qui est « différent ». Pas « alternatif » : différent.

Alfonso Gumucio Dagron explique ainsi comment, lorsque les expériences de communication participative ont commencé dans les années 1960 et 1970 :

26. Un secreto a voces que nous avons traduit par « une voix secrète ». En anglais, la traduction de celle-ci est « The one to watch », qui ne nous semble pas exprimer les subtilités du « secreto a voces », qui fait référence à une rumeur dont tout le monde parle mais qui n’est pas publique, qui n’est pas publiée.

27. Bruce Girard,Secreto a voces. Radio, NTICs et interactividad, FAO, Rome, 2003.

28. Entretien avec un indigène de l’équipe de production de Radio Libertad à Totoro, Région du Cauca, 22 ans.

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Au niveau des communautés, ce qui était clair, c’était le sen- timent d’être « différent de »... et d’être « autre que... ». La clarté d’être « alter » n’avait rien à voir avec un choix intellectuel, il s’agis- sait juste d’un fait et d’une réalité. Les expériences de communica- tion participative sont « alternatives » dans une autre perspective. La plupart ont commencé non pas tellement pour s’opposer à un média envahissant, mais parce qu’il n’y avait pas d’autre média dans les alentours et une voix de la communauté avait besoin d’être entendue29.

Des facilitateurs pour apprendre aux audiences à devenir productrices

Mais cette spontanéité de la naissance de la radio communau- taire, défendue par ses activistes mêmes, est-elle réelle ? Des expé- riences existent en Colombie depuis plus de soixante ans, et dans notre parcours socio-historique de la communication participative dans le pays, nous avons croisé un certain nombre d’individus qui ont fait « carrière » dans les radios communautaires. Il est ainsi inté- ressant de constater que de nombreux activistes qui ont participé au mouvement pour la légalisation des radios communautaires pen- dant les années 1980 et 1990, travaillent encore avec celles-ci. Acti- vistes, civils, religieux, éducateurs, membres d’ONG ou d’institu- tions internationales, ou encore fonctionnaires de l’État, se donnent de manière très consciente le rôle d’« amplificateurs » de processus de communication participative.

Deux programmes de formation coordonnés par les ministères de l’Éducation et de la Communication dans tout le territoire colombien peuvent être cités à titre d’exemple : Municipios al Dial et Radios Ciudadanas30. Ainsi, les stations naissantes et celles qui présentent des difficultés sont visitées par des universitaires, des activistes et des anciens producteurs de radio communautaire, qui ont décidé de prendre leur bâton de pèlerin pour apprendre aux radios comment réaliser une « vraie » communication participative.

Il s’agit ici d’enseigner la manière de permettre au plus grand nombre de s’impliquer dans les affaires publiques par l’intermé- diaire de la radio, de rendre les audiences elles-mêmes productrices d’émissions destinées à la communauté. Ces programmes de

29. Ibid., p. 16, notre traduction.

30. « Municipios al dial »pourrait se traduire comme « Municipalités branchées ». Il s’agit du programme de formation du ministère de la Communication.Radios Ciudadanas se traduit parRadios citoyennes, c’est le programme du ministère de l’Éducation.

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formation portent le dernier coup au mythe de l’état de nature des radios participatives supposées incarner la démocratie directe, spon- tanée, locale et authentique. Pour réaliser une communication par- ticipative, un apprentissage est donc nécessaire, et pour apprendre à la réaliser, tout un secteur de professionnels existe.

Loin de délégitimer l’action des radios communautaires en Colombie, cette conclusion relance le débat sur l’étude des médias participatifs et sur le scepticisme qui les entoure, fondé à notre avis sur de mauvaises raisons, l’état de nature de ces médias n’étant pas réel. Intégrer les notions de réseau, de facilitateurs, de carrières mili- tantes, semble ici nécessaire pour comprendre quel est le rôle joué par ces radios dans la participation sociale dans une communauté.

Une radio participative cherche à faire participer à la production radiale des audiences des médias dits « traditionnels », qui n’ont pas accès à ceux-ci ; pour comprendre l’impact qu’une radio commu- nautaire peut avoir sur une « communauté », une approche métho- dologique efficace pourrait être de concentrer son attention juste- ment sur les producteurs de radio, plutôt que sur les audiences de celle-ci.

Des travaux sont en train d’être développés actuellement dans ce sens par Jo Tacchi et Peter Lewis. Ils partent du postulat qu’en termes de participation sociale, les effets produits par une radio communautaire sont ressentis en premier par les personnes qui y travaillent, celles qui réalisent les programmes et organisent l’acti- vité radiale. Ce qui explique pourquoi, lorsqu’une étude de l’audience des radios communautaires est réalisée pour mesurer son impact sur sa communauté, on obtient généralement des résul- tats plutôt pauvres : la loupe est en effet placée au mauvais endroit, là où il n’y a pas grand-chose, car on applique aux médias commu- nautaires les mêmes grilles que celles qui sont appliquées aux médias commerciaux. Et cette activité radiale particulière semble avoir les mêmes effets que les vagues créées par une pierre lancée dans l’eau : ce sont ceux qui sont au centre de l’onde qui en subis- sent d’abord les effets qui se diffusent progressivement jusqu’à atteindre les autres vagues, chacune des vagues composée par des acteurs différents. L’audience représente justement une des vagues, mais pas la centrale, contrairement à ce que l’on a tendance à penser, la participation se réalisant au cœur même de la production radiale.

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Erica Guevara est doctorante en sciences politiques à l’Institut d’Études Politiques de Paris, au sein du programme consacré à l’Amérique latine, et allocataire de recherche. Elle a réalisé auparavant des études de communication. Elle travaille sur les radios communautaires en Amérique latine et sur le rôle joué par celles-ci dans la construction du tissu social et la définition des identités territoriales.

RÉSUMÉ

Des microphones symboles de participation sociale : le cas des radios communautaires en Colombie

Cet article s’intéresse à la constitution du secteur des professionnels de la commu- nication participative au sein des radios communautaires en Colombie, en tant qu’élément déstabilisateur du mythe de l’état de nature des médias participatifs.

Ni isolées, ni éphémères, ni naturelles, ni résistantes, les radios participatives mobilisent une grande quantité d’acteurs, cristallisant des intérêts différents.

D’éducative à citoyenne, en passant par résistante, l’évolution de la radio parti- cipative colombienne est exemplaire du rapport que peuvent avoir les citoyens à la participation sociale et des paradoxes que ceux-ci entraînent. L’article analyse finalement comment mesurer l’impact que ces médias peuvent avoir sur leurs cibles, à partir d’une analyse des producteurs de radio, plutôt que des audiences.

Microphones, a symbol of social participation: community radio in Colombia, a case in point

This article looks at the formation of a professional participatory communication sector in community radio in Colombia, a phenomenon that belies the myth of the state of nature in participatory media. Contrary to widespread preconceptions, par- ticipatory radio is not isolated, ephemeral or “natural”, nor is it about political resistance: it mobilizes a great many different agents and fuses disparate interests.

Moving from educational to civic-minded via a phase of political dissent, community radio has evolved into a citizens media, exemplifying the relation between citizens and social participation – as well as the paradoxes inherent in that relation. In conclusion, this article analyzes how to measure the impact this media has on its target audience by studying the radio producers rather than the audience itself.

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