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Texte intégral

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!

ÉCONOMIE

Le forfait fiscal en questions 24-28

24 JANVIER 1798

Le prix méconnu de la Révolution vaudoise 30-37

RELIGION

Marie apparaît davantage dans le Coran que dans la Bible

50-55

SAVOIR ALLEZ

NUMÉRO

53

Le magazine de l’UNIL | Janvier 2013 | Gratuit

JUSTICE

SE TROMPENT AUSSI

LES EXPERTS

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4 Allez savoir ! N° 51 Mai 2012 UNIL | Université de Lausanne 4 Allez savoir ! N° 51 Mai 2012 UNIL | Université de Lausanne

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ALUMNIL : le réseau des diplômé·e·s

UNIL | Université de Lausanne – Bureau des alumni contact.alumnil@unil.ch – tél. : +41 21 692 20 88

Informations et inscriptions sur :

www.unil.ch/alumnil

Participez à nos prochains ateliers :

31 janvier 2013 : Atelier «développez votre voix»

6 février 2013 : Atelier cinéma

12 mars 2013 : Atelier emploi – les atouts des PME

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 3

ÉDITO

ISSN 1422-5220

IMPRESSUM Magazine de l’Université de Lausanne

N° 53, janvier 2013 www.unil.ch/allezsavoir Editeur responsable Université de Lausanne Une publication d’UNICOM, service de communication et d’audiovisuel

Quartier UNIL-Sorge Bâtiment Amphimax 1015 Lausanne Tél. 021 692 22 80 allezsavoir@unil.ch Rédaction en chef Jocelyn Rochat, David Spring (UNICOM) Création maquette Edy Ceppi (UNICOM) Rédacteurs Sonia Arnal Sophie Badoux Michel Beuret Elisabeth Gordon Virginie Jobé Nadine Richon Anne-Sylvie Sprenger Renata Vujica Francine Zambano Correcteurs Albert Grun Fabienne Trivier Graphisme Secteur B Sàrl www.secteurb.ch Infographie

Pascal Coderay (pp. 34-35) Photographie

Nicole Chuard Fabrice Ducrest Félix Imhof Illustration

Eric Pitteloud (pp. 3,23) Couverture

©jorgophotography-Fotolia Impression

IRL plus SA, Renens Tirage

15'000 exemplaires Abonnements allezsavoir@unil.ch (p. 62)

PETITE MARIE,

GRAND CHAMBARDEMENT

JOCELYN ROCHAT Rédaction en chef

O

n devrait toujours revenir au texte. C’est, du moins, ce que prétendent les extrémistes religieux en tout genre, qui déplorent le peu d’intérêt que nous por- terions aujourd’hui aux écrits sacrés. Cette com- plainte est reprise avec un bel unisson par les catholiques fondamentaux, les plus réveillés des évan- géliques protestants, les juifs conservateurs ou les mu- sulmans qui brandissent la charia et le Coran comme par réflexe.

Et s’ils avaient raison ? Ne serait-ce qu’un petit peu. Et si ces textes sacrés avaient encore quelque chose à nous apprendre au XXIe siècle ? Allez savoir ! vous propose de tenter l’expérience dans ce numéro. Rassurez-vous, elle est sans risque. Vous n’y trouverez aucune raison de re- lancer ce fameux choc des civilisations dont on nous ra- bat les oreilles. Car, s’il faut replonger dans ces textes, ce n’est pas pour y trouver des causes de querelles sup- plémentaires, mais pour y découvrir des similitudes in- soupçonnées et des héritages communs entre les diffé- rents écrits sacrés qui restent très largement méconnus.

En tout cas dans nos contrées.

Comme vous pourrez le vérifier en page 50 de ce maga- zine, de nombreuses figures bibliques apparaissent dans le Coran, parfois sous des traits étonnamment proches de ceux que nous connaissons dans la tradition chrétienne.

C’est notamment le cas d’Adam, de Noé, d’Abraham, de Moïse ou de David. Jésus a lui aussi trouvé sa place dans le livre de référence des musulmans. Même s’il n’y est pas vénéré comme fils de Dieu, le prophète Jésus reste une figure importante de l’islam.

Autre point de convergence, peut-être plus fort, et surtout plus inattendu, c’est la place importante que le Coran accorde à Marie. La mère de Jésus est en effet cé- lébrée dans la tradition chrétienne comme dans la tradi- tion musulmane, notamment parce qu’une sourate, l’un des fameux chapitres du Coran, porte son nom. L’affaire est moins anecdotique qu’on pourrait l’imaginer à prime abord, puisque Marie est la seule femme dont le nom est mentionné dans le texte sacré musulman.

La Marie du Coran, comme celle de la Bible, a vu un ange lui apparaître pour annoncer la venue prochaine d’un enfant tout à fait imprévu. La Marie du Coran est aussi un « modèle pour tous les croyants ». Un personnage qui

« apparaît comme une véritable figure rassembleuse », as- sure le spécialiste de l’UNIL Jean-Claude Basset dans ce numéro. A tel point que le Liban a institué en 2010 une fête de l’Annonciation faite à Marie, qui se célèbre le 25 mars et qui est désormais une cérémonie commune aux musulmans et aux chrétiens.

Il faut en revenir aux textes, disent les extrémistes de tous bords. D’accord pour en revenir aux textes. Car, quand on relit ces ouvrages sacrés avec la volonté d’y trouver, non pas les versets qui sèment la haine, mais les écrits plus rassembleurs – ceux qui sont étonnam- ment oubliés –, la lecture ouvre des perspectives bien plus fécondes. 

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 5 BRÈVES

L’actualité du campus : évènements, conférences, distinctions, publications.

PORTFOLIO Patagonie, Haydn

et étudiants.

MÉDECINE Coma : qui va se réveiller ?

RÉFLEXION Contre l’hégémonie de l’anglais.

Par Antoine Chollet et Gianni Haver, chercheurs.

ÉCONOMIE Le forfait fiscal en questions.

MOT COMPTE TRIPLE Qu’est-ce que la métabolomique ? Par Bertrand Rochat.

HISTOIRE Révolution vaudoise et trous de mémoire. Les origines mystérieuses du Papet vaudois.

NATURE Pourquoi les chouettes hulottes

sont-elles fidèles et les femelles effraies noires sexy ?

IL Y A UNE VIE APRÈS L’UNIL Le notaire féru de lettres.

Rencontre avec Franco del Pero.

JUSTICE Ils ne sont pas aussi

« Experts » que vous le croyez ! Entretien avec Joëlle Vuille.

HISTOIRE DES RELIGIONS Marie apparaît plus

souvent dans le Coran que dans la Bible.

C’ÉTAIT DANS ALLEZ SAVOIR ! Loup y es-tu ?

Oui, et en famille.

Texte paru en 2003.

MÉMENTO

Cours publics, animations, visites et expositions ouvertes au public.

FORMATION CONTINUE Le marketing management en 8 étapes. Deux nouvelles filières sous la loupe.

ABONNEMENTS Retrouvez Allez savoir ! et l’uniscope sur iPad.

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Avec Bertrand Graz.

LIVRES Art, littérature, archéologie, médias, justice, société.

CAFÉ GOURMAND L’aventure Blaise Cendrars.

Avec Christine Le Quellec Cottier.

SOMMAIRE

6 12 16 23 24 29 30 38 43 44

50 57 58 60 62 63 64 66

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SAVOIR ALLEZ

Le magazine de l’UNIL | Janvier 2013 | Gratuit

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 7

RECHERCHES EN PATAGONIE

Un bloc issu du glacier Grey flotte sur le lac du même nom, au soir du 27 novembre 2012.

Une vingtaine de doctorants en sciences de la Terre des Universités de Lausanne et de Genève, ainsi que de l’EPFZ, ont passé 15 jours en Patagonie, du côté argentin et du côté chilien.

Accompagnés par 5 professeurs, ils ont pu échanger et confronter leurs connaissances sur le terrain, dans une région à la géologie exceptionnelle. Une occasion unique pour ces spécialistes de partager leur savoir de manière transversale. Au programme : trekking, camping, confort minimal et cours à ciel ouvert, en pleine nature.

Images supplémentaires

www.unil.ch/unimedia/page94703.html

PHOTO FABRICE DUCREST

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HAYDN À LA MONTAGNE

Directrice du Chœur universitaire de Lausanne, Fruzsina Szuromi mène l’ensemble lors d’une répétition, le 17 novembre 2012 à Leysin. Pendant tout un week-end

« au vert », près de 80 choristes amateurs ont travaillé la Missa Cellensis de Haydn, avec le soutien d’une préparatrice vocale et d’une pianiste. Des moments de musique d’une grande intensité, alternant exercices vocaux, déchiffrage et attention portée sur les détails de la partition. Pour sa première saison à la tête du Chœur, la jeune cheffe a choisi une œuvre souvent joyeuse, brillante et enlevée.

Membres de la communauté UNIL- EPFL, les chanteurs donneront la messe en public et à Lausanne le 26 février 2013, ainsi que les 2 et 3 mai 2013 (lire en p. 58). DS Article détaillé et images supplémentaires www.unil.ch/allezsavoir.

PHOTO LUCA DA CAMPO - STRATES

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LA RELÈVE EST ASSURÉE

Directeur de l’Ecole des sciences criminelles (ESC), Pierre Margot s’adresse au public rassemblé dans l’auditoire Erna Hamburger le 2 novembre 2012, à l’occasion de la cérémonie de remise des diplômes. Ce jour-là, 33 bachelors en science forensique, 65 masters en science forensique et en droit, 2 doctorats et 5 prix ont été décernés. L’ESC comptait l’an dernier 494 étudiants, dont une majorité de femmes. En 1988, ils étaient 50 : l’intérêt pour les études dans le domaine des sciences criminelles n’est pas près de faiblir.

PHOTO ALBAN KAKULYA

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Les enquêtes d’opinion font partie de la vie quo- tidienne. Nos habitudes de consommation et nos comportements sociaux ou politiques sont régu- lièrement passés au crible. Pour fournir les tech- niques nécessaires à l’élaboration des sondages, à la collecte et à l’analyse des résultats, les univer- sités de Lausanne, Lucerne et Neuchâtel ont mis sur pied une « Maîtrise universitaire en Métho- dologie d’enquête et opinion publique ». Les pre- miers étudiants sont attendus en septembre 2013.

Ce cursus de haut niveau ne possède aucun équi- valent en Suisse. « Il suscite de l’intérêt auprès des entreprises spécialisées dans le domaine », ex-

plique Sybil Krügel, coordinatrice du projet, qui est confiante quant aux débouchés professionnels des futurs diplômés.

Donnée en deux langues (français et anglais ou al- lemand et anglais selon l’Université dans laquelle on est immatriculé) et sur trois sites, la formation se compose d’un tronc commun et d’une spécialisa- tion pendant un an, puis d’un travail de mémoire – que l’on peut lier à un stage - d’une durée de 6 mois. Ce master requiert des connaissances de base en statistique ou en méthodes quantitatives.

Les inscriptions sont ouvertes jusqu’au 31 mai. DS www.unil.ch/enseignement/page91125_fr.html

UN MASTER POUR ENQUÊTEURS 145

Il s’agit du nombre

d’étudiants âgés de plus de 40 ans, que ce soit en bachelor ou en mas- ter, à la rentrée de septembre 2012. Soit 1,3 % du total des per- sonnes inscrites en premier et deuxième cycle, qui se monte à 10 783. Au niveau du doctorat, le taux de quadragénaires (et plus) s’élève à 12 %, soit 228 sur 1 877.

Ces proportions ont peu varié par rapport aux données des 20 der- nières années. L’Université de Lausanne accueille aujourd’hui plus de 12 600 étudiants. DS

A quoi ressemblera l’université en 2084 ? De quoi sera faite demain la vie quotidienne des étudiants et des chercheurs ? Pour la troi- sième édition de son concours annuel de films de poche, l’UNIL a choisi un thème qui entre en

écho avec 1984 et s’ins- crit sous les thèmes de l’utopie et de son côté obs- cur, la dys- topie. Le principe ? La communauté uni- versitaire et les anciens étu- diants ont été invités à tourner des séquences d’une durée de 84 secondes au maximum, au moyen d’un téléphone portable ou d’un baladeur équipé d’une caméra.

Les vidéos soumises par les par- ticipants sont visibles en ligne, sur le site www.unil.ch/filmsde- poche. Les internautes peuvent y voter pour leurs favoris, et un jury composé de professionnels du cinéma et de chercheurs de l’UNIL remettra trois prix. DS ANTICIPATION

LE CHIFFRE ALUMNI

FORMATION

BRÈVES

Pour une première, ce fut une réussite. La soirée alumni, or- ganisée le jeudi 13 septembre 2012, a rassemblé 150 anciens diplômés de l’UNIL au Restau- rant de Dorigny. Issus de toutes les facultés, les convives se sont échangé cartes de visites et sou-

SOUVENIRS, SOUVENIRS

venirs dans une ambiance sym- pathique. Un évènement agré- menté par quelques discours, dont celui du recteur Dominique Arlettaz et du vice-recteur rat- taché à la Recherche Philippe Moreillon. A relever la présence enthousiaste de Claude Béglé,

ancien directeur de La Poste. En- fin, Vincent Kucholl, qui vit un beau succès avec 120 secondes, chronique satirique et matinale de Couleur 3, s’est produit dans un sketch à son image, soit...

impertinent. FZ

Inscriptions et infos : www.unil.ch/alumnil

LE FUTUR SUR PETIT ÉCRAN

lix Imhof © UNIL

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 13 L’Université de Lausanne pourrait accueillir le

cœur d’un nouveau réseau. La Ville de Lausanne et le Canton de Vaud ont décidé de créer un « cluster du sport international ». Chacun des partenaires le subventionne à hauteur de 250 000 francs par an.

Le secrétariat permanent de cette structure pourrait s’installer dans un bâtiment encore à construire, sur le campus de Dorigny. Un crédit cantonal de 400 000 francs a été accordé pour étu-

dier la réalisation de cette infrastructure, qui ac- cueillera également l’Académie internationale des sciences et techniques du sport, ainsi que l’Insti- tut des sciences du sport de l’UNIL.

Le « cluster » permettra de développer les liens entre la recherche et les institutions du sport in- ternational, renforcera l’accueil de nouvelles fédé- rations sportives et de manifestations. Il servira aussi d’atout pour la promotion économique. (RÉD.)

LE SPORT REGROUPE SES FORCES

CONCENTRATION

Pour suivre au quotidien l’actualité de la recherche à l’UNIL, et pour ne pas manquer les manifestations importantes qui s’y déroulent, le passage par Twitter s’avère utile. Le compte @unil est suivi par plus de 1 200 personnes. Ce réseau social prend de l’impor- tance dans les milieux scientifiques, car il permet de partager facilement l’information entre les chercheurs.

Le campus et sa vie quotidienne sont souvent photo- géniques. Pour en rendre compte, le compte unilch sur instagram rassemble des photos insolites et décalées, grâce aux filtres nostalgiques que propose cette ap- plication gratuite. L’architecture des bâtiments, cer- tains événements, le passage des saisons et le paysage de Dorigny constituent les sujets les plus traités. DS https://twitter.com/unil et http://instagram.com/unilch

140 SIGNES (ET DES PHOTOS) POUR LA SCIENCE

CONFÉRENCE RÉSEAUX SOCIAUX

L’EUROPE VUE DE BUDAPEST

La Fondation Jean Monnet pour l’Europe a lancé un cycle de conférences, sous le titre

« Plaidoyer pour l’Europe ». Le 16 novembre 2012, le Hongrois Péter Balázs s’est adressé – en français – au public rassemblé à l’UNIL.

Ancien ministre des Affaires étrangères de son pays, ce professeur à l’Université d’Eu- rope centrale à Budapest a retracé l’histoire récente de l’Union et de son élargissement, de manière lucide. S’il a parlé des « enclaves heureuses, comme la Suisse et la Norvège,

qui peuvent se permettre de faire cavalier seul », le diplomate a mis l’accent sur les pays des Balkans et de l’Est (comme le Bélarus et l’Ukraine). Pour ces derniers, l’UE n’est pas le seul pôle d’attraction du continent. La Rus- sie et la Turquie exercent également leur in- fluence. En conclusion, l’orateur a appelé à une « révision générale de la vieille machi- nerie politique » de l’Union, tout en rappelant qu’il s’agit d’une « construction admirable ». DS www.jean-monnet.ch

© Sébastien val/FJME

NOTRE BUT N’EST PAS DE FAIRE CROÎTRE NOTRE OFFRE

DE FORMATION À TOUT PRIX MAIS DE LA RENDRE LISIBLE ET COHÉRENTE.

Danielle Chaperon, vice-rectrice en charge du dicastère « Enseignement et Affaires étudiantes », dans Le Temps du 14 septembre 2012

lix Imhof © UNIL

CE « CLUSTER » PERMETTRA

DE DÉVELOPPER LES LIENS

ENTRE LA RECHERCHE ET LES

INSTITUTIONS DU SPORT

INTERNATIONAL

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897

Voici le nombre d’articles que les chercheurs de l’UNIL et du CHUV ont fait paraître cette année dans des revues scientifiques (d’après Serval au 11 décembre 2012). Certains d’entre eux sont tout à fait accessibles aux profanes. Ainsi, dans la Revue Suisse d’His- toire (Vol. 62/1/2012), Philippe Vonnard et Grégory Quin publiaient des Eléments pour une histoire de la mise en place du professionnalisme dans le football suisse dans l’entre-deux- guerres : processus, résistances et ambiguïtés. Un sujet ori- ginal et peu traité. « Dans les années 20, la tendance est à la professionnalisation dans le football européen, explique Philippe Vonnard, assistant à l’Institut des sciences du sport (ISSUL). La Suisse suit ce mouvement général avec la création d’une ligue professionnelle en 1933. » Il faut néan- moins rappeler que dans les

décennies précédentes, cer- tains joueurs sont déjà rému- nérés de manière illégale, un phénomène appelé « amateu- risme marron ». Même si cela semble difficile à comprendre aujourd’hui, cette légalisation est contestée. Les arguments ? Seule l’équipe nationale fait recette, et non le championnat (qui rassemble en moyenne

4 000 spectateurs par match dans les années 30) : de fait, les clubs n’arriveront pas à assumer la nouvelle donne. Par ailleurs, « des membres des élites conservatrices ont de la peine à considérer que le sport puisse constituer un métier à part entière », note Philippe Vonnard. Ceux-ci parviennent finalement à renverser la vapeur, et le professionnalisme est aboli en 1941, durant près de deux décennies.

Clair et passionnant, l’article a requis des recherches dans les archives de l’Association suisse de football, où sont no- tamment conservés les documents émanant du Comité cen- tral. Cette documentation a été complétée par une revue d’articles de journaux spécialisés de l’époque. « C’est l’une des difficultés rencontrées par les historiens du football : les sources sont rares et éparses », ajoute encore Philippe Von- nard, qui prépare en ce moment une thèse sur la genèse de l’UEFA (Union des Associations Européennes de Football).

Le travail des deux jeunes chercheurs ouvre des perspec- tives sur d’autres périodes du football suisse, encore très peu défrichées, comme la Deuxième Guerre mondiale et les années 50-60. DS

5557

Le nombre de références faites à l’Uni- versité de Lausanne et au CHUV dans les médias suisses, en 2012 (selon la revue de presse Argus, au 11 décembre 2012). L’exhumation du corps de Yasser Arafat, le 27 novembre, a suscité de très nombreux articles et commentaires dans le monde. Les experts du CHUV ont en effet prélevé des échantillons de sa dépouille, afin de déterminer si le leader palestinien a été empoisonné au polonium. Les résultats ne seront pas connus avant plusieurs mois.

La venue prochaine du Dalaï-Lama à l’Université de Lau- sanne, annoncée à fin octobre, a été largement relayée (lire également en page 59). Toujours sur le plan international, les élections américaines ont permis à des chercheurs de différents domaines (politique, économie, environnement) de faire valoir leur expertise dans les médias.

Les publications de l’Institut CREA d’économie appliquée, qu’elles concernent les exonérations fiscales, le PIB vau- dois ou l’état de la conjoncture, ont donné matière à com- mentaires dans la presse.

Les 25 ans du programme d’échanges Erasmus, fin sep- tembre 2012, ont permis de montrer que les Hautes Ecoles suisses attiraient particulièrement les étudiants étrangers.

Enfin, les informations institutionnelles, comme le regrou- pement des sciences du sport de l’Université de Genève et de Lausanne à Dorigny ou l’inauguration du Centre Sport et Santé UNIL-EPFL, ont fait l’objet d’articles dans la presse régionale. La campagne menée en ville de Lausanne pour attirer l’attention de la population sur le manque de loge- ments pour étudiants a rencontré un écho. DS

AMATEURS 1 – PROS 0

OBAMA, ÉCONOMIE ET ÉTUDIANTS

RECHERCHE

BRÈVES

L'UNIL DANS LES MÉDIAS PASSAGE EN REVUE

TRAVAUX RÉCOMPENSÉS

Professeure bour- sière du Fonds national suisse (FNS) à l'Ecole des sciences criminelles, Céline Weyermann a été distinguée par la Socie- dad Atlántica de Crimi- nalística y Ciencias Fo- renses, fin octobre 2012.

En août, le Emerging Eu- ropean Forensic Scien- tist Award récompensait la chercheuse pour l'en- semble de ses travaux.

Ces derniers, soutenus par le FNS et par l’UNIL, portent plus particulière- ment sur la datation des traces et sur leur évolu- tion au fil du temps, qu’il s’agisse d’empreintes di- gitales, de résidus de tir ou d’encre. Une exper- tise utilisée pour déter- miner si du texte a été

ajouté en douce et après signature à un document.

Céline Weyermann ap- précie de pouvoir travail- ler de manière transver- sale avec ses collègues.

Etablir des liens entre les domaines fait partie in- tégrante de sa mission :

« Ma recherche consiste à développer un modèle commun pour toutes les traces, qu’elles soient physiques ou numé- riques. Mais elle va au- delà, puisque les témoi- gnages sont concernés. » La trentenaire dirige trois doctorants et donne un cours à options (dans le cadre d'un projet pé- dagogique soutenu par l'UNIL) pour les étu- diants de master en Science forensique. DS

lix Imhof © UNIL

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 15

QUATRE CHERCHEURS DISTINGUÉS

NOMINATIONS ET RÉCOMPENSES

Décerné par The American Society For Cell Biology, le « Women in Cell Biology Junior Award 2012 » a été remis le 16 décembre 2012 à Sophie Martin, professeure asso- ciée au Département de microbio- logie fondamentale de la Faculté de biologie et de médecine et mère de deux enfants en bas âge. Cette reconnaissance internationale consacre l’originalité de son tra- vail. La chercheuse et son équipe étudient la polarisation cellulaire, c’est-à-dire la manière dont une cellule se construit en trois dimen- sions et prend la forme nécessaire pour remplir correctement sa fonc- tion spécifique. Par exemple trans- mettre de l’information dans le cas des cellules neuronales. (RÉD.)

Professeur au Département d'éco- nométrie et d'économie politique de la Faculté des Hautes Etudes Commerciales (HEC), Mathias Thoenig vient de recevoir une bourse junior de l'European Re- search Council (ERC). Des fonds difficiles à décrocher, puisque seuls 10 % des postulants y par- viennent. Il s’agit d’une première pour un projet junior en Sciences humaines et sociales à l'Univer- sité de Lausanne. Cette bourse, qui se monte à plus de 1 200 000 francs sur 60 mois, permettra au professeur et à son équipe de lan- cer un projet de recherche in- terdisciplinaire d'envergure in- titulé « L'économie des griefs et des conflits ethniques ». (RÉD.)

Professeure assistante boursière FNS à la Faculté de biologie et de médecine, Greta Guarda a ob- tenu un « Starting Grant » de l’Eu- ropean Research Council (ERC).

Il s’agit de bourses européennes destinées à soutenir des cher- cheurs en début de carrière. Ain- si, en septembre 2012, 536 scien- tifiques de 41 nationalités se sont vu octroyer des fonds importants.

Née en 1980, la chercheuse a étu- dié à l’Université de Zurich et à l’EPFZ, avant de faire son docto- rat à l'Institut de recherche en bio- médecine à Bellinzona. Elle a re- joint l’UNIL en 2007. Le projet mené par Greta Guarda et par son groupe vise à mieux comprendre notre système immunitaire. (RÉD.)

Le concours Durabilis UNIL-EPFL récompense des projets d’étu- diants ayant trait au développe- ment durable. Le projet de master de Lucile Develey, Si on marchait à Morgarten ? Etude de la marcha- bilité et des facteurs incitant à la marche dans un quartier chaux-de- fonnier, a été primé lors de l’édi- tion 2012. Pour son enquête, l’étu- diante en Faculté des géosciences et de l’environnement a parcouru les rues et rencontré les habitants d’un quartier jugé peu convivial et peu praticable à pied. Un mé- moire rassemble les résultats ob- tenus et les solutions proposées.

Aujourd’hui, Lucile Develey effec- tue un stage au sein de l’Associa- tion Mobilité piétonne, à Zurich. DS

lix Imhof © UNIL © DR © DR © Xavier Nussbaum

LITTÉRATURE INTERNATIONAL

DES ÉCHANGES AVEC L’INDE

Le 8 octobre 2012, un accord d’échange a été signé entre l’UNIL et la KIIT Univer- sity (Est de l’Inde), qui compte 17 000 étudiants. Représentant de cette dernière, et directeur de son Ecole de biotechnologie, Mrutyunjay Suar avait exposé en 2010 les problèmes environnementaux du Chilika Lake, une lagune située non loin de son institution, à la Faculté des géosciences et de l’environnement (GSE). Depuis, trois professeurs lausannois se sont rendus sur place. La formalisation de la rela- tion avec KIIT permettra des échanges d’étudiants pour des projets de master et des collaborations au niveau de la recherche. (RÉD.)

© Jean-Luc Epard RDB/GES/Balz Murer

Professeure honoraire à l’UNIL, Doris Jakubec a reçu l’un des Prix culturels Lee- naards le 27 novembre 2012 à l’Opéra de Lausanne. La lauréate a dirigé le Centre de recherches sur les lettres romandes de 1981 à 2003.

« Trois axes orientent son en- seignement et sa recherche : la critique génétique et la pratique de l’établissement de textes ; l’ouverture aux lit- tératures suisses et à la francophonie, dans une perspec- tive comparatiste ; la construction d’importants chantiers éditoriaux, dont Ramuz, Charles-Albert Cingria et Guy de Pourtalès », explique la Fondation. En ce moment, Doris Jakubec travaille justement sur le troisième volume de la Correspondance de Guy de Pourtalès, un ouvrage qui pa- raîtra en juin 2013 chez Slatkine. DS

UN PRIX LEENAARDS POUR DORIS JAKUBEC

© Jean-Christophe Bott/Keystone

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QUI VA SE RÉVEILLER ?

COMA

Certaines personnes sortent du coma. D’autres décèdent. Comment prédire le devenir de chacun ? Pour la première fois, des équipes du CHUV et de l’UNIL ont réussi à identifier des patients qui allaient se réveiller.

Ils ont levé un coin du voile sur un phénomène encore mystérieux.

TEXTE ÉLISABETH GORDON

L

e phénomène est troublant. La personne est allon- gée sur un lit, immobile, les yeux fermés. Elle respire et la plupart de ses fonctions physiologiques sont in- tactes ; elle ouvre même parfois les yeux. Pourtant, elle reste déconnectée de son environnement. Elle ne répond à pas aux stimuli extérieurs et reste indifférente à ses proches. C’est le coma.

Il s’agit d’un « trouble quantitatif de l’état de conscience, pendant lequel la personne reste sans réaction – ou avec des réactions minimes – et sans communication », comme le dé- finit Andrea Rossetti, médecin-associé au Service de neuro- logie et responsable de l’Unité d’épileptologie/EEG du CHUV.

Ce phénomène est donc différent de l’état de conscience minimale. Dans ce dernier cas, « la personne a du mal à se réveiller, mais par moments, la communication passe, même si elle est infime ». Cet état ne doit pas non plus être

confondu avec l’état végétatif, qui se situe entre ces deux cas de figure, dans lequel le patient « ouvre par moments les yeux, mais sans communiquer ». Dans tous les cas, la conscience est atteinte.

L’infarctus, première cause de coma

Dans cet état pathologique qu’est le coma, c’est le cerveau qui est atteint. Parfois directement, par exemple par un ar- rêt de la circulation sanguine qui crée un manque d’oxy- gène dans le cerveau. D’ailleurs, précise Mauro Oddo, res- ponsable de la filière neuro-réanimation au Service de médecine intensive adulte du CHUV, « l’arrêt cardiaque est la première cause d’admission de patients comateux dans les services de soins intensifs ». Elle devrait le rester puisque le nombre de personnes qui se retrouvent dans le coma après un infarctus « a beaucoup augmenté au cours

N° 1 L’ARRÊT CARDIAQUE EST LA PREMIÈRE CAUSE

D’ADMISSION DE PATIENTS COMATEUX AUX SOINS INTENSIFS.

MÉDECINE

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 17

© Miroslaw Oslizlo - getty images

Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 17

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des dix dernières années, du fait de l’amélioration de la prise en charge précoce de l’arrêt cardiaque », selon le spé- cialiste de neuro-réanimation.

Grâce à cela, « le nombre de patients qui arrivent vivants à l’hôpital a doublé au cours des dernières années, ajoute son collègue neurologue. 40 % d’entre eux se réveillent et parmi eux, la plupart (de 80 à 90 %) ne gardent que peu, ou pas, de séquelles de leur état comateux. »

Du traumatisme aux intoxications

Le cerveau peut aussi être directement affecté par « un trau- matisme très sévère comme un choc, une infection – par exemple une méningite bactérienne, indique Andrea Ros- setti. Plus rarement, cela peut venir d’une attaque cérébrale à un endroit stratégique comme le tronc cérébral, d’une tu- meur, d’un saignement ou de bien d’autres affections », car les causes du coma sont multiples.

Le cerveau peut aussi être altéré, indirectement cette fois, par des intoxications, notamment dues à des médicaments, à l’alcool ou à la drogue. Il peut encore être lésé par des dys- fonctionnements d’organes – comme une insuffisance ré- nale ou une hépatite sévère – ou par des métabolites qui dé- tériorent son fonctionnement.

Protéger le cerveau des comateux

Quelle que soit la cause, les conséquences sont les mêmes.

« Du point de vue fonctionnel, la personne n’est plus auto- nome », constate Andrea Rossetti. La prise en charge peut toutefois varier selon l’origine de la perte de conscience.

« Si le coma est dû à un arrêt cardiaque, on peut tenter de remettre le cœur en route. S’il a été provoqué par une ar- tère bouchée, on reperfuse cette dernière. Et si une infec- tion est en cause, on administre des antibiotiques de ma- nière agressive. »

Lors d’un arrêt cardiaque, tout est fait pour protéger le cerveau des malades. « On met le patient en hypothermie, en refroidissant légèrement son corps à 33°. Cela a pour ef- fet de ralentir son métabolisme et de diminuer le stress oxy- datif et l’inflammation qui peuvent aggraver les dégâts du cerveau », explique Mauro Oddo.

ANDREA ROSSETTI ET MAURO ODDO Responsable de l’Unité d’épileptologie/EEG du CHUV. Responsable de la filière neuro-réanimation au Service de médecine intensive adulte du CHUV. Nicole Chuard © UNIL

MÉDECINE

CHUV

Entretien entre une infirmière et deux médecins, au Service de médecine intensive adulte du CHUV (à g.). Ce dernier compte 33 lits. Le médecin assis au centre tient la « feuille d’ordres », qui répertorie les traitements et surveillances à apporter au patient, dont le dossier médical s’affiche à l’écran. Sur la photo de droite : les « pousse-seringues », qui fournissent les traitements nécessaires par voie veineuse. © Nicole Chuard

Le Centre d’imagerie biomédicale

www.cibm.ch

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En outre, on administre aussi au comateux des séda- tifs afin « de maintenir son cerveau au repos pendant 24 ou 48 heures, on stabilise sa pression sanguine et on fait en sorte que le débit sanguin cérébral soit optimal ».

Quel patient a une chance de sortir du coma ?

Grâce à ces gestes médicaux, et notamment à l’utilisation de l’hypothermie, le neuro-réanimateur a pu constater que « le pronostic s’est amélioré au cours de ces dernières années ».

En outre, les traitements précoces améliorent la qualité du fonctionnement cognitif après le réveil des patients.

Il serait donc utile d’affecter de préférence les ressources disponibles aux patients qui ont une bonne chance de sortir de leur coma. Mais comment les repérer ? Le problème est, qu’actuellement, il est impossible de le faire. Certes, il existe de nombreux tests cliniques – examens des réflexes (notam- ment de la pupille), mesure de marqueurs sanguins qui re- flètent l’état des neurones, électroencéphalogramme (EEG), imagerie cérébrale, etc. Mais ils permettent uniquement de détecter des personnes qui ont un grand risque de ne jamais sortir du coma. Quant aux autres, ils se trouvent dans une

« zone grise », selon les termes d’Andrea Rossetti. « Il faut at- tendre des jours, ou parfois des semaines, avant de pouvoir prédire leur devenir, ce qui entraîne un stress pour les soi- gnants et pour la famille », souligne le neurologue.

Une première à Lausanne

La situation pourrait bientôt changer grâce aux recherches menées au Centre d’imagerie biomédicale (CIBM), un insti- tut commun au CHUV, à l’UNIL, à l’EPFL, à l’Université de Genève et aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).

Marzia De Lucia, maître-assistante au CIBM, en collabora- tion avec Andrea Rossetti et Mauro Oddo, a en effet trouvé le moyen de repérer, lors des premiers jours du coma, les per- sonnes qui avaient une chance quasi certaine de se réveil- ler. Ce résultat, publié récemment dans le journal de neuro- logie Brain, représente une première, car aucune étude de ce genre n’avait jamais été réalisée dans ces conditions, « même sur des animaux », précise la jeune chercheuse.

MARZIA DE LUCIA Maître-assistante au Centre d’imagerie biomédicale.

Nicole Chuard © UNIL

PRÉSENCE HUMAINE

Le personnel est formé spécialement aux soins en médecine intensive. « Au-delà des aspects techniques, les contacts humains sont essentiels », indique Thierry Szostek, infirmier chef au Service de médecine intensive adulte du CHUV. Par exemple, il faut apprendre à détecter la douleur ou l’inconfort chez des personnes qui ne peuvent pas parler. Les soignants parlent aux patients comateux comme s’ils étaient conscients. © Nicole Chuard

Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 19 Le Centre d’imagerie

biomédicale www.cibm.ch

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Le test consiste à soumettre les patients à des stimuli au- ditifs – il s’agit « d’une série de sons réguliers, entrecoupés de sons plus inattendus, c’est-à-dire plus longs ou plus courts ou encore plus aigus ou plus bas », explique Marzia De Lu- cia. Parallèlement, les réactions cérébrales du malade sont mesurées à l’aide de l’électroencéphalographie, une tech- nique qui enregistre l’activité électrique du cerveau à l’aide d’électrodes posées sur le crâne. L’expérience est faite une première fois au cours du premier jour du coma, « pendant que le patient est en hypothermie », puis elle est renouvelée le lendemain, alors que son corps a été réchauffé et qu’il a retrouvé une température normale.

Seule compte l’évolution des performances

L’étude, menée par la doctorante Athina Tzovara sous la di- rection de Marzia De Lucia, a porté sur 12 personnes admises au Service de soins intensifs du CHUV et qui étaient dans le coma après un arrêt cardiaque. « Nous avons constaté que la plupart d’entre elles pouvaient effectivement distinguer les différents types de sons, même lorsqu’elles étaient sous sé- dation et en hypothermie », explique la chercheuse du CIBM.

Mais le plus intéressant est ailleurs. Les chercheurs ont re- marqué que le paramètre important est « l’évolution des per- formances de discrimination auditive » des patients au cours des deux enregistrements. Seuls ceux qui différenciaient mieux les sons le deuxième jour que le premier sont par la suite sortis du coma. Soucieuse de valider leurs résultats, la chercheuse et ses collègues ont renouvelé leurs expériences sur « 18 autres nouveaux patients, avec le même protocole et la même machine ». Ils ont pu confirmer leurs premières conclusions : seuls ceux qui avaient progressé dans la dis-

crimination sonore étaient sortis de leur coma. En outre, à titre de contrôle, ils ont aussi étudié 5 volontaires sains, qui se sont prêtés à l’exercice « allongés et les yeux fermés ».

Leurs réactions cérébrales aux stimuli auditifs se sont révé- lées « assez similaires à celles des patients en hypothermie ».

Pouvoir prédictif de 100 %

Non sans satisfaction, Marzia De Lucia peut donc dire que le test qu’elle a mis au point a « un pouvoir prédictif de 100% sur les chances de réveil ». La chercheuse souhaite toutefois re- nouveler l’expérience sur un nombre plus grand de patients – « entre 100 et 150 » – pour être sûre de son fait. Si les résul- tats sont à la hauteur de ses espoirs, ce sera une très bonne nouvelle pour les familles des patients. Le test serait en effet facilement utilisable dans la pratique hospitalière. « Il n’est pas besoin d’être un expert pour estimer l’évolution de la discri- mination auditive des patients, souligne la chercheuse. Nous avons développé un programme informatique qui permettra aux médecins de se contenter d’appuyer sur un bouton, puis de lire les résultats des enregistrements sur leur écran. »

Intérêt pratique et éthique

Ce test devrait ainsi permettre aux soignants « d’optimiser la prise en charge des patients durant la phase aiguë du coma et de mieux informer les familles », conclut Marzia De Lucia.

En tant que clinicien, Andrea Rossetti compte beaucoup sur cette nouvelle technique qui pourrait lui donner les moyens de « poser le pronostic le plus fiable possible » dans les premiers jours du coma. Ce test, estime-t-il, aurait « un in- térêt pratique et même éthique ». Les patients, leurs familles et les soignants auraient tout à y gagner. 

MÉDECINE

AIR ET NOURRITURE

L’infirmière manipule la sonde naso-gastrique qui permet de nourrir le patient (à g.). La machine sur la photo de droite est le respirateur, qui supplée à la fonction respiratoire de la personne soignée. Celle-ci est ventilée grâce à un tube introduit dans sa trachée. © Nicole Chuard. Remerciements à l’équipe du Service de médecine intensive adulte du CHUV.

100% UN TEST PERMET

DE PRÉDIRE À

COUP SÛR LES

CHANCES DE

RÉVEIL D’UN

PATIENT DANS LE

COMA.

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 21 ON NE RESSENT PAS LA

DOULEUR QUAND ON EST DANS LE COMA

C’EST VRAI ET FAUX

« C’est très difficile à savoir, mais il pa- raît très peu probable qu’on éprouve une souffrance », constate Andrea Rossetti, médecin associé au Service de neurologie du CHUV. Les patients dans le coma qui sont traités dans les services de soins intensifs reçoivent des sédatifs puissants. Toutefois,

« nous avons un moyen qui nous per- met de dire qu’ils ressentent la dou- leur, précise Mauro Oddo, responsable de la neuro-réanimation au Service de médecine intensive du CHUV. Mais la ressentir, cela ne signifie pas pour au- tant qu’ils en soient conscients ». Donc qu’ils souffrent réellement.

UNE PERSONNE DANS LE COMA ENTEND TOUT CE QUI SE PASSE AUTOUR D’ELLE

C’EST PLUTÔT FAUX

« Plus on est en coma profond, moins on interagit avec l’environnement et moins en entend », précise Andrea Rossetti. Il se peut toutefois que dans certaines formes de coma, lorsque les patients ne sont pas sous sédation ou que cette dernière est minimale, la personne réagisse à ce qui se passe autour d’elle.

L’étude menée au CHUV (lire article principal) utilise des stimuli auditifs pour prédire si un patient va, oui ou non, se réveiller. Ces sons sont donc reçus par le cerveau qui réagit. Mais sont-ils pour autant intégrés, traités de manière à être vraiment perçus et entendus ? Il n’y a pas d’argument, à ce stade, pour l’affirmer.

IL FAUT TOUCHER LES PA- TIENTS COMATEUX

C’EST VRAI

Bien qu’il y ait peu d’études sur le su- jet, « il semble que le fait de toucher le patient et de stimuler ses divers

PEUT-ON PASSER 20 ANS DANS LE COMA ?

sens aide à la récupération », selon le spécialiste de neuro-réanimation. « Il faut aussi parler aux malades, ajoute son collègue neurologue. On traite un patient comateux comme s’il était conscient : on lui explique les gestes que l’on fait, on communique avec lui. »

SI UN COMATEUX OUVRE LES YEUX, C’EST SIGNE QU’IL VA SE RÉVEILLER

C’EST FAUX

« Après un arrêt cardiaque, certains malades se trouvent dans un coma ir- réversible ; on sait que leur cortex

Phénomène mystérieux, le coma intrigue et donne naissance à de nombreux préjugés. Allez savoir ! vous pro- pose un « Vrai ou faux ? » avec les spécialistes.

TERRI SCHIAVO

Après des années dans le coma, cette Américaine est morte en 2005 suite à la coupure de son alimentation. Son cas est devenu un enjeu de débat national autour de l’euthanasie aux Etats-Unis.

© Peter Muhly - Reuters

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n’est plus en état de fonctionner et qu’ils ne se réveilleront pas. Pourtant, il leur arrive d’ouvrir les yeux, ce qui perturbe leur famille », constate Mau- ro Oddo. En fait, dans ce cas, « l’ouver- ture et la fermeture des yeux sont un réflexe automatique », précise le neu- ro-réanimateur. La sortie de coma peut être constatée uniquement

« lorsque la personne ouvre les yeux à la demande ». C’est un bon signe, car cela prouve qu’elle a repris le contact avec son environnement.

ON PEUT PASSER 20 ANS DANS LE COMA

C’EST VRAI

On peut passer de très nombreuses années dans cet état de perte de conscience, comme le prouve le cas d’Ariel Sharon, ex-premier ministre israélien plongé dans un coma pro- fond depuis janvier 2006. Plus que d’une affaire médicale, la durée du coma « est une question culturelle », remarquent de concert les deux spé- cialistes du CHUV. Dans certains pays, les médecins maintiennent les patients en respiration artificielle jusqu’à leur décès. C’est notam- ment le cas en Israël, en Italie, au Ja- pon ou parfois aux Etats-Unis où le cas de Terri Schiavo, restée dans le coma entre 1990 et 2005, a créé la polémique.

Quoi qu’il en soit, « plus on est res- té longtemps dans le coma, moins grande est la chance de réveil », sou- ligne Andrea Rossetti.

LORSQU’ON EST DANS LE COMA, ON NE RÊVE PAS

C’EST VRAI

« Nous n’avons aucun argument pour dire qu’une personne dans le coma

rêve, dit Andrea Rossetti. D’autant que le rêve est un état physiologique, alors que le coma n’en est pas un. »

LE COMA ÉTHYLIQUE N’EST PAS UN VRAI COMA

C’EST FAUX

L’intoxication par l’alcool, de même que par des drogues, « est l’une des causes du coma. On peut d’ailleurs en mourir », souligne Mauro Oddo. Tou- tefois, le pronostic est a priori meil- leur que dans d’autres cas car, dans la mesure où la personne n’a pas de lésions cérébrales, « si elle se réveille, elle aura moins de séquelles ».

DANS LE FILM « PARLE AVEC ELLE », UN INFIRMIER VIOLE UNE JEUNE FILLE COMA- TEUSE. PEU APRÈS, CELLE-CI SORT DU COMA

MÉDICALEMENT FAUX

« C’est du cinéma », constate en riant Mauro Oddo. D’autant que, ajoute Andrea Rossetti, « l’héroïne est tom- bée enceinte, alors que durant le coma, on observe une dérégulation des hormones qui rend l’ovulation très peu probable ». Les deux méde- cins ont apprécié l’aspect artistique de ce film qui n’est toutefois pour eux qu’une « fiction ».  EG

« PARLE AVEC ELLE »

Le film d’Almodóvar met en scène une jeune femme dans le coma qui se réveille enceinte après avoir été violée par un infirmier.

© Kpa - RDB

MÉDECINE

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 23

RÉFLEXION

SYSTÉMATISER LA PUBLICATION ET LES

INTERVENTIONS EN ANGLAIS NE PEUT RELEVER QUE DE LA SERVITUDE VOLONTAIRE.

E

ntre nous, chercheuses et cher- cheurs en sciences humaines et sociales, il est devenu courant de dénoncer la dictature de l’an- glais dans nos disciplines, tout en continuant à rédiger dans cette langue des articles calibrés pour des revues qui les publient non pas en fonction de leur originalité scienti- fique, mais pour nourrir leur propre visibilité. La pression s’étend puisqu’il est quasi indispensable, même pour des postes de relève, d’afficher de tels articles sur son CV. Au niveau pro- fessoral, une postulation pourtant ex- cellente risque d’être écartée si elle ne contient pas tant de publications dans cette langue. L’anglais devient la clé pour séduire les pairs et les ex- perts détenant le pouvoir d’accorder des postes et des crédits.

Chose étrange, nos chercheuses et chercheurs subissent une situa- tion qu’ils jugent déplorable du point de vue scientifique et humain, tout en se pliant à ces normes mondiali- sées : aucune résistance collective ne s’organise dans nos disciplines et nos institutions.

Systématiser la publication et les interventions en anglais ne peut rele- ver que de la servitude volontaire. C’est faire allégeance à une puissance – no- tamment universitaire –dominante en se plaçant automatiquement dans une situation d’infériorité. Le spec- tacle de chercheuses et chercheurs, parfois confirmés, baragouinant un Pidgin English plus ou moins disgra-

CONTRE

L’HÉGÉMONIE DE L’ANGLAIS

cieux serait risible s’il ne constituait pas le lot de plus en plus ordinaire de la communauté universitaire. La piètre qualité d’écriture de la plu- part des articles rédigés en anglais par des non-anglophones inspire les mêmes sentiments. Il ne s’agit pas, en effet, d’une lingua franca que per- sonne ne maîtrise comme sa langue maternelle. C’est, pour les millions d’universitaires non anglophones de par le monde, la langue de l’autre, et il s’avère que cet « autre » tire une par- tie de sa puissance de ce simple fait.

Les exemples, encore nombreux, de travaux ignorant les débats me- nés dans d’autres langues sur leur objet de recherche sont d’ailleurs tout aussi inquiétants. Une certaine pra- tique de l’anglais nous semble néces- saire et cette aptitude peut s’étendre à d’autres langues encore ; une connais- sance au moins passive permettrait à la communauté universitaire de mettre en commun ces différentes lec- tures. Or, aujourd’hui, c’est moins de mise en commun que de sens unique qu’il s’agit.

La pensée n’est pas antérieure au langage. Condamner l’université, la recherche et la science au monolin- guisme, c’est automatiquement les appauvrir. Soit parce que nos textes devront être traduits avant d’être dif- fusés, soit parce que nous nous efforce- rons de penser dans une seule langue.

L’injonction à se plier à ce rituel absurde s’inscrit dans un mouve- ment d’ensemble de la recherche et

des universités, visant à faire de ces dernières un grand marché homogé- néisé et standardisé au sein duquel les personnes et leurs « productions » se trouvent en perpétuelle concur- rence. La qualité desdites produc- tions – livres, articles, interventions, organisations de rencontres, etc. – est devenue bien secondaire, seule compte leur quantité. Les universi- taires sont ainsi animés d’une véri- table frénésie qui produit tout sauf des travaux créatifs, originaux, inven- tifs. La contrainte du nombre ne peut conduire qu’au mimétisme des thé- matiques et des concepts, travers de plus en plus fréquent puisque cette répétition garantira les meilleures chances de publication. Le monolin- guisme intégré comme une évidence creuse cette dérive.

Ces évolutions servent en réalité deux objectifs : la fin des universités conçues comme des services publics, au sens le plus noble du terme, et l’af- faissement de la pensée critique au sein même des universités. L’espace d’autonomie et de liberté que nos ins- titutions ont pu représenter, dans cer- tains moments privilégiés, est en train de disparaître. On sent chaque jour da- vantage les ravages de ces transforma- tions, et l’on désespère en constatant la faible résistance qui leur est opposée.

Pour les chercheurs et chercheuses que nous sommes, ce qu’il est désor- mais urgent d’imaginer, ce sont des stratégies de résistance. Et nous ajou- tons qu’il faut le faire collectivement.  GIANNI HAVER ET ANTOINE CHOLLET Enseignants-chercheurs à la Faculté

des sciences sociales et politiques

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ÉCONOMIE

MICHAEL SCHUMACHER

L’ex-champion de Formule 1 allemand peut bénéficier du forfait fiscal vaudois.

© David Ebener / DPA / Keystone

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 25

LE FORFAIT FISCAL

EN QUESTIONS

ROGER FEDERER

Par contre, le Bâlois n’y a pas droit. Pourtant, les deux sportifs réalisent l’essentiel de leurs gains à l’étranger.

@ Andy Rain / EPA / Keystone

Est-il normal que Michael Schumacher bénéficie de cette procédure et pas Roger Federer ? C’est l’une des questions

que pose ce fameux forfait fiscal, qui aurait été inventé par les Vaudois il y a 150 ans, et qui est de plus en plus

contesté en Suisse et à l’étranger. La France vient ainsi de lancer une offensive contre cette spécialité.

TEXTE SONIA ARNAL

(26)

L

es Bernois ont décidé, pour le plus grand bonheur de Johnny Hallyday, de sauver le forfait fiscal. C’était le 23 septembre 2012. Mais Zurich, les deux Bâles, Schaf- fhouse et Appenzell Rhodes-Extérieures y ont tous re- noncé entre 2009 et 2012. Depuis que la crise se ma- nifeste à nos portes, le forfait fiscal est controversé : outre ces abolitions, différents cantons, comme Berne justement, ont durci les conditions d’octroi.

Cette façon bien particulière de taxer les résidents étran- gers est également sur la sellette au niveau national puisque la gauche a lancé une initiative pour le rayer définitivement – le Parlement a pour sa part décidé de le maintenir, mais de revoir à la hausse ses exigences. Au-delà des frontières la contestation monte aussi. Ainsi, début janvier, la France a décidé de s’attaquer au forfait fiscal, un geste qualifié de

« déclaration de guerre » par Pascal Broulis, conseiller d’Etat en charge des finances vaudoises. Bref, cette forme d’im- position fait débat actuellement en Suisse. Mais au fond, de quoi parle-t-on vraiment ? Le point avec un spécialiste de l’UNIL.

Qu’est-ce qu’un forfait fiscal ?

« C’est un moyen particulier de taxer une frange très pré- cise de la population », explique Marius Brülhart, professeur d’économie à la Faculté des hautes études commerciales.

Plutôt que de remplir un document où il déclare l’entier de ses revenus et de sa fortune, le contribuable négocie une somme annuelle forfaitaire avec l’administration, suivant des règles différentes de celles qui sont en vigueur pour les contribuables ordinaires.

Qui peut en bénéficier ?

« Pour que l’administration entre en matière, il faut que le demandeur soit étranger, qu’il réside en Suisse (qu’il y vive donc plus de six mois par an) et qu’il n’y exerce pas d’acti- vité lucrative », énumère Marius Brülhart. Un directeur de banque, comme le patron américain de Credit Suisse Bra- dy Dougan, n’est pas concerné, puisqu’il travaille essentiel- lement à Zurich. En revanche, Johnny Hallyday, qui réalise ailleurs dans le monde la plus grande part de ses gains, peut en profiter, alors qu’un Suisse ne peut en aucun cas y avoir droit, quelle que soit sa situation financière.

On peut ainsi supposer que Michael Schumacher en bé- néficie, alors que Roger Federer doit déclarer à l’autorité fis- cale l’entier de ses revenus et de sa fortune. Et pourtant, le champion de tennis comme l’ex-pilote de Formule 1 réalisent l’essentiel de leurs revenus à l’étranger.

Comment le montant du forfait est-il calculé ? La somme forfaitaire négociée avec l’administration ne se base pas sur une déclaration des revenus globaux ou de la fortune totale, que le contribuable peut conserver cachés.

« Elle est calculée sur les dépenses en Suisse, explique Ma- rius Brülhart. Concrètement, c’est le loyer ou la valeur loca- tive du domicile qui constitue l’élément central du calcul.

On estime la valeur annuelle, et on la multiplie par cinq. A ce total, le fisc peut ajouter d’autres éléments de dépenses, comme les voitures, les avions privés, et aussi les salaires versés au personnel. »

Concrètement, un étranger qui achète un appartement dont la valeur locative mensuelle est de 5 000 francs sera imposé sur un revenu de 300 000 francs par année (5 000 x 12 x 5), au minimum. Le rentier étranger qui vient s’éta- blir sur les rives du Léman est donc incité, s’il souhaite éco- nomiser sur ses impôts, à louer un studio dans l’Ouest lau- sannois plutôt qu’à vivre dans un château sur la Riviera – et à passer lui-même la tondeuse. Le forfait ne devient in- téressant, forcément, que si le montant ainsi calculé est in- férieur à la somme qui serait due à l’administration fiscale si le contribuable déclarait l’entier de sa fortune et de ses re- venus, comme n’importe qui d’autre.

Où est-il en vigueur ?

Le forfait fiscal existe dans tous les cantons suisses, moins les cinq qui ont décidé de le supprimer durant les trois der- nières années, soit Zurich, les deux Bâles, Schaffhouse et Appenzell Rhodes-Extérieures. Ailleurs dans le monde, on trouve également des possibilités de négocier des conditions d’imposition particulières lorsqu’on est un résident étran- ger. « A Monaco par exemple, personne ne paie d’impôts sur le revenu, rappelle le chercheur. Ni les nationaux, ni – à l’exception des Français – les étrangers qui viennent y ré- sider. En Autriche, on peut sous certaines conditions obte- nir une forme de taxation qui se base sur les principes ap- pliqués dans le précédent pays de résidence, quel qu’il soit. »

ÉCONOMIE

MARIUS BRÜLHART Professeur au Département d’économétrie et d’économie politique de la Faculté des hautes études commerciales.

Nicole Chuard © UNIL

Le Département d’économétrie et d’économie

politique de la Faculté des hautes études commerciales www.hec.unil.ch/deep/home

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Allez savoir ! N° 53 Janvier 2013 UNIL | Université de Lausanne 27 Autre exemple avec le Royaume-Uni, où les personnes qui

sont soumises au régime dit du « résident non domicilié » ne paient un impôt que sur les revenus réalisés dans le pays – les autres gains sont exonérés.

De quand date son invention ?

Le canton de Vaud est, semble-t-il, le premier à avoir eu cette idée. En 1862 – on a fêté l’an passé ses 150 ans –, le Grand Conseil a constaté que les riches étrangers s’instal- laient volontiers sur les rives du Léman pour de longues pé- riodes, voire définitivement. Il a donc proposé d’introduire une taxe sur la fortune mobilière, histoire notamment de les faire contribuer à la construction des infrastructures qu’ils utilisaient (transports, etc.).

Deux fronts s’opposent déjà à propos du forfait fiscal, dès les origines : certains craignent que cet impôt ne fasse fuir les riches étrangers vers des cieux plus cléments fiscale- ment, fussent-ils moins agréables en termes de climat, pé- nalisant ainsi l’hôtellerie, l’industrie des loisirs et les com- merces. D’autres trouvent inique que ces personnes aisées jouissent de privilèges (par exemple une exonération to- tale les deux premières années) inaccessibles aux contri- buables suisses.

A quoi sert-il ?

Soit à attirer des grandes fortunes étrangères par le biais d’un climat fiscal clément, soit – une fois qu’ils sont instal- lés ici – à les faire contribuer à l’effort collectif, mais sans

les étrangler, au risque sinon de les voir repartir vers des pays fiscalement plus attractifs. Toute la question est de sa- voir à quel point la fiscalité est décisive pour le choix de ré- sidence de ces contribuables, et dans quelle mesure d’autres paramètres (sécurité, qualité de vie, des écoles, du climat, de l’offre culturelle) jouent un rôle.

Combien cela rapporte-t-il au canton de Vaud et à la Confédération ?

« Il y a en Suisse quelque 6 000 personnes au bénéfice d’un forfait fiscal, explique Marius Brülhart. Le quart environ, soit 1 500, habitent le canton. Les forfaitaires résidant sur sol vaudois paient 230 millions de francs d’impôt chaque année, ce qui, pour donner un ordre de grandeur, correspond à la moitié du budget de fonctionnement annuel de l’Université de Lausanne. » A l’échelle de la Suisse, ce sont 700 millions de francs chaque année qui sont payés via un forfait fiscal.

Que se passerait-il si on le supprimait ?

C’est la grande question. Parmi les défenseurs du forfait fis- cal, beaucoup insistent sur le fait que ces grandes fortunes quitteraient la Suisse s’il était abandonné – ce qui, outre une baisse des recettes fiscales, impliquerait d’autres pertes in- directes (on parle de 20 000 emplois menacés, notamment dans la construction et les services de type, par exemple, conseil fiscal et gestion de fortune). Difficile évidemment de savoir ce qu’il en est sans étude et avec fort peu de chiffres – les administrations sont très réticentes à donner des

LUTTE

Le virus H5N1 (ci-dessus). Vaccination orale contre la polio au Yémen (en haut à gauche) et vaccina- tion contre la grippe saisonnière en Europe.

GSTAAD

Le chalet acheté par Johnny Hallyday dans la station des Alpes bernoises. Le chanteur n’y passe que peu de temps.

© Jean Pierre Clatot / AFP

Le Département d’économétrie et d’économie

politique de la Faculté des hautes études commerciales www.hec.unil.ch/deep/home

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ÉCONOMIE

informations dans ce domaine. « Les seules données pré- cises dont nous disposons concernent Zurich, constate Ma- rius Brülhart. Ce canton a publié des chiffres sur les réac- tions des contribuables concernés dans l’année qui a suivi l’abolition du forfait fiscal. Ces chiffres permettent de voir si les résidents qui en ont bénéficié quittaient en masse le can- ton, comme le prétendaient les défenseurs du forfait. Claire- ment, ce n’est pas le cas. Mais on constate néanmoins qu’ils ont une très forte mobilité. »

Sur les 201 résidents concernés, 26 ont quitté la Suisse, et 66 ont changé de canton. Ce qui représente une perte de 13 millions de francs pour le fisc zurichois. « Mais les 109 qui sont restés, et qui représentent plus de la moitié des personnes jusque-là au bénéfice d’un forfait fiscal, ont été imposés de façon ordinaire, soit sur la base d’une déclara- tion de leur fortune et de leurs revenus totaux, et ont donc payé plus d’impôts », nuance le spécialiste. Au final, pour le canton de Zurich, l’opération est presque blanche – avec un solde très légèrement positif.

Pourquoi le forfait fiscal est-il remis en question aujourd’hui ?

Johnny Hallyday qui devrait habiter Gstaad, mais avoue plus ou moins ouvertement n’y passer que les vacances de ski, ça agace. Depuis la crise, la population est plus sen- sible à la justice dès que l’argent est en jeu, et donc notam- ment en matière fiscale. Voir les plus aisés bénéficier de ce qu’elle considère comme des avantages alors que la classe moyenne n’en a guère est mal toléré. Il y a bien sûr le soup- çon que certains bénéficiaires des forfaits fiscaux « trichent »

en ne remplissant pas tous les critères (par exemple la dé- licate question du lieu de résidence effectif, mais aussi du lieu où sont réalisés les revenus : à l’heure d’internet, allez savoir si tel patron est en villégiature dans son chalet ou si son salon n’est pas plutôt le quartier général de sa multina- tionale). Mais au-delà, une violation du principe de l’impo- sition selon la capacité contributive peut déranger, comme l’observe Marius Brülhart : « Bien sûr, il existe une concur- rence fiscale en Suisse entre certains cantons et à l’intérieur des cantons entre les communes. Mais vous ne pouvez pas éviter l’impôt sur vos revenus réalisés dans un canton en déclarant votre résidence dans le canton d’à côté. Par contre, avec le forfait fiscal, il est vrai que tous les contribuables ne sont pas soumis au même traitement. »

En quoi la recherche peut-elle être utile dans ce débat ?

« La mobilité des contribuables, notamment des plus ai- sés, ainsi que leur sensibilité à la variation de la charge fis- cale sont des éléments essentiels pour anticiper les effets des changements dans la façon dont on impose les contri- buables », explique Marius Brülhart. Pouvoir mener d’autres études comme celle entreprise avec les chiffres du canton de Zurich après l’abrogation du forfait fiscal serait idéal, mais ces données sont le plus souvent enfouies sous le sceau du secret. « Par contre, nous avons accès à une base de don- nées de la Confédération, qui contient toutes les déclara- tions, bien sûr anonymisées, des quarante dernières années.

Nous avons un financement du Fonds National pour les étu- dier. Cela nous permettra d’analyser plus finement les réac- tions des contribuables aux variations de charge fiscale. »

MONACO

Personne n’y paie d’impôts sur le revenu.

Ni les nationaux, ni – à l’exception des Français – les étrangers qui viennent y résider.

© Eric Gaillard / Reuters

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