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Article pp.65-75 du Vol.37 n°212 (2011)

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Texte intégral

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D O S S I E R

Les relations siège-filiales dans les multinationales

sous la direction de

Ulrike Mayrhofer

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Katia ANGUE Christoph BARMEYER Jean-François CHANLAT Ana COLOVIC Stéphanie DAMERON Eric DAVOINE Pierre DUSSAUGE Yvonne GIORDANO Isabelle HUAULT Jacques JAUSSAUD Gérard KOENIG Jean-Paul LEMAIRE Thomas LOILIER Olivier MEIER Samuel MERCIER

Eric MILLIOT Caroline MOTHE Claude OBADIA Florence PALPACUER Yvon PESQUEUX Jean-Jacques PLUCHART Frédéric PREVOT Nathalie PRIME Emmanuelle REYNAUD Jan SCHAAPER Albéric TELLIER Olivier TORRES Sabine URBAN Philippe VERY

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Cet article porte sur la gestion des relations siège-filiales dans les firmes multinationales. L’auteur examine les contours de la firme multinationale et ses différentes configurations organisationnelles. L’analyse proposée met en relief la diversité des relations qui peuvent être établies entre les différentes entités d’un même groupe. Compte tenu de l’éclatement de la chaîne de valeur, leur gestion représente un enjeu stratégique pour les entreprises.

ULRIKE MAYRHOFER IAE Lyon, université Lyon 3

La gestion des

relations siège-filiales

Un enjeu stratégique pour les firmes multinationales

DOI:10.3166/RFG.212.65-75 © 2011 Lavoisier, Paris

D O S S I E R

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D

ans un contexte mondial en muta- tion (Milliot et Tournois, 2009), la firme multinationale soulève de nombreuses interrogations, tant pour les praticiens (Ghemawat et Hout, 2008) que pour les chercheurs (Hennart, 2009). En effet, les firmes multinationales jouent un rôle moteur dans l’économie mondiale et contribuent à l’intégration croissante des économies nationales. En même temps, l’évolution de l’environnement mondial influence leurs choix stratégiques et leurs pratiques managériales (Mayrhofer, 2011).

Sous l’impulsion de la mondialisation éco- nomique, les firmes multinationales ont considérablement changé : des entreprises fortement ancrées dans leur pays d’origine et ayant un mode de management centralisé ont ainsi cédé la place à des entreprises dont les activités sont éclatées à l’échelle mon- diale et qui ont établi des réseaux de rela- tions dans de nombreux pays. La gestion des relations siège-filiales est dès lors deve- nue plus difficile (Beddi, 2008 ; Jaussaud et Schaaper, 2006).

Pour rester compétitives, les firmes multi- nationales doivent mettre en place des mécanismes permettant de coordonner, de manière efficiente, les activités exercées par des entités réparties dans le monde entier et dont les contributions ne sont pas iden- tiques. Pour mieux comprendre les enjeux liés à la gestion des relations siège-filiales, il est d’abord nécessaire de mettre en relief quelques caractéristiques clés des firmes multinationales. Ensuite, nous nous interro- geons plus spécifiquement sur les contours des firmes multinationales et leurs configu- rations organisationnelles.

I – LA PLACE DES FIRMES MULTINATIONALES DANS L’ÉCONOMIE MONDIALE

Durant ces dernières décennies, le poids des firmes multinationales (FMN) dans l’éco- nomie mondiale a considérablement aug- menté. Au début des années 1990, on pou- vait compter près de 37 000 firmes multinationales dans le monde, possédant quelque 170 000 filiales à l’étranger. En 2009, il existe environ 82 000 firmes multi- nationales, qui gèrent quelque 810 000 filiales localisées dans divers pays (Cnuced, 2010). Compte tenu de l’importance prise par les marchés émergents, il paraît légi- time d’étudier la place actuelle des firmes multinationales des pays développés et leurs choix en matière de localisation des filiales.

1. La plupart des firmes multinationales ont leur siège dans un pays développé…

Depuis longtemps, la plupart des firmes multinationales ont leur siège dans des pays développés, même si leur place respective a tendance à diminuer. Si, en 1992, 92 % des firmes multinationales étaient originaires des pays développés, leur part s’élève à 79 % en 2000 pour diminuer à 72 % en 2008 (Cnuced, 2010). Selon le classement publié par Fortune Global 500(voir tableau 1), on peut constater que, parmi les vingt premières firmes multinationales dans le monde, neuf entreprises ont leur siège en Europe occi- dentale (dont trois en France), six entreprises aux États-Unis et deux entreprises au Japon.

Malgré l’émergence de « nouvelles » firmes multinationales dans les pays émergents (Ghemawat et Hout, 2008), leur poids semble encore limité : seulement trois

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La gestion des relations siège-filiales 67

Tableau 1 –Le classement des 20 premières firmes multinationales dans le monde (selon le chiffre d’affaires réalisé en 2009)

Source : à partir des données fournies par Fortune Global 500.

Chiffre Résultat

Localisation Secteur d’affaires net (en Nombre Rang/Nom du siège d’activité (en milliards milliards de salariés

de dollars) de dollars)

1. Wal-Mart États-Unis Commerce de détail 408,2 14,3 2 100 000

2. Royal Dutch Shell Pays-Bas Pétrole 285,1 12,5 101 000

3. Exxon Mobil États-Unis Pétrole 284,7 19,3 102 700

4. BP Royaume-Uni Pétrole 246,1 16,6 80 300

5. Toyota Motor Japon Automobile 204,1 2,3 320 590

6. Japan Post Holdings Japon Services 202,2 4,8 229 134

7. Sinopec Chine Pétrole 187,5 5,8 633 383

8. State Grid

Corporation Chine Électricité 184,5 –0,3 1 533 800

9. Axa France Assurances 175,3 5 103 432

10. China National

Petroleum Corp. Chine Pétrole 165,5 10,3 1 649 992

11. Chevron États-Unis Pétrole 163,5 10,5 64 132

12. ING Pays-Bas Services financiers 163,2 -1,3 107 173

13. General Electric États-Unis Société mixte 156,8 1,1 304 000

14. Total France Pétrole 155,9 11,7 96 387

15. Bank of

America Corp. États-Unis Banque 150,5 6,3 283 717

16. Volkswagen Allemagne Automobile 146,2 1,3 368 500

17. Conoco Phillips États-Unis Pétrole 139,5 4,8 30 000

18. BNP Paribas France Banque 130,7 8,1 182 459

19. Generali Group Italie Assurances 126 1,8 154 069

20. Allianz Allemagne Assurances 126 6 153 203

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groupes chinois figurent, à ce jour, dans le

«Top 20» de Fortune Global 500.

2. … mais les choix de localisation de leurs filiales se diversifient

Pendant plusieurs décennies, la plupart des firmes multinationales avaient concentré leurs activités dans leur région d’origine ; un certain nombre d’entre elles avait également choisi de se développer dans un autre pôle

de la triade (Europe occidentale, Amérique du Nord ou Japon) (Rugman, 2005). La période récente est marquée par la volonté des FMN de renforcer leur présence dans d’autres zones géographiques, notamment dans les pays émergents (Colovic et Mayrhofer, 2008). Cette tendance concerne les activités de production et de commercia- lisation, mais aussi les activités de recherche et de développement (voir encadré ci-après).

LE GROUPE DANONE VISE LE MARCHÉ MONDIAL

Le groupe Danone a d’abord développé ses activités en Europe occidentale avant de pour- suivre son expansion internationale en Amérique du Nord et au Japon. Depuis les années 1990, l’entreprise accélère son développement international et s’établit dans les pays émer- gents. Elle saisit les opportunités offertes dans les pays d’Europe centrale et orientale suite à la fin du système soviétique et s’implante dans les pays du Sud-Est asiatique et les pays d’Amérique latine. Ces dernières années, le groupe cherche à renforcer ses positions dans les marchés émergents et privilégie les pays qui se caractérisent par une population importante, un taux de croissance élevé et une progression rapide du pouvoir d’achat des ménages (Chine, Indonésie, Brésil, Argentine, Pologne, Russie, etc.). L’objectif affiché est d’atteindre, à terme, un équilibre entre les pays développés et les pays émergents.

Pour entrer sur de nouveaux marchés, l’entreprise mène des activités d’exportation et établit des filiales, souvent à travers des sociétés communes ou des acquisitions (croissance externe). Lorsqu’elle a réussi à s’implanter sur un nouveau marché, elle cherche à poursuivre son développement par le biais de la croissance interne. Compte tenu des spécificités du sec- teur agroalimentaire, les produits sont fabriqués à proximité des marchés locaux. L’entreprise dispose ainsi de 159 unités de production, dont 123 sont implantées en dehors de l’Europe occidentale. Elle a aussi mis en place des centres de recherche et développement (R&D) dans les différentes zones géographiques où elle est présente afin de pouvoir adapter les produits aux exigences des marchés locaux.

En 2009, le groupe Danone a réalisé un chiffre d’affaires de 14,98 milliards d’euros et un résultat net de 1,52 milliard d’euros. La répartition géographique du chiffre d’affaires est la suivante : Europe occidentale : 47 %, Europe centrale et orientale : 13 %, Amérique latine : 13 %, Asie-Pacifique : 13 %, Amérique du Nord : 9 %, Afrique/Moyen-Orient : 5 %. Aujour- d’hui, le groupe Danone figure parmi les leaders mondiaux de l’industrie agroalimentaire et possède quatre domaines d’activité stratégique : les produits laitiers frais (numéro 1 mon- dial), les eaux embouteillées (numéro 2 mondial), la nutrition infantile (numéro 2 mondial) et la nutrition médicale (numéro 1 européen). L’entreprise emploie 80 976 salariés.

Source : Hertrich et al. (2011).

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Les chiffres fournis par la Cnuced (2010) indiquent qu’en 2009, les FMN ont établi 17966 filiales, dont 13727 constituent des filiales créées ex-nihiloet 4239 des fusions- acquisitions. Le tableau 2 précise la réparti- tion géographique des filiales mises en place.

Il révèle que 46 % des filiales créées ex- nihilo et 69 % des fusions-acquisitions concernent les pays développés, et notam- ment les pays de l’Union européenne (res- pectivement 30 % et 32 %). Les chiffres indiqués témoignent d’un intérêt marqué des

FMN pour l’implantation de filiales dans les pays en développement, surtout à travers la création de filiales (48 % des filiales créées ex-nihilo). Ils montrent également l’impor- tance des pays BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) où les FMN établissent désormais 20 % de leurs filiales créées ex-nihiloet réa- lisent 12 % de leurs fusions-acquisitions.

L’analyse qui vient d’être présentée montre que la plupart des firmes multinationales ont leur siège dans l’un des pays de la triade, même si l’importance grandissante La gestion des relations siège-filiales 69

Tableau 2 –La répartition géographique des filiales établies par les FMN en 2009 (en %)

* Nombre de filiales créées.

** Chiffre d’affaires réalisé par l’entreprise rachetée par région/pays.

*** Pays d’Europe centrale et orientale et communauté des États indépendants.

Source : Cnuced (2010, p. 4).

Région/Pays Création ex-nihilode filiales* Fusions-acquisitions**

Pays développés 46 % 69 %

Union européenne 30 % 32 %

dont France 3 % 2 %

dont Allemagne 3 % 4 %

dont Royaume-Uni 8 % 7 %

États-Unis 9 % 17 %

Japon 1 % 2 %

Autres pays développés 6 % 18 %

Pays en développement 48 % 23 %

Afrique 5 % 1 %

Amérique latine et Caraïbe 9 % 5 %

dont Brésil 2 % 1 %

dont Mexique 2 % 1 %

Asie 34 % 16 %

dont Chine, Hong Kong 10 % 5 %

dont Inde 5 % 2 %

Autres pays en développement 0 % 1 %

PECO et CEI*** 6 % 8 %

dont Fédération de Russie 3 % 4 %

Total 100 % 100 %

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des « nouvelles » firmes multinationales des marchés émergents semble se confir- mer. Elle révèle également que les FMN cherchent à diversifier la localisation de leurs filiales, en privilégiant notamment les pays émergents. La dispersion grandissante des activités est susceptible de rendre la gestion des relations siège-filiales plus complexe dans la mesure où la FMN est amenée à coordonner des entités dans des pays éloignés, dont l’environnement cultu- rel, économique et institutionnel peut pré- senter de fortes différences avec son pays d’origine. Aujourd’hui, la plupart des FMN opèrent dans des environnements hétéro- gènes qui nécessitent des adaptations spéci- fiques tant au niveau des produits et ser- vices commercialisés qu’au niveau des relations entretenues avec les filiales.

II – LES ENJEUX LIÉS

À LA GESTION DES RELATIONS SIÈGE-FILIALES

Compte tenu de l’éclatement de la chaîne de valeur (Berger, 2006 ; Buckley et Ghauri, 2004), les entreprises doivent accorder une importance particulière à la gestion des relations siège-filiales. Pour mieux com- prendre ces enjeux, il est nécessaire d’exa- miner les contours des firmes multinatio- nales et les structures organisationnelles adoptées.

1. Les firmes multinationales : des entreprises aux contours flous ? Les firmes multinationales couvrent une grande variété d’entreprises dont les confi- gurations organisationnelles sont suscep- tibles d’évoluer selon les opportunités offertes sur les marchés internationaux.

Selon Dunning et Lundan (2008, p. 3), une firme multinationale constitue une entre-

prise qui effectue des investissements directs à l’étranger et qui possède ou, dans une certaine mesure, contrôle des activités à valeur ajoutée dans plusieurs pays. Ces acti- vités s’exercent généralement dans le cadre de filiales. Celles-ci peuvent prendre la forme de filiales dont l’entreprise possède plus de 95 % du capital (wholly owned sub- sidiaries) ou de filiales dont l’entreprise partage le capital avec une autre société (filiales communes ou joints-ventures).

Elles peuvent être créées ex-nihiloou résul- ter d’une prise de participation financière dans le capital d’une société locale.

Le rôle joué par les différentes filiales et leur contribution à la chaîne de valeur glo- bale du groupe peuvent fortement varier d’un pays à l’autre. Certaines filiales consti- tuent des filiales qui sont étroitement liées au siège de l’entreprise, d’autres sont davantage ancrées dans leur environnement local où elles ont tissé des relations étroites avec d’autres acteurs (instituts de recherche, fournisseurs, clients, autorités gouvernementales, etc.). Aujourd’hui, la plupart des firmes multinationales sont amenées à gérer un « portefeuille » de filiales qui mènent des activités variées et qui sont localisées dans de nombreux pays.

Dans la gestion des relations siège-filiales, elles doivent prendre en considération plu- sieurs niveaux : 1) les relations entretenues avec les filiales contrôlées à plus de 95 %, 2) les relations gérées avec les filiales com- munes et 3) les réseaux de relations tissés par les différentes filiales locales (voir encadré p. 71). À ce jour, la plupart des recherches portent sur les deux premiers niveaux, et il est nécessaire de prendre davantage en considération les réseaux de relations constitués par les filiales (Hennart, 2009).

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2. Les configurations organisationnelles des FMN sont multiples

Les configurations organisationnelles des firmes multinationales ont considérablement évolué. Dans de nombreuses entreprises, les structures organisationnelles de type hiérar- chique ont cédé la place à des structures plus souples permettant d’accorder une plus grande autonomie aux entités d’un même groupe. Ces structures facilitent générale- ment les interactions entre les différentes unités, mais aussi avec d’autres partenaires.

Si, dans le passé, les relations siège-filiales étaient essentiellement de nature hiérar- chique, elles se caractérisent désormais par une grande diversité de relations qui peu- vent prendre des formes variées.

Plusieurs perspectives théoriques enrichis- sent la compréhension des configurations organisationnelles adoptées par les firmes multinationales. À partir d’une revue des principales approches théoriques portant sur les firmes multinationales, Forsgren (2008) a construit une typologie permettant de distinguer six formes de firmes multina- tionales : 1) la FMN « dominante » (domi- nating multinational), 2) la FMN « coordi- natrice » (coordinating multinational), 3) la FMN « savante » (knowing multinational), 4) la FMN « d’adaptation » (designing mul- tinational), 5) la FMN « de réseau » (net- working multinational)et 6) la FMN « poli- ticienne »(politicising multinational)(voir tableau 3).

La gestion des relations siège-filiales 71

LE GROUPE SEB S’APPUIE SUR SES FILIALES ET LEURS RÉSEAUX D’AFFAIRES

Le groupe SEB, qui est le leader mondial du petit équipement domestique, possède deux domaines d’activité stratégique : le petit électroménager et les articles culinaires. Les pro- duits sont commercialisés dans plus de 150 pays. L’entreprise détient 60 filiales de produc- tion et de commercialisation, qui sont réparties à travers le monde. La majorité des filiales sont détenues à 100 % et plusieurs d’entre elles ont été établies suite à des acquisitions de marques dans d’autres pays (par exemple, Rowenta, All-Clad, Lagostina). Dans certains pays, le groupe SEB partage le contrôle de ses filiales avec des sociétés locales. Tel est le cas de la Chine où l’entreprise a acquis 52,74 % du capital du groupe Supor. L’entreprise cherche également à bénéficier des réseaux tissés par ses différentes filiales locales, par exemple avec des distributeurs. Ainsi, dans le cadre des processus d’innovation, les équipes du siège peu- vent impliquer les filiales locales, notamment en amont (connaissance du marché local) et en aval du lancement de nouveaux produits (relations avec les distributeurs et les consomma- teurs). Si les activités de recherche sont centralisées au niveau du siège du groupe, le déve- loppement de certains produits peut être confié à des filiales à l’étranger.

En 2009, le groupe SEB a réalisé un chiffre d’affaires de 3,18 milliards d’euros et un résul- tat net de 146 millions d’euros. La distribution géographique du chiffre d’affaires est la sui- vante : Europe occidentale : 45 % ; Asie-Pacifique : 19 % ; Europe centrale et orientale : 17 % ; Amérique du Nord : 11 % ; Amérique du Sud : 8 %. L’effectif est de 20 663 salariés.

Source : Arzumanyan et Melin (2011).

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Fondée sur les travaux de l’économie indus- trielle, la FMN « dominante » est une firme qui effectue des investissements directs à l’étranger dans le but d’exploiter un avan- tage spécifique qu’elle possède. Les rela-

tions siège-filiales sont de type hiérarchique, et le siège exerce un contrôle étroit sur les différentes filiales établies à l’étranger.

Développée à partir de la théorie des coûts de transaction, la FMN « coordinatrice » est

Tableau 3 –Typologie des firmes multinationales

Source : traduit et adapté de Forsgren (2008, p. 146).

Type de FMN

Fondements théoriques

Compétence clé de la FMN

Perspective organisa- tionnelle

Rôle stratégique du siège

FMN

« domi- nante »

Économie industrielle

Exploiter un avantage monopo- listique sur des marchés étrangers

Hiérarchie

« Diviser et gouverner »

FMN

« coor- dinatrice »

Modèle transac- tionnel

Internaliser des transactions par la création de filiales à l’étranger

Hiérarchie

Appliquer des contraintes comporteme ntales aux filiales

FMN

« savante »

Approche fondée sur les ressources Créer, transférer, combiner et utiliser des capacités uniques dans différents pays Une

« commu- nauté sociale » avec des ressources et compé- tences dispersées Stimuler la création de capacités au sein de la firme

FMN

« d’adap- tation »

Théorie de la contingence

Adapter l’organi- sation à la complexité et aux change- ments de marchés étrangers Une organisation formelle fondée sur des

« valeurs partagées »

« Lire » l’environne ment et adapter l’organi- sation

FMN « de réseau » Théorie des réseaux, modèle de dépendance des ressources Utiliser les réseaux d’affaires des filiales à l’étranger comme ressources stratégiques

Une

« fédération » avec un pouvoir dispersé

« Un acteur parmi d’autres » dans la lutte pour le contrôle des investis- sements stratégiques

FMN

« politi- cienne »

Théorie institution- naliste

Tirer avantage et influencer l’environne ment institution- nel interna- tional

Une institution complexe,

« entière » et de valeur

Gérer les situations politiques et les conflits dans différents contextes institution- nels

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une firme qui cherche à internaliser les tran- sactions qui sont difficiles à réaliser à tra- vers des relations marchandes. La création de filiales s’inscrit dans une logique d’effi- cience, et les relations siège-filiales sont de nature hiérarchique.

La FMN « savante », qui trouve ses origines dans l’approche fondée sur les ressources (resource based view, RBV), est une entre- prise qui construit un avantage concurren- tiel à partir des capacités développées dans les différentes entités du groupe. Le rôle principal du siège est de stimuler la création de ces capacités, qui désignent des configu- rations particulières de ressources et de compétences pouvant être dispersées à tra- vers le groupe.

La FMN « d’adaptation », qui s’inscrit dans le cadre de la théorie de la contingence, est une organisation qui est capable de s’adap- ter aux changements qui interviennent dans l’environnement. Le rôle du siège est d’ana- lyser l’environnement et d’adapter la struc- ture organisationnelle.

Fondée sur la théorie des réseaux et le modèle de dépendance des ressources, la FMN « de réseau » est une entreprise qui attache une importance particulière aux réseaux d’affaires établis par ses différentes filiales à l’étranger. Le rôle du siège est assimilé à celui des filiales, chaque entité du groupe pouvant influencer les décisions stratégiques à travers son réseau d’affaires (clients, fournisseurs, etc.).

La FMN « politicienne », qui est ancrée dans la théorie institutionnaliste, est une entre- prise qui cherche à tirer avantage et à influencer les différents environnements ins- titutionnels auxquels elle est confrontée. Il appartient au siège et aux filiales de gérer des situations politiques et d’éventuels conflits dans différents contextes institutionnels.

La typologie proposée par Forsgren (2008) met en relief les différents rôles que peu- vent accomplir le siège et les filiales dans les firmes multinationales et la diversité des relations qui en résulte. Dans les FMN

« dominantes », « coordinatrices » et

« d’adaptation », le siège occupe une posi- tion centrale et exerce un contrôle étroit sur les différentes filiales. Dans les FMN

« savantes » et « politiciennes », le siège joue un rôle de coordination, mais n’occupe pas de position prédominante. Dans les FMN « de réseau », le siège est considéré comme une entité au même titre que les dif- férentes filiales.

Les développements qui viennent d’être pré- sentés mettent en exergue le caractère évolu- tif des firmes multinationales, dont les contours sont devenus plus flous. Ils mon- trent que la gestion des relations siège- filiales doit également intégrer les réseaux établis par les filiales locales, quel que soit le degré de contrôle exercé par la société-mère.

CONCLUSION

La firme multinationale constitue un objet d’investigation privilégié de la littérature de management international, et de nombreux travaux ont été menés sur les relations siège- filiales. L’analyse proposée dans cet article souligne que la dichotomie intégration glo- bale vs. réactivité locale (Prahalad et Doz, 1987), qui a beaucoup marqué ce champ de recherche, doit être dépassée au profit de nouvelles conceptualisations qui intègrent la pluralité des relations siège-filiales. Trois niveaux d’analyse doivent être pris en consi- dération : 1) les relations entre le siège et les filiales contrôlées, 2) les relations entre le siège et les filiales communes et 3) les réseaux établis par les filiales.

La gestion des relations siège-filiales 73

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Compte tenu des mutations récentes de l’environnement mondial et des pratiques managériales mises en place par les entre- prises (Mayrhofer et Urban, 2011), les rela- tions siège-filiales constituent un domaine de recherche qui appelle des avancées à la fois théoriques et empiriques permettant de mieux appréhender la complexité de leur

gestion. Au-delà des relations entre les dif- férentes entités d’un même groupe, les investigations futures devraient également attacher une importance particulière aux acteurs qui gèrent ces relations et à l’hété- rogénéité des environnements culturels, économiques et institutionnels auxquels sont exposées les firmes multinationales.

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La gestion des relations siège-filiales 75

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Références

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