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La protection des données dans les rapports de travail

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La protection des données dans les rapports de travail

AUBERT, Gabriel

AUBERT, Gabriel. La protection des données dans les rapports de travail. In: Journée 1995 de droit du travail et de la sécurité sociale. Zürich : Schulthess, 1999. p. 145-191

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:12209

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LA PROTECTION DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL

Gabriel AUBERT professeur à la Faculté de droit

Genève

I. INTRODUCTION

1. Évolution à l'étranger. La protection des données est à l'ordre du jour, en Europe, depuis plus de deux décennies. Elle s'inscrit dans l'évolution générale du droit, qui accorde une importance croissante à la sauvegarde de la vie privée. En outre, elle répond aux besoins nouveaux créés par les développements de l'informatique, grâce auxquels peuvent être conservées et diffusées d'innombrables informations sur tout un chacun.

C'est ainsi qu'en 1977 l'Allemagne consacra une loi à la protection des données ("Datenschutzgesetz"), qui subit une révision importante en 19901. La France, en 1978, fut dotée d'une loi relative à l'informa- tique, aux fichiers et aux libertés, que le législateur compléta en 19922.

Cette évolution se refléta sur le plan international. En 1981, le Conseil de l'Europe adopta une convention pour la protection des personnes à l'égard du traitement informatisé des données à caractère personnel, prolongée en 1989 par une recommandation sur la protection des données à caractère personnel utilisées à des fms d'emploi3. En 1995, le Parlement et le Conseil de l'Union européenne arrêtèrent une directive relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement Les références renvoient à la bibliographie figurant à la fin de la présente étude.

Pour l'Allemagne, voir la section 4 de cette bibliographie.

2 Cf. bibliographie précitée, section S.

3 Cf. le message du Conseil fédéral concernant l'adhésion à la Convention du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, du 13 novembre 1996, FF 1997 1 701, avec le texte de la convention, p. 722. La convention a été ratifiée par la Suisse. avec effet au 1er février 1998.

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des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données4 . En 1997, le Bureau International du Travail a publié un re- cueil (non contraignant) de directives pratiques sur la protection des données personnelles du travailleur, dont l'élaboration fut alimentée par une ample étude comparatives.

2. Évolution en Suisse. En Suisse, pendant de longues années, la protection des données découla de l'art. 28 CC, disposition générale sur la protection de la personnalité, et de l'art. 328 CO, consacré plus particulièrement à la protection de la personnalité des salariés6.

C'est en 1987 que le législateur fédéral adopta les premières dis- positions spéciales sur la protection des données. Touchant les domaines du placement et de la location de services (art. 7 al. 3 et 18 al. 3 LSE, R.S. 823.11), elles furent précisées par une ordonnance d'application, de 1991 (art. 19 et 47 OSE; R.S. 823.111).

En 1992, le parlement franchit une étape importante, puisqu'il vota une loi (générale) sur la protection des données (LPD, R.S. 235.1) et, du même pas, inséra dans le code des obligations un nouvel art. 328b, consacré à la protection des données dans les rapports de travaiF.

Enfm, en 1993, le Conseil fédéral édicta l'ordonnance III d'appli- cation de la loi fédérale sur le travail (OLT 3, R.S. 822.113), dont l'art. 26 comporte une disposition particulière sur les systèmes de surveillance et de contrôle des travailleurss.

Certaines conventions collectives de travail renferment des règles qui complètent les dispositions légales, par exemple en associant les représentants du personnel à la mise en oeuvre de la protection des données.

3. Rôle particulier de la protection des données en droit du travail. Ce bref rappel historique montre que la protection des données joue un rôle particulier en droit du travail. On n'en sera pas

4 Directive 95/46/CE du 24 octobre 1995, JOCE No L 281/31, du 23.11.1995. Cf.

la bibliographie, section 3.

5 Cf. la bibliographie, section 1.

6 Les premières études importantes consacrées particulièrement aux rapports de travail furent celles de NEF, SAILLEN, FREI et TRU1MANN.

7 R.S. 235.1. Message du Conseil fédéral concernant la loi fédérale sur la protection des données, du 23 mars 1988, FF 1988 II 421.

8 On rappellera également, en passant, le nouvel art. 24novies de la Constitution fédérale, introduit en 1992 (génie génétique) et les révisions successives des art.

179 ss CP, en 1979 et 1991 (infractions contre le domaine secret ou le domaine privé).

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LA PROTECTION DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAil.. 147

surpris, car les employeurs sont à même de recueillir de fort nom- breuses informations sur leur personnel: en outre, vu leur situation de dépendance, les salariés et les demandeurs d'emploi se trouvent exposés à des atteintes contre lesquelles la loi doit les protéger9.

n.

DÉFINITIONS

4. Un vocabulaire technique. La loi sur la protection des données utilise un langage technique, imprégné d'allemand et d'anglais, qui s'éloigne de l'usage français courant. C'est dire que le commun des employeurs et des travailleurs aura de la peine à la comprendre. On peut regretter qu'un texte destiné à protéger les justiciables contre les excès de la technique ne puisse être bien compris que par des techui- ciens. Nous reprenons ci-dessous quelques définitions figurant à l'art. 3 LPDlo.

a) Données personnelles. On entend par données personnelles toutes les informations qui se rapportent à une personne identifiée ou identifiable (art. 3 let. a LPD). Cette définition est large. Contraire- ment à l'usage français, le mot "données" ne vise pas seulement les informations traitées automatiquement (informatique), mais aussi celles recueillies ou communiquées d'une autre façon, même oralement. Ce sens général semble particulier à la Suisse. Pour désigner la même chose, les auteurs francophones préfèrent l'expression d'informations nominatives.

b) Données sensibles. Les données sensibles se rapportent aux opinions ou activités religieuses, philosophiques, politiques ou syndi- cales, à la santé, à la sphère intime, à l'appartenance à une race, aux mesures d'aide sociale, aux poursuites ou sanctions pénales et adminis- tratives (art. 3 let. c LPD). Ce sont donc celles qu'il y a lieu d'entourer d'une discrétion particulière. On aurait pu les qualifier d'informations confidentielles.

c) Profil de la personnalité. La notion de profil de la person- nalité est propre à la loi sur la protection des données: elle désigne, elle, un concept nouveau, soit un ensemble d'informations qui, pour

9 Deux auteurs ont établi des statistiques sur le traitement de données par les employeurs: HUBER et RUDOLPH, passim. n est d'ailleurs unanimement admis que l'art. 328b CO s'applique non seulement au salarié, mais aussi au candidat à l'emploi: cf. RUDOLPH, p. 18, avec de nomblCuses réfélCnces.

10 Pour plus de détails. voir en particulier BELSER, ad art. 3 LPD.

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n'être pas forcément confidentielles, permettent d'apprécier les carac- téristiques essentielles d'un individu (art. 3 let. dl. En raison du développement de l'informatique, qui facilite leur conservation et leur transmission, les profils de la personnalité présentent un danger parti- culier: ils exposent les intéressés à la (large) diffusion d'images d'eux- mêmes incomplètes, fausses ou dépassées.

d) Traitement des données. La loi définit le traitement des données comme étant toute opération y relative, notamment la collecte, la conservation, l'exploitation, la modification, la communication, l'archivage ou la destruction des données, quels que soient les moyens et procédés utilisés; peu importe que le traitement soit manuel ou automatisé (art. 3 let. e)l1. Ainsi, selon le langage du législateur, l'employeur qui apprend qu'un salarié se porte bien (ou mal) "traite une donnée". Dans les lignes qui suivent, nous étudierons surtout l'acquisition d'informations nominatives, leur conservation et leur communication.

e) Fichier. Enfin, est considéré comme fichier tout ensemble de données personnelles dont la structure permet de rechercher les données en fonction de la personne concernée (art. 3 let. g). Le fichier se caractérise par la possibilité qu'il offre à l'utilisateur de répertorier les informations nominativement. En droit du travail, le fichier le plus important est, naturellement, le dossier personnel du salarié12

III. LPD ET CO

A. Les principes généraux posés par la LPD

S. Principe: la Iicéité du traitement de données. D'une manière générale, l'obtention, la conservation ou la communication d'informations nominatives reste licite. La nouvelle loi ne présume pas que tout traitement de données personnelles serait, en soi, illicite.

6. Les cas d'illicéité présumée. Dans certaines hypothèses, le traitement de données personnelles se révèle illicite. Ces cas sont énoncés par la loi. Il s'agit de ceux où les données traitées sont inexactes; le traitement viole les règles de la bonne foi ou celles de la proportionnalité; les données sont traitées contre la volonté expresse de

11 SCHÜRER, p. 29.

12 SCHORER, p. 33 et 63.

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LA PROTECTION DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL 149 la personne visée, sont sensibles ou constitutives d'un profil de la personnalité (art. 12 LPD).

7. Le renversement de la présomption. L'illicéité du traite- ment d'informations nominatives peut être levée en présence de motifs justificatifs qui, cependant, ne sont pas d'application automatique. II incombe au juge de dire, à la lumière de l'ensemble des circonstances, s'ils revêtent un caractère prépondérant, au point d'effacer l'illicéité de l'atteinte. Les faits justificatifs sont tirés de la loi, du consentement de la victime, ainsi que d'un intérêt prépondérant privé ou public (art. 13 LPD).

Parmi les intérêts privés prépondérants figurent ceux de la personne qui traite les données lorsque ces dernières se trouvent en relation directe avec la conclusion ou l'exécution d'un contrat et qu'elles concernent une partie ou une future partie à ce contrat (art. 13 al. 2 let. a LPD).

La mise en oeuvre des motifs justificatifs n'ira pas sans difficulté. On imagine mal que l'auteur puisse justifier, par la conclusion ou par l'exécution d'un contrat, un traitement de données violant les principes de l'exactitude, de la bonne foi ou de la proportionnalité. En revanche, ce motif justificatif pourra, le cas échéant, s'appliquer lorsque les informations ont été traitées malgré l'opposition de la personne concernée, lorsqu'elles sont sensibles ou lorsqu'elles constituent un profil de la personnalité.

B. Le nouvel art. 328b CO

8. Une norme spéciale. Vu l'importance des informations nominatives dans le cadre des rapports de travail, le législateur leur a consacré une disposition spéciale, hors de la loi sur la protection des données, à l'art. 328b CO. Selon ce texte, figurant sous la note margi- nale Protection de la personnalité lors du traitement de données per- sonnelles,

"L'employeur ne peut traiter des données concernant le travailleur que dans la mesure où ces données portent sur les aptitudes du travailleur à remplir son emploi ou sont nécessaires à l'exécution du contrat de travail. En outre, les dispositions de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données sont applicables."

9. Principe: l'iIlicéité du traitement des données. Cette formulation revêt une certaine importance, car elle exprime la règle

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fondamentale en droit du travail: en principe, le traitement d'infonna- tions nominatives par l'employeur, à propos du salarié, est illicite.

C'est ce qui résulte du libellé restrictif de l'art. 328b CO ("ne ...

que")13.

10. Les deux cas de Iicéité présumée. Toutefois, le traitement de données est licite dans deux hypothèses: d'une part, si les infonna- tions intéressent les aptitudes du travailleur à remplir son emploi;

d'autre part, si elles sont nécessaires à l'exécution du contrat de travail.

Cette règle découle du principe selon lequel le traitement de données est licite lorsqu'il se trouve en relation directe avec la conclu- sion ou l'exécution d'un contrat. Concrétisant ce fait justificatif, elle détermine, dans le champ des rapports de travail, les deux situations qui justifient la recherche, la conservation et la communication d'infonnations nominatives par l'employeur, à la lumière du principe de la proportionnalité (art. 4 al. 2 LPD)14.

Ainsi, la loi présume licite le traitement d'infonnations nominatives qui se rapportent aux aptitudes de l'intéressé à remplir son emploi ou qui sont nécessaires à l'exécution du contrat de travail. Cette présomp- tion est importante, car elle sert les intérêts légitimes de l'entreprise, dont le bon fonctionnement bénéficie non seulement à l'employeur lui- même. mais aussi aux travailleurs, aux clients et à la collectivité (maintien des emplois, rentrées fiscales, etc.). Soucieuse d'instituer une protection - équilibrée - de la personnalité des travailleurs, la loi ne considère pas les intérêts de l'entreprise comme étant par définition secondaires.

11. Le renversement de la présomption. Comme il l'indique.

l'art. 328b CO ne se suffit pas à lui-même, mais doit se lire dans le contexte de la loi sur la protection des données. En conséquence, il faut exaruiner si d'autres éléments d'appréciation, résultant de ce texte, n'influencent pas la solution.

il en ira ainsi, en particulier, lorsque le traitement des infonnations par l'employeur (même limité aux deux hypothèses susmentionnées) est constitutif d'une atteinte à la personnalité du salarié. Une telle atteinte est généralement réalisée lorsque les données traitées sont inexactes ou que le traitement viole les règles de la bonne foi ou de la proportion- nalité. La pondération des intérêts en présence se révélera plus difficile lorsque les données sont traitées contre la volonté expresse de la 13 SCHÜRER, p. 36.

14 STEINAUER, p. 103-104; RUDOLPH, p. 16,20.

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LA PROTECTION DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL 151

personne visée, soot sensibles ou constitutives d'un profil de la person- nalité (art. 12 LPD).

C. Les rapports entre l'art. 328b et la LPD

12. On peut s'interroger sur l'utilité d'une nonne particulière au contrat de travail, alors que les éléments de la pesée des intérêts figu.

rent déjà dans la loi sur la protection des données. Il faut néanmoins reconnaître que l'art. 328b CO fournit des indications plus précises que celles résultant de la loi sur la protection des données, de sorte qu'il facilite la pesée des intérêtsl5.

L'exemple suivant illustrera cette proposition. L'employeur peut-il fournir au futur bailleur du salarié des indications sur la rémunération du travailleur, sans avoir demandé le conseotement de ce dernier?

Sous l'angle de la LPD, un tel traitement de données est en principe licite: le futur bailleur peut faire valoir un intérêt prépondérant à la communication de cette information, car les indications sollicitées sont en relation directe avec la conclusion d'un contrat de bail (art. 13 al. 2 let. a LPD). En revanche, sous l'angle de l'art. 328b CO, le traitement des données est en principe illicite, car il n'est pas nécessaire à l'exécu- tion du contrat de travail et ne touche pas les aptitudes du travailleur à remplir son emploi. Cette présomption d'illicéité ne peut être renver- sée, le cas échéant, qu'en application d'un autre fait justificatif, c'est-à- dire, notamment, le consentement du travailleur.

Supposons que le bailleur, plutôt que de demander des infonnations sur le salaire du travailleur, interroge l'employeur quant aux aptitudes de l'intéressé. Par ce détour, il entendrait déterminer les chances de son futur locataire de conserver son emploi et, par conséquent, le revenu nécessaire à couvrir le loyer. Certes, cette information se rapporte aux aptimdes du travailleur, de sorte que, a priori, l'illicéité de la commu- nication pourrait être levée (art. 13 al. 2 let. a LPD). Toutefois, une pareille conclusion ne s'impose nullement. Il faut admettre, en effet, que la communication d'infonnations sur les aptitudes du travailleur doit servir dans le cadre des relations entre le travailleur et un employeur potentiel, mais non pas dans ses rapports avec des tiers.

Sous cet angle, la communication d'infonnations au futur bailleur

15 Du mSme avis, RUDOLPH, p. 20-21; pour certains auteurs, l'an. 32gb CO serait inutile: BELSER. p. 65; PETER, p. 200.

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devrait être considérée comme contraire au principe de la proportion- nalité (art. 328b CO, interprété sous l'angle de l'art. 4 al. 2 LPD).

D. La pesée des intérêts

13. Le rôle de la jurisprudence. Selon le message du Conseil fédéral, la loi

"pose des jalons qui permettront au juge de pondérer les inté- rêts en présence. li n'appartient pas au législateur de se substituer au juge (sic); cependant, il importe que le législateur lui four- nisse des éléments d'appréciation pour les cas où le conflit entre l'intérêt au traitement des données et l'intérêt à la protection est particulièrement aigu 16".

Ces propos, qui se rapportent, d'une façon générale, à la loi sur la protection des données, valent également dans le cadre de l'art. 328b CO. Ainsi, l'on ne saurait trouver dans cette disposition des solutions automatiquement applicables à chaque cas d'espèce. Au contraire, le législateur s'est borné à énoncer des principes pour guider le juge, qui reste libre - et tenu - de peser les intérêts en présencel7 .

14, Les aptitudes du salarié; les informations nécessaires à "exécution du contrat. L'art. 328b CO permet à l'employeur de traiter des données qui touchent l'aptitude du salarié à remplir son emploi ou qui sont nécessaires à l'exécution du contrat de travail.

Le mot "aptitude" (Eignung) s'interprète de façon large. Il ne s'agit pas des aptitudes purement professionnelles, attestées par la formation ou l'expérience de l'intéressé (par exemple: cursus scolaire, apprentis- sage, connaissances linguistiques, séjours à l'étranger), mais, plus largement, des qualités de la personne en regard de l'emploi considéré, lesquelles peuvent aller jusqu'à inclure, selon les circonstances, le caractère du salarié, sa vision du monde ou ses ambitions.

Quant aux informations nécessaires à l'exécution du contrat de travail, elles comprennent avant tout celles dont l'employeur a besoin pour satisfaire à ses obligations légales ou conventionnelles (rapports

16 FF 1988 n 466.

17 ATF 122 V 267, consid. 2b, p. 269: RUDOLPH, p. 38.

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LA PROTEcrION DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL 153

avec la police des étrangers, avec l'inspection du travail, avec les insti- tutions d'assurance sociale ou privée, etc.)lS.

15. La nature de l'emploi. C'est la nature de l'emploi qui dictera l'étendue de la protection du travailleur19.

S'il s'agit d'une occupation manuelle ou technique, qui ne requiert qu'un faible investissement personnel, les informations que l'employeur pourra traiter à son sujet resteront limitées. Elles concerneront au premier chef la formation et l'expérience professionnelles du travail- leur.

Si, tout manuel ou technique qu'est le poste envisagé, l'exécution des tâches requiert une confiance particulière, le champ de la curiosité légitime de l'employeur sera plus vaste. Il s'étendra, par exemple, aux dettes de l'intéressé, dans le cas d'un convoyeur de fonds.

S'il's'agit d'une occupation intellectuelle, d'une position exigeant

des capacités d'initiative ou de commandement, l'employeur sera habilité à s'informer de façon encore plus étendue, en particulier sur les hobbies du travailleur, qui révéleront son goût de l'effort ou son ouverture à de nouveaux défis.

Et lorsque la bonne exécution du travail exige l'adhésion de l'inté- ressé aux buts idéaux visés par l'employeur, la sphère privée du salarié se rétrécira encore plus. Par exemple, un parti est habilité à s'informer sur les opinions politiques d'un candidat au poste de secrétaire permanent.

IV. L'ACQUISITION D'INFORMATIONS PAR L'EMPLOYEUR A. Les questions posées au salarié

Quelle que soit la diversité des cas d'espèce, la pratique fait apparaître certaines situations classiques, que nous tentons d'approfon- dir ci-dessous2o.

16. Formation; passé professionnel; autres activités pro- fessionnelles. D'une manière générale, l'employeur peut interroger

1& BRÛHWILER, n. 1 ad art. 328b; SCHWAmoLD, n. 9 ad art. 328b; TRUTMANN, p.

471.

19 Pour davantage de détails, RUDOLPH, p. 19-20; SCHORER, p. 22, 30-31, 43-45.

20 Parmi les monographies, voir en général RUDOLPH, p. 48 ss; SCHÜRER, p. 51 ss; HUBER, p. 68 ss; FREI, p. Il S5.

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le travailleur sur sa formation et son passé professionnels, lesquels sont de nature à l'éclairer sur son aptitude à remplir l'emploi considéré.

A notre avis, l'employeur peut aussi demander au candidat à l'emploi pour quel motif celui-ci a quitté son employeur précédent (voire ses employeurs précédents), car une telle question peut se trouver en rapport étroit avec l'aptitude à assumer une nouvelle activité21 .

L'employeur a un intérêt légitime à interroger un salarié à temps plein sur ses autres activités rémunérées. Il n'en va pas de même lorsque l'intéressé se trouve occupé à temps partiel, à moins que ces activités accessoires ne portent atteinte à sa capacité de travail (par exemple le grutier qui, le soir, travaillerait dans un cabaret et qui, le matin, commencerait très tÔt son activité sur un chantier)22.

17. Salaire. L'employeur potentiel peut être intéressé à connaître le salaire du travailleur, pour renforcer sa propre position de négocia- tion. Une telle information ne touche pas l'aptitude du travailleur à remplir son poste, si bien que l'employeur ne saurait interroger un candidat à l'emploi sur ce point. Certes, le montant du salaire peut donner au futur employeur des indications sur les capacités du travail- leur, mais cet intérêt n'est pas suffisant; en effet, ces capacités ressor- tent suffisamment de la formation et de l'expérience du travailleur;

elles peuvent en outre être appréciées par l'employeur durant le temps d'essai23.

De même, sanf consentement préalable de l'intéressé, l'employeur ne peut communiquer à un tiers des informations relatives au salaire du travailleur. Cette règle s'applique non seulement à un futur employeur de l'intéressé24,mais aussi à la banque qui veut connaître la situation matérielle de son client avant de lui délivrer une carte de crédit, ou au futur bailleur avant la location d'un appartement25.

18. Interdiction de concurrence. L'employeur a un intérêt légitime à savoir si le candidat à l'emploi est lié par une clause d'inter-

21 En grande partie d'un autre avis, RUDOLPH, p. 56-57; WySS, p. 152.

22 RUDOLPH, p. 59; pour un cas curieux concernant l'obligation de travailleurs à la tâche de s'annoncer à une centrale patronale, cf. JAAC 1990, p. 31.

23 RUDOLPH, p. 57-58; voir Préposé. p. 16; contra: Wyss. p. 152.

24 Prtpost, p. 10. Naturellement, l'employeur peut librement demander au travailleur quelles sont ses prétentions salatiales.

25 MONTAVON, p. 81; SCHÜRER, p. 75; Prépost, p. 16.

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LA PROTECTION DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL 155

diction de concurrence26, car d'éventuelles difficultés du travailleur avec son précédent employeur risquent de retentir sur l'exécution du contrat.

19. Appartenance politique ou syndicale; religion; loisirs. Les informations touchant l'appartenance politique ou syndicale, ainsi que la religion, sont par nature confidentielles. Elles entrent dans la catégorie des données sensibles, dont le traitement ne se justifie que dans des situations particulières27. Était ainsi contraire au droit, par exemple, une directive interne d'une grande banque, datant de 1988, enjoignant à tous ses collaborateurs d'annoncer à la direction toU!

mandat politique ou toute appartenance à une commission de gestion d'un établissement scolaire, même si ces activités n'empiétaient nulle- ment sur le travail.

L'exception la plus importante intéresse les entreprises à but idéal (entreprises à tendance), par exemple les partis politiques, les syndicats ou les églises: de tels employeurs sont autorisés à se procurer des informations sur les convictions politiques, syndicales ou religieuses d'un candidat à l'emploi ou d'un salarié, parce que ces convictions affectent objectivement l'aptitude à l'emploi considéré28.

En outre, tandis que l'employeur ne peut s'informer légitimement sur l'appartenance syndicale d'un demandeur d'emploi, la question devient licite, une fois le travailleur engagé, lorsqu'elle a pour fin de déterminer s'il entre dans le champ d'application d'une convention collective de travaiF9 ou s'il est permis de prélever sur son salaire une contribution de solidarité.

Lorsque, à raison de ses convictions (en particulier religieuses), le salarié n'est pas en mesure de fournir sa prestation de travail confor- mément aux exigences de l'entreprise, l'on peut attendre de lui qu'il informe l'employeur avant l'engagement, afin que les deux parties eXaDÙDent si les convictions du salarié sont compatibles avec l'emploi envisagé30.

D'une manière générale, l'employeur ne peut interroger le candidat sur sa vie privée. Par exemple, lorsque l'intéressée sollicite un emploi de téléphoniste, l'employeur ne saurait lui poser des questions sur ses

26 RUDOLPH, p. 58.

27 RUDOLPH, p. 51-53,106-107, avec réf. à JAR 1989, p. 158.

28 SCHÛRER, p. 53; RUDOLPH, p. 43-44, 106-107.

29 ATF 123 ru 129, con,id. 3b cc, p. 134; RUDOLPH, p. 108.

30 SCHÛRER, p. 53.

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loisirs et sur la façon dont elle maîtrise ses problèmes personnels31 . TI en va sans doute différemment lors du recrutement d'un cadre dirigeant.

20. L'état de santé. L'état de santé du candidat à l'emploi ou du salarié fait partie des données qui méritent de rester confidentielles;

seule peut légitimement importer la capacité de l'intéressé d'exécuter son travaiJ32. Ainsi, l'employeur est habilité à exiger du salarié qu'il se soumette à un examen médical, afin de déterminer son aptitude à remplir l'emploi considéré. Toutefois, le médecin se prononcera uniquement sur l'aptitude à l'emploi; il ne communiquera pas à l'employeur le motif d'une éventuelle inaptitude33 .

L'employeur peut aussi exiger un test négatif de séropositivité lorsque l'occupation en cause rend cette mesure indispensable (en parti- culier dans les professions médicales, si le risque de contagion est notable). Cependant, lorsque l'affection n'a aucune influence sur le travail, la question relative à la séropositivité n'est pas licite; de plus, l'intéressé n'est pas tenu d'annoncer spontanément cet état à l' employeur34 •

Lorsque, à raison d'une maladie ou d'un accident, l'état de santé du candidat à l'emploi est tel que, dans un délai relativement bref, l'exécution du travail se révèle excessivement difficile, l'intéressé doit s'en ouvrir spontanément à l'employeur35. En effet, selon les règles de la bonne foi, il doit considérer que ce dernier n'est pas désireux d'engager une personne d'emblée incapable de travailler.

21. La grossesse. L'employeur peut-il licitement demander à la salariée si elle est enceinte ou si elle projette de l'être? Cette question fut longtemps controversée dans la jurisprudence allemande, qui y répond maintenant, en principe, par la négative. Le législateur français l'a tranchée dans le même sens que les juges allemands36.

31 ATF 122 V 267 consid. 4b p. 270; RUDOLPH, p. 109-110.

32 RUDOLPH, p. 60-68; SCHORER. p. 52.

33 RUDOLPH, p. 63-65; SCHÛRER, p. 57; BRÜHWILER, n. 8b ad art. 320.

34 Office fédéral de la santé publique, Sida et emploi, Berne 1989, p. 14; VISCHER, p. 43-44; KELLER, p. 48; PEDERGNANA, p. 41 55.

35 SCHÛRER, p. 52; RUDOLPH, p. 41-42; sur l'absence de devoir d'informer spontanément l'employeur de maladies relativement anciennes, cf. RUDOLPH, p.

72-74, avec réf. à la jurisprudence.

36 RUDOLPH, p. 85-86; art. L. 122-25 du cnde français du travail.

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LA PROTECJ10N DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL 157

Depuis l'adoption, en Suisse, de la loi sur l'égalité entre femmes et hommes, la doctrine, à notre connaissance unanime, rejoint les positions allemande et française. Elle ne réserve que les cas dans lesquels la grossesse se révèle d'emblée incompatible avec l'exécution du travail, s'agissant par exemple d'une danseuse, d'un modèle de photographe, d'une personne chargée de tâches physiquement astreignantes ou interdites aux femmes enceintes (par exemple à raison des risques de radiations). D'ailleurs, dans de telles hypothèses, la travailleuse doit, le plus souvent, annoncer spontanément son état, parce qu'il entrave d'emblée l'exécution du contrat37.

22. Le service militaire. Il a été longtemps admis que l'employeur pouvait librement interroger le candidat à l'emploi et le salarié sur ses obligations ou projets militaires38.

Les effets des informations ainsi acquises varient selon les cas.

Tantôt, l'employeur craindra d'engager un salarié qui risque de s'absenter régulièrement pour accomplir ses devoirs militaires. Tantôt, les grades acquis par un demandeur d'emploi lui procurent un avan- tage, car ils sont réputés démontrer sa capacité d'organisation ou de commandement.

D'une manière générale, les questions en rapport avec le service militaire ne concernent pas l'aptitude de l'intéressé à remplir son emploi. Il faut donc admettre leur caractère a priori illicite. Sont réservés les cas dans lesquels une période de service militaire empêche l'exécution du travail peu après l'engagement, ainsi que ceux où l'habileté à commander dans des circonstances analogues à celles de l'armée jouent un rôle important39.

23. La consommation de tabac, d'alcool ou de drogue. Le fait de fumer peut susciter des difficultés dans l'exercice du travail, en particulier vis-à-vis des autres salariés. L'employeur peut donc inter- roger l'intéressé sur le point de savoir s'il entend fumer durant les heures de travail4o.

37 Cf. l'art. 3 al. 1 LEg; RUDOLPH, p. 74-86, avec des références à la jurisprudence (JAR 1984, p. 95; 1987, p. 106 ss, 112 ss; voir aussi ATF 122 V 267, consid.

4b •. p. 269-270; SCHÜRER, p. 53; Prtpost, p. 9; moins net, VISCHER, p. 43;

BRÜHwn.ER, n. 8b ad art. 320.

38 REHBINDER, n. 36 ad art. 320; BRÛHWll.ER, n. 8b ad art. 320; HUBER, p. 77-78.

39 Pour une approche dttaiIJée, RUDOLPH, p. 99-106; contra: BRÛHWll.ER, n. 8b ad art. 320; JAR 1990, p. 119.

40 RUDOLPH, p. 72.

(15)

La consommation d'alcool, lorsqu'elle est excessive, retentit sur la capacité de travail. Il en va de même de l'absorption de drogues.

L'employeur est donc légitimé à interroger le salarié sur une éventuelle dépendance dans ce domaine. Lorsque l'exercice d'une profession requiert un état de sobriété totale, pour la sécurité de tiers (chauffeurs, pilotes), le travailleur est obligé de se soumettre à des tests permettant de dépister les comportements interdits; le cas échéant, le travailleur doit annoncer spontanément toute infraction à l'interdiction41.

24. L'analyse génétique. Selon l'art. 24novies, al. 2, let. f Cst.

féd., de 1992, le patrimoine génétique d'une personne ne peut être analysé, enregistré et révélé qu'avec le consentement de celle-ci ou sur la base d'une prescription légale.

L'administration fédérale, conseillée notamment par le professeur Olivier Guillod, de l'Université de Neuchâtel42, a préparé un avant- projet de loi sur l'analyse génétique humaine, publié en septembre 1998. Ce texte vise, notamment, l'analyse génétique dans le domaine des rapports de travail.

Sont dites "présymptomatiques" les analyses qui, conduites avant l'apparition de symptômes d'une maladie, permettent de détecter les prédispositions génétiques susceptibles de se concrétiser par une maladie à l'avenir, mais sans danger immédiat. De telles analyses fournissent des informations d'une étendue sans précédent. Or, déclare ce rapport,

"Une personne qui se voit refuser une activité professionnelle en raison d'une prédisposition à une maladie subit une profonde atteinte dans son développement personnel et économique et dans son droit à l'autodétermination. L'ordre juridique actuel ne protège en principe pas les intérêts de l'employeur à connaître les prédispositions de ses travailleurs, en particulier lorsque le but est de diminuer les frais sur la place de travail ou les frais d'assurance. Il est interdit, selon l'art. 328b CO, d'exiger des analyses présymptomatiques ou de demander des résultats d'ana- lyses présymptomatiques déjà effecruées à des fins médicales ( ... ).

En effet, ces analyses ne détecteraient pas des maladies existantes ou imminentes mettant en question l'aptitude acruelle du travail-

41 RUDOLPH, p. 71-72.

42 Cf. GUILLOD, p. 1081; voir aussi Préposé, p. 12.

(16)

LA PROTECTION DES DONNÉES DANS lES RAPPORTS DE TRA V AlL 159

leur, mais elles livreraient des infonnations sur la sphère intime de la personne concemée"4l.

Aussi les auteurs du rapport proposent-ils qu'un employeur ou son médecin-conseil ne soient pas autorisés, lors de l'engagement ou durant les rapports de travail, à exiger une analyse présymptomatique ni à utiliser les résultats d'analyses présymptomatiques déjà effectuées44.

Il en va différemment s'agissant des postes de travail soumis à des mesures spéciales de prévoyance dans le domaine de la médecine du travail, lorsque sont susceptibles de se produire une maladie profes- sionnelle, une grave atteinte à l'environnement ou des risques excep- tionnels d'accidents. Comme l'indique le rapport:

"Le but d'une analyse présymptomatique est alors de détecter le risque potentiel d'une activité professionnelle pour les tiers ou pour l'environnement ou d'éviter un danger pour la santé du travailleur ( ... ). Lorsqu'il s'agit de protéger la santé ou la vie d'un grand nombre de personnes ou d'éviter une catastrophe écologique, l'intérêt du travailleur à ne pas effectuer une analyse génétique dans le but de détecter une prédisposition déterminée doit s'effacer devant l'intérêt public ( ... ). Une analyse présymp- tomatique ne peut toutefois entrer en ligne de compte ( ... ) que si les mesures techniques et organisationnelles sur la place de travail ne suffisent pas à garantir la sécurité des tiers ou de l'environnement et que les autres méthodes diagnostiques sont insuffisantes. En outre, l'analyse doit être effectuée de manière que les droits de la personnalité de la personne concernée soient protégés au maximum ( ... ). L'analyse doit en particulier se limiter à la prédisposition pertinente pour la place de travail en question"45.

C'est dans cet esprit que les auteurs du rapport proposent une exception à l'interdiction de l'analyse présymptomatique. De plus, en cas d'analyse présymptomatique, cette dernière doit se limiter à l'éva- luation de l'aptitude de l'intéressé à occuper la place de travail. Toute recherche sur d'autres données génétiques sera exclue. L'échantillon devra être détruit une fois l'analyse effectuée46.

43 Rappert explicatif de l'avant-projet relatifà une loi féd~rale concernant]' analyse génétique humaine, Berne, septembre 1998, p. 39-40.

44 Art. 18 de l'avant-projet de loi, annexé au rappert précité.

45 Rapport précité, p. 40.

46 Art. 19 et 20 de l'avant-projet; voir aussi RUDOLPH, p.68-71.

_ ... i

(17)

25. Les dettes. A condition de démontrer un intérêt légitime.

c'est-à-dire spécial et actuel, toute personne peut se renseigner, auprès de l'Office des poursuites, sur les poursuites en cours contre une autre personne47 . Un tel intérêt est démontré lorsque l'intéressé demande des informations sur une personne avec laquelle il se trouve en pourparlers ou en relation contractuelle48 .

Toutefois, le nouvel art. 328b CO limite, davantage que la législa- tion sur la poursuite pour dettes et la faillite, la liberté de l'employeur de s'informer sur les poursuites dont le salarié est l'objet. En effet, selon cette disposition, la recherche d'informations par l'employeur n'est licite que si elle porte sur les aptitudes du travailleur à remplir son emploi. Tel sera le cas lorsque l'intéressé est au contact d'espèces ou de valeurs qu'il pourrait être tenté de s'approprier pour redresser sa situation. En revanche, dans de nombreux cas, la présence de pour- suites n'affecte point l'aptitude du salarié à remplir son emploi, s'agissant, en principe et par exemple, d'une opératrice de saisie ou d'un journaliste49 •

Ici encore apparaît une contradiction entre, d'une part, la législa- tion sur la poursuite et, d'autre part, la protection du travailleur. Il ne saurait incomber à l'office compétent d'examiner toutes les circons- tances pour déterminer si l'employeur a un intérêt légitime, vu la nature de l'emploi, à s'informer sur les dettes du travailleur. Dès lors, le droit du travail ne peut pas faire obstacle à la consultation du registre par l'employeur lorsqu'elle est admise par la loi sur la pour- suite.

La protection du salarié interviendra à un autre stade. Si l'employeur le licencie en raison de dettes qui n'ont aucun lien avec le rapport de travail, le congé sera jugé abusif selon l'art. 336 al. 1 let. a CO et ouvrira droit à une indemnité selon l'art. 336a CO.

26. Le passé pénal. Le travailleur a un intérêt de fait important à ce que son passé pénal ne soit pas porté à la connaissance de son employeur. Il en va de même du candidat à l'emploi, envers un employeur potentiel. L'employeur, en revanche, souhaite n'occuper que des personnes en lesquelles il ait une entière confiance. Ces intérêts contradictoires sont souvent difficiles à peser.

47 Art. 8a LP.

48 RUDOLPH, p. 98; voir ATF 115 l i 81, consid. 2.

49 RUDOLPH, p. 96-97; HUBER, p. 75; REHBINDER, n. 36 ad art. 320; contra:

BRÜHW1LER, n. Sb ad art. 320.

(18)

LA PR01ECI10N DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL 161

Comme toujours, beaucoup dépendra des circonstances. Ainsi, le passé pénal d'un jardinier n'a pas la même importance selon que l'inté- ressé est occupé dans un magasin de fleurs, sans accès à la caisse, ou qu'il est employé par le propriétaire d'une villa abritant des collections précieuses50.

a) Les condamnation radiées. Le passé lointain du candidat ou du salarié mérite l'oubli: lorsque l'infraction est ancienne, le bon com- portement atteste que l'intéressé a tiré la leçon de sa condamnation; le risque de récidive s'atténue considérablement. C'est dire que, en principe, le travailleur peut légitimement revendiquer un droit à l'oubli de toutes les condamnations qui ne figurent plus au casier judiciaire, de sorte que l'employeur ne peut l'interroger à ce propoS51.

b) Les condamnations figurant au casier judiciaire. En pratique, de nombreux employeurs demandent au candidat un extrait de son casier judiciaire. L'opinion a été émise qu'ils ne peuvent exiger de connaître, parmi les infractions recensées au casier judiciaire,· que celles qui se trouvent en rapport avec l'aptitude à remplir l'emploi.

Toutefois, on ne voit pas comment cette restriction pourrait être mise en oeuvre, car l'autorité qui délivre l'extrait ne trie pas les informa- tions en fonction des circonstances, qu'elle n'est d'ailleurs pas en mesure de connaître pour soupeser de façon nuancée les intérêts en présence.

Comme la connaissance du passé judiciaire récent représente souvent une condition de la confiance indispensable à la conclusion du contrat, il serait excessif d'empêcher l'employeur de solliciter la production d'un extrait du casier judiciaire. A notre avis, le candidat à l'emploi n'a pas d'autre choix que d'assumer ce passé52.

Après l'engagement, l'employeur peut également avoir un intérêt légitime à conna\'tre les infractions relativement récentes du salarié, en particulier si des informations inattendues l'incitent à s'interroger sur les qualités de l'intéressé. Que l'on songe, par exemple, au responsable

50 SCHÜRER, p. 51.

51 VISCHER, p. 44; RUDOLPH, p. 88; REHBINDER, n. 36 ad art. 320;

STREIFFNoNKAENEL, n. 10 ad art. 320; BRÜHWll.ER, D. 8b ad art. 320.

52 Dans le même sens. BRÜHWll.ER, n. 8b ad art. 320; STREIFFNoNKAENEL, n. 10 ad art. 320; HUBER, p. 74-75; VISCHER, p. 45; contra: RUDOLPH, p. 86-89, 91- 93; REHBINDER, D. 36 ad art. 320. Pour des cas de soupçons ou de condamnations récentes, cf. JAR 1980, p. 275 ss; 1982, p. 193 ss; 1990, p. 122;

1991, p. 101 ss.

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d'une crèche qui entend dire qu'un employé récemment engagé aurait été condamné pour attouchements sur des enfants.

Dans une telle hypothèse, le travailleur ne peut pas demander à l'autorité de lui délivrer un extrait du casier judiciaire qui ne recense- rait que les infractions affectant son aptitude à remplir le poste. A notre avis, il serait excessif de permettre au salarié de refuser la production d'un extrait du casier judiciaire sollicité par l'employeur en cours d'emploi, car, même après l'engagement, l'employeur conserve un intérêt légitime à s'assurer que l'intéressé n'a pas été condamné pour un motif qui risque de porter préjudice à la bonne exécution du contrat.

c) Les poursuites pénales en cours. Jusqu'à condamnation entrée en force, le justiciable est réputé innocent. On pourrait en déduire que l'employeur n'a pas le droit d'interroger un candidat ou un salarié sur les poursuites pénales en cours. Il faut relever cependant, avec le Tribunal fédéral, que la présomption d'innocence s'applique dans les rapports entre les individus et l'État, mais non pas dans les rapports entre individus eux-mêmes. Sur ce dernier plan, il n'incombe pas aux employeurs d'assumer les risques inhérents à l'occupation d'une personne contre qui les circonstances ont justifié l'ouverture d'une enquête pénaleS3 . En effet, on verrait mal qu'une personne pour- suivie pour attentat à la pudeur des enfants puisse se taire sur sa situation alors qu'elle postule à un poste dans une école primaire. La protection des enfants l'emporte sur l'intérêt du candidat à l'emploi. On ne saurait donc, d'une manière générale, reconnaître le droit au secret d'une personne faisant l'objet d'une poursuite pénale, sauf si cette pour- suite est manifestement sans rapport avec l'emploi considérés4.

d) Déclaration spontanée des condamnations ? Parfois, le salarié doit non seulement tolérer que l'employeur se procure des informations sur son passé pénal, mais encore les lui fournir de lui- même. Tel est le cas si le passé pénal rend excessivement difficile l'exécution du contrat de travail: ainsi, lorsque l'intéressé, engagé comme chauffeur, est sous le coup d'un retrait de permis; lorsque, candidat à un poste d'employé de pharmacie, il a été récemment

53 SJ 1993. p. 359 (voir aussi ATF III II 242, consid. 2d). il est à noter que RUDOLPH ne semble pas avoir pris connaissance de l'arrêt publié à la SJ 1993, p.

359 (rédigé en français).

54 Dans ce sens, STRErFFlVON KAENEL, n. 10 ad art. 320; contra: REHBINDER, n.

36 ad art. 320; RUDOLPH, p. 90-01.

(20)

LA PROTECTION DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL 163 condamné pour trafic de stupéfiants; lorsque, poursuivi pour vol, il postule à un emploi de convoyeur de fonds55 .

Le devoir de révéler spontanément des condamnations antérieures ne saurait être admis de façon trop large, car on ne perdra pas de vue que l'employeur reste libre d'exiger un extrait du casier judiciaire ou de poser toutes les questions utiles avant l'engagement. Ainsi, sauf exceptions dictées par les règles de la bonne foi, le candidat à l'emploi peut légitimement considérer que l'employeur n'attache guère d'impor- tance aux faits sur lesquels il omet de se renseigner.

B. Tests graphologiques ou psychologiques; autres tests 27. Principe. La mise en oeuvre de tests peut éclairer l'employeur sur l'aptitude du travailleur à remplir son emploi. Dans cette mesure, elle est sans doute licite. En revanche, s'il fournit des informations dépassant ce but, par exemple en mettant à nu toute la personnalité de l'intéressé, le test est illicite, parce que dispropor- tionné56.

n

semble que l'usage de tests soit moins répandu en Suisse que dans d' autres pays d' Europe57 .

28. Information et consentement de l'intéressé. Avant l'engagement comme en cours d'emploi, le salarié ne peut être soumis à un test qu'avec son consentement58 . Vu le caractère impératif de la protection légale, ce consentement n'est valable que dans la mesure où le test sert à éprouver l'aptitude du travailleur à remplir son emploi59 .

S'agissant de tests graphologiques, qui sont entrés dans les moeurs, la simple réponse manuscrite du candidat à l'emploi, comme suite à une exigence expresse de l'employeur potentiel, vaut sans doute consente- ment de l'auteur à une analyse graphologique60. Hormis ces circons- tances, l'on ne peut pas présumer un tel assentiment.

55 RUDOLPH, p. 41-42; SCHÜRER. p. 51.

56 RUDOLPH, p. 136-137.

57 RUDOLPH, p. 139.

58 RUDOLPH, p. 138; SCHÛRER, p. 54; Préposé, p. 1 \.

59 RUDOLPH, p. 140.

60 REHBINDER. n. 6 ad art. 320; BRÜHWILER, n. 8d ad an. 320. D'un autre avis, RUDOLPH, p. 140-141, avec de nombreuses références; MAURER, n. 21 ad an. 4;

PETER, p. 166, n. 834; SCHÛRER, p. 54; BRUNNER/WAEBERlBÜHLER, n. 4 ad art. 320; Préposé, p. 11.

(21)

Compte tenu du risque d'atteinte disproportionnée inhérent au test, l'employeur doit indiquer au travailleur les informations qu'il vise à obtenir et la méthode utilisée pour y parvenif6l.

29. Validité de l'obligation de se soumettre à un test? Le contrat individuel peut prévoir l'obligation du salarié de se soumettre à des tests. Il faut toutefois se demander dans chaque cas si, vu la protec- tion impérative découlant de l'art. 32gb CO, le salarié peut valablement contracter une telle obligation. On tiendra compte, à cet égard, de la nature de la profession et du but du test. A notre avis, la protection de la personnalité exige l'application de critères stricts: l'obligation de se soumettre à un test ne sera jugée valable que si ce procédé se révèle nécessaire, c'est-à-dire s'il constitue le seul moyen d'établir, à des conditions raisonnables, les aptitudes de l'intéressé à remplir son emploi.

En l'absence de clause contractuelle expresse, l'obligation de se soumettre à un test pourra, exceptionnellement, résulter du devoir de fidélité (art. 321a al. 1 CO). On songe au cas des pilotes, qui doivent régulièrement faire apprécier leur capacité à remplir leur tâche, ou à d'autres professions particulières, comme celle des sportifs, qui doivent attester l'absence de consommation de produits dopants; ou au gardien d'une banque ou de dépôts pétroliers, surpris dans un état qui présente- rait toutes les apparences de l'ébriété.

30. Accès aux résultats. L'intéressé peut exiger que l'em- ployeur porte les conclusions du test à sa connaissance. En outre, s'ils sont conservés par l'employeur, ces résultats doivent rester accessibles au salarié, dans son dossier personnel62.

Enfin, comportant par nature des données confidentielles, les conclusions des tests ne sauraient être communiquées qu'à un cercle extrêmement restreint de personnes, au sein de l'entreprise:

l'employeur doit, en vertu du principe de la proportionnalité, empêcher que les données ne parviennent à la connaissance de personnes qui n'en ont pas un besoin justifié.

C. Sanction des questions et des réponses illicites 31. Le droit au mensonge. Lorsqu'une question est illicite, le salarié peut refuser d'y répondre ou, le cas échéant, fournir une

61 RUDOLPH, p. 138; SCHÜRER, p. 54; Préposé, p. 10.

62 RUDOLPH, p. 137; SCHÜRER, p. 55.

(22)

LA PROTECI10N DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL 165 réponse fausse. En effet, la loi ne protège pas l'intérêt de l'employeur à recevoir une réponse exacte à une question illicite. Au contraire, destinataire d'une telle question, le travailleur se défend légitimement en lui refusant la vérité. Toute solution contraire viderait de sa substance une protection à laquelle le travailleur ne peut pas librement renoncer63.

Il en résulte que l'employeur ne peut pas résilier le contrat de travail avec effet immédiat au motif que le travailleur lui a menti (art.

337 CO). Il ne peut pas non plus invalider le contrat pour cause d'erreur essentielle (art. 24 CO). Une résiliation ordinaire du contrat serait abusive, car elle aurait pour motif la défense, par le salarié, d'un droit qu'il tient de la loi (art. 336 al. 1 let. d CO).

Étant seulement un moyen de défense contre une attaque i\licite, le droit au mensonge ne saurait couvrir les informations communiquées spontanément par le travailleur64.

32. La protection contre le licenciement. S'il licencie le travailleur à raison d'une qualité qui n'a pas de lien avec le rapport de travail ou à raison de l'exercice, par le travailleur, d'un droit constitu- tionnel, la résiliation sera, le cas échéant, abusive selon l'art. 336 al. 1 let. a ou b CO, de sorte que l'intéressé pourra réclamer à l'employeur une indemnité (art. 336a CO).

Ainsi, le congé fondé sur une condamnation pénale antérieure ne sera pas considéré comme abusif si cette condamnation diminue effecti- vement la confiance nécessaire aux rapports de travail. L'employeur peut donc licencier un travailleur en invoquant une infraction anté- rieure contre le patrimoine lorsque l'intéressé manie des espèces ou ordonne des paiements, si des objets de valeur se trouvent à sa proxi- mité ou encore si la clientèle de l'entreprise peut légitimement s'attendre que le personnel ne présente aucun risque, compte tenu des services offerts (par exemple une banque). L'employeur peut égale- ment résilier le contrat en raison d'une infraction, même relativement ancienne, contre les moeurs lorsque l'emploi met l'intéressé en contact avec des mineurs (établissements scolaires, formation d'apprentis) ou lui donne un pouvoir de fait dont il risquerait d'abuser (contremaî'tre, chef du personnel).

63 RUDOLPH, p. 118-125; REHBINDER, n. 42 ad art. 320; STREIFFIVON KAENEL, n. 10 ad art. 320; VISCHER, p. 41; Préposé, p. 10; SCHÛRER, p. 49; cnntr':

BRÜHWILER, n. Sb ad art. 320.

64 RUDOLPH, p. 42.

(23)

Si le travailleur refuse de se soumettre à un test et que, pour ce motif, l'employeur résilie le contrat, le licenciement sera examiné à la lumière de l'art. 336 al. 1 lit. b CO, car la décision du salarié relève de la liberté personnelle, droit constitutionnel non écrit. L'exercice de cette liberté ne saurait être sanctionné que s'il viole une obligation découlant du contrat de travail. Il faudra donc déterminer, à la lumière de toutes les circonstances, si l'intéressé était obligé de se soumettre au test, soit en vertu d'une clause expresse et valable du contrat, soit à raison de l'obligation de loyauté.

33. Le droit du postulant évincé à une indemnité. Selon l'art. 5 al. 2 LEg, la candidate à l'emploi qui se voit refuser un enga- gement pour un motif discriminatoire a droit à une indemnité, qui ne dépassera pas trois mois de salaire. Tel est le cas de la femme évincée à raison de sa grossesse.

Les questions illicites, ainsi que l'exigence de se soumettre à un test illicite, violent l'art. 328 CO, même au stade précontractuel. Ainsi, à notre avis, l'employeur qui refuse d'engager un candidat parce que ce dernier n'a pas répondu à une question illicite ou ne s'est pas soumis à un test illicite devra réparation du préjudice causé. Il y a lieu d'appli- quer, par analogie, quant au principe et au plafond, la règle de l'art. 5 al. 2 LEg, qui limite à trois mois de salaire le montant total de l'indemnité, plafond qui s'applique au total cumulé des indemnités dues, le cas échéant, à plusieurs personnes évincées illicitement.

34. Licenciement; réparation du dommage. Lorsqu'ils four- nissent des réponses fausses à des questions licites, le candidat à l'emploi ou le travailleur s'exposent, selon les circonstances, à un licenciement immédiat (art. 337 CO) ou à l'invalidation du contrat (art.

24 CO), ainsi qu'à l'obligation de réparer le dommage causé (art. 32le ou 41 CO).

E. Les installations de surveillance 1. Généralités

35. L'art. 26 OLT III. Selon le B.I.T., les effets négatifs de la surveillance sur la santé des travailleurs n'ont pas été définitivement établis; cependant, plusieurs études ont fait apparaître des états de

(24)

LA PROTECTION DES DONNÉES DANS LES RAPPORTS DE TRAVAIL 167

"stress" et la possibilité de conséquences plus graves, en particulier lorsque la surveillance a pour objet la mesure du rendement65.

Depuis 1993, les installations de surveillance font l'objet d'une disposition particulière, à l'art. 26 de l'ordonnance III d'application de la loi fédérale sur le travail. Ce texte prévoit:

"(1) Il est interdit d'utiliser des systèmes de surveillance ou de contrÔle destinés à surveiller le comportement des travailleurs à leur poste de travail.

(2) Lorsque des systèmes de surveillance ou de contrÔle sont nécessaires pour d'autres raisons, ils doivent notamment être conçus et disposés de façon à ne pas porter atteinte à la santé et à la liberté de mouvement des travailleurs".

Le libellé ci-dessus reprend textuellement l'art. 20.7 de la conven- tion collective de l'industrie des machines, du 1er juillet 1988.

Certes, le champ d'application de la loi sur le travail est moins vaste que celui du code des obligations, de sorte que l'art. 26 OLT III ne s'applique pas dans certaines branches (agriculture, horticulture, trans- ports, etc.) ni à certaines entreprises (entreprises familiales, etc.).

Toutefois, les principes découlant de cette norme peuvent aussi être déduits, en droit privé, de l'art. 328b CO, qui protège tous les salariés.

36. Principes. On peut déduire de cette disposition qu'elle pro- hibe la surveillance générale du comportement des travailleurs par des moyens techniques d'enregistrement, en particulier les systèmes d'ordi- nateur, les installations téléphoniques ou les caméras. C'est ce que souligne le commentaire de la convention collective de l'industrie des machines. selon lequel sont prohibés des systèmes de surveillance

"destinés à contrÔler exclusivement le comportement des travailleurs à la place de travail" (nous soulignons)66.

Toutefois, la surveillance est autorisée si elle vise d'autres fins qu'une surveillance générale, en particulier si elle a pour but le contrÔle du rendement ou la sécurité67. Ce sont les "autres raisons"

réservées à l'art. 26 al. 2 OLT III. Dans ce cas, la surveillance doit

65 B.I.T., Monitoring, p. 22-23.

66 Association patronale suisse de l'industrie des machines, Commentaire de la Convention dans l'industrie des machines 1993-1998, p. 48.

67 Voir OFDE, ad art. 26, p. 326-1; Préposé, p. 18; SCHÜRER. p. 61.

(25)

respecter le principe de la proportionnalité, de façon à ne pas porter atteinte à la santé des intéressés, ni à leur liberté de mouvementii8.

2.

us

caméras vidéo

37. Étude d'un cas. Le problème de la surveillance par caméra se pose, en particulier, dans des entreprises où sont manipulés des objets de valeur, par exemple de l'argent ou de l'or. li surgit aussi dans d'autres entreprises où le personnel ou les clients ont directement accès à des marchandises faciles à dérober (grands magasins).

Nous étudierons brièvement ci-dessous une affaire relativement récente, qui illustre la mise en oeuvre de plusieurs procédures de protection: la consultation interne à l'entreprise, l'intervention du syndicat signataire de la convention collective de travail, la mise en oeuvre de la loi par l'autorité administrative (inspection du travail).

a) Les faits. Dans l'entreprise E., la valeur de l'or se trouvant quotidiennement dans les ateliers se montait approximativement à dix millions de francs. En une année, E. a constaté, à l'occasion de la refonte de copeaux, la disparition de 4 à 5 kilos. Une lettre anonyme a désigné un prétendu coupable. L'employeur n'a pas prévenu la police, mais a installé un système de surveillance par caméra. Il a consulté ses employés. Panni cinquante collaborateurs, seuls deux s'y sont opposés.

Un syndicat a demandé la suppression de cette mesure de surveillance, qu'il considérait comme disproportionnée; il aurait préféré l'interven- tion de la police ou la présence de caméras surveillant exclusivement la salle du coffre, ainsi qu'un atelier particulier. Un médiateur choisi d'entente entre les partenaires sociaux fit la proposition suivante, laquelle fut admise tant par J'employeur que par le syndicat:

"E. est en droit d'exploiter un système de surveillance vidéo de ses bureaux et ateliers dans le but de prévenir le vol de mar- chandises et de matières premières (or et platine).

Les cassettes enregistrées ne seront visionnées, en présence du délégué syndical, qu'au cas où l'existence d'un vol aurait été constatée par un autre moyen de contrôle.

Dans le cas contraire, les enregistrements seront effacés tous les quinze jours, le 1er et le 15 de chaque mois, ou le jour travaillé suivant, en présence du délégué syndical, sans visionne- ment préalable. Tous les visionnements existants datant de plus de quinze jours seront effacés.

68 Voir déjà REHBINDER. n. 15 ad art. 328; BRÜHWll.ER. n. 2a ad art. 328 in fme.

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