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Discours antisémite et littérature pendant les années de guerre

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Academic year: 2022

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DISCOURS ANTISÉMITE ET LITTÉRATURE PENDANT LES ANNÉES DE GUERRE

« Submergé par la sottise. À tel moment je ne sais plus ce que je pense. Je ne tiens plus à rien penser. Il faudrait repartir de ce zéro pour se refaire une âme, un esprit ». Jean Guéhenno, Journal des années noires, note du15 novembre 1940

« Mais il y a des maux face auxquels le front ne cesse pas seulement d’être une métaphore, et le cerveau, logé derrière et impliqué dans des actes de cette nature, n’est peut-être alors plus capable de la moindre pensée. Je me sens pour ainsi dire assommé ». Karl Kraus, Troisième nuit de Walpurgis

Comment appréhender et comment parler des persécutions, des exclusions, des déportations qui frappent brusquement le monde intelligible et le cours ordonné de la vie, alors que, simultanément, tout un programme politique et culturel (celui de Vichy, celui de l’occupant) est mis en pratique pour célébrer les dites mesures « nécessaires » pour le renouveau national ?

Pour établir le droit nouveau, suite à l’ascension de Hitler au pouvoir en 1933, les juristes qui devaient élaborer le nouveau discours juridique conforme à la doctrine nazie n’ont pas cherché à « modifier les codifications » mais à en

« chambouler les concepts fondamentaux » (Jouanjean 2017 : p.19). C’est sans doute en ce sens que l’interrogation de Chamson, dès 1934, s’avère particulièrement clairvoyante lorsqu’il met en scène dans L’Année des vaincus (p. 94-104) la rencontre entre le personnage ayant fait un court voyage dans l’Allemagne de Hitler et ses voisins villageois qui l’interrogent sur ses impressions. Plongé dans le mutisme, « assommé » (selon le mot de Kraus), le premier n’arrive pas à expliquer ce qu’il vient de voir à travers de simples défilés, étendards et uniformes et qui s’avère impensable et horrible.

L’échec de son explication ou plutôt l’incapacité à nommer le visible déclenche en fin de compte le rire de ses interlocuteurs, tandis que son énoncé frôle à la folie. L’incapacité d’expliquer se situe dans cet espace langagier où la norme, sans toutefois « modifier les codifications » qui la définissent, se façonne par un renversement radical de concepts et de notions.

La journée d’étude se propose d’ouvrir le débat sur l’interrelation complexe entre littérature et politique, littérature et histoire dans le contexte de la Deuxième Guerre mondiale. Elle se propose d’interroger l’action poétique comme acte performatif, apte à faire face à l’inintelligible, ainsi qu’inversement, à convaincre et à devenir une arme redoutable aux mains d’une propagande destructrice. Dans ce contexte historico-politique, une attention particulière sera portée aux textes d’écrivains français dont le rôle public était plus important par rapport à d’autres pays européens. Certains, en effet, ont perçu très tôt les dangers du discours d’exclusion et du discours antisémite et ont élevé leurs voix dès les années trente face aux événements survenant en Europe. D’autres, au contraire, ont préféré se taire ou apporter leur appui à la doctrine de la haine.

Quel fut le rôle joué par la littérature dans la formation de l’opinion publique, notamment face à la propagande journalistico-littéraire antisémite qui atteint son apogée au moment du régime vichyssois ? Comment a-t-elle procédé pour exprimer sa résistance à l’imaginaire antisémite ? Ou, au contraire, de quelle manière a-t-elle opéré pour renforcer le récit meurtrier ?

Il s’agira d’interroger la réaction littéraire à l’antisémitisme, au discours de la « normalisation » et la légalisation des procédés et des mesures d’exclusion et de persécution afin d’examiner le rôle joué par la littérature soit dans une position de légitimation (le cas de Céline, Rebatet, Drieu La Rochelle...), soit dans une position de contestation (Thomas, Duhamel, Cassou, Saint-Exupéry…).

Sont proposés les axes de recherche suivants :

 Littérature et antisémitisme

 Représentations de l’Autre persécuté

 Le discours antisémite et l’idéologie nazie

 Réactions éthiques et esthétiques aux mesures d’exclusions Responsables scientifiques : Atinati Mamatsashvili & Alexis Nuselovici Bibliographie

André Chamson, L’Année des vaincus, in Les livres de la guerre, Paris, Omnibus, 2005.

Olivier Jouanjan, Justifier l’injustifiable. L’ordre du discours juridique nazi, Paris, Presses Universitaires de France, 2017.

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