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La prise en charge orthophonique de la dysoralité sensorielle de l’enfant tout-venant : critères d’évaluation de l’efficacité

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UNIVERSITÉ DE STRASBOURG

Ecole d’orthophonie

Mémoire présenté en vue de l’obtention du Certificat de Capacité d’Orthophonie

La prise en charge orthophonique de la dysoralité sensorielle de l’enfant tout-venant : critères d’évaluation de l’efficacité

des massages de désensibilisation.

Soutenu publiquement le 29 juin 2018

Par Sarah DE ROECK

Présidente du jury : Dr Elisabeth PERI-FONTAA, ORL et phoniatre

Directeur de mémoire : Matthieu MARTEL, orthophoniste

Rapportrice : Virginie CLAUDEL, orthophoniste

Assesseure : Isabelle JOUSSELLIN, orthophoniste

Année universitaire 2017-2018

Faculté de médecine

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Remerciements

A Matthieu Martel, qui a accepté de diriger ce mémoire avec enthousiasme et m’a soutenue dans ses nombreux rebondissements.

A Catherine Senez, qui m’a fait confiance et m’a offert son temps, ses archives et ses connaissances.

A Elisabeth Péri-Fontaa, pour tout ce qu’elle apporte aux élèves de l’école d’orthophonie et pour me faire l’honneur de présider ce jury.

A Virginie Claudel, qui a bien voulu se porter garante de la qualité de ce travail.

A Isabelle Joussellin, qui m’a guidée avec beaucoup de douceur vers une posture professionnelle et qui a accepté de m’accompagner en ce jour très spécial.

Aux orthophonistes et aux parents des enfants de ce mémoire, pour leur implication et pour tout le travail que cela leur a demandé.

Au professeur Couly et au docteur Philippe, qui ont patiemment répondu à mes mails pleins de questions.

A Héléna Chabran et à Lionel Landré, pour leurs conseils judicieux et leur bienveillance dans les pires moments d’angoisse et de remise en question.

A Juliette, pour sa précieuse amitié durant ce cursus et pour toutes les paillettes qu’elle sème sur son chemin.

A mes parents et à tous mes frères et sœurs, qui m’ont appris à croire en moi et à me soucier des autres.

A Wandrille, pour son amour et son soutien sans faille dans ce long parcours vers le métier de mes rêves.

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Table des matières

INTRODUCTION ... 1

DONNEES PREEXISTANTES ... 2

LE DEVELOPPEMENT DE LORALITE ALIMENTAIRE CHEZ LENFANT ... 2

L’oralité primaire ... 2

De l’oralité secondaire à l’oralité tertiaire ... 2

LE SYNDROME DE DYSORALITE SENSORIELLE (SDS) ... 3

Le trouble du traitement de l’information sensorielle ... 3

Qu’est-ce que le SDS ? ... 4

Les chémorécepteurs et mécanorécepteurs en cause ... 5

Le réflexe nauséeux et l’hypersensibilité ... 7

Le RGO et les régurgitations chez l’enfant ... 8

Impact du SDS sur la famille et la relation parent(s)-enfant ... 8

LA PRISE EN CHARGE ORTHOPHONIQUE ET LES MASSAGES DE DESENSIBILISATION ... 9

Le protocole de massages ... 9

L’accompagnement parental ... 11

PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES ... 12

MATERIEL ET METHODE ... 13

RESULTATS ... 14

A. ... 14

B. ... 16

C. ... 18

D. ... 21

E. ... 23

F. ... 25

G. ... 26

ANALYSE DES RESULTATS ... 28

DISCUSSION... 33

CONCLUSION ... 34

BIBLIOGRAPHIE ... 35

GLOSSAIRE ... 38

ANNEXES ... 39

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Introduction

"Je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j'avais laissé s'amollir un morceau de madeleine. Mais à l'instant même où la

gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d'extraordinaire en moi".

Marcel Proust,

Du côté de chez Swan

, 1913.

La bouche est un organe essentiel dans la construction de l’être : porte d’entrée des aliments et des multiples sensations qui les accompagnent, cavité extrasensible permettant les premières explorations d’objets, articulateur principal des sons de la parole, elle participe aux deux fonctions majeures que sont l’alimentation et la vocalisation. C’est un organe central du développement de l’enfant qui bénéficie d’une grande attention de la part des parents.

Malheureusement, ce développement peut être perturbé et certaines familles rencontrent des difficultés au moment de diversifier l’alimentation de leur jeune enfant. Parfois, c’est un syndrome de dysoralité sensorielle (SDS) qui freine ses explorations alimentaires. Dans ce syndrome, les chémorécepteurs de l’épithélium olfactif et les mécanorécepteurs de la bouche sont en cause (Senez, 2015). Trop sensibles, ils provoquent en réponse à certains stimuli un réflexe nauséeux très désagréable pour l’enfant qui se protège en développant des aversions alimentaires. Les parents, démunis et parfois culpabilisés face aux difficultés qu’ils rencontrent pour nourrir leur enfant, ne savent pas toujours quelle méthode employer, ni vers quel professionnel se tourner. Selon Catherine Senez, orthophoniste, des massages ciblés et répétés vont permettre d’augmenter le seuil de réponse des mécanorécepteurs : l’habituation à la stimulation intra-buccale permettrait de faire céder l’hypersensibilité qui empêche la diversification alimentaire. Cependant, aucune publication scientifique n’atteste à ce jour l’efficacité du protocole de massages conçu par madame Senez.

La vocation de cette étude est d’identifier les différents facteurs qui permettraient de mesurer les bénéfices tirés de cette technique de rééducation que nombre de thérapeutes pratiquent déjà quotidiennement.

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Données préexistantes

Le développement de l’oralité alimentaire chez l’enfant

L’oralité primaire

La succion est l’une des premières fonctions à se manifester chez le fœtus, grâce à l’apparition très précoce d’un réflexe archaïque : dès la 10ème semaine de grossesse, l’embryon ébauche une succion sous forme de mouvements de langue antéropostérieurs (réflexe de Hooker) qui permettent la formation du palais, la croissance mandibulaire et l’insertion des muscles de la langue sur la mandibule. Deux à cinq semaines plus tard la déglutition se met en place, et le couple « succion-déglutition » sera répété et automatisé in utero jusqu’à la fin de la grossesse (Thibault, 2007). Ainsi, l’enfant né à terme, entraîné à sucer et déglutir son liquide amniotique, sera capable d’ingérer le lait, nutriment exclusif et sécurisant. Un autre réflexe archaïque, le réflexe nauséeux que nous détaillerons plus loin, permet d’empêcher l’ingestion de substances toxiques et de dégager les voies aérodigestives supérieures. En d’autres termes, le bébé est programmé pour ne rien avaler d’autre que du lait durant ses premiers mois de vie. C’est le moment de l’oralité dite primaire, où l’alimentation est une séquence réflexe dépendant du tronc cérébral.

De l’oralité secondaire à l’oralité tertiaire

L’oralité secondaire, quant à elle, est praxique. Préludée par l’utilisation de la cuillère vers 4 mois, elle débute réellement vers 1 an, lorsque l’enfant mastique et déglutit de façon autonome (Couly, 2017). Cette capacité signe le processus de corticalisation des structures.

L’alimentation n’est alors plus un simple réflexe, mais une phase volontaire activant de nouveaux schèmes moteurs. Une « double stratégie alimentaire », alliant le lait au sein ou au biberon et les autres aliments introduits au fil des mois à la cuillère, est souvent maintenue

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jusqu’aux 2 ans de l’enfant dans les pays occidentaux. Cette oralité volontaire ne sera semblable à celle de l’adulte en termes de mastication et déglutition que vers l’âge de 6 ans.

Enfin, l’enfant grandissant va construire sa propre représentation de l’alimentation, basée sur son expérience sensorielle et sur l’étayage de son environnement. Cette « oralité tertiaire (ou oralité « cognitive ») » (Levavasseur, 2017) amène l’enfant à s’inscrire verbalement dans l’alimentation : « j’aime... », « je n’aime pas... » et à persévérer dans ses préférences comme dans ses aversions.

Le syndrome de dysoralité sensorielle (SDS)

Le trouble du traitement de l’information sensorielle

Le « traitement de l’information sensorielle », anciennement nommé « intégration sensorielle » (Ayres, 1963), désigne le processus par lequel le cerveau transforme un message reçu par le biais des sens en réponse comportementale adaptée. Ce traitement repose d’une part sur la modulation sensorielle, c’est-à-dire la capacité du système nerveux central (SNC) à réguler l’intensité des réponses en fonction des stimuli, et d’autre part sur la discrimination sensorielle qui implique un processus cognitif pour distinguer et interpréter les caractéristiques de ces stimuli. Ces derniers sont analysés par le SNC selon trois paramètres :

- leur modalité (visuelle, tactile, olfactive, gustative, auditive, vestibulaire, proprioceptive),

- leur intensité dont la perception est subjective, variant d’un individu à l’autre et même d’un moment à l’autre chez une même personne,

- leur durée qui implique deux composantes : la durée dite absolue (temps réel durant lequel un stimulus est appliqué), et la durée « ressentie » de la sensation, souvent plus longue.

Certains mécanismes neurophysiologiques permettent de moduler la perception des stimuli sensoriels, comme l’habituation (un stimulus répété va atténuer la réponse des récepteurs concernés) ou son contraire la sensibilisation.

Le trouble du traitement de l’information sensorielle est un trouble de l’organisation des stimuli qui entraîne une incapacité à produire une réponse adaptée, et par conséquent gêne

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certaines activités de la vie quotidienne. L’hypersensibilité sensorielle, définie comme une réponse trop rapide, trop intense ou sur une plus longue période que la durée absolue du stimulus, découle d’un trouble de la modulation sensorielle, c’est-à-dire d’un problème dans la phase initiale du traitement de l’information (Miller, Anzalone, Lane, Cermak & Osten, 2007). Les enfants souffrant d’une hyperréactivité sensorielle présentent des défenses sensorielles comme par exemple des réactions aversives aux odeurs ou à la texture de certains aliments, un inconfort démesuré au contact de certains tissus ou de la saleté, ou encore une intolérance au toucher des personnes ou au brossage des dents...

Les causes de ce trouble demeurent inconnues, mais quelques recherches suggèrent une composante héréditaire. Une étude de Gavin et al., en 2011, a montré des différences d’activité neuronale entre les cerveaux d’enfants neurotypiques et ceux d’enfants ayant un trouble du traitement de l’information sensorielle. Il y aurait donc une dysfonction cérébrale sous-jacente.

Qu’est-ce que le SDS ?

L’alimentation est un processus développemental sensori-moteur, affectif et social qui dépend des interactions entre les systèmes nerveux, cardio-respiratoire et gastro-intestinal, ainsi que des stimulations de l'environnement (Rogers et Arvedson, 2005). Une alimentation variée nécessite non seulement un développement harmonieux des capacités motrices de la sphère orale (succion, mastication, déglutition) mais également une maturation sensorielle générale au niveau du goût, du toucher ou encore de l’olfaction. Elle est également largement influencée par l’environnement, avec d’importantes variables comme la disponibilité, la quantité, le choix et la préparation des aliments, l’agencement et la durée des repas, ou encore les interactions sociales qui en découlent... De nombreux éléments sont donc susceptibles de perturber le développement de l’alimentation de l’enfant. Lorsque les difficultés rencontrées sont d’origine sensorielle, on parle de dysoralité sensorielle.

Selon Catherine Senez, première professionnelle à évoquer le Syndrome de Dysoralité Sensorielle, ce trouble se définit par une « hyper réactivité génétique des organes du goût et de l’odorat ». Une étude de Sauzay et Barrier (2011) estime la prévalence du SDS à 4.86% et met en évidence des hypersensibilités associées, notamment au niveau tactile (exploration limitée des objets et des doigts avec la bouche, difficultés à se salir, à toucher la terre ou le

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sable...). Le SDS décrit par Senez peut prendre plusieurs formes, allant du simple dégoût pour quelques aliments à l’aversion totale de la nourriture. Il s'exprime souvent par des haut-le- cœur (réflexe nauséeux), régurgitations, vomissements ou rejets à la vue, à l’odeur ou au contact de certains aliments liquides ou solides : l'enfant ne peut en tolérer la texture, la température, le goût... Mais selon Senez, le réflexe nauséeux n’est que le symptôme d’un phénomène plus complexe. Elle relève d’autres signes d’aversion alimentaire comme un manque d’appétit, une importante sélectivité combinée à un refus des nouveaux aliments, et une grande lenteur lors des repas, souvent associée à des problèmes comportementaux. Cette aversion d’origine sensorielle serait due à une trop grande réactivité des récepteurs mécaniques et chimiques impliqués dans la prise alimentaire, ce qui rejoint parfaitement la théorie d’un trouble du traitement de l’information sensorielle. Chez l’enfant tout-venant, ces problèmes d’alimentation apparaissent généralement au moment du sevrage et de la diversification alimentaire ou du passage aux morceaux. Les nouveaux aliments et les nouvelles textures proposés aux enfants hypersensibles leur causent des sensations olfactives et/ou intrabuccales qui leur sont insupportables et qui les amènent à restreindre leur alimentation.

Longtemps considérée comme ayant une étiologie psychogène, la dysoralité sensorielle est aujourd’hui un syndrome à part entière, dont la prise en charge entre officiellement dans la nouvelle nomenclature des orthophonistes à partir d’avril 2018, grâce à la création de l’acte spécifique concernant les troubles de l’oralité (AMO 13.5).

Les chémorécepteurs et mécanorécepteurs en cause

L’humain (contrairement aux animaux) ne mange pas essentiellement ce dont il a besoin, mais surtout ce qui lui procure du plaisir. Les messages sensoriels induisant le plaisir ou le déplaisir sont « captés mécaniquement ou chimiquement par les récepteurs du nez, la rétine, la peau et transmis (...) par la traduction réalisée par la sérotonine ». (Gordon- Pomares, 2004) D’autres capteurs s’ajoutent aux récepteurs sus-cités, comme la muqueuse buccale ou encore la langue, l’oreille ...

Les mécanorécepteurs en cause dans la dysoralité sensorielle sont les corpuscules de Pacini et de Meissner qui transmettent les sensations de vibration et la sensibilité tactile, les thermorécepteurs (du chaud et du froid), et les nocicepteurs (responsables des sensations

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douloureuses). Les chémorécepteurs également impliqués sont quant à eux situés dans l’épithélium des papilles fongiformes et caliciformes de la langue et dans la partie supérieure de la muqueuse nasale. Bien que tous les sens soient largement impliqués dans le plaisir de l’alimentation (« la vue, l’odorat, le goût, l’audition, la somesthésie, la proprioception, la thermoception voire le sens vestibulaire » Levavasseur, 2017), nous ne détaillerons ici que les nerfs sensoriels impliqués dans la reconnaissance du goût, de l’odorat et de la sensitivité intrabuccale, c’est-à-dire les nerfs transmettant les informations des chémorécepteurs et mécanorécepteurs précédemment cités :

- Le nerf olfactif (I) est strictement sensoriel. Les cellules olfactives réceptrices se situent dans la muqueuse olfactive qui recouvre la partie supérieure des parois externes et internes des fosses nasales. Leur prolongement périphérique se termine à la surface de cette muqueuse par quelques cils courts et fins. Les fibres nerveuses se réunissent en rameaux et traversent la lame criblée pour gagner la face inférieure du bulbe olfactif avant de voyager à travers le tractus olfactif jusqu’au lobe temporal moyen, dans l’aire olfactive primaire.

- Le nerf lingual (branche du nerf trijumeau V) assure toute l’innervation sensitive, mais non sensorielle, du dos et des bords de la langue jusqu’au V lingual : il transporte les sensations de pression, de tact, de chaud, de froid et de douleur.

- Le nerf facial (VII), moteur et sensitif, comporte les fibres sensorielles spéciales du goût pour les deux tiers antérieurs de la langue.

- Le nerf glosso-pharyngien (IX) est d’abord un nerf sensoriel. Il provient du myélencéphale et s’étend du crâne jusqu’au pharynx. Il comporte les fibres sensorielles générales transmettant le toucher, la douleur, la température et la proprioception du tiers postérieur de la langue, des amygdales et du pharynx (entre autres) : ce territoire explique qu’il soit à l’origine soit de réflexes de déglutition, soit de réflexes nauséeux. Il transporte également les fibres sensorielles spéciales du goût pour le tiers postérieur de la langue.

- Le nerf vague ou pneumo-gastrique (X), moteur et sensitif, reçoit les impressions gustatives perçues au niveau de la base de la langue, en arrière du V lingual et de l’épiglotte. Il transporte la sensibilité proprioceptive des muqueuses du laryngo- pharynx et du larynx, jouant ainsi un rôle protecteur des voies aériennes.

(Rouvière, 1974 ; McFarland, 2009)

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Le réflexe nauséeux et l’hypersensibilité

Un réflexe est une réaction nerveuse inconsciente qui résulte d’une excitation organique. Le réflexe nauséeux est un réflexe vital pour le nourrisson, lui permettant de protéger ses voies aériennes et digestives supérieures en éliminant tout corps étranger susceptible de les obstruer. « Le réflexe nauséeux est archaïque car c’est un réflexe de sauvegarde qui évite au bébé d’ingérer ce qui lui déplait, impliquant ainsi une forte prégnance gnosique préalable. C’est un réflexe segmentaire du tronc cérébral qui recrute beaucoup sur le plan moteur car il exige la contraction du diaphragme. Plus tard, la néophobie alimentaire du grand enfant, vers 2-3 ans, peut générer ce réflexe nauséeux, mais il a alors une origine corticale (aire des émotions). » (G. Couly, communication personnelle, 25 janvier 2018).

Le mécanisme de ce réflexe peut se décomposer ainsi : un récepteur sensoriel est stimulé par une cause externe, ce stimulus est transmis par les fibres afférentes sensitives à une zone bulbaire de réception : le centre du vomissement, situé dans le mésencéphale. La sensation reçue est transformée en impulsion motrice, se traduisant par des nausées (pouvant aller d’une simple envie de vomir à des vomissements). (Mathieu, 1981, cité par Clavière, 2002).

Le mouvement induit par le déclenchement du réflexe nauséeux est le processus inverse d’une déglutition : le diaphragme, se contractant, entraîne l’ouverture réflexe du cardia. Le péristaltisme œsophagien s’inverse, la paroi pharyngée se contracte et le voile du palais s’élève pour fermer le rhinopharynx. On remarque également une protrusion de la langue et une ouverture de la bouche. Il existe des variabilités individuelles et familiales de la sensibilité de ce réflexe. Une hypersensibilité se manifeste par une réaction exacerbée à certaines odeurs ou certains aliments en raison, comme nous l’avons évoqué plus haut, d’une hyper réactivité des perceptions olfactives, gustatives, ou proprioceptives. Les « zones gâchette », c’est-à-dire les aires réflexogènes, sont plus antérieures que la moyenne chez les personnes hypersensibles. Ainsi, certains enfants ont cette réaction dès lors qu’on introduit un objet dans leur bouche (comme une cuillère).

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Le RGO et les régurgitations chez l’enfant

Catherine Senez (2015) présente le RGO comme un signe associé aux aversions alimentaires d’origine sensorielle, cependant elle évoque majoritairement une population d’enfants porteurs de handicaps, ce qui sort du cadre de notre étude. En ce qui concerne les enfants tout-venant, Mouterde (2016) rappelle que « le reflux gastro-œsophagien n’est pas une maladie mais un phénomène physiologique, quoique probablement inutile, qui se produit plusieurs fois par jour chez tout un chacun ». Il précise que le nourrisson y est naturellement sujet « du fait de la quantité de liquide bue par jour, relativement au poids ». Selon ce gastropédiatre, 100% des nourrissons ont un RGO, 60% d’entre eux le manifestent par des régurgitations, et seulement quelques-uns subissent des conséquences néfastes comme des angines, des otites, une toux chronique, des pneumopathies à répétition... Dans ces rares cas, un lait épaissit suffit à diminuer les régurgitations (bien qu’il n’empêche pas le reflux), mais il a été prouvé que le couchage en position proclive dorsale n’avait pas d’impact sur le RGO du nourrisson (Becmeur, Rebeuh et Molinaro, 2009). Le reflux est considéré comme « typique » jusqu’à l’âge de la marche ; au-delà, les régurgitations doivent avoir disparu ou orienter vers un autre diagnostic comme le mérycisme (régurgitation d’aliments épais). Par ailleurs, aucun traitement médicamenteux n’a prouvé son efficacité sur le reflux. Les IPP, souvent prescrites, traitent uniquement l’acidité gastrique qui est par ailleurs utile et très rarement néfaste.

Dans ce contexte, on peut penser que si le RGO est corrélé à la dysoralité sensorielle, c’est avant tout parce que le trouble sensoriel de l’enfant incite les parents à proposer des aliments liquides en grande quantité (grâce au biberon) plus tardivement que la moyenne, et surtout bien au-delà de l’âge de la marche.

Impact du SDS sur la famille et la relation parent(s)-enfant

Les orthophonistes qui prennent en charge ces petits patients et leur famille le savent bien : tout le monde est impacté par un enfant qui ne mange pas comme on l’attend. D’abord, les parents sont confrontés à un échec dans leur fonction nourricière. Ils culpabilisent et s’inquiètent pour la santé de leur enfant, sa courbe de croissance, d’éventuelles carences...

Cela peut aussi remettre en cause toute l’organisation du quotidien : comment laisser toute la

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journée à la crèche ou à l’école un enfant qui n’y mangera rien de ce qu’on lui proposera ? Parfois la reprise du travail par les mères est retardée par le trouble alimentaire de l’enfant.

Les parents doivent en plus composer avec l’incompréhension, les jugements, les conseils et les réflexions de leur entourage, parfois même des médecins ! Senez rapporte que « certains arrivaient après un passage en pédopsychiatrie, ayant été étiquetés comme enfants

« anorexiques », accompagnés par leurs mères minées par les difficultés alimentaires de leur enfant et une culpabilité induite ». L’enfant aussi culpabilise, de ne pouvoir satisfaire les attentes de ses parents et d’être à l’origine du stress familial. Levavasseur explique qu’on observe alors « des parents qui, soit montrent des réponses instables à l’enfant « difficile à nourrir », soit abandonnent les propositions habituellement faites aux enfants du même âge.

Dans les deux cas, on ne peut retenir que l’aspect délétère pour le développement ». Il est naturel qu’un parent tente par tous les moyens de faire manger son enfant. Malheureusement la distraction, le forçage ou encore la punition ne sont pas des attitudes appropriées face à un trouble alimentaire d’origine sensorielle, et nuisent fortement à la relation parent-enfant en créant des tensions et des rancœurs.

C’est dans ce contexte particulièrement délicat et douloureux que les orthophonistes reçoivent les familles qui ont eu la chance d’être bien orientées par leur pédiatre, ou qui ont mené leurs propres recherches sur internet. Cette détresse doit absolument trouver un accueil bienveillant pour que se crée l’alliance thérapeutique nécessaire à la prise en charge des patients.

La prise en charge orthophonique et les massages de désensibilisation

Le protocole de massages

Le protocole de massage préconisé par madame Senez s’inspire de la méthode dite de

« desensitization » (désensibilisation, habituation) (Barber L. M., 1984) utilisée depuis une trentaine d’années dans la rééducation de la main devenue hypersensible après un traumatisme ou une chirurgie. Il s’agit de masser fréquemment et régulièrement la zone concernée par l’hypersensibilité afin de réduire la réponse nerveuse au stimulus répété.

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L’efficacité de cette méthode de rééducation sensitive de la main a déjà été démontrée (Göransson I. et Cederlund R., 2011).

En ce qui concerne l’hypersensibilité intrabuccale, on peut penser que les mécanorécepteurs de la bouche peuvent, tout comme ceux de la main, être désensibilisés par des stimulations répétées. Senez décrit très précisément dans les formations qu’elle donne et dans son livre (2015) le protocole qu’elle recommande de suivre à la lettre pour tous les enfants hypersensibles :

Selon Senez, ces massages doivent être pratiqués 8 fois par jour, en veillant à ne jamais déclencher le réflexe nauséeux de l’enfant, et ce durant 7 mois, même si des améliorations

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étaient repérées au bout de quelques semaines. En cas de fièvre, l’enfant étant plus sensible, il faut réduire l’amplitude des frictions mais ne pas stopper le protocole pour autant. De même, si par maladresse un réflexe nauséeux est provoqué par un massage, il faut immédiatement calmer l’enfant puis recommencer la friction en corrigeant son geste, afin de ne pas arrêter la stimulation sur une sensation désagréable. Cette désensibilisation doit être réalisée par les parents sur les indications de l’orthophoniste qui a un rôle d’accompagnement tout au long du protocole.

L’accompagnement parental

C’est un protocole très lourd que l’orthophoniste tente de mettre en place avec la famille, et cette dernière a besoin de soutien et de conseils tout au long de la désensibilisation.

Dans un premier temps, il s’agit de rassurer les parents, et de bien leur expliquer la cause du trouble alimentaire de leur enfant. Il est important qu’ils comprennent les mécanismes en jeu si l’on veut faire céder les « mauvaises » stratégies qu’ils ont parfois mis en place autour des repas (forçage, chantage, distraction...). Ensuite, l’orthophoniste doit présenter les massages en montrant les gestes en détail : vitesse, intensité, localisation, amplitude... Le plus important est de faire sentir aux parents (dans la paume de leur main par exemple) le stimulus qu’ils devront reproduire si souvent dans la bouche de l’enfant. L’orthophoniste peut leur proposer de « s’entraîner » sur sa propre main pour vérifier que les parents ont correctement intégré le geste, car des massages incorrectement réalisés pourraient empirer la situation. Senez recommande de demander à l’un des parents de faire le massage à l’enfant -après s’être bien lavé les mains- à chaque consultation, afin que l’orthophoniste puisse vérifier qu’il est correctement réalisé ou corriger si besoin le geste parental.

Le protocole de massages étant particulièrement long (7 mois), l’accompagnement parental est indispensable pour aider la famille à tenir sur la durée. Que les progrès soient très rapides ou au contraire plutôt longs à apparaître, la tentation d’arrêter les stimulations peut être forte et l’orthophoniste doit encourager, voire remotiver les familles en cours de traitement. Les consultations, hebdomadaires dans un premier temps puis bimensuelles voire mensuelles par la suite, sont également l’occasion de faire le point sur l’évolution de l’enfant et de mettre en place des ajustements à ses nouvelles capacités.

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Problématique et hypothèses

Le protocole de massages visant la désensibilisation des mécanorécepteurs intrabuccaux par habituation aux stimuli repose, nous l’avons vu, sur des bases théoriques solides. Cette méthode de rééducation est enseignée depuis des années par Mme Senez et mise en pratique par de nombreux orthophonistes. Cependant, aucune publication scientifique n’atteste à ce jour l’efficacité de cette désensibilisation, ni son impact sur l’alimentation des enfants tout-venant souffrant d’une dysoralité sensorielle.

Pour pouvoir mener une étude sur l’efficacité d’une méthode de rééducation, il convient de définir auparavant les critères selon lesquels elle doit être évaluée. Or ce protocole de massages vise à améliorer l’alimentation, qui est une activité centrale dans la vie de l’homme comme dans son corps : c’est un processus développemental sensori-moteur, affectif et social, qui implique tous les sens (la vue, l’odorat, le goût, l’audition, la somesthésie, la proprioception, la thermoception...) et qui repose en plus sur une représentation psychique, voire éthique des aliments et de leur consommation. Il y a donc tant de facteurs en jeu dans ce domaine qu’un premier travail s’impose afin de déterminer ce qui, dans la vie de l’enfant -et par conséquent de sa famille-, évolue grâce à la prise en charge orthophonique et aux stimulations intrabuccales.

Notre hypothèse principale est qu’à la suite de la mise en place du protocole de massages, les prises alimentaires de l’enfant augmentent en ce qui concerne d’une part la quantité ingérée lors d’un repas et d’autre part la diversité des textures acceptées par l’enfant.

Notre seconde hypothèse est que, comme le soutient Catherine Senez, l’enfant bénéficiant du protocole de massages présente de moins en moins de réflexes nauséeux et de vomissements ou régurgitations au fil des mois.

Enfin, nous émettons également l’hypothèse qu’en dehors des repas, d’autres compétences, domaines et activités du quotidien sont impactés par la désensibilisation : le bavage, le brossage des dents, la qualité du sommeil, le plaisir d’être câliné, l’humeur de l’enfant ou encore ses productions langagières.

Valider ou invalider l’une ou l’autre de ces hypothèses permettra de cibler les critères nécessaires à l’évaluation scientifique du protocole de massages élaboré par Senez.

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Matériel et méthode

Nous avons contacté une centaine de cabinets d’orthophonie de la région, les uns nous orientant vers d’autres, susceptibles de recevoir des enfants tout-venant avec un diagnostic de dysoralité sensorielle. Nous avons ainsi recruté 7 enfants (5 garçons et 2 filles) âgés de 7 mois à 6 ans 3 mois. Nous n’avons pu assister au bilan et à toutes les séances d’orthophonie que de 2 d’entre eux, mais nous avons fait signer à tous les parents un formulaire de consentement éclairé (annexe 1) qui leur présentait à la fois le but de notre étude et ce que nous attendions d’eux. En effet, en tant qu’experts de leur propre enfant, ce sont les parents qui avaient le plus grand rôle à jouer dans notre enquête : réaliser les stimulations intrabuccales et prendre des notes, si possible quotidiennes, sur ce que l’enfant acceptait de goûter ou manger, sur le nombre de régurgitations, vomissements et toux observés, sur le nombre de massages réalisés dans la journée et sur tout ce qu’ils observaient de nouveau et qui leur semblait lié à ce travail de désensibilisation. Nous avons choisi de ne pas leur fournir de tableau à remplir afin que leurs notes soient les plus spontanées possibles, incluant les éléments qui leur semblaient importants et auxquels nous n’aurions peut-être pas pensé. Au tout début de leur prise en charge orthophonique et avant le début des massages, nous leur avons également demandé un inventaire alimentaire recensant toutes les textures et tous les aliments acceptés par l’enfant.

En fin d’étude, nous leur avons fait remplir un questionnaire de synthèse (annexe 2) pour leur permettre d’exprimer leur ressenti sur le protocole de rééducation et de faire le point sur les progrès de leur enfant au niveau alimentaire et dans les autres domaines que nous supposions être susceptibles d’évoluer.

Les orthophonistes assurant les prises en charge nous ont fourni, au besoin, le compte-rendu de bilan orthophonique initial et leurs notes de séance, nous indiquant ainsi les conseils donnés aux parents en cours de rééducation. Des échanges téléphoniques avec les parents d’une part, et avec les orthophonistes d’autre part, nous ont permis de récolter un maximum d’éléments pertinents pour l’analyse de l’évolution des enfants. Ainsi, nous avons pu décrire pour chaque enfant un tableau clinique précis de sa dysoralité sensorielle initiale, avant de détailler l’évolution dans le temps de sa sensorialité générale et de son alimentation plus particulièrement.

Etant donnée la grande diversité des profils des enfants et de leur famille, nous avons choisi de présenter nos résultats sous forme de vignettes cliniques.

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Résultats

Afin de garantir l’anonymat des enfants inclus dans cette étude, nous avons choisi de remplacer leur nom par une lettre de l’alphabet. Ainsi, ces enfants sont rebaptisés A., B., C., D., E., F. et G.

A.

Bilan initial

A. est un garçon de 21 mois au moment du bilan, en novembre 2017. Il a présenté un développement normal, a été allaité jusqu’à 6 mois et sevré sans difficulté. Nous relevons cependant dans ses antécédents un important RGO qui a gêné son endormissement pendant un an, ainsi que des régurgitations importantes et des vomissements en jets. Il tousse le matin et le soir et cela semble lui faire mal. De plus, ses nuits sont entrecoupées par sa faim. Il met généralement plus d’une heure à s’endormir et réclame à manger vers minuit, puis vers 6h du matin. Il a de très grosses amygdales et est souvent enrhumé. Au niveau sensoriel, il aime toucher les textures comme le sable, les feuilles et les cailloux avec ses mains. Il porte les objets en bouche, y compris sa brosse à dents. Il est attaché à sa tétine. A. accepte et apprécie les caresses sur les joues, en revanche il refuse que l’adulte lui présente la cuillère pour manger : il préfère contrôler lui-même l’arrivée des aliments dans sa bouche et mange seul avec une fourchette. A. est, comme sa maman, très sensible aux odeurs et il aime que les aliments soient à température ambiante.

La plainte des parents résulte du petit appétit de leur fils lors des repas. C’est un enfant assez mince qui « picore » plus qu’il ne mange (maximum 5 cuillerées de purée par repas), à la maison comme à la crèche. Sa courbe de poids reste cependant normale, grâce aux biberons aux céréales que ses parents lui donnent le soir et la nuit. A table, il accepte de goûter les aliments, du bout de la langue, mais il les repose et s’en désintéresse. Il est sélectif et refuse de manger les morceaux mous, le riz ou encore les légumes verts. Il aime les biscuits apéritifs, le saucisson, les purées lisses, la banane. A. a presque toutes ses dents mais selon ses parents, il a tendance à avaler tout rond ce qu’il met en bouche et peut aller jusqu’à s’étouffer. Lors du bilan, nous n’observons pas de trouble fonctionnel pendant qu’il mange des bretzels, si ce n’est une légère hypotonie labiale occasionnant un bavage important. Sa langue s’oriente bien

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sur les côtés, mais il mâche peu avant d’avaler. Nous notons également qu’il explore les morceaux du bout des lèvres avant de les ingérer.

Nous concluons à la suite du bilan que cet enfant présente une hypersensibilité orale et olfactive dans un contexte de reflux gastro-œsophagien sans doute lié aux biberons nocturnes.

Nous préconisons aux parents d’entamer les massages de désensibilisation intra-buccaux, ainsi qu’une désensibilisation de l’odorat par habituation. Nous proposons un accompagnement parental régulier (toutes les 6 semaines environ) afin de suivre leur évolution. Enfin, nous orientons les parents vers une consultation ORL pour un avis sur la taille des amygdales du garçon.

Evolution

Les massages sont réalisés deux à trois fois par jour, le soir avant le bain puis avant le coucher, avec quelques oublis pendant les week-end et les vacances.

En décembre, une amélioration immédiate est constatée après seulement quelques semaines de massages. Nous constatons que le bavage est beaucoup moins important. Selon ses parents, A. est plus curieux à table où il manifeste davantage sa faim. Il trie les aliments dans son assiette, enlève tous les grains de riz qu’il y trouve. Il goûte du bout de la langue mais ne mange pas de morceaux mous. Il dort mieux, avec moins de réveils nocturnes, mais son RGO est toujours présent. Nous profitons de cette séance pour observer la réalisation d’un massage et corrigeons seulement la pression exercée par le doigt au niveau des gencives, que nous trouvons un peu légère. Au cours du mois, A. s’est étouffé avec un gros morceau de pomme. Cet épisode l’a effrayé et il n’a plus accepté que de la purée pendant une semaine.

En février, A. mange -parfois tout seul- en plus grande quantité et un tout petit peu plus varié : il a goûté au fenouil, à la glace, à la courgette crue. Il aime ce qui croque comme le pain grillé. Il commence à mastiquer ses tétines et à y faire des trous, parfois il joue avec la brosse à dents électrique. Un léger bavage est toujours présent. Il dort plus longtemps sans se réveiller, mais il est plus « énervé » au moment du couchage qui dure 20 minutes à une heure.

Il n’aime plus avoir les mains sales à table et demande qu’on lui essuie. A ce stade nous encourageons les parents à masser également les paumes des mains et les doigts d’A., de façon appuyée, et à lui proposer des choses à croquer/mastiquer pour contenter son besoin et éviter qu’il n’avale le plastique des tétines.

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En avril, A. semble avoir moins faim la nuit et ne réclame pas systématiquement ses deux biberons. A la crèche, il ne mange que les aliments lisses (purées, compotes, soupes) et le goûter. A la maison il mange plus de textures différentes, mais dans une bien moindre quantité : galettes de blé noir au jambon et au fromage, poisson pané, purée de légumes, coquillettes, poulet, knacks, jus de fruits et légumes, amandes germées, raisins secs, sticks apéritifs, chips de légumes... mais les quantités ingérées sont très insuffisantes et le garçon contrôle toujours la température avant de mettre en bouche. Il veut manger tout seul. Les parents déplorent des accidents d’étouffement impressionnants avec des aliments trop gros ou trop durs qui surviennent surtout lorsqu’A. est fatigué. L’ORL consultée a noté une hypertrophie des végétations et une hypertrophie amygdalienne très marquée avec une obstruction quasi-complète de l’oropharynx. Cela engendre l’avancée de la langue et explique le bavage. Dans ce contexte, une amygdalectomie partielle est réalisée.

Synthèse

Après 5 mois de massages de désensibilisation et une opération réduisant la taille de ses amygdales, le RGO de l’enfant a diminué et son bavage également. Il y a aussi une amélioration en ce qui concerne la diversité des textures acceptées et le plaisir qu’il prend à être touché et câliné. La maman précise que les changements se font majoritairement ressentir à la crèche lors du repas de midi, mais que le dîner à la maison reste un moment assez court durant lequel il ne mange pas beaucoup. Malgré tout, il est plus curieux et s’amuse de ses nouvelles sensations, par exemple en léchant un morceau de citron à plusieurs reprises. Les parents associent ces évolutions aux massages réalisés ainsi qu’à leurs nombreux encouragements pour l’accompagner vers la nouveauté. L’opération des amygdales a fait de la place à sa langue et a permis de réduire en partie le bavage, mais tous ses problèmes d’alimentation ne sont pas encore réglés

B.

Bilan initial

B. est un garçon de 2 ans 6 mois au moment du bilan en mars 2018. Cet enfant a été nourri au lait maternel épaissi, par l’intermédiaire du biberon, jusqu’à la diversification alimentaire à l’âge de 5mois ½. Celle-ci s’est bien passée, avec des purées de légumes. Mais

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le passage à des textures moins lisses n’a pas encore pu se faire. Une texture gluante ou grumeleuse (banane écrasée dans un yaourt, compote mélangée à de la goyave) déclenche des vomissements chez cet enfant (hypersensibilité aux textures). Son alimentation se limite donc au lait avec 2 biberons par jour, aux yaourts, aux purées et aux compotes lisses et sans morceaux. Il mange aussi des petits pots qui peuvent parfois contenir des petits spaghettis ou du riz. Sa courbe de poids est normale. Depuis février 2018 il accepte de croquer des biscuits

« boudoirs ». L’orthophoniste relève une hypersensibilité globale : B. n’aime pas du tout que de l’eau lui tombe sur la tête ou le dos, ni être coiffé, avoir les mains sales ou encore se promener pieds-nus sur du sable ou de l’herbe mouillée. Le brossage des dents pose un problème également : B. mord la brosse pour empêcher le brossage. La thérapeute met en place une désensibilisation et commence en douceur par « le tour de la maison », préliminaire avant les massages intrabuccaux, décrit par Senez dans son livre : « En utilisant nos deux mains, paumes ouvertes et posées sur la tête de l’enfant nous allons réaliser une série de contacts, pressions, lâcher de pression, retraits. Les trajets sont : front-sommet du crâne, les deux tempes, un œil-sommet du crâne (...), l’autre œil-sommet du crâne, les deux joues et la bouche-sommet du crâne. Il faut faire ces pressions le plus souvent possible. » Ces gestes sont associés à une petite comptine qui rend le moment agréable et ludique.

Lorsque ces stimulations seront bien acceptées, les parents pourront passer au protocole intrabuccal (en avril). L’orthophoniste conseille de donner à B. une petite assiette contenant les aliments mangés par les parents afin qu’il puisse l’explorer avec les mains à défaut d’y goûter.

Evolution

Au mois de mars, alors que ses parents le stimulent avec « le tour de la maison », B.

vomit trois fois et régurgite une fois sur une période de 3 jours consécutifs. En cause, des petites pâtes ajoutées à la purée de légumes. Dans le même mois, il progresse légèrement en mangeant une fine lamelle de pomme, des « pik et croq » (biscuits croustillants trempés dans un fromage crémeux), et un morceau de banane écrasée avec un yaourt. Il commence également à lécher des biscuits apéritifs et du chocolat.

En avril, après une pause de 3 jours due à des vacances chez ses grands-parents qui n’ont pas pris le relai des stimulations, les parents reprennent « le tour de la maison » trois fois par jour et entament les massages intrabuccaux deux fois par jour. Au cours de ce même mois, B. a eu

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deux épisodes de régurgitation devant un repas, mais il a par ailleurs progressé davantage : il croque dans les petits gâteaux et les biscuits apéritifs, accepte de la saucisse et de la banane écrasée chez sa nourrice, et commence à grignoter des morceaux de pain. Il essaye également une nouvelle température : la glace à la vanille qu’il laisse fondre pour éviter d’avoir des morceaux en bouche.

Synthèse

En deux mois de stimulations et seulement un mois de désensibilisation intrabuccale à raison de deux massages par jour, et malgré une courte pause dans le protocole, le questionnaire de synthèse rempli par la mère de B. révèle qu’il a progressé au niveau de la diversité des textures acceptées (il mange de plus en plus d’aliments solides) et du brossage des dents. Elle associe ces améliorations à l’avancée dans le protocole de massages et n’identifie pas d’autre facteur susceptible d’y contribuer.

C.

Bilan initial

C. est une petite fille de 7 mois au moment de son bilan orthophonique, en septembre 2017. L’anamnèse révèle des difficultés d’alimentation depuis la naissance car elle est née avec un douloureux muguet buccal, traité grâce à un antifongique. C. tétant lentement et peu efficacement, l’allaitement est rapidement devenu difficile -puisque c’est la stimulation réalisée par le bébé en tétant qui provoque la production de lait par le sein- et le biberon est venu compléter son alimentation. Des désordres intestinaux ont amené ses parents à lui proposer du lait de riz, ce qui a bien résolu le problème et lui a permis de finir ses biberons.

Un RGO a été suspecté car elle régurgitait parfois par le nez et un traitement par IPP a été proposé, sans efficacité constatée. Sujette à des bronchiolites à répétition, C. est tout le temps encombrée, elle a des stases de glaires au niveau du carrefour oropharyngé et tousse depuis qu’elle a 1 mois ½. Cet encombrement la fait « ronronner » (sa respiration est bruyante) et ralentit considérablement la prise du biberon car elle est gênée pour synchroniser sa respiration et sa déglutition. C. est donc suivie par un kinésithérapeute qui l’aide à dégager ses voies respiratoires. Par ailleurs un examen du transit a mis en évidence des fausses-routes aux liquides. L’alimentation à la cuillère pose moins de problème, et la petite fille mange des

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légumes à midi et de la compote au goûter. Le lien main-bouche est bien installé : elle suce ses doigts et met les objets en bouche. En revanche elle recrache systématiquement une tétine et elle présente un bavage important. L’ORL consulté n’a constaté aucune anomalie physique.

La demande des parents résulte des difficultés de déglutition des liquides et du temps nécessaire à la prise des biberons. De plus, C. est sélective et refuse certains aliments et certaines textures. La maman ne s’imagine pas pouvoir confier sa fille à une nourrice car son alimentation demande trop d’adaptations. Nous relevons une hypotonie linguale et labiale et conseillons aux parents de masser le plancher buccal pour stimuler la base de langue et de tapoter les lèvres et les joues de l’enfant pour tonifier sa sphère orale. Plus tard, nous leur recommanderons de mettre en place les massages intrabuccaux pour l’aider à supporter davantage de textures.

Evolution

En décembre les parents ont remarqué que sa déglutition de liquide est moins bruyante. Elle n’a plus de régurgitation par le nez, ce qui signifie que son voile du palais ferme correctement le nasopharynx à la déglutition. Elle est également moins encombrée et elle ne « ronronne » plus qu’en période de rhume. Les repas sont plus longs qu’auparavant, mais elle commence à accepter de manger des textures moins lisses, qui lui sont données avec une petite cuillère en silicone. Nous conseillons à la maman d’essayer de passer à une toute petite cuillère en métal pour lui offrir de meilleures informations sensorielles. C. porte absolument tous ses jouets à la bouche et sort beaucoup sa langue pour explorer. Elle reçoit des massages au niveau des gencives et de la langue, ainsi que des tapotements sur les lèvres qu’elle semble apprécier.

En janvier, C. accepte les petits morceaux comme des pâtes bien cuites. Au moment des fêtes de fin d’année, les parents ont oublié de lui faire les massages et s’en sont aperçu au bout de quelques jours car elle avait de nouveau du mal à boire. Cela s’est amélioré avec la reprise des massages. C. a plusieurs dents qui poussent et elle essaye maintenant de mordre sa maman lors des massages, ce qui les rend compliqués à réaliser. Son caractère s’affirme : elle repousse la cuillère et le biberon, mange davantage avec son père qu’avec sa mère, veut décider de ce qu’elle mange ou pas. Par exemple, elle goûte les nouveaux fruits et légumes qui lui sont proposés, mais elle n’accepte que ses gâteaux habituels (des galettes de riz). Le repas peut durer une heure. Elle commence à manger seule avec sa cuillère en silicone, en relais avec la cuillère en métal que tient le parent qui la nourrit. La succion reste un peu

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compliquée pour elle. Elle a eu du mal à s’adapter à une nouvelle tétine sur son biberon d’eau.

Nous proposons lors de cette séance de lui faire sentir des odeurs alimentaires (vanille, fraise, cannelle, citron). Elle semble apprécier et sort sa langue quand l’odeur lui plaît. Nous conseillons à la maman de mettre en place un petit rituel plaisant pour initier le temps du repas avec sa fille.

En février, C. mange beaucoup mieux, en seulement 20 minutes. Elle accepte bien les morceaux et les double-texture. Après le déjeuner elle est fatiguée et ne veut plus de yaourt mais accepte un biberon qu’elle boit toujours lentement. Elle croque des petits bouts de bretzel, des biscuits apéritifs. Elle refuse la brosse à dents et n’accepte pas du tout les stimulations au niveau du palais (elle mord) donc ses parents ne lui massent plus que les gencives. Elle se met en colère quand on la met dans sa chaise haute, mais se calme quand on lui apporte son assiette. Elle explore beaucoup les objets avec ses mains. Nous conseillons les adaptations suivantes : proposer des bâtonnets de légumes cuits qu’elle puisse attraper et croquer, lui proposer une brosse à dents très souple qu’elle puisse manier seule sur imitation, passer à la tasse pour boire afin de pallier ses difficultés de succion, et lui montrer, avant de l’installer pour le repas, une photo de son assiette pleine afin qu’elle comprenne et anticipe les évènements.

En mars, C. goûte de nouveaux aliments (frites, confiture, mousse au chocolat, nouveaux biscuits apéritifs...) et de nouvelles texture (légumes en bâtonnets tendres). Elle commence à mastiquer et réclame davantage de biberons car elle a également moins de mal à téter. Dans ses jeux, C. donne à manger à sa poupée et lui donne l’exemple en ouvrant et fermant la bouche. La maman a arrêté les stimulations intrabuccales car sa fille ne se laissait plus faire, mais elle continue les stimulations faciales, comme pincer ses lèvres vers l’avant, et C.

commence à faire des bisous. Le brossage des dents est toujours impossible : nous leur proposons d’essayer un doigtier en silicone.

En avril, elle a encore intégré de nouveaux aliments et de nouvelles textures et saveurs (biscuits aux fruits, crème pâtissière, morceaux d’orange qu’elle croque pour en extraire le jus, morceaux de poire, thon-mayonnaise...). A midi, elle accepte désormais un yaourt en dessert à la place du biberon. La maman continue de lui faire les massages externes deux fois par jour, et a pris l’habitude de stimuler sa base de langue avant de lui donner à boire car cela semble l’aider. C. met maintenant ses vêtements en bouche et aime croquer sa brosse à dents.

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Synthèse

C. a bénéficié d’environ 4 mois de massages des gencives, à raison de deux massages par jour avec quelques petites pauses. Elle a beaucoup progressé au niveau de la diversité des textures et des aliments acceptés. Elle prend plus de plaisir à manger, déglutit mieux et parle plus. Elle ne fait plus de fausses-routes et elle est moins encombrée. En revanche la prise du biberon est toujours longue et se fait en plusieurs fois. La maman pense que les améliorations coïncident avec l’avancée du protocole de massages, mais évidemment la croissance de C.

implique des progrès spontanés et les nombreux changements qui en découlent (notamment sa nouvelle dentition) sont à prendre en compte.

D.

Bilan initial

Ce petit garçon a 3 ans 7 mois lors de son bilan en septembre 2017. Bébé, il a été allaité au sein pendant un mois mais il ne tétait pas très efficacement et se fatiguait beaucoup, ce qui nécessitait de le nourrir toutes les demi-heures. Face à ses difficultés, sa maman a commencé à tirer son lait pour le lui donner au biberon (essayant tous les modèles et toutes les tétines du commerce). D. se fatiguait toujours et il fallait souvent le réveiller pour qu’il continue à téter ; un petit biberon pouvait lui demander 45 minutes d’efforts. Un RGO lui a valu une prescription d’antiacide qu’il était impossible de lui faire prendre. Son alimentation s’est diversifiée à 6 mois, avec des purées de carotte « maison » bien lisses et des compotes. Il ne prenait plus le biberon que le matin. Vers 12 mois, le passage aux morceaux a été très laborieux. Du jambon mixé dans sa purée lui donnait de violents réflexes nauséeux et cette texture le faisait vomir très souvent. A 15 mois il pouvait manger quelques coquillettes, mais seulement une par une. C’était un enfant qui ne portait rien à sa bouche.

Au moment du bilan, D. est un enfant hypersensible aux textures et à la chaleur : il faut le doucher avec de l’eau presque froide ! Il a un petit appétit, accepte peu d’aliments et ses repas sont longs (45 minutes pour le mettre à table et jusqu’à 1h30 pour qu’il finisse son repas) et source de tensions. Le brossage des dents est très compliqué pour lui. Sa maman se souvient qu’étant petite elle était elle-même hypersensible aux textures et mâchait très longtemps ses aliments pour lisser le bolus qu’elle avait en bouche. Elle est toujours très sensible aux odeurs.

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Le papa de D., de son côté, a des réflexes nauséeux lorsqu’il se brosse les dents ou qu’un médecin pose un abaisse-langue dans sa bouche.

L’orthophoniste met rapidement en place le protocole de massages intrabuccaux et un accompagnement parental. Les parents étant séparés, les séances se font alternativement avec l’un et avec l’autre.

Evolution

D. passe une semaine sur deux avec chacun de ses parents. Les massages sont réalisés en moyenne deux fois par jour par le père et cinq fois par jour par la mère, entre les mois d’octobre et décembre. Durant cette période, D. a beaucoup évolué, notamment en commençant à lécher et mettre les objets en bouche. Il a un PAI à la cantine qui lui permet d’emporter des aliments qui le rassurent. Des jeux autour de la sensation de chaleur lui ont permis de mieux la tolérer. Par exemple, toucher le radiateur, jouer avec le jet de la douche ou encore s’amuser avec une dînette dans le bain l’ont beaucoup aidé. Un petit rituel a été instauré avant le passage à table : il pose sa tétine, passe aux toilettes et va se laver les mains avant d’aller s’asseoir devant son assiette, ce qui prend beaucoup moins de temps qu’auparavant. Au moment de Noël, les massages sont devenus une contrainte que l’enfant a de plus en plus de mal à accepter et ses parents arrêtent le protocole.

En janvier, D. a envie de goûter de nouvelles choses comme de la pizza. Le repas ne dure plus que 30 minutes. La maman contourne les difficultés et résistances de son fils par des renforçateurs, par exemple en lui proposant deux desserts à condition qu’il mange encore telle quantité dans son assiette. Il accepte de nouveaux aliments comme les lentilles, les petits pois et les nuggets. En revanche, il n’a plus envie de venir chez l’orthophoniste et ne comprend pas pourquoi il doit se rendre à ces rendez-vous (« je ne suis pas malade ! »). Les séances sont donc espacées.

Au mois de mars, D. réclame à manger quand il a faim (avant il n’exprimait jamais cette sensation). Depuis le mois de février il a une brosse à dents électrique qu’il adore et qu’il garde longtemps en bouche. Ce moment est devenu un jeu et un plaisir pour lui. Sa courbe de poids se rapproche de la normale, et même s’il est toujours dérangé par certaines textures comme celle du steak haché, il mange presque comme tout le monde et avec plaisir. Le PAI a donc été arrêté.

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Synthèse

Le questionnaire de synthèse a été rempli par chaque parent séparément et les résultats ne sont pas du tout similaires. Visiblement, le père et la mère de D. ne partagent pas le même avis sur le trouble sensoriel de D. ni sur son évolution. Leur regard sur l’alimentation en général semble différer. Pour le papa, les seules améliorations constatées concernent la quantité et la diversité des aliments et des textures acceptés par son fils. Il insiste auprès de lui pour qu’il accepte de manger de tout parce qu’il l’en sait capable. Il ne pense pas que ces progrès soient liés aux massages de désensibilisation, mais plutôt à son changement d’attitude face à son fils : « je pense que trop d’importance a été accordée à ses préférences ». Selon lui, depuis qu’il impose les menus à son enfant -tout en tenant compte de ce qu’il aime, mais sans lui demander son avis- les repas se passent mieux : « il s’y plie désormais sans opposer de résistance ».

Selon la maman, d’autres choses ont évolué : le brossage des dents, la durée des repas, mais surtout l’appétit et le plaisir de manger qui sont vraiment nouveaux pour son fils. Elle dit que chez elle il prend du plaisir à venir à table, accepte de goûter « même s’il reste difficile ». Le repas est devenu un moment convivial et agréable. Elle attribue ces progrès à la désensibilisation : « au début du protocole, il a réellement découvert sa sphère orale et le développement qu’on peut observer chez un tout-petit était observable chez lui, il léchait tout et mettait beaucoup à la bouche. Au fil des mois, il a rattrapé son retard ». D. a pris confiance en lui et veut désormais manger « comme ses copains ».

E.

Bilan initial

E. est un garçon âgé de 6 ans 4 mois lors du bilan orthophonique. Bébé, il a été nourri au lait en poudre, jusqu’à la diversification alimentaire qui a été très compliquée : les petits pots lui déclenchaient d’importants réflexes nauséeux. Il est traité par IPP pour un RGO suspecté. Sa mère le décrit comme un « mangeur à grande vitesse », car il est toujours le premier à terminer son repas. Il semble gober les aliments sans les mastiquer. A table, il s’assied toujours en tailleur et n’arrive pas à garder une position assise « conventionnelle ».

Lorsqu’il n’aime pas ce qu’il y a dans son assiette, il a l’habitude de réclamer un verre d’eau pour s’aider à manger malgré des haut-le-cœur. L’orthophoniste demande à l’enfant ce qu’il

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aime manger, mais il ne sait pas quoi répondre. Lorsqu’elle interroge la mère sur ce qu’il n’aime pas, celle-ci répond que la liste est longue. Au cours de ce bilan, la thérapeute observe E. manger une galette de riz. Il « mastique » principalement avec ses incisives et ne semble pas apprécier : il remue beaucoup et grimace. Cet enfant semble présenter une dysoralité sensorielle contre laquelle il a mis en place des stratégies : mâcher le moins possible pour ne pas être envahi par les saveurs et avaler très rapidement pour éviter de garder en bouche des textures qui le gênent. Il mange de tout mais sans aucun plaisir et dans un temps record. En accord avec la maman, l’orthophoniste met en place un protocole de désensibilisation qui commence avec le « tour de la maison » avant d’entamer les massages intrabuccaux.

Evolution

Les massages sont faits 2 à 3 fois par jour en moyenne à partir du 1er décembre et l’évolution est suivie à raison d’une séance par mois avec l’orthophoniste. Cette dernière contrôle à chaque séance la technique de réalisation des stimulations et guide la progression de l’étendue des mouvements dans la bouche. A la lecture des menus proposés à l’enfant, nous observons qu’il peut effectivement manger de tout (viande, poisson, légumes, riz, pâtes...) et qu’il est exposé à toutes les textures possibles. La maman explique qu’en revanche il faut le forcer pour qu’il goûte.

Au mois d’avril, il semble manger un peu moins rapidement et un peu plus en quantité. Il accepte plus facilement de goûter de nouvelles choses, mais l’alimentation n’est toujours pas un plaisir pour cet enfant dont la maman est plutôt exigeante.

Synthèse

Malgré les massages de désensibilisation et l’accompagnement de l’orthophoniste, les repas ne sont toujours pas agréables pour E. qui a l’air de subir ces moments. S’il mange moins vite c’est qu’il est sans doute un peu moins gêné par les textures, cependant le forçage mis en place -même s’il semble efficace pour le faire manger- est sans doute un frein à la construction d’une représentation agréable de l’alimentation dans l’esprit de cet enfant.

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F.

Bilan initial

F. est une petite fille de 19 mois lors de son bilan en octobre 2017. Elle a une tendance à l’hypertonicité et a commencé à marcher sur la pointe des pieds. L’anamnèse révèle un RGO récurrent depuis sa naissance, avec des vomissements en jets. La tétée semblait difficile et fatigante pour ce bébé qui s’endormait très rapidement. Elle a donc reçu des pipettes de lait en poudre avant de reprendre le sein. Une alimentation mixte sein-biberons a été mise en place au cours de ses 3 premiers mois, ainsi qu’un traitement par IPP qu’elle ne prend plus.

C’est une enfant qui est souvent malade, avec des affections ORL récurrentes et des gastroentérites qui l’empêchent de manger correctement pendant deux semaines. Au moment de ce bilan elle se situe dans la courbe haute sur le plan de la croissance, mais dans la courbe inférieure pour le poids. La plainte des parents résulte du petit appétit de leur fille qui semble avoir faim le matin et le midi mais prend peu de plaisir à manger et se montre très sélective. A partir de ses 12 mois la diversification a été difficile. Au départ elle privilégiait les petits pots du commerce, mais elle préfère désormais les repas « maison ». Elle n’accepte plus aucun morceau ni aliment mou car ils la font vomir et ne se nourrit que d’aliments très lisses : purées, yaourts, poulet et légumes verts bien mixés. F. met les aliments en bouche avec beaucoup d’appréhension, mais elle a tendance à croquer dans des matières non alimentaires, montrant ainsi son besoin de mordre. Elle peut vomir en situation de stress. Sa mère est aussi sujette aux nausées et sensible à la nourriture et au brossage des dents. Sur le plan sensoriel, F. est une enfant hypersensible aux sons, aux odeurs, et au toucher : elle ne touche les matières que du bout des doigts et rejette ce qui est mouillé ou granuleux. Son hypersensibilité intrabuccale rend bien sûr le brossage des dents très difficile pour elle aussi.

L’orthophoniste propose de mettre en place le protocole de désensibilisation intrabuccale de Senez associé à une désensibilisation olfactive par habituation. Un accompagnement parental permettra de suivre l’évolution de l’enfant et une adaptation des textures au fil de ses progrès.

Des activités sensorielles sont préconisées aussi bien à la maison qu’en séance.

Evolution

Les parents avouent ne pas être très assidus dans le protocole de massages, et le suivi est compliqué car ils sont peu disponibles. En revanche F. est stimulée sur le plan sensoriel par des activités comme la pâte à modeler, la peinture aux doigts, ou encore le transvasement

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de semoule sèche. Elle accepte les massages mais est très sensible au niveau des gencives. En novembre, elle est enrhumée et a plusieurs épisodes de vomissements, mais ils sont en lien avec la présence de glaires qui la gênent. En décembre, elle accepte de toucher de la carotte et de la courgette crues puis cuites, mais elle ne supporte pas d’avoir du yaourt sur les mains.

Elle vomit encore au contact de certaines textures en bouche comme avec de la bouillie de lait aux céréales, mais c’est beaucoup moins fréquent qu’auparavant. A Noël, les parents arrêtent les massages parce qu’ils ne trouvent pas le temps de les faire et qu’F. commence à les refuser.

En avril, les parents constatent des améliorations dans plusieurs domaines : la durée des repas, la diversité des aliments et des textures acceptées, l’appétit et le plaisir de manger de leur fille, son humeur et la fréquence de ses vomissements. Ils décrivent F. comme étant plus détendue, allant d’elle-même s’installer à table, ouvrant la bouche plus facilement devant la cuillère et mangeant plus qu’avant. Elle accepte des textures plus épaisses et pioche dans les assiettes de ses parents pour manger elle aussi des frites, des épinards, des chips, du chocolat...

Synthèse

Les massages n’ont été faits que pendant deux mois complets, une à cinq fois par jour.

Les parents pensent que cela a accéléré la progression de leur fille mais ils attribuent essentiellement ses nouvelles compétences alimentaires à un « déclic » pendant des vacances en famille où elle a apprécié les grands repas conviviaux. Elle y goûtait à tout et prenait du plaisir à être à table. Au retour de ce voyage elle avait de nouveau moins d’appétit et aujourd’hui elle mange toujours mieux lorsqu’il y a beaucoup de monde autour de la table.

Les parents se disent soulagés d’avoir pu mettre des mots sur le trouble de leur fille mais regrettent que les massages de désensibilisation soient la seule méthode de rééducation qu’on puisse leur proposer. Ils aimeraient avoir une alternative à ce protocole qui est trop contraignant pour eux.

G.

Bilan initial

Ce petit garçon a bénéficié d’un bilan orthophonique à l’âge de 23 mois, en février 2018. Il est né avec un frein de langue très court qui a été sectionné à 2 jours de vie. Il a été

Figure

Tableau de synthèse des réponses au questionnaire parental

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