• Aucun résultat trouvé

L engagement pousse là où on le sème

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "L engagement pousse là où on le sème"

Copied!
21
0
0

Texte intégral

(1)

L’engagement pousse là où on le sème

écosociété

Le Carré Casgrain, de jardin ouvert à collectif citoyen

Françoise Montambeault, Laurence Bherer et Geneviève Cloutier

Illustrations d’Emanuelle Dufour

(2)

Au printemps 2017, des résident.e.s de Rosemont–La Petite-Patrie, à Montréal, décident de se réapproprier le terrain vague situé à l’extrémité de leur ruelle verte pour en faire un jardin en permaculture et un espace de rencontre. Partage des savoir-faire horticoles, fabrication d’accessoires en matériel recyclé, organisation d’événements socioculturels, gestion des relations avec le voisinage... Au fil du temps, le Carré Casgrain devient une véritable communauté ! Pour les membres du collectif, c’est aussi l’occasion d’expérimenter un fonctionnement horizontal, centré sur l’autonomie et la collaboration. Ils en viennent même à jouer – sans l’avoir cherché ! – le rôle de représentant.e.s du quartier auprès des institutions locales, notamment dans le dossier du garage de la Société de transport de Montréal, rue Bellechasse.

Trois chercheuses en sciences sociales retracent l’aventure du Carré Casgrain et la trajectoire de ses membres, à travers les témoignages d’Hélène, Alex, Hélia, Claude, Camille, Adeline, Charlotte et des deux Fabien. Elles réfléchissent aux motivations qui poussent des citoyen.ne.s à s’investir dans des projets de verdissement et aux nouvelles formes d’engagement politique qu’ils suscitent. Magnifiquement illustrée par Emanuelle Dufour, cette histoire empreinte de convivialité pourrait bien inspirer d’autres initiatives citoyennes !

Françoise Montambeault, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en Participation et Citoyenneté(s), et Laurence Bherer sont professeures en science politique à l’Université de Montréal. Geneviève Cloutier est professeure en aménagement du territoire et développement régional à l’Université Laval. Toutes trois s’intéressent à l’engagement politique, à la participation citoyenne et à la démocratie locale.

(3)

l'engagement pousse là où on le sème

(4)

Coordination éditoriale : Barbara Caretta-Debays Soutien à l’édition : Alexandre Landry

Illustrations : © Emanuelle Dufour, 2021

Maquette de la couverture, typographie et mise en page : Kevin Cordeau Coloration de l'illustration de couverture : Pauline Stive

© Les Éditions Écosociété, 2021 ISBN 978-2-89719-729-2 Dépôt légal : 3e trimestre

Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Ce livre est disponible en format numérique.

Les Éditions Écosociété reconnaissent l’appui financier du gouvernement du Canada et remercient la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC) et le Conseil des arts du Canada de leur soutien.

Gouvernement du Québec – Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres – Gestion SODEC.

(5)

L'engagement pousse là où

on le sème

écosociété

Françoise Montambeault, Laurence Bherer et Geneviève Cloutier

Illustrations d'Emanuelle Dufour

Le Carré Casgrain, de jardin

ouvert à collectif citoyen

(6)

Table des matières

Préface – Un livre qui sème des graines ... 7 Avant-propos – Notre projet collectif ... 11 Introduction – Le Carré Casgrain, une histoire

d’engagement citoyen ... 17

Première partie. Bricoler son espace, inventer du collectif

1. Expérimenter le jardinage, bricoler l’espace ...31 2. Fonctionner de manière organique…

mais s’organiser quand même un peu ... 53 3. Se bricoler un espace à soi… ou s’investir

dans un projet politique ? ... 73

Deuxième partie. Une fenêtre sur le quartier

4. À la rencontre de la communauté et du quartier ... 91

5. Du Carré au quartier : un îlot de verdure connecté ... 113

(7)

6. Mobiliser, représenter : devenir un interlocuteur

du quartier… sans l’avoir cherché ... 121

Troisième partie. Dans l'éphémère, penser la pérennité

7. Jongler avec le statut de squat ...147

8. Composer avec le contexte institutionnel : entre légitimité et reconnaissance ... 161

9. Quand les institutions s’intéressent à l’espace privé : l’effet de la réserve foncière ...177

10. S’engager autrement ?... 187

Conclusion – Faire vivre le Carré, au-delà du jardin ...195

Références et ressources ...209

Notes ...215

(8)
(9)

7

Préface

Un livre qui sème des graines

« Si j’avais su qu’en plantant des carottes, ça mènerait à ce qu’on écrive un livre sur moi ! » s’exclame Claude en riant, après avoir pris connais- sance du manuscrit. Depuis le temps, il devrait pourtant savoir que l’aventure du Carré Casgrain, cette modeste parcelle de terre du quar- tier La Petite-Patrie, à Montréal, est imprévisible et qu’elle mène tou- jours plus loin que ce que l’on avait imaginé au départ. Surprises et rebondissements sont au menu, pas seulement des carottes ! Quatre ans après le démarrage du projet, qui a eu lieu en 2017, la capacité de s’émerveiller de cette expérience reste intacte.

Plus posé, Alex ajoute avec justesse : « Le livre vient sceller le col- lectif, comme une prolongation du jardin. » C’est ça, la gang du Carré Casgrain : des personnalités différentes mais complémentaires, du

« je » et du « nous », dans un aller-retour naturel et constant. Tels ces jardins de permaculture où fleurs et fines herbes se mêlent aux fruits et légumes en un joyeux fouillis qui les rend à la fois plus productifs et plus résilients face aux ravageurs et aux maladies.

(10)

8

Le présent livre le démontre. Françoise, Geneviève, Laurence et Emanuelle, outillées de leurs connaissances de chercheuses universi- taires, tracent le portrait du Carré Casgrain avec sensibilité et acuité : celui du collectif qui a nettoyé ce terrain vague situé au coin de la rue Bellechasse et de l’avenue Casgrain, qui l’a entretenu, occupé, animé durant trois saisons complètes, soit de 2017 à 2019. Non seulement nous nous sommes reconnus dans l’expérience qu’elles décrivent, nous y avons aussi trouvé le fil directeur que nous pressentions, mais sans arriver à le nommer, sans doute parce que nous avions les mains dans la terre : l’expérimentation du politique. Il fallait leur regard extérieur pour la percevoir et la décrire.

Ne nous y trompons pas : le Carré Casgrain est le personnage principal du livre. D’ailleurs, même s’il est retourné à l’état de terrain vacant, il vit encore dans l’imaginaire des résidents du quartier, et bien au-delà. « Le Carré n’est pas mort. Les légumes nous hantent encore », annonçait le feuillet de l’Halloween en 2019. Le lien social, le plaisir de jardiner, d’agir et d’expérimenter ensemble, d’écouter de la musique, d’accueillir les passants, ainsi que tous les appuis que nous avons obtenus ont fait partie de nos récoltes autant que les tomates à profusion, les laitues précoces et autres topinambours envahissants.

Sans parler de la bardane !

Mais tout n’est pas rose – les couleurs proposées par Camille pour les fanions décorant le terrain étaient d’ailleurs le vert, le blanc et l’orange – et les mots des autrices ne l’occultent pas : il y a eu des déconvenues, de rares tensions internes, mais surtout des défis avec le reste de l’écosystème du quartier. Hélia et Hélène, présentes lorsque la pelle mécanique a débarqué à l’automne 2019, en savent quelque chose. Cela fait partie du récit.

(11)

L’expérience du Carré Casgrain reste avant tout celle de la réuti- lisation d’un terrain vacant bien situé, mais sale, laid, dangereux et désolant pour le voisinage. Un terrain comme il en existe tant d’autres à Montréal et ailleurs. Son histoire s’inscrit dans la lignée de précé- dentes initiatives du même genre. Il apporte sa motte de terre à un édifice qui, nous l’espérons, ira en s’agrandissant : il y a tant à faire en matière de réutilisation des terrains vagues, de jardinage collectif, d’agriculture urbaine et de réappropriation citoyenne des milieux de vie. Évidemment, chaque lieu, chaque collectif, chaque expérience, chaque biotope est unique. Nous ne prétendons pas être un modèle.

L’idée est de s’inspirer les uns les autres. Nous espérons que ce livre y contribuera. Qu’il serve de compost et qu’il sème des graines.

Le collectif du Carré Casgrain souhaite remercier sincèrement Françoise, Geneviève, Laurence et Emanuelle pour leur travail, leur envie d’outiller les citoyens par cet ouvrage ainsi que pour la discré- tion, l’écoute et le respect dont elles ont fait preuve tout au long de leur travail de recherche. Nous leur sommes infiniment reconnais- sants. Nous remercions également les deux Fabien et toutes les per- sonnes – des centaines – qui sont passées au Carré et ont participé de près ou de loin à l'aventure, ainsi que ceux qui l’ont soutenue d’une façon ou d’une autre.

Merci aussi à tous ceux qui cultivent la ville, au sens propre comme au sens figuré. Qu’elle soit vivante, inclusive et nourricière !

Le collectif du Carré Casgrain Avril 2021*

* À l’heure où sont écrites ces lignes, l’Arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie négocie le rachat de la parcelle auprès du propriétaire dans l’objectif d’en confier la gestion aux citoyens et aux citoyennes. À bientôt sur le Carré Casgrain !

(12)
(13)

11

Avant-propos

Notre projet collectif

Un livre est presque toujours le résultat d’une aventure collective à laquelle ont participé plusieurs personnes qui, à leur manière, ont donné une couleur au propos, un sens au projet. C’est notre cas : cet ouvrage est le reflet de discussions, d’échanges et d’apprentissages réalisés auprès de la magnifique communauté du Carré Casgrain. Ce sont les voix et les récits de ses membres que nous avons voulu mettre en lumière dans cet ouvrage. Mais ce livre est aussi le fruit de colla- borations et de réflexions menées dans le contexte de nos recherches universitaires, lesquelles ont nourri notre démarche et notre regard sur le jardin et son collectif, sur l’engagement et ses transformations, et sur les formes de participation politique.

Cet ouvrage est né dans le cadre d’une recherche interuniversitaire sur la participation informelle réunissant cinq chercheuses : Françoise Montambeault (science politique, Université de Montréal), Laurence Bherer (science politique, Université de Montréal), Geneviève Cloutier (aménagement du territoire, Université Laval), Pascale Dufour (science politique, Université de Montréal) et Stéphanie Gaudet (sociologie,

(14)

12

Université d’Ottawa). Ce projet est mené depuis 2016 en partenariat avec le Centre d’écologie urbaine de Montréal, Communagir et l’Insti- tut du Nouveau Monde, trois organisations dont le point commun est de valoriser et de soutenir la participation des citoyens et le dévelop- pement de l’agir collectif. La recherche s’intéresse à la participation informelle, un concept qui désigne l’action de citoyens qui décident d’agir politiquement, mais seuls ou en très petits collectifs, loin des groupes organisés ou des institutions. À l’époque, nos partenaires nous ont interpelées sur une réalité qui leur semblait grandissante dans leurs pratiques, soit le fait qu’une portion non négligeable de citoyens semblaient valoriser des engagements politiques ponctuels, hors de tout cadre. C’est le cas par exemple de certaines personnes engagées dans les mouvements de simplicité volontaire, du locavo- risme (« manger local »), de guerilla gardening (guérilla jardinière) ou de slow food (restauration lente). La question était intrigante et avait des répercussions autant analytiques (jusqu’où étendre la notion de participation politique ?) qu’empiriques (comment mobiliser ces citoyens actifs ?). L’équipe de recherche voulait mieux comprendre les raisons qui poussent des citoyens à choisir ce type d’engagement et voir quels étaient les liens possibles avec les formes de participation politique plus conventionnelles.

Pendant trois ans, l’équipe a suivi des citoyens engagés dans deux types de pratiques, sur deux terrains (Montréal et Québec) : le dump­

ster diving (ou glanage urbain, pratique par laquelle les gens récu- pèrent les invendus que les commerces jettent) et le verdissement des espaces publics. Notre enquête s’est appuyée sur une démarche ethno- graphique qui vise à faire de l’observation au plus près des pratiques étudiées. Nous avons ainsi analysé les interactions au sein des groupes

(15)

13

virtuels de dumpster diving et de verdissement sur les médias sociaux, fait de l’observation directe des pratiques et des événements en lien avec celles-ci et réalisé une soixantaine d’entretiens semi-dirigés, principalement avec des citoyens, mais aussi avec des représentants d’organisations et des élus qui encouragent ces pratiques. L’aventure de cette recherche s’est avérée passionnante car ces citoyens, bien que très actifs, sont peu visibles dans la sphère publique. Ils sont dans l’ac- tion : ils s’engagent en faisant directement quelque chose, sans pour autant prendre parole sur un enjeu public particulier et sans coor- donner leurs actions avec celles d’autres acteurs du milieu. Ce sont à ces citoyens, à ces personnes discrètes mais résolument engagées que nous avons eu envie de donner une voix.

C’est Françoise qui a d’abord eu l’initiative de ce livre. Plus enga- gée dans le volet verdissement de l’enquête, elle avait eu l’occasion de réaliser une première série d’entretiens avec quelques membres du Carré Casgrain à l’été 2018. Dès ses premiers échanges avec Hélène, Fabien, Alex et les autres, Françoise a constaté que l’histoire du Carré Casgrain était révélatrice de logiques présentes dans plusieurs des projets de verdissement étudiés et, plus largement, des enjeux liés à la construction d’un collectif citoyen. Y voyant un récit citoyen capti- vant, elle a proposé à Geneviève et à Laurence de retracer l’évolution du Carré Casgrain. Geneviève, qui suivait jusque-là les projets de ver- dissement à Québec, a accepté avec plaisir. Laurence, à titre de direc- trice du projet de recherche, est venue prêter main-forte à Françoise et Geneviève dans la poursuite de l’enquête. Il fallait en effet suivre la gang du Carré pendant les préparatifs de planification du jardin au printemps et lors des activités de la saison estivale. Une deuxième série d’entretiens était aussi nécessaire, en prenant soin cette fois-ci

(16)

14

d’interviewer l’ensemble des membres du Carré et d’approfondir cer- tains éléments abordés en 2018, au gré des transformations du collec- tif. Ces rencontres ont été réalisées à la fin de l’été 2019. Nous avons d’ailleurs intégré à l’ouvrage de larges portions de ces entrevues car nous voulions mettre la parole de ces citoyens au cœur du récit que nous allions raconter.

Les membres du Carré Casgrain ont été des partenaires et collabo- rateurs précieux tout au long de l’aventure. Au début du printemps 2019, nous avons profité d’une corvée de ruelle organisée par le collectif pour réunir tous ses membres dans le salon de Claude. Il s’agissait de leur présenter le projet afin de savoir s’ils acceptaient d’y participer. Cela nous a aussi permis de prendre connaissance de leurs échanges sur la messagerie privée Slack, zone plus informelle d’inter- action à laquelle nous n’aurions pas eu accès autrement. Durant l’été et l’automne 2019, Françoise et Laurence ont assisté à plusieurs évé- nements (c'était plus difficile pour Geneviève qui réside à Québec).

C’est l’ensemble de ce matériel empirique qui a permis de mieux connaître les membres du collectif individuellement, de comprendre les dynamiques du groupe et de reconstituer le récit au cœur de ce livre.

Marie Lefebvre, doctorante en science politique à l’Université de Montréal, nous a appuyées en analysant une partie de cet imposant matériel afin de retracer la trame du Carré. Cette trame a ensuite été utilisée lors de la deuxième série d’entretiens de manière à vérifier que nous avions bien cerné la trajectoire du Carré. Cela a permis de creuser certains épisodes et de mieux comprendre les interactions au jardin et la vision de chacun des jardiniers.

(17)

15

Dès les premiers balbutiements du projet, nous avons eu l’idée d’ajouter des illustrations au livre, pour bien imager l’espace et pour que les lecteurs puissent se représenter la réalité des dynamiques au Carré Casgrain. Françoise a contacté l’illustratrice et chercheuse Emanuelle Dufour qui, de par sa formation, a une grande sensibi- lité pour mettre en images les terrains d’enquête. La sortie au prin- temps 2021 de son magnifique album « C’est le Québec qui est né dans mon pays ! » (aussi aux Éditions Écosociété) a confirmé notre choix.

Comme le travail d’illustration pour un récit ancré dans le réel se fait dans une constante collaboration, Françoise et Emanuelle ont échangé à plusieurs reprises pour trouver les dessins qui allaient le mieux servir le propos, aidées par les nombreuses photos fournies par les membres du Carré et celles que nous avions prises. L’idée de proposer une représentation de l’espace a d’ailleurs pris tout son sens avec la destruction du jardin en octobre 2019.

Le livre a donc été écrit à six mains. À l’aide de grands cartons et de Post­it, Françoise a d’abord fait ressortir de l’ensemble du matériel empirique la structure qui allait devenir récit du Carré Casgrain. Nous nous sommes ensuite partagé à parts égales la première version des trois parties du livre, en prévoyant plusieurs allers-retours entre nous à chaque étape de la rédaction. Chacune a repassé sur l’ensemble des sections, dans l’objectif d’arriver à un style unifié (et non de présenter l’addition ou la juxtaposition de nos trois subjectivités). Dans le dernier droit, nous avons eu la chance de pouvoir compter sur les précieuses relectures des membres du collectif du Carré et sur celle de notre attentive et rigoureuse éditrice chez Écosociété, Barbara Caretta- Debays, qui ont enrichi le manuscrit. Nos collègues Pascale Dufour, Stéphanie Gaudet, Francis Dupuis-Déri, Dan Furukawa Marques et

(18)

Frédéric Mérand ont tous, par leurs commentaires judicieux et le regard critique dont ils savent faire preuve, su nous poser les bonnes questions et contribuer à faire avancer notre réflexion. Évidemment, nous prenons toute la responsabilité des analyses contenues dans ce livre, lesquelles n’engagent ni nos partenaires, ni nos relecteurs.

Écrire à trois peut paraître lourd, mais ce processus s’est avéré créa- teur. Il s’est aussi révélé salvateur à plusieurs égards : la majeure partie du livre a été écrite au moment où débutait la pandémie et pendant l’été qui a suivi. La rédaction de ce récit citoyen empreint de lumière a été un baume, une source de joie pendant une période floue, qui nous a permis d’interagir souvent. Nos rencontres virtuelles, depuis Montréal et Québec, ont été l’occasion d’avancer dans nos analyses, mais aussi de partager nos impressions sur ce contexte inédit. En cela, et à l’image du Carré Casgrain, ce projet de livre est non seulement le reflet de multiples contributions, mais aussi l’aboutissement de la construction d’un collectif de trois chercheuses intriguées par l’enga- gement politique sous toutes ses formes.

Introduction

Le Carré Casgrain, une histoire d’engagement citoyen

Par un samedi ensoleillé du mois d’octobre 2019, alors que les der- nières tomates d’un automne précoce s’apprêtent à rougir et que les citoyens-jardiniers se préparent à la fermeture hivernale du jardin après une saison estivale bien remplie, une ombre se dresse sur le Carré Casgrain : une pelle mécanique qui rase tout ce qui s’y trouve.

Le propriétaire du lot situé à l’angle de la rue de Bellechasse et de l’avenue Casgrain, dans l’arrondissement de Rosemont–La Petite- Patrie, à Montréal, avait jusque-là toléré l’existence du jardin sur son terrain, bien qu’il n’ait jamais permis une telle occupation par les citoyens-jardiniers. Or, en ce beau matin du 5 octobre, il a décidé qu’il reprenait possession de l’espace pourtant laissé à l’abandon pendant une dizaine d’années.

L’histoire du Carré Casgrain commence en fait près de trois ans plus tôt, au printemps 2017. Fabien C., résident du quartier, lorgne depuis quelques semaines ce terrain jonché de détritus et recouvert de hautes herbes en friche, témoins de son abandon depuis belle

(19)

17

Introduction

Le Carré Casgrain, une histoire d’engagement citoyen

Par un samedi ensoleillé du mois d’octobre 2019, alors que les der- nières tomates d’un automne précoce s’apprêtent à rougir et que les citoyens-jardiniers se préparent à la fermeture hivernale du jardin après une saison estivale bien remplie, une ombre se dresse sur le Carré Casgrain : une pelle mécanique qui rase tout ce qui s’y trouve.

Le propriétaire du lot situé à l’angle de la rue de Bellechasse et de l’avenue Casgrain, dans l’arrondissement de Rosemont–La Petite- Patrie, à Montréal, avait jusque-là toléré l’existence du jardin sur son terrain, bien qu’il n’ait jamais permis une telle occupation par les citoyens-jardiniers. Or, en ce beau matin du 5 octobre, il a décidé qu’il reprenait possession de l’espace pourtant laissé à l’abandon pendant une dizaine d’années.

L’histoire du Carré Casgrain commence en fait près de trois ans plus tôt, au printemps 2017. Fabien C., résident du quartier, lorgne depuis quelques semaines ce terrain jonché de détritus et recouvert de hautes herbes en friche, témoins de son abandon depuis belle

(20)

18

lurette par son propriétaire. Il s’agit pourtant d’un espace bien en vue dans un quartier très fréquenté, où circulent tous les jours des centaines de véhicules, de piétons, de cyclistes, et où la spéculation foncière bat son plein… À qui appartient ce terrain ? Pourquoi est-il si mal entretenu ?

Ces questions, d’autres citoyens du quartier se les posent aussi. Le comité de ruelle, créé en 2016 et appuyé par le programme des ruelles vertes de l’Arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie, s’est d’ail- leurs donné pour mission de nettoyer le terrain au printemps 2017.

Celui-ci jouxte la ruelle au sud et offre aux passants un paysage déso- lant, avec les débris de construction qu’on y trouve et les matelas sans doute infestés de punaises de lit. La corvée de nettoyage, organisée à l’initiative du comité de ruelle, permet la rencontre de citoyens qui, ensemble, réfléchissent aux usages possibles de cet espace aban- donné. L’idée d’exploiter ce lieu pour expérimenter les principes de la permaculture émerge.

Même si le lot constitue l’extension naturelle de la ruelle, le comité ne peut pas prendre l’initiative de s’y installer sans permission : c’est un terrain privé, et son appropriation serait l’équivalent d’une occu- pation illégale, d’un squat. Le comité de ruelle, officiellement reconnu par l’Arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie, ne peut donc pas agir au nom de la ruelle verte. Certains membres du comité sont d’ailleurs inquiets et ne s’associeront pas activement à l’initiative du Carré Casgrain. Mais d’autres, comme Hélène, s’intéressent aux pro- jets d’appropriation citoyenne et se reconnaissent dans la proposition de Fabien C. Et puis Claude connaît bien l’endroit, il a documenté ses (non-)usages depuis une dizaine d’années, à partir du moment où le triplex qui l’occupait a été démoli. Il sait que le propriétaire a laissé ce

(21)

214

MONTAMBEAULT, Françoise. The politics of local participatory demo­

cracy in Latin America : Institutions, actors and interactions, Stanford, Stanford University Press, 2015.

PARTICIPEDIA, plateforme de partage et de connaissances sur la partici- pation, <https ://participedia.net/>.

VAN DETH, Jan W. « A conceptual map of political participation », Acta Politica, vol. 49, no 3, 2014, p. 349-367.

Références

Documents relatifs

La licorne était la plus belle des créatures de la forêt. La licorne ressemblait à un magnifique petit cheval blanc. La licorne avait une barbe de chèvre et une jolie corne

Caroline Pham-Dinh (Psychiatre, Metz et CUESIM Nancy) Carine Zumstein (Médecin Généraliste, UNISIMES et DMG de Strasbourg) 11h - 12h. Le patient standardisé en pratique

Kay n’aurait su dire si elle était extrêmement belle ou franchement laide, et en vérité, cela n’avait pas la moindre importance.. Elle était incontestablement singulière, mais

Une fois de plus, les conclusions du Baromètre du cacao sont affligeantes : bien que l’industrie promette depuis des décennies d’améliorer, à travers des mesures volontaires,

Module 3 3 jours Pays de la Loire Bourse du travail Angers A qui s’adresse cette formation. Les membres des commissions exécutives de l’UD et des

Pourtant, nous étions bien des criminels, tous réputés pour être les plus dangereux des Terres Libres d’Alphasia, et nous étions les seuls bâtisseurs de cette gigantesque tour

[r]

Mais la situation actuelle change si rapidement que nous sommes souvent comme des enfants qui veulent profiter de tout et découvrent les consé- quences de leurs actes en