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Au-delà de la notion de technologie expédiente. Avant-propos

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Avant-propos

Laurence Astruc (UMR ArScAn - Préhistoire en Méditerranée orientale)

L'outil, d e c o n c e p tio n plus ou moins ingénieuse, est le prolonge m ent de la main de l'h o m m e e t constitue son m oyen privilégié d 'in te rv e n tio n sur son milieu. Certains d e ces instruments d e facture simple sont traditionnellem ent considérés par les archéologues com m e dépourvus d'in térêt propre. Ils estiment que les groupes humains qui les produisent e t les utilisent ne leur a cco rd a ie n t que peu de valeur sociale ou symbolique e t que ces objets n 'o n t a priori que peu d e rôle à jouer dans la diagnose chrono-culturelle.

L.R. Binford nous d o n n e la possibilité d e raisonner de fa ç o n plus ambitieuse sur ce mobilier dit simple en proposant la notion de « technolo gie expédiente » (Binford 1973, 1977, 1981). Élaborée pour qualifier certains c o m p o rte m e n ts techniqu es d e chasseurs-cueilleurs, c e tte notion a connu un large é c h o dans la littérature anglo-saxonne tra ita n t n o ta m m e n t du Paléolithique ou des traditions techniques d'A m é rique du Nord à travers les âges,

Le séminaire « A u-delà d e la notion d e technologie expédiente » a réuni des spécialistes du Néolithique européen qui inscrivent leur dém arche dans le courant de la Technologie. Ils p la ce n t les outils en pierre taillée ou en matières dures animales (os, bois d e cervidé, ivoire) au centre d e leur réflexion sur les structures économ iques e t sociales des groupes néolithiques e t leurs évolutions.

Q uelle p la c e les outillages simples ou expédients tiennent-ils dans leurs différents contextes d 'é tu d e ? Ces outillages sont-ils le reflet d e com portem ents techniques distincts ? Et dans ce cas : peut-on élaborer une sériation chronologique à l'a id e d e ces productions ? peuvent-elles révéler des faciès culturels régionaux? perm ettent-elles d e pe rce vo ir l'o rg a n isa tio n s o cio -é co n o m iq u e des groupes étudiés ?

1. Terminologie et grilles de lecture

La notion d e « te c h n o lo g ie e x p é d ie n te » : quelle définition ?

Certains considèren t e n c o re le term e d 'e x p é d ie n t co m m e jargonneux. La définition dressée par L.R. Binford est toutefois sans am biguité. Les expressions e x p e d ie n t or re a c tiv e tool m anufacture (Binford 1977, Kuhn 1995) désignent une

fabrication d'outils à l'a id e de matières premières présentes sur p la c e (on the spot), au m om ent où les besoins se fo n t sentir ( a d a p ta b ility ) selon des m éthodes simples, peu normatives, rapides (low

cost). Les outils vite produits sont aussi généralem ent

vite rejetés après utilisation.

On notera que si le term e d 'e x p é d ie n t au sens d e L.R, Binford tient c o m p te de critères de matières premières, d e fabrication et d e cycle d'utilisation, il ne préjuge pas du type d'activité(s) pour lequel l'o u tilla g e e xp é d ie n t est em ployé. Un outilla g e expédie nt pe u t to u t aussi bien être destiné à une tâ c h e spé cifiq u e ou à des tâ ch e s multiples et l'a ctivité réalisée peut elle-m êm e être plus ou moins com plexe ou spécialisée.

Quelques dérives dans l'em ploi du term e sont observées en Préhistoire. L'usage qui en a été fait a souvent été péjoratif rejoignant ainsi c e que l'on ente n d a it par expédient dans le langag e courant, en la n g u e française co m m e en la ngue anglaise : l'a d je c tif renvoie à quelque chose d e com m ode, de c o n ve n a b le , d 'o p p o rtu n , d'u tile tandis qu e le substantif pe u t être synonyme d e palliatif, c'est-à- dire, un rem ède à une situation à la fois provisoire et insuffisant (le Petit Robert 1993).

Ces dérives relèvent au moins partiellem ent des problèmes rencontrés pour identifier au sein des collections archéologiques les outillages que l'on p e u t qualifier d'expédients.

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S im ples o u e x p é d ie n ts : q uelles p ré c a u tio n s d ’em plois des term es ?

Il est fra p p a n t de constater qu'au sein du petit groupe d e néolithiciens que form ent les intervenants du séminaire, la notion d e technologie expédiente reste a b o rd é e en faisant appel à une term inologie co n tra sté e : les outils sont qualifiés d e simples, occasionnels, opportunistes, expédients, etc. Pour quelles raisons ?

La notion d e « technologie expédiente » est d 'a b o rd com plexe puisqu'elle prend en c o m p te non seulement c e qui co n ce rn e la fabrication d e l'outil mais aussi sa fonction. Les spécialistes qui travaillent sur les modes d e fabrication des outillages sans avoir a c c è s aux données sur l'orig in e des matières premières ou sur l'utilisation des outils ne peuvent q u 'ê tre mal à l'aise. L'expression « outillage simple », plus large, pe u t alors être préférée.

Nous nous heurtons ensuite à des questions d 'é c h e lle e t ce la surtout en c e qui concerne les m é th o d e s d e p ro d u ctio n . Une m êm e m é th o d e considérée co m m e simple ou peu norm ative dans un co ntexte donné p e u t apparaître plus com plexe dans un autre co ntexte où elle n'est associée q u 'à des m éthodes plus simples.

Le degré d e simplicité ou de com plexité des m éthodes d e production reste en outre difficile à évaluer. Les critères généralem ent évoqués pour c e tte évaluation sont qualitatifs. Ils se placent, par exem ple pour le lithique, au niveau de l'absence ou d e la présence d 'u n e séquence de mise en form e du b loc a v a n t d é b ita g e (pour les productions laminaires, par exemple, les diverses modalités d'ouverture de plan, d e disposition de lames à crête, de procédés d e cintrage du bloc). Des critères quantitatifs sont-ils é g a le m e n t souhaitables ? Peut-on établir une grille d 'é va lu a tio n transchronologique ?

Laissant peu à peu d e c ô té ces aspects m éthodologiques qui m éritent des développem ents plus approfondis, nous avons préféré répondre à la question suivante : la notion d 'e xp é d ie n t proposée par L.R. Binford pour le P aléolithique est-elle a d é q u a te lorsque l'on quitte les populations de chasseurs-cueilleurs et s'intéresse aux com m unautés agro-pastorales sédentaires du Néolithique ?

D e l ’e x p é d ie n t à l ’in vesti un c o n tin u u m in co n to u rn ab le a u N é olith iqu e ?

Lors d e leur réflexion sur la gestion des assemblages lithiques au Néolithique, D. Binder e t C. Perlés ( 1990)1 prennent eux aussi en c o m p te tous les éléments qui structurent l'outil : origine d e la m atière première, investissement techniqu e consenti lors de l'acquisition, choix du m ode d e production e t cycle d'utilisation. Mais, ils soulignent pour les industries lithiques de c e tte période deux aspects :

1 / ces industries lithiques néolithiques sont des assem blages e t sont ainsi com posées d 'u n e juxtaposition d e produits d 'o rig in e te ch n o lo g iq u e diverse : les matières premières provienne nt d e sources distinctes e t les m odes d e fabrication des outils sont variables (Binder 1998).

2/ deux com p o sa n te s opposées sont fréquem m ent présentes au sein d e ces assemblages, l'une expédiente et l'autre, investie. C ette distinction concerne d 'u n e part, en général, des éclats, réalisés sur m atériaux locaux, selon des m éthodes simples ; les supports sont vite produits, vite rejetés, e t d 'a u tre part, des productions laminaires e t lamellaires homogènes mais pas nécessairem ent standardisées, qui représentent un investissement fort par la recherche d e roches difficiles à acquérir e t/o u par le choix de m éthodes d e fabrication com plexes ; ces supports fo n t l'objet d e cycles d'utilisation longs puisqu'ils sont le plus souvent utilisés, ravivés e t recyclés (Binder et Perlèsl990). Ces productions laminaires e t lamellaires ont, pour certaines, fa it l'o b je t d e circulation sur plusieurs centaines de kilomètres.

Q u 'il s'agisse des industries lithiques du Danubien d e France e t d e Belgique (P. Allard, ce volum e), du Chasséen m éridional (V. Léa, c e volume), du Néolithique final cam p a n ifo rm e du sud- est d e la France (R. Furestier) ou e n co re du Néolithique final e t d e l'â g e du Bronze ancien dans l'a rc jurassien (M. Bailly, c e volume), c e tte bipolarité ne semble pas devoir être remise en cause. Les spécialistes d'industries osseuses du Néolithique final du Jura e t du N éolithique d e G rè c e du nord p articipant au séminaire s'inscrivent en cela dans la m êm e logique (Y. Maigrot, R. Christidou, c e volume). Opposer « simple » (plus général) à « investi » semble p o u rta n t p ré fé ra b le e t p e rm e t d e conserver à « expédient » son sens restreint.

' On rejoint d o n c ici la construction bipolaire proposée p ar les anglo-saxons « expedient te ch no lo g y » vs « cu ra te d te ch no lo g y » (Binford 1979. Shott 1996).

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Il a égalem en t été souligné qu'il existait un continuum entre ces deux pôles e t que la prise en c o m p te d e c e continuum peut seule nous perm ettre de décrire la diversité des situations archéologiques rencontrées et d'expliquer pourquoi, dans un site ou dans une région, un sous-système te c h n iq u e se transform e, d e simple à (plus) com plexe, ou inversement.

2. Outillages expédients e t com m unautés néolithiques

Les outillages simples ou e xp édien ts sont présents, parfois m assivem en t

En c e qui concerne les industries lithiques, il a p p a ra ît clairem ent que m êm e si les marqueurs chrono-culturels sont pour les contextes évoqués m ajoritairem ent des outillages lithiques investis, les productions simples voire expédientes sont présentes e t parfois massivement. Ces dernières sont peu étudiées ; elles servent au mieux d e contrepoin t aux premières.

Sont concernés ici les d é b ita g e s d'é clats, réalisés à la percussion dure ou g râ ce à un d é b ita g e sur enclume, selon des schémas d'e xploitation des blocs simples, qui visent à la production d e supports non-standardisés, d o n c peu normés, c e qui n'exclut pas la présence d 'u n e organisation du d é b ita g e et m êm e la recherche d 'u n m odule particulier de produits.

Les proportions peuvent varier soit d 'u n site à l'autre, au sein d 'u n m êm e horizon chrono-culturel (ex. Chasséen méridional, de 10 à 77%, Léa, ce volume), soit, dans le temps (ex. entre le Rubané e t le VSG-Blicquy, Allard, c e volum e ; entre Néolithique moyen e t Néolithique final-cam paniform e, Furestier, Bailly, c e volume). Dans la m ajorité d e ces contextes, les outillages simples ne constituent pas un outillage d 'a p p o in t.

Q uelqu es pistes d e réflexion

Nous sommes loin d e pouvoir expliquer pourquoi les productions simples se d é v e lo p p e n t dans un site plutôt qu'un autre ou dans une région, à un m om ent donné. Quelques pistes d e réflexion peuvent toutefois être proposées.

Le dévelo p p e m e n t d e ces débitages est lié à un approvisionnem ent des matières premières au sein d 'u n espace restreint, le plus souvent local, c e qui n 'e xclu t en rien, m êm e à c e tte é chelle locale, l'existence d 'u n e véritable économ ie des m atière premières. Il n'est pas le seul fa it d 'u n déterminisme des matériaux (de mauvaise qualité par leur nature — quartz —, leur texture — silex grossiers, chaille —, leur

d é fa u t — diaclases — ou leur m odule — galets de petites tailles — mais relèvent plutôt d 'u n choix distinct dans la stratégie d'acquisition en faveur d 'u n e production locale relativem ent autarcique, au plus proche de l'h a b ita t (« on the spot »). Ceci peut é ventue llem ent té m o ig n e r d 'u n e exploitation du territoire particulière e t d 'u n e évolution des relations entre com m unautés (Allard, Furestier, c e volume).

En A m érique du Nord, notam m ent, le d é v e lo p p e m e n t des p roduction s expédientes a souvent é té corrélé à un d é v e lo p p e m e n t des premiers villages perm anents et d e la sédentarité (Parry e t Kelly 1987). Dans certaines zones du Proche- Orient, les débitages d 'é cla ts semblent dom iner les productions laminaires investies à un m om ent où l'éco nom ie néolithique est pleinem ent établie e t où le schéma d 'im p la n ta tio n des sites semble se modifier (Nishiaki 2000) ; quelques premiers résultats nous p e rm e tte n t d 'a v a n c e r qu e c e c h a n g e m e n t technolo gique serait là moins le fruit d 'u n e mutation d e l'éco nom ie d e subsistance que d 'u n e mutation du c o n te x te social d e p roduction , d 'u n choix différent d'organisation des com m unautés e t de leurs intéractions (Astruc 2004).

Il est g é n é ra le m e n t adm is qu e l'u n e des caractéristiques majeures du N éolithique résidait dans l'e xiste nce d e systèmes d e p ro d u ctio n com plexes et d e réseaux d e circulation parfois à très longues distances (cf. par exem ple : les Cahiers du Thème transversal 3 d'ArScAn, I à III ; Guilaine 2002). Ces phénomènes plus directem ent perceptibles font l'o b je t d'é tudes incessantes. On remarque, pourtant, que les contextes où les productions simples voire expédientes sont très majoritaires ou seules présentes dans un sous-système techniqu e donné ne sont pas rares et q u 'u n e coexistence d e productions simples, ou expédientes e t d e productions com plexes est extrêm em ent révélatrice. Les premières tém oignent des activités intra-sites, réalisées au coeur de l'h a b ita t tandis q u e les secondes relèvent d 'u n e sphère extérieure, mobile, que l'on associe aux réseaux de circulation. Que ces dernières fassent l'o b je t de dons et d'échanges, qu'elles soient socialem ent valorisées ne fait que peu d e d oute ; il n'est toutefois pas exclu q u e les p roduction s simples fassent l'o b je t de stockage et d e redistribution au moins à l'échelle intra-com m unautaire et cela m êm e si elles se situent plutôt dans une im m édiateté qui exclut a priori toute a n tic ip a tio n . L'a rticu la tio n entre ces deux com posantes d é p e n d généralem ent de la stabilité résidentielle, du statut d e l'h a b ita t c'est-à-dire du type d'a ctivités qui y o n t lieu, et des circuits de mobilité plus ou moins pérennes qui se dévelop pent au sein du territoire ou du terroir.

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L'étude d e l'ensem ble des com posantes des industries lithiques reste une absolue nécessité. Q u 'a p p o rte une analyse détaillée des productions simples e t expédientes ?

Elle est incontournable lorsqu'il s'agit de définir le statut des sites, d e caractériser les activités qui y sont réalisées ; les produits exogènes ont, en effet, pu être utilisés à to u t point du parcours (Gassin 1999 ; Astruc, Léa sous presse).

Elles perm ettent d e s'interroger sur l'existence d e traditions techniques dans le c a d re de telle ou telle activité de « consom m ation de tranchants » (Bailly, c e volume).

Elle participe à la réflexion conduite sur les savoir-faire des groupes e t le degré de spécialisation des tâches lors des activités d e production des outils e t d'utilisation d e ceux-ci (activités domestiques vs. activités spécialisées (Binder e t Perlés 1990, Perlés 2001);

Elle perm et d e s'interroger sur la p la ce d 'u n site dans un réseau d e circulation d e m atériau e t de produits investis (par exemple, les lames e t lamelles en silex béd o u lie n pour le N éolithique m oyen m éridonal ou les « grandes lames » en silex du Grand- Pressigny ou en silex oligocène au Néolithique final, Léa, Furestier, Bailly c e volume).

En c e qui co n ce rn e les industries osseuses, les informations recueillies ont essentiellement trait à l'éch elle locale, du site à son territoire d'exploitation. D, Stordeur estim ait e n co re ré ce m m e n t que « l'industrie osseuse est un excellent m arqueur culturel à p e tite échelle. Elle enregistre des m icro­ changem ents à l'intérieur d 'u n e société, elle donne une im age fidèle des temps d e créativité e t des temps d'énertie. En revanche, elle perd beau co u p de son utilité q uand on travaille sur des vastes zones ou d e longues périodes a v e c quelques exceptions. Des objets d e c o n c e p tio n com plexes, certaines techniques originales constituent en e ffe t d e bons repères pour jalonner des circuits d e diffusion ou identifier des aires culturelles » (Stordeur 2003 : 361). Des recherches sur d'éventuels transferts techniques entre le Proche-Orient et Chypre ou encore entre le Proche-Orient e t le m onde balkanique, par exemple, fo n t souvent références à des modes d e fabrication plus ou moins simples ou com plexes (Stordeur 1984, 2003 ; Sidéra 1998). Simple ou expédient, com plexe ou investi, il nous est apparu, au cours du séminaire, q u e ces notions p e u v e n t d ifficile m e n t être envisagées sans une é tu d e a pprofon die de l'origine zoo lo g iq u e e t a n a to m iq u e des m atières dures

anim ales e t sans une réflexion sur les pratiques d 'é le v a g e et d e chasse, sur l'a b a tta g e , la boucherie ou encore sur les récupérations d e m atériaux dans les zones d e rejets.

Plus spécifiquement, les industries osseuses du Néolithique d e G rèce du nord, souvent simples et hétéroclites, nous conduisent à nous interroger sur nos fa cu lté s d e reconnaissance des outils e t d'in terprétation d e ceux-ci (Christidou, c e volume). L'identification d'outils réponda nt à des normes de p ro d u c tio n e t ce lle d 'o utils d 'a p p o in t o n t é té possibles, Ces industries de production simples mais différenciées indiquent une variété im portante de c o m p o rte m e n ts techniqu es q u e le te rm e d 'e x p é d ie n t selon l'em ploi que l'on en fait, trop globalisant ou trop restrictif, ne pe u t caractériser.

Une articulation entre outils simples e t peu normés, d 'u n e part, e t outils sophistiqués, d 'a u tre part, est perce p tib le au Néolithique final à Chalain (Maigrot, c e volume). C om m e pour le silex taillé (Beugnier 1997), les premiers seraient utilisés dans la sphère dom estique tandis que les seconds, destinés à l'exploitation du milieu naturel, participeraient d 'u n e sphère publique.

Conclusion

À l'issue des discussions, nous avons considéré que c e tte notion d e technologie expédiente éta it fort utile lorsqu'on l'en tend dans son sens restreint, sens proposé par L.R. Binford. Elle ne sert alors à qualifier q u 'u n e partie des productions simples. Ce sont ces dernières, e t non les p roduction s expédientes, qu e l'on p e u t opposer aux productions com plexes ou investies.

Il est, to u t d 'a b o rd , indispensable, e t les intervenants l'o n t bien montré, pour rendre c o m p te précisém ent du statut des sites e t habitats, des traditions des groupes néolithiques e t d e leurs interactions, d'analyser plus finem ent les outillages simples ou expédients. Plus différenciés, plus organisés qu'il n'y p a ra ît ces outillages ont un intérêt propre puisqu'ils nous entraînent au coeur des pratiques techniques e t des modes d e vie des groupes.

S'interroger sur les conditions d 'a p p a ritio n et d e d é v e lo p p e m e n t massif d 'o u tilla g e s qui représentent une simplification m arquée des gestes techniqu es d e m a n d e ensuite une connaissance toujours plus aiguè des contextes d e production et d'utilisation d e ces outils. Il s'ag it là d'ailleurs d e notre seul recours pour com prendre de tels phénomènes. Plusieurs pistes d 'in te rp ré ta tio n p e u v e n t être

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proposées. C ette simplification correspond-elle à un m o m e n t particulier d 'u n c y c le d 'in n o v a tio n technique, d 'u n e certaine optimisation à un déclin certain ? Serait-elle le signe d 'u n processus historique, d 'é ta p e s particulières au sein du Néolithique ? Dans quelle mesure peut-elle être interprétée en termes de déterminisme é conom iqu e ou d e mutations dans l'organisation territoriale e t sociale des groupes ? Doit-on y déceler, enfin, le signe d e nouveaux choix, emprunts ou transferts culturels, d 'u n e évolution des com plém entarités s'exerçant nécessairement entre outillages ou encore d 'u n ch a n g e m e n t dans les m odes d e représentation sym bolique qui y sont associés ? Nous com m ençons to u t juste à em prunter ces voies qui nous conduirons très vraisem blablem ent à des résultats d 'u n e p o rté e a n th ro p o lo g iq u e nouvelle.

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Remerciements

Je voudrais ici remercier les responsables du thèm e transversal 3 d'ArScAn, Sophie Méry, Aline Averbouh, Claudine Karlin et Hélène Guiot pour leur accu e il et, en particulier, Claudine qui m'a très tô t enco u ra g é e à organiser c e tte réunion. Je remercie égalem en t les intervenants — Pierre Allard, Vanessa Léa, M axence Bailly, Robin Furestier, Yolaine Maigrot e t Rosalia Christidou — qui ont a c c e p té d e participer à c e tte journée et Catherine Perlés qui y a assisté et a contribué aux débats.

Merci, enfin, à Xavier Faivre pour son aide précieuse lors d e la préparation d e la publication ainsi q u 'à Virginie Lanièpce, Jérôme Louvet et Edgar Vidal pour leurs conseils.

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