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Incorporation du magnésium dans les squelettes calcitiques des échinodermes et des éponges hypercalcifiées

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Academic year: 2021

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Incorporation du magnésium dans les squelettes calcitiques des échinodermes et des éponges hypercalcifiées

Julie HERMANS

Thèse présentée en vue de l'obtention du titre de Docteur en Sciences

UNIVERSITÉ LIBRE DE BRUXELLES (ULB) Faculté des Sciences

Département de Biologie des Organismes Laboratoire de Biologie marine

INSTITUT ROYAL DES SCIENCES NATURELLES DE BELGIQUE (IRSNB) Département des Invertébrés

Promoteurs de thèse

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UNIVERSITÉ LIBRE DE BRUXELLES (ULB) UNIVERSITÉ D’EUROPE

Faculté des Sciences

Département de Biologie des Organismes Laboratoire de Biologie marine

INSTITUT ROYAL DES SCIENCES NATURELLES DE BELGIQUE (IRSNB) Département des Invertébrés

Incorporation du magnésium dans les squelettes calcitiques des échinodermes et des éponges hypercalcifiées

Julie HERMANS

Thèse présentée en vue de l'obtention du titre de Docteur en Sciences

Promoteurs de thèse Dr Philippe Dubois (ULB) Dr Philippe Willenz (IRSNB) Comité de lecture

Dr Christiane Lancelot (ULB) Dr Guy Josens (ULB)

Dr Frank Dehairs (ULB-VUB)

Dr Bruno David (Université de Bourgogne, France)

Dr Luc André (Musée Royal de l’Afrique Centrale-ULB) JUILLET 2010

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Remerciements

J’aimerais tout d’abord remercier le Pr Jackie Van Goethem de m’avoir accueillie au sein de son département de l’Institut royal des sciences naturelles de Belgique et de m’avoir soutenue dans l’obtention du contrat sans lequel cette thèse n’aurait pas été possible. Je lui suis reconnaissante, ainsi qu’à son successeur à la tête du département, le Pr Thierry Backeljau, pour la confiance qu’ils m’ont témoignée.

Je remercie vivement le Pr Michel Jangoux qui, par deux fois, m’a ouvert les portes de son laboratoire de Biologie marine à l’ULB. Je crois pouvoir dire que je m’y sens actuellement comme un poisson dans l’eau.

Mes remerciements les plus sincères vont à mon promoteur Philippe Dubois. Merci d’avoir été la personne sur laquelle j’ai toujours pu compter durant ces années de thèse.

Merci pour ton investissement de tous les jours, ton soutien et ton optimisme. Ta passion de la recherche et tes encouragements dans les jours difficiles ont été une pièce maîtresse de l’aboutissement de cette thèse. Merci aussi pour ta patience face à mes difficultés récurrentes avec les statistiques et les colles de chimie ;-). Enfin, merci pour ton humour et ton côté humain. Saches que ce fut un réel plaisir de travailler avec toi.

Je remercie aussi mon co-promoteur Philippe Willenz. Tu m’auras enseigné la rigueur et le sens du détail. J’aurai beaucoup appris sur les relations humaines en travaillant à tes côtés. Je n’oublierai pas les bons moments passés en mission, de Marseille à Rhodes, ni ton humour qui aura souvent détendu l’atmosphère.

Je tiens à remercier l’équipe du service de Minéralogie et Pétrographie du Musée Royal de l’Afrique Centrale, qui m’a fait un excellent accueil tout au long de cette thèse.

J’exprime toute ma reconnaissance au Pr Luc André pour ses précieux conseils et pour nous avoir toujours ouvert les portes de son laboratoire. Un merci tout particulier à Laurence Monin et Nourdine Dakhani pour leur aide lors des (nombreuses) analyses d’ICP-AES de cette thèse et pour leur sympathie. Je suis reconnaissante à Jacques Navez pour les analyses en HR-ICP-MS et pour son aide dans le traitement des résultats. Merci à Frédéric Planchon pour les discussions riches en magnésium que nous avons eues… tout simplement fortifiantes !

Je remercie aussi toute l’équipe de la VUB, que j’ai eu l’occasion de côtoyer dans le cadre du projet CALMARS, notamment les Pr Frank Dehairs et Eddy Keppens, ainsi que Rémy Mas, Michael Korntheuer et Emilie Chevalier pour leurs explications sur les analyses IRMS.

Je tiens à remercier le Pr Jean Vacelet. Nos échanges d’idées au cours de la rédaction de l’article sur la croissance de P. massiliana ont été extrêmement intéressants.

Je remercie le Pr Yannicke Dauphin pour sa collaboration pour les analyses XANES, réalisées au synchrotron de Grenoble.

Un tout grand merci au Pr Philippe Compère pour ses conseils sur les extractions de matrices organiques et le prêt à long terme de son dispositif d’extraction de protéines.

Je remercie le Pr Alain Bernard pour les analyses XRD qu’il a effectuées à ma demande.

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Je tiens à remercier Jean et Véro du club de plongée « Au-delà plongée » pour le bon accueil que notre équipe y a toujours reçu. Merci aussi à André de « Waterhoppers » pour son aide lors des plongées à Rhodes.

Merci à Helmut Zibrowius de m’avoir aidé à localiser les grottes à Petrobiona de l’île de Rhodes. Sa précision et son excellente mémoire nous ont été d’un précieux secours.

Un tout grand merci à toute la joyeuse équipe du laboratoire. Merci à Chantal, Viviane, David, ainsi que Edith et Saloua, toujours hyper efficaces pour les commandes d’urgence d’un produit. Merci aussi à Thierry Dupont pour ses conseils d’aquariophile sans lesquels je n’aurai pu monter mon propre Nausicaa et pour son aide dans cette entreprise, ainsi que pour les 1001 petites réparations de sauvetage qu’il a faites. Enormes mercis à Ana (« Lunch time ! ») pour sa bonne humeur de tous les jours et ses qualités de chercheuse bibliographique invétérée, Claire (« Patriiiiiiiick the starfish !!! ») pour sa sympathie et ses conseils toujours avisés, Colin (« moi j’aime pas… ») pour un intérim de plongeur quand j’en ai eu besoin et une mission express rondement menée à Marseille, Mathieu pour son aide et sa sympathie, Gauthier pour ses conversations sans fin et ses petits rappels de bio toujours très didactiques, et Bruno pour sa bonne humeur lors de ses incursions dans notre bureau. Merci aussi à la ribambelle de mémorants qui se sont succédé pour mettre un peu d’ambiance dans ce grand laboratoire (« Faites votre vaisselle! »).

Je tiens à adresser un merci tout spécial à mes compagnes de bureau successives, Catherine Borremans et Stéphanie Bonnet. Votre présence et nos longues conversations (parfois intellectuelles !) ont contribué à faire de cette thèse un bon souvenir dans ma mémoire… Je n’oublie pas non plus le palmier gonflable qui a orné notre bureau pendant toutes ces années, égaillant la pièce de ses couleurs vives.

Un tendre merci à Philippe Pernet pour son aide précieuse et toujours efficace, que ce soit au cours des missions, pour les analyses AAS, les interminables séances de découpage de piquants, les régénérations de résines, et j’en passe. Merci pour ta présence, ta disponibilité et ton oreille attentive. Merci du fond du cœur pour ton soutien sans faille lors de la stressante période des derniers mois de thèse. Une chose est sûre, tu m’es devenu indispensable.

Je remercie aussi la petite équipe de l’institut : Melany pour sa sympathie et Laetitia pour son aide toujours souriante... Un tout grand merci à Yves Barette, pour son aide rapide et efficace face aux problèmes de PC et un sauvetage de disque dur que je n’ai pas oublié.

Merci aussi à Pol Gosselin sur lequel, comme à son habitude, j’ai toujours pu compter pour un conseil sur les préférences alimentaires des oursins ou une mission express à Luc- sur-Mer.

Merci aussi à tous les membres du laboratoire de biologie marine de Mons, qui m’ont toujours fait bon accueil, avec une spéciale dédicace à Fifi, Elise et Aline. Merci aussi à Paul Postiau pour sa gentillesse et sa disponibilité.

Merci à la mafia bibliographique portugaise (Johana, Elizabete, Màrio) pour les nombreux pdf que j’ai pu obtenir grâce à leur complicité.

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Ce travail a été rendu possible par la collaboration de l’Institut des Sciences naturelles et du laboratoire de biologie marine de l’Université Libre de Bruxelles. Il a pu être réalisé grâce à l’appui financier d’un programme « Action 2 » financé par la Politique Scientifique fédérale belge, et à celui de la Fondation David et Alice Van Buuren.

Enfin, je remercie ma famille et tous mes amis, qui m’ont toujours soutenue et sans lesquels je n’aurai pu devenir celle que je suis aujourd’hui. Vous êtes dans mon cœur et y resterez, quelle que soit la distance.

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RÉSUMÉ

De nombreux organismes marins précipitent des squelettes en calcite magnésienne.

Depuis près d’un siècle, il est connu que les concentrations en magnésium de ces squelettes sont influencées par les conditions environnementales, telle la température, régnant au moment de leur dépôt. Dans le contexte actuel de changement climatique, cette propriété a promu l’usage de plusieurs taxons en tant qu’archive naturelle des conditions environnementales du passé. Cependant, les squelettes d’espèces sympatriques, voire d’individus de la même espèce, peuvent présenter des concentrations en magnésium très différentes, attestant de l’influence de facteurs biologiques sur la détermination de la concentration squelettique en cet élément. Une parfaite compréhension des mécanismes d’incorporation du magnésium dans les squelettes est donc requise pour valider l’usage de ce paléotraceur. De plus, la solubilité des calcites augmentant avec leur concentration en magnésium, l’incorporation de cet élément conditionne en partie la stabilité des squelettes calcitiques dans un océan en cours d’acidification.

Le présent travail contribue à l’étude des différents facteurs, tant environnementaux que physiologiques et minéralogiques, susceptibles d’affecter l’incorporation du magnésium dans les squelettes en calcite de trois taxons présentant des concentrations en cet élément particulièrement élevées, une éponge hypercalcifiée, Petrobiona massiliana, et deux échinodermes, Paracentrotus lividus et Asterias rubens.

Dans une première partie, les effets de plusieurs facteurs environnementaux ont été étudiés, en milieu naturel dans le cas de l’éponge, étant donné son incapacité à survivre en aquarium, et en conditions contrôlées d’aquarium dans le cas des deux échinodermes.

Une influence environnementale prépondérante de la température sur la concentration en magnésium squelettique a été mise en évidence dans les 3 modèles biologiques étudiés.

Une fois les facteurs génétiques (espèce) et structurels (élément squelettique) fixés, une relation positive liant la température à la concentration en magnésium squelettique a été caractérisée en milieu naturel chez l’éponge hypercalcifiée P. massiliana et en conditions contrôlées chez l’oursin P. lividus. Chez ce dernier, cette relation, non linéaire, se stabilise aux plus hautes températures envisagées, probablement suite à la saturation d’un processus biologique intervenant dans l’incorporation de cet élément. La salinité, un autre facteur environnemental majeur en milieu marin, influence elle aussi positivement la concentration en magnésium dans le squelette de l’étoile de mer A. rubens. A nouveau, il est proposé que cette influence de l’environnement soit modulée par un processus biologique: chez les échinodermes, la concentration en magnésium, contrairement à celle du calcium, n’est pas régulée dans le liquide coelomique. Elle est donc directement influencée par la salinité, et affecte probablement la concentration en cet élément dans le squelette formé. La diffusion depuis l’eau de mer jusqu’au site de calcification par l’intermédiaire des fluides internes a en effet été suggérée sur base du fait que le rapport Mg/Ca de l’eau de mer influence celui des squelettes calcaires

Une fois l’influence, directe ou indirecte, des facteurs environnementaux exclue, 44% de la variabilité du rapport Mg/Ca du squelette des échinodermes restent à expliquer. Les expériences de croissance d’échinodermes réalisées en conditions contrôlées indiquent que ce rapport est indépendant de la vitesse de croissance dans ce groupe, contrairement aux hypothèses émises dans la littérature.

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Dans la seconde partie, la modulation des facteurs minéralogiques par les facteurs biologiques a été investiguée. Pour ce faire, d’une part, les interactions entre rapport Mg/Ca en solution et matrice organique de minéralisation ont été étudiées dans un modèle in vitro. D’autre part, les relations entre soufre et magnésium dans le squelette ont été décryptées.

Le rapport Mg/Ca de la solution de précipitation a une influence prépondérante sur la concentration en magnésium du carbonate de calcium précipité in vitro, attestant de l’importance de la régulation de la composition du fluide de calcification et des mécanismes de transport la contrôlant. Deux mécanismes biologiques complémentaires permettent de favoriser l’incorporation, dans les calcites biogéniques, de quantités de magnésium largement supérieures à celles observées dans les calcites inorganiques, et ce, malgré la forte hydratation de ce cation : l’intervention d’agents chélateurs du magnésium et le passage par une phase de carbonate de calcium amorphe (CCA). Les molécules de la matrice organique de minéralisation jouent entre autres le rôle de chélateur du magnésium, réduisant son état d’hydratation et facilitant ainsi son incorporation dans le minéral. Un rôle similaire a été suggéré pour les sulfates en solution, au vu de la corrélation observée dans ce travail entre les rapports Mg/Ca et S/Ca dans la phase minérale des calcites biogéniques étudiées. La matrice organique affecte elle aussi la concentration en magnésium dans le cristal, probablement via la stabilisation de la phase de CCA nécessaire à l’incorporation de concentrations élevées de cet élément: ainsi, les macromolécules de la matrice organique du test d’oursin induisent in vitro la formation de calcites plus riches en magnésium que celles formées en présence de matrice de piquant, un résultat concordant avec le fait que, in vivo, le test contient des concentrations en magnésium plus élevées que les piquants.

Cette thèse de doctorat a donc soulevé l’importance des effets biologiques dans la détermination du rapport Mg/Ca dans les calcites biogéniques. Les résultats obtenus montrent que le décryptage des mécanismes impliqués dans l’incorporation du magnésium se doit de considérer la phase amorphe transitoire qui précède la cristallisation. Des effets environnementaux affectent eux aussi la concentration squelettique en magnésium, mais nos résultats suggèrent qu’ils agissent au travers d’une modulation des effets biologiques, et non par une influence thermodynamique directe.

Cette hypothèse, si elle est confirmée, impose la plus grande prudence lors de l’utilisation des squelettes en calcite en tant que paléotraceurs.

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SUMMARY

The magnesium concentration in calcite skeletons produced by marine invertebrates is known to be dependent on several environmental parameters, including temperature, salinity and seawater Mg/Ca ratio. This property prompted the use of this concentration as a proxy of the considered parameters. However, skeletal magnesium contents in sympatric species and even in individuals of the same species may be rather different.

These inter and intra-individual variabilities indicate that biological factors also affect magnesium incorporation into biogenic calcites. Magnesium incorporation mechanisms are still unknown in calcifying invertebrates, a fact that questions the validity of this element as a paleoproxy. Moreover, higher magnesium contents increase calcite solubility and could therefore worsen the case of calcifying organisms facing ocean acidification linked to global change.

The present thesis is a contribution to the study of the environmental, biological and mineralogical factors affecting magnesium incorporation into the calcitic skeletons of 3 taxa, i.e. one hypercalcified sponge, Petrobiona massiliana, and two echinoderms, Paracentrotus lividus and Asterias rubens.

The first part of this work was dedicated to the study of several environmental factors affecting the magnesium concentration in the calcite skeleton of the 3 studied organisms.

Consequently to its low survival in aquarium, the sponge was studied using field specimens collected along an environmental gradient. Echinoderms were grown in controlled conditions in aquarium. Once the genetic (species) and structural (skeletal element) factors were fixed, skeletal magnesium concentration was positively related to temperature in the 3 studied species. The Mg/Ca ratio of the test of aquarium-grown P. lividus increased with temperature until a plateau which was probably due to the saturation of a biological process involved in magnesium incorporation. A positive effect of salinity, an other major environmental parameter, on skeletal Mg/Ca was demonstrated in aquarium-grown A. rubens. This influence can also be linked to a biological process:

contrary to magnesium, calcium concentration is controlled in the coelomic fluid, from which ions probably diffuse through the living tissues to the calcification site. Thus, the observed positive relation can be explained by the fact that a salinity increase raises the coelomic Mg/Ca ratio, which, according to previous studies, affected the Mg/Ca ratio of the precipitated skeleton.

In addition to the reported environmental influences, 44% of the skeletal Mg/Ca ratio variation remained unexplained in echinoderms. The absence of growth rate effect on magnesium incorporation into the echinoderm skeleton was demonstrated in aquarium experiments, contrary to previous literature statements. Other biological factors must therefore affect the incorporation of this element.

In the second part of this work, the modulation of mineralogical factors by biological factors was investigated. The interaction between Mg/Ca ratio in the precipitation solution and organic matrix was studied in an in vitro precipitation experiment. In addition, the relation between skeletal Mg/Ca and S/Ca ratios was investigated.

A major influence of the precipitation solution Mg/Ca ratio on the magnesium concentration of in vitro precipitated minerals was evidenced, highlighting the importance of transport mechanisms which determine the composition of the calcifying solution. The

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higher magnesium concentrations presented in some biogenic calcites in comparison to inorganic calcites can be attributed to the action of chelating molecules and to the transition trough an amorphous phase. The strong tendency of magnesium towards hydration can be overcome by the involvement of molecules that can function as magnesium chelators and, therefore, favour the formation of calcite with a high magnesium content. Organic matrix macromolecules have been suggested to proceed as magnesium chelators, reducing the hydration of this ion and facilitating its incorporation into calcite. A similar function was suggested for sulphates that were measured in the echinoderm skeleton. This would explain the positive correlation between skeletal Mg/Ca and S/Ca ratios observed in the studied species. Organic matrix macromolecules also increased the magnesium concentration of minerals precipitated in vitro, probably stabilizing the transient phase of amorphous calcium carbonate, which can incorporate high quantities of magnesium in its structure. The enhancement of magnesium incorporation was more pronounced with the organic matrix extracted from the test of sea urchin than with that extracted from their spines. This result was in agreement with the in vivo skeletal Mg/Ca ratios in P. lividus skeleton that were higher in the test than in the spines.

This study demonstrated the importance of the biological effects in the determination of Mg/Ca ratios in biogenic calcites. According to the suggested hypotheses, the understanding of mechanisms involved in magnesium incorporation should take the transient amorphous phase into account. Magnesium concentration in biogenic calcite was also affected by environmental parameters, but these influences could proceed through the indirect modulation of biological rather than a direct thermodynamic control. This hypothesis, if proved correct, would have deep implications for the use of magnesium in calcite skeletons as a paleoproxy.

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TABLE DES MATIÈRES

Introduction générale...1

1. Les biominéraux et l’environnement...1

2. Les calcites magnésiennes...3

2.1. L’ion magnésium...3

2.2. La magnésium dans les calcites inorganiques et biogéniques...6

2.2.1. Facteurs contrôlant la concentration en magnésium dans les calcites inorganiques………....8

2.2.1.1.Composition de la solution de précipitation……….8

2.2.1.2.Température………..9

2.2.2. Facteurs contrôlant la concentration en magnésium dans les calcites biogéniques………...…………10

2.2.2.1.Température………10

2.2.2.2.Rapport Mg/Ca de l’eau de mer………..12

2.2.2.3.Autres facteurs environnementaux………...…...12

2.2.2.4.Effets vitaux et contrôle biologique...14

3. Modèles biologiques étudiés...19

3.1. Le squelette postmétamorphique des échinodermes...19

3.1.1. Structure et morphogenèse...19

3.1.2. Le magnésium dans le squelette des échinodermes...22

3.2. Les squelettes des éponges calcaires...23

3.2.1. Les spicules calcaires...24

3.2.2. Les squelettes massifs...26

Buts du travail...29

PREMIÈRE PARTIE : Facteurs environnementaux et physiologiques affectant l’incorporation du magnésium………...31

Chapitre 1. Growth rate and chemical features of the massive calcium carbonate……….35

skeleton of Petrobiona massiliana (Baeriida, Calcaronea, Calcispongiae). Journal of the Marine Biological Association of the United Kingdom, June 2010, 90:749-754; doi: 10.1017/S0025315409991081 Chapitre 2. Temperature, salinity and growth rate dependences of Mg/Ca and………….47

Sr/Ca ratios of the skeleton of the sea urchin Paracentrotus lividus (Lamarck): an experimental approach. Marine Biology, June 2010, 157 (6): 1293-1300; doi: 10.1007/s00227-010-1409-5 Chapitre 3. Salinity effects on the Mg/Ca and Sr/Ca in starfish skeletons and………61

the echinoderm relevance for paleoenvironmental reconstructions. Geology, April 2009, 4: 351-354; doi : 10.1130/G25411A.1;2

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DEUXIÈME PARTIE: Processus minéralogiques affectant l’incorporation du

magnésium……….75

Chapitre 4. An intriguing relationship between Mg/Ca and S/Ca skeletal ratios………….77

in biogenic calcites: is sulphur linked to magnesium incorporation? (Submitted in Chemical Geology) Chapitre 5. Relative influences of solution composition and presence of……….93

intracrystalline proteins on magnesium incorporation in calcium carbonate minerals: an in vitro precipitation study (In preparation) Discussion générale et conclusions...109

1. Facteurs biologiques et environnementaux...109

2. Le rapport Mg/Ca en tant qu’enregistreur des conditions environnementales...116

3. Perspectives...118

Références bibliographiques...121

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Introduction générale

INTRODUCTION GÉNÉRALE

1. LES BIOMINÉRAUX ET L’ENVIRONNEMENT

Le terme biominéral désigne un minéral dont la précipitation dépend de l’activité d’un organisme vivant. Un minéral est classiquement défini comme un composé inorganique en phase solide de composition chimique donnée (Steen 1971). La formation de biominéraux est un processus largement répandu dans le monde vivant, recensé dans plus de 55 phylums différents (Lowenstam & Weiner 1989). Ces structures biogéniques remplissent des fonctions biologiques diverses et variées, comprenant notamment les fonctions squelettiques de maintien de la forme statique, de transmission des mouvements et de protection, mais aussi les fonctions de préhension et de mastication de la nourriture.

Les biominéraux interviennent également dans la réception et la transmission sonores, l’orientation (dans un champ gravitationnel ou magnétique) et ont une grande importance dans les processus de détoxication et de stockage d’ions à fonction métabolique.

On connaît actuellement plus de 64 biominéraux de nature différente (Weiner & Dove 2003). La calcification est un cas particulier de biominéralisation où le cation principal est le calcium. Elle concerne environ la moitié des biominéraux recensés à ce jour, le carbonate de calcium constituant le squelette de nombreux invertébrés marins. Dans la nature, le carbonate de calcium (CaCO3) existe sous différentes formes (qui diffèrent par la disposition spatiale de leurs atomes): une forme amorphe (sans arrangement particulier des atomes) et 5 polymorphes, à savoir l’aragonite (système cristallin orthorhombique), la calcite (système rhomboédrique), la vatérite (système hexagonal) et les carbonates de calcium mono-hydratés (système rhomboédrique) et hexa-hydratés (système monoclinique) (Lippman 1973, Dahl & Buchardt 2006). En conditions inorganiques, la calcite et l’aragonite sont stables à température et pression normales. Par contre, la vatérite et les formes amorphes et hydratées du carbonate de calcium sont instables dans ces mêmes conditions (Raz et al 2000, Neumann & Epple 2007). La calcite et l’aragonite sont de loin les principales formes de carbonate de calcium précipitées par les organismes vivants et constituent, entre autres, le squelette des coraux, de certaines éponges, des foraminifères, des coccolithophores, des mollusques, des brachiopodes, des bryozoaires et des échinodermes. Le carbonate de calcium amorphe (CCA) constitue une phase

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Introduction générale

transitoire ou permanente du squelette de nombreux invertébrés, où il est stabilisé par des molécules biologiques (Raz et al 2002). On recense également quelques rares exemples de biominéralisation de vatérite et de carbonate de calcium mono-hydraté, dont les spicules de certaines ascidies (Lowenstam & Abbott 1975, Addadi et al 2003).

Les biominéraux peuvent être classés selon le niveau de contrôle exercé lors de leur précipitation : on distingue les biominéralisations biologiquement induites des biominéralisations biologiquement contrôlées (Mann 2001). Dans le premier cas, le biominéral est précipité sous un contrôle biologique minimal, par simple réaction de métabolites produits par l’organisme avec des ions du milieu extérieur. Le minéral ainsi formé présente des propriétés similaires à celles de son homologue inorganique. Dans le cas de la biominéralisation strictement contrôlée par l’organisme, largement répandue au sein du monde vivant, un contrôle strict de la formation du minéral est assuré par une fraction souvent quantitativement faible de molécules organiques. Le cristal ainsi formé présente des propriétés particulières par rapport à son équivalent inorganique. Le site de calcification est en général isolé de l’environnement extérieur, ce qui permet un contrôle local strict de la composition et de la sursaturation du microenvironnement à partir duquel le minéral est formé (Simkiss & Wilbur 1989). La présence de cette fraction organique fait des biominéraux des matériaux composites, enjambant la frontière stricte opposant mondes vivant et minéral des premières classifications des objets naturels (Aristote -343 dans Barthélemy Saint Hilaire 1887).

La composition des biominéraux est en relation directe avec l’environnement. D’une part, comme nous le verrons, la composition des biominéraux est influencée par les conditions de l’environnement (température, concentration des ions dans l’eau pour les organismes aquatiques, etc…). Les biominéraux sont donc susceptibles d’enregistrer certaines caractéristiques environnementales prévalant lors de leur formation. De ce fait, plusieurs biominéraux sont utilisés comme paléoenregistreurs permettant la reconstruction des conditions environnementales passées. D’autre part, la composition des biominéraux influence leur stabilité et donc la résilience des organismes qui les synthétisent face aux changements environnementaux. La composition des biominéraux joue donc un rôle important dans la problématique des changements environnementaux, ce qui m’a amenée à y consacrer ma thèse de doctorat. Je me suis intéressée plus particulièrement à l’ion magnésium dans les calcites, dont la concentration est d’une part, contrôlée par l’environnement et d’autre part influence la solubilité du minéral formé.

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Introduction générale

2. LES CALCITES MAGNÉSIENNES

De nombreux organismes marins produisent des squelettes de carbonate de calcium, majoritairement sous la forme d’aragonite ou de calcite. Cette dernière cristallise dans le système rhomboédrique, et est caractérisée par un axe c perpendiculaire à deux axes a situés à 120° l’un de l’autre (Lippman 1973, Figure 1).

Figure 1 : Structure de la calcite (d’après Young et al 1999).

Cette polymorphe du carbonate de calcium peut incorporer des concentrations non négligeables d’ions magnésium dans sa maille. Une calcite est définie comme hautement magnésienne, lorsque sa concentration en magnésium est supérieure à 4 mol% de MgCO3

(Lippman 1973) et faiblement magnésienne, lorsque cette concentration est inférieure à 4 mol%. Les aragonites sont généralement plus pauvres en magnésium que les calcites.

C’est notamment le cas dans les carbonates biogéniques (Clarke & Wheeler 1922), où les formes aragonitiques présentent rarement des concentrations en magnésium supérieures à 1 mol% de MgCO3, alors que les formes calcitiques contiennent souvent plus de 20 mol%

de MgCO3, et rarement moins de 1 mol% (Chave 1954, Dodd 1967, Figure 2). Les organismes auxquels est consacrée ma thèse de doctorat produisent un squelette principalement constitué de calcite magnésienne. Je me focaliserai par conséquent sur ce minéral. Dans le présent chapitre, je décrirai l’état actuel des connaissances concernant les propriétés chimiques de l’ion magnésium et la formation des calcites magnésiennes,

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Introduction générale

Figure 2 : Contenu en magnésium des aragonites (A) et calcites (B) des squelettes de différents taxa (d’après Dodd 1967).

en conditions inorganiques et organiques, ainsi que l’ensemble des facteurs susceptibles d’influencer leur synthèse.

2.1 L’ION MAGNÉSIUM

L’ion Mg2+ est le cation divalent le plus abondant dans les cellules vivantes. C’est un élément essentiel au niveau biologique : il intervient dans la formation des tissus du squelette, la chimie des fluides biologiques, la régulation des fonctions cellulaires et tissulaires, la régulation d’enzymes, la photosynthèse, … (Vidolin et al 2007, Bentov &

Erez 2006). L’ion Mg2+ se distingue des autres cations retrouvés dans les systèmes biologiques par sa haute densité de charge1 et sa chimie en solution tout à fait particulière (Smith & Maguire 1998, Wolf & Cittadini 2003).

Tableau 1 : Propriétés des cations communs dans les systèmes biologiques (d’après Maguire &

Cowan 2002).

Ion Rayon ionique

(Å)

Rayon hydraté

(Å)

Rapport des rayons

Volume ionique 3)

Volume hydraté 3)

Rapport des volumes

Nombre de coordination

Taux d’échange aqueux (s-1)

Na+ 0,95 2,75 2,9 3,6 88,3 24,5 6 8×108

K+ 1,38 2,32 1,7 11,0 52,5 4,8 6-8 109

Ca2+ 0,99 2,95 3,0 4,1 108 26,3 6-8 3×108

Mg2+ 0,65 4,76 7,3 1,2 453 394 6 105

1 La densité de charge d’un ion correspond à sa charge divisée par son rayon. Elle permet de prédire le comportement d’un élément en solution. La solubilité des cations en solution aqueuse dépend de l’attraction électrostatique des molécules d’eau sur cet ion, elle-même fonction de la densité de charges de l’ion (Railsback 2006).

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Introduction générale

En effet, parmi les cations abondants dans les systèmes biologiques, l’ion Mg2+ possède le plus petit rayon ionique et la plus grande densité de charge (Tableau 1). L’ion Mg2+ en solution aqueuse a tendance à organiser les molécules d’eau autour de lui : il forme ainsi avec l’eau un complexe structuré en une sphère d’hydratation interne de 6 molécules d’eau liées par des liens électrostatiques (Wolf & Cittadini 2003, Günther 2006), entourée par une sphère externe de 12 molécules d’eau supplémentaires (Markham et al 2002, Figure 3). Si le rayon ionique du Mg2+ est plus petit que celui des ions Ca2+, Na+ et K+, il possède le plus grand rayon hydraté. Ainsi, l’ion Mg2+ hydraté a un volume 400 fois supérieur à celui de l’ion Mg2+ non hydraté. Par comparaison, le facteur d’accroissement de volume du rayon hydraté n’est que de 25 pour les ions Ca 2+ et Na+, et de 4 pour l’ion K+ (Maguire & Cowan 2002). De plus, le taux d’échange des molécules d’eau de la sphère d’hydratation est considérablement plus faible dans le cas du magnésium que dans celui des autres cations biologiques (Maguire & Cowan 2002, Wolf & Cittadini 2003). En conditions biologiques, l’ion Mg2+ est donc fortement hydraté et possède une enthalpie de déshydratation élevée (-1922kJ/mol contre -1592 kJ/mol pour le Ca2+, Wolf & Cittadini 2003).

Figure 3 : Modèle d’arrangement des sphères d’hydratation primaires et secondaires autour d’un cation Mg2+ (Markham et al 2002).

Il résulte de cette chimie unique que les interactions biologiques du magnésium sont différentes de celles des autres cations. De nombreuses interactions biologiques ont lieu au travers de la sphère d’hydratation du Mg2+, plutôt que directement avec le cation Mg2+. L’eau de mer contient de fortes concentrations en magnésium (1294 mg/kg pour une eau de 35 psu, Libes 1992) (Tableau 2). Dans l’eau de mer, le magnésium hydraté est

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Introduction générale

majoritairement présent sous forme libre (87 %) ou forme une paire ionique avec des sulfates (11 %) (Garrels & Thompson 1962, Kester & Pytkowicz 1969). Les biogéochimistes expriment les concentrations en magnésium sous forme d’un rapport molaire avec le calcium, indépendant de la salinité. Les temps de résidence du magnésium et du calcium dans l’eau de mer étant relativement longs (respectivement de 13 et 1 millions d’années, Lea et al 1999), le rapport Mg/Ca des eaux océaniques est relativement constant sur une échelle de temps de l’ordre du million d’années : la valeur actuelle en est de 5,2 mol/mol, mais elle a varié au cours des derniers 540 millions d’années, atteignant des minima de 1 mol/mol (Stanley 2006, Ries 2009). La variation du rapport Mg/Ca des eaux océaniques serait notamment liée aux variations des taux de production de la croûte océanique, qui déterminent en partie les concentrations en Ca2+, K+, Mg2+, SO42- dans l’eau de mer et seraient responsables de ces variations (Hardie 1996).

Tableau 2 : Composition de l’eau de mer (Libes 1992).

2.2 LE MAGNÉSIUM DANS LES CALCITES INORGANIQUES ET BIOGÉNIQUES

Les cristaux de carbonate de calcium peuvent incorporer des ions divalents autres que le calcium dans leur maille cristalline, par substitution du calcium, en solution solide. Ce processus est sélectif et dépend de la taille, la charge et la polarisation de l’ion (Simkiss &

Wilbur 1989). C’est notamment le cas du magnésium incorporé dans la calcite, dont il constitue un élément trace, mineur ou majeur2 selon son abondance dans le cristal.

D’autres cations divalents, tels que le strontium, le fer, le manganèse, le zinc, le plomb et

2 Un élément est considéré comme présent à l’état de traces lorsque sa concentration est inférieure au µg/g (ou ppm), tandis qu’il est dit majeur lorsqu’il est présent à des concentrations supérieures au mg/g, et mineur lorsqu’il est présent à des concentrations intermédiaires.

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Introduction générale

le baryum, peuvent aussi être substitués au calcium dans la calcite (Weber 1969, Auernheimer & Chinchon 1997, Reeder et al 1999). La substitution en solution solide induit une déformation de la maille cristalline, dont la modification des paramètres est proportionnelle au taux de substitution et détectable en diffraction des rayons X (Goldschmidt et al 1955, Goldsmidth & Graf 1958). De ce fait, elle influence la stabilité de la calcite formée : à partir d’une concentration de 8 à 12 mol% de MgCO3 (la valeur exacte étant encore indéterminée à ce jour), les calcites magnésiennes sont plus solubles que les aragonites, et voient leur solubilité augmenter avec leur concentration en magnésium (Andersson et al 2008, Figure 4). L’inclusion d’autres ions influence aussi cette solubilité.

De plus, il a récemment été démontré que les groupements carbonates peuvent être substitués par des sulfates dans la calcite, provoquant un agrandissement des paramètres de la maille (Kontrec et al 2004).

Figure 4 : Solubilité de la calcite dans l’eau de mer en fonction de sa concentration en magnésium ; les symboles pleins représentent les calcites biogéniques, tandis que les symboles vides représentent les calcites synthétiques (d’après Morse et al 2006).

La substitution du calcium par le magnésium est régie par des lois physico-chimiques dans les calcites inorganiques, mais on observe dans les calcites organiques des déviations par rapport à ces prédictions purement physico-chimiques, regroupées sous le terme d’effets vitaux par les biogéochimistes. Les principaux facteurs affectant la précipitation des calcites inorganiques et biogéniques et le taux de substitution du magnésium dans ces minéraux sont développés dans la section suivante.

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Introduction générale

2.2.1 Facteurs contrôlant la concentration en magnésium dans les calcites inorganiques

2.2.1.1 Composition de la solution de précipitation

En conditions inorganiques, les lois thermodynamiques et cinétiques gouvernent les réactions de précipitation en solution. A température et pression normales, la mise en présence de calcium et de bicarbonate en solution sursaturée résulte en la précipitation de calcite. Parmi les formes stables du carbonate de calcium à température et pression ambiantes, cette polymorphe est la moins soluble, suivie par l’aragonite ou par la calcite magnésienne selon son contenu en magnésium (Andersson et al 2008). La présence d’autres ions dans la solution de précipitation, comme c’est systématiquement le cas en milieu naturel, influence les propriétés du minéral formé (Morse & Mackenzie 1990). Par exemple, la présence de magnésium dans cette solution exerce une forte influence sur la polymorphe de carbonate de calcium précipitée: en présence de fortes concentrations de ce cation (comme c’est le cas dans l’eau de mer), la formation d’aragonite est favorisée par rapport à celle de la calcite (Kitano 1962, Kitano & Hood 1962, Lippman 1973, Raz et al 2000). En effet, l’ion magnésium entouré de sa sphère d’hydratation s’adsorbe sur la surface du nucléus de calcite en croissance (Lippman 1973). Son incorporation dans la maille de la calcite requiert une énergie de déshydratation élevée et crée une barrière énergétique inhibant la croissance ultérieure de la calcite (Raz et al 2000, Loste et al 2003). Par contre, suite à des contraintes stériques, l’aragonite n’incorpore pas l’ion magnésium hydraté dans sa structure orthorhombique (sa structure est trop dense pour incorporer la large sphère d’hydratation de cet ion, Addadi & Weiner 1992). Elle cristallise sans barrière cinétique en solution sursaturée. En présence de magnésium, le système en équilibre résulte donc en une précipitation nette d’aragonite.

Des calcites magnésiennes peuvent toutefois être précipitées dans des solutions au rapport Mg/Ca élevé (supérieur à 4 :1), en augmentant la sursaturation de la solution ce qui accélère la cinétique de réaction (Loste et al 2003). Lors de ces précipitations inorganiques in vitro, la présence d’une phase transitoire de CCA a été mise en évidence.

Cette phase est instable et tend à se transformer en une forme cristalline plus stable par expulsion de l’eau (Raz et al 2000). La concentration en magnésium de cette phase transitoire amorphe est principalement déterminée par le rapport Mg/Ca de la solution de

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Introduction générale

précipitation, et détermine celui de la phase cristalline subséquente (Loste et al 2003).

Cette conclusion est en désaccord avec celle d’Oomori et al (1987), selon lesquels le rapport Mg/Ca de la solution de précipitation n’aurait qu’une faible influence sur le rapport Mg/Ca de la calcite formée, principalement déterminé par la température.

Selon Meldrum & Hyde (2001), le type de polymorphe formé dépendrait aussi de la vitesse de croissance du minéral, elle-même dépendante de plusieurs autres caractéristiques de la solution de précipitation, telles que les conditions de saturation et la concentration en carbonates (Morse & Mackenzie 1990, Lopez et al 2009). Cette hypothèse permet d’expliquer la variabilité de la concentration en magnésium des calcites hautement magnésiennes formées dans une solution riche en magnésium.

2.2.1.2 Température

Les lois de la thermodynamique prédisent que la substitution du calcium par le magnésium dans la formation de la calcite dépend de la température. Toute réaction à laquelle est associé un changement d’enthalpie (∆H0) serait sensible à la température, comme l’exprime l’équation de Van t’Hoff : d ln K/ d (1/T) = - ∆H/R

où T= température en °K R=constante des gaz K= constante d’équilibre

Les réactions avec la plus grande valeur de ∆H0 auront la plus grande dépendance vis-à- vis de la température.

La substitution isomorphique du calcium par le magnésium dans la calcite est caractérisée par un ∆H0 de 21 kJ/mol (Lea 2003). C’est donc une réaction endothermique favorisée aux températures élevées. L’équation de Van t’Hoff permet de prédire une augmentation exponentielle du rapport Mg/Ca en fonction de la température (Lea et al 1999, Lea 2003), et de la chiffrer à 3 % par °C entre 0 et 30 °C. Des expériences in vitro sur des calcites inorganiques confirment que la concentration en magnésium incorporé dépend de la température (Katz 1973, Oomori et al 1987).

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Introduction générale

2.2.2 Facteurs contrôlant la concentration en magnésium dans les calcites biogéniques

Les concentrations en magnésium des calcites biogéniques peuvent largement surpasser celles des calcites de synthèse et des « ciments inorganiques» de calcite magnésienne précipités à partir de l’eau de mer (Mucci & Morse 1983 dans Cheng et al 2007). Des concentrations en magnésium élevées ont par exemple été rapportées dans les spicules et les squelettes massifs d’éponges (respectivement 12,9 mol% de MgCO3, Jones & Jenkins 1970, et 19 mol%, Hooper & van Soest 2002), chez certains foraminifères (21 mol% de MgCO3, chez les milioides, Bentov & Erez 2006) et chez les échinodermes (avec une moyenne variant de 13,5 à 16 mol% selon la classe considérée, avec des maxima de 43,5 mol% de MgCO3 mesurés dans les parties très hautement magnésiennes de la dent d’oursin, Weber 1969, Schroeder et al 1969). Il existe également des calcites biogéniques avec des concentrations en magnésium relativement faibles, tels les tests de certains foraminifères planctoniques, qui contiennent moins de 0,1 mol% de MgCO3 (Bentov &

Erez 2006).

La concentration en éléments mineurs ou traces dans les calcites biogéniques est en général le résultat de la superposition d’effets biologiques à des effets de l’environnement similaires à ceux affectant les calcites inorganiques (Weiner & Dove 2003). En plus d’être strictement dépendante du type de polymorphe de carbonate de calcium déposé, la concentration en magnésium squelettique d’un organisme varie systématiquement selon différents facteurs dont les principaux sont la température, la salinité, le pH et la concentration en magnésium dans la solution de précipitation. L'importance relative de ces différents facteurs dans la détermination des concentrations en magnésium incorporées dans les calcites biogéniques est encore mal connue.

2.2.2.1 Température

Tout comme celle de la calcite inorganique, la concentration en magnésium des calcites biogéniques est fortement influencée par la température. Clarke & Wheeler (1922) sont les premiers à relever la corrélation positive entre la concentration en magnésium du squelette de certains invertébrés marins et la température de l’eau dans laquelle vivent ces organismes (Chave 1954, Figure 5).

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Introduction générale

Figure 5 : Concentrations en magnésium dans les calcites squelettiques d’organismes de divers taxons en fonction de la température (Mackenzie et al 1983, d’après les données de Chave 1954).

Dans le contexte actuel de changement climatique global, de nombreux chercheurs se sont penchés sur cette relation entre chimie des squelettes de calcite et température de l’eau, en vue d’une éventuelle exploitation de ces squelettes en tant qu’archive naturelle du climat pouvant pallier aux limitations temporelles des enregistrements instrumentaux. L’analyse du rapport Mg/Ca des tests de foraminifères a fait l’objet d’une attention toute particulière au cours des années 1990 et est devenu un traceur fiable et reconnu des paléotempératures (Rosenthal et al 1997). Les tests de foraminifères sédimentent en grand nombre sur les fonds marins, où ils s’accumulent et sont relativement bien conservés dans les roches sédimentaires. Pour différentes espèces de foraminifères, les relations spécifiques entre le rapport Mg/Ca du test et la température de l’eau ont été établies pour des spécimens élevés en aquarium ou récoltés en milieu naturel dans des pièges à particules (Nürnberg et al 1996, Lea et al 1999, Anand et al 2003, Kisakürek et al 2008, Regenberg et al 2009) puis utilisées sur des spécimens de carottes sédimentaires. Une calibration valable pour une dizaine d’espèces planctoniques actuelles et les familles sub-fossiles et fossiles apparentées a ainsi pu être établie (Mg/Ca=0,38×exp(0,090T), Anand et al 2003, Figure 6). Selon cette calibration, le rapport Mg/Ca augmente de 9,0 ± 0,3 % par °C, et la température de calcification peut être estimée avec une exactitude de 1,2 °C. Par comparaison avec des données obtenues à partir d’autres traceurs (rapports isotopiques), cette relation a pu être vérifiée sur des échantillons sédimentaires riches en foraminifères.

Elle peut néanmoins être légèrement affectée par la dissolution partielle des microfossiles (Henderson 2002).

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Figure 6 : Calibration de la relation entre la température et le rapport Mg/Ca établie pour 11 espèces de foraminifères planctoniques (Mg/Ca=0,38×exp(0,090T), d’après Anand et al 2003).

2.2.2.2 Rapport Mg/Ca de l’eau de mer

Comme en conditions inorganiques, le rapport Mg/Ca de l’eau de mer influence celui des calcites biogéniques qui y sont formées (Lorens & Bender 1980, Ries 2004, Segev & Erez 2006, Stanley 2006). Des études expérimentales réalisées sur divers organismes calcifiants (moules, oursins, crabes, crevettes, serpules et algues corallines) ayant grandi à une même température dans des eaux de mer artificielles aux rapports Mg/Ca contrastés (de 1 à 6,7 mol/mol) démontrent que les rapports Mg/Ca des calcites formées sont en relation directe mais non linéaire avec le rapport Mg/Ca de l’eau de mer (Lorens &

Bender 1980, Ries 2004, 2006).

Cette propriété a été appliquée dans le cadre de reconstructions paléo environnementales du rapport Mg/Ca des eaux des océans anciens, via l’analyse du rapport Mg/Ca de tests d’oursins fossiles datant du Phanérozoïque (Dickson 2002, 2004). Les résultats obtenus concordent avec les reconstructions effectuées par d’autres méthodes.

2.2.2.3 Autres facteurs environnementaux

Salinité. Fergusson et al (2008) ont observé que la calcite des foraminifères méditerranéens présente des rapports Mg/Ca particulièrement élevés, et en ont conclu que les hautes salinités pouvaient avoir un impact important sur l’incorporation du

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magnésium. Par contre, Hoogaker et al (2009) réfutent cet effet direct de la salinité et attribuent cet accroissement de la concentration en magnésium à une contamination de la calcite squelettique par des surcroissances de calcite inorganique. Chez des foraminifères cultivés en laboratoire, la salinité affecte significativement le rapport Mg/Ca de la calcite déposée, mais reste un facteur de détermination secondaire en comparaison de la température: pour une élévation de salinité de 1 psu, le rapport Mg/Ca augmente de 2,3 à 5 % selon l’espèce considérée (Lea et al 1999, Kisakürek et al 2008, Dueñas-Bohòrquez et al 2010). Par contre, la composition en magnésium de la calcite squelettique d’ostracodes ayant grandi à différentes salinités n’est pas affectée par la salinité (De Deckker et al 1999).

pH. L’influence du pH sur le rapport Mg/Ca des calcites biogéniques est controversée.

Des réponses contradictoires aux variations de pH ont été observées chez les foraminifères (Dissard et al 2010). Certaines études rapportent une relation inverse entre pH et Mg/Ca dans la calcite des foraminifères (Lea et al 1999), tandis que d’autres suggèrent une absence d’effet aux pH océaniques moyens actuels mais une diminution drastique à des pH inférieurs à 8,0 (Russel et al 2004, Kisakürek et al 2008).

Etat de saturation de l’eau de mer. Il a également été proposé que la concentration en magnésium dans la calcite soit liée au niveau de saturation de l’eau de mer3 . Une relation entre ces facteurs a été suggérée pour des algues corallines et attribuée à une différence de leur vitesse de croissance (Agegian 1985 dans Morse & Mackenzie 1990). Par contre, plusieurs expériences de culture de foraminifères en conditions contrôlées n’ont montré aucune dépendance significative du rapport Mg/Ca dans la calcite vis-à-vis de l’état de saturation de l’eau de mer (Raitzsch et al 2010, Dueñas-Bohòrquez et al 2010, Dissard et al 2010). De plus, selon Lopez et al (2009), le niveau de saturation de l’eau de mer, même s’il affecte la vitesse de croissance de la calcite, n’aurait pas d’influence sur la concentration en magnésium qui y est incorporé à une température donnée.

3 Le niveau de saturation de l’eau par rapport à un minéral carbonaté, Ω, est défini comme étant le produit des activités des ions calcium, magnésium et carbonates en solution divisé par la constante de solubilité du minéral considéré. Lorsque Ω=1, le minéral est dit en équilibre thermodynamique avec l’eau de mer, c’est- à-dire que ses réactions de dissolution et de précipitation s’équilibrent mutuellement. Dans une solution de Ω < 1 (sous-saturée par rapport au minéral considéré) et Ω > 1 (sursaturée), les réactions de dissolution et de précipitation sont, respectivement, favorisées.

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2.2.2.4 Effets vitaux et contrôle biologique

Des minéraux d’une même polymorphe déposés par des organismes différents vivant dans les mêmes eaux, et donc subissant des conditions environnementales semblables, peuvent présenter des concentrations différentes en magnésium (Chave 1954). Ces valeurs ne sont donc pas en équilibre avec les conditions physico-chimiques des eaux environnantes, comme elles le seraient pour une calcite inorganique. Ceci indique que des effets biologiques s’additionnent aux influences environnementales (Lowenstam & Weiner 1989). Les déviations induites biologiquement par rapport à un comportement purement thermodynamique sont regroupées sous le terme d’effets vitaux (Weiner & Dove 2003, Fergusson et al 2008).

Le terme « effets vitaux » recouvre à la fois des facteurs distaux et proximaux. Les premiers sont liés à la physiologie de l’organisme et seules des corrélations peuvent être établies entre eux et la concentration squelettique en magnésium. Les seconds correspondent aux structures et processus directement impliqués dans la biominéralisation. Dans ce cas, des relations de cause à effet peuvent parfois être établies.

Le principal facteur distal étudié à ce jour est la vitesse de croissance du squelette. Celle- ci est corrélée à la concentration en magnésium du squelette chez de nombreuses espèces (Weber 1973, Kolesar 1978). Or, la vitesse de croissance dépend de nombreux facteurs, environnementaux (température) et biologiques (ontogenèse, disponibilité de la nourriture, état reproducteur). Par exemple, chez certains foraminifères, le rapport Mg/Ca de la calcite varie durant la vie de l’individu, en fonction de la vitesse de croissance, elle- même fonction de la température mais aussi de la taille (Elderfield et al 2002, Hintz et al 2006) ; de plus, ce rapport diffère entre les processus de formation d’une nouvelle chambre du test et l’épaississement secondaire de celle-ci (Erez 2003). De manière générale, les interactions entre ces différents facteurs distaux sont encore très mal comprises.

Les deux principaux facteurs proximaux impliqués dans l’incorporation du magnésium sont la matrice organique de biominéralisation et les mécanismes de contrôles de la concentration en magnésium dans le site de minéralisation (Bentov & Erez 2006).

Matrice organique de minéralisation. La matrice organique de minéralisation est définie comme tout matériel organique inclus ou bordant la phase minérale et affectant la minéralisation. Elle est constituée d’un assemblage complexe de protéines, polysaccharides, et lipides intimement associés à la phase minérale (Addadi & Weiner

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Introduction générale

1992, Albeck et al 1996, Ameye et al 2001, Farre & Dauphin 2009). Ces macromolécules représentent généralement une faible proportion du poids sec du squelette, variant de 0,1 à 5 % de ce dernier selon l’organisme considéré, mais peuvent représenter jusqu’à 45 % du poids sec du squelette chez certains Crustacés (Swift et al 1986, Welinder 1974). Malgré leur faible abondance relative, ces macromolécules jouent un rôle essentiel dans la biominéralisation, exerçant un contrôle direct sur la nucléation, la croissance, la polymorphe et la morphologie du minéral déposé (Simkiss & Wilbur 1989). Ces molécules peuvent être extraites par décalcification du minéral (dans l’EDTA par exemple), et sont séparées en fractions soluble et insoluble dans l’EDTA. Que ce soit chez les échinodermes, les foraminifères ou dans la couche calcitique de la coquille des mollusques, la fraction soluble est principalement constituée de protéines présentant un caractère acide, lié à leur richesse en acides aspartique et glutamique (Weiner 1979).

Même si elles présentent des caractéristiques chimiques communes entre les différents groupes calcifiants (Weiner & Addadi 1997), les protéines de la matrice de biominéralisation ont des compositions en acides aminés spécifiques (Albeck et al 1993).

Ces protéines, et dans certains cas les polysaccharides sulfatés qui leur sont associés, peuvent interagir avec le calcium, grâce à leurs groupements carboxyles présentant de fortes affinités pour cet ion, de manière à initier une nucléation orientée (Wilbur &

Bernhardt 1984, Addadi et al 1987, Addadi & Weiner 1985, 1992).

Les molécules de la matrice interviennent dans la détermination du type de polymorphe formée (Falini et al 1996, Levi et al 1998, Feng et al 2000, Takeuchi et al 2008). Les macromolécules extraites de la couche de calcite de la coquille de mollusque induisent la formation de calcite tandis que celles extraites de la couche aragonitique induisent la formation d’aragonite (Falini et al 1996, Feng et al 2000). Dans des expériences de cristallisations en présence de magnésium, les additifs organiques (tels que les polysaccharides et les polymères d’acides carboxylique et aspartique) favorisent la formation de calcite par rapport à celle d’aragonite (Kitano & Kanamori 1966, Wada et al 1999, Meldrum & Hyde 2001, Takeuchi et al 2008).

En plus de contrôler la polymorphe déposée, les molécules de la matrice organique semblent aussi hautement impliquées dans l’incorporation de hautes quantités de magnésium dans les calcites biogéniques. Robach et al (2006) ont en effet mis en évidence un parallélisme entre les distributions spatiales du magnésium et des protéines de la matrice riches en acides aspartiques dans la calcite très hautement magnésienne de la dent d’oursin (contenant jusqu’à 43,5 mol% de MgCO3). De plus, la présence de

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Introduction générale

macromolécules extraites de biominéraux (ou de molécules synthétiques équivalentes) induit in vitro la formation de cristaux aux contenus en magnésium supérieurs à ceux de cristaux produits en l’absence de telles molécules (Kitano & Kanamori 1966, Raz et al 2000, Stephenson et al 2008). Aucune relation quantitative entre la concentration et la nature précise de ces macromolécules et la concentration en magnésium du minéral précipité n’a toutefois encore été établie.

La matrice organique peut agir de différentes façons sur l’incorporation du magnésium : elle peut agir sur la vitesse de précipitation, la déshydratation du magnésium et la stabilisation temporaire d’une phase précurseur de CCA, plus apte à incorporer des ions Mg hydratés, qui se transforme ensuite en une phase cristalline qui conserve une concentration élevée en magnésium.

Stephenson et al (2008) observent que la présence d’un peptide acide favorise fortement l’incorporation du magnésium dans la calcite formée in vitro, et suggèrent que cet effet est lié à une accélération de la formation de la calcite. Cet effet cinétique résulte en une discrimination moins efficace des ions incorporés dans la maille cristalline, et par conséquent en une augmentation de la quantité de magnésium substituée au calcium. De plus, il est possible que les peptides agissent sur le niveau d’hydratation des ions, réduisant ainsi la barrière énergétique liée à l’incorporation du magnésium (Albeck et al 1993, Raz et al 2000, 2003). Elhadj et al (2006) ont en effet observé que l’accélération de la croissance de la calcite en présence de macromolécules est liée à la charge et au caractère hydrophile de ces dernières. Les molécules de la matrice peuvent donc perturber localement la structuration de la sphère d’hydratation du magnésium en solution, et réduire ainsi la barrière d’énergie liée à son incorporation dans la calcite en croissance. Le mécanisme précis en est encore mal connu, mais une étude récente a démontré que cet effet est fortement corrélé aux caractéristiques chimiques des acides organiques impliqués, et plus particulièrement à leurs constantes spécifiques de liaison au calcium par rapport au magnésium (Wang et al 2009).

Le passage par une phase amorphe transitoire est une stratégie largement répandue dans la formation des biominéraux (Tableau 3) et ce, malgré l’instabilité inhérente à de telles phases. La phase amorphe transitoire, longtemps ignorée de par la difficulté de sa détection (Weiner et al 2003), a été décrite dans le cadre du processus de formation de la calcite des échinodermes, de l’aragonite des mollusques, de la magnétite et l’apatite contenues dans la radula des chitons (Weiner et al 2005, Jacob et al 2008).

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Tableau 3 : Présence de carbonate de calcium amorphe dans différents taxons. La polymorphe la plus communément déposée dans chaque taxon est indiquée en gras (d’après Addadi et al 2003).

Règne/Phylum Forme du dépot Fonctions présumées

Mg/Mg+Ca (atomes%)

Formes de CaCO3 déposées par ces organismes Plantae Cystolithes dans les

feuilles

? 0-26 Calcite, aragonite , vatérite, CCA

Arthropoda : Crustacea

Cuticule Renforce l’exocuticule

0-20 CCA, calcite

Gastrolithes Stockage

temporaire CCA

Porifera Spicule (partie interne) ? 6-17 Calcite, CCA Ascidiacea Spicule (corps) Renforce les tissus

et la tunique

0-16 Calcite, aragonite, vatérite, CCA, monohydrocalcite

Echinodermata Spicule larvaire Phase précurseur 5 Calcite, CCA

Piquant d’oursin Régénération ? Calcite, CCA

Cnidaria/

Gorgonacea Spicules Support mécanique 18 Calcite, aragonite, CCA Mollusca

Bivalvia

Granules Stockage temporaire

? CCA vatérire

Coquille de la larve Phase précurseur Aragonite, CCA Gastropda

(Nudibranchia) Spicules Renforcer les

tissus ? CCA

Plathelminthes Corpuscules ? CCA

Des études récentes démontrent que les spicules des larves d’échinodermes, la dent et les piquants d’oursins sont formés par l’intermédiaire d’un précurseur amorphe qui cristallise ensuite en calcite magnésienne (Politi et al 2004 ; Aizenberg et al 1996a, Beniash et al 1997, 1999). La calcite étant l’état de plus basse énergie du carbonate de calcium, la conversion d’amorphe en calcite est favorisée thermodynamiquement (Killian & Wilt 2008), procédant par des phases transitoires successives de moins en moins instables (Politi et al 2008). La stabilisation transitoire ou permanente du CCA dans les systèmes biologiques est due à certaines macromolécules de la matrice, notamment à des protéines très acides, riches en acides aminés Asp, Glu, et Ser (Aizenberg et al 1996a, 2003, Politi et al 2007), et souvent glycosylées (Aizenberg et al 2003). Aizenberg et al (1996a, 2003) ont ainsi démontré que les protéines extraites de la phase permanente de CCA des spicules de l’ascidie Pyura pachydermata et de l’éponge Clathrina sp permettent d’induire la formation et de temporairement stabiliser une phase amorphe in vitro, sans autre additif. De même, les protéines riches en acide aspartique extraites de la calcite du mollusque Atrina rigida induisent la formation d’une phase de CCA in vitro et la stabilisent temporairement (Politi et al 2007). Toutefois, selon Raz et al (2003) la seule présence des macromolécules n’est pas suffisante pour induire la formation de CCA, qui requiert aussi la présence de magnésium en solution. Cet ion augmente le degré de sursaturation de la solution, ce qui induit la précipitation de particules métastables amorphes, cristallisant ensuite en une polymorphe déterminée par les conditions ambiantes (Raz et al 2000). Même si sa présence en solution est requise, on ignore si le

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Introduction générale

magnésium est uniquement nécessaire à l’élévation du niveau de sursaturation de la solution ou si il intervient dans l’activité des macromolécules.

Le passage par une phase amorphe favorise l’incorporation du magnésium, et la formation de calcites riches en magnésium (Raz et al 2000, Cheng et al 2007, Wang et al 2009). En effet, une phase amorphe hydratée facilite l’incorporation d’ions Mg2+ partiellement hydratés (Raz et al 2000). Des expériences in vitro ont démontré que le contenu en magnésium du cristal formé dépend de celui de la phase amorphe qui le précède, elle- même fonction de la concentration en cet ion dans la solution de cristallisation (Loste et al 2003). Il faut noter que les phases permanentes de CCA, telles qu’observées dans les spicules de certaines ascidies et l’exosquelette des crustacés, sont hydratées (Cölfen &

Mann 2003). L’eau contenue dans ces phases amorphes pourrait intervenir dans leur stabilisation (Politi et al 2006, 2008).

Contrôle des concentrations ioniques dans la solution de précipitation. Comme mentionné dans la section 2.2.2.2, le rapport Mg/Ca de la solution de précipitation peut directement conditionner la concentration en magnésium du minéral formé. Le micro- environnement de cristallisation est un espace délimité, au moins en partie, par une membrane, ce qui permet un contrôle biologique de la composition de la solution de précipitation et des conditions de sursaturation. La concentration en magnésium de la solution de précipitation peut ainsi être déterminée par les transporteurs du magnésium.

Dans le cas des organismes marins, le rapport Mg/Ca de l’eau de mer (5,2 mol/mol) est beaucoup plus élevé que celui des squelettes (généralement de l’ordre de 0,1 mol/mol).

Les systèmes de transport doivent donc réduire la concentration relative en magnésium dans la solution de précipitation. Etant donné la chimie particulière de cet ion (section 1.1), Smith & Maguire (1998) supposent que les transports du magnésium se font via des transporteurs protéiques particuliers ou des membres non classiques de familles de transporteurs connus. Différents systèmes de transport membranaires spécifiques à cet ion ont été décrits à ce jour dans les cellules eucaryotiques: des canaux de diffusion passive (Preston 1998), des échangeurs Na+/Mg2+, Ca2+/Mg2+, H+/Mg2+, Mg2+/Cl- et une pompe Mg-ATPase (Flatman 1984, Cefaratti et al 1998, Wolf et al 2003). La cellule peut aussi modifier le rapport Mg/Ca de l’espace de cristallisation qu’elle délimite par sa membrane en modifiant les concentrations en calcium, pour lequel de nombreux systèmes de transport ont été décrits.

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Introduction générale

3. MODÈLES BIOLOGIQUES ÉTUDIÉS

La présente thèse s’intéresse à des représentants de deux groupes d’organismes produisant des squelettes en calcite magnésienne : les échinodermes et les éponges calcaires hypercalcifiées. Ce chapitre présente les caractéristiques générales de ces squelettes et leurs mécanismes de formation.

3.1 LE SQUELETTE POSTMÉTAMORPHIQUE DES ÉCHINODERMES

3.1.1 Structure et morphogenèse

Excepté chez les holothuries où il est limité à des spicules épars, le squelette des échinodermes est formé d’ossicules qui occupent une partie importante du derme (Hyman 1955). Sauf exception, le squelette est toujours recouvert par l’épiderme. Chaque ossicule est formé de trabécules de calcite anastomosées, structurées en un réseau minéral tridimensionnel (le stéréome) dont les pores sont remplis de tissu conjonctif (le stroma) (Figure 7).

Figure 7 : Squelette d’échinoderme : stéréome à galeries d’un tubercule de l’oursin Tripneustes gratilla (Carter 1990).

Le stéréome est une structure quasi exclusivement minérale de calcite magnésienne qui contient néanmoins en son sein une très faible proportion en poids (0,1 %) de macromolécules organiques intra-squelettiques (Weiner 1985, Swift et al 1986). Le stroma est constitué d’une matrice extracellulaire, de fibres, et de cellules de différents types (cellules immunitaires et squelettogènes, fibroblastes) (Dubois & Chen 1989) (Figure 8).

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