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La gestion génétique des petites populations
E. Verrier
To cite this version:
E. VERRIER
Institut National
Agronomique Paris-Grignon,
Département
des Sciences Animales16, rue Claude Bernard, 75231 Paris Cedex 05
La
gestion
des
populations
La
gestion
génétique
des
petites populations
Résumé.
La conservation des races animalesdomestiques
menacées dans leurseffectifs
est unélément de la
gestion
des ressourcesgénétiques
exploitables
parl’agriculture.
Lesprogrammes
deconservation
comportent,
outre des actions visant à assurer uneplace
de ces races dansl économie,
unvolet de
gestion
génétique.
L’objet
de ce dernier est d’éviter au sein de cetype
depopulations,
dont leseffectifs
sontlimités,
une élévationtrop
rapide
de laconsanguinité
et la réduction concomitante de lavariabilité
génétigue.
Des outils dedescription
de cettevariabilité,
comme lescoefficients
deparenté
etde
consanguinite
ou lesprobabilités d’origine
desgènes,
permettent
de raisonner les méthodes degestion
génétique, qui
reposent
surl’uniformisation
des tailles de descendance entre lesrep roducteurs,
et la division des
pop ulations
en groupes dereproduction.
Lesexemples
de la race ovineSolognote
et de la race bovine Parthenaisepermettent
d’illustrerl’efficacité
de ces méthodes. Ilspermettent
également
de
souligner l’importance
de
définir
des
règles
degestion
suffisamment
simples
pour êtreappliquées
enpratique,
et l’absolue nécessitéqu’il
y a de trouver des débouchéséconomiques
viables pour ces racesqui
ont été délaissées par lessystèmes
deproduction
habituels.La modernisation de
l’agriculture qui
a suivi laseconde guerre mondiale s’est traduite dans la
plupart
des
espèces
animalesdomestiques
par uneintensifica-tion des
productions,
unagrandissement
et unespécia-lisation des
troupeaux
et une industrialisation dessys-tèmes
d’élevage.
Dans ce contexte, quelques grandesraces, bien
adaptées
aux conditions deproduction
et àla demande du
marché,
se sontimposées.
Al’inverse,
beaucoup
d’autres races ontdécliné,
certaines ontdis-paru. Ce
phénomène
a touché tous les paysindustriali-sés,
et se poseégalement
aux pays en voie dedévelop-pement. Face à ce constat, certaines voix se sont
éle-vées,
notamment à la FAO dans la fin des années60,
afin de mettre en
garde
contre la menace d’une forteréduction de la diversité des
types
génétiques
exploi-tés. En
France,
cetteprise
de conscience s’estmanifes-tée au début des années
70,
notamment au sein de la Société d’Ethnozootechnie et duDépartement
deGénétique
Animale de l’INRA. Lepremier
programmede conservation en ferme a concerné la race ovine
Solognote
en 1969.Depuis,
de nombreux programmes de conservation ont vu lejour.
Certains fonctionnent dans un cadrestructuré,
l’instituttechnique
corres-pondant
jouant
un rôlemajeur
dans la coordination des programmes(espèces
bovine etporcine).
Dans denombreux cas, ces programmes bénéficient d’un
sou-tien financier national (Ministère de
l’Agriculture
et dela
Forêt)
ourégional.
Lagestion
de cespopulations
enconservation,
qui
ont par la force des choses des effec-tifsréduits,
pose de nombreuxproblèmes,
à commen-cer par celui des motivations de tels programmes. Nous allonspréciser
la nature de cesproblèmes
etpré-senter certains outils et certaines méthodes mis au
point
pour les résoudre.L’exposé
de cas concretsper-mettra d’illustrer certains
points importants.
1
/ La conservation des
races :motifs
et
principes
généraux
1.1 / Motivations vis-à-vis de la
conservation des
racesEn
France,
comme dans les paysd’Europe
méridio-nale,
la conservation des races s’inscritgénéralement
dans le cadre d’uneproduction
agricole,
hormisquelques
cas comme celui de l’aviculture de loisir. Lasituation est sensiblement différente dans les pays
anglo-saxons
oùl’élevage &dquo;sportif’
estbeaucoup plus
pratiqué.
Lesarguments
en faveur de la conservationdes races
peuvent être,
à l’instar de Molénat(1990),
regroupés
de la manière suivante :- raisons
génétiques :
les races menacéespossèdent
descaractéristiques génétiques originales qu’il
faut conserver en cas de besoin futur commandé par une réorientation dumarché ;
- raisons
zootechniques :
ces racesprésentent
desaptitudes
intéressantes dans un contexteparticulier ;
- raisonsscientifiques :
ces races peuvent constituer un matériel d’étudeintéressant,
notamment en cequi
concerne lesphénomènes
d’interactiongénotype-milieu ;
- raisons culturelles :
ces races font
partie
d’unpatrimoine
commun que nous devons transmettre auxIl est difficile de hiérarchiser ces
arguments.
Certainspensent
quecompte
tenu des écarts depro-ductivité avec les
grandes
racescommerciales,
les races menacées ont une très faibleprobabilité
defournir des
gènes
intéressants pour le futur.Cependant,
force est de constater que lescaractéris-tiques génécaractéris-tiques
etzootechniques
de ces&dquo;petites&dquo;
races sont très mal connues. Ilparaît
donc difficile de faire desparis
sur l’utilité ultérieure de telle ou telle race. Unregard
en arrière doit d’ailleurs inciter à la modestie dans ce domaine. Tout auplus
peut-on
pré-ciser
l’originalité génétique
de différentes races(dis-tances
génétiques),
cequi
nécessite des moyensd’investigation
importants
et desprotocoles
d’étude relativement lourds.Aussi
peut-on
retenir l’ensemble des argumentsévoqués
plus
haut. Et l’on peut considérerqu’à partir
du moment où un groupe d’éleveurs souhaite mainte-nir une race dans le cadre d’une activitéagricole
et sesent concerné par sa
conservation,
il est nécessaire de luiapporter
unappui technique
et/oufinancier,
voire un soutienpsychologique.
Cetype
d’action doit par ailleurs s’inscrire dans unepolitique globale
deges-tion de nos ressources
génétiques.
1.2
/ Méthodes
disponibles
pourla
conservation de la
diversité
génétique
Si l’on ne considère que
l’argument génétique,
onpeut limiter
l’objectif
à la seule conservation degènes
ou de combinaisons degènes.
Dans cetteoptique,
plu-sieurs méthodes sont
disponibles :
- Sans animaux surpied : cryopréservation
(conservation de semence oud’embryons congelés),
banques
d’ADN(?) ;
- Avec animaux sur
pied : pool
degènes (ensemble
d’animauxd’origines diverses,
sereproduisant
enpanmixie plus
ou moinsparfaite),
populations
(races)in
situ,
sereproduisant
indépendamment
l’une de l’autre.Des programmes de conservation ne faisant pas
intervenir d’animaux sur
pied
feraientprendre
lerisque
d’une connaissance insuffisante du matérielconservé.
Ainsi,
lacryopréservation
en tant quemoyen de conservation
unique
n’est utilisée que dansle cas de certaines
lignées
de souris delaboratoire,
très bien connues tant sur le
plan
génétique
que sur celui descaractéristiques &dquo;zootechniques&dquo;.
Parailleurs,
l’existence d’animaux surpied
est seulegarante du maintien de certaines
aptitudes acquises
par le
jeune
au moyen del’apprentissage
auprès
de sa mère. Celapermet
également
d’assurer uneévolu-tion des
populations
conservées en fonction deschan-gements
des conditionsd’élevage.
Ainsi,
la conservation des ressourcesgénétiques
s’envisage
actuellement essentiellement par le biaisd’animaux sur
pied.
Lepool
degènes
est une méthodeefficace de maintien de
gènes
enségrégation
dans unegrande population.
A cetitre,
cette méthode estutilisée chez les volailles (Hubert 1989). Chez les
espèces
demammifères,
la notion de race estforte-ment
ancrée,
enparticulier
chez les gros herbivores. Lesobjectifs
culturels de la conservation nepeuvent
alors être atteintsqu’en préservant
la notion de race.Ainsi,
chez lesmammifères,
les programmes de conservation concernent des races dont on cherche àmaintenir tant l’identité
(d’aucuns
parlent
depureté)
que la cohésion des éleveurs
qui
y sont attachés.1.3
/ Principaux
aspects
de la
conservation des
racesmenacées
Le programme de conservation d’une race
com-prend plusieurs
volets,
qui
doivent être menés de front : inventaire et localisation des éleveurs et desanimaux,
connaissance desaptitudes
zootechniques
de la race et dessystèmes
d’élevage
associés,
connais-sance descaractéristiques génétiques
de la race,ges-tion
génétique
de la race.Les races nécessitant un programme de
conserva-tion sont souvent dans cette situation du fait d’un
manque à gagner
économique
parrapport
auxgrandes
races. La recherche de débouchésspécifiques
et rémunérateurs doit donc se
poursuivre
enparallèle
auxpoints
évoqués
plus
haut. Demême,
un soutienfinancier est le
plus
souvent nécessaire pourpromou-voir les activités
techniques
(état-civil,
contrôles deperformances) indispensables
à lagestion génétique.
Celle-ci revêt différentsaspects
selon les effectifs d’animaux :-
races
reliques (quelques
dizaines de femelles) : ils’agit
ici d’éviter ladisparition
pure etsimple
du fait des aléasdémographiques,
et depermettre
auxani-maux de se
reproduire,
notamment en assurantl’éle-vage et la
disponibilité
desmâles ;
- races à trèspetits
effectifs(quelques
centaines àquelques
milliers de femelles) : ils’agit
de limiter les effets de la dérivegénétique
(voirplus loin) ;
-
races à
petits
effectifs(quelques
milliers àquelques
dizaines de milliers de femelles) : on est ici à la limite de la conservation au sensstrict ;
ils’agit
d’éviter d’atteindre des effectifs
plus
faibles etd’amé-nager les programmes de sélection en veillant au
maintien d’une certaine variabilité.
Notons
qu’au
sein desgrandes
races, au moins chez les ruminantslaitiers,
les porcs et lesvolailles,
les programmes d’amélioration
génétique
mettent en oeuvre des intensités de sélection très élevées ets’appuient
sur des effectifs dereproducteurs
réduits. Le devenir de la variabilitégénétique
dans cesgrandes
races devrait être un souci croissant de leursresponsables.
2
/ Suivi
et
gestion
génétique
des
populations
à effectifs limités
Nous allons nous intéresser essentiellement à la
gestion
depopulations
dequelques
centaines àplu-sieurs milliers de femelles. Dans un
premier
temps,
nous allons brièvement décrire lesprincipaux
phéno-mènes que vont subir ces
populations.
Ensuite,
nous décrirons lesprincipaux
outilsqui permettent
desuivre l’évolution de ce
type
depopulations
et enfin nousprésenterons
les méthodesdisponibles
pour assurer leurgestion génétique.
2.1
/ La dérive
génétique
etla
consanguinité
Quand
les effectifs d’unepopulation
nepeuvent
plus
être considérés comme infinimentgrands,
le pas-sage d’unegénération
à l’autre constitue unéchan-tillonnage
desgènes.
L’évolution de cettepopulation
sera le résultat
d’échantillonnages
successifs.Cette notion de dérive
génétique
a été introduitedéveloppements.
Pour décrire cephénomène,
onétu-die le
comportement
en un locus neutre (c’est-à-direne donnant pas
prise
à la sélection) d’allèles nepou-vant pas muter, au sein d’une
population
&dquo;idéale&dquo;. Cette dernière est unepopulation
fermée àgénéra-tions
séparées,
d’individusdiploïdes
à sexes confon-dus sereproduisant
enpanmixie,
autofécondationcomprise.
Considérons unepopulation
de cetype,
d’effectif N fini et constant dans letemps.
Lafréquen-ce d’un allèle en un locus neutre va
pouvoir
fluctuer dans letemps.
Si nous connaissons lafréquence
ini-tiale de cet allèle(p&dquo;),
nous pouvons calculer apriori
l’espérance
et la variance de lafréquence
autempts
t(
p
)
:
Ainsi,
sous l’influence de la seule dérivegénétique
lafréquence
de l’allèle évolue defaçon
non orien-tée (1).L’équation
(2)quantifie
la fluctuation de lafréquence
del’allèle, qui
est d’autantplus
importante
que N est
petit.
A terme, et du seul fait duhasard,
l’allèle sera fixé (avec une
probabilité
Po
)
ouperdu
(avec uneprobabilité
1 -p,
»
;
dans les deux cas, lepolymorphisme
au locus considéré aura étéperdu.
Une autre
conséquence
de la limitation des effec-tifs d’unepopulation
est le faitqu’un
individu a un nombre borné d’ancêtrespotentiels.
Ainsi,
même enpanmixie,
ilapparaîtra
desaccouplements
entre indi-vidus ayant un ancêtre commun (individusapparen-tés),
donnant naissance à un individuconsanguin.
Onmontre que dans une
population &dquo;idéale&dquo;,
nonconsan-guine
audépart,
le coefficient deconsanguinité
moyen (F) évolue dans letemps
selonl’équation
sui-vante :Au sein d’une
population
de taillelimitée,
laconsanguinité
s’accroît defaçon
inéluctable,
pourtendre à l’infini vers 1 : en un locus
donné,
tous lesgènes
sontidentiques
(au sens donné à cetadjectif
par Malécot en 1948) et il ne subsistequ’un
seulallè-le. L’élévation de la
consanguinité
s’effectue au mêmerythme
que l’accroissement de la variance des fré-quencesgéniques,
d’autantplus
vite que l’effectif estfaible.
En
définitive,
dans unepopulation
de taillelimi-tée,
certains allèles se retrouvent à l’étathomozygote,
d’autresdisparaissent.
La dérivegénétique
et laconsanguinité
sont les deux facettes du mêmephéno-mène. La
conséquence
en est une perte de variabilitégénétique
de lapopulation
au cours desgénérations.
2.2
/
Les
outils de
description
de la variabilité
génétique
La variabilité
génétique
d’unepopulation
peut
s’appréhender
au travers desfréquences
desgènes
etdes combinaisons
génétiques
enplusieurs
locus. Encore faut-ildisposer
d’un nombre suffisant de locuspolymorphes
faciles d’étude. Les outils traditionnelsque sont les
gènes
à effets visibles (sous-entenduvisibles à l’oeil nu :
coloration,
cornage, etc) et lepoly-morphisme biochimique
(mis en évidence par lestechniques
desérologie
etd’électrophorèse)
nedon-nent accès
qu’à
un nombre modéré de locus dûmentidentifiés chez les animaux
domestiques.
Les outils de laGénétique
Moléculaire(RFLP,
minisatellites)permettent
de mettre en évidence unpolymorphisme
sur une part bien
plus importante
dugénome.
Cependant,
le coût de cestechniques
interdit actuel-lement leur utilisationsystématique
àgrande
échel-le,
c’est-à-dire pour des mesuresrépétées
dans letemps,
dans ungrand
nombre depopulations
et sur de nombreux animaux.Aussi,
est-il nécessaire d’utili-ser d’autresoutils,
plus synthétiques,
etqui
s’appuyant
sur la théorie de laGénétique
desPopulations
permettent
d’analyser
apriori
et aposte-riori l’évolution de la variabilité
génétique
d’unepopulation
(voir Vu TienKhang
1983). ).a / La notion
d’effectif génétique
Introduit par
Wright
(1931) pour décrire le phéno-mène de dérivegénétique
dans despopulations
réelles,
l’effectifgénétique
d’unepopulation
se définit comme la taille d’unepopulation
idéale dont le coeffi-cient deconsanguinité
moyen ou la variance desfré-quences
généiques
évolueraientasymptotiquement
comme au sein de la
population
étudiée. D’unemanière
générale,
le calcul de l’effectifgénétique
faitintervenir les élements suivants :
- les effectifs de
reproducteurs,
l’effectifgénétique
croissant avec
ceux-ci,
- les variances et covariances de tailles de
familles,
l’effectif
génétique
étant d’autantplus
élevé que la contribution des individus d’unegénération
donnée àla
procréation
de lagénération
suivante est laplus
uniforme
possible.
La formule de calcul la
plus
utilisée est la suivante :où
N,,
est l’effectifgénétique,
etN,,,
etN,
sont leseffectifs de
reproducteurs,
mâles et femelles respecti-vement, àchaque génération.
L’évolution de la varia-bilité de lapopulation
estprédite
alors parl’utilisa-tion des
équations
(2) et (3) enremplaçant
N parN,,.
Notons tout d’abord que (3) n’est
qu’une
approxima-tion de l’élévaapproxima-tion de la
consanguinité
dans une popu-lationbisexuée,
puisque
cetteéquation
suppose lapossibilité
d’autofécondation. Parailleurs,
du fait deshypothèses
nécessaires,
leplus
souvent la formule (4)est fausse et ne
représente
qu’un majorant
del’effec-tif
génétique
réel de lapopulation
étudiée.Ainsi,
la notion d’effectifgénétique
n’estsimple
àappliquer
que dans
quelques
casparticuliers,
ets’adapte
mal auxpopulations
réelles,
à structure etfonctionne-ment
démographique compliqués.
b / Les
coefficients
deparenté
et de
consanguinité
Le coefficient de
parenté
caractérise des individus deux àdeux,
le coefficient deconsanguinité
caractéri-se les individus eux-mêmes. En retenant les défini-tions
probabilistes
de ces coefficients données parMalécot
(1948),
un calcul directpermet,
en faisantl’hypothèse
d’absence desélection,
deprédire
simple-ment, en fonction des
règles démographiques
connues, leur évolution moyenne au sein de groupes d’animaux. Ces coefficients se calculent
également
aposteriori,
au vu despedigrees
réels.c / Les
probabilités
d’origine
desgènes
L’analyse
despedigrees permet également
decal-culer pour un individu la
probabilité
pourqu’un
gène
pris
au hasard en un locus neutreprovienne
de tel ougènes,
réalisé à l’échelle de groupes, et en référence à des fondateurs (sans ascendanceconnue), permet
dequantifier
lepoids génétique
de différentescatégories
de fondateurs (en fonction de l’année denaissance,
dutroupeau
d’origine,
etc.) dans la constitution de lapopulation
à un instant donné.d / Le nombre de
copies
desgènes
fondateurs
En considérant unepopulation
de N individus à uninstant
initial,
en un locusdonné,
il existe 2N&dquo;gènes
fondateurs&dquo;. En calculant les
probabilités
relatives aux différentes situations d’identitépossibles,
enfonction des
règles démographiques,
onpeut
prédire
l’évolution du nombre decopies
dechaque gène
fon-dateur au cours dutemps.
L’analyse
de ladistribu-tion de ces nombres de
copies
donne une mesure de la variabilitégénétique,
cette dernière étant d’autantplus importante
que la distribution est uniforme.Les différents outils
présentés
icipermettent
dedécrire,
en secomplétant,
diversaspects
desphéno-mènes mis en cause. Ils
reposent
implicitement
sur un ensemble commund’hypothèses ; notamment,
etc’en est une
limite,
hormis le calcul aposteriori
desprobabilités
d’origine
desgènes,
ils décrivent cequi
se passe à un locus non soumis à sélection. Ces outilsont néanmoins
permis
de définir desrègles
defonc-tionnement
démographique
permettant,
apriori,
depréserver
au mieux la variabilité depopulations
à faibles effectifs.2.3
/
Les
grands principes
de la
gestion
génétique
des
petites populations
L’objectif
ici estuniquement
depréserver
lavaria-bilité
génétique
(ou de limiter l’élévation de laconsanguinité),
en l’absence de toute considération sur un éventuelprogrès génétique. L’optimisation
dela sélection dans des
populations
d’effectifs limitésconstitue un
sujet
de recherche ensoi,
et se heurte à d’autres difficultésméthodologiques.
Lesgrandes
règles, qui
ne seront queprésentées
ici,
ressortent de nombreux travauxthéoriques,
notamment ceux deWright
(1931),
Kimura et Crow (1963) et Robertson(1964) . En
France,
la mise aupoint
de ces méthodes(Rochambeau
et al1979,
Rochambeau et Chevalet1985) a associé la recherche
(Département
deGénétique
Animale de l’INRA etDépartement
des Sciences Animales de l’INA-PG) et les associations de race encharge
de lagestion
des programmes autra-vers de leur
organisme
fédératif national (UNLG).Les
principales règles
degestion
sont les suivantes :- Il faut rendre le
plus
uniformepossible
la distri-bution des tailles de familles. Cela suppose de ne pasprivilégier
la descendance d’unreproducteur
particu-lier (nous sommes donc loin duprincipe
même de lasélection). En cas d’effectifs
stables,
l’idéal serait quetout
reproducteur
mâle laisse pour lareproduction
un fils et un seul et que toutreproducteur
femelle laisse une fille et une seule.- Il faut diviser la
population
en groupes derepro-duction. La constitution de ces groupes peut se faire sur la base des coefficients de
parenté
(notion de&dquo;familles&dquo; d’individus
plus
apparentés
entre euxqu’avec
le reste de lapopulation)
ous’appuyer
sur la structuration enélevages. Ensuite,
les descendants des deux sexes restent dans le groupe de leur mère. Les mâles d’un groupe nes’accouplent jamais
aux femelles de leur groupe, mais aux femelles d’autresgroupes, selon un
&dquo;plan
de rotation&dquo;permanent
(sché-mas &dquo;sansdécalage&dquo;)
ou variable dans letemps
(sché-mas &dquo;avecdécalage&dquo;).
Le nombre idéal de groupesdépend
de la taille de lapopulation
et de laprésence
ou non dedécalage
dans leplan
de rotation.- A nombre de femelles
constant, le nombre de mâles doit être aussi élevé que
possible
(l’idéal seraitla
monogamie)
et leur renouvellementrapide.
L’ensemble de ces
règles,
dont l’efficacité a étééprouvée
par le calculanalytique
et la simulationaléatoire,
permet degérer
lespopulations
d’effectiflimité sans considérer l’ensemble des cas
particuliers
en matièred’apparentement.
Laprincipale
difficulté réside dansl’adaptation
de cesprincipes
auxcontraintes de
l’élevage
et à la structure réelle despopulations domestiques.
3
/ De la
conception
à la
réalisation : deux
exemples
De nombreux programmes de conservation
géné-tique
fonctionnent actuellement enFrance,
sur la base de tout oupartie
desrègles précédemment
expo-sées
(pour
un recensementcomplet
des actionsréali-sées en France dans les
principales
espèces
domes-tiques,
voir Société d’Ethnozootechnie 1983 et Audiotet al 1991). Peu d’études ont toutefois été réalisées
pour dresser un bilan
génétique
de tels programmes. Une des raisons en est souvent le manque de reculnécessaire à une telle
analyse.
Nousprésentons
ici des résultats relatifs à une race ovine à trèspetits
effectifs (selon la nomenclature décrite enI),
laSolognote,
et à une race bovine àpetits
effectifs,
la Parthenaise.3.1
/ La
raceovine
Solognote
Originaire
de larégion qui
lui a donné son nom, et yétant actuellement
concentrée,
la raceSolognote
pré-sente de
remarquables aptitudes
de sobriété etd’adap-tation aux variations des ressources
fourragères
dans letemps.
Défavorisée tant par le recul del’élevage
ovinen
Sologne
que par le faibleprix
de vente de sesagneaux de race pure du fait de leur conformation
médiocre,
elle a faillidisparaître
à la fin des années60. Le programme de conservation de cette race a été
mis en
place
en1969,
avec un voletgénétique
(cf 2.3) àpartir
de 1975. La maîtrise d’oeuvre de ce programmeest assurée par le Flock-Book
Solognot
(FBS).En
1982,
un recensement relativementcomplet
avait
permis
de dénombrer 2100 brebisréparties
dans50
élevages
(Verrier 1982). Les effectifsgérés
par leprogramme (brebis inscrites au FBS) sont inférieurs à
cet effectif total et ont fortement évolué
(figure
1) :après
unepériode d’augmentation régulière
de 1975 à1984,
les effectifs au FBS et ceux soumis au contrôle deperformances
sont en chute libre (environ - 50 % en6 ans). Le contexte
économique
del’élevage
ovin,
qui
perdure depuis
unedécennie,
et les difficultés commer-ciales del’agneau Solognot
ne sont sans doute pasétrangères
à cette évolution défavorable. De nombreux éleveurs sedécouragent
et sedésengagent
dupro-gramme : en dehors du cas de deux éleveurs &dquo;accro-chés&dquo; à leur race et
présents depuis plus
de 25 ans, on observe un renouvellement trèsrapide
des adhérents au Flock-Book. Cette situation ne rend pasoptimiste
On
peut
cependant
tenter un bilan du voletgéné-tique
du programme deconservation,
cequi
avait été fait il y a une dizaine d’années (Verrier1982),
une actualisation récentepermettant
dedégager
desten-dances sur un
plus long
terme. Ce programme estfondé sur la
décomposition
de lapopulation
en 11 familles initiales (10aujourd’hui)
constituées sur la base des coefficients deparenté.
Le schéma derota-tion est un schéma sans
décalage,
c’est-à-dire selon un ordrepermanent.
Lesprincipaux points qui
sedégagent
sont les suivants.La constitution des familles sur la base des
généa-logies
a entraîné unedispersion
de ces familles dans de nombreuxélevages.
Encorollaire,
onpeut
obser-ver dans un mêmeélevage
de nombreuxsous-ensembles
comprenant
chacun un faible nombre dereprésentants
d’une famille donnée. Enconséquence,
à l’intérieur des
élevages,
il est souventdifficile,
éco-nomiquement
etpratiquement,
d’élever le nombre de béliers et de constituer le nombre de lots de lutte nécessaires aurespect
desaccouplements
selon leplan
de rotation. A l’heureactuelle,
etmalgré
la miseen
place
en 1979 d’un centred’élevage
debéliers,
letaux de suivi du
plan
de rotation n’est que de l’ordre de la moitié(figure
2).Sans doute en
partie
enconséquence
decela,
les effectifs des différentes familles ont évolué defaçon
très
inégale,
nécessitant unremodelage
des familles en 1982.Malgré
un taux de suivi duplan
de rotationqui
estloin d’être
optimal,
la maîtrise de l’évolution de laconsanguinité
au sein des femelles inscrites(accou-plées
selon ou en dehors duplan
de rotation) semble assez bonne(figure
3). On notera enparticulier
unediminution
significative
de laproportion
desaccou-plements
donnant naissance à desproduits
trèsconsanguins
(F >0,0625,
ce chiffrereprésentant
le coefficient deconsanguinité
d’un individu issu de l’union de deux cousinsgermains).
Le nombre d’éleveurs fournisseurs de béliers a,
malgré
de nombreuses mesuresincitatives,
toujours
été faible.
Aujourd’hui
un seul éleveur fournit des 2/3 aux 3/4 des béliers utilisés dans le cadre duprogram-me. Un calcul des
probabilités d’origine
desgènes
serait nécessaire pour
préciser l’impact génétique
de cettesituation,
apriori
nonoptimale.
Comme on
peut
le remarquer, les contraintes liées aux structuresd’élevage pèsent
fortement sur le suivi desplans d’accouplements,
et il estpréférable
d’adap-ter ces derniers aux structures enplace.
C’est lasolu-tion
qui
a été choisie pour de nombreux programmespostérieurs
à celui de laSolognote.
3.2 / La
racebovine
Parthenaise
Originaire
de l’ouest de laFrance,
la race Parthenaise était anciennementexploitée
pourl’apti-tude
triple
travail-lait-viande. Au début dusiècle,
oncomptait
environ un million d’animauxParthenais,
cequi
situait cette raceparmi
lespremières
sur leplan
numérique
en France. Apartir
del’entre-deux-guerres
la Parthenaise a été
supplantée
par deux racesplus
spécialisées,
l’une pour laproduction
delait,
laNormande,
l’autre pour laproduction
deviande,
laCharolaise. La Parthenaise n’a dû sa survie
qu’à
uneorientation résolument tournée vers la
production
bouchère,
à base d’animaux très bienconformés,
prise
par ses
responsables
au début des années 70.Aujourd’hui
les effectifs de la race sont stabilisés à environ 7 000 vachesreproductrices, réparties
dans660
élevages pratiquant majoritairement
lesystème
naisseur-engraisseur.
Dans cecadre,
laproduction
dejeune
bovin (18 mois) ou dejeune
vacheengraissée
après
avoir sevré un veaupermet
d’obtenir desprix
au kilo nettementsupérieurs
à ceuxpratiqués
pour des animaux de même age mais d’autres races(de
l’ordre de + 15 à + 25 % en 1989). L’association de race (UPRA)comprend
dans sonpremier collège
unecentaine d’éleveurs
jeunes
(les 2/3 desélevages
ontLa race ne fait pas
l’objet
d’un programme de conservation au sensstrict,
mais d’un programme desélection, comprenant
un volet relatif à lagestion
dela variabilité
génétique.
La maîtrise d’oeuvre du pro-gramme est assurée par l’UPRA Parthenaise enétroi-te collaboration avec la
Coopérative
d’Insémination Artificielle des Deux-Sèvres. L’InséminationArtificielle (IA)
représente
actuellement 20 % de lareproduction
dans la race. En1978,
les taureaux d’IAavaient été
répartis
en 12 familles sur la base des coefficients deparenté
(Malafosse etRégaldo 1978).
Le choix des taureaux devait s’effectuer en tenant
compte
de cette structuration en familles. Une analy-se récente du fichier racial (environ 24 000 animauxnés entre 1950 et 1989) a
permis
de voir cequ’il
enavait été et de mesurer l’évolution de la
consanguini-té dans la race (Giraudeau et al 1991).Le coefficient de
consanguinité
moyen s’est main-tenu à un niveau relativement faible tout aulong
des10 dernières années
(figure
4),
et reste modéré pour unepopulation
de cetype.
Sur 12 familles de taureaux d’IA constituées en
1978,
6 n’ontplus
dereprésentant
dont onpossède
de la semence en stock.Des calculs de
probabilités d’origine
desgènes
montrent
l’inégalité
des contributions de ces familles aupatrimoine génétique
de certains animaux actuel-lement en service(figure 5).
Ainsi,
dans ce cas, l’évolution de laconsanguinité
ne décritqu’une partie
de la réalité. L’utilisation d’unautre outil pour suivre l’évolution de la variabilité
génétique,
lesprobabilités d’origine
desgènes,
a per-mis depréciser
lesconséquences
sur la variabilitégénétique
d’une utilisation nonéquitable
destau-reaux
disponibles.
Si rien n’était fait à pour atténuercette
pratique,
l’avenirgénétique
de la racepourrait
s’en trouver affecté.Conclusion
La
gestion
despetites populations
met en oeuvre des méthodesoriginales.
Elles’appuie
sur des outilsde
description
de la variabilitégénétique, qui
permet-tent de raisonner a
priori
le choix de ces méthodes et d’en mesurer l’efficacité aposteriori.
Ladescription,
très
succinte,
qui
a été faite de deuxexemples
concrets
permet
de fairequelques
remarques.Il est nécessaire de diversifier au maximum les
outils de
description
de la variabilitégénétique,
afin de bienprendre
encompte
toutes les facettes desphé-nomènes mis en cause. A ce
titre,
le bilancomplet
d’un programme concret, mettant en oeuvre tous lesoutils décrits
ici,
ycompris
ceux de laGénétique
Biochimique
voire de laGénétique
Moléculaire,
resteà
entreprendre.
Les méthodes de
gestion
génétique
doivent tenircompte
au mieux des structuresd’élevage
et dufonc-tionnement
démographique
despopulations
considé-rées. En cas
contraire,
ellesrisquent
d’êtredifficile-ment
applicables
et ... nonappliquées.
Un volet
génétique
ne suffit pas à lui seul àmain-tenir une race et ses éleveurs. Il est nécessaire de
trouver un débouché
spécifique
etrémunérateur,
sous
peine
dedécouragement.
Les deuxexemples
décrits contrastent fortement de cepoint
de vue, la race bovine Parthenaiseayant
trouvé sa voie et ainsiune
dynamique
nouvelle,
la race ovineSolognote
tar-dant à
s’engager
sur un tel chemin.Enfin,
le fonctionnement de tels programmes nécessite un minimum d’encadrementtechnique
etd’animation,
avec les difficultés financières que despetites
structurespeuvent
rencontrer pour assurer ce travail. Cetaspect
estparticulièrement important
pour ces races enconservation,
dont les éleveursres-sentent un fort sentiment d’isolement. A ce
titre,
leRéférences
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