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Indice africain de développement social: le continent s’oriente-t-il vers un développement plus inclusif?

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Academic year: 2022

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Note d’orientation

L’INDICE AFRICAIN DE DÉVELOPPEMENT SOCIAL:

Mesurer l’exclusion humaine dans une optique de transformation structurelle

Indice africain de développement social: Le continent s’oriente- t-il vers un développement plus inclusif??

I. Introduction

A. Le paradoxe de la croissance en Afrique

Malgré une vingtaine d’années de croissance exceptionnelle, les gains économiques de l’Afrique ne se traduisent toujours pas en résultats sociaux positifs.

De graves inégalités persistent, tant à l’intérieur des pays qu’entre eux, indiquant que la croissance n’est ni suffisamment inclusive ni équitable pour toutes les couches de populations. Selon des chiffres récents, les enfants africains pauvres risquent encore de souffrir d’insuffisance pondérale deux fois plus que ceux vivant dans des familles riches et ils sont probablement trois fois moins scolarisés.

Le chômage est en augmentation, en particulier chez les jeunes, tandis que les filets de protection sociale restent insuffisants et inaccessibles pour bon nombre d’Africains, surtout les plus démunis et les plus vulnérables, ce qui réduit leur capacité de participer au développement et de bénéficier des gains de la croissance économique.

L’exclusion est un phénomène pluridimensionnel difficile à définir faute d’un cadre précis quant à la façon de procéder et aux aspects devant être évalués. On admet cependant clairement qu’une société « exclue » risque de handicaper le développement, de ralentir la croissance économique et de susciter l’instabilité sociopolitique. Plus fortes sont les inégalités et les exclusions, plus limitées également sont les possibilités de mobilité sociale et plus graves les vulnérabilités aux chocs extérieurs qui rendent ces exclus encore plus pauvres. C’est exactement ce qui se passe actuellement en Afrique où la croissance économique ne réussit pas à garantir une répartition inclusive et équitable

de ses bénéfices à toute la population. Tout indique en fait que le rythme actuel de progrès de l’Afrique vers un développement inclusif est trop lent et ses moteurs trop limités pour répondre aux besoins des couches les plus pauvres. C’est pourquoi il faut absolument faire en sorte que ces populations soient intégrées au développement et aux prises de décisions, afin d’accélérer la transition vers une croissance plus durable et plus équitable.

Figure 1: De la transformation structurelle fondamentale au développement inclusif

Développement inclusif et équitable

Source: Commission économique pour l’Afrique (2014).

L’absence d’effet transformateur de la croissance sur le développement social et humain est au cœur d’analyses politiques récentes (Commission économique pour l’Afrique, 2013a). Dans son dernier rapport, le Groupe de haut niveau sur le programme de développement post-2015 recommande que ce nouveau programme se base sur cinq grandes réorientations transformatrices:

a) empêcher les laissés pour compte; b) placer le développement durable au cœur des débats; c) transformer les économies pour créer des emplois et favoriser un modèle de croissance inclusif; d) construire

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la paix et créer des institutions efficaces, transparentes et responsables pour tous; et e) créer un nouveau partenariat mondial (Nations Unies, 2012).

En Afrique, l’émergence du développement social comme élément clé du développement économique gagne aussi du terrain. Les dirigeants africains ont clairement indiqué la nécessité d’une stratégie de croissance inclusive et transformatrice dans le contexte du nouvel Agenda 2063 et de la position commune africaine sur le programme de développement pour l’après-2015, dont les visions se fondent sur l’équité, l’inclusion et la durabilité (Commission économique pour l’Afrique, 2012).

B. Un paradigme pour un développement inclusif

La Commission économique pour l’Afrique a été en première ligne en ce qui concerne la proposition visant à établir un programme de transformation économique et sociale pour l’Afrique. Pour sa transformation économique, l’Afrique doit tirer profit de son avantage comparatif en mettant l’accent sur l’industrialisation de son agriculture et la transformation de ses produits de base, une plus forte intégration régionale et la valorisation de sa production locale, pour en améliorer la compétitivité et la productivité. Pour se transformer sur le plan social, le continent doit faire en sorte que son développement économique soit suffisamment inclusif et se traduise par un plus grand bien-être pour les populations africaines. Un élément clef de cette transformation sociale est la nécessité de s’occuper des groupes exclus, ce qui est indispensable pour que le développement soit équilibré et équitable (protection sociale). Ceci permettrait de remédier aux exclusions, grâce à la formulation de politiques aux niveaux national et infranational.

Pour compléter ce nouveau paradigme, la Commission économique pour l’Afrique a mis au point l’Indice africain de développement social, outil conçu pour aider les gouvernements à évaluer les progrès accomplis en vue de réduire l’exclusion humaine et promouvoir des politiques plus inclusives et équitables. Cet Indice a été créé en réponse à une demande faite en 2011, lors de la deuxième réunion du Comité du développement humain et social, par les États membres africains qui souhaitaient disposer d’un indicateur d’exclusion sociale spécifique à l’Afrique.

II. L’Indice africain de développement social

A. Données générales

Ce nouveau paradigme se fonde sur le principe que l’exclusion peut se manifester sous des formes diverses à différentes étapes de la vie d’une personne. Ceci repose sur l’hypothèse que le risque d’être exclu n’est pas statique, mais dynamique et comporte d’importants effets intergénérationnels et que les moteurs de l’exclusion sont déterminés par l’interaction de facteurs sociaux, économiques, politiques et culturels. Il faut donc bien comprendre les impacts et les facteurs déterminants de l’exclusion dans chaque pays pour formuler des politiques ciblées permettant de contribuer à réduire les vulnérabilités spécifiques que rencontrent les personnes tout au long de leur vie.

En adoptant cette approche fondée sur le cycle de vie, l’Indice vise à mesurer l’impact de l’exclusion humaine dans six dimensions essentielles du bien-être: la survie, la santé, l’éducation, l’emploi, le revenu productif et la qualité de la vie (voir le tableau 1). L’un des aspects essentiel de l’Indice est qu’il peut être différencié dans le temps, ainsi que par sexe et zone géographique, ce qui permet de mesurer les différences entre les pays et au sein des pays selon les couches de populations.

Tableau 1: L’exclusion durant le cycle de vie

Age Étape de la

vie

Principale dimension du développement De la naissance

à 27 jours Naissance Survie

De 28 jours à 5

ans Petite enfance Nutrition/santé Entre 6 et 14 ans Années de

formation

Enseignement de base de qualité 15 ans et plus Entrée sur le

marché du travail Accès à un emploi productif

25 ans et plus Vie productive Moyens de subsistance

60 ans et plus Vieillesse/

Troisième âge

Vivre décemment comme personne âgée

Pour mettre en application ce cadre, on a retenu six indicateurs qui appréhendent les dimensions essentielles de l’exclusion dans chacune des étapes susmentionnées (voir figure 2).

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Les indicateurs ont été choisis en fonction de trois grands critères: la disponibilité de données fiables et pertinentes en provenance des pays africains, si possible à divers échelons de l’administration, des indicateurs d’impact qui peuvent mieux représenter les dimensions retenues de l’exclusion, compte tenu des données empiriques disponibles en Afrique1, et des indicateurs pertinents et aptes à capturer une dimension de l’exclusion.

Des études empiriques montrent que priver les enfants de soins de santé adéquats et d’une bonne nutrition peut avoir des conséquences irréversibles sur leurs résultats scolaires et leur productivité à l’âge adulte (Commission économique pour l’Afrique, 2013b). En fait, selon le Secrétaire exécutif de la Commission économique pour l’Afrique: « le développement inclusif ne sera réalisé que lorsque tous les enfants auront les mêmes chances de survivre, de se nourrir et de s’instruire. L’égalité ne sera réalisée que lorsque tous les jeunes auront des chances égales d’accès à l’emploi, lorsque les ménages seront en mesure de mettre leur famille à l’abri de la pauvreté et que nos personnes âgées pourront profiter décemment de leur retraite. Pour qu’une telle transformation soit possible, il faudra veiller à ce que chaque individu (filles et femmes, garçons et hommes) soient au centre de ce processus ».

L’Indice est destiné premièrement à permettre aux pays africains de mieux remédier aux formes d’exclusion qui risquent de freiner le développement des personnes et des populations et deuxièmement à concevoir des politiques

1 Une analyse en composantes principales a été faite sur les indicateurs retenus pour déterminer leurs pondérations et pour assurer la robustesse du modèle.

plus ciblées et plus inclusives. L’Indice devrait ainsi contribuer à l’accélération de la transformation structurelle du continent, compte tenu de l’ensemble des facteurs qui affectent l’exclusion humaine. On espère aussi que cet Indice aidera à renforcer les engagements régionaux et mondiaux en matière de développement social et à en assurer le suivi, en particulier la mise en application de l’Agenda 2063 et du programme de développement pour l’après-2015 qui mettent au premier plan les questions d’inégalité et d’exclusion.

B. Pourquoi un nouvel indice?

Il est reconnu que les questions d’exclusion et d’inégalités étaient ignorées dans les réflexions sur le développement, notamment dans les objectifs du Millénaire pour le développement et l’Indice de développement humain.

Ces deux documents, en fait, s’ils ont bien servi de catalyseurs pour le développement dans le monde entier, ne mesurent pas les spécificités et les inégalités régionales dans la réalisation des mêmes objectifs de développement.

L’argument avancé en l’occurrence est que les interventions politiques conçues en fonction de données globales ne permettent pas de prendre des décisions optimales et que l’absence de mécanisme permettant de bien suivre le progrès social aboutit probablement à des plans et politiques peu solides. L’Indice africain du développement social est destiné à pallier cette lacune et à compléter les indices internationaux existants en relevant les différents impacts des politiques et facteurs sociaux, politiques et économiques sur l’exclusion humaine en Afrique.

Figure 2: Indicateurs mesurant l’exclusion humaine en Afrique suivant l’approche du cycle de vie

Cycle de l’exclusion

humaine Indicateurs pour l’Afrique

Naissance De la naissance à 27 jours

Petite enfance De 28 jours à 5 ans Années de formation

6 à 14 ans

Entrée des jeunes sur le marché du travail 15 à 24 ans

Prise en charge d’un ménage - 25 ans et plus Personnes âgées

60 ans et plus

Mortalité infantile néonatale

Prévalence de la malnutrition, taille selon l’âge (en pourcentage du nombre d’enfants de moins de 5 ans)

Taux d’alphabétisation des jeunes (pourcentage des jeunes âgés de 15 à 24 ans) Chômage, total des jeunes (pourcentage de la population active âgée de 15 à 24 ans) Ménages vivant en dessous du seuil national de pauvreté

(en pourcentage du nombre total de ménages)

Espérance de vie après 60 ans

Source: Commission économique pour l’Afrique (2014).

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C. Mise en œuvre

L’Indice a été élaboré sur la base de vastes consultations avec les États membres et principales parties intéressées, compte tenu des problèmes spécifiques de développement de l’Afrique. Il a été expérimenté dans cinq pays d’Afrique (Cameroun, Kenya, Maroc, Sénégal et Zambie) et la phase de déploiement a commencé en 2015, avec une série de réunions de formation technique sur son application et son utilisation. Pour faire en sorte que les pays s’approprient l’Indice et en assurent la pérennisation, ce sont des équipes nationales mises en place dans chaque pays concerné, avec des participants en provenance des ministères de l’économie et du plan, d’autres ministères concernés et des bureaux nationaux des statistiques, qui se sont chargées de la collecte des données et de la production et de l’analyse des résultats.

D. Premières conclusions

Les résultats préliminaires indiquent des différences importantes dans la gravité de l’exclusion dans tous les pays. En Zambie, par exemple, environ 60 % d’exclusion totale, telle que mesurée par l’indice, résulte de la pauvreté.

En outre, les causes de l’exclusion sont très différentes pour les hommes et les femmes et varient selon le lieu. En Zambie, les hommes comme les femmes souffrent d’un niveau moyen d’exclusion, d’où la nécessité d’élaborer des programmes et des stratégies visant à résoudre équitablement les disparités entre hommes et femmes.

Les zones rurales connaissent des niveaux plus élevés d’exclusion que les centres urbains, principalement en raison de la pauvreté et du manque d’équipements collectifs. Ces premiers résultats sont essentiels pour comprendre les formes d’exclusion selon les pays et servent à préparer des études de cas et à formuler des recommandations de politiques qui aideront les décideurs dans l’élaboration de politiques sociales adéquates.

Figure 3: Exclusion humaine en Zambie (2007-2013)

L’IADS en Zambie

Valeur de l’IADS 2013

2007

Source: Commission économique pour l’Afrique (2015).

E. L’Indice africain de développement social:

un outil pour une cartographie efficace des politiques

En prolongement de ce travail, les données historiques de l’Indice pourront fournir des informations cruciales sur les tendances de l’exclusion humaine et les facteurs de changement à travers le temps. La Commission économique pour l’Afrique est ainsi en train de mettre au point un cadre de cartographie des politiques se servant des résultats de l’Indice pour évaluer l’efficacité des politiques sociales destinées à réduire l’exclusion et en assurer le suivi, qui sera indispensable pour repérer les choix de politiques inclusives qui peuvent être intégrées dans les plans nationaux et infranationaux de développement.

La présente note d’orientation se fonde sur un rapport intitulé: « Mesure de l’exclusion humaine dans une optique de transformation structurelle: l’Indice africain de développement social » (Commission économique pour l’Afrique, 2014).

Bibliographie

Commission de l’Union africaine et Commission économique pour l’Afrique (2013), Position commune de l’Afrique sur le programme de développement pour l’après-2015, Addis-Abeba.

Commission économique pour l’Afrique (2012), Rapport sur les OMD 2012: Évaluation des progrès accomplis en Afrique dans la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, en collaboration avec la Commission de l’Union africaine, la Banque africaine de développement et le Programme des Nations Unies pour le développement, Addis-Abeba.

Commission économique pour l’Afrique (2013a), Suivi de l’évolution de la situation macroéconomique et sociale en Afrique de l’Est en 2012-2013: Vers une forte croissance de qualité et une transformation structurelle, Bureau sous-régional pour l’Afrique de l’Est, Kigali.

Commission économique pour l’Afrique(2013b).Le coût de la faim en Afrique, en collaboration avec le Programme alimentaire mondial et la Commission de l’Union africaine, Addis-Abeba.

Commission économique pour l’Afrique (2014), Mesure de l’exclusion humaine dans une optique de transformation culturelle: l’Indice africain du développement social, Addis-Abeba.

Programme des Nations Unies pour le développement (1990), Rapport sur le développement humain, New York.

L’INDICE AFRICAIN DE DÉVELOPPEMENT SOCIAL:

Mesurer l’exclusion humaine dans une optique de transformation structurelle

Références

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