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O F ILLINOIS
PRESENTED BY THE MINISTRY OF
FOREIGN A F F A
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SOF THE
FRENCH GOVERNMENT
1938
32.2>.Q>4,4-
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UNIVERSITY OF ILLINOIS LIBRARY AT URBANA-CHAMPAIGN
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L161—0-1096
L’ÉLECTION
L’ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE
EN 1849
>r .... ' . ''
i
/
/
BIBLIOTHÈQUE D’HISTOIRE MODERNE
.L’ÉLECTION
DE
EN 1849
ESSAI D’UNE RÉPARTITION GÉOGRAPHIQUE DES PARTIS POLITIQUES EN FRANCE
PAR
GASTON GÉNIQUE
PROFESSEUR A i/ÈCOLE COLBERT
PARIS
F. RIEDER & C
ie,ÉDITEURS
7, PLACE, SA1NT-SULP1CE.
—
VIe 1921?
/
PRÉFACE
La
présente étude a été faite sur les indications et sous la bienveillante directiond’un maîtreéminent
etaimé,M.
Charles i^gignobos.Nous
tenons à luitémoigner
notre profonde grati- X tude : nous lui devons l’idée de ce travail nouveau, qui^ pourra
être le point de départ et le type d’une série de tra-0
vaux
semblables.Pour
lapremière
fois en effet, se trouve éta- blie, avec des garanties,non
pas absolues certes,mais
presquev "suffisantes,
une
répartitiongéographique
des partis politi- ques ; elle estrendue
sensiblepar une
carte de la France,un
plan de Paris, et des tableaux régionaux.1849 peut être considéré
comme une
date initialeau
point de^ vue
électoral.Le
suffrage universel a été décrété le 5mars
1848; il aété appliquéaux
électionsdu
23 avril suivant,mais
dansune
véritableconfusion politique:tousles candidats,même
N les monarchistes, se sont présentés avec l’étiquette républi- caine ; ceux qui ont été élus, l’ont été sans discernement et presque sans lutte, d’enthousiasme.
En
1849au
contraire,après lesjournées de juin 1848, après l’élection de Louis-Napoléon Bonaparte le 10décembre,
après la constitutiondu
ministère^-réactionnaire Odilon Barrot, les députés de l’Assemblée consti- tuante ont pris nettementposition. Ils ont
formé
et organisédes partis politiquesdansle pays. Les électeurs, éclairés, sollicitéspar les uns et par les autres,ont su quelle politique suivraient les différentscandidatsqui briguaient leurs suffrages.
Nous
trou-^vons
donc dansles résultatsdu
scrutindu
13mai
1849, lapre- îière expression significativedu
suffrage universelen France.I
026
i98
Avec
le mérite et l’intérêt de la nouveauté, notre travail en a les imperfections.Nous
avonsrencontrébeaucoup
de difficul- tés ; nous ne les avons résoluesque
partiellement. Il faut con- sidérercetteétudecomme un
étatdes connaissances surla ques- tion.Nous
l’avons divisée en trois chapitres.Lesdeux
premiers, sur la division et l’organisation des partis avant les électionsdu
13mai
1849 et sur l’actiondu gouvernement
etdu
clergépendant
la période électorale,formentune
sorted’introduction.Ils ne sontpas complets; ilsindiquent cependant, avec plusde précision peut-être
que
lesdéveloppements
souvent plus éten- dus des histoires générales,comment
fut préparéel’élection de l’Assemblée législative. Ils fournissent en quelque sorte l’ex- plication des résultatsélectoraux consignés et interprétés dansletroisième chapitre. Ce dernier chapitre retracela répartition
géographique
des partis ; ildonne
le véritablecommentaire
des cartes et des plans.En
établissant cette statistique,nous
n’avons pas tou- jours atteint la stricte exactitude et la précision désirée.Pour
classer avec sûreté tous les candidats, il eût fallu pouvoir dé- pouillerles
journaux
locauxqui, seuls,permettent deconnaître, à cette époque, la vie politique dans les départements. Maisüs
sont disséminés dans les bibliothèques de province.Pour
le quart environ des procès-verbauxdes électionsdans les dépar- tements, lenombre
des votantsn’estpas indiquéetilestimpos-sible, avec les résultats multiples
du
scrutin deliste, deledé- terminer exactement L’attribution des représentants républi- cains au parti constitutionnelou
au partimontagnard
a été difficile : lesdeux
groupes se sont unis dansun grand nombre
de départements,pour
faire bloc contre leurs adversaires ; le parti de l’Ordre et sesjournaux
les ont confondus à dessein ; leurs élus ont voté dans lemême
sens sur toutes les grandes1. Cf. la liste de ces départements et le procédé employé pourdresser leur carte politique,dansl’explicationdela cartedonnée àla findecetteétude;sile
nombre des votants manque sur un assez grand nombre de procès-verbaux, c’estque lesbureaux de recensement ne se trouvant en présence d’aucune pro- testation, ne se sont pasdonné la peine de totaliserles bulletins de vote.
PRÉFACE 3 questions politiquesdébattues
par
l’Assembléelégislative.D’au- tre part surles candidatsnon
élus, nous n’avons, la plupartdu
temps,que
les appréciations desjournaux
de Pariset cesappré- ciations peuventêtre erronées. Cependant,chaque
foisque
nous avonspu
vérifier les indications desjournaux
parisiens surlesdocuments
(protestations, manifestes,journaux
locaux) conte- nus dansun
certainnombre
de dossiers électoraux, nous lesavons toujours reconnues exactes.
Le nombre
des voix obtenues parchaque
parti dans les arrondissements de Paris et dansles départements a été déter-miné
par de longs et multiples calculs. Leurs résultatsnous
ont servi de basepour
figurer la proportion des partis sur les cartes, plan et tableaux.Pour
rendre cette proportion très sensible,nous
avons hésité entre divers procédés et nous en avons essayé plusieurs.Nous
avons adopté celui des colonnes verticales divisées en carrés égaux, indiquant tous lemême
nombre
devoix, parcequ’il nous asemblé
le plus simple et le plus représentatif. Ilpermet
de déterminer facilementun
cer- tainnombre
de régions politiques. Il faut entendre par là des portionsdu
territoire françaisoù
le rapportentrelespartis est àpeu
près égal,où
lesmêmes
partis ont obtenu des majoritéset des minorités équivalentes. Ces divisions ont reçu,
pour
être renduesdistinctes, desdénominationsgéographiquestrèsgéné- rales.Tels ont été nos tentatives et nos procédés de travail; puis- sent-ils être dequelque utilitéà ceuxquivoudront établir
pour
d’autresépoques
la répartitiongéographique
des partis poli- tiques en France.BIBLIOGRAPHIE
I.
- SOURCES
1° Manuscrits
Les
dossiers des élections de 1849, Archives de laChambre
des députés, cartons
A
182, 183, 184, 185.Ces dossiers contiennent : 1° le procès-verbal rédigé par le
comité de recensement de chaque départementqui
y
aconsigné:le
nombre
des inscrits, presque toujours(ilmanque
dans 16 dé- partements) lenombre
totaldes votants, la liste des élus et des autres candidats, avec lenombre
de voix obtenues par chacun d’eux et, s’ily
avait lieu, les protestations reçues; 2° les circu- laires des préfets et leurs réponses au ministre de l’Intérieur.Dans un
grandnombre
de dossiers se trouve le tableau des inscrits de chaquecommune du
département.Dans
quelques dossiers,les procès-verbauxsontaccompagnés du
texte des pro- testations parvenues au comité de recensement et aussides piè- ces (affiches, pamphlets) quevisent les protestations. Ces docu-ments
permettent d’attribuer, avec certitude, à l’un despartis, des candidatsnon
élusdu
département.Huitdossiers d’élections sont déposés
aux
Archives nationalesF
lcIII, cartons 3, 4 et 5 des séries départementales suivantes:Ardennes,
Aude,
Aveyron,Ille-et-Vilaine,Saône-et-Loire,Deux-
Sèvres, Tarn-et-Garonne, Vendée.Ce
sontlesdoubles de huit des dossiers qui se trouvent aux Archives de laChambre
; ils con- tiennent lesmêmes
pièces, sauf les protestations et les docu-ments
s’y rattachant.BIBLIOGRAPHIE 5
2° Imprimés
Les plus importantes
parmi
les sources imprimées sont lesjournaux :
Le Moniteur
Universel (Bibl. nat.,Le
3, 114) fournit d’abon- dants renseignements.Dans
lesnuméros du
30mai
au 8 juin 1849,aucompte
rendudes séancesde l’Assemblée consacréesàla vérification des pouvoirs,on
trouve : lenombre
des inscrits et desvotantsdans chaque département,—
lesnoms
des élus et lenombre
des voix qu’ils ont obtenues,—
lenom du
candidat qui suitimmédiatement
le dernier élu et lenombre
de voix qu’il a obtenues. Ces indications figurent pour la moitié environ des élections des départements.Pour
les autres, sans doute par la fautedu
rapporteur, lenombre
des inscrits ou des votants,ou
le
quantum
des voix données à chaque élu, oumême
tous ceschiffres,
manquent. Le compte
rendu des débats de quelques élections contestéescomprend
la publication de documents, lus à la tribune,qui montrent la pression exercée dans les départe-ments
par lespréfets et le clergé, dansl’armée par les officiers.Dans
lesnuméros du
8 au 30 juin 1849, aucompte
rendu des séances del’Assemblée,on trouvela publicationdes votes desre- présentants sur les grandes questions soumises, dès sa réunion, à l’Assemblée législative. Cette publicationpermet
de rattacher, avec certitude, lesreprésentantsaux
différents partis.A
côtédu
journal officiel, il faut consulter les feuilles politi-ques qui renseignent sur l’activité des différents groupes.
Le
parti réactionnaire est représenté surtout partroisorganes:
U
Univers (Bibl. nat.,Le
2,1368) publie les manifestesdu Co-
mitéélectoralde la libertéreligieuse(comité catholique), etrendcompte
desélections; ses chiffres sontquelquefoisinexacts, mais
la caractéristique, dontilfait suivre chaque liste, facilite l’attri- bution des candidats
aux
divers partis.Le
Constitutionnel (Bibl. nat.,Le
3, 1055) publie lesmanifes- tesdu Comité
dela ruede Poitiers etsa correspondance aveclesComités départementaux qui dépendent de lui. 11
donne un compte
rendu des élections analogue à celui deV
Univers.L'Ordre(Bibl. nat.,
Le
3, 2036)publielesmêmes documents
queLe
Constitutionnel et fournit des renseignements analoguesaux
siens.
Troisjournaux également renseignent surleparti républicain:
Le
National (Bibl. nat.,Le
8, 1239) publie les manifestes
du Comité
desAmis
de laConstitution, les listes des candidats répu- blicains et montagnards.Ildonne un compte
rendu des électionsmoins
complet que ceux desjournaux réactionnaires.Le Temps
(Bibl. nat.,Le
2, 2013), républicainprogressiste,four- nit lesmêmes
renseignementsqueLe
National.La
Presse (Bibl. nat., Le*, 1416), journal républicain indépen- dant,donne
lesmêmes
renseignements queLe
National etLe
Temps
; soncompte
rendu desélections est plus complet.Un
seul journal apporte des indications utiles sur l’activitédu
parti
montagnard
:Le
Peuple (Bibl. nat.,Lc
s, 1663), socialiste, publie les mani- festesdu
Comité dèmocratique-socialiste etun compte
rendu succinct des élections1.Les renseignements desjournaux sont complétés parune série
de pamphlets et de manifestes dont on trouvera la liste dans le
tome IV du
Catalogue général de l’Histoire deFrance
de la Bibliothèque nationale. Les pamphlets,œuvres
individuelles, ne sont presque d’aucun intérêt pour le sujet traité. Les manifestes font connaître les idées, les projets et Faction de chaque parti.Ceux
qui ontpu
être utilisés sont cités au coursdu
travail.IL
— TRAVAUX
Georges
Weill,
Histoiredu
parti républicain en hrance de1815
à 1870, Paris, 1900, in-81’.Documents
et renseignements surlaformation despartisrépublicainetsocialiste avantlaRévo-
lutionde 1848, surlaconstitution etl'évolutiondespartis sousla
1. Parmilesjournauxdépartementaux,ceux du département delaMarnesont lesseuls que nous ayonspu consulter, ilsmontrent ^organisation et l'activité des grands partispolitiques dans undépartement.
LeJournal de la Marne, Châlons-sur-Marne(Bibl. municip. de Châlons-sur- Marne),réactionnaire,publieles manifestesdu Comité du Conseil généraletdu Comité dupartidel'Ordrequiluia succédé;iltient ses lecteursaucourant des idées, projets et actesdu Comitéde larue dePoitiers.
Le Messager,Châlons-sur-Marne(Bibl.municip.deChâlons-sur-Marne), répu- blicain,publieles manifestesdu ComitédesAmisdelaConstitution,lespièces constatant la scissionqui s'est produite, dansle département, entre les Répu- blicains-constitutionnels et lesMontagnards.
BIBLIOGRAPHIE 7 seconde République et particulièrement
du
parti républicain- constitutionnel etmontagnard
(M. Georges Weill ne distingue pas).George
Renard,La deuxième
républiquefrançaise1848-1851
,dansla collectionde
T
Histoiresocialiste, 1789-1900, publiée sous la direction deM.
Jean Jau ès, Paris, 1907, gr. in-8°.Etude
dela préparation des électionsde 1849; citationde pamphlets élec- toraux
; reproductionde gravures concernantlapériodeélectorale.
André
Lebey, Louis-NapoléonBonaparte
et le Ministère Odi- lonBarrot 1849, Paris, 1912,in-8°.Examen
de la préparation etdu
résultatdes élections; état moral et
économique
dela France à cette époque; action des partis (comités,programmes,
propa- gande); interventiondu gouvernement
; conséquences des élec- tions.L’ÉLECTION DE
L’ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE EN 1849
1
LES PARTIS
AVANT LES ÉLECTIONS DU
13MAI
1849Trois partis sonten présence
aux
élections de 1849 : le parti del’Ordre,leparti républicain-constitutionnel et le partimon-
tagnard. Cespartis, àpeinedistincts
pendant
lerègne de Louis- Philippe, sesont définitivement constitués sous l’influence desévénements
politiques de l’année 1848 et des premiersmois
de 1849.Les diverspartis monarchistes et le parti catholique, divisés sous le règne de Louis-Philippe, sont attachés
aux mêmes
prin- cipes essentiels, politiquesou
sociaux : ils veulentque
le gou-vernement
soit fort et qu’il soit réservéaux
privilégiés de la fortune,que
l’organisation dela société restefondée surla pro- priété et sur l’entière liberté économique. Ils sont susceptibles de s’unir contreun danger commun.
Le
parti républicain, à peine représenté à laChambre
des députés, seforme
en dehors d’elle.Pendant
les premières années de laMonarchie
de Juillet,ilestencadré dans des socié- tés publiquesou
secrètes1; desjournaux propagent
ses idées.Dès
1832,on remarque
dans les sociétés républicaines Aide- l.Le développementdes partis républicainet socialiste est exposéparGeor- ges Weill,Histoiredupartirépublicainen Francede1815 à 1870, Paris, 1900,in-S».Létude des sociétésrépublicainesse trouve dansles chapitres III etIV.
toi, le cielt'aidera, Les
Amis
de la Constitution,La
Société des droits del’homme
,une
divergence de vues entre lesmodérés
résignés à lapropagande
et les avancéspartisans de la révolu- tion.Après
les lois de 1834quisuppriment
les sociétés politi- ques, les sociétés secrètes (communistesou
socialistes) subsis- tent seules; c’est dans lesjournaux que
réside la viedu
parti.Deux
grandsjournaux
parisiens,Le NationaldirigéparArmand
Carre!, puis par
Armand
Marrast, etLa Réforme
dirigéepar
Ledru-Rollin,sedisputentla clientèlerépublicaine.Le
National,modéré, ne s’attache qu’aux réformes politiques;
La Réforme
,plus avancée, liée
aux
sociétés socialistes, jointaux
réformes politiques des réformes sociales. C’estun premier
dualismeau
sein
du
parti républicain; il s’accusera plus tard dans la pra- tiquedu
gouvernement. Mais cette division primitive n’existe qu’à Paris et à Lyon,àla têtedu
parti.Trèsfaibles enprovince, les républicains restent unisets’efforcent de recruterdes adhé- rents.Leur
propagande, dans certains départements, est très active.M.
GeorgesWeill
1donne une
liste deces départements.Ilyaintérêt à lareproduireici,parce
que
laplupartdes dépar- tements cités ou bien ont élu des républicainsen 1849,comme
l’Ain, leCantal, la Creuse, la Corrèze, leCher,la
Dordogne,
le Gers, le Nord, les Pyrénées-Orientales, le Haut-Rhin, le Bas- Rhin,le Rhône, la Saône-et-Loire, le Tarn,le Tarn-et-Garonne, la Haute-Vienne,ou
bien, tout au moins, ontopposé
au parti del’Ordre d’importantes minorités républicaines,tels:lesBou-
ches-du-Rhône, la Côte-d’Or, le Gard, l’Indre, le Loiret, laMo-
selle. Sont encore cités, maisn’entrent pas dans ces
deux
caté- gories : l’Aube, le Calvados, la Charente-Inférieure, l’Eure, la Haute-Garonne, la Loire-Inférieure, la Meurthe, le Pas-de-Ca-lais, la
Somme,
l’Oise, les Deux-Sèvres. Il y a, dans lesdeux
premièreslistes,une ébauche
dela ligne républicaine de l’Est et de la région républicainedu
Massif Central.Malgré
ces tendances, cesjournauxquiprennentposition,cette activité déployée, il n’y a pas, en 1848, de partis constitués, avecun programme
nettement défini,une
direction centrale à Paris, des organes d’exécution et depropagande
en province,une
presse attitrée.1. Oavr. cité,chap. III.
LES PARTIS AVANT LES ÉLECTIONS 11 Ce défaut d’organisationexpliqué pourquoi, aprèslaRévolu- tion defévrier,le 23 avril 1848, l’élection de l’Assembléecons- tituante se fit dans la plus
grande
confusion en province.Pres-que
seuls, Paris etLyon
furent le théâtre de véritables luttes politiques entre républicains et socialistes.La
plupart des dé- partements élurent, sans discernement, des candidats notables qui, à tort ou à raison, s’intitulèrentrépublicains.Dès
le début,on
distinguedans l’Assembléeune
fortemino-
rité réactionnaire,
composée
de monarchistes, qui se sont dissi-mulés
sous l’étiquette républicaine,— une
majorité républi- cainemodérée,
qui veut laRépublique démocratique
sans révolution sociale,— un groupe
socialistepeu nombreux.
Après
les journées de juin 1848, sous legouvernement du
général Cavaignac,le parti confus des républicains se disloque.La première
et unique réuniondu
Palais National se divise en réunionsdu
Palais National, de l'Institut,du
Palais desBeaux-
Arts,delaMontagne
(groupe des représentantsaux
ten- dances socialistes) *.L’élection de
Louis-Napoléon
Bonaparte à la présidence de la République, sous les auspicesdu Comité
monarchiste de la rue de Poitiers, apour
conséquence la formation d’une droite très puissante à l’Assemblée:aux
monarchistes sejoignent des républicainsmodérés
qui désirent avant tout le maintien de l’ordre. C’est cette droite qui, souslenom
departi de l’Ordre, soutient le ministère orléaniste-catholique d’Odilon Barrot, choisi par le président de la République, endécembre
1848.Contre le ministère se dresse l’opposition
démocratique
d’ex-trême-gauche
qui, jusqu’à cemoment,
necomprend que
des socialistes.Dès
janvier 1849,elle s’accroîtdes républicains atta- chés avant tout aurégime
républicainet partisans de quelques réformes sociales. Cette opposition, reprenant l’étiquettedu groupe
le plusavancé de laConvention,s’intitule laMontagne.
Entre le parti de l’Ordre et la
Montagne,
subsistent les débris de la majorité républicaine despremiersmois
de 1848.Groupés
autour de Cavaignac, fidèlesaux
principes et à la lettre de la Constitution, ces républicains sont desadversaires irréductibles de lamonarchie comme du
socialisme. Suivantque
lamonar-
1. Georges Weill, ouvr.cité,chap. IX.
LES DE 1849
chie ou le socialisme leursemblent
menacer
laRépublique,ilscombattent ou soutiennent le
gouvernement
d’Odilon Barrot.De
cette façon, ils sont toujours les arbitres des décisions de l’Assemblée. Ils seront appelés, dans ce travail, républicains- constitutionnels ’.Tels sontles trois partis que, dès le
mois
de janvier 1849,on
distingue àl’Assembléeconstituante.Tous
trois disposentd’une organisation électorale etentretiennentune
active propagande.Il n’y a pas encore de parti bonapartiste. Les bonapartistes, suivantlaconduite
du
prince-Président, agissentde concertavecle parti de l’Ordre, confondent dans les listes électorales leurs
noms
avec les siens.Au
derniermoment,
la listedu
parti de l’Ordre s’adjoint à Paris «MM.
Louis-Lucien Bonaparte et legénéral Piat proposés par lecomité napoléonien dont legéné- ral Piat est le président » a.
Le
parti del’Ordre apour
centre etpour
organe directeurleComité
de larue de Poitiers.La
composition de ce comité, ses idées, son organisation, ses relations, sa presse, sont cellesdu
parti de l’Ordre. Faire l’étude
du
Comité, c’est faire l’étudedu
parti.
Le Comité
de la rue de Poitiers est la réunion de tous les chefs des groupes monarchistes etdu
parti catholique quis’estformé
sous le règne de Louis-Philippe : les légitimistes Berryeret dela Redorte,les orléanistes Molé, Casimir-Périer,
Bugeaud
et Thiers, les bonapartistes de
Morny,
de Persigny, le général Piat etRouher
3, le catholique de Montalembert. Ces groupes,1.Cf.plus loin, dans l'exposé duprogramme etdel’organisation duparti, la justificationdeceterme.
2.L’Univers,11 mai1849.
3. La présencedeces bonapartistes notoiresdans leComité delaruede Poi- tiersestune indication très précisede la position prise parleparti bonapar-
tiste: iln’agitpasséparémentetpoursonproprecompte danslacampagneélec- torale de 1849. Le Comitéélectoralbonapartisteétabli rue Montmartre,qui a pour présidentle général Piat et pour vice-présidents Fialin de Persigny et
ArmandLaity,officiers d’ordonnance du Président de la République, lancele 8 avril unecirculaire,publiéepar Le Constitutionnel du10 avril 1849, oùil dit:
«... Imitons le noble exemple duPrésidentdela République. Bonapartistesde
la veille, soyonslespremiersàrenonceràces distinctions departis qui neser- ventqu’àperpétuer leshainesetà exciterlesméfiances funestes...Necraignons donc pas desacrifier àl'intérêtpubliclesouvenir desgriefs etdes dissidences
LES PARTIS AVANT LES ÉLECTIONS 13
« nuancesdiverses
du
partimodéré,
quiont des racines égale-ment
fortes dans le pays », après « s’être fait des concessions réciproques..., ontformé un Comité
mixte » \ Contre leGou- vernement
républicain qui s’estmaintenu
jusqu’endécembre
1848, toutes les forces antirépublicaines se sont groupées, ou- bliant lesidées qui les divisentpour
ne songer qu’à leursinté- rêtscommuns. Le Comité
de la rue de Poitiers estun Comité
réactionnaire, en ce sens qu’il veut réagir contre l’esprit de réforme des républicains. Sesmembres
et ses partisans sont résolus àempêcher
laRépublique
de porter atteinte «àlareli-gion qui doit êtrerévérée dans son inviolabilité, àlapropriété, cette institution qui date des sociétésrégulières » 2. Ils veulent s’opposer en bloc,
non
seulement à toute tentative de révolu- tion,mais
encore de réformedémocratique
qu’ils qualifient désordre.Leur
principecomme
leur but est le maintien de l’ordre, ordre social et ordre public.A
ce principe d’ordre s’ajoute, dans leurs ouvrages de propagande, leprincipe demodération
qui a lemême
sens à l’égard des idéesque
le principe d’ordre à l'égard des actes. Lesidéesne
doivent pas êtrerévolutionnai- res,c’est-à-dire faireentrevoirun changement
derégime
social.Les
membres du Comité
de larue dePoitiers se sont autorisés de ce principe demodération pour
s’intitulermodérés etmême
républicains modérés. C’est ainsi qu’ils sont qualifiés dans les du passé; etassocions-nous franchement à tous les éléments d'ordre de notre pays.Déjànous avonsdonnélepremierexempledecet espritd'unionetdecon- ciliation par l'adjonctiondeplusieurs d’entrenous au Comitédela rue de Poi- tiers...»
On trouvera laconfirmation et l'explication de cette attitudedu partibona- partistedans lalettre du prince-présidentà son cousin,dansnotre chapitresur lapression du Gouvernement et l’actiondu clergé dans lesélections.
L'action des Comités bonapartistes dissidents fut àpeu près nulle. Cf. à ce sujetA.Lebey, Louis-Napoléon Bonaparteet leMinistèreOdilon Barrot, Paris, 1912, in-8,p. 297etsuiv.
Ces noms sont fournis parune brochure de propagande: Comité électoral de la rue de Poitiers. Appel aux bons citoyenspour arrêter les ravages de la pressesocialiste, Paris, 1849,in-8°, (Bibl. nat.,Lb55,424).
1.Extraitsd’unebrochuresignéeAlbertduBoys,Sur lerôledesdépartements danslesprochainesélections, Paris, 1849, in-8° (Bibl. nat.,Lb55,450), reproduc- tion d'un articleparu dansL'Ami de laBeligion du 27mars 1849.
2. Extrait duManifeste duComitédela rue de Poitiers publié dans L’Ordre du 25 avril 1849.
LES DE 1849
comptes
rendus desélectionspubliéspar lesjournaux
Le Cons- titutionnel,L’Ordre, L’Univers.Ceterme
pourraitaisémentcréerune
confusion avec lesrépublicainsdu groupe
Cavaignac. Maisle parti
du Comité
dela rue de Poitiers n’est, en réalité, exac-tement
caractériséque
par lenom du
parti de l’Ordre,nom
qu’il s’est
du
restelui-même
donné.Le Comité
de la rue de Poitiers,composé
demembres
de l’Assemblée constituanteou
de notoriétés politiques, estun
comité destiné à diriger lacampagne
électorale dans toute la France : il s’intitule Comité électoral.Dans un
manifeste aux départements,ilexpliqueainsile rôle qu’il doitremplir : «Nous
avons entendu partout exprimer le désir de voir seformer un
centre
commun où
l’onpût trouver au besoindes informations, des conseils, desencouragements
à l’union etnous
avons tra- vaillé à l’établir » Ildonne
la direction politique et tactique àun
comité parisien et à des comitésdépartementaux
formés surson initiativeou
tout aumoins
avec l’assurance de son con- cours2. 35 départements le consultent sur leurs listes électo- rales3
.
Le
comitédu
Cher, à peine formé, « semet
encom-
municationimmédiate
avec lui » *.Le
comité centraldu département
de laMarne
« se constituepour
éviter la disper- sion des suffrages...; il fait appel au concours sincère de tous les citoyens qui serecommandent
par la sagesseetlamodéra-
tion de leurs opinions politiques et sont disposés à unir leurs efforts pour faire prévaloir les principes conservateurs et re- pousser ces doctrines si audacieusement
répandues
qui tendent au bouleversement de la société » 5.Les comités
départementaux
subalternes appliquentdonc
le principe d’union qui faitla forcedu Comité
de la rue de Poi- tiers. Ilsluiempruntent
aussi sa hiérarchie en comité et sous- comités.Dans un
certainnombre
de départements (Marne6,1. Manifeste du Comitéélectoraldelà rue de Poitiers, publié dans Le Cons- titutionneldu 18 mars 1849.
2. Le Constitutionnel, 5 mars 1849.
3. Id., 7 mai 1849.
4. Id., 13 mars 1849.
5. Manifeste du comitécentral électoral du département delaMarne, publié dans leJournal de laMarne du28 mars1849.
6. Manifeste ducomité central électoraldu départementdelaMarne.
LES PARTIS AYANT LES ÉLECTIONS 15 Haute-Marne, Côtes-du-Nord,
Cher
\ entre autres),un
comité central estformé
par lesmembres du
Conseil général.Au
des- sous de ce comité central sont créés des comités cantonauxcomposés
des délégués descommunes.
« Les comités canto-naux
correspondent avec le comité central, lui fournissent des renseignements sur les candidats et reçoivent enéchange
lescommunications
decedernier comité 2. »A
Paris, le Comité de la rue de Poitiers créeun
organe électoral particulier l'Union électorale.L’Union
électorale, contrairement à ceque
l’on a plusieurs fois affirmé,nes’occupeque
desélections parisiennes.Les 35 délégués
du Comité
de la rue de Poitiers dirigent lacampagne
électorale3; 64 délégués éluspar
les 64 bataillons de la garde nationale désignent 50 candidats, sur lesquels lescompagnies
dela garde nationale choisissent les 28 qui seront présentésaux
élections aunom
de l’Unionélectorale4
.
Telle est, dans tous ses détails, l’organisation
du Comité de
la rue de Poitiers et, par suite,
du
parti de l’Ordre.Le
parti de l’Ordre est en outre soutenupar
leComité
électoral de la libertéreligieuse qui agit de concert avec leComité
de la rue de Poitiers. C’est l’organe électoraldu
parti catholique dirigé par Montalembert. Il est en relations, danschaque
départe- ment, avec « des correspondants habituels, des électeurs in- fluents et desmembres du
clergé »s. Il exerceune
action di- recte sur les élections départementales ; il indique dansune
circulaire quels représentants de la Constituante il faut con- serverou
écarter, d’après leurs votes surun
certainnombre
de lois et de projets.La
liste des lois et projets, qui servent de critériumpour
les électeurs, estdonnée
à la suite de la circu- laire, ainsiqu’un tableau desreprésentants qui ont votépour ou
contre6. Cesloisou
projets serapportentàlalibertéd’enseigne- ment,au
droit au travail, à l’ordre et àla sécurité publics.1.Moniteur universel, n°3 du30 maietdu 1erjuin1849, comptes rendus des séances de l’Assemblée, débats surlavérification des pouvoirs.
2. Manifestedu comité central électoral du département delaMarne.
3. Le Constitutionnel, 5 mars 1849.
4. L'Ordre, lst mai 1849.
5. Extrait de lacirculaire duComité électoral de laliberté religieuse,publiée dans L’Univers du 28 avril 1849.
6.Cetableau est reproduit surun supplémentspécial de L'Universdu28 avril 1849.
Ainsi encadré, le parti de l’Ordre,
pour
répandre ses idées,augmenter
lenombre
deses adhérents et déterminerun grand
courant d’opinionen sa faveur, «organisaun
système de publi- cations àbon marché
». Ces publications devaient « fairecom-
prendreaux
populationslaborieuses dans quelabîme
de misère etd’immoralité,lesdoctrines, dites socialistes,tendentàlespré- cipiter » i.Le Comité
de la rue de Poitiers ouvrit,pour
cette propagande,une
souscription dont le produit devait serviren
même temps
« à encourager, à favoriser,soit à Paris,soitdans
les départements, toutes les combinaisons qui naîtraient de la
même
pensée et tendraient aumême
but » a. L’intérêt qu’on porta à cette souscription et le succès qu’elle obtint sontattes- tés par cet articledu
Journalde laMarne
3 : «La propagande
antisocialiste organisée par le
Comité
de la rue de Poitiersprend une
heureuse extension.Dans
les trois premiers jourselle a recueilli la
somme
de 108.000francs.Le
quatrièmejour, lessouscriptions étaientenplusgrand nombre
encore...M.
Cavé,membre du
ConseilgénéraldelàSeine-Inférieure, vient d’adres- ser à M. Barbet, président de ce Conseil, laproposition defor-mer un
comité de conseillers généraux, lequel serait chargé d’organiser, dans les départements, la souscription nationale ouverte à Paris parleComité
électoral dela ruede Poitiers4. »Pour
seconder et accroître sapropagande
particulière, leComité
de larue de Poitiers rallia àses projets toute la presse antirépublicaine. Lesjournaux
réactionnairesde Paris, L'Ordreet
Le
Constitutionnel surtout, publièrent ses manifestes et ses circulaires.Le
journal catholiqueL'Univers soutintsa politique et serecommanda
toujours de sonexemple pour
inviter les partisans del’Ordre à se coaliser contre les républicains.Tous
1. Comité électoralde laruede Poitiers.Appel aux bonscitoyens, Paris, 1849, in-8°, (Bibl. nat., Lb55, 424).
2. Id.
3. N° du 5 avril 1849.
4. M. GeorgesRenard,La deuxième républiquefrançaise, Paris, 1907, gr. in- 8°,p.130et 131,indique queleComité delarue dePoitiers ramassaen quelques jours 200.000 francs pour la propagande antisocialiste et qu'il publia ses bro- chures à 550.000 exemplaires.Le Comité voulait donner la peur des rouges (p.141-143).M. André Lebey,ouvr.cité, p. 300, citeplusieursdeces brochures.
Ce sontgénéralementdesdiatribes ou des dialoguesvulgaires oùlesinsulteset lesplaisanteries grossières servent d'arguments.
LES PARTIS AVANT LES ÉLECTIONS 17
le défendirent contre les attaques dontil était l'objet delapart des républicains-constitutionnels.et des
montagnards
et signa- lèrent les «projets révolutionnaires»de cesdeux
partis. Ils les confondirent à dessein sous lenom
de « rouges ».Un
Comité de la presse modérée se créa, à Paris, trois semaines avant les élections, «pour
agir d’uncommun
accord dans la lutte élec- torale qui allait s’engager ». « Il donnait son assentimentaux
motifs qui avaient déterminéla formationdu Comité
de la rue de Poitierset des autres comités institués dansun
but d’ordre et de conciliation *. » Lesjournaux
qui adhérèrent, tous pari- siens,furent:L’Assemblée nationale,Le
Constitutionnel,
Le
Cor-saire,
Le
Courrier français,Le
Dix-Décembre,L’Événement, La
Ga-zette desTribunaux,
Le
JournaldesDébats,Le
Journaldes Villes etdesCampagnes, Le Moniteur du
Soir, L’Opinionpublique,La
Patrie,
Le
Pays,La Revue
desDeux-Mondes,
L'Union,L'Univers2.Un Comité
de lapresse départementale,
formé au
Congrès d’An-goulême
le 15mars
1849, s’inspira « des conseilsdu Comité
de la pressemodérée
de Paris » 3. Il voulut, « organe desvœux
et dessentimentsdelaFrance départementale, apporter de tous les points
du
territoire national l’expression des volontésdu
pays et prémunir, autantque
possible, par sonexemple
et ses avertissements, Paris contrele retour desfaiblesses dontil nous adonné
le triste spectacle » 4. « C’est l'expressiondu grand mouvement
de la province contre Paris 5. »La
provincemodé-
rée veut
triompher
des socialistesde
la capitale.Le
parti de l’Ordre estdonc un
parti organisé aumoment
des élections
du
13mai
1849. Il aun programme
accepté par tous sesmembres, un
comité directeur, des comités et sous- comités d’action électorale,une propagande
très développée,une
presse parisienne et départementale unie et dévouée. Il1.Manifeste du Comité delà pressemodérée,cité parL’Événement du20 avril 1849 (Bibl. nat..Le®, 1931).
2.Id.
3. Termes employés dans la convocation du Congrès d'Angoulême pour la formation d'un Comité, publiée dans LeConstitutionnel du6 mars 1849.
4. Id.
5. A. du Boys,Sur le rôle des départements dans lesprochaines élections.
Extrait de L’Ami de la Religion du 27 mars 1849, Paris, 1849, in-8° (Bibl. nat.,
Lb5S, 459).
jouit ainsi, dans le pays, d'une influence considérable,
rendue
prépondérante par la faiblesse de ses adversaires.Le
parti républicain-constitutionnel aune
organisationana- logue à celledu
parti de l’Ordre, maismoins
forte etmoins
étendue.11 a reçu des appellations diverses : à l’Assemblée, parti Gavaignac,
du nom
de son chef, quelquefois, dansLe Temps
,parti progressiste, dans les
journaux
socialistes, parti modéré.Ce dernierterme, dont le sens est très juste, pourrait, si l’on s’en servait,
amener
des confusionsetfaire classerdansleparti républicainbeaucoup
demembres du
parti de l’Ordre. Les journaux de ce parti, en effet, ont abusé à dessein de la quali- fication demodéré;
ilsl’ontemployée pour
désignerlaplupart de leurs candidats et les faire ainsi profiter d’une équivoque.Pour
éviter des erreurs etdistinguerlafraction lamoins
avan- céedu
parti républicain,on
peut luidonner
l’épithète de constitutionnelle. Ellesejustifieparcesfaitsque
leprogramme du groupe
découle entièrement de la Constitution de 1848 et se réfère explicitement àses principes,que
son comité électo- ral directeur portelenom
d'Associationdémocratique desAmis
de la Constitution.
Les
membres
de l’Association desAmis
delaConstitution,le président Bûchez, les vice-présidents Labelonye,Le
Bas,Dau-
phin, JulesGrévy,Degousée, Desmarets, appartiennent augroupe
Gavaignacdans l’Assembléeconstituante.Le programme
del’As- sociationestla conséquence logique de l’œuvregouvernementale
et législative
du groupe
Cavaignac, de juin àdécembre
1848.«
Le
butque
l’Association poursuit, c’est l’exécutionloyale de la Constitution...Le moyen
d’atteindre ce but, c’est, dans les élections qui se préparent, de choisir leshommes
qui veulent maintenirla Constitution, l’exécuter loyalement, enfaire sortir les réformes qu’elle contient engerme,
enun
mot, lesBépu-
blicains l. »
A
Paris, l’Association desAmis
dela Constitution necomprend
pas de Montagnards.En
province au contraire, ses filiales,nombreuses
dans les départements de l’Est etdu
1. Associationdémocratiquedes Amis de la Constitution, n° 31,Paris, 1849, in-4° (Bibl. nat., Lb55, 533).
LES PARTIS AVANT LES ÉLECTIONS 19 Centre, ainsi
que
les sociétés quiadoptent sesprincipes etpor- tent son titre, réunissent souvent-lesmodérés
et lesavancésdu
parti républicain.C’estl’union
que
symbolise Ledru-Rollinaux
électionsdu
13mai
: il est souvent le candidat des républi- cains-constitutionnelset des Montagnards. Cependant, dans cer- tains départements, des scissions se produisent.Le Comité
électoral desAmis
de la Constitutiondu département
de laMarne
adopte strictement les principes de l’Association de Paris etcréedes sous-comités dans tous les cantons *. Mais, à lapremière réunion des délégués, lamajoritédesmembres du
bureau, dont le président,donnent
leur démission « parce qu’ils ont cru reconnaîtreune
manifestation d'opinions socia- listes dans l’expressiondu
vote de la majorité des électeurs convoqués à Châlons...; ilssontconvaincusque
ces tendances...sont incompatibles avec la Constitution de 1848, leur de- vise » 2.
Le Comité
desAmis
de la Constitutiondu
départe-ment
de laMarne
devient alors exclusivementmontagnard, malgré
la conciliation tentée parLe
Messager, après les débatsdu
9mai
1849 sur l’expédition deRome
3
.
En
général, cepen- dant, les comités desAmis
de la Constitution sont républi- cains-constitutionnelsethomogènes
(Aube, Lot, Côtes-du-Nord).Leur
activité,comme
celledu Comité
central, est faible. Ils ne savent pas répondre, avec l’énergie qui conviendrait,aux
re- proches dontle ministèreCavaignac est l’objet.Le Temps blâme
leur inertie, le défaut de netteté de leurs principes et deleurs projets : « Ils font la patte de velours tantôtaux journaux
royalistes, tantôt au Peuple \ » L’association centrale de Paris envoie
aux
départements des manifestes et des circulaires qui guidentdans leur tactique les comités de province.Mais le
grand
appuidu
parti, cesont les organes de sa pro- pagande, lesdeux
grandsjournaux
parisiens,Le
National etLe
Temps. Cesjournaux
publient les manifestes et les circu- laires del’Association desAmis
de laConstitution ;ils essaient de rassurerla bourgeoisie etle peuple descampagnes,
en affîr-1.Le Messager, 13 avril 1849.
2. Lettre de démission du bureau du comité électoral des Amisde la Cons- titutiondu département de la Marne publiée par Le Messager du3 mai 1849.
3. Le Messager, 10 mai 1849.
4. Le Temps, 8mai1849.
LES ÉLECTIONS DE 1849
mant que
les républicains veulent des réformes, maisnon
pasune
révolution. Jusqu’àla publicationde la lettredu
président de laRépublique
au général Oudinot, dans laquelle le prési- dentordonne au
général d’attaquer les républicains deRome,
ilsrespectentLouis-Napoléon Ronaparteet
montrent une grande
confiance dans ses intentions. Ils veulent ainsi persuaderaux
paysansqu’ils sont partisansd’ungouvernement
qui assurel’or-dre avec fermeté. D’autre part, en affirmant leurs sentiments républicains, ils essaient de se rallier lespopulationsurbaines.
Le
parti républicain-constitutionnel est donc, lui aussi, or- ganisé ;mais
il estmoins
actif,moins connu
en provinceque
le parti de l’ordre ; ses journaux ne suffisent pas à la propa-
gande
qu’il lui seraitnécessaire defaire dansles départements.Le
partimontagnard,
ainsi qu’il senomme lui-même,
estformé par
l’union intime des républicains avancés et des so- cialistes : c’est legroupe
des « rouges ».Dans
l’Assemblée, ce parti constituel’opposition irréductible à la politiquedu
président de laRépublique
etdu
gouverne- ment. Ses chefs sont Ledru-Rollin et Félix Pyat.Au
contraire des républicains-constitutionnels, les Montagnards, dans leurprogramme,
vont audelàde la Constitution ; ilsproposent des réformes sociales : réformedu
service militaire (pour suppri-mer
l’inégalité), abolitiondes impôts surles objets depremière nécessité,impôt
progressifsur le revenu net, exploitation par l’Etat des mines,chemins
de fer, canaux,assurances, crédit de l’État.Au
cours de l’année 1848, le partimontagnard
s’était déve- loppé par les sociétés secrètes.Le
décretdu
28 juillet 1848, qui enlevaitaux
clubs le droit de correspondre et de s’affilier entre eux, les avait détruites. L’associationLa
Solidarité répu- blicaine, qui avaitpour
secrétaire Jean Macé, étaitdémocra-
tique etdévouée
au partimontagnard.
Accusée decomplot
parle gouvernement, elle futdissoute, ainsi
que
sesfiliales, parles soinsdu
ministre de l’IntérieurLéon Faucher
etdes préfets, le 10 janvier 1849 '. Elle n’adonc
paspu,comme
on l’a quelque-foisprétendu,dirigerlapréparationdesélections
pour
lecompte
1. La Presse, 28janvier 1849.
LES PARTIS AVANT LES ÉLECTIONS 21
du
partimontagnard
enmai
1849.Quelques
filiales, subsistant encore à l’insudu gouvernement, ou
les débris de ces filiales, ont peut-être participé à lacampagne
électorale.La
société elle-même,supprimée
en droit et sans doute presquecomplè- tement
en fait, n’a pas eu, dans les élections,de rôle national.Aussi, leparti
montagnard
dut créer,au
derniermoment, un Comité
démocratique-socialiste dont la composition est Feffet naturel etdirect de l’union des républicainsavancéset des so- cialistes : «Le Comité unique
résultant de la fusionprend
lenom
deComité
démocratique-socialiste et secompose
des délé- guésdu
Conseil central et de ceuxdu
Congrès national. Les représentants de laMontagne
faisant déjà partiedu Congrès
nationalsont, par celamême,
tousmembres du
comité.Le
co- mité démocratique-socialiste se complète par l’adjonction des délégués des corporations ouvrièresdu Luxembourg
*. » Ce comité organise les élections à Paris. 11 ne crée paslui-même
des sections en province. Maiscelles-ci se fondent dans les dé- partements (Rhône, Saône-et-Loire, Isère), grâce à l’initiative desmembres
des sociétés secrètesprécédemment
dissoutes.Bien
que
tardive, cette organisation électorale, par son activité, devient très influente. C’est elle qui partout combat, avec leplus de vigueur, le parti de l’Ordre.
Le
partimontagnard répand
à profusion des brochures en province,comme
le signaleun
manifestedu Comité
de la rue de Poitiers 2etcomme
le prouvent aussi lenombre
des piècesmentionnées au
Catalogue général de PHistoire deFrance
de la Bibliothèque nationale 3, avec le titreComité
démocratiquesocialiste.
Sa
presse est violente. Elledénonce
avecune véhémente
indignation les dangersque
font courir à laRépublique
et lePrésident de la
République
et le parti de l’Ordre.Le
Peuple, dirigépar Proudhon,
est legrand
organedu
parti etdu
comité à Paris.En
province, toutes les villes importantes possèdentun
journalmontagnard
qui suit fidèlement la politique des journaux de Paris.1. LePeuple, 3mars 1849.
2. Comité électoralde la rue de Poitiers. Appel aux bons citoyens.,., Paris, 1849, in-8° (Bibl. nat., Lb55, 424).
3. TomeIV, série Lb55.