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Bouleverser la GRH après la reprise… et si c'était le bon choix ?

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Academic year: 2021

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Bouleverser la GRH après la reprise… et si c’était le bon choix ?

Lynda Saoudi, Virginie Gallego, Jean-Marie Estève

To cite this version:

Lynda Saoudi, Virginie Gallego, Jean-Marie Estève. Bouleverser la GRH après la reprise… et si c’était

le bon choix ?. COLLOQUE GRH PME MONTPELLIER 2010, Apr 2010, Montpellier, France. �hal-

03037624�

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Bouleverser la GRH après la reprise… et si c’était le bon choix ?

Lynda Saoudi

Enseignante Sup’Exup, doctorante, ERFI, Université Montpellier 1 Faculté AES, espace Richter, Avenue Raymond Dugrand, 34960 Montpellier

Virginie Gallego

Docteur en Sciences de Gestion, ATER, ERFI, Université Montpellier 1 Faculté AES, espace Richter, Avenue Raymond Dugrand, 34960 Montpellier

Jean-Marie Estève

Docteur en Sciences de Gestion, PDG de la SOLATRAG Solatrag, avenue de Chiminie, 34302 Agde cedex

Résumé

Cet article traite de la transmission à une personne physique externe (RPPE) en contexte de

PME. Plus précisément, il s’agira d’identifier et comprendre les choix en matière de gestion

des ressources humaines après la reprise. Nous montrerons que, aussi paradoxal que cela

puisse paraître, le bouleversement de la GRH par le repreneur peut favoriser le succès de la

reprise. Pour ce faire, nous aborderons dans une première partie les spécificités de la RPPE et

de la GRH en PME et dans une deuxième partie, nous présenterons les résultats d’une étude

menée dans une PME industrielle du Languedoc-Roussillon transmise en 2007.

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Introduction

Au cours des dix prochaines années, la Commission Européenne estime qu’un tiers des PME européennes devrait faire l’objet d’une transmission. Nous entendons par transmission, la poursuite d’une entreprise juridiquement autonome par un autre chef d’entreprise. Il en devient le propriétaire et l’exploitant, par rachat, donation héritage, reprise au conjoint ou location-gérance (Article L. 1234-7 du code du travail). Il s’agit d’une étape cruciale de la vie d’une entreprise qui peut compromettre sa pérennité. En effet, de nombreuses difficultés peuvent survenir notamment sur le plan juridique, fiscal ou socio-managérial. Ces difficultés sont d’autant plus importantes lorsque le repreneur est extérieur à l’entreprise

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: il ne connait ni la structure, ni le fonctionnement, ni d’ailleurs les hommes qui la composent. En effet, il peut adopter une stratégie de continuité, en conservant l’essentiel des pratiques du cédant ou mettre en œuvre une stratégie de rupture, en bouleversant l’existant. Dans ce second cas, un changement organisationnel sera à engager et à maîtriser.

Ce dernier aura d’ailleurs des incidences plus ou moins importantes en fonction de la structure et plus précisément de la taille de l’entreprise. Dans une structure de petite taille, il peut être difficile, compte tenu de la proximité des salariés avec le cédant, de faire accepter à l’ensemble du personnel un tel bouleversement. Il semble a priori que la meilleure stratégie soit le maintien de la structure existante pour éviter les conflits avec le personnel en place.

Toutefois, nous irons à contre-courant de cette idée en montrant que le bouleversement notamment de la GRH peut être un facteur de sucés de la reprise. Il convient donc de répondre à la question suivante: en quoi la modification de la GRH peut-elle faciliter la reprise en PME ?

Pour répondre à cette question, il semble nécessaire dans un premier temps de comprendre les spécificités de la reprise par une personne physique externe et dans un deuxième temps de mettre en relief les spécificités de la GRH en PME. Nous proposons donc après une analyse de la littérature à ce sujet, de présenter une étude de cas menée dans une PME transmise en 2007.

1. Gérer l’après reprise…

1.1. Les fondements de la Reprise par une Personne Physique Externe

La reprise est un processus qui, par une opération de rachat, aboutit à la continuation de la vie d’une entreprise, en difficulté ou non, et de tout ce qu'elle contient (structures; ressources humaines, financières, techniques et commerciales) (Deschamps, 2002). La reprise représente un changement de direction, de pouvoir sans que les éléments primordiaux et constitutifs de l’entreprise rachetée ne disparaissent : l’activité de l’organisation continue avec ses moyens matériels et humains et sa clientèle. L’élément du changement n’est que le propriétaire- dirigeant. Haddadj et d’Andria (1998) parlent de transmission externe, qu’ils définissent comme étant un « rachat par une personne physique ou morale qui n’est pas en poste dans l’entreprise ».

1

«Le niveau de risque est quasi nul pour les transmissions familiales ; de même, un ancien salarié de l’entreprise

a deux fois plus de chance de réussir qu’un repreneur extérieur», expliquent Guidici et Coulaud. Cependant ces

transferts d’entreprises se font désormais de plus en plus souvent en dehors du cadre familial, au profit de tiers

soit 59 % des repreneurs sont externes à l’entreprise : ce sont, soit des personnes physiques, souvent d’anciens

cadres dirigeants de Grands Groupes, soit d’autres entreprises.

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Plus précisément, la transmission à une personne physique externe implique un transfert de propriété, de direction et de capital humain :

Le transfert de propriété : il s’agit de la transmission de tout ou partie du patrimoine professionnel, soit à titre onéreux, soit à titre gratuit (cette forme suppose un compromis entre les solutions propres au droit des affaires et celles imposées par le droit de la famille). Ce dernier peut susciter différents problèmes pour l'entreprise :

- Dans le cas d'une cession à titre gratuit, le paiement des droits de succession ;

- Dans le cas d'une cession à titre onéreux, outre les droits de mutation, le repreneur est la plupart du temps obligé de contracter des emprunts pour acquérir l'entreprise

2

.

Paradoxalement, il ne s’agit pas du critère décisif de l’opération de reprise. Il ne suffit pas de détenir la propriété de certains moyens d’exploitation ou d’une certaine quantité de valeurs mobilières pour prendre acquisition de l’entreprise. L’élément le plus important est la direction.

Le transfert de direction : il s’agit de transmettre le savoir stricto sensu (c’est-à-dire les connaissances détenues et accumulées), le savoir-faire (c’est-à-dire l’expérience maîtrisée) et le savoir être (qui se traduit par une compréhension des autres et de la culture organisationnelle) (Mahé de Boislandelle, 1998) du cédant au repreneur. Toutefois, la problématique fréquemment soulevée par les spécialistes du management moderne est que ce pouvoir soit renforcé par le leadership (reconnaissance de compétences managériales par les autres) pour assoir l’autorité du dirigeant.

 Le transfert du capital humain : bien que les experts soient unanimes sur l’importance à accorder à la valeur des équipes, leur savoir faire…, la transmissibilité du capital humain se trouve dans une certaine mesure négligée (Bienaymé, 1981). Or, il n'y a pas de création de richesses sans ressources matérielles, intellectuelles, financières ou autre.

Le succès de ces transferts peut être mesuré par deux types d’indicateurs de succès (Estève, 1997)

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:

- des indicateurs qui reflètent la pérennité de la structure organisationnelle : l’évolution de la GRH trois ans après la transmission (en retrait, continuité ou en progrès)

- des ratios socialement significatifs : valeur ajoutée par salarié, évolution de la performance économique sur trois années, évolution de la productivité du travail, résultat financier par effectif, évolution de la capacité financière par salarié, évolution des capitaux propres par salarié .

Il convient d’admettre que la signature d’au moins trois bilans positifs est pour les repreneurs une expression tangible de succès. Cependant, le succès de la transmission/reprise ne se limite pas à la rédaction d’actes de propriété ou à des changements dans le registre des actionnaires mais également de la manière dont les ressources humaines seront agencées et valorisées dans

2

Depuis la loi pour l’Initiative Economique du 1er août 2003, un individu qui souscrit un prêt bancaire pour financer la reprise peut désormais déduire sur sa déclaration d’IR 25% des intérêts d’emprunt versés à la banque.

Pour en bénéficier, l’individu doit détenir la majorité du capital social et conserver ses titres cinq ans.

3

L’étude de Estève a été menée dans le cadre d’un rachat d’entreprise par les salariés, nous l’appliquerons à la

RPPE.

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l’entreprise. Et ceci d’autant plus dans une PME. Aussi, il convient de s’interroger sur les spécificités de la GRH en PME.

1.2. La spécificité de la GRH en PME

Pour comprendre les spécificités de la GRH en PME, il est nécessaire d’aborder les spécificités de la PME. Pour ce faire, nous nous appuierons sur le Mix de Proximité de Torrès, (2003) (voir Tableau 1) :

- la proximité entre le dirigeant et les salariés: les dirigeants de PME partagent les mêmes lieux et conditions de travail que leurs salariés ; le niveau de centralisation de la PME est également fonction des conditions de l’entreprise (Kalika, 1988) ; en effet, la structure et la forte proximité conditionnent cette centralisation qui est due également au fait que le dirigeant soit proche de chaque salarié (Barreyre, 1967) ; A l’inverse, une délocalisation pourrait éloigner physiquement le dirigeant de ses salariés.

- la spécialisation : Il existe dans les PME une faible spécialisation du à la proximité : le dirigeant proche de son entreprise peut réaliser plusieurs tâches. Il existe une réelle polyvalence au sein des PME, que ce soit pour les salariés ou dirigeants, chacun s’impliquant dans différentes tâches ; A l’inverse, lorsqu’une partie des activités est délocalisée, la spécialisation sera plus poussée. L’entreprise va alors être décomposée en « tâches » ou activités pour pouvoir localiser chacune d'entre elles dans des conditions optimales d'implantation. « La décomposition des tâches permet une plus grande dispersion géographique des activités et induit à son tour une plus grande décentralisation. »

- la communication au sein de l’entreprise est peu formelle ; le dirigeant favorise le dialogue et les contacts directs. La communication va être modifiée en raison de l’éloignement géographique : on préfèrera une communication via internet qu’une communication de proximité qui existait dans la PME locale.

- la stratégie de l’entreprise est plus réactive que proactive ; il y a très peu d’anticipation ; le dirigeant se base essentiellement sur son intuition pour prendre des décisions. Il sera difficile pour le dirigeant d’anticiper les évolutions du marché et par voie de conséquence d’envisager un développement en France ou à l’étranger.

- À l’inverse des grandes entreprises, dans les PME, le capital est peu transférable ; en effet, le capital de la PME repose essentiellement sur l’aspect relationnel et sur les contacts de la PME avec les partenaires locaux.

- Il existe dans les PME une gestion de proximité qui manque de vision qui conduit à une gestion de type réactif avec des ajustements permanents au niveau des ressources humaines notamment en faisant appel au personnel intérimaire souvent peu qualifié.

Le mix de proximité proposé par Olivier Torres permet de mieux cerner cette spécificité : une

gestion de proximité due aux petites entités. Souvent, le développement d’une entreprise de

petite taille vers une taille moyenne n’est pas suivi par une adaptation organisationnelle et le

dirigeant perd cette proximité qui lui permet d’être réactif.

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Tableau.1. La PME comme mix de proximité (Torrès, 2003)

D’une SPECIFICITE de gestion…

…à une gestion de PROXIMITE

Petite taille Proximité spatiale

Centralisation de la gestion Proximité hiérarchique Faible

spécialisation

Proximité intrafonctionnelle Coordination de proximité

Système d’information Système d’information

De proximité Stratégie intuitive ou peu formalisée Proximité temporelle

La PME demeure un contexte organisationnel marqué par des spécificités fortes qui tiennent au rôle du propriétaire-dirigeant ainsi qu’aux spécificités organisationnelles qui tiennent, quant à elles, à la dimension « humaine » de la PME.

La gestion des hommes dans ce type de structure est également spécifique. C’est la raison pour laquelle, nous mobiliserons un modèle de GRH spécifique à la PME : le Mix-Social (Mahé de Boislandelle, 1998) qui s’articule autour de quatre axes :

- La politique d’emploi repose sur la connaissance de la population employée et sur l’évaluation comparée des besoins et des ressources en personnel. Elle se traduit par différents ajustements internes et externes de nature quantitative ou qualitative.

- La politique de rémunération concerne l’ensemble des allocations monétaires ou en nature, versées au titre du travail accompli ou de l’appartenance à l’entreprise.

- La politique de valorisation recouvre l’ensemble des actions voulues ou acceptées par l’entreprise, se traduisant, d’une part par un enrichissement du salarié à partir du travail confié sur les plans du savoir, savoir-faire, savoir-être, du confort matériel et psychologique au travail et d’autre part, par la perception d’une reconnaissance sociale liée à un statut et à des avantages de carrière.

- La politique de participation représente la forme supérieure de la valorisation. Elle se définit par rapport au partage plus ou moins étendu, du pouvoir de gestion entre le dirigeant et le personnel. Elle s’appuie sur les systèmes d’information et de communication en vigueur au sein de l’entreprise. Elle concerne les processus d’implication dans le travail et d’intégration à l’entreprise à travers des modes d’organisation, de finalisation et de contrôle des activités.

Ces actions, séparément ou de façon conjuguée, produisent des effets directs dans chacun des domaines précités, mais aussi des effets indirects au plan du climat social, de l’image sociale et des performances technico-économiques. Les composantes du Mix social (variables d’action et variables de résultat) et leurs interrelations constituent un sous-système de gestion de l’entreprise. A ce titre, le Mix social est piloté dans un double objectif :

- Améliorer la performance sociale de l’organisation par une cohérence interne,

- Renforcer sa cohérence externe avec les autres « Mix » (markéting Mix…) composant le

système général de gestion.

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L’accent est mis sur le rôle du décideur qui peut être en effet central, notamment en contexte de PME où le dirigeant peut être assimilé à un « chef d’orchestre » guidant son organisation en fonction de ses objectifs. En effet, en contexte de transmission le repreneur peut faire le choix de maintenir les quatre axes du Mix-social en adoptant une stratégie de continuité ou de les bouleverser en adoptant une stratégie de rupture. Nous proposons de résumer les différentes éventualités dans le tableau ci-dessous (Tableau 2).

Tableau 2. Choix stratégiques et politiques de GRH

Choix du repreneur Politique de GRH

Continuité

Mix-social maintenu

Mix-social optimisé

Rupture

Mix-social transformé Changement organisationnel partiel

Mix-social bouleversé Changement organisationnel total

Au regard de cette partie, il va de soi que la GRH après la reprise est incertaine : elle peut-être maintenue ou bouleversé. C’est ce que dont nous traiterons dans la partie suivante. Plus précisément, il s’agira d’identifier les quatre axes du Mix-social avant et après la reprise.

II. …en bouleversant le Mix social ?

Nous tenterons, dans cette partie, de répondre à la question suivante : comment gérer les Hommes de la PME après la reprise ? Pour répondre à cette question, nous présenterons une étude menée auprès d’une PME transmise en 2007.

2.1. Choix méthodologiques de l’étude

Les recherches en sciences de gestion peuvent globalement être caractérisées par quatre dimensions principales (Thiétart, 1999) : le positionnement épistémologique, la nature de la connaissance produite en fonction de la façon d’appréhender les liens entre observations empiriques et connaissances théoriques, le caractère de test ou d’exploitation de la connaissance produite et le type de méthode utilisée.

Ces quatre dimensions sont évidemment très liées les unes aux autres et il est parfois difficile

de démêler la construction d’une recherche, tant que la posture paradigmatique influe sur la

nature de la connaissance produite et ainsi que sur la manière d’aborder les données

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empiriques. Ainsi, nous proposons de justifier le positionnement épistémologique retenu et de présenter le mode de raisonnement choisi.

Face au déficit de connaissances constaté, une approche exploratoire s’est imposée dès le début de notre recherche. Par ailleurs, notre but est d’observer un processus de changement sur une longue période et de s’intéresser de près aux individus et à leur compréhension du monde. C’est dans cette perspective, que nous avons embrassé une démarche qualitative.

Cette méthode étudie des phénomènes spécifiques et s’attache à comprendre et à construire de nouvelles théories plutôt qu’à vérifier des théories existantes. C’est une démarche « pas à pas » et émergente (Marchesnay, 2004) visant à approfondir les phénomènes.

Par ailleurs, nous avons pour ambition de nous intéresser aux actions du repreneur à l’égard de la GRH du cédant. Ainsi, il serait très réducteur de se focaliser sur l’unique perception du repreneur. A cet effet nous avons fait appel à une approche multi-acteurs : cédant/repreneur/salariés afin d’identifier l’évolution de la GRH.

Pour analyser ce phénomène en profondeur, notre choix s’est porté sur la méthode de l’étude

des cas (Huberman et Miles, 1991). L’étude de cas s’attache à mobiliser un maximum

d’informations sur le cas et l’objet de la recherche, afin de construire une explication et de

faire émerger une théorie dormante. La démarche méthodologique adoptée est synthétisée

dans l’encadré suivant.

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Encadré. La démarche méthodologique de l’étude

- Méthodologie

Compte tenu de sa grande flexibilité et de la richesse des informations qu’il peut générer (Huberman et Miles, 1991), l’entretien semi-directif individuel a été privilégié. Nous avons administré de Décembre 2008 à Janvier 2009 douze entretiens en face à face d’une durée moyenne de 1h30. Ils concernent le cédant (C), le repreneur (R) et les salariés (S).

- - Echantillon

L’étude a portée ainsi sur une PME industrielle de la région Languedoc Roussillon. Cette PME a été créée en 1992 et a fait l’objet de deux rachats : le premier en 2001 et le deuxième en 2007. Elle comptait 12 salariés en 1992 et atteint aujourd’hui un effectif de 28 salariés.

Spécialisé dans la métallerie avec des équipements spécifiques : Cisaille, Cintreuses et Presse Plieuse à commandes numériques, Poinçonneuse, Grignoteuse, perceuses, scies, meuleuses, postes à souder (TIG, MIG).

Le cédant est une personne proche de 60 ans à la recherche d’un repreneur depuis deux ans.

Chaque année le compte d’exploitation est équilibré par un abandon partiel du compte courant du propriétaire-dirigeant. Ceci démontre une structure structurellement déficitaire.

Afin d’acquérir à nouveau la confiance des parties prenantes une réunion a été programmée dans le mois suivant la reprise avec les banquiers du cédant, le directeur du banque de France et l’assureur crédit-fournisseur. Huit jours après cette réunion les lignes des crédits ont été réactivées grâce au projet présenté et à la notoriété du repreneur.

- - Population

La population étudiée est composée de 12 acteurs

PME 1

Cédant (C) 1

Repreneur (R) 1

Personnel encadrement (PE) Personnel non encadrement (PNE)

4 6 - - Analyse des données

-

Le traitement des données s’est fait en deux étapes : une pré-analyse à travers l’élaboration

des fiches de synthèses et l’exploitation et l’analyse des matériaux à partir de la méthode de

dépouillement des entretiens de Savall et Zardet, (2004). Cette méthode consiste à regrouper

les phrases-témoins extraites des entretiens, en idées-clés, en sous-thèmes et en thèmes et à

calculer les fréquences afin de mettre en évidence les idées-forces des résultats.

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Cette méthodologie nous a permis de mettre en évidence les résultats que nous proposons de développer ci-après.

2.2. Résultats

À partir de notes exhaustives prises au cours des entretiens, 61 phrases-témoins ont été extraites, puis regroupées en idées-clés, sous-thèmes et thèmes. Trois thèmes ont été identifiés : le Mix-social avant la reprise, le Mix-social après la reprise et l’impact du Mix- social bouleversé sur le succès de la reprise. Nous proposons de présenter les résultats à partir de ces trois thèmes.

Le Mix-social avant la reprise

Sur le plan de la rémunération, le cédant avait tendance à favoriser les récompenses monétaires pour motiver les salariés.

« Je pense que les gens ont besoin d’une carotte pour fonctionner, ici, ce qui les motivent c’est l’argent » (C)

Au-delà de l’aspect monétaire, il nous a confié que la valorisation du salarié passe essentiellement par la confiance qu’il leur témoigne.

« Il faut faire confiance aux gens. Ils s’en rappellent et se sentent valorisés » (C).

« Ici, je me sens valorisé et c’est grâce au dirigeant qu’il y avait, il nous faisait confiance et on savait lui rendre » (PE1)

Bien que la rémunération et la valorisation soient attractives pour certains salariés, il existe également des dysfonctionnements dans le Mix-social du cédant. On a relevé un manque de communication et d’organisation dans le travail, une absence de formation et d’entretien annuel ainsi qu’une mauvaise ambiance au travail.

« Le dirigeant ne nous informait pas des changements dans l’entreprise, on a appris qu’il partait le jour où le nouveau dirigeant a pris les reines de l’entreprise » (PNE2)

« On perdait du temps dans notre travail à chercher des pièces et du matériel, rien n’était organisé » (PE3)

« La formation est inexistante dans l’entreprise » (PNE5).

« Il y a des conflits entre nous, on ne s’entend pas bien, c’est le dirigeant qui a créé ce climat, il y avait du favoritisme » (PNE6)

« Il y a ceux qui savent ce qu’ils vont devenir et ceux qui ne le savent pas : ils sont trop vieux ou trop bêtes » (PNE3)

A la lecture des actions du cédant, il apparait que son seul levier d’action en termes de GRH réside dans la contrepartie financière : le personnel est stimulé par la rémunération et la rétribution. Bien que cet aspect soit important, il n’est pas suffisant pour motiver les salariés.

La GRH du cédant peut donc être qualifiée d’informelle voire « d’absente ». Il convient alors

de se demander si le repreneur va maintenir cette GRH centrée sur le seul levier financier de

la rémunération ou à l’inverse, la « bouleverser ».

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Le Mix-social après la reprise

Dans notre cas, le repreneur a décidé de bouleverser la GRH existante en développant la valorisation (formation, apprentissage) et la participation. Ces deux axes apparaissent ainsi comme une voie de formalisation et de transfert des savoir-faire.

Cette valorisation du personnel a été mise en action suite aux entretiens d’évaluation réalisés pour la première fois dans l’entreprise rachetée : un plan triennal de formation continue pour l’ensemble du personnel a été mis en place en tenant compte des entretiens d’évaluation et des dysfonctionnements constatés dans la production (erreurs fréquente de prises de cotes ; erreurs de matériaux ; difficultés de respecter le planning ; manque d’informations…).

« Il y a régulièrement des formations pour que les salariés apprennent à faire fonctionner les nouvelles machines et à être autonomes sur leurs postes » (R).

« Généralement, notre organisation stipule qu’un salarié ancien doit travailler avec un nouveau. On transmet le savoir-faire des anciens aux nouveaux, on les forme pendant plusieurs mois jusqu’à ce qu’ils soient autonomes » (R).

Il en est ressorti le souhait immédiat du repreneur d’évaluer rapidement le personnel afin d’identifier les difficultés et les savoir-faire de chacun pour programmer des actions de formation et de réorganisation.

Le repreneur a également décidé d’améliorer très rapidement les conditions de travail (aménagement des postes, équipement moderne, équipement de protections individuelles et collectives). Ces actions ont eu pour conséquence une amélioration du climat social, de la productivité et donc de la compétitivité.

« Avant on n’avait pas grand-chose, maintenant on a ce qu’on veut, des outils et du matériel neuf (PNE5).

« Au début c’était difficile, mais maintenant, l’ambiance est meilleure car il y a plus d’égalité entre nous» (PE2)

Les changements instaurés semblent satisfaisants tels que la prime d’intéressement et prime de rendement qui constituent un facteur de motivation du personnel. Cette double rétribution, l’une collective (intéressement) et l’autre individuelle (prime de rendement) peut représenter jusqu’à 20% du salaire.

« Un des moyens que j’ai mis en place pour les motiver est la prime d’intéressement : une trimestrielle ainsi qu’une annuelle en se basant sur le rendement et le chiffre d’affaire de l’entreprise » (R).

Sur l’axe de la participation, la mise en place de fiches de suggestion à permis à chaque salarié de s’exprimer et d’apporter ainsi sa réflexion sur les conditions de travail et l’organisation de son poste.

« La trame des entretiens met en évidence les relations entre manager et salariés mais

aussi entre salariés. Ces entretiens permettent d’aborder l’atteinte des objectifs, le

besoin en formation, les améliorations… »(PE3)

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Nous constatons que le repreneur a développé un management de type participatif en facilitant notamment la participation du personnel à la prise de décision. Il ressort de cette étude un

« bouleversement » de la GRH : on est passé d’une GRH « défaillante » à une GRH

« optimale ». Pour autant, peut-on dire que la reprise est réussie ?

Evolution du Mix-social après la reprise

Nous avons mis en évidence l’évolution significative des pratiques de GRH après la transmission et les effets induits auprès du personnel.

Concernant la rémunération, l a perspective de contrepartie financière est motivante, voire stimulante. En effet, le personnel est stimulé par le gain escompté (primes de rendement) relatif à l’effort supplémentaire consenti. Il est à noter que les primes allouées par les cédants ne reposent que sur des objectifs de productivité et de résultats immédiats, tandis que les repreneurs s’attachent à retenir une variété d’objectifs : résultats immédiats (productivité, efficacité, rentabilité) et création de potentiel (produits nouveaux, technologies nouvelles, compétences, comportements de perfectionnement, polyvalence).

Les actions du repreneur ont permis de perfectionner les méthodes de travail telles que l’adéquation formation-emploi et l’optimisation des postes de travail en capitalisant sur l’outil de production (investissement de 150 000 euros pour moderniser le parc du matériel). Ces actions ont permis à l’entreprise d’acquérir des compétences spécifiques et aux acteurs de consolider leurs parcours professionnels avec un équipement plus efficient. Le but étant d’établir un climat de confiance par une information soutenue et des actions concordantes.

Peu à peu chaque salarié a fait remonter des suggestions pour l’amélioration des conditions de travail.

En effet, dés la reprise, le repreneur a communiqué avec l’ensemble des salariés pour les informer des modalités de la reprise pour les rassurer des paiements des salaires y compris les retards et leurs présenter l’ébauche d’un plan de valorisation sur trois ans.

Pour la participation, elle était reconnue comme une démarche qui mène progressivement à la légitimité du personnel. Le repreneur a ainsi élargi et approfondi ses relations avec ses subordonnés. Ils contribuent à mettre en place et à affiner un système de communication- coordination-concertation régulier. De plus, la formalisation des résultats de l’activité est considérée comme très stimulante par le personnel.

Par ailleurs le repreneur a organisé des élections pour désigner deux délégués du personnel et a mis fin aux procès-verbaux de carence. Ainsi, deux délégués ont été élus pour représenter le personnel auprès des instances dirigeantes. Il s’en est suivi une nette amélioration de la communication, notamment sur les suggestions relatives aux conditions de travail.

Le bouleversement de la GRH a donc permis de faciliter la reprise et ce, sur deux plans :

- Concernant l’entreprise : développement du chiffre d’affaires, réduction des coûts du

personnel, créations de zones d’autonomies et de responsabilisation, construction d’un

nouveau atelier (50% plus grand pour bénéficier d’un outil efficient).

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- Concernant le personnel : possibilités de promotions consécutives à la politique de formation, une progression du personnel de 55% (de 18 à 28 personnes), une meilleure communication et une représentation.

Le nouveau modèle de gestion des ressources humaines se fonde désormais sur la compétence. Les salariés cessent d’être uniquement facteurs de coûts, ils sont désormais considérés par les ressources qu’ils détiennent et qui peuvent être mises au service des objectifs de l’entreprise. Les transformations de l’organisation et de la valeur du travail ont favorisé l’émergence d’une nouvelle GRH, qui dépasse la seule logique poste. On est passé d’un personnel démobilisé par le manque de vision à un personnel impliquer pour préserver l’outil de travail.

Conclusion

La plupart des travaux en transmission mettent l’accent sur les aspects juridico-technico économiques, ainsi que sur le rôle du cédant et du repreneur.

Tandis que, la dimension sociale semble être sous estimée et perçue tardivement pourtant elle pèse plus lourd que les actifs incorporels qui figurent au bilan (Vatteville, 1985). Le repreneur réalise alors que ce n’est pas le montage juridico-technique, bien identifié et maîtrisable, qui est le plus difficile à mettre en place, mais la gestion des hommes. En effet, cette dimension nécessite un audit approfondi pour bien appréhender l’expression des salariés tout en leur expliquant que la réponse s’inscrit dans la durée : il faut du temps pour acquérir la connaissance de diverses expertises nécessaires à la polyvalence.

Ce travail a donc montré que la GRH est une question délicate qui doit faire l’objet d’une réflexion de la part du repreneur. Le choix en la matière peut être crucial dans la survie de l’entreprise et favoriser ou non sa pérennité. Les résultats de l’étude montre que le repreneur, a été amené à procéder à de profonds changements pour assurer la pérennité de l’entreprise.

Ici, la rupture revient à rechercher des alternatives optimales dans l’utilisation des ressources humaines et organisationnelles.

La GRH se pose en la circonstance comme un élément stratégique incontournable tant pour la problématique de la transmission que pour celle du développement de la PME.

Il suffit de constater le résultat obtenu: la sauvegarde d’une entreprise au bord du dépôt de bilan, la création de 10 emplois et la rentabilité retrouvée au terme de six mois. Ce résultat a été obtenu, en préservant l’encadrement existant qui n’a pas manqué, certes, de poser un problème d’adaptation aux changements managériaux et organisationnels.

Les résultats sont cependant à considérer avec prudence, car ils ne constituent que des

tendances qui sont difficilement généralisables, compte tenu de la faiblesse de l’échantillon

(cas unique). Il convient alors de réaliser une étude auprès d’un plus large échantillon de la

région Languedoc-Roussillon afin de confirmer ou non ces résultats. De plus, nous proposons

d’élargir ce travail aux autres types de transmissions telles que la transmission familiale

(Savall, Zardet et Bonnet, 2009) ou le rachat d’entreprise par les salariés ainsi qu’aux

entreprises de très petites tailles (Marchesnay, 2009).

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Bibliographie

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