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Les polynucleaires neutrophiles
Pascal Rainard
To cite this version:
Pascal Rainard. Les polynucleaires neutrophiles. Veterinary Research, BioMed Central, 1993, 24 (4), pp.351-358. �hal-02701081�
d’autres agonistes physiologiques, s’accom-
pagne d’une diminution du taux d’AMPc. L’ana-
logue stable de la PGH2 (U46619), un puissant
inducteur de l’agrégation plaquettaire, n’a pas d’effet sur la variation du taux d’AMPc.
L’acide arachidonique, contrairement à l’U46619, est capable de réverser au cours du temps l’effet antiagrégeant d’une concentration seuil de PG12.
Cette capacité de l’acide arachidonique de
baisser le niveau intracellulaire d’AMPc est mé- diée par des métabolites de la cyclo- oxygénase : les PGs E2 et F2a; la PGH2 ainsi que le TxA2 et le TxB2 n’étant pas impliqués
dans ce processus. En effet, l’aspirine qui inhibe
la cyclo-oxygénase supprime totalement l’effet inhibiteur de l’acide arachidonique sur l’AMPc lorsque celui-ci est augmenté au préalable par la PG12. Ainsi, ni l’acide arachidonique lui-même
ni ses dérivés lipoxygénases ne sont respon- sables de cette diminution du taux d’AMPc. Les TxA2 et B2 ne semblent pas non plus jouer un
rôle dans ce processus puisque l’inhibition de la TxA2 synthétase par le ridogrel (l’acide (E)-5-[[[
(3-pyridinyl) [3-(trifluoromethyl) phenyl]- methylen] amino] oxy] pentanoïque) semble, au
contraire, potentialiser cet effet. Cette inhibition de l’étape TxA2 synthétase réoriente le métabo- lisme des PGs intermédiaires (G2 et H2) vers la synthèse des PGs D2 et E2 connues pour leur activité stimulatrice de l’adénylate cyclase.
La substitution de l’acide arachidonique par la PGE2 ou la PGF2a reproduit le même effet que l’acide arachidonique lui-même; la PGD2 n’étant pas efficace. Ces propriétés différentes des PGs E2 et F2a, d’une part, et de la PGD2,
d’autre part, pourraient être attribuées à une dif- férence de récepteurs membranaires. En effet, les PGs E2 et F2a, moins actives sur l’adénylate cyclase, entreraient en compétition (récepteur commun) avec la PG12 potentiellement active et
diminueraient ainsi le niveau d’AMPc. La PGD2, qui possède un récepteur différent de celui de la PG12, n’affecterait pas, par conséquent, le ni-
veau d’AMPc. La forskoline, un activateur direct de fadénylate cyclase, potentialise au contraire
l’effet de la PG12, favorisant ainsi l’hypothèse at-
tribuant à des récepteurs différents pour les PGs l’effet observé au niveau de l’AMPc.
La thrombine, un agent agrégeant très puis-
sant et dont l’action est médiée en partie par les dérivés proagrégeants de l’acide arachidonique,
est capable de décroître le niveau d’AMPc. Cet
effet est légèrement inhibé par l’aspirine, ce qui
conforte le rôle évoqué pour les PGs E2 et F2a dans ce processus. Ce rétrocontrôle négatif
exercé sur une production excessivement éle- vée d’AMPc joue certainement un rôle important
dans la modulation de l’activation plaquettaire.
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Les polynucléaires neutrophiles. P Rai-
nard(Institut national de la recherche agro- nomique, C:entre de recherches de l ours, Laboratoire de pathologie infectieuse et
immunologie, 37380 Nouzilly, France)
Les polynucléaires neutrophiles constituent une
défense cellulaire essentielle de l’organisme
contre les bactéries. Pour remplir sa fonction, le neutrophile est doté de propriétés de locomo- tion, d’ingestion de particules et de digestion.
L’importance de ce système de défense peut se
mesurer par la sévérité des infections bacté- riennes ou fongiques récurrentes qui mettent en danger l’existence des sujets atteints de défi- cience congénitale sérieuse d’une de ces pro-
priétés (Malech et Gallin, 1987). Les messagers
qui attirent les neutrophiles sont souvent géné-
rés par une infection, mais pas nécessairement.
Les signaux produits par une réaction antigène- anticorps induisent également une infiltration de
neutrophiles, et les conséquences en terme d’in-
flammation en sont comparables. Les neutro- philes sont, en effet, des partenaires et des pro-
tagonistes actifs de la réaction inflammatoire.
Nous verrons également que les neutrophiles
sont considérés, depuis peu, comme étant ca-
pables d’influer sur la réponse immunitaire.
Origine et maturation
Les neutrophiles sont formés dans la moelle os- seuse en une quinzaine de jours, répartis en
une semaine de multiplication et une semaine
de maturation. Une caractéristique essentielle des polynucléaires est l’existence de granules cytoplasmiques qui contiennent des stocks de
protéines indispensables à leur rôle de protec- tion de l’organisme. Plusieurs types de granules apparaissent de façon séquentielle pendant la phase de maturation (Baggiolini et Dewald, 1985). Dans l’espèce humaine, les granules azurophiles (ou primaires) précèdent les gra- nules spécifiques ou secondaires. Dans les gra- nules sont stockées des substances très actives
qui font des neutrophiles des cellules agressives
pour les bactéries, mais aussi pour les tissus dans certaines circonstances (tableau 1). Les granules azurophiles sont apparentés aux lyso-
somes car ils contiennent des hydrolases dont
le pH de fonctionnement optimal est acide. La myéloperoxydase est un marqueur de ces gra- nules, qui contiennent également des protéases
à sérine. Enfin, ils sont riches en polypeptides bactéricides, parmi lesquels les défensines. Le marqueur des granules spécifiques est la lacto-
ferrine.
Chez les ruminants, un type supplémentaire
de granules s’intercale au cours de la morpho- genèse entre les granules azurophiles et spécifi-
ques et représente le compartiment granulaire
le plus volumineux (Gennaro et al, 1983). Les polypeptides bactéricides des neutrophiles des
ruminants sont essentiellement contenus dans les granules majeurs, et contrairement aux dé-
fensines, ils sont activés après la dégranulation quand les protéases stockées dans les granules primaires les ont clivés. Aux granules sont éga-
lement associés des récepteurs pour le complé-
ment que le neutrophile peut mobiliser et expo-
ser à sa surface en réponse à une stimulation
appropriée.
Arrivés à maturité, les neutrophiles sont libé-
rés dans le sang où ils ne séjournent que briève- ment (temps de demi-séjour d’environ 6 h). Ils émigrent ensuite dans les tissus où on estime leur durée de vie à 2 jours.
Locomotion, chimiotactisme et recrutement
L’élucidation des mécanismes qui régissent l’ex-
travasation sanguine des neutrophiles (diapé- dèse) a fait des progrès spectaculaires ces der-
nières années. La diapédèse fait l’objet d’un exposé détaillé par ailleurs. L’attraction des neu-
trophiles vers les foyers d’infection est un préa-
lable à l’expression de leurs fonctions antibacté- riennes. Pour se déplacer, les neutrophiles ne
sont pas seulement dotés de capacités locomo-
trices stimulables par divers facteurs solubles
(chimiocinésie), mais ils peuvent aussi s’orienter dans un gradient de facteurs dits chimiotacti- ques (chimiotactisme). Leur déplacement est
aussi largement influencé par la topographie de
leur environnement (guidage de contact) (Wilkin-
son, 1985). Un neutrophile stimulé pour la loco- motion revêt une forme caractéristique, même
en suspension dans un liquide, en perdant sa
forme sphérique de repos et en prenant une forme allongée polarisée. Sur un support ferme, le neutrophile envoie vers l’avant un pseudo- pode frontal qui s’agrippe au support, et la cel- lule se hisse sur ce point d’appui. En même temps à l’arrière, au niveau d’un large uropode,
la membrane cellulaire doit se libérer du sup- port. En chemin, le neutrophile laisse derrière lui
une partie de son manteau cytoplasmique, cons-
titué de molécules faiblement associées à la membrane, comme par exemple la fibronectine.
La vitesse d’un neutrophile peut atteindre 2,5
mm par heure, deux à trois fois plus rapide que celle d’un monocyte.
Plusieurs catégories de substances attirent les neutrophiles (tableau 11). Parmi ces sub- stances, la liste des cytokines inflammatoires SIS (small induced secreted) ne cesse de s’al- longer (Minty, 1991). Les neutrophiles possè-
dent pour les facteurs chimiotactiques des ré- cepteurs membranaires qui sont couplés, par l’intermédiaire des protéines G (liant le GTP), à
des phosphorylases comme la phosphorylase C (Cockcroft, 1992). En conséquence, les facteurs
chimiotactiques activent les neutrophiles. Un
des facteurs les plus actifs, le fragment C5a du complément, met les neutrophiles dans diffé- rents états d’excitation en fonction de sa
concentration (tableau III). Comme la plupart
des facteurs chimiotactiques, à forte concentra-
tion le C5a inhibe la locomotion, ce qui n’est pas
paradoxal si on considère que ces concentra- tions sont obtenues dans le foyer inflammatoire.
Les neutrophiles sont recrutés par des fac- teurs non spécifiques libérés par la réaction in- flammatoire. Mais ils peuvent aussi être recrutés par des substances antigéniques qui ne sont
par elles-mêmes ni irritantes ni chimiotactiques,
mais qui génèrent chez des animaux une ré- ponse spécifique seulement après une immuni-
sation (Campbell, 1990). Plusieurs mécanismes
qui peuvent rendre compte de ce phénomène
ont été identifiés. Des anticorps peuvent se lier
à l’antigène et en faciliter la capture par des ma-
crophages résidents qui, ainsi stimulés, libèrent des monokines chimiotactiques comme l’IL-8 ou
le MIP-2. Alternativement, des lymphocytes T peuvent réagir avec l’antigène et sécréter des
lymphokines qui soit attirent les neutrophiles,
soit incitent des macrophages à libérer des mo-
nokines chimiotactiques.
Parvenu sur le site infectieux, le neutrophile
aura pour tâche de reconnaître les bactéries, de les ingérer et de les tuer.
Phagocytose et destruction des bactéries Les conséquences de la rencontre d’une bacté- rie avec un neutrophile dépendent en premier
lieu des caractéristiques physico-chimiques des
surfaces qui entrent en contact (Absolom, 1986). Pour réaliser une suspension stable avec
les cellules sanguines, les neutrophiles ont
aussi une membrane cytoplasmique hydrophile
et chargée négativement (répulsion électrostati- que). Les bactéries qui possèdent de telles pro-
priétés de suface, conférées par exemple par
une capsule polyosidique, ne sont pas aisément
capturées par les neutrophiles. Par exemple,
dans les capillaires sanguins, des pneumoco- ques virulents encapsulés rebondissent sur les
neutrophiles et poursuivent librement leur che- min. Il faut des circonstances particulières pour que la capture ait lieu : lorsque le pneumocoque est coincé entre deux polynucléaires ou entre
un polynucléaire et la paroi du vaisseau (Wood
et al, 1951 On parle de phagocytose de sur-
face lorsque les neutrophiles rencontrent les bactéries sur un support ferme, tels un endothé- lium vasculaire, un épithélium, des amas de fi-
brine ou, in vitro, une lame de verre ou de plasti-
que. Le neutrophile, activé par les interactions
avec le support et les facteurs chimiotactiques,
est alors capable d’ingérer des bactéries qu’il ne
«reconnaîtrait&dquo; pas s’il était en suspension dans
un liquide biologique.
En suspension dans un milieu aqueux, la
phagocytose des bactéries pathogènes à multi- plication extracellulaire nécessite l’intervention de substances appelées «opsonines&dquo;, du mot
grec signifiant «assaisonnement,,. Quand les bactéries pénètrent dans l’organisme, leurs pro-
priétés de surface sont modifiées par l’adsorp-
tion de protéines de l’hôte. Selon l’espèce et la
souche bactérienne, la fibronectine, le fibrino- gène, la lactoferrine, la sérumalbumine et bien d’autres protéines interagissent avec des élé-
ments de la surface bactérienne, ce qui peut avoir pour conséquence de favoriser la phago- cytose. La liaison entre bactéries et neutrophiles peut aussi résulter de l’intervention de lectines de surface (Ofek et Sharon, 1988). Les opso- nines les plus efficaces, les anticorps et le com- posant C3 du complément, sont reconnues par des récepteurs membranaires du neutrophile (tableaux IV et V). Les parois bactériennes sont souvent capables d’activer la voie alterne du
complément, ce qui aboutit à un dépôt covalent
de C3b et de C3bi (Frank et Fries, 1991). Pour
que ce depôt soit efficace, il doit être accessible
aux récepteurs du neutrophile pour le complé-
ment. Les capsules protègent les bactéries en
enfouissant le C3b/C3bi hors d’atteinte des ré- cepteurs. Des anticorps anticapsulaires sont
alors nécessaires pour recruter la voie classique
du complément et provoquer la fixation du C3
sur la capsule. L’opsonisation la plus efficace
est obtenue quand à la fois des anticorps et du complément opsonisent la bactérie, permettant
la mise en oeuvre simultanée et synergique des récepteurs pour la portion Fc des immunoglobu-
lines G et pour les fragments du C3. La phago- cytose médiée par les récepteurs pour le com-
plément requiert un stimulus additionnel, qui peut être réalisé par les anticorps, mais aussi
dans certains cas par la fibronectine et les fac- teurs chimiotactiques (Brown, 1986) ou par des
composés de la surface batérienne (Verhoef, 1992).
L’efficacité de la phagocytose en fonction de
l’opsonisation des bactéries est schématisée dans le tableau VI. Les principaux paramètres
de l’efficacité de la capture sont l’hydrophobicité
de la bactérie, l’adsorption de protéines de l’hôte
et le dépôt des opsonines majeures (anticorps
et complément), et enfin l’état d’activation des
neutrophiles, qui conditionne l’expression et l’ac-
tivation des récepteurs membranaires.
La liaison des opsonines aux récepteurs
membranaires déclenche trois processus : l’in- ternalisation des bactéries impliquant l’actomyo-
sine et le cytosquelette, la génération de compo- sés actifs de l’oxygène (flambée oxydative) et la
libération du contenu granulaire (dégranulation).
Les deux derniers processus sont nécessaires à l’activité batéricide des neutrophiles.
La flambée oxydative est initiée par l’activa- tion de la NADPH oxydase, complexe enzymati-
que composé d’au moins 6 espèces molécu- laires, 3 membranaires et 3 cytosoliques, qui
s’assemblent en quelques secondes après un
stimulus et génèrent l’anion superoxyde 02.
Comme tous les radicaux libres (espèce chimi-
que porteuse d’un électron non apparié), l’anion superoxyde est extrêmement réactif. Il subit une dismutation spontanée en peroxyde d’hydro- gène (H202), qui peut ensuite réagir avec des
ions chlorures pour former de l’acide hypochlo-
reux (HOCI) par une réaction catalysée par la
myéloperoxydase stockée dans les granules azurophiles. L’acide hypochloreux a une durée
de vie courte mais forme avec des amines pri-
maires et secondaires des N-chloramines plus
stables. Chloramines et HOCI sont très toxiques
pour de nombreux micro-organismes, créant un
milieu microbicide dans les phagosomes et l’en-
vironnement immédiat des neutrophiles (Roos, 1992).
La dégranulation accompagne la stimulation des neutrophiles. Une stimulation d’intensité moyenne induit une dégranulation limitée aux granules spécifiques, alors que la stimulation in-
tense que représente la phagocytose implique également les granules azurophiles, qui contien-
nent la plupart des hydrolases et des polypep-
tides cationiques bactéricides.
L’intensité de la flambée oxydative et de la dégranulation sont modulables, en rapport avec l’intensité de la stimulation et du contact préa-
lable du neutrophile avec des agents
«d
’
amorçage» qui, par eux-mêmes, ne provo- quent pas de réaction cellulaire mais qui indui-
sent une réaction accrue lors d’un contact ulté- rieur avec un stimulus déclenchant. On peut citer les endotoxines batériennes, le facteur né- crosant des tumeurs (TNF) et le facteur activa- teur des plaquettes (PAF).
Fonction sécrétoire
Les neutrophiles ne possèdent pas seulement la
capacité d’ingérer, ils sécrètent également toute
une variété de substances qui impliquent ces
cellules dans la réaction inflammatoire. Les neu-
trophiles influent sur la réaction vasculaire et l’exsudation de plasma, probablement par la sécrétion de prostaglandines vasodilatatrices
(hyperhémie) et de PAF (exsudation) (Issekutz, 1984). Les neutrophiles semblent également
devoir exercer une activité protéolytique pour
migrer au travers des barrières du tissu conjonc-
tif. Cependant, les neutrophiles peuvent traver-
ser une monocouche cellulaire sans l’endomma- ger ni rompre son étanchéité. En fait, il apparaît
que les neutrophiles ne provoquent des dom- mages tissulaires en réponse à un stimulus chi-
miotactique que lorsqu’ils ont été «amorcées»
au préalable, par de l’endotoxine par exemple.
Dans ce cas, les métabolites actifs produits par la flamblée oxydative et les protéases libérées
par la dégranulation agissent de façon synergi-
que (Roos, 1992). L’oxydation de résidus mé- thionine qui inactive l’a1 antiprotéinase, le princi- pal inhibiteur de l’élastase, en est un bon
exemple. Les protéines cationiques bactéricides
possèdent également une activité cytotoxique.
Les neutrophiles sont d’ailleurs d’excellents mé- diateurs de la cytotoxicité cellulaire anticorps- dépendante. Il faut cependant garder à l’esprit
que les radicaux oxydants sont rapidement inac-
tivés ou s’épuisent en réagissant avec les pro- téines de l’organisme, et que les protéases sont
contrôlées par de nombreuses antiprotéases plasmatiques ou tissulaires. On peut dire que les neutrophiles ont essentiellement une agres- sivité de contact. Cette agressivité s’exerce bien
lorsque le neutrophile réagit avec une particule opsonisée trop volumineuse pour être phagocy-
tée (cas de &dquo;phagocytose frustée&dquo;). La dégranu-
lation déverse le contenu des granules dans le micro-compartiment séquestré entre la suface opsonisée et le neutrophile, isolé des inhibiteurs de protéases et des protéines du plasma (Hen-
son et Johnson, 1987).
Outre sa contribution à la réaction vasculaire inflammatoire et aux dommages tissulaires, le neutrophile participe à la réponse immunitaire par la synthèse et la sécrétion de quelques inter-
leukines.
Intégration dans les défenses de l’organisme
L’activité du neutrophile est modulable, ce qui permet un certain degré d’adaptation de son ac-
tion en fonction des circonstances. La stimula- tion par les facteurs chimiotactiques, l’amorçage
par les endotoxines ou certaines cytokines ont
été mentionnés, ainsi que le recrutement par les
lymphocytes T et leur produits. La notion de contrôle de l’activité des neutrophiles par les
lymphocytes T est maintenant bien documentée
(Campbell, 1990). Outre le recrutement vers un
site infectieux, les lymphocytes T peuvent stimu- ler l’activité batéricide des neutrophiles en agis-
sant sur la flambée oxydative, la dégranulation
et l’expression des récepteurs membranaires pour les opsonines. L’interféron y (IFN-n, l’inter-
leukine 2 (IL-2), le facteur stimulant les colonies de granulocytes-monocytes (GM-CSF), comp- tent parmi les cytokines actives sur les neutro- philes (Steinbeck et Roth, 1989). Plusieurs types cellulaires peuvent moduler l’activité des
neutrophiles. Un exemple est fourni par l’intedeu- kine 8 (IL-8), l’une des quelques cytokines dont la
cible la plus spécifique est le neutrophile. Elle est
sécrétée par des macrophages, des fibroblastes, des cellules épithéliales et endothéliales, et des
hépatocytes (Baggiolini et al, 1989).
En retour, le neutrophile peut agir sur les cel-
lules qui l’environnent. On a longtemps pensé
que le neutrophile était incapable de synthétiser
des protéines. On sait maintenant que le neutro-
phile synthétise un nombre certes restreint de
protéines, mais qui jouent un rôle important
dans la communication intercellulaire. On peut
regrouper ces protéines en deux catégories :
celles qui possèdent une fonction effectrice, et celles qui interviennent dans l’arc afférent de la
réponse immunitaire (tableau VII). Cette capaci-
té de synthèse est stimulable, par le GM-CSF par exemple, et peut s’accompagner de la libé- ration de médiateurs comme I’IFN-a, le PAF et la leukotriène B4. La production de cytokines
par le neutrophile est maintenant bien établie.
Bien que chaque neutrophile n’en synthétise
que de faibles quantités, les quantités produites
localement sur un site inflammatoire où les neu-
trophiles sont majoritaires peuvent être biologi- quement très significatives. Cette synthèse per- met au neutrophile d’intervenir non seulement dans la modulation de la réaction inflammatoire, mais aussi dans la régulation de la réponse im-
munitaire (Lloyd et Oppenheim, 1992).
Conclusion
Le rôle du neutrophile semble donc dépasser
celui de simple exécutant d’une immunité fruste et non spécifique héritée des âges primordiaux,
contrairement à ce que pensaient ceux pour qui
«qui peut le plus peut le moins&dquo;. La démonstra- tion récente de la synthèse et de la libération de toute une variété de médiateurs, dont plusieurs cytokines, positionne le neutrophile parmi les ac-
teurs cellulaires qui prennent part à la modulation des réponses inflammatoires et immunitaires.
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Rôle des mastocytes et des polynu-
cléaires basophiles et éosinophiles
dans les phénomènes inflammatoires.
JM Mencia-Huerta(Instituf Henri-Beaufour, Département d’immunologie, 91952 Les Ulis, France)
Bien qu’appartenant à des compartiments tissu-
laires différents, les mastocytes (poumon, peau...) et les basophiles (sang) présentent des caractéristiques communes. Ces deux types cel- lulaires contiennent des quantités importantes
d’histamine qu’ils conservent à l’intérieur de gra- nules riches en protéoglycans. De plus, les mas- tocytes et les basophiles portent à la surface des récepteurs de haute affinité pour les IgE. De
ce fait, les cellules sont capables de libérer le contenu de leurs granules lors de leur stimula- tion par l’antigène spécifique. Chez le cobaye et
le rat, les mastocytes ont une longue durée de
vie et sont capables de libérer leurs médiateurs
plusieurs mois après avoir été sensibilisés. Le contenu des granules des mastocytes et des ba- sophiles ne se limite pas à l’histamine et aux
protéoglycans pour distinguer différents sous-
types cellulaires. Récemment, la synthèse de di-
verses cytokines impliquées dans la régulation
de la réponse immunitaire a été démontrée au niveau des mastocytes. Ces cytokines sont libé-
rées lors de la stimulation des mastocytes dans