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Devenir de la flexibilité mentale au cours du vieillissement normal

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Academic year: 2021

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ET PRISE EN CHARGE INDIVIDUELLE

DES ASPECTS DE LA RECHERCHE AU RESPECT DE LA PERSONNE

Sous la direction de

Bruno Vivicorsi & Raphaèle Collet

Publications des Universités de Rouen et du Havre

(2)

DEVENIR DE LA FLÉXIBILITÉ MENTALE AU COURS DU VIEILLISSEMENT NORMAL Céline GUÉDIN & Évelyne CLÉMENT.

L'objectif de cette recherche est d'appréhender s'il existe chez le jeune adulte et la personne âgée des différences de flexibilité mentale mesurée en terme de différences de sensibilité à la mécanisation de la pensée.

La mécanisation de la pensée est un phénomène décrit par les gestaltistes comme I'effet négatif des apprentissages sur le développe- ment de la pensée créative et la découverte de solution par < insight >

(voir, pour une synthèse, Murray, 1995). Pour démontrer I'effet négatif (< effet de set >) de I'expérience sur la découverte créative de solution, Luchins (1942) a utilisé les problèmes de jarres. Dans ces situations, il

s'agit de transvasement de liquide de jarre en jarre. Afin d'obtenir une quantité définie, on dispose de 3 jarres de contenances différentes. On peut rernplir et vider ces jarres à volonté. Les 5 premiers problèmes se

résolvent tous d'une façon unique qui est montrée aux sujets. Les problèmes 6 et 7 peuvent se résoudre de la même façon ou d'une façon plus simple, le problème 8 ne peut pas se résoudre comme les pre- miers problèmes.

La majorité des sujets applique la procédure de résolution des cinq premiers problèmes, ne remarque pas qu'il existe une procédure plus simple au cours des problèmes critiques (problème 6 et 7) et continue d'appliquer la même procédure pour le problème 8. Luchins a inter- prété ce phénornène coutme un effet de set. Dans certaines situations, I'expérience empêche la découverte de rnéthodes de résolution créa- tives.

Ce phénornène a été réinterprété plus récemment comme un frein au changement de représentation mentale sur le problèr-ne (Ohlsson 1984;' Kaplan & Sirnon 1990). et comrne un effet négatif du rransfeft analogique (Richard, 1998). En effet. au cours des différents pro- blèmes, les sujets appliquent par analogie la procédure qui a permis de

trouver la solution des problèmes précédants sans s'engager dans le codage de toutes les caractéristiques pertinentes des problèmes.

Univelsité de Rouen, Laboratoire Ps1.'cholo-eie et Neurosciences de la Cognition (Psy.Co EA 1780), F-76821 Mont Saint Ai_snan Cedex - Té1.:02 35 t4 6l t6

- Fax : 02 35 14 64 34 - MéI. : evelyne.clement.fruniv-r'ouen.fr

(3)

Dans la même perspective, nous interprétons ce phénomène de mé- canisation de la pensée en terme de flexibilité mentale. Nous définis- sons la flexibilité mentale comme, d'une part, la capacité à changer de représentation quand la première interprétation conduit dans des situa- tions d'impasse et, d'autre part, la capacité à abandonner des connais- sances non pertinentes issues d'apprentissages antérieurs (Clément, 200r).

Les problèmes de jarre (tableau 1) nous semblent bien adaptés pour appréhender cette deuxième composante de la flexibilité, En effet, on peut formellement décrire ces problèmes comme des problèmes à

transformation d'états, où il s'agit de transformer l'état initial (les don- nées du problème) en un état final (quantité à obtenir) en appliquant des opérateurs (addition ou soustraction).

Tableau l. Les l0 problèmes de jarre (d'après Luchins, 1942).

Problème Données du problème

(quantités disponibles)

A B C

But (quantité à obtenir)

Procédure de résolution

Pbl 2t t27 J 100 B-A-C-C

Pb2 l4 163 25 99 B-A-C-C

Pb3 18 43 t0

5

B-A-C-C

Pb4 9 42 6 21 B-A-C-C

Pb5 20 59 4 3t B-A-C-C

Pbe 6 23 49 3 20 B-A-C-CouA-C

Pb7 t5 39 3 18 B-A-C-CouA+C

Pb8 28 76 3

,,4,

A-C

Pb9 t8 48 4 22 B-A-C-CouA+C

Pb I0 14 36 I 6 B-A-C-CouA-C

Comme on peut le noter dans ce tableau, pour résoudre les cinq premiers problèmes, il faut utiliser 3 quantités (A, B, C). Pour les deux problèmes suivants, 3 quantités (A, B, C) ou 2 quantités (A, C) peuvent être utilisées. Dans le problème 8, seules 2 quantités peuvent être utilisées. Enfin, dans les problèmes 9 et 10, 2 ou 3 quantités

peuvent être utilisées. Découvrir la solution ici, nécessite le traitement

des propriétés pertinentes des problèmes que sont le nombre de

quantités à utiliser. En effet, si au cours des résolutions des premiers

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FLEXTBTLITÉ nr vrelr-r-rssEMENT

problèmes on construit une contrainte qui impose d'utiliser les 3 quan- tités, alors la résolution du problème 8 devient impossible.

Ainsi, ce paradigme présente plusieurs intérêts pour étudier les différences de flexibilité au cours des résolutions successives. D'une part, le problème 8 est un problème

<<

impasse > qui nécessite un recodage en prenant en compte les propriétés pertinentes de la situa- tion. D'autre part, les problèmes 9 et l0 sont des problèmes oùr il est possible d'identifier comment après le problème impasse les individus abordent les nouvelles situations et s'ils ont appris en découvrant les propriétés pertinentes de la situation.

Nous faisons I'hypothèse que les differences de flexibilité s'expri- ment dans la gestion de I'impasse. Les sujets les plus flexibles seront ceux qui au cours du problème 8 découvriront la solution en aban- donnant la procédure utilisée dans les précédants problèmes et en se

réengageant dans le codage de la situation en découvrant qu'il ne faut plus utiliser 3 quantités mais 2 quantités. D'autre part, au cours des

deux problèmes suivants ces sujets devraient découvrir spontanément les procédures les plus économiques en soustrayant ou additionnant 2 quantités.

Nous faisons une deuxième hypothèse quant au rôle des aides externes dans la découverte de solution. Nous pensons que les aides explicites données par I'expérimentateur au cours du problème < im- passe ) ne seront pas suffisantes pour engager I'individu en difficulté dans le codage des propriétés pefiinentes du problème.

Par ailleurs, des travaux menés auprès de jeunes adultes et des personnes âgées dans la résolution de problèmes de Tour de Hanoi, ont montré des différences de flexibilité entre les deux groupes d'âge (Clément & Delabarre,200l ; Delabane & Clément, 2003). Dans ces

travaux, c'est la première composante de la flexibilité qui a été appré- hendée (le changement de représentation). Dans la recherche présente,

nous pensons observer les mêmes différences sur la deuxième

composante de la flexibilité qui devrait se traduire chez les personnes âgées comme une plus grande sensibilité à la mécanisation de la pensée.

Pour tester ces hypothèses, nous avons invité 15 personnes de 84 ans d'âge moyen et 15 adultes jeunes de 20 ans d'âge moyen à résou-

dre les problèmes de jarres de Luchins. Au cours du problème

< impasse > (problème 8), quand les sujets ne découvrent pas sponta- nément la nouvelle procédure, nous avons proposé des aides de 3

niveaux d'explicitation. Nous voulions savoir sous quelle condition

s'opère le changement de codage et quelle est I'opportunité d'aides

245

(5)

explicites. Enfin, afin de dégager des grands profils dans le groupe des

jeunes adultes et des personnes âgées, nous avons mené une analyse des procédures problème par problème.

Méthode Participants

La population de l'étude est constituée de l5 adultes jeunes (20 ans d'âge moyen;min.: l8 ans;max.:25 ans) et de 15 personnes âgées

(84 ans d'âge moyen ; min. 75 ans ; max. : 99 ans), actives et indé- pendantes qui vivent en maison de retraite (départements de I'Eure et de la Seine Maritime).

Remarques

Nous avons fait passer aux personnes âgées le Mini Mental State Examination (version mise au point par le GRECO) afin de nous assu-

rer qu'elles ne présentaient pas de graves déficits cognitifs. Ce test, rapide à passer, est couramment utilisé par les professionnels pour un dépistage des déficits cognitifs (Derouesné, Poitreneau, Hugonot, Kalafat, Dubois, Laurent, 1999).

Matériel

Nous avons repris les problèmes des jarres en les présentant de façon numérique sur des caftons.

Procédure

La passation est individuelle et les problèmes sont présentés un à

un. La consigne est la suivante : < je vais vous proposer de résoudre des problèmes, soit par addition, soit par soustraction. Je vais vous montrer comment résoudre le premier problème. On a 3 quantités, 21, 127,3 et on veut obtenir 100. On pose 127, on soustrait ensuite 2I, ce

qui fait 106. On soustrait ensuite 3, ce qui fait 103 et on soustraitune

deuxième fois 3, ce qui fait 100. Je vais vous demander de refaire la

même chose par écrit pour voir si vous avez bien compris >. Lorsque

les sujets ont compris et effectué les opérations, I'expérience propre-

(6)

FLEXIBILITE ET VIEILLISSEMENT 247 ment dite commence. On laisse les sujets résoudre seuls les 9 autres problèmes.

Au cours du problème 8, si les sujets ne trouvent pas spontanément la solution, on propose alors trois aides qui diffèrent selon leur profon- deur d'explicitation

:

- A1 : au bout de 2 minutes de résolution sans succès, I'expérimen- tateur informe le sujet que < le problème est impossible à résoudre avec la procédure précédente >

;

- A2: I minute après la première aide, si le sujet n'a toujours pas

trouvé la solution, I'expérimentateur lui indique qu' <on peut résoudre le problème avec A et C >

;

- A3 : I minute après la deuxième aide, I'expérimentateur donne la solution : ( on peut résoudre le problèrne en soustrayant C de A >.

Résultats

Nous avons mené deux types d'analyse pour identifier les différences de flexibilité mentale : (1) une analyse de la performance selon le groupe d'âge en considérant le pourcentage de découverte spontanée de la solution au problème 8, la nature et le nombre d'aides nécessaires pour découvrir la solution eI, (2) une analyse des procé- dures utilisées au cours des problèmes 9 et l0 consécutifs au problème

< impasse > afin de dégager des différences entre les sujets dans le bénéfice tiré de I'impasse.

Enfin, nous avons analysé dans chacun des groupes d'âge le com- portement de résolution sur I'ensemble des problèmes de sujets flexi- bles et moins flexibles.

I. Analyse cle la perfonrLance selon l'âge

l.l. Répartition selon l'âge des sujets qui ont découvert la solution au problème 8 sans aide

La majorité des sujets jeunes ('73,33%) découvre la solution du

problème 8 sans aide tandis que seulement20%o des sujets âgés décou-

vrent la solution sans aide (voir tableau 2). Cette différence est signifi-

cative (Xz : 9.666 ; p < .005).

(7)

Tableau 2. Pourcentage et effectif des sujets qui découvrent spontanément la solution au problème B.

Adultes (n: 15) Agés (n : l5)

Découverte sans aide 13,33 % (tl)

20 % (3)

Les sujets jeunes découvrent plus facilement la procédure adéquate pour ce problème. Ce résultat va dans le sens de notre hypothèse : les sujets âgés sont plus sensibles à I'effet de set.

A l'issue du problème, lorsque nous demandons aux sujets

pourquoi ils n'ont pas trouvé spontanément la solution, la plupart d'entre eux nous a dit qu'elle pensait devoir utiliser les trois quantités

A, B, C. Ainsi, au cours des résolutions successives, les sujets ont traité une caractéristique invariante commune aux problèmes et cons- truit une contrainte subjective qui est de s'imposer d'utiliser les trois quantités disponibles. Pour découvrir la solution du problème 8, il faut abandonner cette contrainte et construire une nouvelle représentation dans laquelle seules deux quantités sont à prendre en compte.

1.2. Répartition des sujets qui découvrent la solution au problème 8 avec aides en fonction de l'âge

73,330Â (ll/15) des sujets âgés ont au moins besoin des deux premières aides pour découvrir la solution alors que seulement 200lo (3/15) des sujets jeunes ne découvrent pas la solution avant la deuxième aide (voir tableau 3).

La différence est significative (X2: 8,56 ; p < .005).

Tableau 3. Répartition des sujets selon l'âge et l'aide nécessaire pour découvrir la solution.

Sujets jeunes (n : 4)

Sujets âgés (n : I 1)

Les sujets âgés ont donc besoin d'aides d'un niveau de profondeur d'explicitation plus important pour pouvoir trouver la solution.

L2

2 6 A1

I I

A3 I

5

(8)

FLEXIBILITE ET VIEILLISSEMENT 249

Dans ce contexte, les aides ont pour fonction de guider le sujet à changer de point de vue sur le problème. En effet, dans l'étude de la résolution de problèmes d'insight du type de l'échiquier tronqué (Anderson, 1995 ; Wickelgren, 1974), Kaplan et Simon (1990) ont montré que le niveau d'explicitation des aides données par I'expéri- rnentateur avait une influence sur la découverte de solution. Dans notre recherche, rnalgré les aides fournies, les sujets âgés ont plus de

difficultés à abandonner la contrainte subjective qu'ils ont construite.

Ce n'est qu'à la présentation de I'aide qui spécifie qu'on peut résoudre le problème avec seulement 2 quantités, que la rnoitié des sujets âgés découvre la solution.

2. Analt,se cles procéclures utilisées (lu cours tles problèntes 9 et 10.

L'analyse des procédures utilisées au cours de ces deux problèmes consécutifs au problèrne < impasse > devrait nous confirmer les dif- férences de bénéfice que les sujets tirent de I'impasse. En effet, les

plus flexibles devraient coder I'information pertinente des problèmes

et ne pas mettre en æuvre la procédure où les 3 quantités sont utilisées, bien que cette procédure permette de trouver la solution. En revanche, les sujets moins flexibles devraient utiliser la prernière procédure enseignée sans tirer profit de ce qu'ils ont découvert lors du problème < impasse >.

Globalement, au cours des deux problèmes consécutifs au pro- blèrne impasse, les sujets se différencient quant aux procédures qu'ils utilisent (voir tableau 4).

Dans le problèrne 9, certains continuent d'utiliser la procédure de

résolution des problèmes précédants. et I'effet de set est plus marqué dans le groupe des personnes â-eées que dans celui des jeunes adultes (respectivernenT 7115 et 3,11-5). Toutefois cette différence n'est pas

significative au ser.ril habituel.

Pour le problèn,e i0. on observe la rnênte tendance. Dans les deux groupes d'âge, certains sujets appliquent la procédure de I'effet de set.

ll est à noter néanmoins que plus de la moitié (9/15) des personnes âgées utilisent cette procédure alors que seulement 3 des I5 adultes jeunes l'utilisent. La différence est significative (Xr :4,48; p < .05).

Enfin, deux procédures (1B-lB+1A+lC) et (18-lB+lA-1C) ont eté mises en æuvre par un mêrne sujet du groupe des jeunes adultes.

Nous interprétons ces procédures cotltfire un cotnprolris entre la

contrainte < utiliser les 3 quantités disponibles > et la découverte

parlielle de la quantité pertinente à utiliser dans les problèrnes 9 et 10.

(9)

En effet, ces deux procédures sont semblables: le sujet a découvert qu'on pouvait résoudre le problème avec les 2 quantités A et C, rnais n'abandonne pas l'utilisation de la quantité B en faisant une opération qui annule cette quantité (B-B).

Tableau 4. Types de procédures utilisées et effectifs selon l'âg,e.

Procédure plus simple

Procédure de I'effet

de set

1B-lB+14+1C 1B-18+14-1C

Pb9 Pb l0 Pb9 Pb 10 Pb9 Pb r0

Sujets jeunes (n : 15')

il lt J J

I I

Sujets âgés (n : 15)

8 6 7 9

Les différences de procédures utilisées au cours des problèmes confirment les différences de flexibilité entre les deux groupes d'âge

qui s'expriment par des différences de bénéfices tirés après le pro- blème impasse.

En résumé, les résultats issus des deux types d'analyse que nous avons menés sur les problèmes 8,9 et 10 sont cohérents et valident I'hypothèse d'une moins grande flexibilité mentale chez les personnes âgées : dans ces situations elles sont plus sensibles au phénomène de mécanisation de la pensée.

Néanmoins nous avons pu observer dans cette recherche des diffé- rences à I'intérieur de chaque groupe d'âge. Certains jeunes adultes se sont montrés plus sensibles à I'effet de set que d'autres. De la même façon, certaines personnes âgées se sont révélées plus flexibles que d'autres. Nous présentons ci-après les deux grands profils de réso-

lution dans les deux groupes d'âge sur I'ensemble des l0 problèmes (voir tableau 5).

Comme on peut le noter dans ces profils, la moins grande

flexibilité des sujets (eune et âgé) se manifeste d'une part dans la non découverte spontanée de la solution au problème impasse et, d'autre part, dans la réitération après ce problème de la procédure de

I'effet de set. Les aides foumies par I'expérimentateur ne sont pas

suffisantes pour attirer I'attention du sujet sur les caractéristiques

pertinentes et n'ont pas d'effet sur la suite des résolutions.

(10)

FLEXIBILITE ET VIEILLISSEMENT

Tableau 5. Profils.fleribles et peu.flexibles ou L'ours tle la résolution des l0 problètnes che:. les su.jets.jeunes et les personnes âgées.

Problèmes 2 à 7 (effet

de set)

Problème 8 (problème imoasse)

Problèmes

9et10

(nbs tests) Sujet jeune

flexible

Effet de set Découverte solution sans aide

Procédule nlus sinrnle Sujet âgé

flexible

Effet de sel Découverte solution avec l aide

Procédure plus simple Sujet jeune

peu flexible

Efïet de set Découvelte solution avec 3 aides

Procédure de I'effet de set

Sujet âgé peu flexible

Effet de set Découverte solution avec 3 aides

Procédure de I'effet de set

Discussion

Nous avons mis en évidence dans cette recherche des différences de flexibilité chez le jeune adulte et la personne âgée en terme de différence à gérer une situation d'impasse et à en tirer profit pour I'adaptation du comportement dans la suite des résolutions. pour certains sujets, I'impasse est une condition nécessaire pour apprendre sur la situation et s'engager après impasse dans I'analyse des données du problèrne. Ils découvrent dans ce cas la procédure la plus adaptée.

Pour d'autres, l'impasse n'est pas suffisante pour s'engager dans un nouveau codage de la situation et ne rnodifie pas le comportement consécutif. On peut interpréter ces différences de flexibilité comrne des différences dans le contrôle et la régulation de I'activité. Lors de la confrontation des résultats obtenus avec les données initiales du pro- blème, certains sujets vont réajuster leur comportement en s'engageant

à nouveau dans I'analyse des données initiales du problèrne. Les autres, engagés dans I'exécution de la tâche, réitéreront les mêmes comportements sans prendre en compte les différences entre les résultats de leurs actions et le but poursuivi. Luria (1980) décrivait la difficulté des patients frontaux à réajuster leur comportement après confrontation des résultats obtenus avec les données initiales des

situations. Les sujets les rnoins flexibles dans notre étude présentent les mêmes difficultés.

251

(11)

Par ailleurs, nous avons pu mettre en évidence que les aides fournies explicitement par I'expérimentateur ne sont pas suffisantes pour amener le sujet peu flexible dans le traitement des données pertinentes du problème.

Enfin, I'analyse des profils montre des différences de flexibilité entre les deux groupes d'âge d'une part, mais elle témoigne aussi d'une grande variabilité interindividuelle au sein d'un même groupe d'âge. La capacité à se réengager dans le codage du problème et à tirer bénéfice d'une situation impasse est un indice pertinent pour appré- hender les différences de flexibilité mentale au cours du vieillis-

sement.

Conclusion

En conclusion, nous pensons avoir montré que la capacité à se

réengager dans le codage du problème et à tirer bénéfice d'une situation impasse sont des indices pertinents pour appréhender les différences de flexibilité mentale au cours du vieillissement.

Les objectifs à moyen et long termes d'une telle recherche sont la mise en place de prises en charge individualisées et adaptées en vue d'< une vieillesse réussie > (Baltes & Baltes, 1990 ; Fontaine &

Pennequin, \99'/). Notre expérience en maison de retraite nous a con- firmée le désarroi et le manque de formation du personnel face à la population qu'il accueille. Nous pensons que le développement de connaissances sur le devenir des processus cognitifs au cours du vieillissement sont indispensables pour envisager des aides indivi- dualisées en fonction des capacités préservées (Fontaine & Toffart, 2000) et des processus cognitifs affectés par l'âge.

Dans ce but, nous envisageons de nouvelles recherches qui visent à

comparer les situations les plus efficaces pour perrnettre à I'individu de se désengager de I'exécution et de se réengager dans le codage de la situation.

Nous pensons qu'inciter I'individu à expliciter ce qu'il fait pendant

qu'il résout le problème devrait favoriser la prise de conscience et la

découverte spontanée des procédures adéquates.

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FLEXIBILITE ET VIEILLISSEMENT 253 Références

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Références

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