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Paléo-environnement et comportements de subsistance des derniers Néandertaliens et des premiers hommes modernes : étude taphonomique de la faune de la grotte d’El Castillo (Espagne)

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Academic year: 2022

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Thesis

Reference

Paléo-environnement et comportements de subsistance des derniers Néandertaliens et des premiers hommes modernes : étude taphonomique de la faune de la grotte d'El Castillo (Espagne)

LURET, Mathieu

Abstract

En Espagne, la grotte d'El Castillo fait partie des grottes emblématiques de la région Cantabrique notamment pour les peintures rupestres qui lui a valu d'être inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO en 2008 sous le titre de « La grotte Altamira et l'art rupestre paléolithique du nord de l'Espagne ». Ce site archéologique est aussi réputé pour sa séquence stratigraphique présentant plusieurs phases d'occupations préhistoriques et en particulier les technocomplexes se succédant lors de la transition Paléolithique moyen/supérieur, qui font l'objet de ce présent travail. Ce mémoire s'intéresse à la reconstitution paléo-environnementale et à la détermination des modalités de subsistance des populations humaines entre la fin du Paléolithique moyen et le début du Paléolithique supérieur. Nous avons effectué une analyse archéozoologique/taphonomique sur le matériel osseux de la faune des niveaux 21 et 20 (Moustérien), du niveau 19 et du niveau 18(Aurignacien de transition de type El Castillo 18C).

LURET, Mathieu. Paléo-environnement et comportements de subsistance des derniers Néandertaliens et des premiers hommes modernes : étude taphonomique de la faune de la grotte d'El Castillo (Espagne). Thèse de doctorat : Univ. Genève, 2017, no. Sc.

5117

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:107181 URN : urn:nbn:ch:unige-1071811

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:107181

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FACULTÉ DES SCIENCES Professeure Marie BESSE

Professeure Ariane BURKE

Paléo-environnement et comportements de subsistance des derniers Néandertaliens et des premiers hommes modernes : étude

taphonomique de la faune de la grotte d’El Castillo (Espagne)

THÈSE

Présentée à la Faculté des sciences de l’Université de Genève pour obtenir le grade de docteur ès sciences, mention interdisciplinaire

par

Mathieu LURET

de France

Thèse n°5117

Atelier d’impression ReproMail Genève

2017

UNIVERSITÉ DE GENÈVE

Département F.-A. Forel des sciences de l’environnement et de l’eau Laboratoire d’archéologie préhistorique et anthropologie

UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL (Canada) Département d’Anthropologie

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Remerciements

C’est avec beaucoup de plaisir que j’adresse aujourd’hui mes remerciements.

À Marie Besse, Professeure et Responsable du Laboratoire d'archéologie préhistorique et anthropologie, Département F.-A. Forel des sciences de l’environnement et de l'eau, Sciences de la Terre et de l'environnement, Université de Genève, Suisse.

Merci Marie d’avoir accepté de diriger ce travail. Ton soutien, tes encouragements, ta disponibilité, le temps que tu as consacré à la relecture et les commentaires constructifs ont contribué à la bonne réalisation de ce travail, pour tout cela je te suis sincèrement reconnaissant.

À Ariane Burke, Professeure au Département d'anthropologie, Université de Montréal, Canada.

Merci Ariane de m’avoir proposé ce sujet de thèse et de l’avoir co-dirigé. Pour ton soutien et l’intérêt que tu as porté à ce travail, pour le temps passé à la relecture et nos échanges qui m’ont permis d’avancer et de réaliser ce travail, pour tout cela je te remercie.

À Jean-Christophe Castel, Docteur en Archéozoologie, Chargé de recherche au Muséum d’Histoire Naturelle de Genève, Suisse.

Merci pour tout. Merci d’avoir fait confiance à cet étudiant curieux que tu as découvert dans

tes fouilles, de m’avoir formé à l’archéozoologie et de m’avoir donné l’envie de continuer dans cette voie, sans toi je n’en serais pas là aujourd’hui. Nos discussions et tes remarques constructives ont grandement contribué à la réalisation de ce travail. Pour tout cela, je ne te remercierais jamais assez. Merci également d’avoir accepté de faire partie du jury.

À Federico Bernaldo de Quiros, Docteur en Archéologie, Area de prehistoria, Universidad de Leon, Espagne.

Je vous remercie pour m’avoir autorisé à étudier le matériel faunique issu des fouilles que vous avez dirigées dans la grotte d’El Castillo. Nos nombreux échanges m’ont permis également de

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comprendre le site, ce qui m’a beaucoup aidé pour la réalisation de ce travail. Merci d’avoir accepté d’être membre du jury de cette thèse.

À Ana Belen Marin Arroyo, Professeure à l’Instituto Internacional de Investigaciones Prehistoricas de Cantabria, Universidad de Cantabria, Espagne.

Je tiens à vous remercier d’avoir accepté de juger ce travail.

À Stéphanie Girardclos, Docteure en sciences de la Terre, Département des sciences de la Terre, Université de Genève, Suisse. Merci de me faire l’honneur de juger ce travail.

La réalisation de ce travail a été possible grâce à plusieurs financements. Nous remercions le Fond National Suisse (FNS) d’avoir cru en ce projet et de l’avoir financé pendant une durée de 3 ans (Grant - 143415). Nous remercions également la bourse Augustin Lombard (Société de Physique et d’Histoire Naturelle de Genève), qui a nous a octroyé par deux fois une bourse pour financer les deux déplacements que nous avons réalisés à Santander pour étudier le matériel présenté dans ce travail. Ces financements ont grandement facilité mon travail et m’ont permis de finir ce projet dans le temps imparti.

Merci à Pedro Angel Fernandez Vega, directeur del Museo de Prehistoria y arqueologia de Cantabria de m’avoir autorisé, en 2013, à venir étudier le matériel de la grotte d’El Castillo et qui a mis à ma disposition bureau et matériel pour réaliser mon étude. Et merci à son successeur, Roberto Ontaño Peredo, qui m’a également autorisé à étudier le matériel entre 2014 et 2015.

J’en profite pour remercier les membres du laboratoire du Museo de Prehistoria y arqueologia

de Cantabria, et en particulier Adriana Chauvin, qui m’ont accueilli chaleureusement et qui m’ont permis de réaliser mon étude dans de très bonnes conditions.

Ma gratitude va envers ces personnes qui ont contribué à la réalisation de ce travail :

- la docteure Élisabeth Issaieva, pour ton aide dans les réalisations des analyses statistiques réalisées dans ce travail.

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3 - Renée Moubarak-Nahra pour ton soutien et ton aide précieuse lors de l’étude du matériel, et pour avoir été là durant une grande partie de ce travail.

- Le docteur Amjad Al Qadi pour les relectures et ton aide dans la compréhension de l’industrie lithique de la grotte d’El Castillo.

- Julie Debard pour les relectures de mon travail, tes conseils et ton amitié.

- Claudine Abegg pour les traductions en anglais et les gâteaux au chocolat !

Je remercie l’ensemble des membres du Laboratoire d'archéologie préhistorique et anthropologie pour leur soutien, leur conseil, les discussions de tout et de rien, les parties de badminton, les apéros …

Julie, Claudine, Ève, Stefano, Gaëlle, Amjad, Jessica, PYN, Bubu, Marisa, Eva, Matteo, Jordan, Jocelyne, Tara, Lucie, Giorgos, Déborah, Anouk, Gabi, Tobias, Alessandra, Anaïs, Jean, Anass, Mireille, et tous ceux que j’oublie !

Un petit mot pour Jacqueline Studer qui m’a accueilli au département d’archéozoologie (Muséum d’Histoire Naturelle de Genève) en 2009 et qui suit depuis avec intérêt l’avancée de mon travail.

Un immense merci à ma famille. Papa et Maman merci de m’avoir soutenu depuis le début de mes études et encouragé à poursuivre mes envies, merci pour le temps passé à la relecture de ce manuscrit. Merci à mon petit frère qui a toujours été là pour moi. Merci à tout le reste de la famille, ma tante, mon oncle, mes cousins et cousines.

Le dernier remerciement est pour ma grand-mère, à qui j’aimerais dédier ce travail.

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SOMMAIRE

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5 INTRODUCTION

8-13

1- LA GROTTE D’EL CASTILLO 14-45

2 - CONTEXTE ENVIRONNEMENTAL ET ARCHÉOLOGIQUE 46-70

3- ÉTUDES ANTÉRIEURES SUR LE MATÉRIEL FAUNIQUE DE LA GROTTE D’EL CASTILLO

71-95

4 – MATÉRIEL ET MÉTHODOLOGIE 96-147

5- RÉSULTATS 148-243

6 - INTERPRÉTATION 244-275

7 - DISCUSSION 276-293

8 - CONCLUSION GENERALE 294-297

BIBLIOGRAPHIE 298-337 ANNEXES

338-365

Table des Illustrations 366-379

Table des Annexes 380-383 Table des matières

384-393

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INTRODUCTION

Vu du Mont El castillo.

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Introduction

La grotte d’El Castillo (Puente Viesgo, Cantabrie, Espagne) est une grotte emblématique d’Espagne classée au patrimoine mondial de l’UNESCO sous le titre de « La grotte Altamira et l’art rupestre paléolithique du nord de l’Espagne » depuis 2008. La grotte revêt un intérêt particulier par la détermination de plusieurs niveaux d’occupations humaines et en particulier ceux de la fin du Paléolithique moyen et du début du Paléolithique supérieur. Le contexte

archéologique de la transition entre les derniers représentants de l’espèce néandertalienne (Homo néandertalensis) et l’apparition des hommes modernes (Homo sapiens) en Europe de l’Ouest fait l’objet de nombreux questionnements. C’est sur cette période charnière entre la fin

du Paléolithique moyen et le début du Paléolithique supérieur que notre étude se concentre et en particulier sur les stratégies de subsistance adoptées par les groupes préhistoriques se succédant au cours de cette période.

L’histoire de la grotte d’El Castillo commence en 1903 lorsque Don Hermilio Alcalde del Río fit sa découverte. C’est l’une des découvertes les plus importantes de la région à l’époque, après la découverte de la grotte d’Altamira en 1868. Après avoir effectué un premier sondage,

qui montra un potentiel archéologique intéressant, Don Hermilio Alcalde del Río découvre les peintures rupestres en 1906, qui font la renommée de la grotte. À la suite de cette découverte, d’éminents archéologues s’intéressent à la grotte pour son potentiel archéologique. En 1910, Hugo Obermaier, avec la collaboration de Paul Wernet, de l’Abbé Breuil, de Don Hermilio Alcalde del Río et de l’abbé Bouyssonie, commence les fouilles de la grotte d’El Castillo sous l’égide de l’Institut de Paléontologie Humaine (Paris) et du Prince Albert 1er de Monaco.

En cinq années, ils mettent au jour une série d’occupations allant du Paléolithique moyen au Néolithique, incluant l’ensemble des cultures de Paléolithique supérieur. Après l’arrêt des fouilles en 1914 pour cause de première guerre mondiale, ce n’est qu’en 1980 qu’une équipe de chercheurs dirigée par V. Cabrera-Valdés entreprend de nouvelles fouilles de la cavité.

Ces nouvelles fouilles se concentrent sur les niveaux correspondant à la transition entre le Paléolithique moyen (niveaux 21 et 20) et le Paléolithique supérieur (niveau 18) avec comme

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10

Introduction

problématique de mieux comprendre cette transition et d’explorer le lien entre la disparition

des Hommes de Néandertal et l’émergence de l’Homme anatomiquement moderne dans la région cantabrique (Cabrera-Valdés et al., 2001). C'est lors de ces fouilles que fut défini un niveau Aurignacien transitoire nommé « L’Aurignacien de transition du type El Castillo 18B et 18C » (Cabrera-Valdés et al., 2001), connu à ce jour uniquement dans ce site et qui fait aussi la renommée de la grotte.

La définition de cette nouvelle culture de transition a fait l’objet de critiques (Zilhao et D’Errico,

2003) contestant l’attribution culturelle du niveau 18, en se basant sur les publications traitant des industries lithiques et osseuses (Cabrera-Valdés et al., 2001 ; Maillo-Fernandez, 2002), mettant en avant un remaniement stratigraphique de ce niveau avec le niveau sous-jacent.

Les arguments avancés pour un « Aurignacien de transition », Cabrera-Valdés et al. (2001) s’appuient sur l’analyse du matériel lithique et osseux, il est donc préférable de garder cette définition.

La transition entre le Paléolithique moyen et supérieur dans la grotte de El Castillo aurait eu lieu entre 47 000 et 37 000 ans avant le présent (BP), selon les dates reçues pour les niveaux de transition (Cabrera-Valdés et Bischoff, 1989 ; Hedges et al., 1994 ; Cabrera-Valdés et al., 1996

; Bernaldo de Quiros et al., 2006 ; Wood et al., 2016) (Voir 1-6 - La Chronologie). Au cours de cette période charnière, les Hommes préhistoriques occupant la région Cantabrique évoluent dans un environnement tempéré froid dominé par les plaines (xérophiles et steppiques) et la présence également de forêts (Dari et Renault-Miskovsky (2001). Des variations climatiques ont eu lieu au cours de cette phase correspondant aux Greenland stadial (GS 13 à 8) et interstadial (GI 12 à 7), celles-ci ne sont pas forcément visibles dans le contexte stratigraphique et palynologique, mais les analyses palynologiques démontrent que les niveaux 20 et 18C

correspondent à une reconquête partielle de l’environnement par les forêts alors que dans le sous-niveau 18B la steppe reconquiert le territoire (Dari et Renault-Miskovsky (2001). La faune confirme l’environnement tempéré froid dominé par le milieu ouvert avec la présence d’espèces

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11

Introduction

de plaine (cheval et bison/auroch, rhinocéros) (Dari et Renault-Miskovsky (2001) présentes dans les niveaux 21, 20, 19 et 18. La présence de forêts est aussi confirmée par la détermination de restes de chamois et de chevreuil (Dari et Renault-Miskovsky (2001) également dans ces niveaux. La présence de reste de cerf, animal ubiquiste, en abondance confirme la diversité de l’environnement (plaines et forêts).

Nous proposons ici une étude archéozoologique complète sur l’ensemble de matériel osseux extrait lors des fouilles Cabrera-Valdés/Bernaldo de Quiros (1980-2011), correspondant aux niveaux 21, 20, 19 et 18 définis par Cabrera-Valdés (1984) et datés entre 47 000 et 37 000 BP.

Ce matériel correspond à 20 487 restes déterminés et 138 070 restes indéterminés, répartis sur l’ensemble des niveaux étudiés. Cette étude nous permettra de comprendre les modalités de subsistance des derniers groupes Moustérien et des premiers occupants Aurignacien et de dresser les chaînes opératoires de traitement du gibier pour ces deux cultures archéologiques afin de les comparer. Nous pourrons ainsi voir si les stratégies d’acquisition du gibier et les modalités d’exploitation des carcasses ont changé ou non au cours des transformations

climatiques successives et au cours de la transition entre le Paléolithique moyen et supérieur.

Ainsi ces informations, nous permettent d’avancer sur le questionnement entourent cette période charnière où les hommes de Néandertal et les hommes modernes sont présents en Europe de l’ouest. A cette période pouvons-nous observer des différences entre les stratégies d’acquisition et d’exploitation de l’animal dans les différents technocomplexes étudiés ?

La grotte d’El Castillo n’est pas le seul site de la corniche Cantabre à avoir livré des niveaux archéologiques pour la période de transition entre le Paléolithique moyen et Paléolithique supérieur (ex : Sopeña, Covalejos, Morin, …). En effet, le Moustérien et l’Aurignacien sont bien documentés dans la région et les cultures de transition ont désormais été identifiées dans d’autres sites qui ont livré du Proto-aurignacien (Labeko Koba et La Viña) et du Châtelperronien (La Güelga, Ekain et Labeko Koba). Dans un premier temps, nous confronterons les données archéozoologiques des différents sites avec celles obtenues pour El Castillo, puis nous

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Introduction

envisagerons de dresser, si possible, les stratégies de subsistance mises en œuvre sur la corniche Cantabrique lors de la transition entre Paléolithique moyen et Paléolithique supérieur.

Dans ce travail, nous avons effectué une description de la grotte d’El Castillo (Voir : 1- La grotte d’El Castillo) en exposant l’historique de découverte et des fouilles archéologiques. Dans ce même chapitre, nous abordons les différentes études déjà réalisées sur le matériel issu des différentes fouilles (1-5 - Stratigraphies, 1-6 - chronologie, 1-7 - l’attribution culturelle des niveaux de la grotte d’El Castillo). Le second chapitre (Voir : 2 - Contexte environnemental et archéologique) est consacré au le contexte archéologique et environnemental de la grotte d’El Castillo et de la corniche Cantabre en nous appuyant sur les différentes études déjà effectuées dans ces domaines. Le chapitre suivant (Voir : 3 - Études antérieures sur le matériel

faunique de la grotte d’El Castillo) correspond à une synthèse des données Paléontologique/

Archéozoologique antérieures réalisées sur le matériel des fouilles Obermaier 1910-1914 et celles de Cabrera-Valdés/Bernaldo de Quiros 1980-2011. Les derniers chapitres sont consacrés à notre étude sur le matériel faunique. Dans le chapitre 4 nous définirons le matériel étudié ainsi que la méthodologie utilisée pour son étude (Voir : 4 - Matériel et méthodologie). Les résultats obtenus lors de l’étude de restes fauniques sont exposés dans le chapitre 5- Résultats, qui sont organisés par niveaux stratigraphiques. Le chapitre 6 est consacré aux interprétations (Voir : 6 - Interprétations). C’est dans ce chapitre que nous proposons une interprétation niveau par niveau des indices taxonomiques et taphonomiques qui nous permettent une interprétation plus globale sur l’origine de l’accumulation des restes fauniques et sur les stratégies de subsistance des différents groupes culturels se succédant dans la grotte d’El Castillo. Le chapitre 7 (Voir : 7 - Discussion) est consacré à la discussion des résultats de ce travail mis en relation avec un contexte plus global issu des données des différents sites archéologiques de Cantabrie ayant livrés de niveaux archéologiques de cultures similaires à ceux étudiés dans la grotte d’El Castillo (Moustérien, Châtelperronien, Proto-aurignacien, Aurignacien). La conclusion est réalisée dans le dernier chapitre (Voir : 8 - Conclusion générale).

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1 - La Grotte d’El Castillo

Entrée de la grotte d’El Castillo au début du XXe siècle.

Source : Las Cavernas de la Región Cantábrica (Fernández Vega, Garciá Diez, Hurel) 2010.

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1 - La Grotte d’El Castillo

Figure 1-1 : Situation géographique de la grotte d’El Castillo (Puente Viesgo, Cantabria, Espagne. Fond de carte Google earth

1-1 Description

La grotte d’El Castillo se situe au nord-ouest de l’Espagne dans la corniche Cantabre, entre la côte atlantique et la cordillère cantabrique, près du petit village de Puente Viesgo (Figure 1-1).

Le réseau fluviatile de la région a conduit à la formation de vallées fermées. Puente Viesgo se

trouve dans la vallée du Pas, traversée par la rivière du même nom. Une des rares ouvertures au nord de cette vallée se situe au niveau du village de Puente Viesgo. La grotte d’El Castillo surplombe le passage, et c’est ainsi qu’elle a offert aux différents occupants de la grotte la possibilité de dominer les voies de communication de la vallée du Pas.

La grotte s’ouvre à 195 m d’altitude sur le versant nord-est du Monte Castillo qui culmine à 355 m asl. La colline de Monte Castillo possède plusieurs réseaux karstiques, creusés dans

du calcaire du Carbonifère (345-325 Ma), contenant des grottes ornées, notamment : Las Chimeneas, la Pasiega, Las Monedas, et El Castillo (Figure 1-2). Ces quatre grottes sont inscrites au Patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2008 sous le titre de « La grotte Altamira et l’art rupestre paléolithique du nord de l’Espagne ».

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Figure 1-2 : Plan topographique du système karstique du Monte Castillo (Puente Viesgo, Cantabrie, Espagne) (D’après le club de spéléologie de Garcia, In. Cabrera-Valdés, 1984). En gris le chemin actuel menant à l’entrée

de chaque grotte.

1-2 La découverte et les premières fouilles

C’est en novembre 1903 que Don Hermilio Alcalde del Río fit la découverte de la grotte d’El

Castillo. À la suite de cette découverte il réalisa, la même année, un sondage dans ce qu’il nomma « la première chambre ». Cela lui permit d’évaluer l’énorme potentiel archéologique du site et d’établir la première coupe stratigraphique du remplissage de la grotte, atteignant une profondeur de 2,20 mètres (Alcade del Rio, 1906 ; Breuil et Obermaier, 1912). Il définit ainsi 7 niveaux de A à G (Cabrera-Valdés, 1984 : p. 39-45), de haut vers le bas :

- Le niveau A correspond au sol actuel de la grotte, composé de blocs et de plancher stalagmitique.

16

1 - La Grotte d’El Castillo

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- Le niveau B est formé de sédiment calcaire et de terre végétale (30 cm) et contient également des fragments d’ossements humains et de la céramique.

- Le niveau C (20cm) est le premier niveau archéologique contenant du matériel attribuable au Magdalénien et présentant également des fragments de céramiques (attribuables au Néolithique et/ou à l’Âge du Bronze).

- Le niveau D est une couche stérile d’argiles de 2 cm.

- Le niveau E est la deuxième unité archéologique avec des objets en silex attribuables au Magdalénien.

- Le niveau F est un niveau stérile d’argile de 30 cm.

- Le niveau G est le dernier niveau archéologique décrit par Alcade del Río et fait 125 cm de profondeur. Dans les premiers 60 cm se succèdent des couches de cendres de quelques centimètres, puis une couche d’argile de 2 cm et une couche d’os bréchifiés sans plus de détail ni d’attribution culturelle. Dans l’ensemble du niveau, il a été trouvé une grande abondance de restes fauniques.

En 1906, Alcade del Río décrit pour la première fois les peintures rupestres de la grotte d’El Castillo (Alcade del Río, 1906). Ces peintures sont désormais datées entre 37,63 et 22,88 ka BP (Pike et al., 2012).

Les peintures rupestres sont en cours d’étude par l’équipe de Marc Groenen (CReA, Université Libre de Bruxelles) qui a permis de recenser environ 2 500 unités graphiques peintes, dessinées, gravées et sculptées (Groenen, 2012).

1-3 Les fouilles Obermaier 1910-1914

Après les sondages de Alcade del Rio les premières fouilles commencent en 1910 sous la direction d’Hugo Obermaier, avec la collaboration de Paul Wernet, de l’Abbé Breuil, de Don Hermilio Alcalde del Río et de l’abbé Bouyssonie, sous l’égide de l’Institut de Paléontologie Humaine (IPH) et du Prince Albert 1er de Monaco (Figure 1-3).

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1 - La Grotte d’El Castillo

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Figure 1-3 : Entrée de la grotte d’El Castillo en 1909. À droite : le Prince Albert 1er de Monaco ; à gauche : Alcade del Rio, H. Breuil et H. Obermaier. (Fernandez Vega et al., 2010)

Ces premières excavations se concentrent sur le talus composé d’énormes blocs de pierre, rendant difficile d’accès l’entrée dans la grotte. La fouille s’étend sur environ 135 m² et sur 7 m de profondeur (Figure 1-4). Deux niveaux stratigraphiques sont reconnus : le premier niveau

archéologique, décrit dans un premier temps comme du « Eneolitico » (chalcolithique), fût déterminé comme datant de l’Age du bronze après la découverte d’objets en métal (Cabrera- Valdés, 1984). Il oscille entre 40 et 80 cm d’épaisseur et se caractérise par la présence de fragments de céramique et de meules, ainsi que d’objets de bronze. Le deuxième niveau décrit est attribué à l’Azilien (30-60cm d’épaisseur).

Dès 1910, Paul Wernet localisa différentes zones de la grotte où apparaissent les peintures rupestres, confirmant la présence d’une importante occupation paléolithique. Cette étude de

l’art pariétal fut complétée par le travail de Hermilio Alcade del Rio, Henri Breuil et Lorenzo Sierra dans leur ouvrage « Les cavernes de la région Cantabrique (Espagne) » publié en 1912.

1 - La Grotte d’El Castillo

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19 En 1911, la campagne de fouille s’étend du mois d’avril à la mi-août; la majeure partie de la fouille se concentre sur le talus extérieur de la grotte qui obstrue l’entrée du vestibule (Figure 1-3 et 1-4). La description du talus est divisée en deux unités : la zone à l’intérieur du vestibule et la zone extérieure. Dans ces deux zones ont été décrits un niveau Néolithique à céramique et un niveau Azilien à harpon azilien. À ceci se rajoutent deux niveaux attribués par Obermaier au Magdalénien : les niveaux Magdalénien A et B, découverts uniquement dans la zone

intérieure du vestibule (Breuil et Obermaier, 1912). C’est au cours de cette même année qu’a été découverte la grotte ornée voisine de La Pasiega (Figure 1-2), lors de prospections autour de la grotte d’El Castillo.

1 - La Grotte d’El Castillo

Figure 1-4 : Plan du vestibule d’entrée de la grotte d’El Castillo représentant les zones fouillées et plan topographique du système karstique de la grotte d’El Castillo (Réseau karstique d’après M. Groenen, In http://

crea.ulb.ac.be/Castillo.html (2017), Zones fouillées (d’après Cabrera-Valdés et al., 1993).

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De 1912 à 1914, l’équipe d’Obermaier fouille le vestibule (Figure 1-4). Cette entreprise a conduit à l’excavation de plus de 2/3 du porche d’entrée jusqu’à 25 m de profondeur, soit des

milliers de mètres cube de sédiment. Les méthodes de fouille du début du 20e siècle n’incluaient pas le tamisage du sédiment et prenaient donc en compte uniquement les vestiges de grande taille et de belle facture, conduisant à la perte probable d’une importante quantité de matériel.

Malgré cela, la séquence stratigraphique établie à la suite des 3 premières années de fouilles est remarquablement détaillée pour l’époque (Figure 1-5). La présence de la totalité des cultures du Paléolithique supérieur, de l’Azilien à l’Aurignacien font de cette grotte l’une des plus importantes découvertes de l’époque en Espagne.

En 1912, la fouille se concentre dans l’intérieur du vestibule durant 3 mois. L’équipe continue le sondage effectué le long du talus lors de l’année précédente, poursuivant la fouille le long

du mur nord (Figure 1-4). C’est lors de cette campagne qu’une des pièces emblématiques de la grotte, un bâton percé en bois de cerf (Figure 1-6), a été découverte dans le niveau Magdalénien A. Il est actuellement exposé au Muséo de prehistoria y arqueología de Santander.

1 - La Grotte d’El Castillo

Figure 1-5 : Coupe stratigraphique réalisée par Obermaier à la fin des fouilles de 1912 (In Fernandez Vega et al., 2010)

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1 - La Grotte d’El Castillo

En 1913, la fouille a duré 4 mois en reprenant la continuité de l’année précédente et en s’étendant vers l’est (Figure 1-4). Un nouveau niveau est défini, le niveau Moustérien G, qui sera associé

à l’Acheuléen en 1914. Le changement d’attribution de ce niveau serait dû à la découverte de bifaces selon Cabrera-Valdés (1984).

En 1914, la quasi-totalité de l’intérieur du vestibule fut fouillée (Figure 1-4), permettant à l’équipe d’obtenir une stratigraphie complète (Figure 1-10) et de définir 12 phases d’occupation anthropique de la grotte incluant des niveaux Enéolithique, Azilien, deux niveaux Magdalénien, un niveau Solutréen, quatre niveaux Aurignacien (alpha à delta) et trois niveaux Moustérien (alpha à gamma) (Figure 1-5).

Obermaier et son équipe ont été contraints de suspendre leurs activités dans la grotte d’El Castillo en raison de la première guerre mondiale et n’ont jamais pu les reprendre. Après la guerre, la grotte fut exploitée comme site touristique et un parking a été mis en place devant la grotte avant 1970 (Figure 1-7). Ce n’est qu’en 1980 qu’une équipe de chercheurs espagnols, dirigée par Victoria Cabrera-Valdés, décide de reprendre l’excavation dans la grotte, et cette fois-ci, avec des techniques de fouilles modernes.

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Figure 1-6 : Bâton percé du niveau Magdalénien A de El Castillo (source: http://cuevas.culturadecantabria.com/

el-castillo/ (2017)).

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Figure 1-7 : Entrée de la grotte d’El Castillo en 1970 (photo de F. Bernaldo de Quiros).

1-4 Les fouilles Cabrera-Valdés/Bernaldo de Quiros - 1980-2011

C’est en 1980 que commencent les fouilles modernes de la grotte d’El Castillo qui se poursuivent jusqu’en 2011 sous la direction de Victoria Cabrera-Valdés et de Federico Bernaldo de Quiros.

L’objectif principal de ces nouvelles fouilles étant l’étude de la transition Moustérien/

Aurignacien (Cabrera-Valdés et al., 2001, p. 508), la solution envisagée est de fouiller sous le parking construit juste devant la grotte (Figure 1-7). Ce dernier a en effet permis de conserver les niveaux archéologiques intacts. Cette zone se situe dans la partie extérieure du vestibule, à la limite de la fin de la fouille d’Obermaier et correspond à l’emplacement du talus qui a

été déblayé en 1910 par l’équipe d’Obermaier (Figure 1-8). Le premier niveau, situé sous le parking, est le niveau 13, correspondant à un niveau stérile selon Obermaier (Figure 1-9 et 1-10). Il manque donc toute la partie sommitale de la stratigraphie.

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La nouvelle campagne de fouille commença par la révision de la stratigraphie établie lors des fouilles précédentes. De 1980 à 1984 Cabrera Valdés se concentre sur le matériel des fouilles Obermaier et à la reprise de la stratigraphie. Ce travail a fait l’objet d’une thèse en 1984 intitulée « El yacimiento de la cueva de El Castillo (Puente Viesgo, Santander) » (Cabrera-Valdés, 1984). Cette révision fut possible non seulement grâce aux notes laissées par Obermaier, qui furent comparées aux coupes stratigraphiques encore en place dans la grotte, mais aussi grâce à l’étude du matériel issu des fouilles Obermaier par Cabrera-Valdés et aux observations lithostratigraphiques. C’est ainsi que Cabrera-Valdés (1984) identifia 26 niveaux stratigraphiques correspondant aux niveaux décrits par Obermaier et elle ajoute de nombreux sous-niveaux (Figures 1-9 et 1-10). Cette nouvelle description stratigraphique est plus précise, notamment pour certains niveaux qui ont été divisés en sous-niveaux, correspondant souvent à des foyers (Figure 1-9).

Figure 1-8: Entrée de la grotte en 1980, début de la fouille 1980-2011 (photo de F. Bernaldo de Quiros).

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Figure 1-9: Stratigraphie réalisée par Cabrera-Valdés (Cabrera-Valdés, 1984). Description sédimentaire des niveaux et sous-niveaux et correspondance effectuée avec les niveaux définis par Obermaier 1914.

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25 Avant de commencer la fouille, il a donc été nécessaire de détruire le parking et d’enlever les sédiments en dessous de celui-ci qui correspondaient à des éboulements des niveaux 13 à 17, (niveaux stériles), les niveaux 14 et 16 ne sont pas représentés dans cette zone (Cabrera-Valdés et al., 1993). Les nouvelles fouilles se concentrent sur une superficie de 45 m² qui fut réduite à 24 m² à partir du niveau 18 à cause de la présence de gros blocs calcaires dans la zone externe et à 3 m² pour la zone de la coupe longitudinale (Cabrera-Valdés et al., 1993) (Figure 1-4). Le premier niveau intact à être fouillé est le niveau 18 correspondant à l’Aurignacien δ d’Obermaier (Figure 1-9). Ce niveau est subdivisé en 3 sous-niveaux stratigraphiques : le 18A (stérile) et le 18B et 18C, correspondant à de l’Aurignacien de transition selon Cabrera-Valdés et al. (2001, 2004). Le niveau 19, qui correspond à un niveau stérile entre le niveau moustérien α et le niveau Aurignacien δ de Obermaier, a été divisé en 3 sous-niveaux stratigraphiques : 19Sup, 19Base,

et le niveau 19 (stérile en industrie lithique, mais pas en faune). Sous-jacent au niveau 19, vient le premier niveau Moustérien, le niveau 20, que Cabrera-Valdés subdivise d’abord en 2 sous- niveaux « a » et « b » (Cabrera-Valdés, 1984, p : 105) puis en 4 sous-niveaux stratigraphiques,

Figure 1-10: Description des niveaux stratigraphiques et comparaison entre les fouilles 1910-1914 (D’après Cabrera-Valdés, 1984) et les fouilles 1980-2011 (D’après Cabrera-Valdés et al., 1993).

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20A/B, 20C, 20D, 20E appartenant selon elle à la même unité culturelle (Source : base de données de la fouille, Cabrera-Valdés et al., 1993, Cabrera-Valdés et al., 2001)

Le niveau 21, considéré stérile par Obermaier, a livré de l’industrie lithique lors des fouilles plus récentes (Maillo Fernandez et al., 2004). Ce niveau est subdivisé en deux sous-niveaux stratigraphiques, 21a et 21b et reste à définir, d’autant plus que très peu d’études des assemblages

issus de ce niveau ont été réalisées (Maillo Fernandez et al., 2004). L’attribution de ce niveau sera discutée dans les parties «1-5 La Stratigraphie, p. 26-31», «1-6 La chronologie, p. 32- 33» et «1-7 L’attribution culturelle des niveaux de la grotte d’El Castillo, p.34-45». On notera également la présence du niveau 22 qui a livré des vestiges archéologiques récoltés lors de rectifications et l’effondrement des coupes, ce niveau n’ayant pas été fouillé lors des fouilles 1980-2011. Le matériel des trois niveaux moustériens provient de la coupe longitudinale de 3 m² (N16, N17, N18) et également des effondrements de coupes de cette zone (M16, M17, M18) (Figure 1-4).

En 2005, suite au décès de Victoria Cabrera-Valdés, Federico Bernaldo de Quiros reprend la direction de la fouille et dirige les campagnes de fouille entre 2005 et 2011. En 2011, la fouille s’arrête au sommet du niveau 20 pour la zone externe, et au milieu du niveau 21 pour la coupe longitudinale.

Depuis 2011, il n’y a plus eu de fouilles sur le site d’El Castillo.

1-5 La Stratigraphie

Le gisement d’El Castillo est bien connu pour sa longue séquence stratigraphique dont une succession d’occupations paléolithiques, s’échelonnant dans le temps depuis le Paléolithique inférieur jusqu’à l’Énéolithique. Comme nous l’avons vu précédemment, la grotte a été fouillée par deux équipes, celle d’Obermaier au début du 20ᵉ siècle et celle de Cabrera-Valdés et Bernaldo de Quiros de la fin du 20ᵉ au début du 21ᵉ siècle. Les fouilles Obermaier ont couvert plus de

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deux tiers du vestibule sur près de 20 m de profondeur ; la stratigraphie réalisée reste exploitable et différencie une série de 12 occupations distinctes (Figure 1-6). Cabrera-Valdés a réussi à corréler les niveaux stratigraphiques de ces fouilles (1980-2011) avec ceux d’Obermaier (1910- 1914) (Cabrera-Valdés 1984) (Figure 1-10). Elle identifie également plusieurs sous-niveaux, notamment pour les niveaux 18 et 20 (Figure 1-11) lors des fouilles 1980-2011 (Cabrera-Valdés et al., 1993).

L’équivalence des niveaux stratigraphiques entre les déterminations d’Obermaier et les nouvelles attributions faites par Cabrera-Valdés sont répertoriées dans la Figure 1-9 pour l’ensemble des niveaux stratigraphiques. Pour cette étude, seuls les niveaux moustériens et aurignaciens sont étudiées. Le niveau 22 moustérien de Cabrera-Valdés correspond au Moustérien β de Obermaier.

Le niveau 21 moustérien de Cabrera-Valdés équivaut au Moustérien entre α et β de Obermaier.

Figure 1-11: Séquence stratigraphique du site d’El Castillo établie par Cabrera-Valdés et al., (1993) lors des fouilles 1980-2011.

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Le niveau 20 moustérien de Cabrera-Valdés est l’équivalent du Moustérien α de Obermaier. Le niveau 19 de Cabrera-Valdés concorde avec le niveau entre moustérien α et Aurignacien δ de Obermaier. Le niveau 18 « Aurigancien de transition » de Cabrera-Valdés colle avec le niveau Aurignacien δ de Obermaier.

Dans ce qui suit, nous décrirons en détail les niveaux qui font l’objet de notre étude, c’est-à-dire les niveaux moustériens « α » et « β » et le niveau « stérile » intercalé (22, 21 et 20), le niveau

aurignacien (18) et le niveau stérile (19) intercalé entre le niveau 20 et 18. Nous rajouterons à ce descriptif le niveau 17, niveau dont nous n’avons pas analysé les restes fauniques, mais qui nous permettra de mieux cerner le contexte de notre étude.

Nos observations s’appuieront essentiellement sur le travail de Cabrera-Valdés et al., 1993, sauf mention contraire, notamment pour les niveaux 22 et 21 qui n’ont pas été décrits dans cette publication.

Niveau 22 :

Ce niveau n’a pas fait l’objet d’étude lors des fouilles 1980-2011. Nous reprenons donc les informations sur le niveau Moustérien β provenant de la fouille Obermaier, cités dans Cabrera- Valdés (1984) qui établira trois sous-niveaux pour ce niveau (Figure 1-9).

D’une puissance sédimentaire de 50 à 80 cm, le niveau 22 est composé d’une matrice limoneuse coupée par de fines strates de cendres et de manganèse. Les restes fauniques sont abondants et présentent une minéralisation et une calcification importantes. L’industrie lithique est aussi abondante (Cabrera-Valdés, 1984 p. 106).

Niveau 21 :

D’après la description d’Obermaier (Cabrera-Valdés, 1984), ce niveau a une puissance sédimentaire de 10 centimètres et est constitué d’un limon jaune clair et de concrétion, Obermaier

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le définit comme stérile archéologiquement (Figure 1-9 et 1-10). Selon Cabrera-Valdés (1984) le niveau 21 se trouve entre le Moustérien α et β. Seule la zone supérieure du niveau 21 a été fouillée lors des recherches de 1980-2011 et plusieurs sous-niveaux ont été définis : 21sup, 21A, 21B, 21BI, 21BM ; 21BE (source : base de données des fouilles 1980-2011). Aucune description stratigraphique de ces sous-niveaux n’est actuellement pas disponible. Lors des

fouilles 1980-2011, le niveau 21 a livré des restes fauniques et lithiques, il n’est donc pas stérile archéologiquement. C’est sur ce point que l’attribution du niveau 21 avec le niveau Moustérien entre α et β d’Obermaier peut être remise en question. Notre discussion avec le responsable de

fouille, F. Bernaldo de Quiros, laisse entendre que le niveau 21 pourrait correspondre à la base du niveau 20 (F. Bernaldo de Quiros, pers. comm. 2015), mais sans information complémentaire la partie fouillée de ce niveau restera attribuée au sommet du niveau 21.

Niveau 20 :

D’une épaisseur comprise entre 32 et 45 cm, le niveau 20 se compose d’argile sableuse brune foncée et riche en matière organique. On y retrouve une abondance de cailloux calcaires dispersés et très altérés. Cette sédimentation provient de ruissellements venant de l’entrée de la grotte en alternance avec des épisodes de solifluxion. À ceci s’ajoute la chute de blocs provenant

des parois de la grotte par gélifraction et l’abondance des restes lithiques et fauniques (Cabrera- Valdés et al., 1993).

Cinq sous-niveaux ont été désignés: 20A, 20B, 20C, 20D et 20E. Les niveaux 20A et 20B

sont désormais considérés comme un seul niveau, 20AB, qui résulterait de nettoyage de foyer (Cabrera-Valdés et al., 2005 p. 518 ; Cabrera-Valdés et al., 2006 p. 458). Le niveau 20C contient également un foyer avec au moins deux épisodes distincts d’utilisation, matérialisé par la présence d’accumulation de charbon entre 2-5 cm d’épaisseur avec une superficie de 1 m² ;

une date radiocarbone provenant du foyer indique un âge de 43 300 ± 3800 BP (Gifa 92506 In.

Cabrera-Valdés et al., 2004 p. 182). Les couches 20C1 et 20C3 correspondent à des lentilles

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sédimentaires qui ne sont pas présentes dans l’ensemble du sous-niveau.

Au niveau karstique, il y a très peu d’apports de l’intérieur de la grotte dans le niveau 20. Ceci est dû à la fermeture progressive du conduit de la partie inférieure qui se comble complètement.

Niveau 19 :

D’une puissance sédimentaire de 45 à 55 cm, ce niveau est composé d’argile limono-sableuse marron-jaunâtre avec des « canaux à base horizontale, parfois légèrement marqués par l’érosion, avec lits discontinus de graviers et de sables » (Cabrera-Valdés et al., 1993 p. 32). Comme pour le niveau 20, on retrouve des cailloux calcaires altérés en quantité ainsi que des grands blocs tombés de la voûte. Cette sédimentation est le résultat d’apport énergétique par des eaux superficielles et de glissements par solifluxion provenant de la zone sud-ouest de l’entrée.

La présence de pierres calcaires est due à des phases de gel/dégel de faible intensité, et leur altération à des conditions de forte humidité. À partir du niveau 19, toute l’entrée de la grotte se comporte comme un grand abri avec des apports sédimentaires ne provenant plus de l’intérieur de la grotte.

Le niveau 19 contient de l’industrie lithique à la base et au sommet, attribuée respectivement à un remaniement du sommet du niveau 20 et de la base du niveau 18C respectivement (Bernaldo de Quiros, pers. comm. 2015). Les restes fauniques sont, quant à eux, présents dans l’ensemble du niveau (voir 5-4 Résultats – niveau 19, p.104)

Niveau 18 :

Le niveau 18 a subi de grandes déformations causées par la chute de gros bloc. Dans la partie la moins modifiée, son épaisseur atteint tout de même 20 à 30 cm. Au niveau sédimentaire, ce niveau n’est pas homogène. En effet, bien que la matrice sédimentaire soit la même dans la zone externe et zone intermédiaire (argiles brunes, riches en matière organique, en blocs calcaires et cailloux anguleux), dans la zone inférieure l’apport détritique calcaire est moins 30

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important que la matière organique. La zone intermédiaire est aussi marquée par un lit plus sablonneux calcaire, d’une épaisseur de 5 à 8 cm. La sédimentation de ce niveau est lente et les apports extérieurs se font par solifluxion. La sédimentation par des eaux superficielles est plus marquée dans la partie intermédiaire. La chute de blocs par gélifraction est modérée à la base et plus intense au sommet, qui marque la fin de la sédimentation de ce niveau par le plus grand éboulement de blocs de la voûte. Ce dernier épisode a entraîné le recul du porche de la grotte.

Le niveau 18 est divisé en trois sous-niveaux archéologiques (18A, 18B, 18C). Le sous-niveau 18A est archéologiquement stérile, les sous-niveaux 18B et 18C sont attribués à l’Aurignacien de transition (Aurignacien δ de Obermaier). Globalement, le sous-niveau 18B représenterait une aire de boucherie et le sous-niveau 18C, riche en charbon et contenant de nombreux restes lithiques et osseux, serait une aire de rejet issue du nettoyage épisodique de foyers (Cabrera- Valdés et al., 2005 p. 518 ; Cabrera-Valdés et al., 2006 p. 458).

Niveau 17 :

D’une épaisseur de 40 à 45 cm, le niveau 17 est divisé en 3 sous-niveaux, 17c (15-17cm), 17 b (7-9cm) et 17a (18-20cm). Ces sous-niveaux présentent tous une matrice limoneuse marron, des graviers et du sable calcaire, seule la taille des cailloux et leur état de conservation changent.

Pour le 17c, ils sont de taille petite à moyenne, très altérés ou anguleux-frais. Au contraire, le 17 b est caractérisé par des petits cailloux sous-anguleux altérés en surface et le 17a montre des petits cailloux altérés. Ces remplissages sédimentaires proviennent d’apports colluviaux de l’extérieur de la grotte, tandis que les roches calcaires, anguleuses sont la conséquence de gélifraction de faible intensité.

Ce niveau est considéré comme archéologiquement stérile, mais la présence de restes fauniques est attestée. La faune n’ayant pas fait l’objet d’une étude dans le cadre de ce travail, son origine reste à déterminer.

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1-6 La chronologie

Les datations absolues effectuées sur le matériel ont été réalisées par deux méthodes : la résonance de spin électronique (ESR) et la datation radiocarbone par spectrométrie de masse par accélérateur (AMS). Nous ne discuterons pas ici de la fiabilité de l’une ou l’autre méthode

de datation et prendrons donc en compte ces datations telles qu’elles ont été publiées (Figure 1-12) en tenant compte toutefois de la stratigraphie du site et de l’attribution culturelle des témoins archéologiques propres aux niveaux concernés.

Les dates sur le matériel archéologique, obtenues par ESR, provenant des niveaux 22 et 21 montrent un intervalle compris entre 79 500 ± 4 300 BP et 59 100 ± 5 000 BP (Rink et al., 1997). Ces niveaux correspondent donc au stade isotopique 4 et la fin du stade 5. Les datations du niveau 21 sont réalisées sur du matériel provenant de la base de ce niveau, ce qui pourrait expliquer que les dates obtenues sont dans la même fourchette que celles obtenues pour le

niveau 22 (Rink et al., 1997). Les datations absolues sont donc parfaitement cohérentes avec l’attribution culturelle de ce niveau au Moustérien.

Les dates AMS du niveau 20 sont quant à elles comprises entre 49 400 ± 3 700 BP et 39 300

± 1 900 BP soit dans le stade isotopique 3 (MIS 3). Les dates AMS (Bernaldo de Quiros et al., 2006 ; Wood et al., 2016) sont cohérentes avec les dates ESR (Liberda et al., 2010), qui donnent un âge moyen de 42,7 +/- 3,5 ka BP. La fourche d’âge est donc parfaitement cohérente avec l’attribution culturelle de ce niveau au Moustérien. Un hiatus d’au moins 8 000 ans entre le niveau 21 et le niveau 20 est donc suggéré.

Les premiers niveaux d’occupation attribuables au Paléolithique supérieur ont livré des datations

AMS s’étalant de 43 100 ± 1 700 BP à 39 500 ± 2 000 BP pour le sous-niveau Aurignacien 18C et de 46 000 ± 2 400 à 37 000 ± 2 200 BP pour le sous-niveau Aurignacien 18B (Cabrera- Valdés et Bischoff, 1989 ; Hedges et al., 1994 ; Cabrera-Valdés et al., 1996 ; Bernaldo de Quiros

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Figure 1-12: Datations absolues réalisées sur le matériel des niveaux 22, 21, 20, 19, 18, 16/17 et 16 de la grotte d’El Castillo.

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et al., 2006 ; Wood et al., 2016). Les dates obtenues pour les niveaux 20, 19, 18C et 18B se chevauchent. Cela suggère qu’entre la fin de l’occupation moustérienne du niveau 20 et le début

de l’occupation « aurignacien de transition » du niveau 18C, le laps de temps est de très courte durée, et correspond au niveau 19 stérile daté à 44 900 ± 2 100 BP.

Les datations obtenues pour les niveaux 20 et 18, soit entre 45 000 et 36 000 BP coïncident avec

l’intervalle entre les évènements de Heinrich 4 et 5 (ou l’oscillation de Moershoofd, Vidal et al., 1999) et correspondant à la période entre le GI-13 et GS-9. Si on considère uniquement les datations réalisées par Wood et al. (2016), obtenues par la méthode de l’ultrafiltration, méthode qui élimine les contaminants dans les échantillons, et rend donc ces dates plus fiables que celles effectuées sans cette méthode. On remarque que ces dates sont légèrement plus anciennes, dans chaque niveau archéologie, que les datations obtenues sans cette méthode.

Le contexte chrono-stratigraphique de la transition montre une succession de niveaux

archéologiques proches dans le temps, ce qui pourrait impliquer une succession rapide des occupations dans la grotte d’El Castillo.

1-7 L’attribution culturelle des niveaux de la grotte d’El Castillo

La première attribution culturelle de l’ensemble des niveaux de la grotte d’El Castillo a été

proposée par Obermaier (voir 1-3 Les fouilles Obermaier 1910-1914, p.19) en se basant sur la typologie (les fossiles directeurs) (Figure 1-9). En 1984 Cabrera-Valdés révise le matériel lithique des fouilles Obermaier (1910-1914) couplé avec le matériel issu des nouvelles fouilles (1980-2011) et avec ses collègues, propose des attributions culturelles pour les niveaux 22, 21, 18

et 16 basées sur une lecture technotypologique (Cabrera-Valdés et al., 2001 ; Maillo Fernandez et al., 2004 ; Maillo Fernandez et al., 2010 ; Maillo Fernandez, 2012). Nous présenterons ici les caractéristiques de chaque industrie pour les niveaux moustériens 21 et 20 et pour le niveau aurignacien 18.

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1-7-1 Niveaux moustériens

L’étude sur le matériel lithique provenant du niveau 21 souligne la présence d’un débitage lamellaire. Celui-ci se caractérise par des pièces lithiques majoritairement taillées en quartzite de grains fins. Les nucléus ont une morphologie prismatique d’une modalité de débitage bipolaire

(Maillo Fernandez et al., 2004). Les supports se présentent sous forme de petites lames de morphologies rectangulaires avec une préparation sur l’envers, soit abrasive, soit par retouche.

Dans le sous-niveau 21 supérieur, les supports sont réalisés en quartzite de grains fins, mais également en silex. Ces supports correspondent à des lames de section triangulaire ou trapézoïde

avec une préparation sur l’envers par retouche ou abrasion (Maillo Fernandez et al., 2004). On a également retrouvé dans le sous-niveau 21sup une lamelle de type « Dufour » (Maillo Fernandez et al., 2004), qui est une lamelle retouchée caractéristique de l’Aurignacien (Le Brun-Ricalens et al., 2001). La production lamellaire est traditionnellement liée au Paléolithique supérieur et en particulier aux premières étapes de l’Aurignacien. La présence donc de cette production dans des niveaux Paléolithique moyen concorde avec Bar Yosef et Kuhn (1999), qui remettent

en question l’hypothèse selon laquelle cette production est la vraie révolution du Paléolithique supérieur (BarYosef et Kuhn, 1999).

Globalement, le niveau 20 moustérien est caractérisé par un débitage discoïde unifacial et bifacial, et par un débitage Levallois. Dans chaque sous-niveau, on distingue également une production lamellaire quasi similaire au niveau 21 (Maillo-Fernandez et al., 2004) avec la présence de lamelles « Dufour ». Le niveau 20E a fait l’objet d’une étude approfondie par Sanchez-Fernandez et Bernaldo de Quiros (2008). Le matériel lithique est réalisé sur quartzite à grains fins en majorité, puis en quartzite à gros grains. Quelques pièces en grès, en cristal de

roche et en calcaire sont également mises en évidence. Le sous-niveau 20E est caractérisé par la présence d’un débitage discoïde, unifacial et bifacial, ainsi que Levallois. D’après Sanchez- Fernandez et Bernaldo de Quiros (2008), la technique discoïde unifaciale est réalisée sur

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Figure 1-13: Industrie lithique provenant des niveaux Moustérien 21 et 20 (Figure de Maillo-Fernandez et al., 2004).

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quartzite à grains fin, alors que la technique bifaciale s’utilise sur la quartzite à gros grains et sur ophite. La technique Levallois est identifiée sur dix nucléus de modalité bipolaire unipolaire ou centripète, sur quartzite à grains fins et sur quartzite à gros grains. On observe également dans le matériel du sous-niveau 20E des nucléus de type Quina et Kostienki. On notera également la présence de racloirs classés technologiquement comme du type 0 de Tixier (Sanchez-Fernandez et Bernaldo de Quiros, 2008). De plus, on distingue aussi plusieurs pièces retouchées de typologie variée dont les caractéristiques correspondent aux assemblages moustériens. Au sein

du débitage Levallois de ce niveau, on constate la présence de pièces provenant d’un schéma lamellaire. On notera la présence de trois lamelles de type « Dufour » (Sanchez-Fernandez et Bernaldo de Quiros, 2008). Les produits retouchés de ce niveau 20E sont représentés par des denticulés et des racloirs avec des retouches de types Quina (Sanchez-Fernandez, 2005

; Sanchez-Fernandez et Bernaldo de Quiros, 2008) (Figure 1-13). L’attribution culturelle est donc Moustérien Quina.

1-7-2 L’Aurignacien de transition (niveau 18)

Globalement, les industries du niveau 18 (sous-niveaux 18C et 18B) se caractérisent par la

présence des éléments aurignaciens réalisés sur des supports obtenus à travers un débitage de technique moustérienne (Cabrera-Valdés et al., 2001). Ces caractéristiques technologiques moustériennes associées aux éléments typiques aurignaciens font des niveaux 18 (sous niveaux 18C et 18B) des niveaux de transition dans lesquels une industrie dénommée « Aurignacien de transition de type Castillo 18B » est observable (Cabrera-Valdés et al., 2001).

Le matériel lithique du niveau 18 a permis de définir une production lithique dominée par le

débitage discoïde unifacial et bifacial, avec la présence de débitage récurrent centripète et d’un débitage lamellaire bipolaire (Op.Cit.). Quelques schémas de débitage simples (incluant un débitage pseudo-centripète) ont également été identifiés, ainsi que plusieurs autres concepts technologiques. Le premier concept technologique est le plus simple. Il consiste en un débitage

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à partir de galets de quartzite à grains fins pour produire des supports qui sont transformés dans le sous-niveau 18C en racloirs et grattoirs (Cabrera-Valdés et al., 2001). La deuxième technique de débitage s’effectue sur des galets de quartzite à grains fins sans préparation préalable. On retrouve des grattoirs carénés dans les deux sous-niveaux auxquels s’ajoutent

des racloirs, des denticulés et des burins dans le sous-niveau 18B. On parle ici d’un débitage

« pseudo » centripète (Cabrera-Valdés et al., 2001). La troisième technique la plus complète est le débitage qui se caractérise par les mêmes phases décrites précédemment, auxquelles

s’ajoute une méthode récurrente centripète (Cabrera-Valdés et al., 2001). On obtient ainsi une plus grande production de grattoirs dans le sous-niveau 18B et des grattoirs, des racloirs, des burins, des troncatures, des denticulés et des pointes à l’intérieur de sous-niveau 18C. Une dernière technique de débitage est observée, il s’agit d’un débitage laminaire ou lamellaire unipolaire (Cabrera-Valdés et al., 2001). En ce qui concerne le sous-niveau 18C, le débitage est de type Levallois, réalisé sur quartzite vert pour produire des éclats laminaires, alors que dans le sous-niveau 18B, la technique utilisée appartient à celle du Paléolithique supérieur pour la conception de lames et lamelles (Cabrera-Valdés et al., 2001). Dans les deux sous-niveaux (18B et 18C) ont été mises en évidence des lames de types aurignaciennes en silex (Cabrera-Valdés et al., 2001) (Figure 1-14).

Les premières traces d’industrie osseuse et d’art mobilier sont retrouvées dans le niveau 18, où les chercheurs ont pu identifier 25 pièces dans de la collection Obermaier (Cabrera-Valdés V.,

1984 ; Corchon Rodriguez S., 1986 ; Giménez la Rosa, 2006) et 9 pièces provenant des fouilles modernes (sous-niveau 18C et 18B) (Moran et Tejero, 2006). Parmi ces pièces sont déterminés 6 sagaies complètes, 7 fragments de sagaies, 4 fragments de bois de cerf travaillés, 4 os gravés, 5 os travaillés, 2 pendentifs, 2 os perforés, 1 spatule, 1 coin et 1 ciseau (Figure 1-15). Toutes ces pièces d’industrie osseuse ont été réalisées en bois de cerf ou en os de cerf (Giménez la Rosa, 2006) sauf un pendentif réalisé à partir d’une canine d’ours brun (Ursus arctos) (Moran et Tejero, 2006). Un seul objet non osseux a été identifié, il s’agit d’une plaquette en grès gravée.

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Figure 1-14: Industrie lithique provenant du niveau Aurignacien de transition 18 (Figure de Cabrera-Valdés et al., 2001).

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Les sagaies retrouvées dans le niveau 18 sont toutes de types « sagaie à base fendue » (Giménez la Rosa, 2006), caractéristiques de l’Aurignacien ancien. Sur les 13 sagaies, 9 sont en bois de cerf, 3 en fragments de diaphyses de cerf et 1 en côte de cerf.

Le ciseau, le coin, les os et bois travaillés sont une série d’instruments à usage technique pour créer d’autres instruments lithiques ou en os (Giménez la Rosa, 2006). Quant aux objets gravés, aucune figure n’a pu être déterminée.

1-7-3 Les restes humains

Les restes anthropologiques sont relativement rares dans le gisement, seuls les niveaux 22, 21, 20, 18B et 8 (Magdalénien inférieur) ont livré des ossements humains. Les niveaux moustériens ont livré trois restes humains, une quatrième prémolaire supérieure droite retrouvée dans le niveau 20, une phalange proximale droite du second doigt dans le niveau 21 et une première

incisive droite dans le niveau 22. Ces trois restes humains présentent des caractéristiques robustes et sont attribuables à la lignée néandertalienne (Garralda, 2005).

Les restes anthropologiques du niveau 18B (Aurignacien de transition) sont donc au nombre de 15 dont 3 fragments de crânes d’adultes, 7 fragments de crânes d’enfants, 1 fragment de mandibule d’enfant et 4 dents isolées. Ces ossements appartiennent à au moins 4 enfants et 1 adulte (Garralda, 2006). Les os humains provenant des fouilles Obermaier incluent des fragments crâniens d’adulte, une deuxième molaire inférieure droite d’adulte, des fragments

crâniens d’enfant, ainsi qu’un fragment de mandibule d’enfant. Malheureusement, ces objets ont été perdus et les seules descriptions que nous avons sont celles de H.V. Vallois dans des notes envoyées à Obermaier en 1933 et une description de la mandibule d’enfant faite par J.M. Basabe en 1984. Plusieurs auteurs ont envisagé de reprendre ces données afin d’essayer

de déterminer à quels hominidés ces restes appartiennent, notamment, Garralda M.D. et al., (1992). Aucun des chercheurs précités n’a pu conclure sur l’espèce, la variabilité des spécimens se trouvant aussi bien dans la variabilité connue des Néandertaliens que des Hommes modernes.

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Figure 1-15: Industrie osseuse et art mobilier du niveau 18 de la grotte d’El Castillo (Figure de Tejero et al., 2005) 1 - La Grotte d’El Castillo

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En 2006, Garralda (Garralda, 2006) reprend les os découverts lors des campagnes Obermaier et rajoute les nouvelles découvertes faites lors des fouilles menées par Cabrera-Valdés, à savoir, une deuxième molaire inférieure droite d’un enfant de plus de 8 ans, une première incisive

supérieure gauche d’enfant de 5 ans ± 16 mois et une première molaire supérieure gauche d’un enfant de 9 ans ± 24 mois. Ces nouvelles données ont permis de montrer les caractères archaïques de ces restes d’hominidés qui, d’après Garralda (2006), se rapprochent davantage de la lignée néandertalienne que des populations modernes.

1-7-4 Synthèse

Le matériel lithique issu des niveaux 21 et 20 est défini comme Moustérien ; les restes humains issus de ces niveaux sont attribués à Homo neandertalensis (Garralda, 2005). Pour le niveau 18, les restes d’hominidés n’ont pas trouvé d’attribution spécifique, mais Garralda (2006) a montré

que ces restes se rapprochent davantage de la lignée néandertalienne que des populations modernes.

Notre étude s’inscrit donc dans le contexte d’une transition entre le Paléolithique moyen, associée aux derniers représentants du genre néandertalien, et l’émergence du Paléolithique supérieur. Le Paléolithique supérieur est généralement associé aux hommes modernes en Europe

de l’Ouest, mais certains auteurs (Cabrera-Valdés et al., 2000, 2001 ; Maillo Fernandez et al., 2004, Bernaldo de Quiros et Maillo Fernandez, 2009) considèrent qu’une transition locale a eu lieu dans la Péninsule ibérique, notamment à El Castillo. Cette hypothèse a des implications sérieuses par rapport à l’évolution de notre lignée et l’attribution de l’Aurignacien à H. sapiens uniquement.

L’analyse archéologique du site d’El Castillo est d’autant plus intéressante puisque l’étude de l’industrie lithique et osseuse a permis de définir un niveau Aurignacien « de transition » : « L’Aurignacien de transition du type El Castillo 18B et 18C » (Cabrera-Valdés et al., 2001).

Comme le Châtelperronien lors de sa découverte, l’identification d’un Aurignacien « de transition

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» soulève quelques désaccords. C’est en se basant exclusivement sur les différents articles traitant des études sur l’industrie lithique et de l’industrie osseuse que Zilhao et D’Errico (1999

; 2000 ; 2003) remettent en question les déterminations culturelles des sous-niveaux 18C et 18B de El Castillo. En effet, ces auteurs proposent plutôt que le niveau 18C soit moustérien, avec un remaniement des niveaux supérieurs responsable de la présence d’éléments diagnostiques de

l’Aurignacien. Pour cela ils avancent plusieurs arguments concernant l’attribution du matériel lithique, la stratigraphie du site et l’attribution des pièces d’industrie osseuse et de l’art mobilier au niveau 18. Le matériel lithique provenant des sous-niveaux 18C et 18B est, selon ces auteurs, plus proche d’un contexte Moustérien qu’Aurignacien. Pour cela, ils mettent en avant la forte concentration de pièces de type Moustérien et la rareté de pièces de type Aurignacien (Zilhao et D’Errico, 1999 ; 2000 ; 2003). Ils avancent également que ces éléments lithiques aurignaciens pourraient provenir d’un mélange stratigraphique avec le niveau sus-jacent, affirmation basée uniquement sur les publications.

D’après D’Errico et al. (1998) et Zilhao et D’Errico (2003), une partie de l’industrie osseuse et de l’art mobilier identifiés par Cabrera-Valdés et al. (1993 ; 2001) ne peuvent être considérés comme un argument en faveur d’un contexte Aurignacien. En effet, après l’étude d’une partie de ce matériel, les auteurs ont montré qu’une partie de ce matériel défini comme industrie ne

montre en réalité aucun indice de réalisation anthropique (D’Errico et al., 1998 ; Zilhao et D’Errico, 2003). Le reste du matériel portant des traces anthropiques n’est pas considéré, par ces chercheurs, comme typique de l’Aurignacien : « Objects with marks similar to those from level 18 are known in Mousterian contexts (for instance, at Morin, Isturitz, Noisetier, Ermitage, Ferrassie, Marillac, Suard, Vaufrey…) » Zilhao et D’Errico (2003, p : 325).

Nous soulignerons qu’à l’exception de quelques pièces d’art mobilier et d’industrie osseuse, la totalité de ce matériel n’a pas été étudié par Zilhao et D’Errico (1999 ; 2000 ; 2003). Ainsi, même si les arguments avancés sont concevables, ils demeurent théoriques. Les arguments avancés pour un « Aurignacien de transition » Cabrera-Valdés et al. (2001) s’appuient sur

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l’analyse du matériel lithique et osseux. Il est donc préférable de garder la définition émise par les chercheurs ayant étudié le matériel et donc de qualifier les sous-niveaux 18 de « Aurignacien de transition de types El Castillo 18B et 18C ».

C’est dans ce contexte particulier que nous engageons notre étude archéozoologique des niveaux 21, 20, 19 et 18. Cette analyse permettra d’apporter des éléments complémentaires à

la compréhension et la connaissance des modalités de vie des dernières cultures moustériennes (21 et 20) et de la transition (18) entre le Paléolithique moyen et supérieur dans la Péninsule ibérique.

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2 - Contexte Environnemental et Archéologique

Vue depuis le sommet du Mont d’El Castillo

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