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Cannabidiol : où en est-on ?

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Academic year: 2022

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Le Courrier des addictions (19) – n° 3 – juillet-août-septembre 2017 24

F F o o c c u u s s F F o o c c us u s

PHARMACOLOGIE

Comme le delta-9-THC, le cannabidiol se fi xe sur les récepteurs cannabinoïdes cérébraux CB1. Cependant, son affinité pour eux est environ 100 fois plus faible. Le cannabidiol ne possède pas d’eff ets euphorisants ni de potentiel addictif, ce qui a notamment fait l’objet d’une évaluation dans une étude randomisée en double aveugle, contre placebo (1).

D’après des études chez l’animal et, précliniques, chez l’homme, il pourrait avoir des propriétés antipsychotiques, anxiolytiques, antiépileptiques et anti-infl ammatoires (2).

ÉTUDES DES EFFETS CHEZ L’ANIMAL

Dans l’épilepsie

C’est la pathologie pour laquelle il existe le plus d’études évaluant les eff ets du cannabidiol : il possède une activité antiépileptique dans un

Cannabidiol : où en est-on ?

Cannabidiol : what’s up?

B. Angerville*, A. Dervaux*

modèle animal d’épilepsie temporale et d’épi- lepsie partielle (2). Il réduit notamment la sévé- rité des crises (2).

Dans les troubles psychotiques

Plusieurs études dans des modèles animaux de schizophrénie ont suggéré que le cannabidiol pouvait avoir un potentiel antipsychotique. Il pourrait notamment améliorer certains défi cits de l’inhibition du réfl exe de sursaut, proposé comme modèle d’endophénotype de schizo- phrénie chez l’animal, et aussi améliorer le comportement dans les interactions sociales (3).

Il pourrait également améliorer la cognition et les symptômes négatifs dans un modèle animal de schizophrénie (chez le rat) induite par une substance antagoniste des récepteurs NMDA, le MK-801 (3).

Dans les troubles anxieux

Une trentaine d’études ont suggéré que le cannabidiol pouvait être efficace dans des modèles animaux d’anxiété et de stress comportemental. Il modulerait l’acquisition ou l’extinction du conditionnement contextuel par la peur (4). Il pourrait interrompre l’apprentissage associatif de la peur par conditionnement chez le rat. Des données précliniques ont suggéré l’absence d’eff ets sédatifs (5) .

Dans les addictions

Dans l’addiction au cannabis, il pourrait dimi- nuer les eff ets aversifs du THC à fortes doses (6).

Dans l’addiction aux opioïdes, il peut réduire les eff ets de récompense de la morphine et de la recherche d’héroïne dans un modèle animal de dépendance à cette substance (7).

Dans l’alcoolodépendance il pourrait diminuer la consommation d’alcool et du nombre de rechutes, en diminuant les propriétés “renfor- çatrices” de l’alcool chez le rat (8).

ET CHEZ L’HOMME

Dans l’épilepsie

Un essai ouvert multicentrique (11 centres) sur plus de 200 patients a retrouvé que le cannabidiol réduisait la fréquence des crises d’épilepsie chez les enfants et les jeunes adultes hautement résistants aux traitements antiépileptiques classiques (9).

Dans les troubles anxieux

Un essai clinique randomisé en double aveugle contre placebo dans un groupe de sujets volontaires, présentant une anxiété sociale, mis en situation de parler en public (n = 24), a retrouvé que l’administration aiguë de cannabidiol (300 - 600 mg) réduisait l’anxiété induite expérimentalement (10).

Dans les addictions

Dans l’addiction au tabac, une étude évaluant l’effi cacité du cannabidiol contre placebo chez des fumeurs (n = 24) a retrouvé une réduction signifi cative du nombre de cigarettes fumées (40 %) durant une semaine de traitement (11). Dans l’addiction au cannabis, une étude a retrouvé une diminution des eff ets renforçateurs de cette substance et des biais attentionnels chez les sujets qui en consommaient dans un produit à haute teneur en cannabidiol, ce qui suggère un intérêt thérapeutique (12). Un cas de régression des signes de sevrage au cannabis, mais sans modifi cation du craving, a également été rapporté (13).

Dans l’alcoolodépendance, une seule étude portant sur 10 volontaires sains en crossover n’a pas retrouvé de diff érence concernant les eff ets subjectifs induits par l’alcool lors des évalua- tions après administration d’alcool seul versus après administration associée à celle de canna- bidiol (200 mg) [14].

Dans les troubles psychotiques

Un essai clinique randomisé en double aveugle portant sur des patients schizophrènes, évalués à l’aide de la PANSS (Positive And Negative

De nombreuses publications ont récemment mentionné le cannabidiol, qui est l’un des 2 principes actifs du cannabis avec le delta-9-tétrahydrocannabinol (delta- 9-THC), en raison de ses propriétés modulant les effets du delta-9-THC. Des études, préliminaires chez l’animal et précliniques chez l’homme, ont suggéré qu’il pouvait avoir un intérêt dans l’épilepsie de l’enfant et du jeune adulte, les troubles anxieux et psychotiques ou dans les addictions et d’autres pathologies psychiatriques et neurologiques. Nous présentons l’essentiel des publications récentes, toutes anglophones, qui ont fait une synthèse des nombreuses études sur ce sujet.

* Service de psychiatrie et addictologie de liaison, CHU Sud, Amiens ; Groupe de recherche sur l’alcool et les pharmacodépendances (GRAP)-équipe de Recherche Inserm ERI 24), Amiens.

Mots-clés : Cannabidiol, cannabis, épilepsie, troubles anxieux, troubles psychotiques, addictions

Keywords: Cannabidiol, cannabis, epilepsy, anxiety disorders, psychotic disorders, substance use disorders

Several studies recently focused on cannabidiol which is one of the principle psychoactive of cannabis with Delta-9-tétrahydrocannabinol (delta-9-THC). Cannabidiol modulates the effects of delta-9-THC.

Preliminary animal or human studies suggested that cannabidiol could be effective in epilepsy in children or young adults, anxiety disorders, psychotic disorders, substance use disorders or other psychiatric or neurological disorders. We focus on the main article reviews on this topic regarding therapeutic effects of cannabidiol.

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Fo c us Fo c u s

Focus Focus

Le Courrier des addictions (19) – n° 3 – juillet-août-septembre 2017

25 Syndrom Scale) et de la BPRS (Brief Psychiatric

Rating Scale), échelle abrégée d’appréciation psychiatrique, comparant l’effi cacité du canna- bidiol (n = 20) à celle de l’amisulpride (n = 19), pendant 4 semaines, a retrouvé une effi cacité comparable des 2 molécules (15). Il y avait moins d’eff ets indésirables dans le groupe de sujets recevant du cannabidiol, notamment moins de symptômes extrapyramidaux, de cas de prise de poids et d’hyperprolactinémie (15).

PERSPECTIVES

Plusieurs études évaluent actuellement les eff ets du cannabidiol dans les troubles psychotiques et les phobies sociales. Elles sont répertoriées sur clinicaltrials.com, site référençant les études cliniques en cours. Initialement américaines, maintenant internationales, les études doivent être enregistrées sur ce site pour être prises en compte par la FDA (Food and Drug Adminis- tration) ou être publiées dans des journaux à haut facteur d’impact.

Troubles psychotiques

Un essai randomisé en double aveugle est en cours dans la schizophrénie, comparant son effi cacité à celle de la clozapine (Leweke et al.) .

Addictions

Une étude d’imagerie fonctionnelle, randomisée, en double aveugle évalue actuellement ses eff ets dans l’addiction aux amphétamines (Justras- Aswad et al.) . Ses effets sur la dépendance à la cocaïne et aux opiacés et le maintien de l’abstinence dans ces addictions sont en cours d’investigation (Hurd et al.) .

Troubles anxieux

Un essai clinique de phase II, évaluant son effi - cacité en sublingual, est en cours de recrute- ment (Gruber et al.) .

Épilepsie

Plusieurs essais contrôlés randomisés, de forte puissance statistique, évaluant son effi cacité, notamment dans l’épilepsie résistante chez l’adulte et chez l’enfant, sont en cours.

CONCLUSION

Plusieurs études ont suggéré que le cannabidiol pouvait avoir un intérêt dans le traitement de divers troubles psychiatriques, addictologiques ou neurologiques. Néanmoins, même si les résultats sont prometteurs, ces études portent sur de petits eff ectifs, et leur niveau de preuve est faible à modéré, sauf en ce qui concerne les épilepsies résistantes , pour lesquelles la bonne tolérance semble plus argumentée. Des études de plus grande envergure restent nécessaires pour montrer son intérêt en pratique quotidienne.

Bernard Angerville déclare ne pas avoir de liens d’intérêts en relation avec le sujet de cet article.

Alain Dervaux déclare avoir des liens d’intérêts avec Lundbeck, Indivior, Otsuka, AstraZeneca, Janssen, sans rapport avec le sujet de cet article.

Références bibliographiques

1. Babalonis S, Haney M, Malcolm RJ et al. Oral can- nabidiol does not produce a signal for abuse liability in frequent marijuana smokers. Drug Alcohol Depend 2017;172:9-13.

2. Rong C, Lee Y, Carmona NE et al. Cannabidiol in medical marijuana: Research vistas and potential opportunities. Pharmacol Res 2017;121:213-8.

3. Gomes FV, Llorente R, Del Bel EA, Viveros MP, López-Gallardo M, Guimarães FS. Decreased glial reac- tivity could be involved in the antipsychotic-like eff ect of cannabidiol. Schizophr Res 2015;164(1-3):155-63.

4. Bitencourt RM, Pamplona FA, Takahashi RN.

Facilitation of contextual fear memory extinction and anti-anxiogenic eff ects of AM404 and cannabi- diol in conditioned rats. Eur Neuropsychopharmacol 2008;18(12):849-59.

5. Bergamaschi MM, Queiroz RH, Zuardi AW, Crippa JA.

Safety and side eff ects of cannabidiol, a Cannabis sativa constituent. Curr Drug Saf 2011;6(4):237-49.

6. Vann RE, Gamage TF, Warner JA et al. Divergent eff ects of cannabidiol on the discriminative stimulus and place conditioning eff ects of Δ9-tetrahydrocannabinol.

Drug Alcohol Depend 2008;94(1):191-8.

7. Katsidoni V, Anagnostou I, Panagis G. Cannabidiol inhibits the reward-facilitating eff ect of morphine: invol- vement of 5-HT1A receptors in the dorsal raphe nucleus.

Addict Biol 2013;18(2):286-96.

8. Viudez-Martínez A, García-Gutiérrez MS, Navarrón CM et al. Cannabidiol reduces ethanol consumption, motivation and relapse in mice. Addict Biol 2017; epub ahead of print.

9. Devinsky O, Marsh E, Friedman D et al. Canna- bidiol in patients with treatment-resistant epilepsy:

an open-label interventional trial. Lancet Neurol 2016;15(3):270-8.

10. Bergamaschi MM, Queiroz RHC, Chagas MH et al. Cannabidiol reduces the anxiety induced by simu- lated public speaking in treatment-naïve social phobia patients. Neuropsychopharmacology 2011;36(6):1219-26.

11. Morgan CJA, Das RK, Joye A, Curran HV, Kamboj SK. Cannabidiol reduces cigarette consumption in tobacco smokers: preliminary fi ndings. Addict Behav 2013;38(9):2433-6.

12. Morgan CJ, Freeman TP, Schafer GL, Curran HV.

Cannabidiol attenuates the appetitive effects of Delta 9-tetrahydrocannabinol in humans smoking their chosen cannabis. Neuropsychopharmacology 2010;35(9):1879-85.

13. Crippa JA, Hallak JE, Machado-de-Sousa JP et al. Cannabidiol for the treatment of cannabis with- drawal syndrome: a case report. J Clin Pharm Th er 2013;38(2):162-4.

14. Consroe P, Carlini EA, Zwicker AP, Lacerda LA.

Interaction of cannabidiol and alcohol in humans.

Psychopharmacology (Berl) 1979;66(1):45-50.

15. Leweke FM, Piomelli D, Pahlisch F et al. Canna- bidiol enhances anandamide signaling and alleviates psychotic symptoms of schizophrenia. Transl Psy- chiatry 2012;2(3):e94.

TOLÉRANCE DU CANNABIDIOL (5)

Pas de modifications de l’appétit N’induit pas de catalepsie chez l’animal N’affecte pas les paramètres vitaux

(fréquence cardiaque, pression artérielle et température) ; n’affecte pas le transit intestinal

N’altère pas les fonctions psychomotrices Pas d’effet sur la cognition, sauf dans des

modèles animaux de schizophrénie Pas d’effets euphorisants

Pas de potentiel addictif retrouvé à ce jour Bonne tolérance à fortes doses, jusqu’à

1 500 mg/j, du cannabidiol chez l’homme

JULIEN MOREL D’ARLEUX, NOUVEAU DIRECTEUR DE L’OFDT

Le 26 juin dernier, le conseil d’adminis- tration de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) a nommé Julien Morel d’Arleux, 43 ans, directeur de ce

groupement d’intérêt public. Il remplace à ce poste François Beck, à l’issue d’un mandat de 3 ans. François Beck, que nous connaissons bien au Courrier des addictions et qui nous a confi é plusieurs articles majeurs et accordé un entretien (1), a rejoint l’Insee.

Le nouveau directeur de l’OFDT, haut fonction- naire du ministère de la Justice, était, depuis 2012, sous-directeur des administrations de l’État

à la direction de l’administration péniten tiaire.

Spécialiste de l’élaboration et de l’évaluation des politiques publiques, il s’est intéressé, tout au long de sa carrière, aux questions liées à la recherche et à sa valorisation, notamment dans le domaine des addictions mais aussi des politiques pénales.

1. Des chiff res robustes pour décoder les usages. Un entretien avec François Beck. Le Courrier des addictions 2014;XVI(3):5-10.

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