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Lettres pures et lettres impures ? : les professeurs de français dans le tumulte des réformes : histoire d'un corps illégitime (1946-1981)

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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HAL Id: tel-00575863

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Submitted on 20 Apr 2011

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français dans le tumulte des réformes : histoire d’un corps illégitime (1946-1981)

Clémence Cardon-Quint

To cite this version:

Clémence Cardon-Quint. Lettres pures et lettres impures ? : les professeurs de français dans le tumulte des réformes : histoire d’un corps illégitime (1946-1981). Histoire. Université Rennes 2; Université Européenne de Bretagne, 2010. Français. �NNT : 2010REN20055�. �tel-00575863v2�

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sous le sceau de l‟U

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pour l‟obtention du titre de

D OCTEUR DE L ‟U NIVERSITÉ R ENNES 2

Mention : Histoire

École doctorale de Sciences Humaines et Sociales présentée par

Clémence C ARDON -Q UINT

Préparée à l‟Unité mixte de recherche CNRS n°6258 CERHIO Ŕ Centre de recherches historiques de l‟Ouest

Soutenue publiquement le 9 décembre 2010

L ETTRES PURES ET LETTRES IMPURES ?

L ES PROFESSEURS DE FRANÇAIS DANS LE TUMULTE DES RÉFORMES

H ISTOIRE D UN CORPS ILLÉGITIME (1946-1981)

sous la codirection des professeurs Gilbert NICOLAS, Université Rennes 2 Jean-Noël LUC, Université Paris-Sorbonne

Jury

Professeur Anne B

ARRÈRE

, Université Paris 5, Sciences de l‟Education, rapporteur

Professeur Bruno B

ELHOSTE

, Université Paris 1, Histoire, rapporteur Martine J

EY

, MCF HDR, Université Paris-Sorbonne, Littérature Française

Professeur Jean-Noël L

UC

, Université Paris-Sorbonne, Histoire

Professeur Gilbert N

ICOLAS

, Université Rennes 2, Histoire

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2

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À Jean-François et Timothée

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REMERCIEMENTS

Mes remerciements vont d‟abord à mes deux directeurs de thèse, Gilbert Nicolas et Jean- Noël Luc pour leurs conseils avisés, leur patience et la confiance qu‟ils m‟ont témoignée.

André Chervel a très libéralement mis à ma disposition l‟importante documentation amassée au cours de ses recherches : qu‟il en soit ici chaleureusement remercié.

Je tiens aussi à remercier tous ceux qui ont accepté de me livrer leur témoignage, et tout particulièrement Jean-Dominique Beaudin, qui m‟a transmis sa collection des bulletins de l‟APL.

Cette thèse a profité des échanges fructueux du séminaire REDISCOL. Faute de pouvoir citer tout le monde, je veux au moins remercier Renaud d‟Enfert pour ces nombreuses discussions qui ont très largement alimenté ma réflexion.

Au Service d‟histoire de l‟éducation, j‟ai trouvé des collègues passionnants et passionnés : merci à eux.

D‟innombrables discussions ont émaillé la préparation de cette thèse, et je regrette de ne pouvoir remercier ici tous ceux que j‟ai croisés dans les colloques, à la Bibliothèque nationale, aux archives ou ailleurs, et qui ont contribué, à leur façon, à l‟avancée de ma recherche.

Anne-Marie Quint et ma mère, Marie-Odile Cardon, ont été des relectrices patientes et attentives et des grands-mères dévouées. Merci à elles pour cet indispensable soutien.

Merci à Lise pour ses talents de traductrice.

À ma famille, à mes amis, merci pour votre présence tout au long de ces années.

À Timothée, je voudrais demander pardon pour ces derniers mois.

Cette thèse n‟existerait pas sans la présence, l‟enthousiasme, le bon sens, les colères et la

patience de Jean-François : je n‟ai pas de mots pour le remercier.

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SIGLES

AAEENS : Associations des anciens élèves et élèves de l‟École normale supérieure

ANECNES: Association nationale des éducateurs de classes nouvelles de l‟enseignement secondaire

AFP/EF : Association française des professeurs/enseignants de français

AGE : Assemblée générale des étudiants ANIPR : Association nationale des inspecteurs pédagogiques régionaux

A/SPHG: Association/société des professeurs d‟histoire géographie

APL : Association des professeurs de lettres

APLAES : Association des professeurs de letters de l‟enseignement supérieur

APME(S)P: Association des professeurs de mathématiques de l‟enseignement public AQPF : Association Québecoise des professeurs de français

ARELA: Association régionale des enseignants de langues anciennes

BAPL: Bulletin de l‟Association des professeurs de lettres

BEL : Bureau d‟étude et de liaison pour l‟enseignement du français dans le monde BELC: Bureau pour l‟enseignement de la langue et de la civilisation française à l‟étranger

BREF : Bulletin de recherche sur l‟enseignement du français

BSPFLA : Bulletin de la Société des professeurs de français et de langues anciennes

CAC : Centre des archives contemporaines CAL : Comité d‟action lycéenne

CAPCEG : Certificat d‟aptitude au professorat des collèges d‟enseignement général

CAPES : Certificat d‟aptitude au professorat de l‟enseignement du second degré

CCFR : Catalogue collectif de France

CDDP : Centre départemental de documentation pédagogique

CEG : Collège d‟enseignement général CEGT : Conseil de l‟enseignement général et technique

CES : Collège d‟enseignement secondaire CESD : Conseil de l‟enseignement du second degré

CET : Collège d‟enseignement technique CIEP : Centre international d‟études pédagogiques

CNARELA : Coordination nationale des associations régionales des enseignants de langues anciennes

CNGA : Confédération nationale des groupes autonomes

CRELEF : Centre de recherche en linguistique et enseignement du français CSEN : Conseil supérieur de l‟éducation nationale

CODHOS : Collectif des centres de documentation en histoire ouvrière et sociale

CPR : Centre pédagogique régional

CRAP : Cercle de recherche et d‟action pédagogique

CRDP : Centre régional de documentation pédagogique

CREDIF : Centre de recherche et d‟étude pour la diffusion du français

CRFPEGC : Centre régional de formation des professeurs d‟enseignement général des collèges

DEUG : Diplôme d‟études universitaires générales

EAF : Épreuve anticipée de français

EHESS : École des hautes études en sciences sociales

ENNA : École normale nationale d‟apprentissage

ENP : École nationale professionnelle ENS : École normale supérieure

ENSET : École normale supérieure de l‟enseignement technique

EPS : École primaire supérieure

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FA : Le français aujourd‟hui

FEN : Fédération de l‟éducation nationale FCPE : Fédération des conseils de parents d‟élèves

FGEL : Fédération générale des étudiants en lettres

FNELF : Fédération nationale des étudiants en lettres de France

FIPF : Fédération internationale des professeurs de français

GFEN : Groupe français d‟éducation nouvelle

GLC : Groupe de lettres classiques GLM : Groupe de lettres modernes GTU : Groupe de travail universitaire HIMASE : Histoire des militants associatifs et syndicaux

IDEN : Inspecteur départemental de l‟éducation nationale

IA : Inspecteur d‟académie

ICEM : Institut coopératif de l‟école moderne

IEP : Institut d‟étude politique IG : Inspecteur général

IMEC : Institut mémoires de l‟édition contemporaine

IPES : Institut préparatoire à l‟enseignement du second degré

IPN-INRDP : Institut pédagogique national (Institut national de recherche et documentation pédagogique)

IPR : Inspecteur pédagogique régional IREM : Institut de recherche sur l‟enseignement des mathématiques

JORFDAN : Journal officiel de la République française. Compte rendu des débats de l‟Assemblée nationale

JORFDS : Journal officiel de la République française. Compte rendu des débats du Sénat.

MAFPEN : Mission académique à la formation des personnels de l‟Éducation nationale

MAIF : Mutuelle assurance des instituteurs de France

ND : non disponible

OCDE : Organisation pour la coopération et le développement économique

OECE : Organisation européenne de coopération économique

OFRATEME : Office française des techniques modernes d‟éducation

OPI : Objectifs, programmes, instructions PEGC : Professeur d‟enseignement général des collèges

PEN : Professeur d‟école normale PGS : Programme général des stages REDISCOL : Réformer les disciplines scolaires (projet ANR)

RFA : Revue de la Franco-Ancienne RTS : Radio-Télévision Scolaire

SELF : Société d‟étude linguistique française

SGEN : Syndicat général de l‟éducation nationale

SHE : Service d‟histoire de l‟éducation SNALC : Syndicat national des lycées et collèges

SNALSH : Syndicat national autonome des facultés de lettres et sciences humaines SNC : Syndicat national des collèges SPFLA : Société des professeurs de français et de langues anciennes

SNES : Syndicat national de/des enseignement(s) du second degré (classique, moderne technique)

SNESUP : Syndicat national de l‟enseignement supérieur

SNI (PEGC) : Syndicat national des instituteurs (Professeurs d‟enseignement général des collèges)

SU : Syndicalisme universitaire

SUDOC : Système universitaire de documentation

TEF : Tableaux de l‟enseignement et de la formation

TS : Tableaux statistiques

UEC : Union des étudiants communistes UER : Unité d‟études et de recherches UJCml : Union des jeunesses communistes, marxistes-léninistes

UNEF : Union nationale des étudiants de France

UNI : Union nationale interuniversitaire US : Université syndicaliste

UV : Unité de valeur

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INTRODUCTION

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« Nous n‟avons pas de maîtres de français et pour comble – car c‟est véritablement un comble et il faut que ces choses soient dites – ce sont les professeurs de latin, de grec et de français qui font opposition à la création d‟une vraie carrière de professeur de français. D‟une part ils n‟enseignent le français qu‟en rechignant, car enfin le fait est là, ils ne l‟enseignent qu‟en rechignant, d‟autre part, ne l‟enseignant que malgré eux dans un très grand nombre de cas, ils s‟opposent à ce qu‟on forme des professeurs qui n‟enseigneraient que lui »

1

.

Jean Guéhenno, inspecteur général de lettres.

Stage sur l‟enseignement moderne, 6 décembre 1955.

Le paradoxe dénoncé avec vigueur Ŕ et non sans excès Ŕ par l‟inspecteur général Guéhenno trouvait son origine dans un très ancien héritage, dont les professeurs de lettres étaient la vivante incarnation. Derrière le professeur de lettres classiques des années 1950 se profilait la figure du régent des collèges de l‟Ancien Régime, professeur de grammaire ou de belles lettres

2

, dispensant un enseignement fondé sur l‟étude des langues anciennes et des textes de l‟Antiquité grecque et romaine

3

.

Dans l‟éducation humaniste, telle que l‟avait codifiée pour les Jésuites la Ratio studiorum, les textes anciens offraient à la fois un modèle d‟écriture Ŕ la rhétorique, règles communes régissant tout discours et consacrant, par là même, l‟unité du savoir, selon la conception encyclopédiste de la Renaissance Ŕ et un modèle éducatif : celui d‟une société antique consciemment idéalisée, condensé de toutes les vertus

4

. L‟émergence des belles- lettres dans la société de cour, la naissance de l‟écrivain français au XVIIe siècle laissèrent intacte la tradition pédagogique : agréable divertissement, la littérature française n‟était pas vue comme un objet d‟enseignement

5

.

Le mouvement des Lumières bouscula ce bel ordonnancement. Avec le développement de la science moderne prenait corps un idéal de transparence, de neutralité et d‟objectivité du discours scientifique, renvoyant la rhétorique au rang des ornements

1 « L‟enseignement du français et le monde moderne. Notes prises au cours d‟une conférence de M. Jean Guéhenno, inspecteur général de l‟Instruction Publique (Sèvres, 6 décembre 1955) », Cahiers pédagogiques, n°6, mars 1956, pp. 398-399.

2 Divisions en vigueur dans les collèges de l‟université de Paris. Dominique Julia, « La naissance du corps professoral », Actes de la recherche en sciences sociales, 39-1, 1981, pp. 71-86.

3 Sur l‟enseignement des humanités dans les collèges de l‟Ancien Régime, signalons notamment les travaux suivants : Marie-Madeleine Compère, Du collège au lycée (1500-1850) : généalogie de l‟enseignement secondaire français, Paris, Gallimard-Julliard, 1985, 285 p. ; André Chervel et Marie-Madeleine Compère (dir.), Les humanités classiques, n°74 de Histoire de l‟éducation, mai 1997, 253 p. ; François de Dainville, L‟éducation des Jésuites : XVIe-XVIIIe siècles, Paris, Éd. de Minuit, 1978, 570 p.

4 Adrien Demoustier, Dominique Julia, Ratio studiorum : Plan raisonné et institution des études dans la Compagnie de Jésus, Paris, Belin, 1997, 314 p.

5 Sur la naissance de la littérature française : Philippe Caron, Des “belles lettres” à la “littérature” : une archéologie des signes du savoir profane en langue française. 1680-1760, Louvain, Paris, Peeters, 1992, 430 p. ; Alain Viala, Naissance de l‟écrivain, Paris, Éd. de Minuit, 1985, 317 p.

(13)

superflus

6

. Les encyclopédistes, sévères censeurs des collèges d‟Ancien Régime, appelaient de leurs vœux un enseignement positif, enseignement des realia ouvert aux sciences comme aux langues modernes. Tout au long du XIXe siècle s‟affrontèrent ainsi, dans l‟enseignement secondaire Ŕ et à travers l‟expérience de l‟enseignement spécial - défenseurs des humanités d‟ancien régime et promoteurs du modèle encyclopédiste brièvement expérimenté dans les écoles centrales

7

. Pendant ce temps, l‟enseignement du français progressait dans les classes, sans pour autant renverser le primat de la langue latine.

Les réformes républicaines de la fin du XIXe et du début du XXe siècle rompirent avec cette polarisation du débat pédagogique par un jeu subtil de chassé-croisé. Les sciences consolidaient leur implantation dans l‟enseignement secondaire, non comme spécialités, enseignement utilitaires, mais comme humanités scientifiques ou modernes : c‟était l‟arbitrage de la réforme de 1902

8

. En un sens opposé, les mutations de l‟enseignement littéraire consacraient l‟abandon de la pédagogie humaniste des collèges. Par un double glissement, le français s‟émancipait de la tutelle latine, tandis que la culture rhétorique, fondée sur l‟imitation des modèles anciens, cédait le pas à la culture du commentaire

9

.

Soutenu par l‟essor de l‟histoire littéraire comme discipline universitaire, ce nouvel enseignement du français se plaçait sous les auspices de la science. Dans le même mouvement, et non sans paradoxe, en faisant de la lecture des œuvres littéraires françaises une propédeutique à la philosophie, une voie d‟accès au Beau, au Vrai, au Bien, il inscrivait au cœur de l‟enseignement littéraire Ŕ fût-ce autour d‟un canon encore très classique - la figure de l‟écrivain prophète, héritée de l‟âge romantique, lors même que l‟évolution du champ littéraire en prédisait le crépuscule

10

. Se trouvait ainsi préservée, pour le professeur de lettres, la fonction éducative définie autrefois par référence aux humanités. La promotion

6 John Bender et David Wellbery, The ends of rhetoric, Stanford, Stanford university press, 1990, 238 p.

7 Sur ces transformations, Clément Falcucci, L‟humanisme dans l‟enseignement secondaire en France au XIXe siècle, Toulouse, Privat, 1939, 667 p. ; Émile Durkheim, L‟évolution pédagogique en France, Paris, Alcan, 1938, 221 et 226 p.

8 Bruno Belhoste, «Réformer ou conserver ? La place des sciences dans les transformations de l‟enseignement secondaire en France (1900-1970) », dans Bruno Belhoste et. al., Les sciences au lycée : un siècle de réformes des mathématiques et de la physique en France et à l‟étranger, Paris, Vuibert-INRP, pp. 27-38. ; Bruno Belhoste, « Les caractères généraux de l‟enseignement secondaire scientifique », Histoire de l‟éducation, n°41, janvier 1989, pp. 3-45 ; Antoine Prost, « De l‟enquête à la réforme. L‟enseignement secondaire des garçons de 1898 à 1902 », Histoire de l‟éducation, n°119, juillet-septembre 2008, pp. 29-80.

9 Martine Jey, La littérature au lycée : invention d‟une discipline. 1880-1925, Metz, Klinckseck, 1998, 344 p.

10 Sur le romantisme caché des conceptions littéraires de Gustave Lanson, voir Rémy Ponton, « Durkheim et Lanson », dans Michel Espagne, Michael Werner (dir.), Philologiques I. Contribution à l‟histoire des disciplines littéraires en France et en Allemagne au XIXe siècle, Paris, Éd. de la Maison des Sciences de l‟homme, 1990, pp. 253-267. Sur le sacre de l‟écrivain à l‟époque romantique, puis son crépuscule, Paul Bénichou, Romantismes français. I. Le sacre de l‟écrivain. Le temps des prophètes, Paris, Gallimard, 2004, 985 p. ; Romantismes français II. Les mages romantiques. L‟école du désenchantement, Paris, Gallimard, 2004, 989 p.

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scolaire de la langue et de la littérature françaises participaient, au même titre que l‟histoire, à la célébration de l‟idéal national, nouveau rêve des peuples européens

11

.

Ce modèle nouveau n‟avait pas effacé toute trace de l‟ancien régime : nourri de latin et de grec, le professeur de français de l‟enseignement secondaire était, dans les classes, l‟ombre portée du régent, plus enclin à traiter de grec et de latin que de littérature française.

En pratique, la place du latin dans l‟enseignement classique, la part des langues anciennes dans la formation des professeurs de lettres

12

, perpétuèrent, dans ce nouvel édifice, les structures et les modes de pensée du modèle précédent, freinant ainsi son essor, compromettant sa réussite, du moins si l‟on en croit Guéhenno.

Invitation à prendre la mesure des pesanteurs historiques à l‟œuvre dans l‟enseignement du français, la sortie de l‟inspecteur général faisait aussi brutalement sortir de l‟ombre les professeurs de lettres : détenteurs d‟un savoir inadéquat, gardiens jaloux d‟un territoire disputé, divisés par des conflits, comme celui qui opposait, dans ce cas précis, l‟inspection générale, en la personne de Guéhenno, à l‟association de spécialistes, la Franco- Ancienne, directement visée par ses propos. Non pas les médiateurs transparents d‟une discipline à laquelle ils s‟identifieraient, mais des acteurs, au plein sens du terme, et à ce titre, objets légitimes d‟une recherche.

Des spécialistes méconnus : bilan historiographique

Dans la recherche en histoire de l‟éducation, l‟histoire du corps enseignant et l‟histoire des disciplines ont suivi, le plus souvent, des chemins séparés. La première s‟est d‟une part intéressée, dans la voie tracée par Paul Gerbod

13

, à l‟évolution des conditions de formation, de recrutement et d‟exercice des professeurs du secondaire, puis du second degré, toutes disciplines confondues. Les travaux sur la sociologie du corps enseignant au XXe siècle ont repris ce parti-pris, justifié il est vrai, par l‟existence d‟un certain nombre de phénomènes généraux qu‟il convenait d‟éclairer. La vaste enquête de Jean-Michel Chapoulie

11 Anne-Marie Thiesse, La création des identités nationales, Paris, éd. du Seuil, 1999, 302 p.

12 Sur l‟échec des projets d‟agrégation de lettres ou de langues modernes à la fin du XIXe siècle, Martine Jey, La littérature au lycée…., op. cit., chapitre 3 « Problèmes de formation ».

13 Paul Gerbod, La condition universitaire en France au XIXe siècle : étude d‟un groupe socioprofessionnel, professeurs et administrateurs de l‟enseignement secondaire public de 1842 à 1880, Paris, Université de Paris, Faculté des lettres et sciences humaines, 1965, 720 p. On ne peut citer ici la totalité de ces travaux. Signalons toutefois les recherches de Victor Karady, « Les Professeurs de la République. Le marché scolaire, les réformes universitaires et les transformations professorales à la fin du 19e siècle », Actes de la recherche en sciences sociales, n°47-48, juin 1983, pp. 90-112, et l‟indispensable instrument de travail réalisé par Philippe Savoie, Les enseignants du secondaire, XIXe-XXe siècles : le corps, le métier, les carrières. 1802-1914, Paris, INRP-SHE- Économica, 2000, 751 p.

(15)

sur les professeurs de l‟enseignement secondaire au début des années 1970

14

apporte ainsi, avec d‟autres travaux

15

, un soubassement indispensable à l‟analyse plus fine des spécificités disciplinaires.

Mais peu de groupes de spécialistes ont fait, jusqu‟ici, l‟objet d‟une étude en tant que tels. L‟on signalera deux exceptions : les professeurs et maîtres de langues, bien connus grâce entre autres aux travaux de Jacques Brethomé

16

, et les professeurs d‟éducation physique et sportive, objets de diverses recherches

17

. Faut-il voir dans le fait que ces professeurs se distinguaient, non seulement par leur discipline, mais aussi par leur statut, l‟origine de ces exceptions ?

18

Quoi qu‟il en soit, hormis quelques articles isolés

19

, ce type d‟enquête est resté marginal.

Le bilan est tout aussi maigre si l‟on s‟intéresse à l‟histoire des associations et syndicats du corps enseignant, seconde voie ouverte par Paul Gerbod

20

. L‟histoire des associations de spécialistes, qui aurait pu trouver là un terreau favorable, a souffert, dans les faits, d‟un désintérêt manifeste. Les recherches de Suzanne Citron sur la Société des professeurs d‟histoire géographie sont longtemps restées isolées

21

. Ce décalage a plusieurs explications. La puissance des syndicats et leur poids face à l‟État, dans la seconde moitié du XXe siècle, font de leur histoire une clef essentielle pour la compréhension des évolutions

14Jean-Michel Chapoulie, Les professeurs de l‟enseignement secondaire : un métier de classe moyenne, Paris, Éd. de la Maison des Sciences de l‟homme, 1987, 407 p.

15 Signalons, entre autres, Gérard Vincent, Les professeurs du second degré : contribution à l‟étude du corps enseignant, Paris, Armand Colin, 1967, 330 p. ; Alain Léger, Enseignants du secondaire, Paris, PUF, 1981, 256 p. ; Monique Hirschhorn, L‟ère des enseignants, Paris, PUF, 1993, 301 p. ; Alain Norvez, Le corps enseignant et l‟évolution démographique : effectifs des enseignants du second degré et besoins futurs, Paris, PUF, 1977, 206 p. ; Jean-Pierre Terrail, (dir.), Le métier d‟enseignant du second degré et ses évolutions, Laboratoire de sociologie du travail et de l‟environnement social-INRP, 1994, 445 p.

16 Jacques Brethomé, La langue de l‟autre : histoire des professeurs d‟allemand des lycées (1850-1880), Grenoble, Ellug, 2004, 286 p.

17 Signalons, entre autres : Philippe Néaumet, L‟éducation physique et ses enseignants au XXe siècle, Paris, Éd.

Amphora, 1992, 215 p. ; Guilhem Véziers, Une histoire du syndicalisme des professeurs d‟éducation physique entre 1880 et 2002 : un militantisme corporatif, pédagogique et politique, thèse, Sciences et techniques des activités physiques et sportives, Université Lyon I, 2004, 670 p.

18 L‟intégration, déjà ancienne, de l‟histoire de l‟enseignement du sport à la formation des professeurs d‟EPS, explique aussi que les travaux en ce domaine soient extrêmement nombreux, comparativement à d‟autres disciplines.

19 Par exemple, Bruno Poucet, « Quelle identité pour les professeurs de philosophie ? (1809-2000) », dans Pierre Caspard, Jean-Noël Luc, Philippe Savoie (dir.), Lycées, lycéens, lycéennes, Lyon, INRP, 2005, 501 p.

20 Paul Gerbod, « Associations et syndicalismes universitaires de 1828 à 1928 (dans l‟enseignement secondaire public) », Le Mouvement social, n° 55, avril-juin 1966, pp. 3-45 ; Paul Gerbod, « Association et syndicalisme universitaire de 1929 à 1937 dans l‟enseignement secondaire public », Le Mouvement social, n°73, octobre- décembre 1970, pp. 79-110. Là encore, il ne pourrait être question de citer l‟intégralité de ces travaux.

Signalons entre autres les recherches de Jacques Girault, Bertrand Geay, Laurent Frajerman, André D. Robert etc.

21 Suzanne Citron, Aux origines de la Société des professeurs d‟histoire : la réforme de 1902 et le développement du corporatisme dans l‟enseignement secondaire, 1902-1914, thèse de troisième cycle, s.l. , 1974, 350 p. ; « Positivisme, corporatisme et pouvoir dans la Société des professeurs d'histoire », Revue française de science politique, 27-4/5, août 1977, pp. 691 - 716.

(16)

structurelles du système éducatif

22

. Le rôle des associations de spécialistes est, à cet égard, plus marginal. Le syndicalisme enseignant a bénéficié, d‟autre part, de l‟attrait de chercheurs progressistes pour l‟histoire du mouvement social et du mouvement ouvrier, auquel l‟histoire du syndicalisme enseignant a d‟emblée été rattaché

23

.

La création de l‟HIMASE, association pour l‟histoire des militants associatifs et syndicaux de l‟éducation, est venue récemment consacrer l‟autonomie et la diversité des engagements propres au monde enseignant par rapport au mouvement ouvrier : elle marque, à cet égard, un tournant. L‟essor des travaux sur les mouvements d‟éducation nouvelle

24

et l‟attention accordée depuis peu aux associations de spécialistes s‟inscrivent dans la même logique

25

. Mais cette inflexion est encore toute récente. Pour toutes ces raisons, la structuration du corps enseignant par spécialités, et les conséquences de ce phénomène sur l‟histoire de l‟enseignement secondaire français au XXe siècle sont mal connues.

Le tableau n‟est pas le même pour l‟enseignement supérieur. Bien que ce ne soit pas là l‟objet direct de notre recherche, la proximité historique de l‟enseignement supérieur Ŕ à plus forte raison des facultés de lettres Ŕ et de l‟enseignement secondaire, le rôle joué par les facultés dans la formation des professeurs du secondaire depuis la fin du XIXe siècle

26

, justifie ce détour. Si l‟étude des professeurs de facultés a d‟abord relevé d‟une histoire et d‟une sociologie des élites où la structure par discipline académique Ŕ par delà la grande division entre lettres, sciences, médecine et droit Ŕ ne jouait qu‟un rôle secondaire

27

, l‟essor

22Voir, par exemple, la mise en évidence de la rivalité syndicale SNES-SNI dans le blocage de la réforme sous la Quatrième République, Jean-Marie Donegani, Marc Sadoun, « La réforme de l‟enseignement secondaire en France depuis 1945 : analyse d‟une non-décision », Revue française de science politique, 26-6, 1976, pp. 1125- 1146.

23 En 1966-1967, Jean Maitron fonda le Centre d‟histoire du syndicalisme. Figuraient au conseil d‟administration les représentants des principales confédérations syndicales françaises : CFDT, CGT, CGT-FO, CNPF et FEN.

24 Voir le site-ressource créé par Laurent Gutierrez, « Histoire du mouvement de l‟Éducation nouvelle en France », http://hmenf.free.fr, consulté le 28 août 2010.

25 Pierre Savaton, « L‟Association des professeurs de biologie-géologie de l‟enseignement public : un acteur incontournable de l‟enseignement des sciences naturelles », Muriel Guedj, « L‟Union des physiciens (UdP) : quel acteur pour la commission Lagarrigue (1970-1976) », communications présentées au troisième congrès de la Société française d‟histoire des sciences et des techniques ; Éric Barbazo, L‟Association des professeurs de mathématiques de l‟enseignement public (A.P.M.E.P.). Un acteur politique, scientifique, pédagogique de l‟enseignement secondaire mathématique du 20e siècle en France, thèse, histoire des sciences, EHESS, 2009.

26 Victor Karady, « Les professeurs de la République », Actes de la Recherche en Sciences Sociales, 47-1, 1983, pp. 90-112.

27 Christophe Charle, La République des universitaires 1870-1940, Paris, éd. du Seuil, 1994, 505 p. Pour un panorama des recherches sur l‟enseignement supérieur, Emmanuelle Picard, « L‟histoire de l‟enseignement supérieur français : pour une approche globale », Histoire de l‟éducation, n°122, avril-juin 2009, pp. 11-33.

(17)

de l‟histoire et de la sociologie des sciences a suscité de nombreuses recherches portant sur tel ou tel milieu universitaire

28

.

Tournées vers l‟innovation, la création de savoirs, l‟institutionnalisation des disciplines, plus que sur leur transmission, ces recherches ont rarement abordé la question des liens avec l‟enseignement secondaire. Les travaux de Nicole Hulin sur les sciences

29

et ceux d‟Hélène Gispert sur les mathématiques font exception à la règle

30

. En lettres, les recherches de Françoise Ropé sur la naissance de la didactique du français comme champ universitaire

31

, ceux de Jean-Claude Chevalier et Jean-Pierre Encrevé sur le champ de la linguistique dans les années 1960

32

, apportent sur notre objet de précieux éclairages. Le milieu des spécialistes de la littérature a malheureusement été plus étudié pour la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle

33

que pour la seconde moitié du XXe siècle

34

.

C‟est donc du côté de l‟histoire des disciplines qu‟il faut se tourner pour voir apparaître des considérations sur les enseignants du secondaire dans leur rapport à la discipline enseignée. Dans l‟article programmatique publié en 1988, André Chervel a d‟emblée souligné le rôle du collectif formé par les maîtres exerçant les mêmes fonctions dans l‟évolution d‟une discipline :

« Les solutions apportées aux difficultés concrètes ne peuvent être que le fruit de la collaboration de tous les maîtres exerçant les mêmes fonctions. La multiplicité des initiatives est d‟abord la règle avant que la confrontation des méthodes et la diffusion des meilleurs manuels ne génèrent l‟optimisation des rendements. Dans ce processus

28 Pour un panorama historiographique, Fabien Locher, « Les sciences et les techniques dans l‟enseignement supérieur français (XIXe-XXe siècles). Un panorama historiographique », Histoire de l‟éducation, n° 122, avril- juin 2009, pp. 35-52.

29 Nicole Hulin, L‟Organisation de l‟enseignement des sciences. La voie ouverte par le Second Empire, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 1989 ; « Physique et “humanités scientifiques”. Autour de la réforme de l‟enseignement de 1902 », Villeneuve d‟Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2000 ;

«Enseignement scientifique et lignes de partage disciplinaire. La place de la physique dans la première moitié du XIXe siècle », Revue de synthèse, n° 1-2, 1994, pp. 121-134.

30 Hélène Gispert, « La mobilisation des notables universitaires parisiens » dans Hélène Gispert, Nicole Hulin et Marie-Claire Robic (dir.), Science et enseignement. L‟exemple de la grande réforme des programmes du lycée au début du XXe siècle, Lyon/Paris, INRP-Vuibert, 2006, pp. 149-159.

31 Françoise Ropé, La Recherche en didactique du français langue maternelle de 1970 à 1984 : une discipline en émergence, thèse de sciences de l‟éducation, Paris V, 1988, micro-fichée.

32 Jean-Claude Chevalier, Pierre Encrevé, Combats pour la linguistique, de Martinet à Kristeva, Essai de dramaturgie épistémologique, ENS éditions, 2006, 419 p.

33 Signalons, entre autres, Antoine Compagnon, La troisième République des lettres : de Flaubert à Proust, Paris, éd. du Seuil, 1983, 381 p.; Pascale Hummel, Humanités normaliennes. L‟enseignement classique et l‟érudition philologique dans l‟École Normale supérieure du XIXe siècle, Paris, Les Belles-Lettres, 1995, 297 p. ; Michel Espagne, Michael Werner, Philologiques 1. Contributions à l‟histoire des disciplines littéraires en France et en Allemagne au XIXe siècle, Paris, Éd. de la Maison des Sciences de l‟homme, 1990, 427 p.

34 Signalons toutefois les éclairages utiles apportés par les travaux de François Dosse, Histoire du structuralisme, t. 1 : Le champ du signe. 1945-1966, Paris, Librairie générale de France, 1995, 472 p. ; t. 2 : Le chant du cygne : 1967 à nos jours, Paris, Librairie générale de France, 1995, 542 p. ; Pierre Bourdieu, Homo academicus, Paris, éd. de Minuit, 1984, 302 p.

(18)

de concertation et de sélection, plusieurs facteurs contribuent à la généralisation de la solution optimale, déplacement des régents ou des instituteurs, visiteurs de congrégations, publication, dès le XVIe siècle, de manuels pédagogiques. Le XIXe siècle accélérera ces processus en multipliant les corps d‟inspecteurs et les organismes de formation des maîtres, conférences pédagogiques, cours normaux, écoles normales, et en développant à un degré jamais atteint toutes les formes de la littérature pédagogique »

35

.

André Chervel a lui-même montré la pertinence de cette approche en étudiant, par exemple, les voies de diffusion d‟une nouvelle culture orthographique et grammaticale chez les instituteurs au début du XIXe siècle

36

. Dans divers travaux d‟histoire des disciplines Ŕ pensons, par exemple, aux recherches d‟Évelyne Héry, sur l‟histoire

37

, ou à celles d‟Élisabeth Chatel sur les sciences économiques et sociales

38

Ŕ la structuration du corps enseignant, ses modes de socialisation dans des associations ou lors des stages organisés par l‟administration sont analysés et mis en rapport avec l‟évolution de la discipline.

Pour l‟objet qui nous intéresse Ŕ les professeurs chargés de l‟enseignement du français dans le secondaire puis le second degré - les travaux les plus importants portent sur le XIXe et les débuts du XXe siècle. Pierre Albertini a étudié le cursus studiorum du professeur de lettres au XIXe siècle et sa réorganisation par les les républicains : abandon du modèle rhétorique, entrée de l‟histoire littéraire et de la philologie dans la formation initiale

39

. Les analyses d‟André Chervel sur les transformations de l‟agrégation de lettres au XIXe siècle ont mis en évidence, pour cette même période, les liens entre épreuves du concours et transformation de la discipline

40

. Analysant le processus d‟invention de la littérature française comme discipline de l‟enseignement secondaire, Martine Jey s‟est, quant à elle, intéressée au rôle joué, dans cette mutation, par des filières d‟enseignement dominées dotées d‟un corps enseignant spécifique : l‟enseignement féminin, et l‟enseignement spécial puis moderne. Elle a, d‟autre part, étudié les premiers débats relatifs à la mise en place d‟un cursus spécifique pour la formation des professeurs de lettres affectés dans les sections modernes, héritières de l‟enseignement spécial.

35 André Chervel, « L‟histoire des disciplines scolaires. Réflexions sur un domaine de recherche », Histoire de l‟éducation, n°38, mai 1988, p. 86.

36 André Chervel, Histoire de l‟enseignement du français du XVIIe au XXe siècle, Paris, Retz, collection Usuels, novembre 2006, pp. 295-338.

37 Évelyne Hery, Un siècle de leçons d‟histoire : l‟histoire enseignée en lycée de 1870-1970, Rennes, PUR, 1999, 432 p.

38 Élisabeth Chatel (dir.), Enseigner les sciences économiques et sociales : le projet et son histoire, Paris, INRP, 1990, 379 p..

39 Pierre Albertini, « Le cursus studiorum des professeurs de lettres au XIXe siècle », Histoire de l‟éducation, n°45, janvier 1990, pp. 43-69.

40 André Chervel, Histoire de l‟agrégation : contribution à l‟histoire de la culture scolaire, Paris, INRP-Kimé, 1993, 289 p.

(19)

Les travaux portant sur l‟histoire de l‟enseignement du français dans le second degré au XXe siècle n‟ont, en revanche, réservé qu‟une place marginale aux professeurs, donnant le pas à l‟étude des textes officiels, des exercices, des finalités et des contenus d‟enseignement sur celle des enseignants eux-mêmes. C‟est le cas, entre autres, de la thèse de Violaine Houdart-Mérot sur la culture littéraire au lycée

41

ou de celle de Sylviane Ahr sur l‟enseignement de la littérature au collège

42

. Hormis quelques considérations générales sur la vague de recrutement des années 1960 et les effets de la démocratisation du second degré, les professeurs y sont relégués à l‟arrière-plan.

L‟on tient alors pour évident ce qui, à défaut d‟être démontré, ne peut rester qu‟une hypothèse : l‟émergence de solutions, fruit de la concertation et des échanges entre professeurs. L‟on étudie l‟apparition et la transformation des contenus, des finalités et des exercices, en lien avec l‟évolution du public scolaire, des idées pédagogiques, ou des

« savoirs savants », sans chercher à les resituer par rapport à la structure d‟un groupe, à son fonctionnement interne, à ses éventuelles divisions, et en réduisant parfois les conflits au schème simplificateur de l‟opposition entre novateurs et conservateurs, appelé à s‟aplanir de lui-même avec le temps.

Ces lacunes ne sont qu‟en partie comblées par les travaux relevant de la sociologie du curriculum. Avant même que l‟histoire des disciplines n‟ait pris son essor en France, des chercheurs anglo-saxons, dans la lignée de Basil Bernstein et Michaël Young, avaient prêté attention aux rapports de force sous-jacents à la définition du « curriculum », à la sélection et à l‟organisation des savoirs scolaires

43

. C‟était ouvrir à la voie à une réflexion sur le rôle joué par les professeurs dans l‟évolution de leur discipline

44

. La référence à cette nouvelle sociologie de l‟éducation ne s‟est pas imposée en France avant la fin des années 1980, date à laquelle les travaux de Jean-Claude Forquin ont commencé à la populariser

45

. On peut pourtant y rattacher quelques travaux plus anciens qui, sans toujours revendiquer cette filiation, partagent avec ce courant de recherches quelques points communs

46

.

41 Violaine Houdart-Mérot, La culture littéraire au lycée depuis 1880, Rennes, PUR, 1998, 274 p.

42 Sylviane Arh, L‟enseignement de la littérature au collège : histoire, enjeux, contenus, thèse, littérature française, sous la dir. d‟Emmanuel Fraisse, 2006, 650 p. ; L‟enseignement de la littérature au collège, Paris, L‟Harmattan, 2006, 651 p.

43 Michael F. D. Young, Knowledge and control, London, Collier-Macmillan, 1971, 289 p.

44 Par exemple, sur les mathématiques, Barry Cooper, « On Explaining Change in School Subjects », British Journal of Sociology of Education, vol. 4, n°3, 1983, pp. 207-222.

45 Jean-Claude Forquin, École et culture : le point de vue des sociologues britanniques, Paris-Bruxelles, Éd.

Universitaires-De Boeck université, 1989, 247 p.

46 Ce rattachement nous semble d‟autant plus autorisé que certains chercheurs l‟ont opéré a posteriori pour leurs propres travaux. Dans l‟introduction des Savoirs scolaires. Enjeux sociaux des contenus d‟enseignement et de

(20)

Lise Demailly a mené, à la fin des années 1970, une enquête Ŕ observations et interviews Ŕ auprès de quarante-neuf professeurs de français dans sept collèges de la région Nord-Pas de Calais. Sur cette base, elle a proposé une typologie des postures professionnelles des enseignants, en fonction des trajectoires personnelles, du rapport au milieu local, du rapport au discours pédagogique des experts et aux transformations de la société française

47

. Viviane Isambert-Jamati et Marie-France Grospiron ont, quant à elles travaillé sur l‟enseignement du français dans le second cycle long à la fin des années 1970, et ont dressé une typologie des professeurs en fonction du degré de reconnaissance et de prise en compte de la composition sociale de la classe, des orientations socio-éducatives globales, et de la conception de la culture à mettre en œuvre dans une pédagogie du français

48

. Il faut enfin mentionner, dans une perspective toute différente, la thèse d‟Éric Dumaître. Se réclamant de la sociologie cognitive, ce chercheur a montré comment l‟engouement pour le structuralisme littéraire pouvait être lu comme une réponse apportée par les professeurs de lettres à la crise de la culture scolaire

49

.

Si ces travaux éclairent les enjeux de l‟enseignement du français dans le second degré, ils ne proposent pas de réflexion d‟ensemble sur les professeurs chargés de cette discipline, sur ce qui fonde et justifie leur compétence de spécialistes, et leur confère, par- delà les divisions, une unité, fût-elle purement administrative. Le rapport des professeurs de français à leur discipline y est exclusivement saisi à l‟échelle individuelle ce qui revient à négliger tous les phénomènes liés à l‟existence d‟un groupe d‟individus chargés d‟exercer les mêmes fonctions, qu‟il s‟agisse des efforts des autorités pour gouverner les orientations pédagogiques de ce groupe ou des initiatives prises par les professeurs eux-mêmes pour peser de manière collective sur l‟évolution de leur discipline.

leurs réformes, Viviane Isambert-Jamati réinscrit ses travaux anciens dans le cadre de la théorie du curriculum.

Sur ce point voir Françoise Ropé, « Sociologie du curriculum et didactique du français en France », Revue française de pédagogie, n°135, 2001, pp. 35-44.

47 Lise Demailly, Pédagogie du français et rapports sociaux : enquête sur l‟enseignement du français au collège et à l‟école primaire dans une agglomération française, thèse de troisième cycle, sous la dir. de Pierre Bourdieu, EHESS, 341 p. Les résultats en sont repris dans Le collège : crise, mythes et métiers, Lille, Presses universitaires de Lille, 1991, 373 p.

48 Viviane Isambert-Jamati, Marie-France Grospiron, « Types de pédagogie du français et différenciation sociale des résultats », Études de linguistique appliquée, n° 54, 1984, pp. 69-97.

49 Éric Dumaître, Le structuralisme littéraire et la crise de la culture scolaire, doctorat, sociologie, sous la dir.

de Raymond Boudon, 2006, 380 p. ; Éric Dumaître, Les raisons d‟un engouement : le structuralisme littéraire et la crise de la culture scolaire, Paris, Hermann, 2008, 198 p.

(21)

De la compétence du spécialiste au gouvernement pédagogique de la discipline : le cas du professeur de français

L‟on s‟est donc proposé d‟étudier le groupe professionnel formé par les professeurs chargés de l‟enseignement du français dans le second degré général Ŕ héritier de l‟enseignement secondaire Ŕ de la 6

e

à la terminale, en privilégiant deux niveaux d‟analyse : la compétence du professeur de français comme enjeu de conflit et le gouvernement pédagogique de la discipline.

La conception du professeur de l‟enseignement secondaire comme spécialiste d‟une discipline s‟est progressivement imposée dans le courant du XIXe siècle, avec la spécialisation croissante des concours d‟agrégation, à laquelle répondit, au sein du ministère, la spécialisation de l‟inspection générale

50

. La notion, simple en apparence, recouvrait en pratique plusieurs définitions qui, pour n‟être pas nécessairement contradictoires, ne coïncidaient pas forcément. Un tableau de la situation dans l‟entre-deux-guerres permettra de mettre en valeur un certain nombre de points clefs.

Le spécialiste se définissait d‟abord par une compétence scientifique sanctionnée par une formation universitaire de haut niveau dans sa discipline : c‟était là l‟héritage de la réforme des licences de lettres et de sciences entreprise au début de la Troisième République

51

. Il correspondait d‟autre part à une réalité administrative traduite dans les concours de recrutement, dans la gestion du personnel de l‟enseignement secondaire, et dans les statistiques officielles du corps enseignant. La représentation des différents ordres d‟agrégation au Conseil supérieur de l‟instruction publique consacrait le rôle des spécialistes dans la politique éducative définie par le gouvernement. Enfin, par le biais des associations de spécialistes Ŕ créées aux alentours de 1910 - les professeurs d‟une même discipline s‟imposaient comme groupe professionnel doté d‟intérêts à défendre, face à l‟État et face aux autres associations ou syndicats du corps enseignant

52

. La Franco-Ancienne, Société des professeurs de français et de langues anciennes rassemblant les professeurs de lettres et de grammaire de l‟enseignement secondaire public trouvait naturellement sa place dans ce tableau. Autant de définitions possibles du professeur de français comme spécialiste, susceptibles d‟entrer en concurrence.

50 Pour Guy Caplat, le tournant se fait peu avant la Première Guerre mondiale. Guy Caplat, L‟inspection générale de l‟instruction publique au XXe siècle. Dictionnaire biographique des inspecteurs généraux et des inspecteurs de l‟académie de Paris. 1914-1939, Paris, INRP-Économica-SHE, 1997, pp. 40-43.

51 Jacques Verger (dir.), Histoire des universités en France, Toulouse, Privat, 1986, 432 p. Voir en particulier la partie rédigée par Victor Karady.

52 Suzanne Citron, Aux origines de la Société des professeurs d‟histoire…, op. cit.

(22)

Si les conflits suscités par la compétence du spécialiste méritent de retenir notre attention, c‟est parce que s‟y jouait, en définitive, la légitimité des divers modes de gouvernement pédagogique adoptés pour la discipline. Pour éclairer cette notion de

« gouvernement pédagogique », il peut être utile d‟en revenir aux origines du corps enseignant. Les fondateurs de l‟Université impériale étaient pénétrés de l‟idée que, pour être animés d‟un seul et même esprit, les professeurs devaient appartenir à un corps unifié

53

. Mais ce projet était foncièrement ambigu. S‟agissait-il de ressusciter dans l‟Université les corporations enseignantes de l‟Ancien Régime, largement autonomes ? S‟agissait-il au contraire d‟avoir à disposition de l‟État une armée de fonctionnaires dociles, suivant les injonctions du gouvernement ?

54

Les textes fondateurs de l‟Université assirent les prérogatives de l‟État sur l‟enseignement et le corps enseignant, mais ils n‟en préservèrent pas moins Ŕ à travers certaines institutions comme le Conseil de l‟Université impériale Ŕ cet idéal d‟une Université se gouvernant elle-même, idéal vivant chez les universitaires tout au long du XIXe siècle, selon Paul Gerbod. Coexistèrent ainsi, dans l‟enseignement secondaire français, deux modèles concurrents de gouvernement pédagogique, deux façons différentes d‟appréhender le groupe des professeurs comme collectif investi d‟une mission commune, et cela, non sans conséquences, d‟une part, sur le processus de prise de décisionŔ élaboration des textes officiels, choix des horaires, épreuves d‟examen etc. Ŕ et d‟autre part, sur les mécanismes de concertation et d‟harmonisation susceptibles de donner à l‟enseignement une unité, ou un semblant d‟unité sur l‟ensemble du territoire. La spécialisation croissante des professeurs compliqua encore cette configuration. Corps dans le corps, les spécialistes avaient des intérêts particuliers qui ne pouvaient être assimilés à l‟intérêt général de la corporation

53 Philippe Savoie, « Construire un système d‟instruction publique : de la création des lycées au monopole renforcé (1802-1914) », dans Jacques-Olivier Boudon (dir.), Napoléon et les lycées. Enseignement et société en Europe au début du XXe siècle, Paris, Nouveau Monde, éd. Fondation Napoléon, 2004, pp. 39-55.

54 Cette réflexion s‟inspire des travaux sur la « professionnalisation » du corps enseignant sans s‟y intégrer tout à fait. Si elle a permis d‟identifier, sur une longue période, les grandes étapes de la constitution d‟un corps enseignant Ŕ signalons, pour l‟essentiel, les travaux pionniers d‟Antonio Novoa (Antonio Novoa, Le temps des professeurs : analyse socio-historique de la profession enseignante au Portugal XVIIIe-XXe siècle, Lisbonne, Instituto nacional de investigaçao cientifica, 1987, 939 p.), la problématique de la professionnalisation, appliquée à la période contemporaine, tend à privilégier, non sans téléologie, une certaine conception du métier de professeur, au détriment de réalités persistantes qui interdisent d‟en faire une profession, au sens anglo-saxon du terme. Nous rejoignons sur ce point les conclusions de Raymond Bourdoncle. « La professionnalisation des enseignants : analyses sociologiques anglaises et américaines. I. La fascination des professeurs », Revue française de pédagogie, n°94, janvier-mars 1991, pp. 73-91 ; « La professionnalisation des enseignants : les limites d‟un mythe », Revue française de pédagogie, n°105, octobre-décembre1993, pp.83-119.

(23)

enseignante ; l‟autonomisation des spécialistes menaçait la cohésion du corps enseignant et la définition d‟un projet éducatif global

55

.

Dans ce système complexe, la période de la Libération marqua, à divers égards, un tournant. Aboutissement d‟une ancienne revendication, la mise en système de l‟éducation nationale, l‟intégration des anciennes filières d‟enseignement mettaient le professeur de l‟enseignement secondaire en concurrence avec des maîtres qui, bien que chargés eux aussi de l‟enseignement d‟une discipline dans le second degré, ne correspondaient pas à la conception traditionnelle du spécialiste. Inspiré par les courants d‟éducation nouvelle, le versant pédagogique de la réforme de l‟éducation Ŕ réforme projetée et débattue, mais jamais complètement réalisée - remettait en cause le rôle structurant des disciplines dans la formation dispensée par les établissements du second degré. La réforme des conseils d‟enseignement en 1946 modifiait le mode de représentation des agrégés et ôtait, de facto, aux spécialistes le droit de se prononcer ès qualités sur les réformes de l‟enseignement. Sur ces évolutions générales se greffa, en lettres, la création de la licence de lettres modernes qui mit un terme, en 1946, à l‟unité de formation des professeurs de français de l‟enseignement du second degré, en fusionnant l‟héritage du primaire supérieur et du secondaire. Les divers critères qui se combinaient autrefois pour asseoir le rôle du professeur de lettres comme spécialiste dans l‟enseignement secondaire rentraient désormais en concurrence. Sans s‟interdire une certaine souplesse, 1946 constituait donc un point de départ pertinent pour notre étude.

Ce choix nous permettait d‟aborder avec plus de recul les transformations des années 1960. Alors que la création de l‟agrégation de lettres modernes en 1959 semblait annoncer la victoire des humanités modernes, libérées de la tutelle gréco-latine, les années 1960 virent l‟effondrement des bases idéologiques et culturelles de la configuration précédemment décrite. D‟un côté, le développement rapide des sciences humaines dans l‟université, leur aura croissante dans la société française, jetaient le discrédit sur l‟éducation humaniste, dans ses méthodes, ses contenus et son support : la littérature comme voie d‟accès à l‟homme éternel. De l‟autre, l‟essor de la linguistique, l‟attrait de la sémiotique, le succès des nouveaux modes de communication, ébranlaient le primat de la langue écrite littéraire : usage circonscrit d‟une langue qui n‟était, à tout prendre, qu‟un système de signes parmi d‟autres.

La démocratisation de l‟enseignement du second degré Ŕ à la fois réalité palpable de l‟évolution du public scolaire et utopie d‟une réduction des inégalités sociales dans et par

55 Voir encore Clément Falcucci, L‟humanisme…, op. cit.

(24)

l‟école Ŕ offrait enfin aux partisans d‟une transformation radicale un argument politique et social majeur. Il s‟agira de comprendre comment ces transformations, saisies d‟ordinaire à l‟échelle de la société ou à celle de l‟individu, peuvent être appréhendées à l‟échelle du groupe formé par l‟ensemble des professeurs qu‟elles touchaient au premier chef.

L‟on aurait pu suivre ce fil jusqu‟à nos jours, mais dans le cadre limité d‟une thèse, 1981 offrait un terme satisfaisant. La réalisation du collège unique, l‟inscription, dans les programmes, d‟une rénovation longuement débattue, enfin l‟élection de François Mitterrand et les débuts du ministère d‟Alain Savary, entraînant une redistribution des pouvoirs au sein de l‟éducation nationale, faisaient de 1981 une date charnière. De la mise en place du cursus de lettres modernes Ŕ consacrant l‟autonomie du français par rapport aux langues anciennes, la victoire des « humanités modernes » mais aussi l‟ascension du primaire supérieur Ŕ à la redéfinition des programmes et instructions de l‟enseignement du français Ŕ prenant acte des remises en cause plurielles de la fin des années 1960 et du début des années 1970 Ŕ se joua, en définitive, tout au long cette période, le rapport des professeurs de lettres à la démocratisation du second degré. Saisir les réponses collectives apportées à ce défi Ŕ dont les significations et les manifestations ont évolué au fil du temps Ŕ tel est donc l‟enjeu de cette enquête.

Objet, sources et méthodes : le choix de la diversité

Puisque la notion de spécialiste est en elle-même l‟objet de définitions concurrentes, il va de soi que l‟on ne peut définir de manière figée les frontières du groupe formé par les spécialistes d‟une discipline : cela vaut pour toutes les disciplines mais a fortiori pour le français. Les difficultés commencent avec la dénomination même de la discipline : lettres ou français ? Les significations de ce doublet ont évolué au fil du temps : les lettres désignant tantôt l‟ensemble formé par l‟enseignement du français et des langues, vivantes ou mortes, tantôt une conception littéraire de l‟enseignement du français. Ces deux significations coexistèrent parfois, comme le montrent les dénominations des sections de professeurs d‟enseignement général des collèges dans les années 1970 : lettres-histoire géographie, lettres-langues vivantes et français-latin. Plutôt que de trancher et d‟opter Ŕ arbitrairement Ŕ pour l‟une ou l‟autre dénomination, il nous a semblé plus fructueux de restituer, dans leur diversité et leurs contradictions, les représentations concurrentes des principaux intéressés.

Nous utiliserons donc, au fil du texte, l‟une ou l‟autre expression, sans lui attacher un sens

particulier.

(25)

Dans la mesure où la conception du professeur comme spécialiste s‟enracine dans l‟histoire de l‟enseignement secondaire, ce sont les professeurs de lettres « de type lycée », héritiers de l‟enseignement secondaire qui formeront le cœur de notre étude : catégorie elle- même mouvante puisqu‟elle intègre, au cours de cette période, les professeurs des établissements techniques longs, longtemps formés dans des filières séparées. Comprendre dans quelle mesure et de quelle façon la « spécialité » a pu ou non servir de référence commune, intégratrice, pour les catégories étrangères aux traditions de l‟enseignement secondaire, sera justement l‟un des enjeux de cette étude.

Se posait, d‟autre part, le problème de l‟enseignement privé. À cette époque et dans cette discipline, on ne trouve guère trace des spécificités de l‟enseignement privé par rapport à l‟enseignement public : les textes officiels, les manuels, les revues sont communs aux uns et aux autres

56

. Après la loi Debré de 1959, plusieurs mesures favorisèrent l‟alignement des conditions de recrutement et de rémunération des professeurs de l‟enseignement privé sur ceux de l‟enseignement public. Pour autant, les données sur le corps enseignant des établissements privés sont difficilement accessibles et il n‟était pas possible de pousser aussi loin l‟enquête à leur sujet. D‟autre part, les professeurs de l‟enseignement privé restèrent très largement étrangers aux différents rouages du gouvernement pédagogique que l‟on se propose d‟étudier ici. Très peu nombreux sont ceux qui intervinrent dans le débat public.

L‟enseignement privé reste donc un point aveugle de notre enquête.

Le choix des sources découlait logiquement des orientations ainsi définies. Les archives publiques, archives du ministère de l‟Éducation nationale, pour l‟essentiel, mais aussi archives de la présidence de la République, conservent des documents encore inexploités sur les prises de décision affectant l‟enseignement du français : horaires, programmes, épreuves d‟examen. Les archives, malheureusement lacunaires, de l‟inspection générale nous ont éclairée sur les fonctions remplies par ce corps, à certaines périodes tout au moins. La consultation des dossiers individuels des inspecteurs généraux partis à la retraite avant 1979 a permis de compléter l‟ensemble.

56 Pour l‟enseignement de la philosophie au XIXe siècle, il allait de soi que les spécificités de l‟enseignement privé ne pouvaient, à l‟inverse, être ignorées. Voir les travaux de Bruno Poucet, Histoire de l‟enseignement de la philosophie en France dans l‟enseignement secondaire de 1863 à 1965 : structures scolaires, contenus et pratiques pédagogiques d‟une discipline d‟enseignement, thèse, sciences de l‟éducation, Paris V, 1996, 760 p.

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