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Le portique de la cathédrale Saint-Pierre. Un grand chantier à Genève au XVIIIe siècle

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Book

Reference

Le portique de la cathédrale Saint-Pierre. Un grand chantier à Genève au XVIIIe siècle

BUYSSENS, Danielle, et al.

Abstract

Ce dossier qui accompagnait une exposition des projets pour la réfection de la cathédrale Saint-Pierre au milieu du XVIIIe siècle contient l'édition de deux sources majeures et la publication de quatre contributions pour éclairer le contexte qui a vu naître le portique réalisé par Benedetto Alfieri.

BUYSSENS, Danielle, et al . Le portique de la cathédrale Saint-Pierre. Un grand chantier à Genève au XVIIIe siècle . Genève : Maison Tavel, 2003, 57 p. texte seulement

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:74884

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Le portique de la cathédrale Saint-Pierre Un grand chantier à Genève au XVIIIe siècle

Textes de Danielle Buyssens, Leïla ei-Wakil, Anastazja Winiger-Labuda, Livio Fornara

ainsi que deux sources historiques dues à Léonard Baulacre et à Jean- Louis Calandrini et Gabriel Cramer

Ville de Genève, Département des affaires culturelles

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Architecture et montage de l'exposition:

Jean-Marc Cherix, Jean-Marc Schaeffer, Dominique Troutot

Conception graphique:

Atelier Boris Calame, Genève Photographies:

Nicolas Spuhler, Genève Lithographie:

Color+, Prilly Impression:

Kurz sa, Genève

Impression fiches dossier:

Ville de Genève, Service des achats

© Maison Tavel - Genève 2003 - ISBN 2-8306-0215-3 Imprimé en Suisse

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Dossier de visite

par Livia Fornara

En voici le contenu: en premier lieu, la reprise in extenso d'un texte ancien, constitutif du sujet même de cette exposition-dossier. Il s'agit de l'Abrégé des mémoires présentés au Magnifique Conseil' touchant le temple de St-Pierre, rédigé par les professeurs de mathématique à l'Académie Jean-Louis Calandrini (1703-1758) et Gabriel Cramer (1704- 1752), deux protagonistes de la reconstruction de la façade de la cathé- drale Saint-Pierre au milieu du XVIII' siècle. Ce mémoire, imprimé dans les premiers mois de l'année 1750, forme une brochure in-octavo de vingt pages; c'est une sorte de document de travail destiné à être envoyé à des architectes expérimentés ou à des praticiens susceptibles de venir en aide ou simplement de conseiller leurs homologues genevois dans une entreprise ardue et qui sort de l'ordinaire. Calandrini et Cramer fonction- nent dans une commission constituée en 1749 pour travailler au délicat et urgent problème du temple de Saint-Pierre, l'ancienne cathédrale, dont la partie nord-ouest et le haut de la façade principale sont en péril. Après une année d'expertises sur l'état alarmant de l'édifice, de mensuration des faux aplombs et d'études sur les solutions à apporter, ces deux pro- fesseurs font état de leurs travaux devant le Petit Conseil. L'affaire est complexe, les hommes de métier qui ont collaboré avec la commission ont fait plusieurs propositions, mais on demeure incertain sur le parti à prendre. L'intervention de compétences extérieures semble indispensable, d'où la décision de publier l'essentiel du mémoire lu au Conseil. La ver- sion imprimée comprend trois sections, une description de la cathédrale avec toutes ses dimensions, la somme de toutes les déformations, petites ou grandes, que présente l'édifice, l'examen des projets élaborés pour sauver le temple. C'est un état des lieux des plus neutres et des plus objectifs; les deux mathématiciens posent le problème et discutent les solutions envisagées jusqu'ici. Le document est intéressant par son approche rationnelle des choses; il contient d'intéressantes remarques sur les qualités ou les fonctionnalités que doit présenter un temple protes- tant; surtout, il est révélateur sur l'appréciation du monument gothique dans ce siècle des Lumières.

Anastazja Winiger retrace l'historique du projet de la nouvelle façade à travers les sources écrites. Son étude forme en quelque sorte pendant à l'exposition-dossier, qui, elle, présente toutes les sources graphiques, autrement dit tous les projets conservés. Elle suit pas à pas le déroulement des travaux de la commission de Saint-Pierre dans laquelle œuvrent Calandrini, Cramer, l'ingénieur La Ramière, ainsi que les architectes et maître maçons les plus compétents, jusqu'à l'intervention de Benedetto Alfieri, dont les plans apportent la magistrale solution à toute cette entreprise.

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Leïla ei-Wakil ouvre bien au-delà de Genève son champ d'investigation:

elle passe en revue des réalisations analogues à celle que connaît la cathédrale Saint-Pierre, en France, en Italie, en Angleterre. Sa mise en perspective révèle les pratiques et les débats théoriques de l'époque.

Danielle Buyssens présente le pasteur Léonard Baulacre, qui s'exprime à plusieurs reprises dans le Journal Helvétique à propos de la cathédrale Saint-Pierre. Ce bibliothécaire érudit se déclare partisan de la reconstruc- tion complète de la façade gothique; il apporte sa caution d'homme de goût et d'amateur d'art à la colonnade du portique directement inspirée du temple antique. Ce qu'il en écrit résume sans doute la position des milieux cultivés de la République. Ainsi, même à l'étranger on sait que les Genevois s'engagent dans une réalisation de prestige.

Ce sont à la fois des contributions éclairantes et des compléments utiles non seulement pour les historiens de l'architecture, mais aussi pour qui- conque voudra mieux connaître la genèse du portique monumental de la cathédrale. En 1911, Camille Martin, dans sa grande étude sur Saint- Pierre, avait bien abordé la longue gestation du projet. En 1982, la grande exposition sur la cathédrale, au musée Rath, avait présenté une sélection des principaux projets. Le sujet n'est donc pas neuf, mais il demeure passablement méconnu.

Jusqu'ici, l'ensemble des différents projets conçus pour la façade de Saint- Pierre n'a jamais été présenté. Le faire aujourd'hui peut avoir son utilité.

D'une part, une exposition constitue un moment privilégié d'attention plus aiguë sur les œuvres, et approcher les originaux réserve toujours sa part de découverte. En outre, le déploiement de l'ensemble des projets en un seul lieu et en même temps offert à tous les regards peut se révéler fécond de compréhensions diverses et enrichissantes.

D'autre part, l'année 2006 marquera les 250 ans de l'achèvement des travaux- l'inauguration a lieu le 5 décembre 1756. Le moment venu, on voudra sans doute rappeler cet anniversaire avec une publication jubilai- re. Dans ce cas, les études figurant dans ce dossier auront fait une part du travail. Poursuivies, développées, jointes à d'autres procédant de pers- pectives ou de disciplines différentes, elles pourraient constituer une somme bienvenue sur une réalisation architecturale qui intéresse bien au delà de l'histoire monumentale locale et régionale.

Tous ces plans et projets ont été, bien après l'achèvement des travaux, regroupés dans deux recueils factices pour être archivés. Avec des rapports d'experts, des contrats, des factures et le livre de comptes, ils constituent

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le dossier des travaux, à conserver pour mémoire et pour besoins ulté- rieurs. Certaines de ces feuilles avaient été détachées des onglets d'un recueil en 1982, pour être montrées dans l'exposition Saint-Pierre cathé- drale de Genève, un monument une exposition, au musée Rath. Pour la présente exposition de nombreuses autres feuilles ont été démontées.

Cela a permis un nécessaire travail de restauration dans l'atelier du Centre d'iconographie genevoise. Ils seront remontés dans le recueil d'origine après l'exposition.

Quatre tableaux sont généreusement prêtés par la Bibliothèque publique et universitaire; nous en sommes reconnaissants à M. Alain Jacquesson, directeur, et à M"" Danielle Buyssens, conservateur de la Collection ico- nographique. Ainsi les beaux portraits de Jean-Louis Calandrini et Gabriel Cramer se retrouvent le temps de l'exposition entourés des projets qu'ils ont inspirés.

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Abrégé des mémoires présentés au Magnifique Conseil, touchant le temple de Saint-Pierre

Prémiére Partie

Description de l'Eglise Cathédrale de St. Pierre

Situation. L'EGLISE de St. Pierre de GENEVE est batie au sommet d'une Colline d'un sable grené, ferme & bon, élevée d'environ 100 Pieds sur le niveau des eaux du Lac. Le terrain, sur lequel cet Edifice est placé, est de 13 Pieds plus élevé au midi qu'au nord du Temple, & cette pente devient très-rapide à 20 Toises du mur septentrional de l'Eglise. A l'orient, à 5 Toises du chevet, la Colline est coupée presque à pic par une gorge qui sépare cette Colline d'une autre plus étendue: cette pente est soutenue par des murs & des édifices particuliers.

Forme générale. L'Eglise est en forme de Croix Latine. Sa longueur, qui est de 202 P[ieds] en œuvre, est dans la direction du couchant d'Eté au levant d' Hyver. La Nef, divisée en cinq Vou tes gothiques, a 137 P. La croi- sée en a 26, & le Chœur 39: il est terminé en rond-point.

La Nef est accompagnée, de part & d'autre, d'une Basse-Nef, à laquelle on communique par cinq Arcades, soutenues de gros Piliers. Ces Bas-côtés se terminent aux bras de la Croix, qui ont 111 P. d'un bout à l'autre. Le long de chacun des Croisillons, à côté du Chœur, sont deux Chapelles de 13 P. de profondeur, & au devant de celle qui est joignant le Chœur au nord, il y a un Vestibule de 12 P. construit dans le même gout que les Chapelles.

La largeur de la haute-Nef, entre les Piliers, est de 23 1/4 P., cell.es des basses~Nefs est de 10 P. La distance du mur du nord à celui du midi est de 54 P. 4 pouces. La hauteur de la grande Voute est de 63 P. sous clef;

celle des basses-Voutes de 35 P.

Piliers. Chacun des gros Piliers a 9 P. dans le sens de la longueur du Temple, & 8 1/2 1~ dans le sens de sa largeur. Ces Piliers, à l'exception de ceux de la Croisée, sont composés de douze Colomnes cylindriques, groupées trois-à trois.

Des trois, qui font face à la Nef, celle du milieu a 15 p[ouces] de dia- metre & les latérales 10 p. Elles s'élèvent en tout à 45 1/2 P. de hauteur,

& sont terminées par un chapiteau gothique: elles soutiennent les retombées des nervures des Arcs de la Voute, tant de l'Arc doubleau, qui est en tiers-point, & a 17 P. de haut sur 24 P. d'ouverture de 36 P.

Les autres Colornnes du Pilier ne s'élèvent qu'à 18 P. & sont aussi ter- minées par un chapiteau gothique. Les trois, qui sont de part & d'autre sous les Arcades, en soutiennent l'Arc, qui a 19 P. d'ouverture sur 13 1/2 P.

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d'élévation, & 3 P. 8 p. d'épaisseur. Il est formé d'un avant-corps, qui porte sur la Colomne du milieu, & de deux aîles qui retombent sur les Colomnes latérales.

Enfin, les trois Colomnes, qui font face aux basses-Nefs, en soutiennent l'Arc doubleau, (qui a 10 P. d'ouverture sur 7 P. 2 p. d'élévation) & les Croisées d'ogive, dont la clef s'élevant 10 P. plus haut, fait que chaque basse-Voute est en cul-de-Four. Ces Arcs, du côté du mur, retombent sur un Pilastre, qui fait saillie de 2 P. hors du mur, & présente un groupe de trois Colomnes, en symetrie à celles de vis-à-vis.

Les Piliers de la Croisée ont seize Colomnes, parce que les Arcs doubleaux de la grande & des petites Voutes joignant les Croisillons sont renforcés de part et d'autre d'une aîle qui retombe sur les Colomnes ajoutées. Les Arcs doubleaux des Croisillons sont aussi renforcés. Les deux Piliers de la Croisée, attenant au Chœur, ont leur partie orientale engagée dans le mur du Chœur.

Décoration intérieure. Un Cordon, élevé de 35 P. sur le sol de l'Eglise, regne tout autour de la Nef, des Croisillons & du Chœur. Il passe par dessus la grande Porte, par dessus les Arcades des basses-Nefs, par dessus celles des Chapelles, & par dessus les Fenêtres intérieures du Chœur. Sur ce Cordon est un Coridor de 2 P. de large & de 10 1/2 P. de haut, qui passe derriére les Colomnes qui soutiennent la Voute, si ce n'est du côté du midi où il est interrompu derrière ces Colomnes. Dans ce Coridor s'ou- vrent de petites Portes pour passer sur les basses-Voutes: à l'extremité des Croisillons & autour du Chœur, ce sont des Fenêtres. Ce Coridor est bordé de petites Colomnes, qui soutiennent des Arcades en plein-ceintre, lesquelles portent un second Cordon, élevé de 451/2 P. sur le sol de l'Eglise, au niveau des chapiteaux des grandes Colomnes. Sur ce Cordon est un second Coridor, de même largeur que le prémier, qui regne sous les Arcs formerets des Voutes. Il est bordé de Colomnettes, qui soutiennent cinq Arcades, lesquelles suivent la courbure de ces Arcs formerets. Le mur exte- rieur de ce Coridor est percé, à chaque entre-colomne, de trois Fenêtres de 3 P. de large sur 8 à 9 P. de haut; mais aux extremités des Croisillons, au lieu des trois Fenêtres, il n'y en a qu'une grande, en Rose.

Voute & Tours. La Voute de la Nef, divisée en cinq parties, est soutenue par des Arcs doubleaux & des Croisées d'ogive, qui ont 1 P. d'épais &

13 P. de douelle. Les Pendentifs sont de tuf, épais de 9 à 10 p. Les quatre Arcs, qui font la Croisée de l'Eglise & les Arcs doubleaux des Croisillons, ont 3 P. 7 p. de large sur 3 P. d'épaisseur. Ils sont ainsi renforcés, parce que ceux de la Croisée servent de fondement à un Clocher de charpente assés haut, & que ceux des Croisillons portent un des murs de deux

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Tours, dont les trois autres côtés sont communs dans leur partie inférieure avec les murs de l'enceinte des Croisillons. Ces murs des Tours n'ont que 4 1/2 P. d'épaisseur du côté du levant: aux autres côtés, la Tour du nord a 5 P. 9 p. d'épais, & celle du midi 6 P. Celle-ci est toute revêtue de roche. Chaque face de ces tours est soutenue à ses deux extrémités par un fort Eperon qui diminue par retraites. Ces faces s'élévent environ 50 P.

au dessus des Voutes; mais les 24 P. supérieurs ne sont qu'un parpain assez mince, formé en Arcade ou en Rose.

Chœur. Le Chœur est composé d'une Voute de 12 P. de longueur & d'un Rond-point. De sa clef partent huit Arcs, dont les six antérieurs portent sur de simples Colomnes placées dans les angles que forment les por- tions du chevet. Dans chacune de ces portions, au dessous du Cordon inférieur, & à chaque Coridor est une Fenêtre, dont l'inférieure, qui est la plus grande, a 13 P. de haut sur 3 P. de large. Le mur du Chœur est épais de 3 P. 10 p. & haut de 60 P. En dehors, il y a un Eperon, qui répond à chaque Arc en raion, & qui a 4 P. de saillie, 3 P. d'épais, & 49 P. de haut.

Tout ce mur, & les Eperons, ont un socle de roche, de 3 P. de haut, avec une retraite de 6 p.

Façade. La Façade donne sur une Place assez jolie, mais irrégulière, qui laisse un espace de 110 P. entre l'Eglise & la maison vis-à vis. Au côté du midi, & joignant la Cathédrale, est une petite Eglise, nommée la Chapelle des Machabées, dont la Façade est dans le même alignement que celle de St. Pierre. Cette Façade des Machabées consiste en deux Contreforts de 6 P. 4 p. de saillie, entre lesquels est une Fenêtre, haute & large, mas- quée en bonne partie, & surmontée d'un Pignon fort exhaussé. Au côté du nord de l'Eglise, il y a une maison particulière très-ornée & d'une bonne architecture, qui avance sur la Place 30 P. de plus que la Façade du Temple: mais elle en est séparée par une ruë large de 17 P. Au pied de la Façade est une Plate-forme de 12 P. de large, entourée d'une Balustrade:

on y monte par douze marches, séparées par un Palier de 6 P.

La Façade a 95 P. de hauteur, dès la Plate-forme jusqu'au sommet du Pignon, dont l'angle est d'environ 60 degrés. La portion du milieu, qui répond à la haute-Nef, est flanquée de deux Eperons de 11/2 P. de saillie, de 3 P. 5 p. de large, qui s'élèvent de 64 P. sur la Plate-forme, & qui suportent chacun une Tourelle. Entre ces deux Eperons est le Portail, de marbre blanc, surmonté d'un Fronton très-aigu, dont le sommet est à 35 P. de hauteur, & dans le Tympan duquel on voit trois grandes Figures

& cinq petites, d'une sculpture gothique. Le Portail n'a que 2 P. de saillie sur le mur de la Façade. Ce mur, jusqu'à la hauteur de 35 P. (ce qui répond au sol du Coridor inférieur) a 3 P. 8 p. d'épais. De là, & dans toute la hauteur des deux Coridors, il n'a que 18 à 19 p. d'épaisseur:

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mais au dessus de l'Arc qui couvre le second Coridor, le mur reprend son épaisseur de 3 P. 8 p. jusqu'au sommet du Pignon.

La Façade a très-peu d'ornemens, à l'exception de ceux du Portail. Entre les Eperons il y a trois Fenêtres, qui répondent au Coridor supérieur, &

qui ont été ornées de Colomnettes & de Tondins. Plus haut est une Fenêtre, qui donne sur la Voute. Au milieu du Pignon, il y a l'Aigle Impérial. Les portions de la Façade qui terminent les basses-Nefs, ont peu de symétrie: elles ont chacune un Œil-de-bœuf, orné d'un bandeau, pour éclairer les bas-côtés. Le parement de la Façade, & de tous les murs de l'Eglise, est de pierre de taille, d'un brun roussâtre, bonne et dure, mais rongée du côté du midi & du couchant.

Faces de la Nef. Les Faces de la haute-Nef, au midi & au nord, n'ont d'autres fondements que les gros Piliers & les Arcades qui sont entre- deux. Ces Faces ont 3 P. 8 p. d'épaisseur jusqu'au prémier Cordon: à l'endroit des Coridors leur épaisseur n'est que de 19 p., au dessus des Arcs qui surmontent le Coridor supérieur, elles reprennent leur épais- seur de 3 P. 8 p. & la gardent jusqu'à la Corniche sous le toit, laquelle est élevée de 65 P. sur le sol de l'Eglise. Ces murs sont butés, vis-à-vis de chaque Pilier, prémiérement par les Arcs doubleaux des basses- Voutes, & par des murs qui portent sur ces Arcs, & qui s'élèvent jusqu'à la hauteur de la naissance des Arcs de la haute-Voute, en suivant la pente du toit des bas-côtés qui les recouvre; ensuite sur ces murs s'élè- vent des Eperons, qui ont 2 1/2 P. de saillie, 1 P. 8 p. de large, & 18 P. de haut, ensorte qu'ils montent aussi haut que laVoute.

Murs des basses-Nefs. Le mur de la basse-Nef du nord a 3 P. 10 p. d'épais,

& 44 P. de haut extérieurement. Celui du midi n'a que 33 P. de haut extérieurement, & 4 1/2 P. d'épaisseur au bas, qui se réduisent à 2 1/2 P.

au haut. Le mur du nord est soutenu, à l'angle de la Façade & vis-à-vis de chaque Pilier, par des Eperons assés inégaux: ils ont 1 P. 7 p. de saillie, 3 P. 8 p. de large & 33 P. de haut: mais celui qui répond au cin- quième Pilier a 3 P 5 p. de saillie, 4 P. de large, & 36 P. de haut. On peut aussi compter entre les appuis de ce mur du nord, un Perron avec un Palier couvert, placé vis-à-vis de la troisième Voute; & un contremur qui renforce par embas le mur qui répond à la cinquième Voute.

La Chapelle des Machabées est adossée au mur du midi le long des deux prémiéres Voutes, & son escalier est adossé à la troisième. Dans la partie de ce mur du midi qui est à découvert, il a deux Eperons, vis-à-vis le qua- trième et cinquième Pilier. Leur saillie est de 16 à 17 p. leur largeur de 3 P. 10 p. & leur hauteur de 31 P. La portion du mur, qui répond à la cin- C]lliéme Voute, est renforcée comme du côté du nord

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Portes & fenêtres. L'Eglise a 6 Portes. La principale est à la Façade: sa lar- geur est de 8 P. 10 p. sa hauteur de 14 P. Il y a une Porte au rnur de la basse-Nef du nord qui répond à la troisiéme Voute, & une à celui du midi qui répond à la qualriéme Voute. Par la prémiére de ces Portes on des- cend dans la ruë par 15 marches, qui font une hauteur de 9 P. 8 p. Par la seconde on monte 6 marches, qui font 3 P. 8 p. Il y a deux Portes du côté du levant, l'une au Vestibule qui est au nord du Chœur, l'autre à la secon- de Chapelle au midi. La sixiéme Porte, qui est tort petite, est à l'extremité du Croisillon du nord. On peut ajouter une Porte au mur du midi, sous la prémiére Voute, qui communique à la Chapelle des Machabées.

Le Temple a 86 Fenêtres en tout. Il y en a 52 au Coridor supérieur; sçavoir, 33 à la Nef, 8 aux Croisillons, 2 Roses à leurs extrémités, & 9 Fenêtres autour du Chœur. Il y en a 15 au Coridor inférieur; sçavoir, 2 au côté du couchant des Croisillons, 6 à leurs extrémités, & 7 autour du Chœur. Il y a encore 19 Fenêtres au dessous du Cordon; sçavoir, 2 Œils-de-bœuf,

& 5 Fen~tres pour éclairer les basses-Nefs, (les trois prémiéres Voutes du

côté du midi, & les deux prémiéres du côté du nord n'ayant point de Fenêtres) 7 grandes Fenêtres autour du Chœur, & 5 aux Chapelles &

Vestibule qui sont de part & d'autre.

Seconde Partie

Etat de l'Eglise de St. Pierre, ainsi qu'il résulte de la Visite géné- rale faite en 1749

Il paroit que les accidents survenus à l'Edifice ont été principalement occasionnés,

1 o Par la poussée latérale des Voutes de la Nef, qui a fait pancher le mur du nord vers le nord, & celui du midi vers le midi. Cette poussée a produit plus d'effet du côté du nord, parce que de ce côté-là le mur est plus mince, & le terrain plus bas, & parce que du côté du midi la Chapelle des Machabées a soutenu, en partie, le mur auquel elle est adossée.

2°. Par la poussée, longitudinale des Arcs formerets, & oblique des Croisées d'ogive, qui a fait pancher la Façade en avant, & qui a jetté toute la Nef vers le couchant, c'est-à-dire du côté de la Façade.

3° Par l'injure du tems, qui a rongé les matériaux aux Faces du midi &

du couchant, & peut-être aussi par quelques incendies qui ont attaqué l'Edifice du côté du nord.

Nous donnerons le détail de ces accidents, en commençant par la Façade, d'où nous passerons à la Nef, puis à la Croisée, & enfin au Chœur.

Etat de la Façade. 1. La Façade vuë de l'extérieur, se divise naturellement en troi<; pilrtiPs.

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1. Du sol au haut du Portail; hauteur 36 P. surplombe de 5 1/2 p.

2. Du haut du Portail à la Corniche; hauteur 27 P. surplombe de 10 1/2 p.

3. De la corniche au sommet du Pignon; hauteur 33 P. surplombe de 4 p.

Ainsi la Façade surplombe de 20 p. sur toute sa hauteur de 95 P. mesu- rée au milieu de la Façade. Les Eperons, hauts de 82 P. surplombent, l'un & l'autre, de 14 p.

Les extrémités de la Façade panchent, sur une hauteur de 40 P. celle du nord de 7 p., celle du midi de 5 p. Cette diférence vient de la Chapelle des Machabées, construite 500 ans après la Cathédrale, qui a maintenu l'angle du midi, auquel elle est liée. On peut encore l'attribuer, en partie, à des barres de fer avec des ancres, posées il y a cent ans, & qui lient l'Eperon du midi avec le mur du même côté.

Intérieurement, la Façade se retire de 2 p. moins qu'elle ne panche en dehors: d'où l'on conclud que les matériaux se sont déliés à la hauteur du Cordon, & que la partie extérieure s'est plus jettée en avant que la partie intérieure.

On voit, au milieu de la Façade, une fente de bas en haut, qui se subdivise en plusieurs branches, selon les joints des quartiers de pierre. Elle traverse un grand Cadran, & fracture les traits des chiffres qui marquent la VI' &

la Xli' heures. Comme ce Cadran a été peint en 1699, on voit que cette fente s'est faite, ou qu'elle a sensiblement augmenté depuis 50 ans.

Enfin, les matériaux du Portail, & ceux du milieu de la Façade, sont déran- gés par ces fentes & ces surplombemens; aussi bien que par l'injure du tems, qui a rongé le parement des quartiers & les angles de leurs joints.

Etat de la Nef Il. Piliers. 1. Dans les gros Piliers de la Nef, que nous comp- tons en commençant par la Façade où les prémiers sont en partie noyés, nous distinguons trois parties, l'inférieure, la moienne, & la supérieure.

La prémiére, comprise entre le sol & le chapiteau inférieur, a 18 P. de haut. La seconde, qui va du chapiteau inférieur au Cordon, a 17 P. Et la troisiéme, dès le Cordon au chapiteau supérieur, a 101/2 P. On a mesuré séparément les surplombements de ces trois parties.

Les prémiers Piliers, engagés en partie dans la Façade, se renversent de 8 p. vers l'occident, sur toute leur hauteur de 45 1/2 P.

Il y a lieu de croire que les autres Piliers panchent aussi du même côté, mais leur principal surplombement est vers le nord pour ceux du nord,

& vers le midi pour ceux du midi. En voici les mesures.

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Au nord. Le second Pilier surplombe, dans la partie inférieure de 1 p. dans la moienne de 5 p. & dans la supérieure de 41/2 p. en tout de 10 1/2 p.

A l'endroit du Cordon, les pierres ont glissé vers le nord, & font comme une retraite.

Le troisiéme Pilier: partie inférieure 1 p. moienne 5 p. supérieure 3 3/4 p.

en tout 9 3/4 p.

Le quatrième: partie inférieure, à plomb; moienne 3 1/2 p. supérieure 2 p. en tout 5 1/2 p.

Le cinquième: partie inférieure, à plomb; moienne 1 p. supérieure 11/4 p.

en tout 2 1/4 p.

Le sixiéme Pilier est entièrement à plomb.

Au midi. Le second Pilier panche vers le midi, dans sa partie inférieure &

moienne de 1 p. dans sa partie supérieure de 21/2 p. en tout de 31/2 p.

Le troisième est à plomb jusqu'au Cordon: sa partie supérieure ne panche que de 1 p.

Le quatrième & cinquième, de même.

Le sixiéme Pilier panche, au contraire, de 11/2 p. vers le nord: ce qu'on ne peut guéres attribuer qu'à la construction primitive.

Arcades. 2. Entre les Piliers sont les Arcades, sous lesquelles on passe de la haute-Nef aux basses-Nefs. Leurs retire mens, mesurés par dedans, dès le sol jusqu'au cordon, font,

Au nord. Prémiére Arcade 3 3/4 p. Seconde 5 3/4 p. Troisiéme 3 1/2 p.

Quatrième 2 1/2 p. La cinquiéme est à plomb.

Au midi elles sont toutes assés à plomb.

Murs de la Nef. 3. Sur ces Arcades s'élévent les murs qui ferment la haute-Nef au midi & au nord. C'est dans ces murs que sont pratiqués les Coridors, & que sont percées les grandes Fenêtres. On en a mesuré les surplombemens par dehors, & sur la hauteur d'environ 30 P. dès le Cordon à la Corniche ou au Toit, on a trouvé,

Au nord, joignant la Façade, 4 p. Entre le 1' & le 2" Eperon, 13 p. Joignant le 2" Eperon, 14 p Entre le 2" & le 3', 15 p Joignant le 3' Eperon, 10 112 p.

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Entre le 3' & le 4', 8 1/2 p. Joignant le 4' Eperon, 5 1/2 p. Entre le 4' &

le 5', 4 p. Joignant le 5' Eperon, 41/2 p. Entre le 5' Eperon & la Croisée, 3 1/2 p. Joignant la Croisée, 11/2 p. dans la partie supérieure seulement Les assises de ce mur du nord panchent vers le couchant, & il est crevas- sé en divers endroits, principalement entre le 1' & le 3' Eperon, où ces fentes ont dérangé les Arcs de quelques Fenêtres, sur tout de la prémiére.

On a voulu, il y a environ 40 ans, lier les matériaux avec des barres de fer;

mais ils étaient si usés que le quartier, auquel la barre étoit cramponée, s'est cassé & s'est séparé, en partie, de sa liaison. Ces fentes proviennent de l'inégal surplombement du mur, & du renversement de la Façade vers le couchant.

Au midi, le mur surplombe, entre le 1' & le 2' Eperon, de 6 à 7 p. entre

le 2' & le 3', de 3 à 4 p. entre le 3' et le 4', de 2 à 3 p. entre le 4' & le

5', de même; & de même encore entre le 5' & la Croisée; joignant la Croisée, de 1/2 p. à la partie supérieure seulement.

Le mur du midi a moins de fentes que celui du nord: il s'en voit pourtant quelques-unes entre le 1' & le 2' Eperon: mais dans toute la partie de ce mur qui est exposée à l'air, les matériaux sont extrémement rongés.

Clefs des Voutes. 3. LaVoute de la Nef est, comme on a dit, partagée en cinq Voutes, séparées par des Arcs doubleaux, & dont chacune est divisée en quatre Pendentifs par une Croisée d'ogive.

Il parait que les Clefs de ces cinq Voutes se sont portées vers le nord- ouest, à cause du renversement de la Façade vers le couchant, & de celui du mur au nord plus considérable que celui du mur au midi. On n'a pû mesurer la quantité de ce mouvement des Clefs à la prémiére & seconde Voute, parce qu'elles étaient déjà ceintrées quand on a fait la Visite géné- rale du Temple: mais à la troisiéme Voute on la trouve de 4 p., & à la quatriéme de 3 p. La cinquiéme ne parait pas avoir varié.

Arcs doubleaux. 4. L'Arc doubleau, qui sépare la prémiére Voute de la seconde, a ses Voussoirs fort dérangés: les supérieurs bâillent à l'intrados,

& les inférieurs à l'extrados. Il y a cent ans qu'on a retenu ceux qui sont

les plus proches de la Clef, en les liant avec des crampons de fer; mais les Voussoirs suivans se sont déjoints: ce qui prouve que dès-lors la pous- sée a continué d'agir. Cet Arc panche vers la Façade de 7 à 8 p. sur la hauteur de 17 p. Le suivant a aussi ses Voussoirs très-dérangés, & panche du même côté de 5 p.

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Celui qui vient après a aussi quelque dérangement, & panche de même vers le couchant de 3 p.

L'Arc doubleau, commun à la quatrième & cinquième Voute, parait sain, aussi bien que celui de la Croisée.

Croisées d'ogives. 6. Les Croisées d'ogive ont suivi le mouvement des Clefs vers le nord-ouest; ce qui a causé quelques dérangements à leurs Voussoirs.

Dans la prémiére Voute, l'Arc qui retombe sur le second Pilier au nord s'est plié d'un Pied au dessous de son trait naturel: les Voussoirs supé- rieurs sont écartés à l'intrados, & les inférieurs à l'extrados de 2 à 3 p.

Les moulures de l'angle occidental de leur douelle sont cassées.

La nervure de la seconde Voute, qui retombe sur le même Pilier, est aussi dans un triste état; desorte que les trois Arcs qui portent sur ce Pilier sont fort en désordre.

Le mal est moins grand aux Croisées d'ogive de la troisième Voute:

c'est peu de chose à la quatrième; & on n'aperçoit rien de vicieux à la cinquième.

Pendentifs. 7. Plusieurs des Pendentifs des trois prémiéres Voutes sont fèlés. Cela se remarque sur tout à la prémiére, où il y a des fentes à tra- vers lesquelles ont voit le jour. Un des Pendentifs de cette Voute s'est si fort courbé en sens contraire, qu'il est en partie convexe vers le bas. En montant sur la Voute, on voit que les Pendentifs sont séparés des murs du nord & du sud par des fentes, dont celle du nord est large, à la pré- miére Voute de 15 p., à la seconde de 12, à la troisième de 71/2, à la quatrième de 41/2, à la cinquième de 1 p.; & celle du midi, à la prémiére Voute de 6 à 7 p., à la seconde de 31/2, à la troisième de 2 1/2, à la qua- trième de 2 p. A la cinquième Voute il n'en parait point. Ces fentes ne se voient presque pas dès le bas.

Sur les reins de la prémiére Voute on avait construit deux petits murs desti- nés à porter les extrémités des sommiers qui soutiennent un Clocheton, lequel s'élève derrière le Pignon de la Façade, & où était une grosse Horloge avec ses Cloches. On croit que cet ouvrage a contribué à faire pancher les murs du midi & du nord.

Etat des basses-Nefs. Ill. Pilastres. 1. Les Pilastres, qui soutiennent les Voutes des basses-Nefs, ont 18 P. de haut. Du côté du nord, le second

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se retire de 5 1/2 p., le troisième de 4 1/2, le quatrième de 3 1/4, le cin- quième de 11/2, le sixième est à plomb.

Du côté du midi, le second, troisième & quatrième se retirent chacun de 11/2 p. Le cinquième & sixième sont à plomb.

Murs. 2. Les murs, qui remplissent les intervalles de ces Pilastres, ont au milieu 33 P. de haut mesurés par dedans.

Celui du nord se retire, entre le 1' & le 2' Pilastre de 10 3/4 p.; entre le 2' & le 3', de 12 1/2 p.; entre le 3' & le 4' de 9 p.; entre le 4' & le 5', de 5 p., entre le 5' & le 6', de 2 p.

Celui du midi, entre le 1' & le 2' Pilastre, de 3 p., entre le 2' & le 3' d'au- tant, entre le 3' & le 4' de 41/2 p., entre le 4' & le 5' de 31/2 p., & entre

le 5' & le 6' de 2 p. Où il faut remarquer que du 1' au 3' Pilastre ce mur

est adossé à la Chapelle des Machabées; ce qui a diminué le retirement.

Ces mêmes murs ont été examinez par dehors: Celui du nord a, de ce coté-là, 44 P. de haut; la ruë étant de 9 à 10 P. plus basse que le sol de l'Eglise. Sur cette hauteur, les surplombemens sont, joignant la Façade ou le 1' Eperon, de 141/2 p.; joignant le second, de 13 3/4 p.; joignant le troisième, de 9 p., & cela seulement dans les 30 P. supérieurs, un Talud ayant empêché de jeter l'aplomb jusqu'embas. Joignant le quatrième Eperon, plus fort que les autres, de 71/2 p. Entre cet Eperon & la Tour du nord, le mur est renforcé sous la Tablette de la Fenêtre, d'un contremur épais de 17 p. près de l'Eperon, & de 9 p. près de la Tour. Le contremur est à plomb, & le mur, dès la Tablette en haut, ne surplombe que de 1 p.

Ce mur de la basse-Nef du nord est fort crevassé, sur tout dans la partie la plus voisine de la Façade. Entre le second & le troisième Eperon, les matériaux sont, en partie, enfumés; ce qui marque un reste d'incendie. Le mur du midi surplombe vers le midi. On n'a pû le mesurer le long des deux prémiéres Voutes, parce que dans cette longueur il est adossé à la Chapelle des Machabées. Mais entre le troisième & quatrième Eperon il surplombe de 41/2 p., au quatrième de 4 p., au cinquième de 2 p. Entre le cinquième & la Tour du midi, il y a un contremur épais de 9 p. jusqu'à la Tablette de la Fenêtre, dès laquelle jusqu'au haut le mur surplombe de 2 p.

Voutes. Les Voutes des basses-Nefs sont en passablement bon état, à l'exception de la prémiére au nord, dont les Arcs sont assés dérangés;

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& de la seconde, dont le Pendentif est séparé du mur par une fente d'environ 2 p.

Croisillons & Chœur. IV Les Croisillons ont tous leurs Arcs doubleaux ren- forcés & sains.

Les Piliers n'ont, dans toute leur hauteur, aucun surplombernent qui passe 11/2 p.

Au bout du Croisillon du nord, on voit dans le plafond du Coridor infé- rieur trois fentes qui répondent aux clefs des trois Fenêtres.

La Tour, qui porte sur ce Croisillon, surplombe à la Face du nord de 4 p.

sur 80 P. de hauteur d'un gros mur, & dans les 24 P. restans, qui forment les Arcades du haut de la Tour, le surplombement est de 3 3/4 p. La Face orientale surplombe de 61/2 p., vers l'angle du nord, sur toute sa hauteur.

La Face occidentale est assez à plomb, mais ses matériaux sont fort ron- gés, sur tout vers le haut. La Face du midi, qui a été rebatie il n'y a pas longtemps, est bien.

La Tour, qui porte sur le Croisillon du midi, a été revêtue de pierre de roche en 1510, & elle est toute en bon état.

Le Chœur a quelques surplombemens, mais qui n'excédent pas 61/2 p. sur 60 P. de hauteur. Intérieurement, les Colomnes, qui suportent les Arcs du Rond-point, se renversent de 2 1/2 p. au plus, sur une hauteur de 42 P.

Fondements. V. On n'a pas visité les Fondemens; mais on a ouvert le Terrain au pied du quatrième Pilier du nord. Son Fondement n'avait du côté de la Nef que 6 p. de saillie. 20 p. du côté opposé, & 18 p. sous les Arcades. li étoit profond de 10112 P., de maçonnerie de cailloux, & de bon mortier, mais déchirée & rentrante en dedans Le fonds du terrain était un bon sable. Ce Fondement, ne descendant que de 1 P. plus bas que la rue voisine, fait présumer que ceux de l'Eglise ne sont pas profonds.

Charpente. VI. La charpente du Clocheton sur le Pignon de la Façade est pourrie & rompue en bonne partie, aussi bien que les sommiers sur les- quels elle porte; celui qLJI touche la Façade est entièrement pourri.

La charpente du Toit est de deux sortes. La partie la plus proche

de

la

Façade a été renouvellée, & est omposée de fermes bien liées dans le bas par des sommiers-tirans. Le reste, plus ancien, n'est formé que de simples chevrons, liés en haut par un petit enlrëlil; desorte que leurs jambes. portan sur les murs, les poussent de part et d'autres. La char-

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pente sur le Rond-point du Chœur est de même sans liaison. Il n'en est pas ainsi de celle des Tours: elle est bien entendue, & composée de fortes pièces de chêne solidement assemblées.

Troisiéme Partie

Examen des diférens Projets pour réparer le Temple de St. Pierre Les diférens Projets de réparation se raportent à trois Classes. Ou l'on veut laisser subsister l'Edifice tel qu'il est en soutenant ce qu'il y a de caduque:

Ou l'on veut abattre ce qu'il a de défectueux, & le rétablir à neuf, en conservant au Temple toute sa longueur: Ou l'on veut en retrancher quelque partie.

/. Projet. Le prémier Projet consiste à soutenir les Voutes & les murs, qui menacent ruine, par des barres & des ancres de fer, ou par des sommiers

& des clefs de bois.

Mais l'étendue de l'ébranlement des Voutes, le surplombement de quelques parties des murs, & le défaut de liaison des matériaux, ne per- mettent pas de se flater qu'on puisse retenir cet Edifice en attachant ce qui est malade à ce qui est sain. Il serait plutôt à craindre que ce qui est caduque n'entrainât ce qui peut encore se soutenir. L'expérience ne confirme que trop cette crainte. La Façade a été liée anciennement par des barres de fer aux murs de côté; mais elle n'a pas laissé de travailler,

& elle a rompu & arraché les quartiers auxquels ces liens avaient été scel- lés. Le surplombement des murs est si considérable en quelques endroits, que du côté du nord le mur de la Nef, qui n'a que 19 p. d'épaisseur, panche de 13 à 14 p. sur 28 P. de haut; si bien que c'est une merveille qu'il se soutienne. On ne pourrait entreprendre sans témérité de conserver des murs si mauvais & si renversés.

Il. Projet. Le second Projet est de démolir les Voutes qu'on ne peut plus conserver, de les rétablir en bois, & de les peindre en couleur de maçon- nerie, pour assortir au reste.

Mais ce Projet ne peut être soutenu, que quand on ne connoit pas toute l'étendue du mal. Ce sont moins les Voutes, que les murs, qui font craindre: en démolissant les Voutes le mur du nord est en danger de crouler. La question est donc de savoir si, quand il s'agira de refaire ces Voutes, on ne pourrait pas préférer le bois au tuf ou à la pierre.

Ce ne pourrait être que par une raison d'œconomie. Car quelque colo- ris qu'on donne, la différence des Voutes anciennes & des Voutes nou- velles frapera toujours désagréablement. Le froid, dont on se plaint si

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fort, percera bien mieux à travers les Voutes en bois: elle éteindront la voix du Prédicateur. Le bois se tourmentant, l'assemblage souffrira &

demandera un entretien continuel. Sans parler des incendies auxquels ces voutes seraient exposées, elles ont un inconvénient qui se manifeste quand on examine ce Projet par les régies de la Méchanique. C'est que les cinq Voutes buttent les unes contre les autres, comme cinq ressorts, qui faisant chacun le même effort pour se débander, s'empêchent mutuellement & se tiennent en équilibre. Il faudrait donc, si l'on voulait substituer des Voutes de bois à quelques-unes des Voutes de pierre, trou- ver l'art de mettre le bois en équilibre avec la pierre; ce qui ne pourrait se pratiquer sans prodiguer les matériaux; & alors on perd tout l'avantage de ce Projet. qui est l'épargne: car peut-être les Voutes de tuf, dont on a dans celles qui existent la plus grande partie des matériaux, couteront- elles moins que les Voutes de bois, dont il faudrait acheter toutes les piéces.

Ill. Projet. Le troisiéme Projet est de soutenir les murs surplombans, tant la Façade que les côtés, par des contremurs, des Eperons, ou des Arcs- boutans.

L'avantage de ce Projet consiste en quelque œconomie par rapport aux frais de la démolition, & dans l'agrément de conserver le corps de nôtre Cathédrale, pour laquelle on sent une tendresse d'habitude. Mais les difficultés en sont fort grandes.

1 o Pour soutenir la Façade, qui surplombe de 20 p il fau droit en grossir considérablement les Eperons, qui résistent à la poussée en longueur des Voutes de la Nef. Le fait prouve qu'ils n'ont pas été suffisants. Tandis que la Façade étoit à plomb, son poids aidoit à cette résistance: aujourd'hui il n'y faut plus compter. Il faudrait donc fortifier cette Façade par deux puissans Eperons, fondés solidement & profondément.

Cela serait d'une assez grande dépense, d'une laideur insigne, & d'un succés incertain. Le mur entre les Eperons panchant beaucoup, étant crevassé & mal lié, on n'oserait répondre qu'il pût subsister longtemps à l'aide de ces Eperons. Il seroit sans doute nécessaire de démolir le Pignon:

& que lui substituerait-on qu'un Toit à pan rabattu? ce qui donnerait à nôtre Cathédrale une physionomie d'Eglise de Village. D'ailleurs, qui peut savoir où nous conduirait cette démolition?

2° Il faudrait maintenir solidement le mur du nord, qui porte immédia- tement la basse-Voute, & médiatement la haute-Voute. Il est plein de fentes & surplombant. On ne peut le soutenir que par un contremur. Des Ererons ne le feraient qu'en partie, & rétréciraient la rue. Ce contremur

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se ferait, ou sur le vieux Fondement, ou sur un nouveau. Il est probable que le vieux Fondement n'est ni assés ferme, ni assés large, pour porter un contremur; & s'il faut un nouveau Fondement, il est à craindre qu'en s'assèiant le contremur ne se détache du mur, ou ne l'entraine.

3° Mais en supposant qu'on lui donne la solidité nécessaire; il faudrait, pour maintenir la haute-Voute, élever des Arcs-boutans sur chacun des Arcs-doubleaux de la basse-Voute, & il ne sont pas sans défauts. Il fau- droit encore démolir & refaire, presque en entier, les trois prémiéres Voutes qui sont ruineuses; rebatir, dans cette étendue, les murs de la Nef, dès le haut jusqu'au Cordon supérieur, du côté du midi; & jusqu'au Cordon inférieur, ou même plus bas, du côté du nord: tout cela étant mauvais, délié, & hors de ses aplombs. Ce mélange de vieux & de nou- veau ne pourrait guéres s'exécuter de façon à donner de la confiance en la solidité de cette Fabrique.

Ainsi ces trois prémiers Projets semblent devoir être rejettés. Les suivans sont tous admissibles: il ne s'agit que de chercher celui qui réunira le mieux la solidité, la commodité, la beauté & l'œconomie.

IV Projet. Le quatrième Projet consiste à démolir tout ce qui est trop caduque pour être conservé, & a le rétablir précisément tel qu'il est; en renforçant seulement la Façade par deux bons Eperons, & chaque Arc- doubleau par deux Arcs-boutans extérieurs.

On met donc bas, 1°. Toute la Façade: car quoi qu'elle puisse se soutenir dans toute la hauteur du Portail; cependant cette partie est trop mince

& trop panchée pour édifier du neuf sur ce vieux reste. 2°. Le mur qui

soutient la basse-Voute du nord, le long des trois prémiéres Voutes. 3°.

Les trois prémiéres basses-Voutes du nord. 4°. Les trois prémiéres hautes- Voutes. 5°. Le mur qui les soutient du côté du nord, dès le haut jusqu'au chapiteau inférieur des gros Piliers: & 6°. Le mur opposé au midi dès le haut jusqu'au Cordon supérieur. Tout cela est condamné par le jugement des Experts, qui va même plus loin.

V Projet. Le cinquième Projet ne difére du précédent, qu'en ce que, au lieu de rétablir la Façade, gothique & lugubre comme elle est, enlaidie encore par deux Eperons, on propose d'élever, à la même place, une Façade de gout, mais simple & modeste, comme il convient à nôtre Religion & à nôtre situation. On a présenté, par exemple, une ordonnance empruntée de la belle Façade de St. Gervais à Paris, reduite à plus de simplicité & aux dimensions de nôtre Edifice. C'est un Avant-corps com- posé de deux Ordres, un Dorique & un Ionique, couronnés par un grand Fronton triangulaire, & dont les côtés, retirés en arrière, sont terminés

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par des Pilastres Doriques couplés. Mais, sans s'arrêter à ce Dessein plu- tôt qu'à tout autre, il faut examiner si la dépense de ces ornemens doit contrebalancer les raisons tirées de la beauté qui en résulterait pour la Cathédrale & pour la Place, & de la convenance qu'il y a de donner, en cette occasion, des preuves du progrès des beaux Arts dans nôtre Ville,

& du zèle du Magistrat pour l'honneur de la Patrie & de la Religion. Le but des Projets qui suivent est de concilier l'œconomie avec les vues de beauté & de solidité, en retranchant une, deux, ou trois Voutes à l'extrémité du Temple.

VI. Projet. Le projet de retrancher trois Voutes diminue peut-être trop la capacité du Temple, & fait perdre quelques Bancs, qu'on retrouverait pourtant ailleurs avec avantage. Il ôte l'usage de la Porte du nord; mais on y suppléroit en pratiquant trois Portes, au lieu d'une, à la Façade nou- velle. On y gagnerait un espace, entre la Chapelle des Machabées, & la maison Mallet, qui embellirait la Place devant la Façade.

VIl. Projet. Dans le Projet de retrancher une seule Voute, le coup d'œil de l'intérieur du Temple n'est pas changé sensiblement; on ne trouve, non plus, aucune diférence remarquable dans les usages, soit pour le culte divin, soit pour les Assemblées générales. Mais aussi il y a peu d'épargne.

Pour ce qui est de l'effet que produirait ce retranchement. lors qu'on regarderait le Temple du dehors, les uns pensent que la Façade retirée de 28 P. ferait un enfoncement désagréable: d'autres croient, au contraire, que cela serait mieux, parce que la Maison Mallet avançant sur le Place de 24 P. de plus que l'Eperon de la Chapelle des Machabées, on mettrait, en reculant la Façade, plus d'égalité entre ces deux avances, & on se raprocheroit ainsi de la symétrie.

VIII. Projet. Le Projet moien, de retrancher deux Voutes, participe des avantages des deux précédens, sans en avoir les désavantages. Il ne diminue point le nombre des Bancs: il procure même la facilité de les augmenter au moien d'une grande Tribune. li laisse à l'entrée du Temple un espace fort raisonnable, & il donne une Place au dehors, qui pourra flater agréablement la vuë par quelque décoration gratieuse.

IX & X Projet. Mais on peut présenter à l'œil quelque chose d'auguste, en substituant à la portion retranchée un Portique, ou Porche, soutenu

& entouré de seize Colomnes, dans le gout de celui de la Rotonde à Rome, qui est un des plus beaux restes de l'antiquité.

Ce morceau ne serait pas si cher qu'on pourrait d'abord le croire. Il res- teroit ali dessous du prix des Voutes auxquelles on le substitue. La

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dépense n'augmenterait pas même beaucoup, quand au lieu de grais, on voudroit l'exécuter en marbre, que nous pouvons tirer aisément du Valais. On pourroit aussi y faire quelque épargne, en emploiant de la pierre plus commune, ou en diminuant le nombre de colomnes.

Examen des raisons pour conserver toute la longueur de l'Eglise, ou pour en retrancher quelque partie

Pour conserver

1°. Nos yeux sont habituez à cette forme de nôtre Eglise, que la coutume nous fait regarder comme majestueuse: ensorte que plusieurs personnes n'entendent parler de retranchement qu'avec une répugnance qu'on doit ménager.

2°. Les Edifices gothiques ont leurs proportions, dont on ne doit pas sortir dans une partie, tandis qu'on la garde dans le reste; puisque le vrai Principe de la beauté est l'uniformité de structure dans un Edifice.

3°. En conservant le Temple dans sa forme & dans ses dimensions, on se met à l'abri des critiques & des reproches qu'on ne manquera pas de faire à ceux qui veulent rafiner sur le goût de nos Ancêtres, & qui ne se contentent pas de la structure du Temple, dont ils se sont fort bien accommodés.

4°. L'expérience de plusieurs Siècles a fait voir que cette construction n'est point mauvaise pour nos usages sacrés & politiques.

5°. Quoi qu'il semble qu'il y ait de l'épargne à retrancher quelque partie du Temple; néantmoins en démolissant avec soin & ménageant les maté- riaux, il n'en coutera pas beaucoup pour les remettre à la même place qu'ils occupaient auparavant, & s'il se trouve sous la Façade un bon fon- dement, ce sera une vraie épargne de la rebatir où elle est aujourd'hui.

Raisons pour retrancher

1 o Il est certain qu'un Vaisseau presque neuf fois plus long que large présente à l'œil une disproportion choquante. Les Grecs & les Romains, ces grands Maîtres de l'Art, ne se sont guéres éloignés de la proportion double, ils n'ont point été jusqu'à la triple. Depuis le rétablissement de l'Architecture, les modernes n'ont pas passé la proportion quadruple.

C'est dans les Siècles barbares, qu'on s'estjetté dans l'excès oi'1l'on voit plusieurs Eglises gothiques. Il a falu même que la superstition vint à l'ap-

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pui de la barbarie, pour étouffer l'instinct de la Nature, qui nous fait aimer les proportions simples & belles. Le respect pour la Croix dégénérant en abus, on a voulu des Croix par tout, jusques dans la forme des Cathédrales, quelque peu de raport qu'il y ait entre ces deux choses.

2°. La forme de Croix peut convenir à une Eglise Catholique: elle ne va point à un Temple Protestant: Dans celle-là, la distinction du Chœur &

de la Nef, séparés par un Jubé, partage la longueur en deux parties, &

d'une Eglise en fait deux, pour ainsi dire, qui ont chacune leur proportion

& leur régularité: mais elle disparoit entièrement, lorsque, par la suppres- sion du Jubé, ces deux parties reviennent à faire un seul tout d'une longueur démesurée.

3°. Dans une Eglise Catholique, le principal but est d'arranger un Maître Autel. un Chœur, & plusieurs Chapelles, & pour cet usage la forme de la Croix a ses avantages. La multitude des ornemens détourne les regards de dessus la forme générale, qui se montre à nud dans sa simplicité de nôtre Culte. Un Temple Protestant est un Auditoire, dont la construction doit tendre à recevoir autant d'auditeurs qu'en peut comporter son éten- due; à faire qu'ils soient bien assis & placés, fraichement en Eté, chau- dement en Hyver, autant qu'il se pourra; qu'ils puissent entrer & sortir commodément; sur tout que rien n'empêche, mais que tout favorise la voix du Prédicateur. On peut démontrer que, pour remplir ces vuës, il n'est point de Figure plus propre que celle du Cercle ou du demi Cercle.

Celle de la Croix est des plus vicieuses. Le Prédicateur tourne nécessai- rement le dos à une bonne partie de l'Assemblée, les Piliers interceptent sa vuë & sa voix à une autre partie, & la longueur de la Croix ne per- mettrait pas qu'il fût entendu par ceux qui seraient les plus éloignés. Aussi reste-t-il nécessairement un grand espace vuide. D'où il résulte deux inconveniens; l'un de dissiper la voix du Prédicateur, l'autre d'amener du froid dans l'Auditoire: inconveniens qui diminueront en retranchant une ou deux cinquième de la longueur de laVoute.

4°. La raison tirée de l'habitude, qui nous rend respectable la forme de nôtre Cathédrale, n'est pas d'un grand poids. Il est difficile à celui qui est accoutumé à de belles choses, de gouter celles qui le sont moins; mais on porte aisément son gout du laid au médiocre, & du médiocre au beau.

Dans six mois, personne ne 1·egrettera la longueur inutile & dispropor- tionnée de nôtre Temple.

5° On ne doit pas craindre de violer les régies de l'Architecture gothique, qui n'en eut jamais de fixe à cet égard. Qu'on ajoute ou qu'on retranche quelque chose à la longueur de nôtre Temple, on se trouvera toujours danc; les rroportions de quelque fameuse Eglise gothique.

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6° On ne doit pas, non plus, se faire un scrupule de joindre quelques ornemens dans le gout moderne à une Eglise bâtie dans le gout gothique.

Sans contredit, tout ce qu'on peut embrasser d'un coup d'œil doit être d'une structure uniforme: mais comme on ne peut voir en même tems le dehors & le dedans d'une Façade, il est permis, en conformant son intérieur à l'intérieur du Temple, d'orner son extérieur dans un autre genre: on peut citer quantité d'exemples de cette diversité, dans les ouvrage les plus aprouvés.

7°. Quant à la critique, ce serait un beau secret que celui de lui imposer silence: mais comme la chose est impossible, on doit être content de ne donner aucune prise aux critiques raisonnables, telle que celle-ci: Vous conservez, avec de grandes dépenses, un Edifice de mauvais gout, tandis que vous pouriez élever à moins de fraix, quelque chose qui vous ferait honneur aux yeux de vos Concitoiens, des Etrangers, & de la Posterité.

go Si jusqu'aujourd'hui l'on s'est contenté du Temple tel qu'il est, c'est qu'on n'a pas été dans la nécessité de le rétablir. C'eut été une prodigalité impardonable de renverser un Edifice solide, uniquement pour lui en substituer un autre de meilleur gout: Mais aussi, ce serait un attachement servile à l'Antiquité, de relever, au XVIII' Siécle, précisément sur le même Plan, un Edifice du XIe Siécle, c'est-à-dire, du Siécle le plus ignorant dans les beaux Arts.

9°. L'expérience aprend que le Temple, tel qui est, n'a pas les avantages qu'on suppose. Il est froid en Hyver: les sorties en sont embarassées, &

incommodes quand il pleut: un quart ou un tiers de la place reste néces- sairement vuide: la voix du Prédicateur ne peut atteindre qu'à la moitié de sa longueur; au delà elle se perd dans un espace inutile.

10°. Mais la principale raison à considérer ici, c'est la dépense. Les pré- miéres Voutes sont tellement ruinées, leurs matériaux sont si délabrés qu'il en couterait beaucoup pour les rétablir. Le peu d'épaisseur des murs donne lieu de soupçonner que les Fondemens sont fort minces. Si cela est ainsi, il y aura plus d'œconomie à les laisser en terre & faire ailleurs de nouveaux Fondemens, qu'à les démolir pour en construire d'autres plus larges en leur place. La considération des fraix a souvent arrêté des entreprises dont l'utilité est universellement reconnue. Ne doit-elle pas mettre quelque obstacle à une construction, qui n'a en sa faveur qu'un gout d'habitude, qui passera surement bien vite par une habitude contrai- re?

Pour être mieux en état de juger entre les divers partis, il serait néces- saire de faire des Modèles en bois des deux ou trois Projets, entre les-

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quels se peut trouver la concurrence. C'est le conseil de tous les habiles Architectes. Voici comme s'exprime le Commentateur de VIGNOLE, dans son Introduction à l'Architecture; Dans les Ouvrages, pour peu considé- rables qu'ils soient, on ne saurait aporter assez de précaution, en se ser- vant de Desseins & de Modeles, du moins en petit, pour juger de l'ef- fet de l'ouvrage: & c'est une vanité ridicule de se piquer de faire les choses du prémier coup.

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les projets du portique de Saint-Pierre:

présentation des sources (1748-1752}

par Anastazja Winiger-Labuda

les premières expertises

L'idée de la reconstruction de la façade de Saint-Pierre est énoncée pour la première fois devant le Conseil des Deux Cents en août 1748'. Trois mois plus tôt, l'ingénieur de la République Pierre Pradès de La Ramière (1674-1750) est chargé d'évaluer le danger que représentent les surplombs observés dans les murs de la partie nord-ouest du temple. Le ton de son rapport est alors plutôt rassurant les murs en question présentent certes une inclinaison vers l'extérieur d'environ 40 cm, mais les sondages démon- trent qu'ils <(n'ont point bougé el qu'il n'y a aucune variation par rapport à leqr penchernent depuis 57 ans.)) Et il ajoute <<On a fait visiter la char- pente du Temple par les [ ... ] maîtres charpentiers. qui ont fëlpporté qu'il n'y avaient f,)oint trouvé de changement. On a aussi fait visiter les murs du temple par les [ ... ] maîtres maçons, qui ont rapporté que les crevasses qui étaient aux murailles ne paraissaient pas nouvelles2

Pour stopper la poussée des voûtes et enrayer la dislocation de la façade nord, l'ingénieur recommande de renforcer les parties menacées par les arcs-boutants et les barres de fer, moyens déjà proposés en 1643 et 1706 lorsque la stabilité du temple semblait compromise. En effet, conformé- ment à l'esprit empirique de l'époque, La Ramière puise d'abord dans le savoir-faire de ses prédécesseurs, recherchant dans les anciens registres de la Chambre des Comptes tous les remèdes proposés face au même pro- blème3. Dans un mémoire intitulé Opinion sur ce qui peut avoir causé le surplombement des colonnes et des voûtes de l'église de Saint-Pierre et les moyens que les divers experts ont proposés pour réparer cet édifice, il passe en revue toutes les solutions envisagées depuis plus de ent ans et cite les avis de quelques contemporainS". Ces derniers se réfèrent égale- ment à des exemples à l'étranger. Ainsi, Armand Minot, dessinateur attitré de la Chambres des Comptes, «dit qu'il a vu réparer à Berlin une église qui avait les mêmes défauts que celle de Saint-Pierre et que pour la réparer, on avait revêtu par dehors la façade et les murs qui penchaient en adossant un nouveau mur contre le vleux5.» De méme, «un Anglais qui traversait le temple de Saint-Pierre dans le temps qu'on prenait les derniers aplombs, dit que nouvellement on avail réparé en Angleterre l'église de Westminster, qui avait aussi les mêmes défauts que celle de Saint-Pierre, sans rien toucher au-dedans, en la revêtant en dehors& ... » Enfin, «Une personne de goOt», dont La Ramière ne révèle pas le nom, propose de réédifier la façade en supprimant les travées endommagées.

Cette idée paraît à l'ingénieur «la meilleure>> mais en même temps la plus onéreuse'. Aussi s'empresse-t-il de modérer ces ambitions par ur'l projet de réparations n'engageant qu'une dépense «des plus modiques,>.

Des années d'expérience sur le grand chantier des fortifications, dor1t le

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coût avait provoqué de vives critiques, l'ont sans doute rendu prudent à l'égard des projets dispendieux.

Lorsqu'en août 1748, ces différents rapports sont présentés en Conseil, l'idée de la reconstruction de la façade est loin d'être acquise. Pour pou- voir se prononcer sur la manière de sauver le temple, les magistrats ordonnent des expertises supplémentaires. La Chambre des Comptes, chargée des travaux publics, dépêche sur les lieux trois maîtres maçons et trois maîtres charpentiers, tous d'anciens jurés de leurs professions".

En septembre, l'équipe intègre quatre autres maçons et charpentiers.

Entre temps, une commission de la Seigneurie est nommée pour contrôler les travaux de ces dix experts9 Toutefois, les minutieux rapports que ces derniers livrent aux autorités n'apportent aucune solution, puisqu'à la fin de la même année on demande à l'architecte Jean-Michel Billon d'ef- fectuer une nouvelle expertise.

La proposition de Jean-Michel Billon (1705-1778)

Dans son mémoire daté de décembre 1748, Billon se prononce en faveur d'une réédification partielle du temple10Constatant qu'aucun des maçons désignés par la Chambre des Comptes n'a pu évaluer précisément l'état de l'édifice- «leur âge ne leur permettant pas de pouvoir aller dessus des couverts» -, il s'inquiète de la détérioration progressive des voûtes et des murs: «quoi qu'il y ait des personnes qui disent et croient que les fractions n'ont pas augmenté depuis plusieurs années [sans doute une allusion aux conclusions de La Ramière] je les prie de ne pas trouver mauvais si je ne suis pas de leur avis".» Selon son analyse, de simples réparations lui paraissent insuffisantes. Il recommande donc de refaire à neuf les niveaux supérieurs des deux premières travées. Quant à la façade sur la cour Saint-Pierre, il propose de supprimer les deux tourelles latérales et de remplacer le pignon existant par un nouveau en «bonnes pierres de molasse de Lausanne [ ... ] avec un chantournement de figure agréable, avec des petites pyramides ou des vases simples pour amortissement en place des deux petites tours qu'il faut défaire"». Les niveaux inférieurs seraient en revanche maintenus: «Il faudra piquer, garnir et ragréer tout le reste de cette façade du bas en haut; le mur est assez épais et solide pour être conservé jusqu'à la hauteur des petites tours à défaire, ensuite passer toute cette façade en couleur de belle pierren.» Enfin, pour le clocher de l'horloge, il «devra être en façon de donjon à lanterne couvert de fer-blanc, de grandeur proportionnée à la hauteur de l'édifice et au nombre des clochers qui seront dedans".»

La proposition de Billon, qui tente de concilier le nouveau avec l'ancien, n'est pas du goCit de la commission de Saint-Pierre Lors d'une séance

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en janvier 1749 à laquelle l'architecte est convoqué, le conseiller Jean- Louis Calandrini, l'ingénieur La Ramière et Guillaume Desconfins, contrôleur des travaux publics- formant le «petit comité» élu au sein de la commission pour étudier l'ensemble des rapports- critiquent sévère- ment son projet. On lui reproche notamment de minimiser l'ampleur des travaux à faire. Billon le reconnaît et explique «qu'il n'avait parlé que des réparations qu'il estimait absolument indispensables pour prévenir une ruine prompte et qu'on lui proposait des extensions qu'à la vérité il trouvait si convenables, qu'il ne serait pas prudent de faire de la dépense pour mettre du bon sur du mauvais".» Il s'engage à revoir sa proposition et à dresser un nouveau devis.

L'évocation de ~<la Rotonde>> de Rome

Le même jour, les trois hommes auditionnent l'équipe d'experts composée de maçons et de charpentiers. Le compte-rendu de leur entretien révèle la solution à laquelle a déjà songé le petit comité:

«On a encore proposé à maître Bovet[ ... ] si on ne pourrait point en ter- minant l'église à la troisième voûte [travée]. substituer à la place des deux dernières voûtes un porche dont le frontispice serait une colonnade [ ... ]. surmontée d'un fronton. Sur quoi, il a répondu que cet ouvrage serait le même que celui du frontispice de la Rotonde qui est le plus beau morceau d'architecture que l'on ait, que les colonnes pourraient être de marbre de Valais qui ne coûterait pas plus que la roche, que l'on serait dispensé de faire une façade, puisqu'il ne s'agirait que de faire au fond du porche trois portes avec leurs tableaux dont la hauteur n'aurait pas 30 pieds'6 ... ».

Cette proposition, inspirée directement du Panthéon de Rome et immé- diatement reconnue comme telle par le maître maçon Jean-Louis Bovet, émane sans doute de Jean-Louis Calandrini (1703-1758), le plus actif des

«commissaires'' et par la suite fervent défenseur du projet d'Alfieri. Elle lance en effet l'idée du portique monumental qui sera adoptée deux ans plus tard. Calandrini l'a peut-être développé avec son ami, l'éminent mathématicien Gabriel Cramer ( 1704-1752), qui se joindra bientôt aux séances du petit comité. La reconstruction complète de la façade est donc envisagée dès ce moment.

Les deux premiers projets de Jean-Louis Bovet père (1699-1766) Stimulé sans doute par l'entretien qu'il a eu avec les membres du petit comité, Jean-Louis Bovet soumet au début du mois de mars son propre prowt aussitot écarté: «Vu le plan de maître Bovet qu'on a trouvé trop

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