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Quelle est la place de la chirurgie dans l adénocarcinome pancréatique localement évolué?

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ARTICLE DE SYNTHÈSE /REVIEW ARTICLE

Quelle est la place de la chirurgie dans l ’ adénocarcinome pancréatique localement évolué ?

What is the place of surgery in locally advanced pancreatic adenocarcinoma?

M. Soufi · M. Bensaid · S. Benamr · R. Messrouri · J. Mdaghri · H. Essadel · M.K. Lahlou · E.H. Mohammadine · A. Taghy · A. Settaf · B. Chad

Reçu le 28 septembre 2009 ; accepté le 17 novembre 2009

© Springer-Verlag France 2010

Résumé Le cancer pancréatique représente la cinquième cause de décès par cancer dans les pays occidentaux, et son incidence est en augmentation. La résécabilité des cancers du pancréas a malheureusement peu évolué et reste très faible. Nous présentons une étude rétrospective de 61 dossiers sur une période de huit ans. À la lumière des données de la littérature, les auteurs discuteront certains aspects diagnostiques, thérapeutiques et pronostiques de l’adénocarcinome pancréatique. Nous rapportons, à travers une étude rétrospective, portant sur une période de huit ans, entre janvier 1999 et décembre 2006, 61 cas de cancer pan- créatique. L’âge moyen de nos patients était de 61 ans avec un sex-ratio de 1,65. L’ictère et l’amaigrissement étaient les maîtres symptômes ; la radiologie, l’échographie et le scanner ont permis de poser le diagnostic chez 81 %.

L’opérabilité était de 83, et la résécabilité de 31 %, une chi- rurgie à visée curative a été réalisée dans 15 cas. La mortalité globale opératoire était de 2 %. La morbidité globale était de 21 %. La survie des patients non opérés était de 4 contre 11 mois pour les patients qui ont bénéficié d’une palliation à l’ictère (p< 0,001). Les patients ayant une R0 avaient une survie moyenne de 28 vs 14 mois pour les résections R1 (p< 0,01). La survie à trois ans était de 31 %.

Conclusion: La fréquence très élevée des formes métastati- ques ou localement avancées fait que moins de 20 % des malades sont porteurs d’une tumeur résécable au moment du diagnostic. Seule une résection chirurgicale peut apporter une survie prolongée, bien que la survie à cinq ans soit très discutée avec des valeurs de moins 15 %.

Mots clésCancer · Pancréas · Localement avancé · Résécabilité · Chirurgie

AbstractPancreatic cancer is the fifth leading cause of cancer deaths in western countries and his incidence is increasing.

The resection pancreatic cancers have unfortunately changed little and remains very low with rates not exceeding 22% for the best teams. We present a retrospective study over a period of 8 years, having to compile 61 patients, which we intend to discuss the clinical and paraclinical aspects, and try to empha- size, in the light of data from the review, objective criteria of resecability operable in a patient carrying a no metastatic and locally advanced pancreatic tumor.

Patient and method: We present a retrospective study, over 8 years (between January 1999 and December 2006), of 61 cases of pancreatic cancer. The average age of our patients was 61 years with sex ratio at 1, 65. The jaundice and weight loss are the principal symptoms. Radiological examination (US and CT scan) radiology ultrasonography and scanner confirm the diagnosis in 81% cases. The operability was at 83% and the resecability at 31%. A curative surgery was carried out in 15 cases. The mortality rate was 2% and the morbidity rate was 21%. The survival of the patients not operated was 4 vs 11 months for the patients who had pal- liative surgery (P< 0.001). The survical rate in patients with cure resection was 28 vs 14 months in palliative resection R1 (P< 0.01). Three years survival rate was 31%.

Conclusion: Very high frequency of metastatic forms or locally advanced that less than 20% of patients are carriers of a resectable tumor at the time of diagnosis. Surgical resec- tion alone can bring prolonged survival although survival at 5 years was much discussed with values of less than 15%.

KeywordsCancer · Pancreas · Locally advanced · Surgery · Resecability

Introduction

Le cancer du pancréas est le troisième cancer digestif après les cancers colorectaux et celui de l’estomac [1]. C’est un

M. Soufi (*) · M. Bensaid · S. Benamr · R. Messrouri · J. Mdaghri · H. Essadel · M.K. Lahlou · E.H. Mohammadine · A. Taghy · A. Settaf · B. Chad

Clinique chirurgicale B, hôpital Avicenne, Rabat, Maroc e-mail : drsoufimehdi@hotmail.fr

DOI 10.1007/s12558-010-0090-4

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cancer rare avant l’âge de 50 ans, avec une légère prédomi- nance masculine. Le type histologique le plus fréquent est l’adénocarcinome dans plus de 90 % des cas. L’avènement de nouvelles méthodes d’exploration, notamment l’IRM et l’échoendoscopie (EE), a ouvert de nouveaux horizons ; par ailleurs, les progrès des techniques opératoires et l’amélioration de l’anesthésie–réanimation limitent les contre-indications opératoires et autorisent, de ce fait, une chirurgie de plus en plus agressive et carcinologique. La place importante des thérapeutiques adjuvantes est actuelle- ment indiscutable, même en néoadjuvant, rendant résécables des tumeurs initialement très évoluées.

Malgré tous ces progrès, le pronostic du cancer du pan- créas demeure désespérément médiocre, avec une survie à cinq ans ne dépassant pas 5 à 15 %.

Notre travail porte sur l’étude de 61 cas de cancer de pan- créas colligés sur une période de huit ans, de 1999 à 2006, tout en insistant, à la lumière de la littérature, sur les diffé- rents facteurs prédictifs de non-résécabilité et sur la prise en charge d’un cancer pancréatique localement avancé.

Matériel d’étude

Nous rapportons, à travers une étude rétrospective portant sur une période de huit ans, entre janvier 1999 et décembre 2006, 61 cas de cancer pancréatique (adénocarcinome), les autres tumeurs ont été exclues ; pour cela, nous avons exploité les données cliniques et paracliniques, ainsi que les attitudes thérapeutiques engagées.

L’âge moyen de nos patients était de 61 ans, avec des extrê- mes allant de 28 à 86 ans. Notre série comprenait 38 hommes et 23 femmes, soit un sex-ratio de 1,65. Tous nos malades étaient symptomatiques. Le délai moyen de consultation était de 2,8 mois. L’ictère était le maître symptôme chez 46 de nos malades, et il était associé dans 40 cas à des douleurs abdominales de type solaire ; par contre, 93,4 % présentaient une perte de poids à l’admission. À l’examen clinique, neuf malades avaient une grosse vésicule palpable, et quatre seu- lement présentaient une masse épigastrique palpable.

Une échographie abdominale a été réalisée chez tous nos malades, montrant dans 36 cas un aspect tumoral du pancréas, dans deux cas un envahissement vasculaire et ganglionnaire et dans trois cas des métastases hépatiques multiples. Une TDM abdominale a été réalisée chez 58 malades (95 %) et a permis de poser le diagnostic dans 50 cas, de déceler l’enva- hissement vasculaire dans dix cas et les lésions hépatiques chez quatre malades. Malheureusement, la bili-IRM et l’EE n’ont été réalisées, respectivement, que chez trois et deux de nos malades, et elles ont permis, dans les cinq cas, de porter le diagnostic et d’étayer les rapports de la tumeur avec une spé- cificité élevée. La localisation céphalique était prédominante (50 cas), corporéocaudale (huit cas), la tumeur occupait la

totalité du pancréas chez trois malades. La taille de la tumeur dépassait largement 3 cm chez 57 de nos patients.

Le bilan biologique trouvait une cholestase dans 82 % des cas, une hyperglycémie chez six malades. Le taux des mar- queurs CA19-9 et ACE réalisés seulement chez 16 et 6 mala- des, respectivement, était manifestement augmenté dans la moitié des cas.

Parmi les 61 malades inclus dans notre étude, 51 ont été opérés, soit une opérabilité de 83 %. Les dix malades restant avaient des tumeurs jugées très évoluées et étaient classés ASA III et ASA IV, contre-indiquant toute laparotomie.

Chez seulement 16 malades, soit une résécabilité de 31 %, une chirurgie à visée curative a été réalisée, dont 15 cas de duodénopancréatectomie céphalique (DPC) avec curage gan- glionnaire, associée à une résection veineuse dans deux cas.

Dans un cas, une totalisation, soit une duodénopancréatecto- mie totale (DPT) pour cancer étendu, était réalisée. Chez la majorité de nos patients, soit 51 %, le stade évolué de la mala- die et surtout l’envahissement vasculaire (artérielle) constaté en peropératoire ainsi que l’état général altéré nous ont forcé la main pour réaliser des gestes palliatifs : 29 dérivations biliodigestives, couplées dans 14 cas à une gastroentéroanas- tomose. Une abstention thérapeutique (biopsie tumorale) a été respectée chez six malades. La mortalité globale opératoire était de 2 %. Un seul décès survenu à j + 3 d’une DPT, et dont les suites postopératoires immédiates étaient marquées par une défaillance multiviscérale. La morbidité globale était de 21 %. Deux malades ont présenté une fistule biliaire suite à un geste de dérivation, spontanément tarie au bout des deux premières semaines ; cinq de nos malades ont présenté une infection de la paroi. On déplore, par contre, deux reprises pour hémorragie postopératoire, une fistule pancréatique s’est tarie sous traitement médical à 25 jours du postopéra- toire, et une ascite chyleuse avec évolution bénigne dans un cas. À l’étude histologique, il s’agissait d’un adénocarcinome sur des pièces opératoires. La marge rétropéritonéale était envahie dans quatre cas, soit 25 % des cas.

Tous nos patients ont été suivis ultérieurement en consul- tation. La survie des patients non opérés était de 4 contre 11 mois pour les patients qui ont bénéficié d’une palliation à l’ictère (p< 0,001). Les patients ayant une R0 avaient une survie moyenne de 28 vs 14 mois pour les résections R1 (p< 0,01). La survie à trois ans était de 31 %.

Discussion

Depuis la première DPC réalisée par Codivilla en 1898 et rapportée en 1908 par Sauvé, les trois premières exérèses duodénopancréatiques effectuées par Whipple en 1935 et la première exérèse d’un cancer de la tête du pancréas menée à bien en 1937 par Brunschwig, la chirurgie d’exérèse pancréatique céphalique s’est considérablement développée.

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Malgré la diffusion de cette technique, la DPC demeure une intervention à haut risque, et les taux de mortalité et de mor- bidité restent élevés [2].

Le cancer du pancréas est le troisième cancer digestif après les cancers colorectaux et celui de l’estomac [1].

Son incidence est aujourd’hui de 1/10 000 habitants et ne cesse de croître. Il est responsable d’environ 5 000 décès par an en France [3]. C’est la cinquième cause de décès par cancer dans les pays occidentaux, avec une mortalité identique à l’incidence. Au Maroc, selon une étude faite au service de gastroentérologie à Casablanca, l’incidence serait de 0,32 % [4].

À l’instar des études publiées, le cancer du pancréas tou- che l’homme plus que la femme. Dans l’étude réalisée par l’AFC, la répartition selon le sexe était de 59 % d’hommes et de 41 % de femmes [5]. Le risque de cancer du pancréas paraît augmenter à partir de 50 ans, mais surtout pour des patients entre 65 et 80 ans. Selon une étude de l’AFC, l’âge moyen était de 68 ans [6]. Nos résultats rejoignent les données de la littérature, avec un sex-ratio de 1,65 et une moyenne d’âge de 61 ans.

Le tabac pourrait jouer un rôle dans l’activation de certains oncogènes comme K-ras. Trente pour cent des can- cers du pancréas pourraient lui être attribués [5]. D’autres facteurs ont été incriminés tels qu’une alimentation riche en graisse, une exposition à des produits pétroliers, à la naphtylamine et à la benzidine [7]. Le risque relatif des patients ayant une pancréatite chronique est de 26 [8].

Certaines affections héréditaires rares prédisposent à ce type de néoplasme dans près de 3 % des cas, citons les NEM de type I, les pancréatites héréditaires, le syndrome de Von Hippel Lindau [6,9].

La symptomatologie clinique (Tableau 1) est peu spéci- fique et le plus souvent tardive, traduisant un envahissement des organes de voisinage. Pour les localisations céphaliques, les formes ictériques sont les plus fréquentes [10]. Les épi- gastralgies ou les douleurs solaires traduisent une infiltration néoplasique des ganglions semi-lunaires et seraient présen- tes chez 85 %, avec un cancer localement avancé ; un ictère cholestatique lui est associé chez la moitié des patients avec une tumeur non résécable [11].

L’examen clinique permet d’évoquer le diagnostic devant une grosse vésicule, souvent associée à une hépatomégalie et, plus rarement, à une masse épigastrique. Les tumeurs corporéocaudales sont découvertes tardivement au stade de lésions souvent très volumineuses. L’AEG a été retrouvée chez 94,6 % de nos malades. Sa fréquence n’est que de 68 % dans la série de l’AFC. Cette discordance peut être expliquée par le stade tardif et évolué de la maladie de nos patients. Le diagnostic d’une forme évoluée peut également être évoqué en présence d’ascite abondante traduisant sou- vent une carcinose péritonéale ou devant des nodules de perméation cutanés (Tableau 1).

L’échographie abdominale est un examen de première intention pour établir le diagnostic positif et faire le bilan d’extension locorégionale [12]. Toutefois, elle reste d’apport limité pour des tumeurs dont la taille n’excède pas 2 cm ou localisées à la queue. Dans notre série, l’échographie a été réalisée à hauteur de 92,85 % des cas, elle a permis d’évoquer le diagnostic dans près de 68 % des cas. La majo- rité de nos malades a consulté tardivement et à un stade évolué où la tumeur avait atteint une taille importante facilitant sa détection par l’échographie abdominale [13].

Actuellement, l’émergence du scanner hélicoïdal et, plus récemment, du scanner multibarettes ainsi que la reconstruc- tion 3D permettent d’assurer un diagnostic de résécabilité

« préopératoire » avec une fiabilité de l’ordre de 90 % [14].

Dans notre série, la TDM a été faite chez 58 patients, soit 95 %, et elle a permis de poser le diagnostic dans environ 86 % des cas.

La sensibilité de l’EE est supérieure à 90 %, cet examen est particulièrement performant dans le dépistage des tumeurs de moins de 2 cm ; il permet de détecter l’envahissement veineux et ganglionnaire d’une spécificité de 87 %. La prin- cipale limite de l’EE reste la difficulté à établir le diagnostic différentiel avec un noyau de pancréatite chronique [12]. Les performances de l’IRM permettent d’associer à l’imagerie conventionnelle une imagerie spécifique des canaux biliaires et pancréatiques ainsi qu’une imagerie vasculaire avec des séquences angiographiques, dont la qualité est très proche de l’angiographie conventionnelle, ce qui permet un bilan lésionnel complet [15]. Dans notre série, la bili-IRM a été réalisée chez trois malades, et elle a permis de porter le diag- nostic de tumeur de pancréas avec une spécificité de 100 % et a permis unstagingcorrect. Cependant, son coût et sa dispo- nibilité rendent cet examen peu accessible dans notre contexte. La cholangiopancréatographie rétrograde endosco- pique (CPRE) reste d’intérêt surtout thérapeutique lorsqu’une décompression biliaire avec mise en place d’une prothèse est indiquée, même si cette méthode est d’actualité dans les pays européens, dans notre unité de soins, elle reste en cours d’évaluation [12]. La biopsie pancréatique scannoguidée pour preuve histologique garde sa place lors d’un doute diag- nostique ou devant une tumeur jugée inextirpable pour une Tableau 1 Principaux signes cliniques dans certaines séries

Clinique AFC

(%) [37]

Chirurgie A (%) [7]

Notre série (%)

Diabète 16 20 9,83

Ictère 71 93 75,4

Douleurs 59 73 65,57

Amaigrissement 74 80 93,44

Angiocholite 10 3,63 4,2

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éventuelle chimiothérapie palliative [16]. La laparoscopie à visée diagnostique, d’une sensibilité de 93 à 97 % et d’une spécificité de 100 %, permet de dépister de petites métastases hépatiques et les carcinoses péritonéales passées inaperçues.

Couplée à l’échographie perlaparoscopique, elle permet de dépister les extensions vasculaires artérielles et veineuses et de contre-indiquer la chirurgie. La pratique d’une étude cyto- logique perlaparoscopique a une spécificité de 98 % et per- met de renoncer à une laparotomie inutile [17]. Actuellement, l’étude des modifications du gène P53 suppresseur de tumeur, du récepteur de facteur de croissance de l’épiderme (EGFR), de la densité des microvaisseaux (le nombre de petits vaisseaux qui alimentent et fournissent de l’oxygène au cancer) est en cours d’expérimentation [17,18].

Les examens biologiques ne sont pas spécifiques, on peut trouver une cholestase, tardivement une cytolyse et une baisse du TP, des troubles de la glycorégulation. Le tubage duodénal ou le cathétérisme endoscopique du canal de Wirsung, à la recherche de cellules néoplasiques, peut être effectué. Les marqueurs tumoraux : le dosage de l’ACE n’a pas d’intérêt diagnostique ; cependant, le taux sérique de CA19-9 est aug- menté dans 80 % des cas, mais il sera utilisé pour le suivi thérapeutique [19]. Au plan anatomopathologique, le cancer du pancréas se présente sous forme de tumeur grisâtre, dure, homogène et irrégulière ; les tumeurs de la tête représentent 60 à 70 % de toutes les tumeurs, le corps : 10 % et la queue : 5 %.

Dans 80 à 90 % des cas, il s’agit d’adénocarcinome pan- créatique canalaire bien ou moyennement différencié ; le cystadénocarcinome mucineux et l’épithélioma colloïde muqueux ne représentent que 1 et 2 %, respectivement.

D’autres variétés histologiques, quoique rares, sont parfois retrouvées (sarcomes, lymphomes, etc.). Le degré élevé d’envahissement ganglionnaire s’explique par la richesse vasculaire du carrefour duodénopancréatique. Le potentiel métastatique élevé du cancer du pancréas est élucidé par certaines hypothèses qui mettent en valeur une expression importante du vascular endothelia growth factor, facteur antigénique qui contrôle la prolifération et la migration des cellules endothéliales, ainsi qu’une activation du gène du récepteur de la somatostatine [20,21].

Toutes ces explorations radiologiques et l’étude de la pièce de pancréatectomie vont permettre lestagingtumoral selon la classification TNM (UICC 2002) (Tableaux 2,3).

Malgré l’avènement et la disponibilité de moyens d’in- vestigations modernes, une meilleure connaissance de facteurs pronostiques (âge, douleur, taille tumorale, envahis- sement ganglionnaire, type histologique, atteinte multifo- cale) permet de poser les meilleures indications.

À l’heure actuelle, l’exérèse chirurgicale reste la seule possibilité de guérison du cancer du pancréas, et l’indication opératoire dépend directement du stade de la tumeur. Cette chirurgie curative permet d’obtenir une survie documentée de 15 à 24 % de la survie à cinq ans en moyenne [7]. Les

traitements palliatifs visent l’amélioration des symptômes ou la suppression de la douleur. Les traitements adjuvants ou néoadjuvants ont pour but de diminuer le taux de rechutes et d’augmenter la médiane de survie. Le traitement chirurgi- cal de choix consiste en une pancréatectomie adaptée à la topographie de la tumeur. Les cancers céphaliques sont résé- cables dans 10 et 25 % des cas selon les différentes études.

Les cancers corporéocaudaux sont moins souvent résécables (5 à 10 %). Seulement la présence de métastases viscérales et la précarité des fonctions vitales du malade constituent des contre-indications à toute chirurgie carcinologique [22]. Un bilan de résécabilité a pour but de rechercher d’autres limites à la résection carcinologique, tels l’infiltration de certains éléments (lame rétroportale, artère mésentérique, l’aorte abdominale, etc.) ou un envahissement ganglionnaire à l’origine du tronc cœliaque, le hile hépatique, la racine du Tableau 2 Classification TNM (UICC 2002) des cancers du pancréas

T-Tumeur primitive Tis Tumeur in situ

T1 Tumeur limitée au pancréas, moins de 2 cm dans sa plus grande dimension

T2 Tumeur limitée au pancréas, plus de 2 cm dans sa plus grande dimension

T3 Extension extrapancréatique avec atteinte du duodénum, du cholédoque et du tissu péripancréatique

T4 Extension extrapancréatique avec atteinte du côlon, de lestomac, du tronc cœliaque ou de lartère mésentérique supérieure

N-ADP régionales

N0 Pas de métastases ganglionnaires, même si moins de 10 ganglions examinés

N1 Envahissement ganglionnaire métastatique régional Nx Ganglions non évalués

M-Métastases

M0 Pas de métastases M1 Métastases à distance

Tableau 3 Classification de lAmerican Joint Comitee of Cancer (AJCC)

Stade 0 Tis N0 M0

Stade IA T1 N0 M0

Stade IB T2 N0 M0

Stade IIA T3 N0 M0

Stade IIB T1, T2, T3 N1 M0

Stade III T4 Tout N M0

Stade IV Tout T Tout N M1

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mésentère ; par contre, l’artère splénique, la veine mésenté- rique supérieure ou la veine porte peuvent parfois être réséquées [23].

Le caractère curatif de la résection est principalement conditionné par le caractère complet (R0) de l’exérèse, on distingue plusieurs procédés :

la DPC (intervention de Whipple). Dans notre série, le pourcentage des cancers réséqués était de 32 %, rejoi- gnant ainsi les données de la littérature très variables d’une série à l’autre, allant de 1 [24] à 70 % [20] ;

la DPT : pour les formes multicentriques [25] ;

la pancréatectomie corporéocaudale.

Dans tous les cas, un curage ganglionnaire péripancréatique est indispensable, même si certains auteurs ont des survies prolongées avec des curages étendus. Une exérèse de la lame rétroportale, facilitée par l’abord premier de l’artère mésenté- rique supérieure, est indispensable pour espérer une résection curative de type R0 et diminuer les récidives locorégionales.

Cependant, elle reste grevée d’une lourde morbidité [39].

La chirurgie palliative reste indiquée chaque fois qu’il existe un ictère et/ou une compression duodénale et qu’une tumeur est jugée non résécable [28], elle fait recours aux anastomoses biliodigestives portant sur la voie biliaire prin- cipale (anastomose cholédocojéjunale ou hépaticojéjunale, anastomose cholédocoduodénale) et exceptionnellement sur la vésicule biliaire [26]. En cas de sténose duodénale, il est préférable d’associer systématiquement une gastroenté- roanastomose sans vagotomie tronculaire [29] (Tableau 4).

L’avènement des stents ou des prothèses a modifié la place de la chirurgie dans la palliation. Cette technique séduisante n’est pas dénudée de complications et d’hospita- lisation itérative pour angiocholite. Dans notre contexte, vu que le plateau technique n’est pas disponible, la chirurgie reste le moyen de palliation de choix [30,31].

La morbidité opératoire dans notre étude rejoint celle de la littérature, elle reste autour de 25 à 35 %, représentée par la gastroplégie, les fistules pancréatiques, les suppurations locales, les hémorragies et les lâchages anastomotiques [32].

En cas de tumeur pancréatique localement évoluée, une radiochimiothérapie première associant 5-FU et cisplatine permet de rendre résécable 20 % des tumeurs initialement non résécables. Sa Cunha et al. rapportent, sur une série de 61 malades [38] avec suspicion d’engrainement artériel sur tumeur pancréatique, 13 cas de résection carcinologique après radiochimiothérapie qui ont été possibles avec une

survie médiane de 40 vs 11 mois pour les malades non répon- deurs et 20 mois pour les malades réopérés, mais n’ayant eu qu’un geste palliatif [33]. Ce traitement expose à des compli- cations, vu qu’il est adressé à des patients dénutris, ictériques.

Cette méthode mérite la validation par des études prospectives.

En cas de tumeur pancréatique résécable d’emblée, la chimiothérapie adjuvante par 5-FU et acide folinique est une référence [34].

De nouvelles molécules rentrant dans le domaine des biothérapies, que ce soit les antiangiogènes, les inhibiteurs de l’oncogène K-ras, les inhibiteurs de cyclo-oxygénases et les inhibiteurs des récepteurs de facteurs de croissance tyrosines-kinases comme l’EGF (herceptine, cetuximab), ont été testées en situation palliative et en association avec la gemcitabine, montrant dans une étude un bénéfice signi- ficatif en survie sans progression et en survie globale (survie à un an de 24 vs 17 %) [35].

Le pronostic, en général très mauvais, dépend en grande partie de la qualité du geste opératoire, l’examen des marges pancréatiques distales, cholédociennes et gastriques ou duo- dénales, n’est plus suffisant. Il est impératif d’étudier la marge rétropéritonéale qui doit être repérée sur la pièce d’exérèse [23]. La survie après chirurgie curative n’étant que de 10 à 30 % à cinq ans, le résultat est d’autant meilleur que la tumeur est plus petite et qu’il n’y a pas d’envahisse- ment ganglionnaire histologique. Pour les malades dont la tumeur n’est pas résécable, 50 % sont morts entre six et dix mois après le diagnostic [36].

Conclusion

Le cancer du pancréas est une affection fréquente, et le pro- nostic reste sombre. En effet, malgré le développement des techniques d’imagerie médicale, le bilan d’extension fait au moment du diagnostic montre que la tumeur est localement avancée ou carrément métastatique, traduisant la grande latence clinique de ce type de tumeurs. Actuellement, l’avènement de nouvelles molécules en polychimiothérapie couplée à une radiothérapie en néoadjuvant paraît améliorer les conditions locales pour rendre certaines tumeurs, jugées inextirpables au début, accessibles à une résection à visée curative. La chirurgie, qui reste le seul traitement capable de donner un espoir de survie, paraît profiter des progrès

Tableau 4 Les gestes thérapeutiques réalisés chez nos malades

Résection (%) Dérivation (%) Laparotomie exploratrice (%)

AFC [37] 22 67 11

Notre série 19992006 31 56 11

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de la réanimation–anesthésie qui permettent une chirurgie pancréatique de plus en plus agressive.

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