• Aucun résultat trouvé

La goutte : repères historiques.

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "La goutte : repères historiques."

Copied!
3
0
0

Texte intégral

(1)

4

Revue Marocaine de Rhumatologie

La goutte : repères historiques.

The gout : historical landmarks.

Jamal Mehssani.

Faculté de Médecine et de Pharmacie de Rabat, Université Mohammed V, Rabat, - Maroc.

Rev Mar Rhum 2019; 48: 4-6

Résumé

La goutte est parmi les premières maladies décrites par les anciens, déjà connue à l’époque de l’Egypte antique. Hippocrate en fait une description remarquable au Vème siècle Av. JC, et la dénomma « podagra ». Galien, au 1er siècle de notre ère, décrit les tophi et évoque le caractère héréditaire de la maladie, cependant la description complète de la maladie est due à Soranos d’Ephèse. L’apport des médecins arabes est d’une grande importance, ERRAZI lui consacre une MAQALA (un traité) de vingt chapitres, dont le manuscrit est publié pour la 1ère fois en 2003.

L’anglais Thomas SYDENHAM, lui même atteint de la maladie, publie en 1683 « Tractatus de Podagra et Hydrope » ouvrage entièrement dédié à la goutte, où il décrit avec minutie la maladie.

Attribuée durant des siècles à un déséquilibre des humeurs, l’usage du microscope au XVIIème siècle, contribue à la compréhension de son origine métabolique. Au XXème siècle, plusieurs gènes impliqués dans la pathogénie de la goutte ont été identifiés.

Mots clés :

Goutte; Podagre; Histoire.

Abstract

The gout is among the first diseases described by the ancients, already known at the time of ancient Egypt. Hippocrates, made a remarkable description in the 5th century BC, and called it «podagra». Galen, in the 1st century of our era, described tophi and evoked the hereditary character of the disease. However the full description of the disease comes from Soranos of Ephesus. Arab doctors greatly contributed, with ERRAZI devoting a twenty chapter MAQALA (a treatise), whose manuscript was first published in 2003. Englishman Thomas SYDENHAM, who himself suffered from gout, published in 1683 «Tractatus of Podagra and Hydrope», a work entirely dedicated to gout, where he meticulously describes the disease.

Attributed for centuries to a humor disorder, the use of the microscope in the seventeenth century, contributes to the understanding of its metabolic origin. In the twentieth century, many genes involved in the gout pathogenesis were identified.

Key words :

Gout; Podagra; History.

Correspondance à adresser à : Pr. J. Mehssani Email : jamal.mehssani@gmail.com

Disponible en ligne sur www.smr.ma

DOI: 10.24398/A.338.2019;

La goutte est parmi les premières maladies décrites par les anciens, déjà connu à l’époque de l’Egypte antique, ainsi elle est citée dans le papyrus d’Ebers en 1500 Av. JC.

Maladie des Rois et des riches, Hippocrate, le père de la médecine en fait une description remarquable au Vème siècle Av. JC, il la dénomma « podagra » « podagre » en français, qui signifie en grec « pris par le pied » évoquant le piège dans lequel l’animal est capturé (pous désigne le pied et agra la chasse, prise, capture), il la différencie de l’arthrite, maladie du pauvre. [1]

Dans ses aphorismes, appris par des générations de médecins jusqu’au XVIIIème siècle, on peut lire :

« - Les eunuques ne sont pas atteints de goutte ;

- Une femme ne fait pas de goutte avant la perte de ses menstrues ;

- Un jeune homme ne fait pas de goutte avant de se livrer au coït ;

- L’inflammation cède en 40 jours dans l’affection goutteuse ; - Les affections goutteuses sont actives au printemps et à l’automne ;

- Les gonflements et douleurs articulaires de la goutte sont le plus souvent améliorés par une « affusion » copieuse d’eau froide ». [2]

Galien, au 1er siècle de notre ère, décrit les tophi et évoque le caractère héréditaire de la maladie, cependant la description complète de la maladie est due à Soranos d’Ephèse « les malades atteints d’arthritis éprouvent d’abord de l’engourdissement, des fourmillements dans les jointures prises, une difficulté de l’extension et de la flexion, une pesanteur, un besoin de repos, une fatigue intense au moindre mouvement ; ils ont, pendant

DOSSIER SPÉCIAL

(2)

5

Revue Marocaine de Rhumatologie Revue Marocaine de Rhumatologie

La goutte : repères historiques.

leur sommeil, une sensation de craquements articulaires et se réveillent avec des soubresauts dans les membres affectés ; puis, sans cause apparente, surviennent, dans les mêmes régions, des frissons, du froid, du tremblement. Le mal augmente : chez les goutteux, une douleur lancinante, apparaît dans un pied ou dans les deux, commence par la plante, par la voûte ou, plus souvent, par le gros orteil ; en même temps persistent l’engourdissement, la pesanteur, la difficulté des mouvements.

Des frissons irréguliers parcourent les membres ; quelquefois, il y a une sensation de chaleur extrême ; d’autres fois, c’est le contraire, de sorte que les malades recherchent, les uns le chaud, l’autre le froid, ce qui fait créer les appellations de

goutte chaude et de goutte froide. Souvent, au début, il n’y a, au niveau des parties malades, ni changement de couleur, ni changement de forme, ni tuméfaction. Puis surviennent du gonflement et de la rougeur, ce qui détermine souvent un soulagement des parties profondes ».

Au moyen âge (V-XVème Siècle), les médecins arabes, particulièrement ERRAZI au Xème siècle en fait une description précise et remarquable, ERRAZI lui consacre une MAQALA, dont un manuscrit dans la bibliothèque d’Alexandrie s/no 6418 composée de 40 pages et publié pour la 1ère fois en 2003.

Il subdivise son traité en 20 chapitres [3] :

Quand à Avicenne, il écrit dans le canon « les jointures des pieds et des mains se prennent parce qu’elles offrent plus que les autres régions un espace à l’humeur morbide, parce qu’elles sont toujours en mouvement, parce qu’elles sont de complexion faible et froide et que leur place aux extrémités du corps est éloignée du centre régulateur. Aussi sont-elles le siège de tophi plâtreux et de déformations diverses. Quelques fois les jointures réussissent à se débarrasser du principe morbide qui se porte sur les organes essentiels et met le malade en péril si on ne le rappelle à son siège primitif ».

Les grands médecins arabes, à l’instar de leurs prédécesseurs, vont continuer à donner de l’intérêt à l’utilisation de l’hermodacte comme «antidote de la podagre et des affections articulaires». C’est lbn el-Baytar, au XIIIème siècle, éminent botaniste et pharmacologue, qui aurait le premier donné au colchique le nom que nous lui connaissons. [4]

A la renaissance (XVIème Siècle), Ambroise Paré, le père de la chirurgie moderne et à qui on doit le pansement des plaies remplaçant ainsi la cautérisation au feu où à l’huile bouillante, imposa le terme GOUTTE, vocable français au lieu

(3)

6

Revue Marocaine de Rhumatologie

de podagre, pour lui « les humeurs distillent goutte à goutte sur les jointures ».

Thomas SYDENHAM, grand clinicien, nommé l’Hippocrate anglais, lui même atteint de la maladie, publie en 1683 « Tractatus de Podagra et Hydrope » ouvrage entièrement dédié à la goutte, où il décrit avec minutie la crise de goutte : « Le sujet s’est couché bien portant et s’est abandonné au sommeil mais, vers deux heures après minuit, il est réveillé par une douleur occupant le plus souvent le gros orteil, quelque fois le talon, la jambe ou la cheville. Cette douleur rappelle celle de l’entorse et il s’y ajoute la sensation comme d’une eau à peine dégourdie répandue sur la région. Bientôt surviennent une sensation de froid, de frisson et un léger mouvement fébrile. La douleur, d’abord modérée, augmente par degrés en même temps que le froid et les frissons disparaissent et cela d’heure en heure, jusqu’à ce qu’elle parvienne à son comble à la tombée de la nuit : elle embrasse merveilleusement les petits os du tarse et du métatarse dont elle occupe les ligaments ».

Si à travers les époques, les descriptions cliniques n’ont pas beaucoup changés, l’explication humorale a résisté durant des siècles, par contre la compréhension de la genèse de la maladie, a beaucoup évolué depuis le XVIIIème siècle.

C’est grâce au microscope et Antoni van Leuwenhoeck (1632- 1723) que fut découverte la présence de cristaux dans les tophi. S’en suivra la découverte de l’acide urique à partir de calculs urinaires provenant d’un goutteux. Le chimiste anglais William Hyde Woolaston démontra la présence d’acide urique dans les tophi.

La description de la formule de l’acide urique par Hermann

Fischer (1852-1919), prix Nobel de chimie en 1902, clôtura l’histoire chimique de la goutte [5].

En 1967, J.E. Seegmiller et son équipe identifient le premier déficit enzymatique du métabolisme des purines. Depuis, plusieurs gènes impliqués dans la pathogénie de la goutte ont été identifiés, dont le gène SCL2A9 [6].

En parcourant les dates repères de l’histoire de la goutte, on constate aisément que les médecins arabes ont développé le savoir de leurs prédécesseurs gréco-romains et que leurs travaux étaient à la base des développements ultérieurs des connaissances sur la goutte.

RÉFÉRENCES

1. Jean-Louis Schlienger ; L’histoire des tourments de la podagre (goutte) Médecine des maladies Métaboliques - Avril 2014 - Vol. 8 - N°2

2. Hippocrate. Nouvelle traduction des Commentaires sur les aphorismes d’Hippocrate et commentaires spécialement applicables à la médecine dite clinique avec la description de la peste d’Athènes (traduction par F.-C.-F. de Mercy). Paris : Béchet Jeune; 1829.

3.

4. André Julien FABRE ; Le colchique :deux millénaires d’actualité.

Histoire des Sciences Médicales-TOME XXXIX-N°2-2005.

5. Nuki G ; Treatment of crystal arthropathy-history and advances. Rheum Dis Clin North Am 2006; 32: 337-57, vi.

6. Kelley WN, Rosenbloom FM, Henderson JF, Seegmiller JE ; A specific enzyme defect in gout associated with overproduction of uric acid. Proc Natl Acad Sci U S A 1967;57:1735-9.

Jamal Mehssani

DOSSIER SPÉCIAL

Traité de la goutte et l’hydropisie de Sydenham Manuscrit du traité de la goutte d’ER-RAZI

Références

Documents relatifs

Les métadonnées EXIF sont des données relatives à la prise de vue qui sont enregistrées dans le fichier correspondant à l’image numérique. Parmi ces métadonnées EXIF, on

Les métabolites anormaux de la tyro- sine (fumarylacétoacétate, maléylacé- toacétate et succinylacétone) peuvent donc s’accumuler dans un grand nombre de tissus et de cellules

L'analyse immunohistologique de la distribution des différentes chaînes de collagène IV dans les MBG et les membranes basales dermo-épider­ miques de sujets atteints

On peut ainsi penser que les mutation de la première partie du deuxième segment pourraient être les plus gra­ ves, celles de la partie C-terminale les plus

Dans leurs der­ niers travaux, les équipes qui se sont intéressées aux diverses forme de Charcot-Marie s'adressent à une autre entité clinique, la maladie de

Le XVIIe siècle marque une étape importante dans la compréhension de la notion de fonction avec l'introduction du symbolisme de l'algèbre littérale et l'usage des

In conclusion, by observing long-living Rabi oscillations of sol-qubits in Heisenberg gapped spin-Peierls systems, we provide evidence for coherence in spin chains and, more

Il a également été suggéré qu’une exposition aux métaux lourds comme le fer, le mercure, le manganèse, le cuivre, le zinc et le plomb entraînerait une accumulation dans