L’édition anglaise de la revue
Annales. Histoire, Sciences Sociales (2010-2018)
« Les revues et la politique de traduction » Comité de suivi de la Loi numérique
19 juin 2018
Comité de soutien à l’édition scientifique Séminaire Traduction
19 juin 2018
L’origine du projet (2009-2011)
• 2009 : bilan de l’évolution des Annales depuis la fin des années 1990 :
- baisse régulière des abonnements en France et à l’étranger depuis les années 1990, accentuée par la mise en ligne sur Cairn au milieu des années 2000 - Baisse parallèle du chiffre d’affaires de la revue, non compensée par la
croissance des revenus électroniques
Double enjeu : augmenter la diffusion, en particulier à l’étranger et compenser la perte de chiffre d’affaires
• 2010 : conception du projet d’édition anglaise de la revue, première présentation à la Maison Française d’Oxford le 18 mai 2010
http://www.mfo.ac.uk/en/events/publishing-and-disseminating-social-sciences-and -humanities-french-and-british-approaches
• 2011 : signature de la convention avec le CNRS pour cinq ans, financement de 20 000 euros par an pour l’aide à la traduction ; engagement de l’EHESS (un poste d’éditrice) ; soutien de la Fondation Florence Gould et de l’American University of Paris
La stratégie éditoriale
• Présentation du projet dans deux éditoriaux : http://annales.ehess.fr/index.php?186
• Objectifs :
- concevoir un nouveau type de revue, à l’âge numérique et mondialisé des sciences sociales, capable d’être identifiée comme une référence selon le standard international de publication, en particulier en langue anglaise, mais aussi de défendre et d’illustrer une politique éditoriale liée à une communauté scientifique de langue française.
- articuler des normes professionnelles internationales propres à l’espace savant des sciences sociales et un projet intellectuel enraciné dans une tradition qui repose sur une conception originale des rapports entre l’histoire et les sciences sociales, autant d’un point de vue politique qu’épistémologique.
Le lancement de l’édition anglaise (2012)
• Première année de l’édition anglaise en ligne, diffusée sur Cairn et Cairn international
• Equipe éditoriale : Angela Krieger (éditrice), Steve Sawyer (AUP), Nicolas Barreyre (EHESS)
• Constitution d’un pool de collaborateurs réguliers pour la traduction
• Budget de traduction : entre 30 et 35 000 euros par an (20
000 euros CNRS, 10 000 euros EHESS, et le reste financé
par la Fondation Gould)
L’organisation du travail de traduction
• Préparation de la copie en français (ou en anglais) par une éditrice et le directeur de la revue
• Conception du planning par l’éditrice anglaise
• Envoi à un traducteur de notre pool
• Traduction et échange direct entre le traducteur et l’auteur du texte
• Préparation de la copie par l’éditrice anglaise et l’un des deux responsables de l’édition anglaise
• Dernier échange avec l’auteur pour validation de la copie
• Composition des épreuves et triple correction, par l’éditrice et les deux responsables éditoriaux
Il ne s’agit pas de donner à lire des « traductions » mais une version bilingue des Annales dont les textes fassent référence dans les deux langues. L’opération de traduction à proprement parler ne représente que la moitié du temps de travail éditorial, l’édition à proprement parler est aussi importante, ce qui est essentiel dans le dispositif
La première phase (2012-2016)
• Bilan de la diffusion et des recettes peu probant pour 2012-2014 : diffusion par Cairn international limitée
• Arrivée d’une nouvelle éditrice, Chloe Morgan (2014)
• Augmentation de la diffusion et des revenus de
l’édition électronique en anglais avec le passage sur JSTOR et MUSE (2015)
• Augmentation rapide des soumissions en anglais et en
français
L’évolution des soumissions et publications (1)
Année 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015
Articles
examinés par le
comité 60 67 81 83 103 91 93 75
Articles retenus
35 33 35 25 26 29 30 20
Dont articles examinés en langue anglaise
4 2 9 4 12 10 14 20
Dont articles retenus en langue anglaise
2 2 3 1 2 3 6 7
L’évolution des soumissions et publications (2)
• En 2014, 20 % des textes acceptés avaient été soumis en anglais, ce qui est une vraie différence avec la période antérieure (5 % en 2008, 6 % en 2009, 8 % en 2010, 4 % en 2011, 8 % en 2012, 11 % en 2013).
• En 2015, pour la première fois plus de 25 % des articles présentés en comité qui ont été soumis en langue anglaise, contre un peu plus de 6 % de moyenne entre 2008 et 2011, autour de 11 % en 2012 et 2013, 15 % en 2014.
• Leur taux d’acceptation, signe de leur qualité, est supérieur au taux d’acceptation des textes en français ou dans une autre langue, puisque 35% ont été retenus par le comité.
• La tendance générale de 2012 à 2016 : la revue reçoit de plus en plus
d’articles en général, de plus en plus d’articles en anglais, de plus en plus de bons articles en anglais.
Le partenariat avec Cambridge University Press
• Contrat de coédition signé pour cinq ans en juin 2016
• Le travail éditorial est entièrement assuré par la revue, CUP prend tout en charge tous les frais et le travail depuis les fichiers Word stylés jusqu’à la distribution et à la diffusion électronique
• Les tarifs de l’édition française pour la France restent inchangés, de même que sa diffusion électronique
• L’édition anglaise a maintenant une version papier, et l’édition électronique anglaise est exclusive sur Cambridge Core, avec une tarification spécifique
• Le chiffre d’affaires est partagé à 50%-50% entre les deux partenaires
• Le coût de traduction est pris en charge, soustrait du chiffre d’affaires avant partage, ce qui a permis de renoncer à la subvention du CNRS.
Bilan de la première année du partenariat (2017)
• La transformation de l’ensemble de la chaîne de production et de diffusion a été d’une grande complexité et a occasionné un surtravail important
pour l’équipe éditoriale
• Les abonnements remontent légèrement pour la première fois depuis les années 1990
• Le bilan financier est encourageant, car on craignait une baisse liée au changement, mais il reste à confirmer
• La diffusion est en forte amélioration, en particulier par les souscriptions électroniques aux bouquets de CUP, ce qui rend les Annales plus
largement disponibles, en particulier dans le monde anglophone
• Il reste des points de fragilité, en particulier pour la vente et le réabonnement et pour le retard accumulé
Nombre d’abonnés (2008-2017)
20080 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017
500 1000 1500 2000 2500
Nombre d'abonnés
Résultats financiers des Annales (2012-2017) (estimation à consolider)
2012 2013 2014 2015 2016 2017
0 50000 100000 150000 200000 250000
Institutions abonnées aux Annales par pays (2016 et 2017, hors diffusion Cairn)
Japon Chine
Bangladesh Corée du Sud
Australie Russie
RU et Irlande Allemagne
Italie Espagne
France Ethiopie
Kenya Tanzanie
Turquie Ouganda
Rwanda
Canada USA 0
50 100 150 200 250 300
2016 2017
Quelques perspectives sur la traduction en anglais d’une revue scientifique française
• Le coût est important, mais il faut le considérer comme un investissement
• Un modèle économique viable semble possible, en combinant une
accessibilité de l’édition française et une valorisation internationale de l’édition anglaise
• La traduction en anglais d’une revue française peut rencontrer un lectorat (cf. étude d’Yves Gingras), mais cela ne veut pas dire que c’est
reproductible dans tous les cas (les Annales diffusaient déjà 2/3 de leurs abonnements à l’étranger historiquement) : il semble nécessaire d’avoir des stratégies finement différenciées selon les revues
• Une telle opération montre l’intérêt et la nécessité d’une montée en
puissance de l’édition en anglais depuis la France : il faudrait appuyer le développement de postes d’édition dans ce sens (ce qui n’est pas prévu
actuellement). Il s’agit d’une stratégie nationale et publique d’indépendance scientifique.
• Enfin, une telle opération montre le rôle clé des diffuseurs électroniques et la nécessité de collaborer avec des plateformes anglophones disposant du savoir-faire dans le domaine