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II. Un élevage ovin sous un nouveau regard. [ De l'analyse zootechnique à l'analyse du dialogue avec les éleveurs ]

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Études rurales

II. Un élevage ovin sous un nouveau regard. [ De l'analyse zootechnique à l'analyse du dialogue avec les éleveurs ]

De l'analyse zootechnique à l'analyse du dialogue avec les éleveurs

Jacques Lasseur

,

Etienne Landais

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Lasseur Jacques, Landais Etienne. II. Un élevage ovin sous un nouveau regard. [ De l'analyse zootechnique à l'analyse du dialogue avec les éleveurs ]. In: Études rurales, n°131-132, 1993. Droit, politique, espace agraire au Brésil. pp. 117-122;

doi : https://doi.org/10.3406/rural.1993.4777

https://www.persee.fr/doc/rural_0014-2182_1993_num_131_1_4777

Fichier pdf généré le 24/05/2018

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II. UN ELEVAGE OVIN SOUS UN

NOUVEAU REGARD De l'analyse zootechnique à l'analyse du dialogue avec les éleveurs

JACQUES LASSEUR ETIENNE LANDAIS

entretien entre J. Lasseur et Aimé A., éleveur ovin des Préalpes, s'est déroulé par un après-midi ensoleillé du mois de juin 1991, en présence de J.-P. Darré et d'un magnétophone. Aimé A. gardait ses bêtes qui pâturaient dans le secteur au nom évocateur de Brame-Faim.

Cet entretien avait pour nous, zootechniciens, une finalité précise : valider et approfondir certaines des conclusions auxquelles nous étions parvenus à l'issue d'études menées dans d'autres

exploitations d'élevage ovin de la région ayant un rythme de reproduction et un système d'élevage

comparables. Ces études reposaient sur l'analyse zootechnique des performances de reproduction des brebis, à l'échelle du troupeau et à celle des

individus [Lasseur et Landais 1992 ; Vissac 1988].

Elles débouchaient sur des conclusions non conformes au modèle technique véhiculé aussi bien par la Recherche que par les organismes de Développement. Selon ce modèle, l'adoption de trois périodes de mise-bas par an constitue le moyen d'accélérer le rythme de reproduction des animaux pour passer d'un agnelage par brebis et par an à l'objectif préconisé : trois mises-bas tous les deux ans. Or, nos observations

établissaient clairement que dans notre échantillon les

exploitations pratiquant trois périodes de mise-bas par an ne présentaient pas d'accélération sensible du rythme de reproduction. Par ailleurs,

contrairement au modèle, les différentes sessions de reproduction n'avaient pas de fonction particulière (lutte** principale, lutte de rattrapage, introduction des agnelles, etc.), et leur importance respective était très variable selon les années (les résultats enregistrés lors d'une période de mise-bas dépendant largement des arrière-effets des mises-bas précédentes). De ces observations et des échanges que nous avions eus auparavant avec les éleveurs, nous tirions deux conclusions :

a) La logique de fonctionnement de ces systèmes ne répond pas à l'objectif productiviste qui leur est généralement attribué.

b) Les éleveurs cherchent plutôt, à travers la multiplication des sessions de lutte, à régulariser la production du troupeau et à minimiser les risques liés à chaque session de reproduction, en offrant aux animaux de multiples occasions de "rattrapage" et en permettant l'expression d'aptitudes

individuelles variées.

Tout se passe donc comme si la sécurisation du système de production représentait, pour les éleveurs étudiés, un objectif plus important que la recherche d'une productivité zootechnique accrue.

Méthode classique d'intensification, le système

"trois agnelages par an" prend donc au contraire dans ce contexte la signification d'une technique d'élevage extensif.

Il nous fallait, pour aller plus loin, vérifier que ces conclusions étaient recevables par les éleveurs et

1 17

* Zootechniciens, INRA-SAD.

** Pour la définition des termes techniques, consulter le glossaire p. 122.

Études rurales, juillet-décembre 1 993, 1 31 -1 32 : 1 1 7-1 22

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JACQUES LASSEUR ET ETIENNE LANDAIS

118 surtout approfondir notre connaissance - notre compréhension - du modèle d'action qui sous-tend ce type de fonctionnement. Changement de moyen, donc, passage de l'analyse des performances techniques à celle du dialogue avec les éleveurs, et entrée en scène de J.-P. Darré.

L'exploitation des frères A.

Aimé A. travaille avec son frère et associé, Robert.

Leur exploitation se situe en zone de moyenne montagne méditerranéenne, au nord-ouest de Digne, dans les Alpes-de-Haute-Provence. Le territoire de l'exploitation (550 hectares environ) s'étage entre 600 et 1000 mètres d'altitude. Il est exploité quasi exclusivement en vue de la

production d'agneaux de bergerie. Les 600 brebis adultes de race Préalpes du Sud et les agnelles de renouvellement prélèvent l'essentiel de leur alimentation au pâturage de début mai à fin février. Pratiquées tantôt en deux lots (brebis allaitantes d'un côté, brebis taries et agnelles de l'autre), tantôt en un seul troupeau, les sorties au pâturage se font sous la garde d'Aimé A. (et de son frère lorsque le troupeau est scindé en deux). Les circuits quotidiens combinent l'exploitation de parcelles cultivées et de parcours.

La conduite du troupeau

Trois sessions de mise-bas se succèdent au cours de l'année : fin février-début avril, début août-mi- septembre, mi-novembre-fin décembre. Elles résultent de luttes naturelles d'environ 45 jours qui correspondent respectivement à l'introduction des béliers dans le troupeau en fin septembre, fin février et à la mi-juin (schéma 1). Les luttes d'été et d'automne concernent l'ensemble du troupeau.

Pour la lutte de printemps, qui se déroule en même

temps que la session de mise-bas de mars-avril, les béliers ne sont introduits que dans le lot des brebis non suitées. Les effectifs de brebis mettant bas sont très variables d'une saison à l'autre et d'une année sur l'autre.

À partir du début de la période de mise-bas, les brebis suitées sont conduites séparément du reste du troupeau pour une durée de trois mois à trois mois et demi, jusqu'au sevrage de l'ensemble du lot d'agneaux. Durant cette période, le troupeau est donc divisé en deux lots qui ne sont pas conduits de la même manière. Les brebis allaitantes suite à une mise-bas d'août-septembre se voient ainsi réserver les repousses de prairie naturelle ainsi que les chaumes de céréales, auxquels est adjointe une complémentation en bergerie, variable suivant les disponibilités au pâturage, tandis que le reste du troupeau est alimenté exclusivement sur parcours. Après les mises-bas de novembre-décembre, les brebis allaitantes pâturent sur prairie naturelle et sont complé- mentées en bergerie puis, à partir de début janvier, sont alimentées exclusivement en bergerie. Le reste du troupeau est, quant à lui, maintenu à l'extérieur jusqu'à fin février si la saison le permet, les brebis prélevant alors l'essentiel de leur ration sur parcours.

Quelle que soit la période de l'année, les brebis sont rentrées en bergerie tous les soirs. En été, la chôme est aussi effectuée en bergerie.

Les bâtiments d'élevage et le territoire II existe sur le territoire de l'exploitation deux bergeries qui depuis l'accroissement récent de la taille du troupeau ne peuvent chacune que difficilement abriter l'ensemble des animaux, en particulier lorsqu'un grand nombre de brebis agnèlent à la même période, puis lorsqu'un lot d'agneaux important est en phase d'engraissement. Le troupeau étant

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RAISONS ET PRATIQUES

Luttes

i i i i l i i Mises-bas

Janv. Fév. Mars Avril Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov. Dec. Janv. Fév. Mars Avril

alors divisé en deux lots, ainsi qu'il a été expliqué plus haut, il faut affecter l'une ou l'autre des bergeries à chacun des lots. Ce choix se fait en fonction : a) des caractéristiques propres à chaque bergerie, et surtout de sa localisation : proximité de l'habitation, des locaux de stockage et des secteurs de pâturage ; b) du type de conduite programmé pour chacun des deux lots ;

c) du calendrier fourrager. Le choix de la bergerie conduit en effet à attribuer préférentiellement tel secteur de pâturage à telle saison à telle catégorie d'animaux, comme nous le verrons plus loin.

Le territoire cultivé

Le territoire cultivé couvre une superficie de 50 hectares dont la majeure partie est en propriété. Il est très morcelé. On peut distinguer, à partir de leur conduite actuelle, 55 parcelles différentes.

Principalement situées en fond de vallée, ces parcelles sont dans l'ensemble accessibles au troupeau depuis l'une ou l'autre des bergeries. Neuf hectares de prairies permanentes partiellement irrigables (au gré du débit de la source approvisionnant un long canal vétusté) constituent la partie invariante de la sole. La première pousse est fauchée ; les repousses suivantes sont pâturées par les brebis allaitantes en

août-septembre, puis en novembre-décembre. Sur le reste des parcelles de culture se succèdent : - des prairies artificielles de sainfoin et luzerne (20 ha en 1990). La première exploitation est en principe destinée à la constitution des stocks de foin pour la période hivernale. La repousse de fin de printemps est fauchée ou pâturée. La dernière exploitation de la campagne se fait par pâturage en novembre et décembre ;

- des cultures annuelles (14 ha en 1990),

principalement de l'orge et du triticale, récoltées en grain et pailles, et destinées à l'alimentation des brebis en bergerie. Les chaumes sont pâturés en fin d'été.

Une association vesce-avoine implantée sur une grande parcelle a assuré «n 1991 et 1992 une part importante du pâturage de printemps. C'est sur cette parcelle qu'a eu lieu, en juin 1991, l'entretien présenté ci-après ;

- des jachères (7 ha en 1990), parcelles

généralement proches des bergeries, qui du fait des pointes de travail de l'automne et de l'intérêt pour le pâturage à cette saison (en chaumes) n'ont pu être labourées et ensemencées avant l'hiver. Il n'est pas aisé, à ce sujet, de faire la part du souhaité et du subi, du conjoncturel (un contexte climatique défavorable à l'automne) et du structurel

119 Schéma 1 :

succession des sessions de lutte et de mise-bas au cours de l'année.

La mise-bas d'août-septembre est la mise-bas

"d'été" pour Aimé A., "d'automne"

pourJ. Lasseur.

De même, la mise- bas de novembre- décembre est dite

"d'automne" par A. A. et "d'hiver"

par J. L, ce qui ne facilite pas le dialogue !

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JACQUES LASSEUR ET ETIENNE LANDAIS

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Le territoire de l'exploitation des frères A.

St Philippe et Brame-Faim

Quartier des Graniers Quartier de Garce

|;;:;::;;| Parcours BB Cultures

Bergerie

"Aire d'influence" de la bergerie 500m

(un équipement limitant pour le labour). Ces jachères sont surtout pâturées au printemps.

Les parcours

terrains de parcours qui, par définition, s'opposent aux surfaces précédentes, puisqu'ils ne font l'objet d'aucune intervention culturale. Quelque 500 hectares de landes, de taillis clair de chênes et de pe- L'essentiel de la surface exploitée est constitué de louses sont, bon an mal an, parcourus par le

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RAISONS ET PRATIQUES

troupeau au cours de l'année. Des limites foncières floues, la précarité d'accords oraux de "vente d'herbe" (à validité annuelle), des intensités d'utilisation très inégales viennent néanmoins

relativiser ce chiffre. Aimé A. découpe ce territoire vaste et relativement hétérogène en "secteurs", grandes unités fonctionnelles, à partir de critères fondés sur

les périodes d'utilisation, elles-mêmes liées à l'exposition et à la localisation des différentes unités de territoire par rapport aux bergeries :

- les secteurs de Saint-Philippe et de Brame-Faim, situés entre 600 et 800 mètres d'altitude, dont la surface peut être estimée à 150 hectares, sont utilisés dès le printemps et jusqu'à fin juillet à partir de la bergerie des Graniers. Leur exposition sud-est et sud- ouest interdit une utilisation estivale. Ils sont exploités en association avec des parcelles fourragères cultivées proches de cette bergerie (repas du matin sur parcours, repas de l'après-midi sur prairie) ; - le secteur de Gorge-de-Brun (700 à 1000 m d'altitude), d'une surface de 40 hectares, est utilisé en

août et septembre. En raison de son exposition à l'est, Aimé A. y réalise le circuit de pâturage de l'après-midi. Comme les suivants, ce secteur est utilisé depuis la bergerie de Garce ;

- le secteur de Saint-Jean (70 ha entre 700 et 1000 m), est lui aussi utilisé en août et septembre.

Du fait de son exposition ouest, il est exploité lors du circuit du matin. La partie de ce quartier la plus éloignée de la bergerie est pâturée en janvier- février ;

- le secteur de Bezaudun (80 ha) est situé à la même altitude que les deux précédents. Du fait de son éloignement des bergeries, il ne peut être utilisé que lorsque le pâturage est réalisé en une seule sortie journalière. Il est donc pâturé en octobre- novembre, époque à laquelle le pâturage est possible en continu, même aux heures les plus chaudes de la journée ;

- les secteurs de L'Amourié et Piégut (160 ha entre 600 et 900 m), d'exposition sud, sont utilisés en décembre-j an vier .

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JACQUES LASSEUR ET ETIENNE LANDAIS

122 Glossaire

Agneau de bergerie : il s'agit d'un type d'agneau de boucherie qui, contrairement à l'agneau broutard, sera alimenté exclusivement à l'intérieur, à partir du lait maternel et d'aliment distribué. Ce type d'agneau à

croissance rapide est destiné à être abattu à un âge compris entre trois et cinq mois.

Agnelle : jeune femelle conservée pour le renouvellement du troupeau.

Allotement : pratique consistant à répartir les animaux du troupeau en plusieurs lots qui seront conduits séparément.

Chaumes : résidus de céréales qui restent sur le champ après la moisson.

Chôme : période de repos et de rumination pour le troupeau à la mi-journée, lors des chaleurs estivales. La

chôme dure, selon la température et l'ensoleillement, entre trois et cinq heures en moyenne.

Complémentation : distribution en bergerie d'aliments destinés à remédier aux insuffisances quantitatives et/ou qualitatives des fourrages prélevés par les animaux au pâturage.

Lutte : accouplement. Les périodes de lutte sont les périodes durant lesquelles les béliers sont laissés dans le troupeau de femelles.

Mise à l'herbe : premières sorties des animaux après une longue période de claustration en bergerie. Cette période fait l'objet de soins particuliers pour assurer une bonne

transition entre deux environnements contrastés et deux régimes alimentaires très différents.

Parcours : pâturages spontanés qui ne font l'objet d'aucune intervention agronomique. Les seules interventions pastorales sur la végétation des parcours sont le passage des troupeaux (prélèvement-piétinement-fertilisation des zones de repos) et éventuellement le feu. Cependant, les

interventions anthropiques peuvent prendre d'autres formes, et notamment celle de l'exploitation forestière périodique.

Prairie artificielle : parcelle semée d'une plante fourragère destinée à la pâture ou à la fauche. Dans le cas

présent, il s'agit exclusivement de légumineuses, sainfoin ou luzerne.

Prolifïcité : nombre moyen de produits mis bas par portée. Dans les races ovines concernées par cette étude, les portées ne comptent qu'un ou deux agneaux. La proli- ficité est l'une des composantes de la productivité des troupeaux.

Regain : repousse de l'herbe dans les prairies artificielles après une ou plusieurs exploitations (fauche ou passage du troupeau). Par extension : foin issu de cette repousse. La qualité de ce foin est réputée.

Renouvellement : remplacement progressif des femelles âgées par des jeunes pour entretenir le potentiel de reproduction du troupeau. Par extension : ensemble des jeunes femelles conservées pour remplacer les brebis

mortes ou réformées durant l'année.

Triticale : céréale hybride entre le blé et le seigle.

Références

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