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M. Poincaré et l’affaire Dreyfus

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Academic year: 2022

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M. Poincaré et l’affaire Dreyfus

Niveau : Terminale générale, spécialité ou Maths complémentaires. Problème ouvert.

Lien avec le programme : non dévoilé.

Lien avec Les maths au quotidien : Société.

L’affaire Dreyfus est un conflit social et politique majeur de la Troisième République survenu à la fin du XIXe siècle, autour de l’accusation de trahison faite au capitaine Alfred Dreyfus, qui sera finalement innocenté.

Elle a bouleversé la société française pendant douze ans, de 1894 à 1906. Emile Zola y pris notamment parti avec son tonitruant J’accuse publié dans le journal l’Aurore.

On sait moins quelle importance y occupèrent les mathématiques.

Il y avait au cœur de l’« Affaire » un bordereau, une lettre non signée proposant de vendre à l’Allemagne des documents militaires confidentiels. Et le capitaine Dreyfus possédait une écriture qui ressemblait beaucoup à celle sur le document…

Quoique non expert en la matière, le criminologue Alphonse Bertillon entreprit de démontrer graphologiquement que Dreyfus était bien l’auteur du bordereau et que celui-ci cachait un code secret.

Il aboutit à un « grand nombre de coïncidences ». « Bien au-delà, estima-t-il, de ce que le calcul des probabilités prédisait. »

Quelques-uns des plus grands mathématiciens du moment, dont Paul Painlevé, Gaston Darboux et Henri Poincaré s’intéressèrent activement à l’affaire.

Voici ci-dessous un extrait de la lettre du célèbre mathématicien Henri Poincaré, adressée à Paul Painlevé lors du procès en révision de 1899, dans lequel il remet en cause le calcul de probabilité initial de Bertillon.

« Mon cher ami,

Vous me demandez mon opinion sur le système Bertillon.

Sur le fond de l’affaire, bien entendu, je me récuse. Je n’ai pas de lumières et je ne puis que m’en rapporter a ceux qui en ont plus que moi.

Je ne suis pas non plus graphologue, et je n’ai pas le temps de vérifier les mesures.

Maintenant, si vous voulez seulement savoir si, dans les raisonnements où M. Bertillon applique le calcul des probabilités, cette application est correcte, je puis vous donner mon avis.

Prenons le premier de ces raisonnements, le plus compréhensible de tous.

Sur 13 mots redoublés correspondant à 26 coïncidences possibles, l’auteur constate 4 coïncidences réalisées.

Evaluant à 0,2 la probabilité d’une coïncidence isolée, il conclut que celle de la réunion de 4 coïncidences est de 0,0016.

C’est faux.

0,0016 c’est la probabilité pour qu’il y ait 4 coïncidences sur 4. Celle pour qu’il y en ait 4 sur 26 est 400 fois plus grande, soit 0,7.

Cette erreur colossale rend suspect tout ce qui suit. [...]

Quand M. Poincaré parle de « 400 fois plus grande, soit 0,7 », expliquer pourquoi il a dû faire ses calculs « à la main » et a donné des approximations par défaut. On pourra en passant expliquer pourquoi la partie de phrase « Celle pour qu’il y en ait 4 sur 26 » pourrait être ambigüe.

Point info : lors du dernier procès de 1904, Poincaré (aidés de Darboux et Appel) va rédiger un rapport indiquant notamment que dans l’analyse du bordereau par Bertillon, des techniques mathématiques sont appliquées de manière abusive et erronée. Le rapport commence d’ailleurs par un petit cours sur la façon correcte dont on peut utiliser les probabilités conditionnelles (notamment la formule de Bayes, que l’on applique sans la nommer en terminale…), contrairement à l’utilisation qu’en fait Bertillon.

Poincaré indique également que l’utilisation du calcul des probabilités dans ce genre de considération ne peut être légitime. En effet, tout raisonnement probabiliste nécessite l’introduction de probabilités a priori. Or celles-ci relèvent nécessairement d’éléments moraux qui ne peuvent en aucun cas être modélisés par un calcul scientifique.

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