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La source thermale de Saillon et les voûtes de la Salentze
PITTARD, Jean-Jacques, PETIT-PIERRE, Jean-L.
PITTARD, Jean-Jacques, PETIT-PIERRE, Jean-L. La source thermale de Saillon et les voûtes de la Salentze. Revue polytechnique , 1940, vol. 42, p. 3569-3571
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. LA
SOURCE THERMALE. DE SA.ILLON
ET LES VOUTES DE LA SALENTZE
PAR
Jean-]. PITTARD,
or
ès sciences ETJean-L. PETIT-PIERRE,
Président G. J. S.S.S.
J ':xt rait du Bulletin de la Société Sitisse de Spéléologie du 25 octobre 1940
GENÈVE
lMl'RIMERIE DE LA TRIBUNE DE GENtVE Rue du Stand, 42
1940
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LA SOURCE THERMALE DE SlULLON ET LES VOUTES DE LA SALENTZE
~La source thermale de Saillon se trouve dans les gorges de la Salentze (gorges de Saillon).
La Salentze est un torrent qui prend sa source dans le massif du Muveran. Cette rivière entre dans une faille étroite qu'elle descend au moyen de plu- sieurs grandes cascades. Ces gorges, presque inacces- sibles, sont bien connues par les exploits du célèbre faux-monnayeur valaisan Farinet qui y trouva la mort, abattu par les gendarmes qui le surveillaient du haut des parois voisines 1 .
A la sortie des gorges, sur la rive droite du torrent, s'ouvrent deux petites galeries, probablement an- ciennes exploitations d'ardoises. La galerie n~ r est
1 cc Ces gorges ont eu une cert<d11.<.l célébri té à. l'époq ue des jeux de Saxon, où elles étaient pour.vues cle galeries qui permettaient de les visiter sans da.nger. Elles eure11t un regain d'actualité en r88o, année où fut découvert le repaire du fanx-monnaye.ur. Cel ui-ci, traqué par .les gendarmes, s'était Téfugié clans la J,'aroi de i·0cher opposée à sa grotte. et à l'abri d'une saillie dominant l'immense précipice. Il fut assiégé pendant trois jours par la gen- dannerie qui cribla de balles toutes les anfractuosités du roc, toua les buissons et toutes les mottes de terre sans po\1voir atteind_re le faux-moru1a.ye ur. En désesp<>ir de ca use, le brigadier r1ui commanda.il la troupe simula une levée de siège à la ~urnbée du jour, mais, au cou r1:1 de Ja ,nuit, les postes de snrveillani.:e étaient réoccupës.
Farinet ne se croyant plus surveill,é, quitta son refuge le lendemain matin el. crut pouvoir s'enfuir par le bisse de Salllon. Il y fol reçu, cli l-on. par la balle d'un gen- danne et pi:écipité da11s la gorge. » (C. Desfayes, Le Cinquantenaire de la Fédération des Fanfares villageoises du Centre. Imprimerie J. Pillet, Martigny, 1932.)
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située à 200 m. en amont du Moulin Roduit (anciens moulins de Saillon) et à 4 m. au-dessus de la rivière.
On peut y accéder par uu sentier qui suit la rive gauche de la Salentze, qu'il faut alors franchir en sautant. Cette excavation est longue de 4 m., large de 2 m. et haute de l m. 60. Quelques suintements s'écoulent par les plans de schistosité et laissent des dépôts tufeux. La galerie n° 2 s'ouvre à 120 m. en amont de la première, à 3 m. au-dessus du cours d'eau. Ses dimensions sont un peu plus petites (lon- gueur 4 m., largeur l m. 20, hauteur l m. 50). Le fond est occupé par une ccgouille» alimentée par des suintements. On peut y remarquer également la formation de· tufs.
En aval des moulins de Saillon, la Salentze entre dans la plaine du Rhône où elle déborde parfois, recouvrant des cultures, notamment en automne .1939.
SoLLr<• therm.:ile de la ~alentse
lt po;.,,tiUl (,,.J;,,., 1· cntrr'r _
C.oup~ ~c:ne'matiq1A.e de la Grotte
La source thermale sourd du rocher à 500 m. en amont du Moulin Roduit, dans la partie inférieure des gorges de Saillon, sur la rive gauche de la rivière.
Elle sort d'un massif de schistes par une petite grotte s'ouvrant dans un gros amas de tuf déposé par l'eau fortement minéralisée. Les roches environnantes appartiennent au Jurassique (Lias, Dogger). Son emplacement est au contact de schistes argileux
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aaléniens et de roches du Bp,joci~n inférieur (calcaires plaq uetés).
Les tufs obstruent une partie des gorges, rejoignent les deux rives, tandis que la Salentze, formant une succession de grandes cascades, s'engouffre par dessous.
La petite grotte est constituée par un boyau tor- tueux et étroit, de dimensions très variables. L'eau
Grotte G• (d .!:>01<m the<màlc clc l• S•l•nhe
Pt an !>~hemati1pcr
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en vient par plusieurs évents ; elle est très transpa- rente, tiède et présente un goût légèrement styptique.
Elle laisse un abondant dépôt ocreux sur les rochers où elle ruisselle. Au même niveau, c'est-à-dire à 15 m. au-dessus du torrent, mais sur la rive droite, nous voyons une autre source ferrugineuse, bien moins importante, sourdant d'un banc 'de schistes, L'eau des deux sources se réunit puis tombe en cas- cade dans la Salentze en passant par une ouverture naturelle pratiquée dans le tuf.
Au-dessous de ces sources, dans la gorge, la Sa- lentze coule dans une vaste grotte. En aval de cette grotte, la rivière passe sous une grande barme de tuf longue d'une vingtaine de mètres, à la base de la- quelle apparaît un conglomérat constitué par d'an- ciennes alluvions du cours d'eau. En amont, faisant
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suite à cette barme, le m;;i.ssif de tuf recouvre entière- ment la rivière, formant ainsi une haute et vaste grotte. C'est au plafond de celle-ci, par une sorte de lucarne, que s'écoule l'eau thermale entourée de vapeurs.
Photo J.-J. Pillard Grotte de la source thermale. Remarquer la protubérance de tuf fixée sur les schistes; l'eau, passant par les plans de stratification de ces derniers, vient du fond de la grotte.
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A l'extrémité supérieure de ce tunnel, long d'une trentaine de 'mètres, large de 3 à 5 m., haut de 5 à
IO m., on voit la Salentze se précipiter, s'élançant d'un replat par une cascade de IO mètres de hauteur pour retomber en mugissant dans une profonde vasque.
La source thermale était connue depuis longtemps par les habitants du pays qui s'en servaient comme eau d'alimentation. A ce propos, nous extrayons ce
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qui suit d'un manuscrit inédit de M. ] oseph Roduit, de Saillon : cc Le village n'était alimenté que par. une source thermale de 28° se trouvant aux limites de Saillon-Leytron. Les habitants durent utiliser cette source pour leur consommation d'eau potable au
Photo J.-J. Pïtlaid Le bassin de la source thermale de Seillon. L'eau, d'une limpidité parfaite, passe par-dessus, le déversoir et se jette
dans la grotte de la Salentze.
moyen d'une rigole à ciel ouvert traversant le vigno- ble, à partir des cascades rochèuses des gorges de la Salentze, rive droite, pour arriver vers les Bour- gneaux ,ari levant du village. En hiver, l'eau man~
quait à cause du gel. Afin de subvenir aux besoins des .habitants, on détournait l'eau du torrent au pied du Mont, au pont des Moeille. Là, chaque ménage venait matin et soir se pourvoir d'eau. En 1848, M. le conseiller d'Etat Barman eut l'heureuse idée de faire
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construire un acqueduc dans les gorges pour capter l'eau du torrent, nécessaire à la consommation et à l'irrigation. Les travaux, commencés en 1848, ont été terminés en 1853. Le coût a été d'environ 500 louis d'or. Aujourd'hui tous les ménages ont l'eau courante à domicile. 2n
I'lwto J.-J. I'illard Intérieur de la grotte de la Salentze. L'eau thermale descend par une sorte de lucarne naturelle ouverte dans le massif de tuf.
L'eau passe maintenant dans un tunnel, mais on peut suivre l'ancien bisse suspendu à plus de 150 m.
au-dessus de la Salentze, passage périlleux et des plus
vertigineux. '
La source thermale a une température de 24°.
La température de la petite source est de 21°. Cette
2 Roduit, Joseph: Notes sur Saillon (Saillon du JXe au XX0 siècle). Manuscrit inédit. Collection Raphaël Roduit, à Saillon.
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différence s'explique aisément, car cette dernière étant bien moins abondante se refroidit naturelle- ment plus facilement.
Les mesures ont été faites le 30 mars ·r940. En voici le résultat :
Etat du temps : quelques chutes de neige.
Température de l'air: - 0,5°~
» de l'air près des sources : 2,5°.
Température de l'eau de la Salentze: 4°.
de l'eau de la source principale: 23,7°.
de l'eau de la petite source: 20,8°.
de l'air à l'entrée de la grotte: 7°.
La minéralisation est assez abondante en bicar- bonate et en sulfate de chaux. On trouve également une proportion assez importante de magnésium.
Voici une analyse de cette eau exécutée à Genève en été 1940 :
Couleur.
Odeur . Saveur .
Résidu sec à roo0 Résidu sec calciné Oxydabilité.
Ammoniaque Nitrites . . Nitrates ..
Sulfates (en S03) Chlorures (en C1) Silice. . . .
Oxydes de fer et d'alumine Oxyde de calcium. . . Oxyde de mognésium . Fer . . . . Degré d'alcalinité . Dureté totale . . .
limpide normale
légèrement styptique 988 mg. par litre 880 mg.
3,3 mg.
o mg.
o mg. )) o mg. )) 439 mg.
4 mg. )) 3 mg.
3 mg.
292 mg. )) 71 mg.
présence (non dosé) 14
7r.
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L'absence de nitrites, de nitrates et d'ammoniaque dans une eau aussi riche en sels dissous en fait res- sortir l'intérêt.
L'importante minéralisation de cette eau s'explique en partie par la température élevée qu'elle a acquise
Intérieur de l'une des voûtes de tuf de la Salentze. La base de cette voûte est constituée par un conglomérat. La photo
est prise non loin de l'entrée de la grotte, côté aval.
en profondeur : elle a pu dissoudre ainsi en grande quantité des carbonates et sulfates de chaux et de magnésie 1. Df.tP.nclnf. P.t rP.frnirliP. ;:i11 momP.nt rlP. son émergence, elle abandonne une partie de ses éléments qui se déposent abondamment, augmentant de la sorte constamment les dépôts de tufs. Cette dernière roche est commune dans le pays: non loin de l'entrée
1 La meilleure dissolution du sulfate de calcium dans l'eau pure se fait à la température de 35° - A 0°, mille parties d'eau pure dissolvent 2,05 parties de sulfate de calcium; à 35°, z,54 parties; à 100°, z parties.
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des gorges on peut voir les restes d'un ancien captage d'eau pour l'alimentation du village de Leytron, captage auquel on a dû vite renoncer à cause de l'obstruction . rapide des conduites par les divers sels de chaux.
Ce sont toutes ces eaux richement minéralisées, surtout celles des sources thermales, qui ont contri-
Grotte de la source thermale. Le t.ul s'est dépost\ entre les plans de stratlflcatlon de la roche. L'entrée prlnclpale de la
grotte est visible dans la partie supérieure de ln photo.
bué à l'édification des grosses protubérances de tuf sous lesquelles coule la Salentze. Ces dépôts se sont formés en effet sur les deux rives de la gorge, s'épais- sissant peu à peu, finissant par se rejoindre. Dans la partie inférieure, le torrent lavant continuellement ses rives a empêché la formation de ces amas. Ceux-ci ont alors constitué une voûte, une sorte de tunnel, au-dessus du cours d'eau.
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