Irréversibilité, étude qualitative Regroupement 2 Page 1 sur 2
Thermodynamique, T09.R2 © Isa 2019
« Deux compartiments »
Ce regroupement rassemble les analyses faites sur les déclinaisons de l’expérience que nous nommons « Deux compartiments », déjà vues dans le chapitre T09, Irréversibilité, étude qualitative, § I.A.2 & II.A.3.
I. Description de l’expérience initiale
Un cylindre horizontal est partagé en deux par une cloison verticale mobile, initialement immobilisée par un loquet escamotable. Voir la figure 1 ci-dessous. Le compartiment de gauche est rempli d’un gaz comprimé ; celui de droite d’un gaz sous plus faible pression1. Les deux gaz contenus dans le cylindre, celui-ci et sa cloison forment un système isolé et en équilibre. Lorsqu’on escamote le loquet, l’équilibre du système est rompu. Ce nouvel état de déséquilibre ne peut persister. La cloison se déplace et les gaz subissent une évolution brusque, spontanée, irréversible qui les conduit à un état final d’équilibre thermodynamique. La non-uniformité de la pression est la cause de cette compression-détente, celle-ci cessant lorsque les pressions se sont égalisées et stabilisées.
Pour nous convaincre, si besoin était, de l’irréversibilité de cette transformation, filmons la scène jusqu’à l’égalisation des pressions et passons ensuite le film à l’envers. Personne ne croit à la vraisemblance du scénario.
Les gaz ne peuvent pas l’un se comprimer, l’autre se détendre spontanément, reconduisant la cloison dans sa position initiale. Cette évolution est bien irréversible.
T09.R2 Figure 1 : Irréversibilité de la compression-détente dans « Deux compartiments ».
II. Liste des causes d’irréversibilité de cette transformation
Première cause : Pour tout système isolé soumis uniquement à des forces de pression, la non-uniformité de la pression en son sein est une cause d’irréversibilité.
Deuxième cause : L’existence de frottements conduit toujours à un échauffement des portions des systèmes en contact. Or la réversibilité imposerait que les frottements conduisent à un échauffement dans un sens et à un refroidissement dans l’autre. Donc dès que des frottements apparaissent il ne peut y avoir réversibilité.
Troisième cause : L’existence de fuites thermiques. En effet, le sens des fuites est le même pour la transformation inverse que pour la transformation initiale. Supposons, par exemple, qu’elles ont lieu à l’aller du gaz, alors de température plus élevée, vers l’extérieur alors de température moins élevée. Au retour, le gaz sera encore de température plus élevée et l’extérieur de température moins élevée.
Quatrième cause : L’existence de défauts d’étanchéité. Car le sens des fuites de matière est le même pour la transformation inverse que pour la transformation initiale. Supposons, par exemple, qu’elles ont lieu à l’aller du compartiment de pression plus élevée, vers l’extérieur ainsi que vers l’autre compartiment. Alors au retour, le premier compartiment sera encore de pression plus élevée que celle de l’extérieur et du deuxième compartiment.
III. Comment approcher la réversibilité ?
Nous allons examiner ces quatre causes pour chercher à les réduire, en commençant par la quatrième.
1. Pour lutter contre les fuites de matière, il faut s’assurer que le cylindre est bien étanche ainsi que la cloison. Les parois ne doivent pas être poreuses et les joints doivent être de bonne qualité.
2. Pour lutter contre les fuites thermiques, il faut s’assurer que les parois sont adaptées à la transformation choisie.
Par exemple pour une transformation adiabatique il faut que l’ensemble des parois soit réalisé dans un isolant de bonne qualité. Pour une transformation isotherme il faut que le contact entre le cylindre et la source thermique soit
1 Dans ces cours les nuances de vert symbolisent conventionnellement les différences de pression.
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réalisé dans un matériau bon conducteur thermique ainsi que la cloison ; Ainsi on contrôle les échanges thermiques et on évite les variations indésirables de température.
3. En principe, pour lutter contre les frottements on peut, en premier lieu, amoindrir les frottements en passant des frottements solides aux frottements fluides car ces derniers sont très inférieurs aux frottements solides. C’est le cas des dispositifs à coussin d’air2. On peut aussi réaliser ce passage en lubrifiant les contacts. Ensuite il est nécessaire d’opérer à vitesse lente car les frottements fluides s’annulent avec la vitesse et par conséquent plus on réduit la vitesse, plus l’échauffement devient négligeable et plus on s’approche de la réversibilité. Lorsque nous examinons cette évolution thermodynamique, nous constatons que certes nous pouvons lubrifier les contacts pour réduire les frottements mais que l’évolution ne peut être ralentie sans modifier profondément le dispositif. En effet un expérimentateur devrait contrôler le mouvement de la cloison. Donc il ne s’agirait plus d’une transformation spontanée3 interne au système mais d’une transformation imposée par le milieu extérieur. En d’autres termes la transformation serait modifiée, dénaturée, en une détente semblable à celle de l’exemple « Corps de pompe ».
Cette transformation ne peut pas être conduite lentement4sans la dénaturer. Il est donc impossible d’approcher la réversibilité alors même qu’on peut réduire les frottements.
2 Dans la vie courante, les aéroglisseurs qui effectuent les liaisons Corse-continent ou Angleterre-continent en sont un exemple frappant car les frottements entre une coque de navire et l’air sont très inférieurs aux frottements de la même coque sur l’eau.
Au laboratoire, les dispositifs de table à coussin d’air ou de mobile autoporteur utilisent le même fait : les frottements entre un mobile et la couche d’air sont très inférieurs à ceux entre le mobile et la table. La couche d’air est produite par la table dans le premier cas et par le mobile dans le second.
3 Pour approfondir cette propriété, voir T09.R5.
4 Pour approfondir cette propriété, voir T09, § II.D.5 & T09.C4.