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Parus ou à paraître Nous avons lu

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Nous avons lu et testé

Parus ou à paraître

Nous avons lu

par Jean DERVIEUX Lycée Blaise Pascal - 63000 Clermont-Ferrand lebup.nous_avons_lu@udppc.asso.fr

Une histoire de flou

Miroirs, trous noirs et autres mondes

Pierre LÉNA

Éditeur : Le Pommier Collection : Impromptus Parution : 2019 Nombre de pages : 392 Prix : 20 €

ISSN/ISBN : 978.2.7465.1805.6

Public visé : Tout public intéressé par l’astronomie

Un jeu de mots se cache dans le titre de ce livre pétri d’huma- nité, car l’aventure scientifique et collective qu’il relate – celle de la lutte contre le flou dans les détails des images télescopiques, un combat où l’auteur joue un des rôles majeurs – paraissait à beaucoup au départ être une histoire de fou, dispendieuse et vouée à l’échec. En effet, les causes de cette dégradation des images semblaient une fatalité : il y a d’une part l’inéluctable diffraction par le bord du miroir primaire du télescope de diamètre D (qui impose une limite angulaire intrinsèque

fd

à la perception des détails, valant , 0 1

m pour D = 2,4 m et une longueur d’onde

de 1 µm) ; et d’autre part la traversée, par la lumière, de l’atmosphère inhomogène et turbulente (« la plus mauvaise partie de l’instrument », disait Jean Texereau – célèbre opticien de l’Observatoire de Paris) qui fait éclater l’image instantanée d’un point en une multitude de taches de dimensions angulaires voisines de

fd

(les tavelures, ou

speckle pour les Anglo-saxons) s’agitant frénétiquement au rythme de la turbulence

avec un temps caractéristique de quelques millisecondes et formant un ensemble de dimension angulaire (le seeing),

fs,

1

m dans les conditions ordinaires. Mais puisque

l’auteur, l’astrophysicien Pierre Léna, professeur émérite à l’Observatoire de Paris et à l’Université Paris-Diderot (devenue depuis l’Université de Paris), est aussi membre de l’Académie des sciences et de l’Académie pontificale des sciences depuis 1991 et 2001 respectivement, et ardent promoteur d’une Europe de la Science, on devine que la saga dans laquelle s’inscrit son action scientifique a été couronnée de succès.

Pierre Léna s’intéressait initialement à l’imagerie infrarouge à peine naissante,

qui plus tard permettra de voir au travers des nuages de poussière cachant la naissance

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des étoiles ainsi que le centre de notre Galaxie ; jeune chercheur en 1966, obnubilé par l’image ondoyante du limbe solaire sur laquelle il faisait ses premières armes dans l’infrarouge, il s’interroge sur les moyens de la stabiliser et d’améliorer la qualité des observations, afin d’obtenir ce qu’on appellera dès 1981 la « haute résolution angu- laire » – un sujet qui mobilisera ses forces à partir de 1978. Car entretemps, les deux piliers de cette haute résolution ont commencé à prendre corps : l’optique adaptative qui, par déformation rapide et asservie d’un miroir, contrecarre les effets néfastes de la turbulence atmosphérique sur l’imagerie ; et l’interférométrie, qui permet de dépas- ser la limitation

fd

= 1 2 ,

m

/D due à D, en la remplaçant par

fi

=

m

/B liée à la base

B de l’interféromètre, pouvant être très grande devant D. Dès 1982, avec l’astronome

François Roddier, Pierre Léna comprend que des interféromètres stellaires couplant des télescopes de plusieurs mètres de diamètre ne donneront, contrairement à ceux couplant des télescopes de quelques décimètres, des résultats exploitables que s’ils sont dotés d’une optique adaptative.

Chacun de ces piliers a droit à un chapitre entier, en commençant par l’optique adaptative dont la réalisation, initiée avec le prototype ComeOn de 1989, n’a cessé de voir ses performances s’accroître grâce à des systèmes de plus en plus sophistiqués : par exemple, pour le Very Large Telescope de l’ESO sur le Cerro Paranal (Chili), il y a eu d’abord NaCo à partir de l’an 2001, puis SAXO /ExAO intégré au spectropolarimètre SPHÈRE (2014), et AOF / GALACSI intégré à l’instrument MUSE (2017). Cela illustre merveilleusement une idée profonde exprimée par Antoine Labeyrie dès 1970 : la turbulence ne fait que compliquer la vision des détails dans l’image, mais elle ne fait pas disparaître toute l’information aux hautes fréquences spatiales, lorsqu’on « fige » l’image vue au travers de l’atmosphère en quelques millièmes de seconde.

Second pilier : l’interférométrie astronomique, dont l’idée remonte à Hippolyte Fizeau en 1851 – qui ne la rend publique qu’en 1868. Elle donne un premier résultat positif en 1891 avec Albert Michelson, puis celui-ci fournit ainsi en 1920 la première mesure du diamètre angulaire d’une étoile, Bételgeuse ( , 0 047

m

) ; mais cette technique sommeille à partir de 1938, jusqu’à sa réactivation d’abord en radioastronomie avec la

« synthèse d’ouverture » dans les années 1950 ; et ensuite dans le domaine optique en 1970 en URSS, puis en 1974 en France avec Antoine Labeyrie qui ouvre de nouvelles voies permettant de dépasser les limites techniques des mesures interférométriques des années 1920. Quant à l’obtention de vraies images, nécessitant un interféromètre à bases multiples non identiques, elle n’est devenue effective qu’en 1996 (avec l’étoile multiple Capella) puis 1997 (avec le disque de Bételgeuse).

Depuis les idées foisonnent, et se matérialisent au sein de l’ESO – organisme fondé

en 1962 et auquel participe Pierre Léna à partir de 1977. En témoin privilégié de ce

développement, il nous raconte une histoire humaine haletante aux multiples interve-

nants (astronomes chevronnés, opticiens talentueux, industriels audacieux, techniciens

et ingénieurs subtils, administrateurs compétents, politiques qui font des efforts pour

comprendre les besoins financiers des astronomes), avec ses débats technologiques ou

scientifiques, ses projets multiples, ses choix parfois déchirants, ses traversées du désert,

ses changements d’équipes, ses avancées progressives et son magnifique aboutissement :

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le VLTI. C’est un extraordinaire interféromètre à bases multiples (200 m maximum), partiellement opérationnel depuis 2001, pleinement validé depuis 2017, avec : huit télescopes, dont quatre géants de 8,2 m de diamètre constituant le VLT ; des systèmes d’optique adaptative (MACAO pour les quatre géants dès 2003, NAOMI en 2018 pour les quatre autres) ; un instrument de mesure de franges en optique intégrée ou à fibres (VINCI en 2001, AMBER et MIDI en 2007, PIONIER en 2010, GRAVITY en 2015, MATISSE en 2018 dans l’infrarouge moyen). Le VLTI a fourni sa première vraie image en 2008. En utilisant la méthode dite du « double champ », qui permet de détecter la position relative des franges avec une précision de 0,003 interfrange, on arrive à mesurer des positions angulaires relatives avec une résolution trois cents fois meilleure que /B

m

, donc une précision d’un cent-millième de seconde d’arc pour

m

= 2 µm et B = 130 m !

C’est justement l’ordre de grandeur du rayon angulaire de l’horizon du trou noir central de notre Galaxie. Un chapitre passionnant est consacré à l’émergence de la notion de trou noir, la prise de conscience de l’existence de trous noirs supermas- sifs dans toutes les galaxies à bulbe, l’identification de celui de notre Galaxie avec la radiosource intense SgrA

*

, l’observation de l’étoile S2 qui le frôle à 5 000 km/s (ce qui permet d’estimer la masse de SgrA

*

: quatre millions de masses solaires)… Il s’achève sur deux prouesses instrumentales récentes : l’observation en 2011 de sursauts lumineux très proches de la plus petite orbite circulaire stable autour de SgrA

*

, ce qui permettra – en accumulant les mesures – d’estimer le moment cinétique propre du trou noir et de le comparer à sa valeur maximale théorique ; la vérification en 2018 du décalage spectral vers le rouge en champ gravitationnel très intense, ce qui conforte les lois de la relativité générale et affine la mesure de la masse de SgrA

*

.

Un autre chapitre est consacré aux exoplanètes : car même sans interférométrie, on a pu obtenir quelques dizaines d’images ponctuelles d’exoplanètes grâce à l’optique adaptative d’un seul des télescopes de 8,2 m du VLTI, à condition de le munir en plus d’un coronographe pour supprimer autant que possible la lumière trop intense de l’étoile correspondante. La première image, historique, date de 2004 (à , 0 7

m de son

étoile), suivie en 2008 de celle de

b

Pictoris b (à , 0 4

m). Quant à la première détection

directe d’une exoplanète par interférométrie, elle revient encore au VLTI utilisant la méthode du double champ, en 2018. On a obtenu aussi des images de disques protopla- nétaires (de quelques dixièmes de seconde de diamètre angulaire), montrant des sillons qui témoignent du processus de formation de planètes !

Les quelques lignes qui précèdent sont loin d’épuiser la richesse des informations

données au long des trois cent quatre-vingt-dix pages de ce livre. Il s’agit donc d’un

ouvrage dense et tonifiant, vulgarisant une foule d’idées scientifiques de pointe en

optique astronomique, montrant aussi les péripéties de leur mise en œuvre par des

hommes et des femmes audacieux, animés dès leur jeunesse par la quête du savoir

ainsi que le désir d’en repousser les limites observationnelles, et récompensés par une

moisson scientifique d’une ampleur exceptionnelle. Celle attendue des futurs instru-

ments, actuellement en projet, a de quoi faire rêver ! Que souhaiter de mieux comme

exemples pour illustrer, devant nos étudiants, les vertus de la transmission des connais-

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sances et de la persévérance dans l’étude ? Si de tels modèles irriguent notre enseigne- ment, nous aurons alors le bonheur de susciter de nouvelles vocations de chercheurs ! Luc DETTWILLER

La conspiration de la nature et l’honneur du physicien Horizons, mesures et principes

Jean PERDIJON

Éditeur : Presses polytechniques et universitaires romandes (PPUR) Parution : 2018

Nombre de pages : 188 Prix : 20 €

ISSN/ISBN : 978.28.891.52490

Public visé : Étudiants et enseignants en physique grand public éclairé

La physique est une science qualifiée d’expérimentale, ce qui souligne qu’elle est en lien avec le monde matériel dans lequel nous vivons. Mais quelles sont les bases de cette relation fondamentale ? L’auteur, qui fut ingénieur spécialisé dans le nucléaire et enseignant à l’ENSPG (École nationale supérieure de physique de Grenoble), s’intéresse depuis longtemps aux pro- blèmes posés par les mesures physiques. Il élargit son propos dans cet ouvrage, plaçant en exergue une citation de Heidegger : « L’objet que l’on voit le plus mal, c’est la paire de lunettes que l’on porte devant les yeux », pour présenter les trois paires de lunettes imposées au physicien : observation-mesure-interprétation.

La première partie du livre est consacrée aux « horizons » limitant notre espace- temps observable. Il distingue ceux limitant l’observateur intérieur : horizons géo- métrique, relativiste, cosmologique, et ceux interdisant l’observation de l’extérieur : horizon gravitationnel (trous noirs) et horizon d’accélération ou « horizon de Rindler ».

Ce dernier horizon est le moins connu, il traduit le fait qu’un objet subissant une accélération de valeur a ne peut établir de relation causale qu’à l’intérieur d’une zone de rayon R = c

2

/a (qui correspondrait à un travail de la force ma sur la distance R, égal à l’énergie de masse mc

2

du corps). En général, l’observateur est situé à l’intérieur de cette zone et peut donc observer l’objet en question, mais il n’en est plus de même pour les accélérations extrêmes, dans le domaine des hautes fréquences. Dans d’autres publications, Jean Perdijon développe ce concept et propose de l’appliquer aux struc- tures atomiques ou au rayonnement du corps noir.

Ce tour d’horizon(s) est suivi d’une partie consacrée aux mesures (système d’uni- tés, acquisition, traitement) qui permettent d’acquérir de l’information sur le réel. Le pluriel à mesures est important et suppose de s’interroger sur l’échantillonnage, le contrôle de la qualité et le traitement statistique des résultats.

La troisième partie est consacrée aux principes mis en œuvre, principes qualifiés

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Nous avons lu et testé

d’« explication ingénieuse » et regroupés en plusieurs catégories :

concernant les objets : réalité, localité, continuité…

concernant les méthodes : causalité, non-contradiction, universalité, simplicité…

principes d’interdiction : thermodynamique, relativité, quantique…

principes de conservation : charge, masse, quantité de mouvement, énergie…

principes de stationnarité : Fermat, Maupertuis…

Enfin, – last but not least – le dernier chapitre s’intitule « Et le réel dans tout ça ? ».

Les réflexions de l’auteur sont parfois très personnelles et on ne le suivra pas forcément dans toutes ses positions mais, dans l’ensemble, cet ouvrage se lit avec un grand intérêt, en particulier pour sa richesse en références historiques et en citations. À chaque page, ce sont les grands noms de la physique qui s’expriment et nous font partager leurs interrogations sur notre discipline. On apprécie d’autant plus que ce volume se termine par une trentaine de pages de notes qui abondent de précisions et de références. Nous avons là un ouvrage personnel, mais qui parle à tous les physiciens, une lecture prenante et stimulante !

Jean DERVIEUX

L’apprentissage de la critique

Développer l’analyse critique en physique

Laurence VIENNOT et Nicolas DÉCAMP

Éditeur : EDP Sciences Parution : 2019 Nombre de pages : 204 Prix : 25 € (ebook 17 €) ISSN/ISBN : 978.27.598.23550

Public visé : Enseignants et futurs enseignants

Spécialistes de didactique de la physique à l’Université Paris- Diderot (devenue depuis l’Université de Paris), les auteurs se proposent d’attirer l’attention des enseignants et étudiants sur la nécessité de faire preuve en permanence d’esprit critique, que ce soit pour expliquer une théorie, rédiger un problème, présenter des résultats expérimentaux… En fait, en maintes circonstances dans la pratique de l’enseignement de la physique, le risque est grand : manquer de rigueur logique (incomplétude, contradictions internes…), laisser de côté a priori des explications alternatives, généraliser abusivement, s’appuyer sur des hypothèses implicites qui ne vont de soi que par la force de l’habitude…

L’exemple introductif est percutant, il expose un énoncé officiel (document

d’accompagnement des programmes) qui énonce une hypothèse simplificatrice pour

une question, mais qui, en fait, rend impossible la situation décrite préalablement ! Tout

aussi surprenante est l’analyse de l’exploitation d’une expérience dans laquelle on perce

des trous superposés dans la paroi d’une bouteille d’eau verticale pour comparer les jets

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obtenus. L’expérience est toute simple, mais souvent les schémas associés sont faux : ils montrent des jets qui vont d’autant plus loin que les trous sont proches du bas de la bouteille… Pourquoi ? Sans doute parce que les auteurs de ces schémas sont focalisés par ce qu’ils veulent démontrer, c’est-à-dire l’augmentation de pression hydrostatique avec la profondeur. Ils construisent alors le raisonnement suivant : si la pression est plus forte au niveau du trou, la vitesse initiale du jet est plus grande et « donc » sa portée aussi… Ce disant, ils oublient que la trajectoire parabolique du jet ne pourra se déve- lopper horizontalement qu’en fonction de la hauteur disponible ! Le jet issu d’un trou proche du fond de la bouteille, donc proche de la table sur laquelle elle est posée, ne pourra pas aller bien loin, malgré sa vitesse d’éjection supérieure aux autres…

Ce ne sont là que deux exemples parmi bien d’autres, qui parfois peuvent paraître critiqués de manière bien pointilleuse – car sans présupposés communs on n’avancerait pas – mais le plus souvent convaincants, et qui ne peuvent que nous inciter à nous interroger sur nos présentations.

Soulignons que le propos se veut constructif, et que les auteurs ont organisé l’ou- vrage pour le rendre pratique : classification des facteurs de risques, étude approfondie de plusieurs situations classiques, propositions de textes pouvant servir de support à la critique. Les références à des travaux universitaires sont présentes, au fil du texte et dans une riche bibliographie. Nous avons ici un ouvrage compact et accessible, mais dense et bien conçu, et qui suscitera moult réflexions profitables !

Jean DERVIEUX

N’oubliez pas, pour compléter cette rubrique, de consulter le site de l’UdPPC :

http://www.udppc.asso.fr - Rubrique « Lu et testé  Ouvrages »

où vous trouverez des analyses d’ouvrages qui ne sont pas, faute de place, publiées dans ce numéro du Bup. Pour ce mois-ci vous trouverez :

1018-4874 : La vraie nature du temps par Vincent Boqueho.

1018-4876 : L’entropie fatale par Assa Auerbach et Richard Codor.

1018-4877 : Transition énergétique par Bertrand Cassoret.

Pour toute remarque ou renseignement concernant cette rubrique, s’adresser à Jean Dervieux (cf. coordonnées en début d’article).

Jean DERVIEUX Professeur de physique-chimie

et « informatique pour tous » en classe de MPSI Lycée Blaise Pascal

Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme)

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