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Meta-analyse des effets de l'environnement sur la dynamique des stocks de thonidés

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-02821292

https://hal.inrae.fr/tel-02821292

Submitted on 6 Jun 2020

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Meta-analyse des effets de l’environnement sur la dynamique des stocks de thonidés

Florence Dufour

To cite this version:

Florence Dufour. Meta-analyse des effets de l’environnement sur la dynamique des stocks de thonidés.

Biodiversité et Ecologie. Université de Pau et des Pays de l’Adour, 2010. Français. �tel-02821292�

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THÈSE

PRÉSENTÉE À

L’UNIVERSITÉ DE PAU ET DES PAYS DE L’ADOUR

ECOLE DOCTORALE DES SCIENCES EXACTES ET DE LEURS APPLICATIONS

PAR

Florence DUFOUR

POUR OBTENIR LE GRADE DE

DOCTEUR

Spécialité :

PHYSIOLOGIE ET BIOLOGIE DES ORGANISMES – POPULATIONS – INTERACTIONS

MÉTA-ANALYSE DES EFFETS DE

L’ENVIRONNEMENT SUR LA DYNAMIQUE DES STOCKS DE THONIDÉS

Soutenue le 7 Juin 2010 Devant le jury composé de :

ARRIZABALAGA Haritz Chargé de recherche, AZTI-Tecnalia, Pasaia Co-encadrant de thèse JARRY Marc Professeur, Université de Pau et des Pays de l’Adour Directeur de thèse

MEDINA Antonio Professeur, Université de Cadiz Rapporteur

MOTOS Lorenzo Directeur de Laboratoire, AZTI-Tecnalia, Pasaia Examinateur MOUCHÈS Claude Professeur, Université de Pau et des Pays de l’Adour Examinateur

PEREIRA, João A. G. Professeur, Université des Açores Rapporteur

PRÉVOST Étienne Chargé de recherche, Université de Pau et des Pays de l’Adour Examinateur

SAUTOUR Benoît Professeur HDR, Université Bordeaux 1 Président du Jury

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Remerciements

Bien que ce travail soit le fruit d’un investissement personnel sans limite, il a été mené en collaboration plus ou moins étroite avec plusieurs personnes.

Je tiens donc tout d’abord à remercier Xabier Irigoien d’avoir monté le projet Européen METAOCEANS, et par la même occasion la fondation Marie Curie qui l’a financé. Ils m’ont donné des opportunités exceptionnelles pour réaliser cette thèse dans des conditions inégalables.

Este trabajo no estaría así sin la ayuda de Haritz Arrizabalaga, mi tutor de tesis.

Quiero agradecerle el tiempo que ha pasado a pensar conmigo a como se podría llevar a cabo esta tesis. Querría agradecerle también la libertad que me ha dado para hacer este trabajo.

Nunca impuso sus ideas pero solo fue un guía en el proceso de maduración de las ideas.

Je voudrais par ailleurs remercier Marc Jarry d’avoir accepté d’être le directeur de cette thèse. Je tiens principalement à le remercier des différentes tâches administratives qu’il a accomplies pour me faciliter la vie.

Je souhaite également remercier Francis Marsac et Alain Fonteneau pour les données auxquelles ils m’ont permis d’accéder. Je voudrais aussi les remercier de m’avoir permis de profiter durant 15 jours de leur savoir sans limite sur les pêcheries thonières.

Quierro tambien agradecer mucho Leire Ibariabalaga, quien me ayudó a muchas ocasiones de mi tesis. Ya por haberme iniciado a R y luego por sus consejos estadísticos. La querría agradecer particularmente porque aunque estaba de baja maternal me ayudó al último de la tesis para conseguir a tener resultados de calidad que no habría tenido a tiempo sin su guía metódica. Je voudrais également remercier Marina Chifflet pour m’avoir soutenue et aidée lors de mes grands moments de doute sur les données.

Je souhaite également remercier mes camarades de la sala de becarios. Nicolas Goñi, tout d’abord, pour m’avoir fait partager son amour de cette belle région dans laquelle j’ai eu la chance de passer ces dernières années. Cuando todo iba mal, Ainhoa Lezama me permitía de ver que las cosas podían ser peores, a pesar de ella. Tengo un pensamiento especial para Iratxe Menchaca que ha estado la compañera ideal para llevar a cabo esta tesis. En fin, querría agradecer a todos los becarios por el ambiente de nuestra sala que no sé si podré olvidar…

Je n’oublie bien évidemment pas ma mère et mon frère pour leurs relectures

scrupuleuses. Je souhaite finalement remercier du fond du cœur Mikaël qui m’a soutenu et

supportée tout au long de ces trois années. Il a été présent à chaque moment important pour

m’aider et me réconforter, mais aussi pour célébrer chaque petite victoire. Il a été mon soleil,

au sens propre comme au figuré !

(5)

2

Résumé

Il est probable que le changement climatique influence la distribution spatiale et temporelle des espèces de thonidés de par son impact sur les bas niveaux trophiques. L’objet de cette thèse est donc (1) de déterminer quelles sont les principales variables environnementales définissant l’habitat des thonidés, (2) de définir les gammes de préférence, tolérance et rejet pour ces mêmes variables et (3) d’étudier, à différentes échelles, l’effet de l’environnement sur la distribution spatiale et temporelle des thonidés et poissons à rostre de l’Atlantique.

Des modèles additifs généralisés (GAM) ont donc été mis en place afin de déterminer quelles sont les variables environnementales définissant le mieux l’habitat des thonidés à l’échelle mondiale. Pour chacune des espèces le meilleur modèle incluait toutes les variables environnementales considérées : température, salinité, oxygène dissous, anomalie du niveau de la mer, profondeur de la couche de mélange et concentration en chlorophylle. Les GAMs ont révélé que la plupart des espèces sont principalement liées à la température de surface, l’oxygène et l’anomalie du niveau de la mer. L’analyse des quotients a par ailleurs été utilisée pour définir les gammes de préférence et rejet des thonidés pour les différentes variables environnementales. Les espèces tropicales préfèrent des eaux plus oxygénées, plus chaudes et moins productives que les espèces tempérées.

La deuxième partie de cette thèse a permis de démontrer que la migration saisonnière du germon et du thon rouge vers le Golfe de Gascogne est plus précoce dans les années 2000 de respectivement 2 et 5,6 jours par décennie que lors des années 1960 et 1980. Ce changement phénologique est corrélé avec l’évolution de la température sur les mêmes périodes. De plus, la température, notamment la latitude de l’isotherme 17 °C, a également montré une corrélation avec la latitude de capture des germons dans les eaux adjacentes au Golfe de Gascogne. Celle-ci a également évolué de 2,5° vers le nord sur les 40 dernières années. On a enfin pu montrer que le changement de régime de l’Atlantique Nord à la fin des années 1980 a eu une influence sur la migration de ces deux espèces.

Finalement, une synthèse de toutes les études locales concernant les thonidés et poissons à rostre de l’Atlantique Nord et Sud a été adressée par le biais d’une méta-analyse.

Le résultat général indique que la distribution latitudinale de l’ensemble des espèces ne semble pas présenter de corrélation avec la température. Cependant, la corrélation générale est positive si on ne s’intéresse qu’à l’hémisphère Nord. Les latitudes de captures des différentes espèces présentent de plus fortes corrélations avec l’oscillation Nord Atlantique et l’oscillation du Sud qu’avec la température.

Ces différents résultats laissent penser qu’à l’échelle locale la température pourrait être

un facteur déterminant de la distribution des espèces tandis qu’une plus grande partie des

processus physiques de l’océan doivent être pris en considération pour comprendre la

dynamique spatiale des thonidés à l’échelle de l’océan.

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Abstract

Climate change may affect spatial and temporal distribution of tuna species due to its impact on lower trophic levels. Hence, the aims of this thesis are (1) to determine the main environmental variables that define tuna habitat (2) to define the ranges of preference, tolerance and avoidance for these variables and (3) to study, at different scales, the effect of environment on spatiotemporal distribution of tuna and billfish of the Atlantic.

Generalized additive models (GAM) were carried out to determine the environmental variables defining global tuna habitat. For each species the best model included all environmental variables considered i.e. temperature, salinity, dissolved oxygen, sea level anomaly, mixed layer depth and chlorophyll. GAMs revealed that for most species surface temperature, dissolved oxygen and sea level anomaly were variables explaining most of CPUE deviance. Besides, the quotient analysis was used to define tuna ranges of preference, tolerance and avoidance for different environmental variables. It appeared that tropical species prefer warmer, less productive, and more oxygenated waters than temperate species.

The second part of this thesis revealed that albacore and bluefin tuna seasonal movements to the Bay of Biscay appeared earlier in the 2000s than in the 1960s and 1980s, respectively. The rate of change was 2 and 5.6 days for decade, respectively. This change was correlated with phenological changes in temperature over the same periods. Moreover, the temperature, latitude of 17 °C isotherm in particular, also showed a correlation with albacore catch latitude in adjacent waters of the Bay of Biscay. It also moved 2.5 ° northwards over the last 40 years. Lastly, we showed that the late 1980s regime shift of the North Atlantic had an influence on the migration of these two species.

Finally, a synthesis of all local studies on tuna and billfish in North and South Atlantic was addressed in a meta-analytic framework. The overall result indicates that species distribution do not correlate with temperature. However, the overall correlation was positive in the northern hemisphere. Species catch latitude showed stronger correlations with the North Atlantic Oscillation and the Southern Oscillation than with temperature.

These different results suggest that temperatures could be a factor determining species

local distribution whereas some ocean physical processes should be considered in order to

understand tuna spatial dynamics across oceans.

(7)
(8)

Table des matières

CHAPITRE 1 : INTRODUCTION GENERALE ... 6  

1.1.   L

E CHANGEMENT CLIMATIQUE ET SES CONSEQUENCES

... 7  

1.1.1.   Généralités ... 7  

1.1.2.   Changements phénologiques ... 8  

1.1.3.   Changements biogéographiques ... 9  

1.1.4.   Conséquences sur les relations entre les espèces ... 10  

1.2.   O

BJECTIFS

... 11  

CHAPITRE 2 : VARIABILITE ENVIRONNEMENTALE ET MATERIEL BIOLOGIQUE ... 13  

2.1.   VARIABILITE ENVIRONNEMENTALE ... 14  

2.1.1.   El Niño ... 14  

2.1.2.   Oscillation Nord Atlantique ... 15  

2.1.3.   Changements de régime ... 16  

2.1.4.   Notion d’habitat ... 17  

2.2.   M

ATERIEL BIOLOGIQUE ET CONTEXTE ECOLOGIQUE

... 18  

2.2.1.   Gestion et conservation des stocks ... 18  

2.2.2.   Aperçu des espèces ... 18  

2.2.3.   Les thons et leur environnement ... 31  

2.3.   L

A PECHE DES THONIDES DANS LE MONDE

... 34  

2.3.1.   Captures par océans... 34  

2.3.2.   Importance relative des différents engins de pêche ... 35  

2.3.3.   Dynamique des flottilles ... 36  

2.3.4.   Hypothèses sur les données ... 36  

CHAPITRE 3 : LA MÉTA-ANALYSE ... 39  

3.1   O

RIGINE ET DEFINITION

... 40  

3.2.   A

PPROCHES PRINCIPALES ET INTERETS

... 41  

3.2.1.   Méthodes méta-analytiques ... 41  

3.2.2.   L’analyse secondaire... 44  

(9)

5

CHAPITRE 4 : PREFERENCES D’HABITAT DES THONIDES A L’ECHELLE GLOBALE ... 46  

4.2.   M

ATERIEL ET METHODES

... 47  

4.3.   P

RINCIPAUX RESULTATS ET DISCUSSION

... 50  

4.3.1.   Analyse des quotients ... 50  

4.3.2.   Modèles additifs généralisés ... 52  

4.4. C

ONCLUSIONS

... 55  

A

RTICLE CORRESPONDANT AU QUATRIEME CHAPITRE

... 56  

CHAPITRE 5 : L’IMPACT DU CHANGEMENT CLIMATIQUE SUR LA DISTRIBUTION DU GERMON ET DU THON ROUGE DU GOLFE DE GASCOGNE ... 104  

5.1.   P

ROBLEMATIQUE

... 105  

5.2.   M

ATERIEL ET METHODES

... 105  

5.3.   R

ESULTATS PRINCIPAUX ET DISCUSSION

... 110  

A

RTICLE CORRESPONDANT AU CINQUIEME CHAPITRE

... 114  

CHAPITRE 6 : META-ANALYSE DE L’IMPACT DU CHANGEMENT GLOBAL SUR LES THONS ET POISSONS A ROSTRE DE L’ATLANTIQUE ... 123  

6.1.   P

ROBLEMATIQUE

... 124  

6.2.   M

ATERIEL ET METHODES

... 124  

6.3.   R

ESULTATS PRINCIPAUX

... 126  

6.4.   L

IMITES

... 129  

A

RTICLE CORRESPONDANT AU SIXEME CHAPITRE

... 131  

CHAPITRE 7 : DISCUSSION GENERALE ET PERSPECTIVES ... 162  

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ... 169  

LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES ... 182  

(10)

Chapitre 1 :

Introduction Générale

(11)
(12)

1.1. Le changement climatique et ses conséquences

1.1.1. Généralités

La température moyenne du globe a augmenté d’approximativement 0,6 ºC sur les cent dernières années et cette tendance perdure. En seulement 30 ans, cette augmentation a non seulement affecté la phénologie des organismes et les zones de distribution des espèces mais également la composition et la dynamique des communautés (comme il a déjà été révisé par Walther et al., 2002). Le groupe de travail nº2 du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (IPCC) a mis en évidence l’influence des changements climatiques régionaux sur bon nombre de systèmes naturels dans la plupart des océans, notamment en raison de la hausse des températures (IPCC, 2007). Néanmoins, tous les effets du réchauffement sur les océans ne sont pas parfaitement connus (Edwards et Richardson, 2004 ; Richardson et Schoeman, 2004).

Parmi les différentes réponses des espèces vis-à-vis du réchauffement climatique, deux sont fréquemment étudiées et seront développées dans cette thèse : les modifications de distribution géographique des espèces et le rythme de leurs activités. En premier lieu, puisque les espèces se déplacent afin d’occuper des aires en accord avec leur préférences métaboliques, leurs densités peuvent varier en divers endroits et leur distribution peut s’étendre vers les pôles. Dans un second temps, comme les traits d’histoire de vie des espèces sont déclenchés par des signaux liés à la température, des variations dans le rythme d´évènements (ex : des migrations) peuvent apparaître.

Certains organismes ont démontré une sensibilité de leurs distributions

spatiotemporelles au regard du changement climatique (Hughes, 2000). Les premiers effets

ont été mis en évidence pour les systèmes terrestres. L’influence du réchauffement a par la

suite été démontrée sur les processus côtiers et les systèmes marins en général. Il a également

été démontré que 90% des changements observés dans les règnes végétaux et animaux

résultent d’une réponse similaire à ces variations de température. Dans les systèmes

aquatiques, les algues, le plancton et les poissons ont vu leur phénologie, leur migration et la

composition de leur communauté modifiée. L’IPCC note que 99% des changements dans les

systèmes marins sont liés au changement climatique global. Dans la littérature, bien qu’ils

(13)

8 soient moins liés à leur environnement que les systèmes marins (Richardson et Poloczanska, 2008), les systèmes terrestres sont les plus représentés (Steele, 1991). Même si le réchauffement de l’océan est plus lent que celui de l’atmosphère, la réponse des organismes marins semble plus rapide que celle des organismes terrestres (Richardson et Poloczanska, 2008). On a d’ailleurs observé une modification de plusieurs kilomètres de la distribution spatiale de différents groupes tels que le phytoplancton (Edwards et Richardson, 2004), le zooplancton (Beaugrand et al., 2002) et les poissons (Sabatés et al., 2006).

Les interactions entre l’océan et l’atmosphère ne peuvent être ignorées lorsque l’on tente de comprendre les systèmes globaux et le changement climatique. De la même manière, les transports verticaux et horizontaux des masses d’eau à grande échelle ne sont pas les seuls à influencer l’océan, les facteurs biotiques et chimiques jouent également un rôle. Colebrook (1982) a démontré que la variabilité interannuelle du phytoplancton et du zooplancton reflète les changements dans les vents et la température des océans. En effet, la température détermine le taux auquel les cellules phytoplanctoniques se divisent ainsi que le taux de développement du zooplancton. En outre, la température agit de manière indirecte sur le zooplancton à travers son effet sur le phytoplancton. Le changement climatique affecterait donc les espèces de manière individuelle, mais aussi de manière collective. Ainsi, la taille et la structure des populations, la composition spécifique des communautés ou encore la structure et le fonctionnement des écosystèmes peuvent être atteints (Portner et Knust, 2007).

1.1.2. Changements phénologiques

La phénologie est l'étude du rythme des phases biologiques récurrentes (tel que le rythme de la migration), des causes de celui-ci au regard des forces biotiques et abiotiques, et des interrelations entre les phases des espèces (Lieth, 1974).

La phénologie constitue le premier type de réponse d'une espèce ou d'un groupe taxonomique

face à des changements dans les contraintes environnementales. Dans une région donnée, si

les conditions environnementales (par exemple la température) changent, la première

possibilité pour une espèce de s'adapter à ces nouvelles conditions est de modifier son cycle

de vie de telle manière que ses phases critiques de développement répondent à la variabilité

saisonnière de l’environnement physique. Si de tels changements dans le calendrier sont

possibles, l'espèce peut rester dans la région. Si les changements sont trop prononcés pour

(14)

permettre à l'espèce d'adapter son cycle de vie, son abondance diminue jusqu’à potentiellement disparaître au niveau local, impliquant un changement biogéographique.

Depuis les années 1960, les activités printanières sont apparues en général de plus en plus tôt. Certaines études montrent que les événements phénologiques automnaux sont également retardés, bien que le changement soit moins prononcé que pour les événements printaniers (Walther et al., 2002). De tels changements phénologiques sont différents selon les espèces puisqu’ils s'appuient sur leur sensibilité à un facteur environnemental donné.

Beaucoup de travaux, à la fois terrestres et marins, ont montré que la variabilité climatique peut influer sur la phénologie des espèces (Crick et al., 1997 ; Myneni et al., 1997 ; Reid et al., 1998 ; Menzel et Fabian, 1999 ; Post et Stenseth, 1999 ; Fitter et Fitter, 2002). Dans le domaine marin pélagique, les facteurs physiques par lesquels le climat agit sur la phénologie sont principalement la température et la turbulence. La température augmente la rapidité du développement gonadique et déclenche la reproduction d'un grand nombre d'espèces (Edwards et Richardson, 2004 ; Kirby et al., 2007). Par exemple, associé à l'augmentation de la température, le maximum saisonnier de Calanus helgolandicus a avancé de près d'un mois entre les années 1960 et le début du 21ème siècle (2000-2005). De la même manière, dans la mer du Nord, certaines espèces ont réagi à l’élévation de la température printanière par un cycle saisonnier désormais plus précoce.

1.1.3. Changements biogéographiques

En plus des réponses phénologiques, il y a un nombre croissant d’indications d’une

réponse des espèces au réchauffement par la modification de leur distribution géographique

soit vers les pôles, soit vers des altitudes plus élevées (Parmesan, 1996 ; Parmesan et al.,

1999). En effet, des méta-analyses ont montré que des changements significatifs de

distribution ont été observés au siècle dernier. Un décalage de la distribution des espèces vers

les pôles de quelques kilomètres par décennie a notamment été démontré (Parmesan et Yohe,

2003). Par exemple, dans l’hémisphère nord, l’augmentation de la température de l’eau a

provoqué une extension de la distribution spatiale des espèces vers le nord. On a également

observé une plus forte abondance d’espèces dites d’eaux chaudes sous nos latitudes

(Drinkwater et al., 2003).

(15)

10 Plusieurs études ont également montré des relations entre les conditions environnementales et des changements dans le recrutement, les abondances, la distribution ou encore la croissance de poissons et coquillages (e.g. Sheperd et al., 1984 ; Sharp, 1987). De plus, il y a un nombre croissant de travaux montrant comment les changements climatiques récents ont affecté un large champ d’organismes ayant diverses distributions géographiques (Hughes, 2000 ; Ottersen et al., 2001 ; Parmesan et Yohe, 2003). Il est donc maintenant manifeste que des changements vers les pôles et vers de plus hautes altitudes se sont déroulés au cours du 20

ème

siècle pour une grande quantité de groupes taxonomiques, dans différents lieux (Easterling et al., 2000 ; Hughes, 2000 ; McCarty, 2001)

1.1.4. Conséquences sur les relations entre les espèces

Le réassemblage des communautés dans le temps et l’espace est souvent considéré comme la conséquence la plus inquiétante du changement climatique sur les écosystèmes. En effet ce processus a le potentiel d’impliquer un mismatch trophique, de brusques changements des écosystèmes ou même de perturber les relations proies-prédateurs (Edwards et Richardson, 2004 ; Navarette et al., 2005 ; Parmesan et Matthews, 2006 ; Beaugrand et al., 2008). En effet, Cushing (1990) postule que la mortalité larvaire est contrôlée par l’adéquation temporelle entre le pic d'abondance des larves de poissons et celui de leurs proies planctoniques. Il a proposé deux explications, dont la vulnérabilité des larves en l’absence de nourriture. Il se pourrait aussi que les larves peu alimentées croissent plus lentement, les rendant plus sensibles à la prédation. Un certain soutien empirique est venu confirmer cette hypothèse au cours des dernières années.

Les données sur le long terme portant sur des organismes terrestres et marins ont montré que les espèces répondent différemment au changement environnemental, entraînant une altération de leurs interactions (e.g. Fromentin et Planque, 1996 ; Saetre et al., 1999).

Beaugrand et Reid (2003) ainsi qu’Edwards et Richardson (2004) ont récemment indiqué qu’un même forçage climatique déclenche souvent des réponses spécifiques différentes selon les préférences écologiques et les distributions spatiotemporelles des espèces.

Les environnements marins tempérés sont particulièrement vulnérables aux changements

phénologiques car le succès du recrutement des niveaux trophiques supérieurs est fortement

dépendant de la synchronisation avec le pic de production planctonique (Hjort, 1914 ;

(16)

Cushing, 1990). En effet, le climat a une incidence sur le zooplancton, d’une part au travers de son influence sur la production primaire et d’autre part car la température détermine son taux de développement. N’oublions pas non plus que les vents (par mélange turbulent) influent sur le taux de contact entre le zooplancton et sa nourriture.

Le changement climatique peut également fortement modifier la distribution et l’abondance des poissons (Wood et McDonald, 1997 ; Brander et al., 2003). Cet effet est dû à des changements dans la croissance, la survie, la reproduction ou à des réponses à des changements à d’autres niveaux trophiques (Beaugrand et al., 2002 ; Beaugrand et al., 2003).

En dépit de travaux en faveur d’un contrôle de l’écosystème par le haut (top-down) dans certains écosystèmes marins (Cury et al., 2003), le contrôle de l’écosystème par le bas (bottom-up) semble être le plus fréquent dans les écosystèmes pélagiques (Richardson et Schoeman, 2004). Il semble cependant difficile de trancher entre ces deux types de contrôle, de par le peu de données et d’études impliquées.

Les thonidés, qui sont de grands prédateurs pélagiques, constituent la cible des pêcheries opérant dans divers bassins océaniques pélagiques. Une telle soustraction de prédateurs supérieurs altère très probablement la structure du réseau pélagique au travers des effets de top-down (Essington et al., 2002). Parallèlement, des effets bottom-up (via l’impact des changements climatiques et environnementaux sur la base du réseau trophique) contrôlent également l’abondance et la dynamique spatiale des prédateurs supérieurs puisqu’elles dépendent de la disponibilité des proies (Frank et al., 2006). Ainsi, la variabilité des populations de poissons pélagiques est intimement liée aux activités de pêche mais aussi à la variabilité climatique (Stenseth, 2004, Lehodey et al., 2006).

1.2. Objectifs

Il y a donc de plus en plus d’éléments indiquant que le changement climatique

influence les espèces (migration, distribution spatiale, recrutement….). Toutefois il n’existe

pas encore d’étude générale synthétisant les résultats afin de déterminer si l’environnement

affecte la distribution et la migration des thons, de manière globale. Les travaux de cette thèse

s’inscrivent dans cette optique. Dans le deuxième chapitre de ce manuscrit on énoncera les

caractéristiques biologiques et écologiques des espèces étudiées ainsi que le contexte

environnemental dans lequel elles évoluent. Le troisième chapitre s’intéressera à l’outil

(17)

12

statistique principalement utilisé, c'est-à-dire la méta-analyse. L’origine de ces méthodes

d’analyses, ainsi que les différentes manières de les mener seront approchées. La quatrième

partie s’intéressera à définir l’habitat des thonidés à l’échelle globale. Des plages de valeurs

de préférence, tolérance et rejet pour plusieurs variables environnementales seront obtenues

par l’analyse de données de pêches sur plusieurs décennies. Les variables les plus importantes

dans la définition de l’habitat des thonidés seront également déterminées à partir de ces

mêmes données et de modèles additifs généralisés. La cinquième partie correspondra à une

analyse des données précises de la pêcherie locale du germon et du thon rouge du Golfe de

Gascogne. Les conséquences du réchauffement climatique sur la phénologie et la distribution

spatiale de ces espèces seront étudiées au niveau local. Dans la sixième partie, une vue plus

globale sera abordée en essayant d’appréhender l’impact de l’environnement sur les

distributions spatiales de neuf espèces de thonidés et poissons à rostre dans l’ensemble de

l’Atlantique. Enfin, la septième partie fera le bilan des résultats obtenus, s’intéressa aux

facteurs limitants de cette thèse et présentera différentes perspectives permettant d’améliorer

les résultats.

(18)

Chapitre 2 :

Variabilité environnementale et

matériel biologique

(19)
(20)

2.1. Variabilité environnementale

Beaucoup de travaux suggèrent que la température est un facteur clé des systèmes vivants. Elle influe sur les espèces du niveau cellulaire jusqu’à celui des écosystèmes.

Au niveau des espèces, la température affecte la mortalité par son influence sur les traits d’histoire de vie, la survie, et le temps de génération. Ces traits d’histoire de vie vont à leur tour contribuer à déterminer la distribution spatiale, la taille et les caractéristiques morphologiques des espèces (Mauchline, 1998 ; Beaugrand et Reid, 2003).

Au niveau des écosystèmes, la température influe sur la composition spécifique et donc sur la taille moyenne des organismes. Par ailleurs, dès lors que l’on s’intéresse aux effets de l’environnement sur les espèces, ou même les stocks, il est important de comprendre les relations de causalité entre les processus de forçage climatique et les réponses biologiques (Sund et al., 1981).

2.1.1. El Niño

La variabilité environnementale interannuelle est principalement caractérisée par l’oscillation du Sud : El Niño (ENSO). Les eaux chaudes de la couche de surface du Pacifique Équatorial Occidental (la warm pool) ont des températures supérieures à 28 ºC tout au long de l’année. Elles provoquent une convection atmosphérique vers le Pacifique Oriental (plus froid) grâce à la circulation atmosphérique zonale de Walker (Lehodey et al., 2006).

El Niño est un bouleversement du système océan-atmosphère de l’océan Pacifique tropical ayant de grandes conséquences sur la météorologie globale. Pendant El Niño, les alizés se relâchent dans le Pacifique Central et Occidental laissant la warm pool s’étendre jusqu’à l’est du Pacifique central (elle atteint les côtes du Pérou pendant les évènements les plus puissants). Cela induit un approfondissement de la thermocline dans le Pacifique Est et une élévation de la thermocline à l’ouest. Ces derniers ont pour effet de réduire l’efficacité de l’upwelling rafraîchissant la surface de la côte Est du Pacifique et donc d’y stopper l’apport d’eaux riches en nutriments. Il en résulte une augmentation des températures de surface et un déclin drastique de la production primaire. Le phénomène inverse est observé durant la Niña puisque la warm pool est alors confinée à l’extrême ouest du Pacifique Equatorial.

Ces déplacements zonaux de la warm pool, accompagnés de changements dans la circulation

de Walker, sont reflétés par le SOI (l’indice d’Oscillation du Sud). Il est calculé par la

différence de pressions au niveau de la mer entre Tahiti et Darwin. Les phases chaudes de

(21)

15 ENSO sont appelées El Niño tandis que la Niña représente les phases froides. Un indice fortement négatif indique un évènement El Niño tandis qu’un fort indice positif représente un évènement la Niña.

ENSO affecte considérablement les pêcheries et les écosystèmes des côtes péruviennes et chiliennes. Les niveaux trophiques supérieurs, dont les espèces commerciales de la région, sont défavorablement affectés durant les épisodes El Niño (Jiao, 2009). Les océans Indien, nord Pacifique et d’autres écosystèmes extratropicaux sont également grandement influencés à l’échelle décennale.

2.1.2. Oscillation Nord Atlantique

L’oscillation Nord Atlantique (NAO) est un phénomène atmosphérique et océanique qui concerne principalement l'Atlantique Nord. Elle représente une oscillation à grande échelle entre l’anticyclone subtropical des Açores et la dépression subpolaire de l’Islande. Les changements d’intensité et de position de ces deux masses d’air mènent à une variation de la force et de la direction des vents à travers l’Atlantique, depuis la côte Est des Etats-Unis jusqu’en Europe. La NAO est accentuée en hiver (novembre à avril) avec un maximum d’amplitude et de rémanence dans le secteur Atlantique. Dans le Nord de l’Europe la NAO est souvent utilisée comme variable indirecte des patrons de températures (Ottersen et al., 2001).

Une valeur positive de l’indice NAO entraîne des hivers doux et pluvieux en Europe mais froids et secs dans le Nord du Canada et le Groenland. En revanche, des conditions de NAO négative apportent un air humide en Méditerranée et de l’air froid dans le Nord de l’Europe, tandis que les hivers sont plus doux au Groenland (Hurrell, 1995).

Les communautés et les écosystèmes du Nord Atlantique sont fortement influencés par ces changements de conditions (Drinkwater, 2002). Pendant les hivers à NAO positive, les vents d'ouest sur l'Europe sont plus de 8 m.s

-1

plus forts que lors des hivers à NAO négatives.

Un flux anormal du sud se produit sur l'Est des Etats-Unis tandis qu’un flux de nord,

également anormal, se produit dans l'Ouest du Groenland, l’Arctique Canadien et la

Méditerranée.

(22)

La NAO semble influencer la distribution et les flux des principaux courants et masses d’eaux de l’Atlantique. Elle semble aussi gouverner la formation d’eaux profondes en mer du Groenland tout comme celle des eaux intermédiaires de la mer du Labrador (Dickson, 1997 ; Curry et al., 1998 ; Reid et al., 1998). La relation entre l’état de la NAO et ces patrons, les vents et les précipitations est particulièrement forte. Il se peut que la quasi-totalité du refroidissement du Nord-Ouest Atlantique et du réchauffement du continent européen depuis 1980 soit linéairement liée aux changements de NAO (Ottersen et al., 2001). En effet, du début des années 1940 au début des années 1970, quand l'indice NAO a montré une tendance à la baisse, les températures hivernales européennes étaient souvent plus faibles que la normale. Cependant, un brusque renversement s'est produit au cours des 3 dernières décennies, avec des valeurs d'indice NAO sans précédent, fortement positives depuis 1980 (Hurrell, 1995).

Les compartiments biologiques répondent indirectement à la NAO au travers de changements dans les caractéristiques physiques et chimiques des eaux (Ottersen et al., 2001).

Le patron de distribution spatial des corrélations entre l’indice NAO et la température de surface est triple. En effet, la corrélation entre l’indice NAO, les températures de surface hivernales et la force des vents varie selon les régions (Ottersen et al., 2001 ; Beaugrand, 2009). Les corrélations sont négatives dans les régions subpolaires et subtropicales alors qu’elles sont positives aux latitudes moyennes de l’Atlantique Nord (Beaugrand, 2009). En raison de la variation spatiale des réponses physiques à la NAO il est attendu que la réponse biologique présente également une variabilité spatiale (Drinkwater, 2002).

2.1.3. Changements de régime

Isaacs (1976) fut le premier à présenter aux halieutes le concept de régimes climatique, océanographique et biologique (Steele, 1996 ; Beamish et al., 1999 ; Beamish et al., 2000). Il suggérait que les régimes étaient connectés par un certain nombre de discontinuités abruptes.

Beamish et al. (2000) ont défini le changement de régime (regime shift) comme un

changement dans la moyenne d’une série de données s’effectuant sur une période de plusieurs

mois à une année. Le terme de « changement de régime des écosystèmes » insinue que les

changements sont causalement connectés et peuvent être liés à des changements à tous

(23)

17 niveaux trophiques. Cependant, la plupart des signes sont généralement apportés par les espèces commerciales puisqu’elles sont l’objet d’un plus grand nombre de recherches.

Les implications potentielles des impacts régionaux du changement climatique en halieutique sont étudiées depuis plusieurs années. Bien que la surexploitation ait été considérée comme responsable des changements pendant longtemps (Soutar et Isaacs, 1974 ; Cushing, 1982 ; Francis et Hare, 1994), des témoignages historiques soutiennent l’idée que ces changements sont apparus avant la surexploitation (Steele, 1996). Cela confirme donc l’hypothèse de changements de régime, indiquant que les facteurs environnementaux et l’effort de pêche sont les mécanismes sous-jacents des changements constatés.

2.1.4. Notion d’habitat

Bien que complexe à définir, l’habitat désigne un espace écologique dans lequel les individus peuvent normalement vivre et s’épanouir (Dickinson, 1963 ; Abercrombie et al., 1966). Dans ce travail, l’habitat a été considéré comme l’ensemble de variables biotiques et abiotiques pouvant avoir une incidence sur la distribution des espèces.

Les halieutes tentent depuis quelques années d’incorporer la variabilité environnementale dans l’évaluation des stocks, notamment par la mise en place de modèles d’habitats (e.g.

Bigelow et al., 2002 ; Kleiber et al., 2003 ; Bigelow et Maunder, 2007). Toutefois, les caractéristiques d’habitat ne sont pas correctement définies pour de nombreuses espèces comme les grands pélagiques. Seules la température et l’oxygène sont considérés comme les variables qui conditionnent principalement l’habitat des thonidés (Brill, 1994). Les informations sur les moteurs de distribution des individus sont incomplètes, rendant les modèles d’habitat pour l’estimation des stocks peu performants.

Un approfondissement des connaissances sur les caractéristiques des eaux propices à une forte production de grands pélagiques aurait des implications dans les modèles d’écosystèmes pélagiques (e.g. Kitchell et al., 2006), l’évaluation des populations (e.g.

Maunder et Punt, 2004 ; Bigelow et Maunder, 2007) et permettraient une gestion efficace des

pêches (e.g. Young et al., 2006).

(24)

2.2. Matériel biologique et contexte écologique

2.2.1. Gestion et conservation des stocks

Les thonidés suscitent un intérêt grandissant dans divers domaines : en tant que ressource alimentaire, en tant qu’organismes pélagiques ayant une distribution immense mais bien définie, en tant que prédateurs supérieurs des écosystèmes océaniques et aussi comme groupe de poissons à l’anatomie, la biochimie et la physiologie uniques (Sund et al., 1981).

L’évaluation et la gestion des stocks de thonidés et poissons à rostre (billfish) dans les différents océans sont pilotées par cinq commissions. Elles gèrent des bases historiques de captures et d’efforts de pêche pour différentes espèces. La commission pour la conservation du thon rouge du Sud (CCSBT) s’occupe exclusivement de cette espèce alors que les stocks des autres espèces sont gérés par océan. Ainsi, la Commission Internationale pour la Conservation des Thonidés de l’Atlantique (ICCAT) est responsable de la conservation des thonidés et poissons à rostre dans l’océan Atlantique et ses mers adjacentes. Dans le Pacifique central et occidental la WCPFC se charge de la gestion des stocks alors que l’IATTC s’occupe des stocks de thons et poissons à rostre du Pacifique Est. Enfin, l’Océan Indien est sous la responsabilité de la commission des thons de l’Océan Indien (IOTC).

Les données sont classées par engin de pêche, pavillon, position géographique, date etc… Les registres débutent dès la fin des années 1950, ce qui permet d’étudier des séries temporelles assez longues. Il est donc possible d’appréhender un effet à long terme de la variabilité climatique sur les stocks de thons et c’est pourquoi les travaux de cette thèse s’appuient en grande partie sur ces données.

2.2.2. Aperçu des espèces

Les espèces étudiées dans cette thèse appartiennent à la famille des Scombridés représentée par les genres Thunnus et Katsuwonu, à la famille des Istiophoridés composée des genres Makaira, Istiophorus et Tetrapturus et à la famille des Xiphiidés représentée par le genre Xiphias. Les espèces T. alalunga (Bonnaterre 1788), T. thynnus (Linnaeus 1758), T.

maccoyii (Castelnau 1872), T. orientalis (Temminck et Schlegel 1844) et X. gladius

(25)

19 (Linnaeus, 1758) sont considérées comme tempérées tandis que les espèces T. albacares (Bonnaterre 1788), T. obesus (Lowe 1839), K. pelamis (Linnaeus 1758), M. nigricans (Lacepède 1802), I. albicans (Latreille 1804) et Tetrapturus albidus (Poey 1860) sont tropicales.

Alors qu’ils sont considérés comme des hétérothermes, les thons ont une température corporelle régionalement supérieure à celle du milieu ambiant (Boyce et al., 2008). Il est donc assez difficile de déterminer quel intervalle de température leur correspond le mieux. De plus, la classification des espèces de thons en «tropicale» et «tempérée» n’a pas beaucoup de sens puisqu’elle se réfère à des conditions de surface non pertinentes pour des espèces ne vivant pas exclusivement dans la couche superficielle (Brill et al., 2005).

2.2.2.1. Le germon

Le germon (Thunnus alalunga) fait partie des plus petits thonidés. Il a une taille maximale de 140 cm (Torres et Pauly, 1991), un poids de 60 Kg (IGFA, 2001) et une longévité de 15 ans (Le Gall, 1974). La plupart des germons pêchés ne dépassent cependant pas les 100 cm et pèsent 45 à 50 kg.

Durant ses premières phases de vie, le germon est épipélagique (Bard et al., 1998). Ensuite, au cours de son développement, il devient mésopélagique. Dans l’Atlantique il est rencontré entre 100 et 450 m de profondeur avec une plus grande abondance entre 250 et 300 m (Bard, 2001). Dans le Pacifique, Bertrand et al. (2002) indiquent qu’on le rencontre entre la surface et 380 m tandis que d’autres estiment qu’il se répartirait jusqu’aux alentours de 450 m (Bard et al., 1999).

La distribution spatiale du germon s’étend entre 50ºN et 40ºS mais les stocks des hémisphères Nord et Sud sont séparés. De plus, cette espèce est moins abondante dans les eaux équatoriales entre 10ºN et 10ºS (Collette et Nauen, 1983).

Le germon préfère des eaux plus froides que la majorité des autres espèces, bien que les

adultes soient rencontrés principalement dans la zone tropicale (figure 2.1). Les déplacements

latitudinaux du germon lors de ses migrations suivent ceux des isothermes 16 à 21 ºC (Havard

Duclos, 1973). Toutefois, leur préférence thermique est limitée à la plage de température 10-

20 ºC (Graham et Dickinson, 1981 ; Laurs et Lynn, 1991).

(26)

2.2.2.2. Le thon rouge de l’Atlantique

Le thon rouge de l’Atlantique (Thunnus thynnus) est la plus grande espèce de thonidés, il peut atteindre 400 cm. Le poids maximal rapporté pour cette espèce est de 900 kg (Mather, 1995).

Le thon rouge de l’Atlantique se distribue dans l’écosystème pélagique de tout l’Atlantique Nord et ses mers adjacentes (figure 2.2). Cette espèce vit en permanence dans les eaux tempérées de l’Atlantique (Bard et al., 1998 ; Fromentin et Fonteneau, 2001) bien qu’elle puisse supporter des température entre 3 et 30 ºC (Block et al., 2001).

Les juvéniles et les adultes plongent souvent entre 500 et 1000 m (Lutcavage et al., 2000 ; Brill et al., 2002). Ils se regroupent le long des fronts océaniques (Humston et al., 2000 ; Royer et al., 2004) en raison du fort nombre de proies qui peuplent ces eaux.

Figure 2.1 : Distribution du germon au niveau mondial. Les champs

colorés illustrent les captures de cette espèce tous engins confondus

(moyenne 1990 – 2007) (source: FAO, 2003).

(27)

21 2.2.2.3. Le thon rouge du Pacifique

Le thon rouge du Pacifique (Thunnus orientalis) excède 300 cm, 500 kg, et sa longévité peut atteindre jusqu’à 30 ans (Foreman et Ishizuka, 1990).

L’espèce se reproduirait dans le Pacifique Ouest et certains juvéniles migreraient vers le Pacifique Est dans la première ou la deuxième année de leur vie. Ils ne reviendraient dans le Pacifique Ouest que plusieurs années plus tard, pour se reproduire à leur tour (Bayliff, 1994).

L’espèce se distribue dans les eaux subtropicales, entre 50ºN et 45ºS (figure 2.3). Il semble que l’on puisse rencontrer le thon rouge du Pacifique jusqu’à 200 m de profondeur (Mundy, 2005) mais peu d’études ont été menées à ce sujet. Bien qu’il ait été observé dans des eaux où les températures de surface sont entre 12 et 21 ºC, la plupart des captures ont lieu dans des eaux entre 17 et 23 ºC (Bell, 1963 ; Bayliff, 1994).

Figure 2.2 : Distribution du thon rouge de l’Atlantique au niveau

mondial. Les champs colorés illustrent les captures de cette espèce

tous engins confondus (moyenne 1990 – 2007) (source: FAO, 2003).

(28)

2.2.2.4. Le thon rouge du Sud

Le thon rouge du Sud (Thunnus maccoyii) a une taille moyenne de 160 à 200 cm (Silas et Pillai, 1982) pour un poids de 260 kg (Nakamura, 1990) et une longévité moyenne d’une vingtaine d’années (Collette et Nauen, 1983).

C’est une espèce épipélagique des eaux froides océaniques. On la trouve la plupart du temps à des températures entre 5 et 20ºC. Les seules exceptions sont les larves et les individus en fraie qui se distribuent là où les températures de surface sont entre 20 et 30 ºC (Collette et Nauen, 1983).

La distribution du thon rouge du Sud est quasiment circumpolaire et s’étend de 30ºS à 50ºS (figure 2.4). Cette espèce n’en est pas moins l’une des plus migratrice. Les adultes entreprennent des migrations depuis les zones d’alimentation dans les eaux tempérées jusqu’aux zones de reproduction dans l’Océan Indien tropical (Caton, 1991). Les juvéniles ont également un comportement migratoire, et se dispersent depuis les côtes australiennes vers les eaux plus océaniques (Caton, 1991 ; Farley et al., 2007).

Figure 2.3 : Distribution du thon rouge du Pacifique au niveau

mondial. Les champs colorés illustrent les captures de cette espèce

tous engins confondus (moyenne 1990 – 2007) (source: FAO, 2003).

(29)

23 2.2.2.5. L’espadon

La taille maximale observée pour l’espadon (Xiphias gladius) est de 455 cm (IGFA, 2001) pour un poids maximal de 650 kg mais la plupart des individus pêchés en Atlantique pèsent autour de 320 kg (Nakamura, 1985). La longévité maximale des individus de cette espèce est de 15 ans.

L’espadon se distribue entre 45ºN et 45ºS dans les eaux tropicales et tempérées de tous les océans, mais également en Méditerranée (figure 2.5). C’est une espèce que l’on peut retrouver entre 5 et 27 ºC. Toutefois, elle est souvent pêchée dans des eaux où la température de surface est supérieure à 13ºC (Nakamura, 1985). Les individus de grande taille sont rencontrés dans les eaux froides tandis que ceux de moins de 90 kg sont rarement dans des eaux inférieures à 18ºC (Beardsley, 1978).

Figure 2.4 : Distribution du thon rouge du Sud au niveau mondial.

Les champs colorés illustrent les captures de cette espèce tous engins

confondus (moyenne 1990 – 2007) (source: FAO, 2003).

(30)

2.2.2.6. Le listao

Le listao (Katsuwonus pelamis) mesure généralement 80 cm (Collette et Nauen, 1983) mais la taille maximale observée pour cette espèce est de 108 cm. Son poids maximal est de 34,5 Kg et il peut vivre jusqu'à 12 ans (Collette et Nauen, 1983).

Le listao se distribue dans les 3 océans entre 60ºN et 50ºS mais il est plus abondant dans les régions équatoriales et tropicales (figure 2.6), où les individus forment des bancs. Sa distribution verticale est proche de la surface pendant la nuit mais on peut le retrouver jusqu’à 260 m de profondeur durant la journée (Forsbergh, 1980 ; Collette et Nauen, 1983). On retrouve cette espèce où les eaux superficielles sont comprises entre 20 et 30 ºC (Forsbergh, 1980). C’est un thonidé épipélagique rencontré en haute mer, plutôt dans les zones de convergence et autres discontinuités hydrographiques (Collette et Nauen, 1983).

Ses déplacements horizontaux dépendent des conditions ambiantes (température, salinité, nutriments, etc.) et bien que les données de marquage de cette espèce soient récentes, il semble qu’elle ait une forte capacité migratoire, du moins dans l’océan Indien (IOTC, 2008).

Les captures de listao eurent tendance à augmenter pendant toute la période de son exploitation. Il compte pour la plus grande proportion des captures mondiales de thons (figure 2.7) et est l’espèce principalement utilisée pour les conserves.

Figure 2.5 : Distribution de l’espadon au niveau mondial. Les champs

colorés illustrent les captures de cette espèce tous engins confondus

(moyenne 1990 – 2007) (source: FAO, 2003).

(31)

25

Figure 2.7 : Captures mondiales annuelles de thons et poissons à rostre (en milliers de tonnes).

Figure 2.6 : Distribution du listao au niveau mondial. Les champs

colorés illustrent les captures de cette espèce tous engins confondus

(moyenne 1990 – 2007) (source: FAO, 2003).

(32)

2.2.2.7. Le thon obèse

Le thon obèse (Thunnus obesus) est l’une des plus grandes espèces de thonidés. Il représente la troisième espèce la plus importante en termes de poids débarqué (figure 2.8). La taille maximale rapportée est de 250 cm pour un poids de 210 kg (Collette et Nauen, 1983 ; Frimodt, 1995). Cependant, les individus pêchés ont des tailles comprises entre 40 et 170 cm (Fonteneau et Marcille, 1991). La longévité de cette espèce est d’environ 11 ans (Stequert et Marsac, 1989). Les individus sont sexuellement matures aux alentours de 3 ans.

Le thon obèse peuple les eaux océaniques où la température de l’eau est comprise entre 17 et 22 ºC. Son aire de répartition est néanmoins limitée par l’isotherme de surface 12 ºC. Il peuple donc les eaux tropicales et subtropicales des océans Atlantique, Indien et Pacifique (Collette et Nauen, 1983) (figure 2.9). Les adultes peuvent être rencontrés à de plus hautes latitudes que les juvéniles mais la distribution générale de cette espèce se situe entre 60ºN et 50ºS.

La distribution verticale du thon obèse est notamment influencée par la température (Maury, 2005) et les juvéniles évoluent dans un habitat plus superficiel que les adultes (Stequert et Marsac, 1989). On retrouve les individus à des profondeurs pouvant atteindre les 500 m au lever du jour mais ils remontent périodiquement dans les eaux superficielles au cours de la journée afin d’augmenter leur température corporelle. La nuit, il est principalement rencontré dans la couche homogène afin de s’y alimenter (Brill, 1994 ; Brill et al., 2005).

Cette espèce a une haute tendance migratoire, même si les mouvements des adultes n’ont pas

encore été bien étudiés. En fonction des groupes d’âge, l’espèce présente une série de

déplacements saisonniers trophiques ou génétiques (Bard, 1991).

(33)

27

Figure 2.8 : Captures annuelles des principales espèces de thonidés, autres que l’albacore et le listao (en milliers de tonnes).

Figure 2.9 : Distribution du thon obèse au niveau mondial. Les

champs colorés illustrent les captures de cette espèce tous engins

confondus (moyenne 1990 – 2007) (source: FAO, 2003).

(34)

2.2.2.8. L’albacore

L’albacore (Thunnus albacares) est une espèce épi- à méso- pélagique que l’on retrouve dans les eaux équatoriales à subtropicales des 3 océans (Collette et Nauen, 1983).

Dans le Pacifique Est, il est la cible principale des pêcheries des eaux internationales. Les tailles capturées vont de 20 à 180 cm et sa longévité dépasse 10 ans. L’individu le plus grand enregistré mesurait 240 cm et pesait 200 kg (Collette et Nauen, 1983).

Bien que son aire de répartition soit comprise entre 50ºN et 50ºS (figure 2.10), l’albacore est l’espèce de thonidés la plus tropicale puisqu’elle présente un maximum d’abondance entre 30ºN et 30ºS (Sund et al., 1981). Les juvéniles sont rencontrés principalement dans les zones côtières de la région équatoriale mais les adultes se déplacent vers des latitudes plus hautes et des eaux plus océaniques.

La limite de distribution de l’espèce est représentée par l’isotherme 16 ºC mais la reproduction a lieu dans des eaux d’une température supérieure à 26 ºC. Dans l’Atlantique il se répartit autour de la température de 22 ºC (Block et al., 1997 ; Brill et al., 1999).

Verticalement, on les retrouve dans la couche superficielle, au-dessus de 100 m (Sund et al., 1981 ; Kailola et al., 1993 ; Brill et al., 1999). Les individus effectuent toutefois

Figure 2.10 : Distribution de l’albacore au niveau mondial. Les

champs colorés illustrent les captures de cette espèce tous engins

confondus (moyenne 1990 – 2007) (source: FAO, 2003).

(35)

29 épisodiquement des plongées profondes (jusqu’à 250 m, Power et May, 1991), à la recherche de proies. L’albacore est l’espèce de thonidés la plus migratrice (Bard, 1991) avec des déplacements rapides et de grande ampleur.

L’albacore est également la deuxième espèce commerciale de thon (en poids) la plus importante. La plupart des albacores est utilisée pour la mise en conserve, mais de plus en plus des captures sont vendues sur les marchés de poissons frais et congelés. De même que pour le listao, les captures d'albacore ont eu tendance à augmenter pour atteindre maintenant 1,3 millions de tonnes en 2004 (figure 2.7).

2.2.2.9. Le voilier

Le voilier (Istiophorus albicans) mesure généralement entre 160 et 180 cm et atteint un âge maximal de 17 ans (Ortiz et al., 2003).

Le voilier est uniquement rencontré entre 50ºN à 40ºS dans l’océan Atlantique. Il se distribue donc autour des tropiques, dans les eaux subtropicales et tropicales et plus rarement dans les eaux tempérées.

Il se répartit près des côtes continentales, des îles et des récifs, dans les eaux chaudes proches de la surface (10 à 20 m de profondeur, de Sylva, 1974 ; Nakamura, 1985). Ses déplacements semblent liés au mouvement saisonnier de l’isotherme 28 ºC.

Son parcours migratoire est encore mal connu mais il semble se déplacer sur de courtes distances. Le voilier est une cible très prisée des pêcheries sportives du monde entier. Cette espèce représente une prise accessoire des pêcheries commerciales, notamment la palangre, mais il existe également une pêcherie artisanale qui capture et débarque les voiliers.

2.2.2.10. Le makaire blanc

Le makaire blanc (Tetrapturus albidus) est uniquement pêché dans l’Atlantique. Il a généralement une taille comprise entre 150 et 180 cm (Goodyear et al., 2003). Sa longévité maximale observée est de 15 ans (Ortiz et al., 2003). Le plus grand individu signalé pesait 82 kg et mesurait 280 cm (Nakamura, 1985).

Le makaire blanc se distribue dans l’Atlantique entre 55ºN et 45ºS (figure 2.11). Les juvéniles

se distribuent dans les eaux tropicales tandis que les adultes peuplent toutes les eaux. Il évolue

(36)

principalement à moins de 25 m de profondeur et la plupart des descentes s’effectuent entre 100 et 200 m.

Le makaire blanc se retrouve où ses proies se concentrent : dans les fronts océaniques et les hauts-fonds. On le rencontre jusqu’à une centaine de mètres de profondeur dans des eaux dont les températures de surface dépassent 22 ºC. Cependant, cette espèce semble préférer des températures entre 24 et 29 ºC.

Il n’existe pas de pêcherie commerciale visant le makaire blanc mais cette espèce est capturée de manière accidentelle par les palangriers ciblant les thonidés de l’Atlantique.

2.2.2.11. Le makaire bleu

Le makaire bleu (Makaira nigricans) est un des plus grands istiophoridés. Il mesure habituellement entre 180 et 300 cm (Goodyear et Arocha, 2001). Il a une grande longévité puisque les femelles peuvent vivre jusqu’à 27 ans tandis que les mâles ont une longévité de 18 ans (Hill et al., 1989).

Le makaire bleu se réparti entre 50ºN et 45ºS (figure 2.12) et accompli de longs déplacements migratoires. C’est une espèce épipélagique, les individus se distribuent dans les eaux inférieures à 25 m. Les adultes suivent l’isotherme 24 ºC et sont pêchés dans des eaux entre 22 et 31 ºC.

Figure 2.11 : Distribution spatiale du makaire blanc au niveau mondial.

Les champs colorés illustrent les captures de cette espèce tous engins

confondus (moyenne 1990-2007) (source FAO, 2003).

(37)

31 Dans l’Atlantique, il n’existe pas de pêcherie commerciale visant le makaire bleu mais il est tout de même capturé comme prise accessoire par les palangriers et les senneurs ciblant les thonidés.

2.2.3. Les thons et leur environnement

2.2.3.1. Aperçu de l’impact de l’environnement sur les thonidés

Sund et al. ont indiqué en 1981 que les connaissances sur l’écologie des thonidés avaient progressé, passant de la phase descriptive à explicative, mais laissant encore beaucoup de travail à mener dans ces deux domaines. Plus de vingt cinq ans plus tard, bien que les connaissances sur ce groupe se soient grandement étendues, beaucoup reste encore à découvrir.

Ravier et Fromentin (2004) ont mis en évidence que les fluctuations des captures à la madrague sont fortement et négativement liées aux variations de température et peuvent

Figure 2.12 : Distribution spatiale du makaire bleu au niveau mondial. Les

champs colorés illustrent les captures de cette espèce tous engins confondus

(moyenne 1990-2007) (source FAO, 2003).

(38)

également résulter de changements dans les migrations de fraie, attribuables à des modifications dans les conditions océanographiques.

De plus, durant les épisodes El Niño, les fluctuations à grande échelle de pression atmosphérique, du niveau de la mer et des courants influent substantiellement sur la structure (dans le temps et l’espace) de la température de l’eau de l’océan Pacifique. Ces épisodes ENSO altèrent grandement les conditions de pêche des thons du Pacifique. En effet, la warm pool du Pacifique occidental est déplacée pendant les évènements ENSO impliquant notamment un déplacement de la zone de pêche du listao de plus de 6000 km (Lehodey et al., 1997). En outre, les routes migratoires du thon blanc mature - qui vit dans les eaux tempérées du Pacifique nord - s’étendent plus loin durant les années El Niño, en raison de l’apparition d’une région d’eau froide dans le centre et le sud-ouest du Pacifique Nord (Kimura et al., 1997).

Plusieurs études ont montré l’impact du NAO sur le réseau trophique Nord Atlantique (Fromentin et Planque, 1996) tout comme sur la reproduction, la croissance et la distribution spatiale des poissons tels que le hareng, la morue ou les thons (Alheit et Hagen, 1997 ; Bard, 2001 ; Ottersen et al., 2001). Lorsque l’indice NAO est positif, le recrutement moyen du thon rouge est quasiment doublé par rapport à sa valeur pendant les années à NAO négative (Santiago, 1998 ; Borja et Santiago, 2002). Cependant, pour le germon, ces mêmes auteurs indiquent que le recrutement pendant les années à NAO positive est réduit de moitié par rapport aux années à NAO négative.

MacKenzie et Myers (2007) n’ont cependant pas trouvé de lien entre l’augmentation des captures de thon rouge de l’Atlantique dans les eaux de la Baltique entre 1900 et 1950 et le changement de température contemporain de cette dernière. D’un autre côté, le déclin des captures Nord Atlantique de thon rouge et l’augmentation de celles-ci en Méditerranée depuis le début des années 1980 pourraient être interprétés comme un changement dans la taille de la sub-population, en réponse aux variations climatiques et à la surexploitation (Fromentin, 2009). Par ailleurs, le déplacement nord-sud de l'effort de pêche du listao Atlantique est fortement associé à des variations saisonnières de la température de surface (Andrade, 2003).

Il n’y a donc pas de consensus sur la réponse des espèces de thons face au changement

climatique.

(39)

33 2.2.3.2. Rôle des échelles spatiotemporelles

Les échelles spatiotemporelles jouent un rôle important en écologie. Lors de leurs migrations, les thonidés suivent des conditions environnementales spécifiques (Cayré, 1990) impliquant que leur distribution spatiale soit affectée par l’environnement. L’échelle spatiale à laquelle on suppose une intervention du climat dans la répartition spatiale des thons ne peut être séparée de l’échelle temporelle. Le diagramme de Stommel est donc utile à l’étude des effets de l’environnement sur les thonidés puisqu’il caractérise les échelles significatives de la variabilité environnementale (Stommel, 1963 ; Haury et al., 1978). Pour une étude à l’échelle globale, les évènements El Niño ainsi que le réchauffement global sont les variables nécessaires à prendre en considération (figure 2.13).

Le SOI et la NAO sont des variables représentant les variations du climat et de l’océan à grande échelle. Cependant, d’après Lehodey et al. (2006), ces indices sont peut-être trop restrictifs pour expliquer la variation à des niveaux régionaux.

Figure 2.13 : Échelles des phénomènes climatiques : échelles

temporelles caractéristiques et taille des différents évènements (source

Clark, 1985).

(40)

Les populations tendent à suivre les processus environnementaux lorsque le temps de génération des espèces est court vis-à-vis de l’échelle temporelle de la variation environnementale (Clark, 1985 ; Perry et al., 2005 ; Fromentin, 2009). Ainsi, la relation entre les échelles spatiales et temporelles des variations environnementales avec le temps de génération des organismes considérés influence directement l’importance relative des facteurs environnementaux dans les patrons de distribution et d’abondance des populations (Hutchinson, 1953).

2.3. La pêche des thonidés dans le monde

Dans les paragraphes qui suivent, les chiffres concernent exclusivement le marché principal c’est à dire le marché des espèces commercialement les plus importantes. Les différents chiffres sont issus des estimations de la FAO présentées en 2007 (Majkowski, 2007).

2.3.1. Captures par océans

Historiquement, la plus grande proportion de capture de thons a toujours été prise dans l'océan Pacifique (figure 2.14). Entre 1998 et 2002, les captures annuelles dans cet océan sont restées assez stables, à environ 2,5 millions de tonnes. Cela représente environ 65% des captures annuelles mondiales toutes espèces de thons confondues. Dans le Pacifique, le listao et l’albacore contribuent pour environ 86% du total des captures.

Jusqu'au milieu des années 1980, les captures de l'Atlantique et de la mer Méditerranée ont été supérieures à celles de l'Océan Indien mais dans le milieu des années 1980, la tendance s’est inversée. Le transfert de certains navires de l'Atlantique vers l'Océan Indien a contribué à ce changement.

Avant les années 1980, les captures de l'Océan Indien représentaient moins de 8% de la production mondiale des thonidés. À la suite de l'expansion des opérations de pêche thonière dans cet océan (dans les années 1980), les captures de listao et albacore ont rapidement augmenté. Tout comme dans le Pacifique, le listao et l’albacore contribuent pour environ 86%

du total des captures de l’océan Indien.

(41)

35

2.3.2. Importance relative des différents engins de pêche

De nos jours, à échelle industrielle, les thonidés et les poissons à rostre sont généralement capturés par des senneurs (qui réalisent la majorité des prises en termes de poids), des palangriers et des canneurs, sur de vastes étendues des 3 océans. Dans le Pacifique, environ 70% des captures de thons sont réalisées par les senneurs, 10 % par les canneurs et 8% par les palangriers. Dans l'Océan Indien, ces valeurs sont de 45, 15 et 20 % et dans l'Atlantique, 55, 21 et 22 %, respectivement.

La senne et l’appât vivant sont utilisés pour les captures de poissons près de la surface (par exemple le listao et les petits albacores, germons et thons rouges). Les palangres sont utilisées pour pêcher à de plus grandes profondeurs (par exemple les grands thons rouges, thons obèses, albacores, germons et poissons à rostre).

La plupart des pêches de senneurs et canneurs sont pour le marché de la conserve tandis que les prises à la palangre, à l'exception de celles du germon, sont principalement vendues sur le marché du sashimi pour être consommées crues.

L'utilisation de canneurs et palangriers de grande envergure est globalement en baisse, tandis que la senne est de plus en plus utilisée, entraînant une plus grande capture de listao, d’albacore petits à moyens et petits thons obèses, alors que les captures de grands albacores et autres thons, sont restées relativement stables.

Figure 2.14 : Captures de thons par océan (en milliers de tonnes)

(42)

2.3.3. Dynamique des flottilles

La pêche au thon industrielle est extrêmement dynamique et les flottilles, en particulier celles qui pêchent au large, peuvent réagir très rapidement aux changements dans la taille des stocks ou les conditions de marché. Par exemple, au début des années 1980, en raison des faibles taux de capture et des problèmes d'accès aux zones de pêche, de nombreux senneurs français et espagnols de l'Atlantique se sont déplacés vers l'Océan Indien, ce qui a contribué au doublement des captures dans cet océan. Certains de ces navires sont revenus plus tard dans l'Atlantique. De même, en raison de mauvaises conditions océanographiques (El Niño), les senneurs américains se sont déplacés du Pacifique Est vers le Pacifique Ouest dans les années 1980. Entre 1978 et 1984, de nombreux navires se sont également déplacés vers l’Ouest dans le Pacifique et l’Indien, y développant de nouvelles pêcheries.

La production mondiale des thonidés a augmenté assez régulièrement, passant de moins de 200 000 tonnes au début des années 1950 à un pic de 4,3 millions de tonnes en 2003, mais a légèrement baissé en 2004 (figure 2.7). Au début des années 1950, la plupart des captures (environ 80%) se sont faites dans le Pacifique. Entre 1970 et 1978, les captures mondiales ont sensiblement augmenté en raison de l'expansion de la pêche dans l'Atlantique Est et le développement de nouvelles zones de pêche du large dans le Pacifique Oriental.

Dans le milieu des années 1980, les captures des principales espèces de thons ont atteint 2,4 millions de tonnes. En 1994, grâce à de meilleures conditions océanographiques après le transfert des navires, les captures des principales espèces de thons avaient augmenté jusqu’à 3,4 millions de tonnes.

2.3.4. Hypothèses sur les données

Les données commerciales de capture et d’effort, et par conséquent les prises par unité

d’effort (PUE), sont régulièrement utilisées comme estimation de l’abondance des ressources

thonières (Nishida et Fluharty, 1999). Ces indices sont nécessaires à l’évaluation des stocks,

en particulier pour les populations de thonidés pour lesquelles il n’y a quasiment pas d’indice

d’abondance indépendant des pêcheries.

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