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Homo sapiens sapiens L es révélations de l’ADN mitochondrial:une deuxième sortie d’Afriqued’

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450 m/s n° 3, vol. 16, mars 2000

NOUVELLES

médecine/sciences 2000 ; 16 : 450-1

L

es révélations de l’ADN mitochondrial :

une deuxième sortie d’Afrique

d’ Homo sapiens sapiens

Où et quand les hommes modernes ou Homo sapiens sapiens sont-ils appa-rus ? Est-ce l’Afrique le lieu d’ori-gine de notre espèce ? Dans le cas où les hommes modernes seraient apparus en Afrique, quelles routes ont-ils empruntées pour quitter l’Afrique et coloniser le reste des continents ? Toutes ces questions sont sujettes à polémiques. Plusieurs disciplines sont impliquées dans l’étude des origines de l’espèce humaine, mais la contribution de la génétique a été d’une importance capitale pour éclairer de façon révo-lutionnaire l’histoire de nos ori-gines.

Il est indiscutable que la période allant de 300 000 à 50 000 ans avant notre époque représente un stade décisif pour l’apparition de notre espèce. Cette transition fut marquée par différents changements morpho-logiques et technomorpho-logiques, mais les polémiques sont principalement concentrées sur les relations de parenté entre les hommes de type moderne (Homo sapiens sapiens) et nos plus proches ancêtres : Homo erectus et

Homo sapiens archaïque. Deux

grandes théories ont été proposées pour expliquer l’origine de notre espèce : celle de la continuité régio-nale ou « modèle de candélabre » et celle du remplacement rapide, appelé également Out of Africa [1]. D’après le premier modèle, les hommes modernes auraient émergé de façon indépendante et parallèle à partir de plusieurs populations locales d’Homo erectus dans diffé-rentes régions du monde. Ainsi, les hommes modernes actuels auraient un ancêtre commun, âgé d’environ 1 million d’années. Ce modèle s’oppose à celui appelé Out of Africa qui implique que l’Homo sapiens

sapiens serait apparu en Afrique, puis

sorti vers le reste du monde en rem-plaçant les populations autochtones d’Homo erectus. Dans ce cas, notre ancêtre commun serait beaucoup plus récent (100 000-200 000 ans) et originaire d’Afrique.

La théorie du remplacement rapide ou Out of Africa [2], actuellement la plus populaire, s’est trouvée forte-ment confortée par des recherches génétiques qui établissent les rela-tions entre les différentes popula-tions ainsi que le temps qui les sépare les unes des autres. En parti-culier, l’analyse de l’ADN provenant des mitochondries est très en faveur de cette théorie. L’ADN mitochon-drial (ADNmt) possède des caracté-ristiques qui le rendent unique : il est hérité presque exclusivement par la mère et sa fréquence de mutations est 10 fois plus élevée que celle de l’ADN nucléaire. On peut ainsi retracer les lignes maternelles ances-trales de l’espèce humaine et simpli-fier le calcul des distances géné-tiques entre populations, distances à partir desquelles on peut remonter le temps et calculer la date à laquelle deux lignes ont divergé. Grâce à la comparaison de l’ADNmt des diffé-rentes populations humaines, Alan Wilson, Mark Stoneking et Rebecca Cann de l’Université de Berkeley avaient émis, à la fin des années 1980, la « théorie de l’Ève Afri-caine », proche de la théorie de Out

of Africa. Ces chercheurs ont mis en

avant l’idée selon laquelle toutes les populations humaines d’aujourd’hui proviennent d’une même mère ori-ginelle vivant en Afrique, il y a envi-ron 150 000 à 200 000 ans [34]. Plu-sieurs études sur la variation de l’ADNmt dans les populations humaines ont ensuite confirmé que

c’est en Afrique qu’il existe la plus grande diversité génétique et sont donc en faveur d’une apparition de l’homme en Afrique il y a 100 000 à 200 000 ans.

Bien que la théorie Out of Africa ait soulevé des objections et des polé-miques, la plupart des données génétiques situent la racine de l’arbre phylogénétique humain en Afrique, confirmant l’hypothèse selon laquelle les hommes modernes se répandirent dans le monde à partir de l’Afrique.

Cependant, si l’Afrique est le ber-ceau de l’Homo sapiens sapiens, com-ment ce dernier l’a-t-il quitté ? Deux routes de sortie de l’Afrique ont été proposées : l’une à travers le Moyen-Orient et l’autre à partir de l’Éthio-pie vers l’Asie du Sud-Ouest en sui-vant les côtes [1]. D’après les restes fossiles d’hommes modernes trouvés dans les grottes du Mont Carmel en Israël (Skhul/Qafzeh), la première sortie d’Afrique aurait eu lieu il y a environ 100 000 ans [5].

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revanche, cette combinaison est qua-siment absente en Europe et en Afrique [9, 10]. La présence de l’haplogroupe M en Éthiopie peut être le résultat de trois scénarios dif-férents : soit des influences asia-tiques dans le pool génique éthio-pien, soit une ancienne caractéristique africaine exportée vers l’Asie ou soit deux mutations indépendantes ayant touché le même nucléotide. Pour essayer de répondre à cette question, nous avons étudié de nombreuses molé-cules d’ADNmt de l’haplogroupe M en Éthiopie et en Inde par deux approches expérimentales : le séquençage de la région hyperva-riable de l’ADNmt et l’analyse à haute résolution de toute la molé-cule d’ADNmt.

L’étude des degrés de diversité nucléotidique dans les branches éthiopienne et indienne et l’utilisa-tion des fréquences de mutal’utilisa-tion cal-culées pour l’ADNmt nous ont per-mis de dater à environ 50 000 ans la séquence ancestrale des deux branches. De plus, en analysant d’autres mutations associées à la mutation qui définit l’haplogroupe M, nous avons exclu la possibilité d’une double origine de la mutation « M » et démontré une seule origine africaine de cette mutation [11]. La présence de l’haplogroupe M en Éthiopie et en Asie associée à sa quasi-absence chez les populations du Moyen-Orient devient très infor-matif sur les sorties de l’homme moderne d’Afrique (figure 1). Ces données sont en faveur d’une deuxième sortie d’Afrique de l’homme moderne, il y a environ 60 000 ans, et en accord avec l’hypo-thèse selon laquelle les vraies migra-tions hors d’Afrique auraient com-mencé à cette période. La route prise par ces populations partirait de l’Éthiopie et passerait par les côtes de l’Arabie Saoudite vers l’Inde, le Sud-Ouest asiatique et les îles du Pacifique.

Si cette théorie est confirmée par d’autres résultats provenant d’autres locus, l’haplogroupe M deviendrait le premier marqueur génétique démontrant la réalité de cette deuxième route de sortie de l’Afrique des hommes modernes.

Europe Amérique via Béring Asie Sud-Est Asiatique Océanie 300 000 ans 60 000 ans 100 000 ans

Figure 1. Les premières migrations de l’homme moderne. D’après les

don-nées archéologiques, il semblerait que la première sortie de l’Afrique, il y a 100 000 ans par le Moyen-Orient, n’ait pas eu de succès. Grâce à l’étude de l’ADN mitochondrial, on a mis en évidence une deuxième sortie de l’Afrique, il y a 60 000 ans. La route prise par ces populations partirait de l’Éthiopie vers l’Inde en passant par les côtes. En prenant l’ensemble de ces résultats, il est probable que la majorité des populations actuelles eurasiennes pro-vienne de cette deuxième sortie plus récente.

1. Cavalli-Sforza LL, Menozzi P, Piazza A. The

his-tory and geography of human genes. Princeton:

Prin-ceton University Press, 1994.

2. Lewin R. Africa: cradle of modern humans.

Science 1987 ; 237 : 1292-5.

3. Cann RL, Stoneking M, Wilson AC. Mitochon-drial DNA and human evolution. Nature 1987 ; 325 : 31-6

4. Quintana-Murci L, Veitia R, Santachiara-Bener-cetti S, McElreavey K, Fellous M, Bourgeron T. L’ADN mitochondrial, le chromosome y et l’histoire des populations humaines. Med Sci 1999 ; 15 : 974-82. 5. Stringer CB, Grün R, Schwarcz HP, Goldberg P. ESR dates for the hominid burial site of Skhul in Israel. Nature 1989 ; 338 : 756-8.

6. Stringer CB. Neanderthals, their contempora-ries, and modern human origins. In: Giacobini G, ed. Hominidae. Milan : Jaca Book, 1989.

7. Lahr MM, Foley R. Multiple dispersal and modern human origins. Evol Anthropol 1994 ; 3 : 48-60. 8. Passarino G, Semino O, Quintana-Murci L, Hammer M, Excoffier L, Santachiara-Benerecetti AS. Different genetic components. In the Ethio-pian population, identified by mtDNA and Y-chro-mosome polymorphisms. Am J Hum Genet 1998 ; 62 : 420-34.

9. Torroni A, Schurr TG, Cabell MF, et al. Asian affinities and continental radiation of the four founding Native American mtDNAs. Am J Hum

Genet 1993 ; 53 : 563-90.

10. Chen YS, Torroni A, Excoffier L, Santachiara-Benerecetti AS, Wallace DC. Analysis of mtDNA variation in African populations reveals the most ancient of all human continent-specific haplo-groups. Am J Hum Genet 1995 ; 57 : 133-49. 11. Quintana-Murci L, Semino O, Bandelt HJ, Passarino G, McElreavey K, Santachiara-Benere-cetti AS. Genetic evidence of an early exit of

Homo sapiens sapiens from Africa through eastern

Africa. Nat Genet 1999 ; 23 : 437-41.

N O U V E L L E S

Lluis Quintana-Murci

Références

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