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La puissance paternelle au XIXe siècle ( )

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Academic year: 2022

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La puissance paternelle au XIXe siècle (1804-1889)

Johanne Melcare-Zachara

To cite this version:

Johanne Melcare-Zachara. La puissance paternelle au XIXe siècle (1804-1889) : Étude du titre IX et X du Code civil (1804-1889). Droit. Université de Nantes, 2019. Français. �tel-02963691v2�

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THÈSE PRÉSENTÉE POUR OBTENIR LE GRADE DE

DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ DE NANTES

ÉCOLE DOCTORALE DE DROIT (ED 501) SPÉCIALITÉ HISTOIRE DU DROIT

Par Johanne MELCARE-ZACHARA

LA PUISSANCE PATERNELLE AU XIXe SIÈCLE

Étude du titre IX et X du Code civil

(1804 – 1889)

Sous la direction de M. Grégoire BIGOT Professeur à l’Université de Nantes

Soutenue publiquement le 14 novembre 2019

Membres du jury : M. BIGOT Grégoire

Professeur à l’Université de Nantes, directeur de thèse Mme FIORENTINO Karen

Professeur à l’Université de Bourgogne, rapporteur M. GODIN Xavier,

Professeur à l’Université de Nantes, président du jury Mme LEVELEUX-TEIXEIRA Corinne

Professeur à l’Université d’Orléans, rapporteur

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REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier Monsieur BIGOT, Professeur à l’Université de Nantes, qui nous a encadré pendant nos travaux de recherche. Nous sommes ravis d’avoir travaillé en sa compagnie car outre son appui scientifique, il a toujours été là pour nous soutenir et nous conseiller au cours de l’élaboration de cette thèse.

Nous exprimons toute notre reconnaissance à Mme Le Professeur Corinne LEVELEUX-TEIXERA et Mme Le professeur Karen FIORENTINO qui nous font l’honneur d’être rapporteur de cette thèse.

Nous adressons nos sincères remerciements à M. Le Professeur Xavier GODIN pour avoir accepté de participer à ce jury.

Il nous est impossible d’oublier l’ensemble de nos enseignants- chercheurs en histoire du droit de l’Université Montesquieu Bordeaux IV, M. Le Professeur Michel VIDAL, M. Le Professeur Marc MALHERBE, M. Le Professeur Gérard GUYON, Mlle Emmanuelle BURGOT, maître de conférences, qui nous ont soutenu pendant nos études et nous ont transmis la passion pour l’histoire du droit.

Nous remercions chaleureusement M. Pierre-Nicolas BARENOT, maître de conférences en histoire du droit à l’Université Jean Monnet de Saint-Étienne, avec qui nous avons partagé nos études de droit, pour ses nombreux conseils tout au long de cette thèse.

Nos parents, pour leur soutien constant et leurs encouragements.

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5 SOMMAIRE

PARTIE I : LA PUISSANCE PATERNELLE, FONDEMENT DU POUVOIR POLITIQUE

TITRE I - LE CODE NAPOLEON : UN RENFORCEMENT DE LA PUISSANCE PATERNELLE GARANTE D’UN POUVOIR POLITIQUE FORT

Chapitre 1- L’autorité d’un chef, une véritable magistrature paternelle Chapitre 2 – La force d’une autorité souveraine

TITRE II – L’INTERVENTIONNISME DU POUVOIR POLITIQUE AU SEIN DE LA SPHÈRE PRIVÉE

Chapitre 1 – Le droit de correction

Chapitre 2 – La puissance paternelle des parents d’enfants naturels légalement reconnus

PARTIE II : UNE PUISSANCE PATERNELLE AFFAIBLIE PAR UN NOUVEL ORDRE POLITIQUE

TITRE I – LA SURVEILLANCE DU PATRIMOINE FAMILIAL

Chapitre 1 – La protection de l’édifice social

Chapitre 2 – Les legs et donations accordés aux enfants de famille

TITRE II – UN RÔLE D’ADMINISTRATEUR DES BIENS DE L’ENFANT

Chapitre 1 – L’administration légale

Chapitre 2 – La tutelle, objet de défiance à l’égard du conjoint survivant

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PRINCIPALES ABRÉVIATIONS

Ass. :

Assemblée

Bull. :

Bulletin

Bull. civ. :

Bulletin civil de la Cour de cassation

Bull. crim. :

Bulletin des arrêts de la Chambre criminelle

CA. :

Cour d’appel

C. Cass :

Cour de cassation

C. civ. :

Code civil

C. Nap. :

Code napoléon

CP :

Code pénal

CPC :

Code de procédure civile

d. :

Décret

D. :

Recueil de jurisprudence Dalloz

Dev. :

Recueil Devilleneuve

D. H. :

Dalloz hebdomadaire (fin de publication en 1941)

D. P. :

Dalloz périodique (Idem)

Dr. :

Droit

Ex. :

Exemple

Gaz. Pal. :

Gazette du Palais

p. :

Page de livre ou de revue

Pal. :

Jurisprudence du Palais

Req. :

Requête (ancienne Chambre de la Cour de cassation)

Trib. :

Tribunal suivi du lieu où siège la juridiction

TGI :

Tribunal de Grande instance

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

- Introduction

« La plupart des législateurs ont été des hommes bornés, que le hasard a mis à la tête des autres et qui n’ont presque consulté que leurs préjugés et leurs fantaisies. Il semble qu’ils aient méconnu la grandeur et la dignité même de leur ouvrage : ils se sont amusés à faire des institutions puériles, avec lesquelles ils se sont à la vérité conformés aux petits esprits, mais décrédités auprès des gens de bon sens. Ils se sont jetés dans des détails inutiles ; ils ont donné dans les cas particuliers : ce qui marque un génie étroit qui ne voit les choses que par parties, et n’embrasse rien d’une vue générale. Quelques-uns ont affecté de se servir d’une autre langue que la vulgaire ; chose absurde pour un faiseur de lois : comment peut-on les observer, si elles ne sont pas connues ? Ils ont souvent aboli sans nécessité celles qu’ils ont trouvées établies ; c’est-à-dire qu’ils ont jeté les peuples dans les désordres inséparables des changements. Il est vrai que, par une bizarrerie qui vient plutôt de la nature que de l’esprit des hommes, il est quelquefois nécessaire de changer certaines lois. Mais le cas est rare ; et lorsqu’il arrive, il n’y faut toucher que d’une main tremblante : on y doit observer tant de solennités et apporter tant de précautions que le peuple en conclue naturellement que les lois sont bien saintes, puisqu’il faut tant de formalités pour les abroger.

Souvent ils les ont faites trop subtiles, et ont suivi des idées logiciennes plutôt que l’équité naturelle. Dans la suite, elles ont été trouvées trop dures ; et, par un esprit d’équité, on a cru devoir s’en écarter : mais ce remède était un nouveau mal. Quelles que soient les lois, il faut toujours les suivre et les regarder comme la conscience publique, à laquelle celle des particuliers doit se conformer toujours. Il faut pourtant avouer que quelques-uns d’entre eux ont eu une

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attention qui marque beaucoup de sagesse ; c’est qu’ils ont donné aux pères une grande autorité sur leurs enfants : rien ne soulage plus les magistrats ; rien ne dégarnit plus les tribunaux ; rien enfin ne répand plus de tranquillité dans un État, où les mœurs font toujours de meilleurs citoyens que les lois. C’est, de toutes les puissances, celle dont on abuse le moins ; c’est la plus sacrée de toutes les magistratures ; c’est la seule qui ne dépend pas des conventions, et qui les a même précédées. On remarque que, dans les pays où l’on met dans les mains paternelles plus de récompenses et de punitions, les familles sont mieux réglées : les pères sont l’image du créateur de l’univers, qui, quoiqu’il puisse conduire les hommes par son amour, ne laisse pas de se les attacher encore par les motifs de l’espérance et de la crainte. Je ne finirai pas cette lettre sans te faire remarquer la bizarrerie de l’esprit des François. On dit qu’ils ont retenu des lois romaines un nombre infini de choses inutiles et même pis ; et ils n’ont pas pris d’elles la puissance paternelle, qu’elles ont établie comme la première autorité légitime1 ».

- Définition de la puissance paternelle

La puissance paternelle est un attribut délégué par la loi au père de famille sur la personne et les biens de son enfant. Elle peut s’entendre également comme étant une autorité supérieure. L’article 373 du Code civil daté du 24 mars 1803 précise que seul le père exerce l'autorité sur les enfants.

1 Montesquieu, « Lettres persanes » (1721), Texte établi par André Lefèvre, A. Lemerre, 1873, pp.

174-176.

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Elle est l’une des plus anciennes puissances2. Les premières sociétés sont, d’abord, composées de plusieurs familles dirigées par un seul et même chef.

Magistrat et protecteur, il n’est concurrencé par aucune autre autorité3.

Le droit naturel4 permet au père d’étendre ses prérogatives sur son enfant, mais le droit des gens5 l’accepte tout autant. L’autorité du père sur son enfant est plus ou moins étendu selon les pays et les traditions6.

Comme l’individu ne demeure pas dans un état infantile toute sa vie, les pouvoirs du père évoluent aussi avec le temps. L’ampleur de ses prérogatives dépendent, bien évidemment, des périodes de l’histoire.

D’ailleurs, Justinien rappelle que la patria potestas7 est propre aux Romains. Aucun autre peuple n’adopte ce système patriarcal. La particularité de

2 Sur ce sujet, V° F. DAUCE, Évolution de l’autorité du père sur l’enfant légitime, thèse, Paris, 1940, p.

75 ; J.-B. BOSSET, Politique tirée des propres paroles de l’Écriture Sainte, Coignard, Paris, 1748, t. 1., 10.

3 Cf. N. HAILLANT, L’Autorité paternelle dans l’histoire du droit, Imp. N. Collin, Saint-Nicolas et Nancy, 1873, p. 7.

4 S. BRAUDO, Dictionnaire du droit privé, Decitre, Paris, 2018, Tome I, p. 25 : « Les règles de droit contenues dans les Lois, les Décrets et les règlements, celles qui sont tirés des acquis de la jurisprudence et des travaux de la doctrine appartiennent au "droit positif". Le droit naturel s'oppose au droit positif, qui est le droit en vigueur, qui est modifié en fonction de l'évolution des mœurs. Le droit naturel est l'ensemble des droits que chaque individu possède du fait de son appartenance à l'humanité et non du fait de la société dans laquelle il vit. Le droit naturel, qui comprend notamment, le droit à la vie, et à la santé, le droit à la liberté, comme le droit de propriété ; il est inhérent à l'humanité, universel et inaltérable, alors même qu'il n'existe aucun moyen concret de le faire respecter. »

5 M. FABRE-MAGNAN, Introduction générale au droit, P.U.F, Paris, 2018, Tome I, p. 48 : « Le jus civile (droit civil) désignait l'ensemble du droit des citoyens romains, droit public ou droit privé, par opposition au jus gentium (le droit des gens), droit des autres nations de l'Empire. »

6 V° E., BECCHI, « L’Antiquité », in Histoire de l’enfance en Occident, Le Seuil, Paris, 1998, Tome 1, pp. 43-73. ; Pour une bibliographie sur le sujet, cf. V., DANSEN, « Antiquité gréco-romaine », Annales de démographie historique, 2001/2, n°102, p. 16.

7 Puissance paternelle

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la puissance paternelle telle qu’elle est pratiquée chez les Romains réside dans son caractère perpétuel, étendu et illimité sur les membres du foyer. Tant que le fils de famille vit, il demeure sous l’autorité du père8. Celui-ci peut le laisser vivre, le corriger9, le tuer10 ou bien le vendre11. Tout ce que le fils obtient par lui-même revient au père12. Ces différentes prérogatives évoluent avec le temps tout comme les États13.

8 V° H. ANKUM, « La position juridique du filius familias mineur en droit romain classique » paru dans les Mélanges Felix Wubbe (Fribourg, Éditions universitaires de Fribourg, 1993, p. 1) ; Y.

THOMAS, « Droit domestique et droit politique à Rome. Remarques sur le pécule et les honores des fils de famille », publié dans les Mélanges de l’École française de Rome. Antiquité (t. 94, 1982, p.

527) ; J.-C. DUMONT, « L’imperium du pater familias », paru dans Parenté et stratégies familiales dans l’Antiquité romaine (Rome, École française de Rome, 1990, p. 475) ; J. GAUDEMET, « Parents et enfants dans la doctrine patristique et la législation conciliaire du Bas Empire », publié dans les Études d’histoire du droit privé offertes à Pierre Petot (Paris, LGDJ, 1959, p. 223) ; M. HIRT, « La législation romaine et les droits de l’enfant », paru dans Naissance et petite enfance dans l’Antiquité (Fribourg, Göttingen, Academic Press / Vandenhoeck et Ruprecht, 2004, p 281) ; G. MATRINGE,

« La puissance paternelle et le mariage des fils et filles de famille en droit romain », publié dans les Studi in onore di Eduardo Volterra (V, Milan, Giuffrè, 1971, p. 191).

9 V° J.-M. CARBASSE, « La correction domestique, vis licita. Du droit romain au droit de la France méridionale (XIIe – XIVe siècle), publiée dans Histoires de famille. À la convergence du droit pénal et des liens de parenté (Limoges, PULIM, 2012, p. 17).

10 T. HOBBES, Léviathan, Dalloz, 1999, Paris, t. 1, p. 32.

11 Sur ce sujet, V° D. LHUILLIRT-MARTINETTI, L’individu dans la famille à Rome au IVe siècle d’après l’oeuvre d’Ambroise de Milan, P.U.R., Rennes, 2008, p. 183 et s. Le droit de vendre l’enfant sera affaibli avec le temps pour n’être légal qu’en cas d’extrême misère du père, puis limité à nouveau par CONSTANTIN aux nouveau-nés ; P.-F, GIRARD, Manuel élémentaire de droit romain, 1895, réédition présentée par Jean-Philippe LÉVY, Dalloz, 2003, p. 153.

12 P. VEYNE, « L’Empire romain », in Histoire de la vie privée, éd. Seuil, Paris, Tome 1, DL 1985, p.

23 ; J.-P. NÉRAUDAU, « L’enfant dans la culture romaine », in Histoire de l’enfance en Occident, Tome 1, p.99 ; V. Le GRAND, « La naissance de l’enfant dans l’histoire des idées politiques », CRDF, 2006, n°5, pp. 14-15.

13 Sur ce point, v° J. BART, Histoire du droit privé de la chute de l’Empire romain au XIXe siècle, Montchrestien, 2009, Paris, Tome I, p. 2 : « Toute société produit des normes dont le respect assure sa solidité et sa durée. Alors que le droit dit public concerne l'organisation du groupe humain dans son ensemble, comme celle de la cité ou de l'Etat, le droit dit privé englobe les règles qui régissent les rapports des personnes entre elles. ainsi que les rapports entre les personnes et les choses. En ce domaine, le système juridique qui structure la société d'aujourd'hui est le fruit d’une longue évolution. »

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Dans les pays de droit écrit, la puissance paternelle est régie par le dernier état du droit romain14, à de rares exceptions près15. C’est ainsi que le fils ne peut s’obliger pour cause de prêt, même s’il est majeur. Il est également interdit pour un enfant de tester, sauf en ce qui concerne le pécule castrense16 et quasi castrense17. Quant au père, il peut disposer des biens que l’enfant acquiert et tout ce que le père donne au fils ne l’est que provisoirement. Si le fils vient à être émancipé, le père continue à user de ses biens pour moitié18. Il en est de même des biens dévolus aux enfants par le prédécès de la mère.

La puissance paternelle s’achève en cas d’émancipation, de mort naturelle ou civile du fils de famille. Mais d’autres moyens mettent fin à la puissance paternelle. C’est ainsi que les premières dignités de la Cour et de l’épée émancipent. Seuls les évêques sont concernés par les dignités ecclésiastiques. Les

14 Sur ce sujet, V° J. POUMARÈDE, « Puissance paternelle et esprit communautaire dans les coutumes du Sud-Ouest de la France au Moyen-Âge », publié dans les Mélanges Roger Aubenas (Recueil de mémoires et de travaux publiés par la Société d’histoire du droit et des institutions des anciens pays de droit écrit, Montpellier, fasc. IX, 1974, p. 651), « La puissance paternelle en pays de droit écrit d’après la jurisprudence du Parlement de Toulouse (XVIe – XVIIIe siècles) », paru dans Le droit de la famille en Europe (précité, p. 443) [ces deux articles ont été repris dans Itinéraires d’un historien du droit. Jacques Poumarède, regards croisés sur la naissance de nos institutions (Toulouse, CNRS / Université de Toulouse-Le Mirail, 2011, p. 111 et 177 ; « Les tribulations de l’autorité paternelle de l’ancien droit au Code Napoléon », publié dans les Annales de l’Université des sciences sociales de Toulouse (t. XLII, 1994, p. 17).

15 V° Notamment P. PETOT, La famille, Loysel, Paris, 1992, Tome I, p. 4 ; R. AUBENAS, Cours d'histoire du droit privé : anciens pays de droit écrit, Pensée universitaire, Paris, 1956, Tome I, p. 23.

16 A. DAIN, Sur le « peculium castrense ». In : Revue des études byzantines, tome 19, 1961, p. 234 : « Le peculium castrense représente l’ensemble des biens acquis à l’occasion du service militaire (ou provenant d’un frère d’armes, voire de la succession de l’épouse d’un soldat) ; ces biens sont considérés comme un patrimoine appartenant en propre au fils de famille. »

17 Ibid. : « Le peculium quasi-castrense, assimilé au précédent depuis Justinien, est l’ensemble des biens constitués par les traitements ou honoraires et les donations impériales dont bénéficient les fils de famille occupant une fonction à la cour. »

18 Le tiers des biens en propriété, d’après la loi de Constantin. Mais Justinien, réduit ce tiers à la moitié en usufruit.

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avocats généraux, procureurs et autres présidents bénéficient également de ce privilège.

Dans les pays de droit coutumier19, la puissance paternelle est variée et bien différente de celle du droit écrit20. Si l’enfant n’habite plus au domicile paternel, cette situation ne met pas un terme à la puissance paternelle.

Néanmoins, cela dépend des coutumes. Quant au mariage, il paraît émanciper dans les pays de droit coutumier mais pas dans ceux de droit écrit21.

Si dans les pays de droit coutumier, la puissance paternelle est distincte de celle existant dans les pays de droit écrit, il apparaît que certaines pratiques émanent plus du droit romain que des usages. Par exemple, d’après la coutume de Bretagne, le fils mineur reste soumis à la puissance du père de famille tant qu’il n’a pas contracté mariage22. Ici, il n’y a pas de limite d’âge. Pour ce qui est des biens acquis par l’enfant, le père en a la jouissance légale23. Quant à la coutume d’Auvergne, elle permet au fils d’agir en justice, indépendamment de l’avis du père. Quant à ses biens, ils demeurent soumis à la jouissance du père.

19 C’est ainsi que d’après la coutume de Berri, les enfants sont soumis à la puissance paternelle jusqu’à 25 ans mais le mariage peut émanciper avant. Quant à la coutume de Montargis, elle permet de rester en puissance jusqu’à 20 ans. Seul le mariage émancipe, encore, l’enfant, avant.

De même pour les coutumes de Reims et de Châlons.

20 V° J. BART, « Le père absolu, Du père à la paternité. Question cruciale pour la protection maternelle et infantile », publié dans Du droit de la province au droit de la nation (Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 2003) ; R. GANGHOFFER, Le droit de la famille en Europe (Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, 1992) ; J. YVER, « Coutume et droit écrit. La puissance paternelle en Poitou » paru dans les Mélanges Pierre Tisset (Recueil de mémoires et de travaux publiés par la Société d’histoire du droit et des institutions des anciens pays de droit écrit, Montpellier, fasc. VII, 1970, p. 473).

21 Une exception est faite, ici, pour les pays de droit écrit du ressort du parlement de Paris.

22 Il en est, de même, pour la coutume de Poitou.

23 G. LEPOINTE, Histoire des institutions et des faits sociaux. Paris, Montchrestien, 1956. Éléments de bibliographie sur l'histoire des institutions et des faits sociaux. Paris, Montchrestien, 1958. — Droit romain et ancien droit français : Régimes matrimoniaux, libéralités, successions.

Paris, Montchrestien, 1958. In : Bibliothèque de l'école des chartes. 1959, tome 117. pp. 336-339.

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La puissance paternelle apparait, en définitive, comme un statut personnel plaçant l’enfant sous la dépendance de son père. Selon la loi du pays de naissance, l’étendue de ses droits est plus ou moins limitée24. Cette autorité du père sur le fils de famille est tout autant un statut réel puisqu’il attribue au père de famille des droits sur la personne et les biens de son enfant.

- Contexte

La puissance paternelle n’est pas un concept transhistorique qui aurait traversé les siècles sans changer. C’est au contraire une notion d’interface entre la famille et l’État. À ce titre, elle est au cœur de transformations majeures affectant chacun de ces deux pôles tout comme les liens qui les unissent et parfois les opposent. La famille change. La gens romaine qui a construit la patria potestas autour du culte des ancêtres, de la puissance virile et du droit de citoyenneté, n’a que très peu de points communs avec la famille nucléaire qui s’affirme en France avec l’industrialisation du pays25 et un exode rural massif. Quant à l’État, il n’est pas en reste dans ce processus dynamique de mutations signifiantes. Il s’affirme en effet de plus en plus, depuis le XVIe siècle, comme le gardien des familles, leur tuteur, voire leur instance de surveillance et de contrôle. De ce point de vue, un parallèle entre le Code civil et le développement de l’école primaire au cours du XIXe siècle (notamment avec les lois Guizot) est souligné par les contemporains,

24 V° J. GAUDEMET, Introduction historique au droit : XIIIe-XXe siècles, L.G.D.J., Paris, 2000, Tome I, p. 9 ; A. LEFEBVRE-TEILLARD, Introduction historique au droit des personnes et de la famille, PF, Paris, 2000, Tome I, p. 14.

25 V° R. SZRAMKIEWICZ, Histoire du droit des affaires, L.G.D.J., Paris, 2019, Tome I, p. 5.

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autour de l’idée d’un investissement croissant de la puissance publique dans l’éducation des enfants aux dépens de l’autorité du père26.

- Problématique

Même si le Code Napoléon de 1804 a contribué à la renaissance de la puissance paternelle, celle-ci est régulièrement contestée tout au long de ce siècle.

Quant à l’État, il s’avère de plus en plus interventionniste au sein de la sphère familiale. Le mineur bénéficie également d’une attention particulière, notamment de la part de l’autorité judiciaire. On remarque, cependant, qu’aucune modification significative n’a été apportée à la puissance paternelle jusqu’en 1889, date à laquelle a été adoptée la première loi importante sur la protection de l’enfant27.

Mais alors quelle est l’évolution générale de la puissance paternelle au

XIXe siècle ?

Pour étudier sa transformation, nous verrons, d’abord, que le XIXe siècle est assez contradictoire en soi. En effet, même s’il cherche à construire un nouvel ordre public familial, les actions menées restent dans la droite ligne de celles déjà initiées par l’Ancien Régime : la législation relatée pendant cette période témoigne d’un renforcement des prérogatives du père sur ses enfants tout

26 Sur ce sujet, V° J.-P. Lévy et A. CASTALDO, Histoire du droit civil, Dalloz, Paris, 2010, Tome I, p. 220 ; A. LECA, Introduction historique au droit de la famille, LexisNexis, Paris, 2017, Tome I, p. 32.

27 Sur ce sujet, V° D. DARYA VASSIGH, « L'action juridique en faveur des enfants maltraités dans la deuxième moitié du XIXe siècle », Criminocorpus, Justice des mineurs, mis en ligne le 06 juillet 2012, URL : http://journals.openedition.org/criminocorpus/1912.

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comme le roi sur ces sujets qui parfois se substituent au père de famille28. Ces acquis rentrent pourtant en confrontation avec les idéaux des révolutionnaires29 : les manuels consacrés à cette époque reflètent une ambition, celle d’imposer aux familles les idéaux démocratiques30 (liberté, égalité31, fraternité). Les lois adoptées seront particulièrement hostiles au père de famille32.

Le droit révolutionnaire se révèle être un échec politique conduisant inévitablement à sa disparition33. Le Directoire abolit les textes révolutionnaires

28 F.A. ISAMBERT, Recueil général des anciennes lois françaises, depuis l’an 420, jusqu’à la Révolution de 1789, Belin-Leprieur, Paris, 1821-1833, 29 vol.

29 J. Poumarède, La législation successorale de la Révolution entre l'idéologie et la pratique, in I.

Théry et C. Biet (dir.), La Famille, la Loi, l'État de la Révolution au Code civil, Éditions du Centre Georges Pompidou/Imprimerie nationale Éditions, p.167, 1989.

30 V° I. THERY, La Famille, la Loi, l'Etat. De la Révolution au Code civil, Centre Georges Pompidou, Paris, 1989, 1 vol, v° notamment M. GARAUD, La Révolution française et la famille, P.U.F, Paris, 1978, 1 vol ; M.-F. LÉVY, L'enfant, la famille et la Révolution française, Plon, Paris, 1 vol.

31 La mise en œuvre de la loi du 17 nivôse en II a donné lieu à plusieurs articles : J. FERRAND,

« Les stratégies successorales dauphinoises à l’épreuve de la législation révolutionnaire ou l’impossible régénération des mœurs par la loi », paru dans la Revue d’histoire du droit française et étranger, t. 79, 2001, p. 293. ; O. DEVAUX, « À propos de la transmission du patrimoine : la loi du 17 nivôse an II », publié dans Propriété et Révolution, CNRS, Paris, 1989, p. 99. ; J. GOY, « Entre philosophie et réalisme politique : le bonheur par l’égalité successorale (1750-1804) », paru dans Le bonheur est une idée neuve. Hommage à Jean Bart, Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 2000, p.

253 ; J. POUMARÈDE, « La législation successorale de la Révolution entre l’idéologie et la pratique », publié dans La famille, la loi, l’État ; de la Révolution au Code civil, imprimerie nationale, Paris, 1989, p. 167 ; R. VILLERS, « Les premières lois successorales de la Révolution (1790-1792) », paru dans La Révolution et l’ordre juridique, t.1, p. 335.

32 Robespierre, cf B. SCHNAPPER, « Liberté, égalité, autorité : la famille devant les assemblées révolutionnaires 1790-1800 » in L’enfant, la famille et la Révolution, p. 333.

33 Au sein de l’ample bibliographie traitant de la question, v° notamment J.-L. HALPÉRIN, « Le droit privé de la Révolution : héritage législatif et héritage idéologique », Annales historiques de la Révolution française, n° 328, 2002, pp. 135-151 ; Ph. SAGNAC, La législation civile de la Révolution française (1789-1804), Hachette, Paris, 1898, pp. 213-29, et pp. 347-355 ; J. BART, « L’égalité entre héritiers dans la région dijonnaise à la fin de l’Ancien Régime et sous la Révolution », paru dans les Études en souvenir de Georges Chevrier, MSHDB, t. 29, 1968-1969, p. 65 ; J.-J. CLÈRE, « De la Révolution au Code Révolution au Code civil ; les fondements philosophiques et politiques du droit des successions », MSHDB, t. 43, 1986, p. 7 ; F. FORTUNET, « Connaissance et conscience

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adoptés sous la Constituante et la Convention. Cette période est peu productive en matière de législation consacrée à la famille. Nous démontrerons ensuite que le Consulat aspire au renouveau de la puissance paternelle, les lois révolutionnaires l’ayant anéantie, ainsi que la famille traditionnelle34.

Nous étudierons la période napoléonienne où la puissance paternelle et la famille sont réglés par le code civil. Guidé par les aspirations de Napoléon Bonaparte, les pouvoirs du père sont renforcés dans un État fort. Les nouvelles lois adoptées sur la puissance paternelle vont faire l’objet de nombreux débats au cours du dix-neuvième siècle. Nous les analyserons à travers le recueil Fenet et les ouvrages doctrinaux.

Enfin, nous constaterons que cette autorité paternelle devient finalement une puissance tutélaire, protectrice, qui a pour but l’éducation physique et morale de l’enfant35. Si les parents abusent de leur pouvoir, ce sont des considérations de justice qui justifieront « qu’en pareil cas, l’intérêt de l’enfant exige que cette autorité passe en d’autres mains. L’intérêt social l’exige aussi : l’autorité paternelle exercée comme elle doit l’être est une garantie de bon ordre dans la société et un auxiliaire de la puissance publique »36.

juridique à l‘époque révolutionnaire en pays de droit coutumier : la législation successorale », publié dans La Révolution et l’ordre juridique privé, rationalité ou scandale ?, Presses universitaires de France, Paris, 1988, t. 1, p. 365, « De l’égalité dans la différence : les enfants dans le droit révolutionnaire », L’enfant, la famille et la Révolution française, Plon, Paris, 1990.

34 A. BURGUIÈRE, La Révolution et la famille. In : Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 46ᵉ année, n° 1, 1991, pp. 151-168.

35 V° J. ROHR, Victor DURUY, ministre de Napoléon III, Essai sur la politique de l’instruction publique au temps de l’Empire libéral, LGDJ, Paris, 1967, t. 1, p. 139 ; M. OZOUF, L’école, l’Église et la République 1871-1914, Cana, Paris, 1982, t. 1, p. 69.

36 I. MAUS, Commentaire de la loi du 15 mai 1912 sur la protection de l’enfance, L. Larose, Paris, 1912, Tome I, p. 25 : « En pareil cas, l’intérêt de l’enfant exige que cette autorité passe en d’autres mains.

L’intérêt social l’exige aussi : l’autorité paternelle exercée comme elle doit l’être est une garantie de bon ordre dans la société et un auxiliaire de la puissance publique ».

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En conclusion, nous essaierons de prouver que la puissance paternelle au XIXe siècle a été un instrument pour le pouvoir politique en place, ce qui a conduit à son affaiblissement du fait notamment de l’immixtion répétée de l’État dans la sphère privée.

- Méthodologie

Nos recherches ont commencé par l’étude du Recueil FENET afin de mieux appréhender le Code Napoléon et pouvoir l’interpréter. Les comptes rendus des commissaires du gouvernement nous ont semblé les plus intéressants puisqu’ils développent des analyses juridiques précises qui permettent de comprendre les enjeux tels que la nécessaire modification de la législation existante.

Ensuite, nous avons étudié la jurisprudence par le biais du Journal du Palais, publié par F.- F. PATRIS ; du Recueil Dalloz, publié par M. DALLOZ aîné et A. DALLOZ ; du Recueil Sirey, publié par J.-B. SIREY de 1800 à 1830, puis par L.M. DEVILLENEUVE et A.A. CARETTE à compter de 1831 ; du Répertoire de la jurisprudence du notariat, publié par J. J. DE VILLARGUES ; et à l’aide du Bulletin des arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation publié par le directeur des affaires criminelles et des grâces.

Enfin, nous avons analysé la doctrine. Ici, l’étude des auteurs du

XIXe siècle a permis de structurer nos recherches. En effet, la puissance paternelle recouvre de nombreux thèmes et est en lien tant avec le droit civil qu’avec le droit pénal ou les règles procédurales. Nos recherches démontreront, d’ailleurs, qu’elle relève également du domaine du droit international privé.

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Nous avons remarqué, en outre, que quelques auteurs récents ont publié des articles sur la protection de l’enfance37 au XIXe siècle, mais nombreux sont ceux qui s’intéressent davantage à d’autres périodes de l’histoire. Inversement, nous avons constaté un plus grand nombre d’ouvrages et de publications en ce qui concerne le droit de correction38.

37 Sur ce point v° notamment J.-M. ROHRBASSER, C. ROLLET, Les enfants au XIXe siècle, In : Population, 57ᵉ année, n°1, 2002. pp. 213-216 ; J. TURGEON, « L’autorité parentale et l'intérêt de l'enfant » dans Le droit dans la vie familiale, Livre du Centenaire du Code civil, textes présentés par J. BOUCHER et A. MOREL, Montréal, Presses de l'Université de Montréal, 1970, p. 768 ; A.

ARMENGAUD, L'attitude de la société à l'égard de l'enfant au XIXe siècle. In : Annales de démographie historique, 1973. Enfant et Sociétés. pp. 303-312 ; C. DE AYALA, « L’histoire de la protection de l'enfance », Le Journal des psychologues, vol. 277, no. 4, 2010, pp. 24-27.

38 V° A. DESRAYAUD, « Le père dans le Code civil, un magistrat domestique », Napoleonica. La Revue, 2012/2 (N° 14), pp. 3-24 ; J.-M. FAYOLLE NOIRETERRE, « I. De la puissance paternelle à l'autorité parentale : la responsabilité des pères ? », dans : Jean Guillaumin éd., Le père. Figures et réalités. Le Bouscat, L’Esprit du temps, « Perspectives Psychanalytiques », 2003, pp. 41-46 ; M.

PERROT, « Quand la société prend peur de sa jeunesse, au 19e siècle », in Les Jeunes et les autres.

Contribution des sciences de l’homme à la question des jeunes, Vaucresson, Criv, 1986, pp. 19- 27 ; B. SCHNAPPER, « La Correction Paternelle Et Le Mouvement Des Idées Au Dix-Neuvième Siècle (1789-1935) » Revue Historique, vol. 263, no. 2 (534), 1980, pp. 319–349 ; B. SCHNAPPER, De la magistrature domestique à la liberté surveillée, les pères de famille du Code civil à 1889, Archives Aquitaines de Recherche sociale, 1989-1990, Bordeaux, p. 13 …

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21

Nous avons pu également compter sur les recherches de Grégoire BIGOT39, Anne LEFEBVRE-TEILLARD40, Xavier MARTIN41 et Anne VERJUS42, dans ce domaine.

Les études d’Ivan JABLONKA43 nous ont permis aussi de mieux appréhender la situation de l’enfant au niveau sociologique et d’observer l’évolution progressive de la notion d’intérêt de l’enfant menacé.

39 G. BIGOT, L’autorité judiciaire et le contentieux de l’administration. Vicissitudes d’une ambition (1800- 1872), préface de François Burdeau, Paris, LGDJ, « Bibliothèque de Science administrative », Tome 15, 1999 ; « La conception de l’État dans l’œuvre d’Édouard Laboulaye », Revue Française d'Histoire des Idées Politiques, 2018/1 (N° 47), p. 59-80 ; « La force du gouvernement » : écritures et réécritures constitutionnelles de l’administration (1789-1799) », Annales historiques de la Révolution française, 2017/3 (n° 389), pp. 19-38 ; « La jurisprudence au secours de l’alimentation des enfants illégitimes au XIXe siècle », in Ordre et désordre dans les familles, C. Plessix-Buisset (dir.), Rennes, PUR, 2002, pp. 127-149.

40 A. LEFEBVRE-TEILLARD, Autour de l’enfant : Du droit canonique et romain médiéval au Code Civil de 1804, Brill, Boston, 2008, Tome I, p. 316 ; Introduction historique au droit des personnes et de la famille. Paris : Presses Universitaires de France, 1996. In-8°, 475 pages. (Droit fondamental, droit civil.). In : Bibliothèque de l'école des chartes. 1997, tome 155, livraison 2. pp. 736-737 ; « La famille, pilier du Code civil », Histoire de la justice, 2009/1 (N° 19), pp. 311-319 ; « Naissance du droit français : l’apport de la jurisprudence », Droits, Revue française de théorie, de philosophie et de cultures juridiques, n° 38, 2003, pp. 79-85.

41 X. MARTIN, À tout âge ? Sur la durée du pouvoir des pères dans le Code Napoléon, Revue d’Histoire des Facultés de droit et de la science juridique, 1992, pp. 227-301 ; Fonction paternelle et Code Napoléon. In : Annales historiques de la Révolution française, n°305, 1996. pp. 465-475 ; Mythologie du Code Napoléon. Aux soubassements de la France moderne. In : Annales historiques de la Révolution française, n°338, 2004. La vulgarisation des savoirs et des techniques sous la Révolution. pp. 175-176 ; Politique et droit privé après Thermidor, La Révolution et l’ordre juridique privé, rationalité ou scandale ? Actes du colloque d’Orléans, 11-13 septembre 1986, Paris, P.U.F., 1988.

42 A. VERJUS, Le bon mari. Une histoire politique des hommes et des femmes à l’époque révolutionnaire, Paris, Fayard, 2010, 392 pages ; « La paternité au fil de l'histoire », Informations sociales, 2013/2 (n°

176), p. 14-22 ; Introduction historique au droit des personnes et de la famille. Paris : Presses Universitaires de France, 1996. In-8°, 475 pages. (Droit fondamental, droit civil.). In : Bibliothèque de l'école des chartes. 1997, tome 155, livraison 2. pp. 736-737.

43 I. JABLONKA, Des hommes justes. Du patriarcat aux nouvelles masculinités, Seuil Paris, 2018 ;

« Les Abandonnés de la République. L’enfance et le devenir des pupilles de l’Assistance publique de la Seine placés en famille d’accueil (1874-1939) », Revue d'histoire du XIXe siècle, 30 | 2005.

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En effet, alors que le législateur ne s’est intéressé que tardivement au sort du mineur soumis à une puissance paternelle incontrôlée, l’autorité judiciaire s’est très vite souciée du « bien-être de l’enfant »44.

Nous avons étudié les travaux préparatoires de façon chronologique et analysé la pensée de la doctrine ainsi que les articles successivement.

Les manuels mis à notre disposition sont commentés, comme ceux de TOULLIER et DEMOLOMBE, assez nombreux en la matière45. Quant à notre jurisprudence, elle est chronologique par thème abordé.

La thèse mentionne des extraits du Recueil FENET avec les orateurs du Tribunat, de jurisprudences, de doctrines et d’articles du Code civil.

Le droit romain est également abordé.

Nous faisons référence principalement à des auteurs des XIXe, XXe et

XXIe siècles qui nous éclairent par leur analyse approfondie de la matière.

44 De nombreux travaux ont été consacrés à cette étude. Citons notamment J. KRYNEN,

« L’emprise contemporaine des juges », 2nd tome de l’État de justice. France XIIe-Xxe siècle, Gallimard, Paris, 2012.

45 C.-B.-M. TOULLIER, Le droit civil français, suivant l’ordre du code, ouvrage dans lequel on a réuni la théorie à la pratique, Société typographique belge, Bruxelles, 1811-1831, 14 vols ; Supplément à la première édition des huit premiers volumes du Droit civil français, Paris, 1820-1837, 14 vols ; C.

DEMOLOMBE, Cours de Code Napoléon, Durand, Paris, 1860-1872, 30 vols.

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Notre analyse est également assortie de commentaires de J.-É.-M.

PORTALIS, avocat du droit du sud de la France et de J. De MALEVILLE, jurisconsulte du XIXe siècle.

Nous ne sommes pas toujours en accord avec les thèses des auteurs que nous citons et les contestons très régulièrement. Des extraits de leurs études sont également évoqués, favorables ou non à la puissance paternelle. Quant à nos sources, elles se confrontent entre elles.

Il faut souligner que l’application des articles varie en fonction des évolutions jurisprudentielles. Quant à la doctrine, elle est systématiquement commentée.

Nous débattons également des thèses de doctorat du XIXe siècle et notamment celles de 1880,46 mais aussi des travaux effectués dans ce domaine47.

46 V° notamment HABERT, De la puissance paternelle, 1864, Bourges ; BOUCHOT, De la puissance paternelle, 1866, Paris ; HAILLANT, L'autorité paternelle dans l'histoire du droit, 1870, Nancy ; TARDIEU, De la puissance paternelle, 1875, Paris ; DECOUTEIX, De la responsabilité du père de famille, 1876, Paris ; ARION, De la puissance paternelle, 1878, Paris ; GALINIER, Les droits de puissance paternelle et de tutelle sur les enfants naturels, 1885, Paris ; DUBOIS, Étude historique sur la protection de l'enfance, 1888, Paris ; PLANTEAU DU MAROUSSEM, Du contrôle de la justice sur les droits paternels d’éducation et de correction, 1887, Paris ; POMERA, De la déchéance et de la suspension de la puissance paternelle, 1887, Soissons ; DUBOIS, Étude historique sur la protection de l'enfance, 1888, Paris ; VINGTAIN, Des restrictions et déchéances de la puissance paternelle sur la personne de l'enfant, 1891, Paris ; DAUPLEIX, De la puissance paternelle et de ses causes d’extinction, 1892, Nancy ; PROTICH, De la puissance paternelle en droit international privé, 1892, Paris ; CHAUVIN, Des droits du père sur la personne de ses enfants légitimes, 1893, Paris ; DRUCKER, De la protection de l’enfant contre les abus de la puissance paternelle, 1894. Paris ; GÉGOUT, Des limitations de la puissance paternelle, Nancy, 1897, Paris.

47 NOUGARÈDE, Essai sur l'histoire de la puissance paternelle, 1801, Ouvrage couronné par l’Institut qui avait mis au concours la question suivante : « Quelles doivent être, dans une république bien

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24 - Objectif et organisation

Notre étude établira une évolution législative qui tend à affaiblir la puissance paternelle. Il faudra, cependant, attendre l’apparition des premières lois protectrices de l’enfant pour que la puissance paternelle soit enfin contrôlée et son usage réellement sanctionné48.

Nos recherches démontreront que le XIXe siècle apparaît comme une période en constante recherche « du bien-être de l’enfant », ce qui le distingue du

XVIIIe siècle. En effet, sous l’Ancien Régime, la situation du mineur était plus désavantageuse que sous le Code Napoléon. Le père pouvait par simple lettre de cachet adressé au roi transférer d’office son enfant mineur au sein d’une prison49. Mais face à la critique constante des révolutionnaires envers cet autoritarisme, ce système va être très rapidement abandonné par le décret du 16 mars 179050.

constituée, l’étendue et les limites du pouvoir du père de famille ? » ; BERNARD, Histoire de l’autorité paternelle en France, 1863, couronnée en 1860 par l’Académie des Sciences morales ; FUZIER- HERMAN, De la protection légale des enfants contre les abus de l'autorité paternelle, 1878, mémoire couronné par l’Académie de législation de Toulouse ; LALLEMAND, Histoire des enfants abandonnés et délaissés, 1885, couronnée par l’académie des Sciences morales ; Société de législation comparée, Session extraordinaire de 1889, rapport de FUZIER-HERMAN sur la puissance paternelle en France, avec une bibliographie ; DELEPIERRE, Histoire de la puissance paternelle, 1887, Abbeville ; BOURCART, De l’autorité paternelle sur la personne et sur les biens des enfants légitimes et naturels, mémoire lu au Congrès des Sociétés savantes en 1891, bulletin du comité des travaux historiques et scientifiques pour 1891, p. 37 ; CHOLLET, Des limitations à la puissance paternelle, Paris, 1897 ; THIBAULT, De la puissance paternelle, discours prononcé à la conférence des avocats, Poitiers, 1897.

48 V° la loi du 24 juillet 1889 sur « la protection des enfants maltraités ou moralement abandonnés»

et la loi du 19 avril 1898 sur « la répression des violences, voies de faits, actes de cruauté et attentats commis envers les enfants ».

49 Sur ce sujet, V° F. FUNCK-BRENTANO, « Les lettres de cachet en province », in Revue bleue, 1899, p. 138 ; H. CARRE, « Le régime des lettres de cachet a-t-il reparu sous le Consulat et l’Empire ? », in Études et documents divers, Rodez, Paris, 1926, p. 143.

50 Sur ce point v° notamment J.-M. JANDEAUX, « La révolution face aux « victimes du pouvoir arbitraire » : l'abolition des lettres de cachet et ses conséquences », Annales historiques de la Révolution française, 2012/2 (n° 368), pp. 33-60.

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Nous observons que la Révolution française va redéfinir la famille51 telle qu’elle devait exister au XVIIIe siècle, un système fondé « sur une relation égalitaire librement consentie, dans une harmonie garantie par la vertu et le civisme »52. Afin de mieux encadrer la puissance paternelle, les tribunaux de famille vont faire leur apparition avant de disparaître de manière précipitée en 179053.

Déjà critiquée pour son emprise sur les mineurs, la puissance paternelle va être définitivement abolie pour les majeurs54.

Nous constaterons ainsi que la puissance paternelle apparaît de plus en plus affaiblie55. D’abord, par le décret du 29 frimaire 1793 qui instaure un droit à l’éducation pour les enfants mineurs, source d’émancipation pour le futur citoyen.

Néanmoins, au cours de cette période, la place du père n’apparaît pas amoindrie. Bien au contraire, il est intégré dans un système égalitaire56. Le contrôle de la famille par l’État apparaît donc déjà ici57.

51 V° J.-J- ROUSSEAU, Du Contrat social, Dupont, 1823, Tome I, p. 65.

52 Ph. DAUMAS, Conclusion. Famille et Révolution : un bilan nuancé In : Familles en Révolution : Vie et relations familiales en Île-de-France, changements et continuités (1775-1825). Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2003.

53 BUCHEZ et ROUX, Histoire parlementaire de la Révolution française ou Journal des assemblées nationales depuis 1789 jusqu’en 1815, éd. Paris, 1835, p. 121.

54 Loi de l'Assemblée nationale législative, du 28 août 1792, l'an quatrième de la Liberté, portant que les majeurs ne seront plus soumis à la puissance paternelle.

55 E. MASSON, La puissance paternelle et la famille sous la Révolution française, PUF, t. 1, 1978, p. 141.

56 V° L. BOUDOUARD, « Des droits pour les bâtards, l’enfant naturel dans les débats révolutionnaires », in La famille, la loi, l’État : de la Révolution française au Code civil, t. 1, 1989, p. 141.

57 A. BURGUIÈRE. La Révolution et la famille. In : Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 46ᵉ année, N. 1, 1991. pp. 151-168.

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On observera ainsi que l’enfant semble être un instrument permettant aux régimes en place d’étendre leur idéal politique sur les citoyens58. D’ailleurs, les codificateurs utiliseront le mineur comme un objet de propagande du pouvoir en place.

Nous le constaterons au cours du XIXe siècle et noterons que la famille devient un véritable instrument politique. Elle apparaît, dans les faits, comme un petit État dans l’État, représentant ainsi un modèle de société.

Le Code Napoléon instaure donc dans le foyer un père doté de nombreux pouvoirs qu’il utilise librement sur les membres de sa famille.

Nous remarquerons aussi que le XIXe siècle fait apparaître pour la première fois la notion d’intérêt de l’enfant, d’abord dans les décisions de justice puis dans de nombreux textes doctrinaux.

Cette période restera marquée, également, par les premiers mouvements sociaux et les lois réglementant le travail des enfants mineurs59. Cette mutation législative démontre, à l’évidence, une volonté de la part du pouvoir politique de mieux protéger l’enfant60.

Face à ces changements, on peut affirmer que pour subsister, la puissance paternelle va devoir être en perpétuelle adaptation. Mais cela sera-t-il suffisant ?

58 MADIVAL et LAURENT, Archives parlementaires de 1789 à 1860, Recueil complet des débats législatifs et politiques des chambres françaises 1789-1799, 1ère série, Paris, 1881, t. 17, p. 618.

59 La loi du 22 mars 1841 relative au travail des mineurs apparait comme la première loi les encadrant. Ceci démontre un net interventionnisme de l’État dans la liberté d’entreprendre pourtant protégée par le décret d’Allarde des 2 et 17 mars 1791.

60 La 1ère du 24 juillet 1889 et la 2ème loi du 19 avril 1898.

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Pour y répondre, il nous faut d’abord étudier dans une première partie la puissance paternelle, garante du pouvoir politique (Partie I), puis dans une seconde partie, une puissance paternelle affaiblie par un nouvel ordre politique (Partie II).

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Première partie

LA PUISSANCE PATERNELLE,

FONDEMENT DU POUVOIR POLITIQUE

Le Code Napoléon se distingue du droit révolutionnaire en ne reconnaissant que la famille légitime et en n’attribuant des prérogatives qu’à l’égard d’un seul de ses membres, le père de famille. Ces sujets ne sont donc pas égaux en droits. La mère y est encore soumise au pouvoir du mari. Et comme le rappelle PORTALIS, « la femme a besoin de protection car elle est faible. La prééminence de l’homme est impliquée par la constitution même de son être…

L’obéissance de la femme est un hommage rendu au pouvoir qui la protège61 ».

Mais en pratique, la puissance paternelle qui appartient, ici, au père de famille de son vivant s’avère être un redoutable instrument d’autorité et donc un allié évident pour maintenir l’ordre au sein des familles (Titre I). Néanmoins, dans l’intérêt de l’enfant, l’autorité judiciaire veille au respect des droits des parties les plus faibles au sein d’une même famille. Ce qui limite considérablement la marge de manœuvre du père (Titre II).

61 P.-A. FENET, Recueil complet des travaux préparatoires du Code civil, Tome IX, Videcocq, Paris, 1836, pp. 177 et s.

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30 Titre I

LE CODE NAPOLÉON : UN RENFORCEMENT DE LA PUISSANCE PATERNELLE GARANTE D’UN POUVOIR POLITIQUE FORT

Les enfants sont soumis tout comme leur mère à l’autorité du père62. Cette domination s’exerce principalement par le biais de la puissance paternelle.

Son pouvoir confère au père des droits sur ses enfants jusqu’à l’âge de la majorité, mais une seule prérogative lui est attribuée de façon perpétuelle, c’est l’honneur et le respect63.

62 B. SCHNAPPER, « Autorité domestique et partis politiques de Napoléon à De Gaulle » in Voies nouvelles en Histoire du droit ; la justice, la famille, la répression pénale (XVIème – XXème siècle), PUF, Paris, 1991, p. 564.

63 X. MARTIN, « À tout âge ? Sur la durée du pouvoir des pères dans le Code Napoléon », in Revue d’histoire des facultés de droit et de la science juridique, 1992, n°13, p. 281.

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CHAPITRE I

L’AUTORITÉ D’UN CHEF,

UNE VÉRITABLE MAGISTRATURE PATERNELLE

D’après PORTALIS, il a été nécessaire de rétablir l’ordre au sein de la société, après la période de tumulte qu’a connue la France64. Les codificateurs ont décidé d’insérer dans le code un article 37165 relatif au respect de l’enfant à l’égard de ses parents66. Ils espèrent ainsi créer une société fondée sur l’ordre, idéalement différente de l’ordre révolutionnaire. En effet, dans l’esprit des révolutionnaires, le citoyen doit se joindre à l’État car celui-ci est le seul garant des libertés individuelles. La doctrine des révolutionnaires trouve son fondement au sein d’un pacte social qui rejette toute idée d’autorité et prône l’abandon des droits individuels au profit de l’État67. Pour s’éloigner de ce système et rétablir la soumission filiale, les pouvoirs du père de famille doivent être renforcés68. En effet, le père est considéré comme étant, par essence, le magistrat naturel à l’intérieur de sa famille et c’est lui qui transmet les valeurs de l’État69.

64 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome IX, p. 148 : « Il nous a paru utile aux mœurs de faire revivre cette espèce de culte rendu par la piété filiale au caractère de dignité, et j'ose dire, de majesté que la nature elle-même semble avoir imprimé à ceux qui sont pour nous, sur la terre, l'image et les ministres du créateur ».

65 Art. 371 du Code Napoléon : « L’enfant, à tout âge, doit honneur et respect à ses père et mère ».

66 « Honore ton père et ta mère afin d’avoir longue vie sur la terre que le Seigneur ton Dieu te donne » (Ex 20, 12).

67 Sur ce point v° notamment É. LETONTURIER, « Fonder l’autorité sur les lois de la raison », Jean- Jacques ROUSSEAU, Les dossiers, Encyclopædia Universalis, 2015, Paris, p. 38.

68 J.-L. HALPÉRIN, Histoire du droit privé français depuis 1804, PUF, Paris, 2018, t. 1, p. 29.

69 S. PUFENDORF, Le droit de la nature et des gens, Schelte, Amsterdam, 1706, t. 1, p. 195.

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MALEVILLE indique, d’ailleurs, à juste titre que le père de famille est le bras armé de l’État70.

Le Code Napoléon démontre une volonté manifeste d’échapper au principe d’égalité qui était le fondement même du noyau familial. L’égalité entre les hommes a été amplifiée de manière outrancière conduisant à l’éviction de l’autorité, de la puissance paternelle et de l’État. Il faut donc rétablir l’ordre public par le biais de la puissance paternelle, outil nécessaire à l’instauration de l’ordre au sein des familles.

Pour ce faire, les codificateurs se fondent d’abord sur l’idée de souveraineté défendue au XVIe siècle : « le droit au gouvernement de plusieurs ménages est ce qui leur est commun, avec la puissance souveraine donc la souveraineté, la puissance absolue est perpétuelle d’une République71 ». La République peut être définie comme un droit gouvernemental, plus précisément un gouvernement qui respecte le bien commun. Le droit du gouvernement trouve sa source dans l’édification de plusieurs familles, le fondement politique de l’État est donc la famille et non l’individu. Pour PORTALIS, c’est Dieu qui a conçu la famille et qui a créé la puissance paternelle. Il est le garant de l’ordre dans la société et la source du pouvoir72. L’ordre étatique s’est fondé sur la base d’une organisation des puissances claniques, la renonciation des pouvoirs au profit d’un puissant qui garantit la défense de chacun. Considérant que l’État est fait de plusieurs noyaux familiaux, la famille, en tant que telle, appartient par

70 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome X, p. 486 : « La puissance paternelle est la providence des familles, comme le gouvernement est la providence de la société… l'autorité des pères de famille doit être là pour suppléer les lois, corriger les mœurs et préparer l'obéissance ».

71 J. BODIN, Les six livres de la République, Belin-Leprieur, Paris, 1593, p. 5.

72 J.-E.-M. PORTALIS, De l’usage et de l’abus de l’esprit philosophique durant le XVIIIe siècle, Moutardier, Paris 1834, Tome II, p. 242.

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conséquent au domaine public. Ce qui permet d’affirmer que l’État peut intervenir au sein de la sphère familiale grâce à un outil qui est la puissance paternelle. Cet élément peut être considéré comme le bras de l’État au sein de la sphère privée. Le titre IX sur la puissance paternelle est donc vu comme un domaine relevant davantage du droit public que du droit privé73. Le nouvel ordre politique trouve son fondement, de ce fait, au sein de la sphère familiale. Cet ordre légitime son pouvoir auprès du père de famille, mais cette restauration de la suprématie de la paternité par le Code Napoléon, en 1804, ne se fera que sur une courte période74. La renaissance du pouvoir politique trouve appui auprès de la puissance du père de famille, seul à exercer l’autorité parentale. Par le biais du Code Napoléon, le père de famille retrouve l’intégralité de ses prérogatives que sont notamment la puissance paternelle, le droit de garde et le droit de correction. L’autorité paternelle se renforce après avoir été affaiblie par les révolutionnaires.

L’État, garant de la puissance paternelle, s’immiscera au sein de la sphère familiale afin de vérifier son bon fonctionnement et éviter ainsi les excès ou au contraire les manques d’autorité. Le XIXe siècle verra l’émergence d’un État fort garanti par la puissance paternelle.

Le titre IX relatif à la puissance paternelle nous délivre, dès ses premiers mots, un message de révérence absolue envers les parents75 attribuant, de fait, un

73 Le titre IX du livre premier du Code civil de 1804 est adopté le 3 germinal an XI (24 mars 1803) et promulgué le 13 germinal (3 avril 1803). V° P. DELEPIERRE, Histoire de la puissance paternelle étudiée principalement dans ses effets sur la personne de l’enfant, C. Paillart, Abbeville, 1887, p. 240 et s.

74 Sur ce point v° notamment J.-L. HALPERIN, L’impossible Code civil, Presses universitaires de France, Paris, 1992, Tome I, p. 4.

75 Art 371 du Code Napoléon : « L’enfant, à tout âge, doit honneur et respect à ses père et mère ».

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pouvoir parental infini sur l’enfant. Même si cet article donne les apparences d’une subordination non limitative dans le temps, celle-ci est beaucoup plus restrictive que sous l’ancien droit. Exercée principalement par le père, la puissance paternelle appartient également à la mère qui ne pourra s’en attribuer l’utilisation qu’au décès de l’époux ou en cas d’incapacité de celui-ci. Cet article est destiné exclusivement aux parents, même si les ascendants bénéficient vis-à- vis des petits enfants de droits qui leur sont propres. Il est intéressant d’essayer de comprendre les motivations qui ont poussé les codificateurs à inclure l’article 371 au sein du Code (Section 1) et d’analyser l’interprétation qu’en font, en pratique, la jurisprudence et la doctrine (Section 2).

Section 1 La soumission filiale

La puissance paternelle est l’autorité que le législateur a donnée au père de famille sur ses enfants, garantissant ainsi un ensemble de droits et de devoirs pendant leur minorité (§ 1) ou jusqu’à leur majorité ou émancipation (§ 2).

§ 1 – Pendant la minorité de l’enfant

Le père de famille représente un outil juridique utilisé par les codificateurs pour établir au sein des familles un nouvel ordre. Dans leur esprit, cet individu est considéré comme un élément mineur, mais non moins essentiel pour mettre en œuvre leur idéal sociétal. Il est, à ce titre, la providence du nouvel ordre établi76. Et pour mettre en place une certaine stabilité politique ainsi qu’une

76 P.-A. FENET, Recueil complet, op. cit., Tome XII, p. 466 : « Le père de famille comme étant la providence des familles, comme le gouvernement et la providence de l'État : il serait impossible à celui-ci de maintenir l'ordre s'il n'était efficacement secouru par les premiers ».

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