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Le projet He was Here ! du collectif We found Him

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Academic year: 2022

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HAL Id: hal-01616368

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01616368

Submitted on 13 Oct 2017

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L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

Sophie Daste

To cite this version:

Sophie Daste. Le projet He was Here ! du collectif We found Him : Comme expérience d’un corps ubiquiste. Le corps dans les jeux vidéo ubiquitaires 20 novembre 2014 co-organisé par le laboratoire RIRRA21 de l’UM3 et LIRMM de l’UM, RIRRA 21 et LIRMM, Nov 2014, Montpellier, France.

�10.21409/HAL-01616368�. �hal-01616368�

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20 novembre 2014

co-organisé par le laboratoire RIRRA21 de l'UM3 et LIRMM de l'UM2

ARTGAME NOVEMBRE 2013

Le projet He was Here ! du collectif We found Him

Comme expérience d’un corps ubiquiste

< Sophie Daste>

Groupe EnsADLab GoD|Art (Game oriented Design|Art), PSL (Paris Sciences et Lettres) Rechearch University Paris,

31 rue d’Ulm, 75240 Paris Cedex 05, France

Équipe TEAMeD (Théorie, Expérimentation, Arts, Médias et Design), Laboratoire AI-AC (Art des Images – Art Contemporain), Université Paris 8

2 rue de la Liberté93526 Saint-Denis Cedex, France sodaste@ensad.com

<RESUME >

Au travers du projet He was Here ! du collectif We found Him, nous pouvons arguer trois axes relatant de la notion d’ubiquité et plus précisément celle des corps ubiquistes et ubiquitaires.

Nous introduirons cet article par une description des principes de jeu du projet He was Here ! réalisé par le collectif We found Him. Une fois cette base posée, nous mettrons en avant le caractère ubique du personnage fictionnel auquel se réfère HwH ! Nous enchainerons par l’importance donnée à l’ubiquité du personnage dans la conception et la pratique du jeu HwH ! Nous nous interrogerons pour finir sur la nature même du collectif anonyme qui constitue la communauté de joueurs, nommé We found Him, le dernier pendant ubiquiste de ce texte.

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< ABSTRACT >

Through the He was Here!’s project of the collective We found Him, we can argue three axes relating to the notion of ubiquity and more precisely that of ubiquitous bodies.

We will introduce this article by a description of the game principles of the He was Here!’s project directed by the collective We found Him. Once this base is set, we will put forward the ubic character of the fictional character to which HwH ! refers. We will enchain by the importance given to the ubiquity of the character in the conception and the practice of the game HwH!. We will discuss the nature of the anonymous collective which constitutes the community of players, named We Found Him, the last ubiquitous of this text.

< MOTS-CLES >

Jeu à réalité alternée, digital street art, communauté fan, culture participative, ubiquité, mobilité.

< KEYWORDS >

Alternative Reality Game (ARG), Digital Street Art, Fandom, Participatory Culture, Ubiquity, Mobility.

1. Introduction

He was Here ! 1 est un jeu à réalité alternée de digital street art qui s’approprie l’image du personnage dessiné par Martin Handford en 1986, nommé « Charlie » des livres éponymes Où est Charlie ? 2, et la retranscrit

1. Si vous souhaitez avoir de plus amples explications sur le concept et les différents aspects technologiques du projet He was Here !, je vous invite à vous référer à ce chapitre qui les détaille : Sophie Daste, « Projet He was Here ! du collectif We found Him – Expérimentation artistique entre digital street art et Alternative Reality Game (ARG) » chapitre dans l'ouvrage « Frontières Numériques & Artefacts », éditions l’Harmattan – Local et global. 23 pages (2015).

2. Cette série de livres illustrés est publiée depuis 1987 à nos jours.

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au travers des principes énoncés par la culture fan3, par le biais du collectif anonyme We found Him dans le monde tangible.

Le personnage de Martin Handford possède selon les vingt-huit langages dans lesquels les livres d’illustrations ont été traduit un prénom différent4, la seule chose qui atteste de son identité est son habit rayé

3. « Pour de nombreux fans, la nature non-commerciale de la fan-culture est une de ces caractéristiques les plus importantes. Il s’agit ici d’amour. Les fans opèrent dans une économie du don et reçoivent gratuitement d’autres fans qui partagent leur passion pour les mêmes personnages. Libérés des contraintes commerciales qui entourent les textes sources, ils jouissent d’une liberté nouvelle pour explorer des thèmes ou faire des expériences avec des structures et des styles qui ne font bien souvent pas partie des versions 'grand public' de ces univers ». Henry Jenkins, La culture de la convergence:Des médias au transmédia (Paris: Armand Colin, 2013), 247-248.

4. Ces livres ont été édités dans plus de cinquante pays différents. Il existe deux versions différentes en langue anglaise. Le personnage initialement créé par son auteur britannique se nomme pour les versions anglaise et australienne « Wally » («Where’s Wally ?) tandis qu’il se prénomme « Waldo » dans son édition américaine et canadienne (Where’s Waldo ?). D’autres pays ont adopté différents patronymes comme « Willie » en africaans, « Vladik » en tchèque ou « Holger » en danois, etc. Nous choisirons de le nommer « Charlie » dans ce texte rédigé en langue française.

Figure 1. Image photographiée de “Charlie” dans l’espace public – Place des Vosges, Paris, 2016

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uniformément de rouge et de blanc. Toute personne rencontrée dans l’espace public répondant à ce descriptif deviendra pour les participants (membres du collectif WfH) une image de « Charlie » (Figure 1).

Le joueur de HwH ! a en sa possession l’application mobile gratuite téléchargée sur son téléphone ou sur sa tablette. Sur l’application, il peut voir par l’intermédiaire de symboles reprenant les rayures emblématiques du personnage de Martin Handford, où « Charlie » a été repéré par le passé : He was here. Il est invité à se rendre sur ces différents lieux pour y scanner un QRCode rouge et blanc rayé et numéroté, visible et accessible dans l’espace public. Ce QRCode identifiable a pour passe de devenir à l’instar de d’autres réalisations de street art, un motif urbain.

Lorsque le joueur scanne le QRCode, l’image de « Charlie » capturée en ce lieu lui apparaît. Il peut alors replacer l’individu recherché dans l’architecture qui l’entoure et contextualiser sa capture. Cette photographie est intégrée à sa collection d’images dévoilées de

« Charlie » (Figure 2).

Figure 2. Aperçu des trois étapes décrites : carte consultable depuis l’application, QRCode accessible dans l’espace public, apparition de l’image photographiée de

« Charlie » après la lecture du QRCode.

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Une autre partie du jeu consiste à enrichir la collection des autres joueur en ajoutant les images capturées par chaque joueur. Lorsqu’un membre de WfH croise « Charlie », il est invité à capturer son image et à l’envoyer par le biais de l’application aux membres dirigeants qui lui confiront par la suite un QRCode à poser à l’endroit où la photographie aura été prise et qui ajouteront sur la base de données son emplacement sur la carte partagée par toute la communauté.

Nous verrons dans les chapitres qui suivent l’importance de la notion d’ubiquité qui apparaît à plusieurs endroits dans le projet HwH ! décrit ci- dessus. Le terme « ubiquité » vient du latin « ubique », signifie « partout, en tout lieu » (Gaffiot, 1934, 1621). Le mot « ubiquité » appuie dans sa définition l’idée du temps identique contenu sans être explicite dans son étymologie latine : « Fait d'être présent partout à la fois ou en plusieurs lieux en même temps » (Larousse, 2016, en ligne). L’adjectif

« ubiquitaire » est employé pour décrire « l'informatique lorsqu'elle est omniprésente dans un environnement » (Larousse, 2016, en ligne) alors que l’adjectif « ubiquiste » signifie dans un premier temps « qui a le don d'ubiquité » ainsi que « se di[sant] des espèces animales et végétales que l'on rencontre dans des milieux écologiques très différents » la définition appuie aussi en troisième point son synonyme « cosmopolite » (Larousse, 2016, en ligne). Nous retrouvons d’ailleurs dans le troisième sens donné à ce dernier terme : « se dit d'une espèce animale ou végétale quand elle est présente dans toutes les parties du monde » » (Larousse, 2016, en ligne) ce qui se trouve être en parfait accord avec la définition d’ubiquité qui qualifie l’être « Charlie ». En faisant référence à des individus fait de chair et de sang, ne les numérisant que par le biais de la photographie, nous trouvons plus approprié de parler dans cet article d’un corps ubiquiste au travers du dispositif He was Here !

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2. « Charlie » personnage fictionnel ubique

L’ubiquité du personnage de Charlie est intrinsèque à sa nature. Il existe depuis 1987 sur chaque double page illustrée des albums publiés par Martin Handford vendus à travers le monde. Ces faits impliquent qu’au même moment en divers lieux plusieurs personnes peuvent être en quête de trouver « Charlie ».

Le succès aidant, « Où est Charlie » se décline rapidement sur différents supports le transformant en objet crossmédia.

Le dessin animé sorti en 1991 montre sur douze épisodes une narration des images illustrées à travers la découverte des différents endroits insolites qui pullulent dans l’univers original (la Préhistoire, l’Égypte antique, les tapis rouges d’Hollywood, etc.). Chaque épisode se stoppe en arrêt sur image deux fois, pendant 1 minute durant laquelle les téléspectateurs sont invités à chercher la cachette de « Charlie » dans ce programme. À la fin du décompte, l’emplacement du personnage ubique est révélé.

De 1997 à 1998, un magazine hebdomadaire nommé dans sa version originale « Wally’s world » voit le jour. Le titre est évidemment traduit dans différentes langues en reprenant le prénom utilisé dans chacun des pays concernés.

La série illustrée « Où est Charlie » est aussi déclinée depuis 1991 sur supports vidéoludiques. La première adaptation faite par Sega, reprend une succession de petits jeux où le joueur est invité à chercher « Charlie ».

L’avatar même du joueur est désigné par une main dont on voit l’esquisse de l’avant-bras, cet avant-bras est recouvert de l’habit de « Charlie ». Par voie imaginative, le joueur peut s’identifier au personnage fictionnel.

Depuis « Charlie », Where's Waldo? in Hollywood (2010), les adaptations vidéoludiques de l’univers se font exclusivement sur format mobile ((iPhone, iPad, iPod Touch, Android, etc.). Cette tendance était déjà présente dans le précédent opus sorti en 2009, où l’on retrouvait ces plateformes mobiles susnommées en plus de la console portable DS5. Il y a donc ici une invitation à se plonger dans le monde de « Charlie » en dehors du cadre du foyer, de la chambre où l’on feuillette les albums, du

5. Le jeu existait aussi sur la console de salon Wii et sur les ordinateurs Mac et PC.

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salon où l’on regarde le dessin animé ou où l’on joue au jeu vidéo sur console ou ordinateur. Il continue d’exister une version en ligne gratuite adaptée de la licence « Où est Charlie »6 qui permet d’offrir à la communauté fan un autre support à son héros.

Divers objets de merchandising existent aussi sur la licence allant des classiques posters, à la figurine, aux affaires scolaires comme aux mugs, etc. Ces objets à l’effigie continuent d’étendre la figure omniprésente du personnage, par le décloisonnement de l’objet « Charlie » dans sa forme et dans son espace qui tend à appuyer son ubiquité.

Le personnage est tellement populaire qu’il existe des rassemblements depuis 2009 de personnes habillées avec les vêtements iconiques de « Charlie » réunis en un même lieu, présentant une foule hétéroclite revendiquant une même identité. En 2011, à Dublin, le record, non encore égalé à ce jour, a réuni 3 872 personnes dans le square de Merrion. Sur un autre continent et dans le but de recueillir des fonds pour la restauration du Canyon Waldo qui a été dévasté par un incendie en juin 2012. Ce site homonyme du personnage de Martin Handford dans sa version américaine voit se réunir en son honneur depuis 2012 dans le Colorado, chaque dernier ou avant dernier samedi du mois, un rassemblement de personnes habillées en « Charlie ». Alors que le premier rassemblement ne comptait qu’une centaine de participants, l’évènement croît en popularité chaque année et a réuni au dernier décompte 3 524 personnes déguisées7.

Plus récemment des vidéos 360°8 adaptées à la technologie VR (Réalité Virtuelle) montrant un homme endossant le costume de « Charlie » se dissimulant dans la foule ambiante. La vidéo met en scène « Charlie » tantôt se cachant comme dans les illustrations originales, ou en mouvement ou milieu des gens composant la foule anonyme, poursuivit pas d’énigmatique hommes en noir, ajoutant une narration supplémentaire.

6. http://www.findwally.co.uk/ - adresse consultée le 15 décembre 2016.

7. Chaque participant paie entre 35 et 40$ et obtient un kit de déguisement comprenant : le haut rayé à manches longues, un chapeau rayé et des lunettes rondes.

8. http://www.refinedguy.com/2016/02/29/wheres-waldo-360-vr-video/ - adresse consultée le 11 avril 2016.

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« Charlie » est clairement un personnage iconique dirigé par le public.

D’ailleurs plusieurs réalisations intègre ce personnage comme un clin d’œil populaire à l’encontre de leurs spectateurs, comme dans le film Astérix et Obélix, Mission Cléopâtre réalisé en 2002 par Alain Chabat, où on peut voir parmi la foule des ouvriers sur le chantier dédié à la réalisation d’un palais pour César, « Charlie » à la mode égyptienne se dissimuler. L’allusion dans cette scène est purement visuelle, puisque personne ne fait mention à l’oral de cette rencontre, en revanche pour le spectateur attentif, s’il lit le dérouler du générique, il trouvera en effet le nom d’un personnage à la sonorité égyptienne familière : « Ouécharlis ».

Dans un registre nostalgique mais beaucoup plus caustique, la websérie Les Kassos se réfère à la nostalgie des natifs des années 80 tout en maltraitant leurs icones dans des scénettes à l’humour caustique. Charlie arrive dans le vingt-deuxième épisode pour exposer ses problèmes au personnage principal de la websérie, une assistante sociale9.

La référence à l’univers illustratif de « Charlie » est aussi pleinement assumée dans le travail des photographes Max & Charlotte avec leur série

« Où est Charlie » (2009-2011). Les photographes mettent en scène des foules accessoirisées dans des décors très travaillés de la capitale française. Il n’y a pas vraiment de complexité à trouver la figure de

« Charlie » dans les différentes compositions, l’imagerie générale est surtout esthétique et joue sur des codes couleurs pop et chatoyants et sur l’incongruité des objets mis en scène. Chaque photographie reflète le côté fun de l’univers original de l’œuvre de Martin Handford.

« Charlie » offre une image sympathique au public, sa popularité ne fait pas l’objet de critiques à l’inverse d’autres icones populaires auxquelles peuvent être associées mercantilisme et cynisme de ses auteurs. Malgré une exposition et une marchandisation manifestes du personnage, sa réception ne souffre d’aucun opprobre, d’aucune suspicion. L’appropriation du personnage par les différents peuples à travers son prénom atténue de fait le nationalisme de ce personnage et en conséquence le sentiment négatif qui peut découler du suprématisme associé au conquérant.

9. https://www.youtube.com/watch?v=ikDkUlDgQwM - adresse consultée le 28 mars 2015.

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3. Mise en exergue de la nature du corps ubiquiste de la figure de

« Charlie » dans He was Here !

Comme nous l’avons annoncé précédemment le personnage

« Charlie » dans HwH ! est qualifié d’ubiquiste. Le jeu à réalité alternée de digital street art HwH ! n’a aucune frontière spatiale, ni temporelle. À chaque instant partout dans le monde sont observable des occurrences de « Charlie ».

Nous illustrerons ce propos au travers de l’anecdote d’un membre du collectif WfH. Lors d’un séjour à Tokyo, ce joueur a photographié au milieu de la foule du quartier de l’électronique tokyoïte Akihabara, une image de « Charlie ». Pour réussir son cliché et choisir celui qu’il préférerait voir s’afficher par le biais du QRCode qui sera placé à cet endroit, le joueur a pris une salve de photographies. Voulant éviter de saturer la mémoire de son objet mobile, il décida de faire sur le champ un tri afin d’enlever toutes celles où un passant cachait la vision de

« Charlie ». À son grand étonnement, alors qu’il s’apprêtait à effacer la première photographie correspondant aux critères sus-énoncés, il s’aperçu qu’une autre occurrence de « Charlie » était visible sur cette photographie. Un autre individu que celui qu’il avait cherché à photographier initialement avait endossé lui aussi l’identité provisoire de

« Charlie ». Cette autre personne ne lui est jamais apparue directement, ni avant, ni pendant les photographies ni même après avoir constaté son existence manifeste. Cet individu n’a été visible qu’au travers cette unique photographie. Nous remarquons dans ces photographies présentées (Figure 3) que le cadre est quasi identique. Dans la photographie de droite, prise en amont de celle de gauche, l’image de « Charlie » initiale est dissimulée derrière les deux personnes floues du premier plan et de l’esquisse de silhouette de la personne de deuxième plan. Aucune photographie de la série n’a révélé les deux occurrences sur un même et unique cliché. La photographie de droite est la seule preuve de la présence d’un autre « Charlie » se déplaçant dans le sens contraire du premier.

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Il n’est pas rare de croiser lors de la même journée dans des temps très

rapprochés plusieurs occurrences de « Charlie » (Figure 4). Il n’est donc pas difficile d’imaginer qu’au même moment d’autres « Charlie » étaient visibles dans le reste de la ville, du pays et du monde.

Figure 3. Occurrences de « Charlie » - À gauche, l’image de « Charlie » initialement cherchée à être capturée. À droite, l’image « Charlie » révélée par la

photographie.

Figure 4. Photographies prises le dimanche 26 octobre 2014 dans le jardin des Tuilerie à l’occasion du parcours de la FIAC hors les murs.

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Il est important de souligner ici, que cet habit rayé uniformément de rouge et de blanc est un habit simple qui existe sous plusieurs formes et sous diverses marques depuis de nombreuses années. Il s’agit d’un

« classique » de la mode. Il n’est donc pas difficile à trouver en dehors de nos territoires, cet habit n’est pas attaché à une nationalité précise tout comme le personnage « Charlie ». Il est donc facile de trouver des personnes endossant l’identité provisoire de « Charlie ».

Cet uniforme de « Charlie » devient un motif repérable et identifiable dans la foule, comme lorsque l’on cherche le personnage dans les illustrations de Martin Handford (Figure 5). Nous remarquons sans peine que l’identité unique de « Charlie » est porté par une multitude de profils qualifiés usuellement de diversifiés car non classables parmi les catégories socio-culturelles habituelles ou en termes de genre ou encore classifiées par l’âge, etc. La figure de « Charlie » est universelle. Dans HwH

! « Charlie » est un être polymorphe dont l’identité n’est fixée que par le port d’un haut rayé uniformément de rouge et de blanc. Si l’habit est caché dans son intégralité, par exemple sous un manteau, le calque de réalité alternée disparaît, « Charlie » n’est plus. En revanche dès que l’on aperçoit l’habit, l’identité « Charlie » prend le dessus sur l’individualité de la personne, devenant pour un moment « Charlie » avant de disparaître.

Nous pouvons cependant noter certaines tendances dans le port du vêtement « Charliesque ». Nous le trouvons plutôt durant les périodes douces et chaudes de l’année. L’habit se déclinant beaucoup en manches courtes. La version manches longues étant préférée en début de printemps et en fin d’automne. Il est bien évidemment possible de croiser

« Charlie » en hiver, mais la déclinaison en pull reste plus rare.

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Figure 5. Différentes occurrences de « Charlie »

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« Charlie » apparait donc comme un motif récurent à celui qui y prête attention. Dans le jeu HwH ! nous avons pensé à mettre en forme l’idée de collection. C’est la collection des clichés existant de « Charlie » que le joueur peut dévoiler en se rendant sur place. La galerie photo est pensée, à la manière des albums d’images autocollantes à collectionner, objets très populaires chez les enfants dans les années 80-90. Ainsi à chaque scan, se découvre une image qui prend place dans les différentes pages de la galerie. Le joueur est poussé pour parfaire sa collection à dévoiler les photographies adjacentes (Figure 6). Pour cela, il doit obligatoirement

Figure 6. Exemple d’une page de collection chez le joueur

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se rendre aux différents endroits où la présence de « Charlie » a été marquée par la présence d’un QRCode.

4. Le QRCode comme motif urbain ubiquitaire

Le QRCode désigne dans la rue la présence passée de « Charlie » traduite par le titre du projet « He was here ! - Il était là ! ». Par sa récurrence dans l’espace public le QRCode de HwH ! devient un motif urbain au même titre que les icones urbaines du mouvement street art (les Chats de M. Chat, les mosaïques d’Invaders, etc.). Le motif urbain se dessine par sa redondance dans la rue et par le sentiment de déjà-vu qu’il procure à ceux qui le remarquent. C’est un travail patient entre le street artiste et les passants, car si chacun connaît le travail de M. Chat ou d’Invaders peu de gens l’avaient remarqué dès leurs premières poses en 1998. Cela fait donc vingt années que nous côtoyons quasi quotidiennement ces œuvres urbaines.

La carte accessible depuis l’application, montre les localités où

« Charlie » a été vu. D’un simple coup d’œil, le joueur peut voir tous les endroits où le corps ubiquiste de « Charlie » est présent, par le biais de marqueurs rayés. Cette carte est basée sur la technologie Googlemap, plus l’utilisateur zoome plus il voit en détail les différents lieux, et peut s’apercevoir de son omniprésence. Ces marqueurs géolocalisés indiquent chacun la présence d’un marqueur physique celui d’un QRCode unique numéroté de HwH ! Le joueur est invité à explorer le lieu indiqué à la recherche de son correspondant physique.

L’objet QRCode a été choisi car il témoigne grâce à sa forme reconnaissable, d’une lecture possible avec un objet connecté (Figure 7).

Afin d’assurer sa pérennité dans l’espace public. Les QRCodes ont été imprimés en 3D, en plastique ABS.

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Chaque personne croisant ce motif sait qu’il peut être lu. Par sa récurrence en tant que motif urbain, il suscite la curiosité et amène celui qui croise ce motif régulièrement à s’interroger sur sa signification (Figure 8).

Sa lecture permettra de voir apparaitre la photographie de « Charlie » vu en cet endroit. Le curieux pourra alors remonter le fil en trouvant la racine de l’adresse du site et sera invité à télécharger gratuitement l’application. En raison de sa composante numérique et des informations

Figure 7. Exemple du design des QRCodes de HwH !

Figure 8. Le QRcode de HwH ! comme motif urbain.

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uniques cachées dans son dessin, la signalisation de « Charlie » est celle d’un motif urbain ubiquitaire dévoilant le corps ubiquiste de « Charlie ».

5. Ubiquité des membres du collectifs We found Him

Le collectif We found Him est anonyme. Il forme un groupe homogène où l’individualité s’efface au profit de la communauté, le « We » est un

« nous » englobant. La phrase « We found him » se traduit par « Nous l’avons trouvé ». Ce « nous » est celui de la communauté de WfH face au jeu de le trouver, « lui » (him), que nous nommons en français « Charlie ».

Il y a deux facettes du joueur, l’explorateur et le chasseur.

L’explorateur est celui qui découvre, qui lit les QRCodes, qui enrichit sa collection photographique par des déplacements ciblés ou déambulatoires. Il repère les QRcodes dans l’espace public et les scanne, il peut ensuite jouer avec le lieu qui l’entoure et replacer « Charlie » à l’endroit où il a été capturé (Figure 9). Il peut aussi noter les changements urbains qui ont été opérés. Dans le cas de la photographie présentée dans la figure 9, nous pouvons constater que si le lieu est bien identique la devanture du café « Le rond-point » a changé. Il y a une note de vestige architecturale et urbaniste qui accompagne ces photographies.

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Figure 9 – Le joueur explorateur

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Tandis que dans la posture du chasseur, le joueur passe à l’action, il est dans une approche plus participative, puisqu’il contribue à enrichir la base de données de « He was here ! ». Le joueur peut sortir dans la rue avec pour objectif de trouver l’image de « Charlie » dans la rue. Il peut décider de se rendre dans des endroits où se réunissent facilement des personnes, que cela soit dans un quartier fréquenté, un jardin public ou une exposition à ciel ouvert (Figure 4), etc. Le joueur peut aussi choisir de respecter son programme de la journée et rencontrer « Charlie » tout autant au détour d’une rue que dans les différents lieux cités précédemment. Lors de ces rencontres, le joueur choisit de basculer dans le rôle du chasseur, au moment où il traquera sa proie jusqu’à réussir son clicher.

À force de répétition de ce motif rayé de rouge et de blanc, que cela soit dans l’espace public avec les QRCodes et les rencontres évènementielles avec un individu « Charlie », le cerveau du joueur est conditionné à répondre à ce stimulus visuel (Figure 5 et Figure 8).

Inconsciemment lorsqu’un membre de WfH arrive dans un lieu, il repère instantanément, les personnes portant des habits qui pourraient correspondre à « Charlie ». Sa vision se trouve parasitée par ce calque qui augmente sa réalité et qui le fait basculer n’importe quand dans cette alternance proposée par HwH ! Le joueur est libre de choisir d’interrompre sa routine pour répondre au stimulus reçu soit pour lire le QRCode rencontré, soit pour suivre « Charlie » le temps de prendre une photographie, ou alors le joueur peut choisir de ne pas répondre à cette sollicitation visuelle et de continuer son chemin. Dans tous les cas, le joueur est conscient de l’information qu’il a perçue et il effectue un choix.

La réalité des membres de WfH peut être à tout instant perturbée par l’offre d’un basculement possible vers l’ARG HwH !

Un joueur peut aussi endosser sciemment l’identité de « Charlie » effectuer un parcours et essayer de deviner par l’attitude des personnes qui l’entourent s’il a été repéré par des membres du collectif WfH. Il pourra à terme vérifier si des QRCodes attestent de son passage, montrent qu’il fut « lui ».

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Le nouveau membre du collectif peut être amené soit par la découverte récurrente des motifs urbains déposés autour de lui soit par le bouche-à-oreille. La forte présence recensée de « Charlie » en un endroit en dit plus sur la communauté que sur « Charlie » lui-même.

« Charlie » est un virus présent partout sur le globe, c’est le rapport de son image qui est conditionnée aux membres de WfH. C’est la contamination, ici qui est un autre point de vue intéressant à imaginer.

Car si elle est conditionnée dans certain épicentre de par l’environnement direct, c’est sur les déplacements en d’autres terrains non-dévoilés par les différents membres qui suscitent un intérêt certain.

6. Conclusion

La notion d’ubiquité est très présente dans le projet de jeu à réalité alternée de digital street art HwH ! Nous avons pu constater que le personnage de la pop culture autour duquel HwH ! se focalise possède dans sa manière d’être exploité des qualités ubiques. De plus, son exploitation dans HwH ! relève parfaitement d’une constatation et d’une mise en avant du don d’ubiquité. La multiplicité des symboles conforte encore dans ce sens. De même que l’anonymat et par de fait l’homogénéité de la communauté WfH appuie encore ce point.

Nous pouvons alors dire aisément que le projet HwH ! s’inspire d’une icône populaire ubique, dont l’image ubiquiste est signalée par des motifs ubiquitaires eux-mêmes lus et dont la composante est enrichie par une communauté anonyme dotée par sa nature d’une forme de don d’ubiquité.

Bibliographie non numérotée et Références

Daste, Sophie., « Projet He was Here ! du collectif We found Him – Expérimentation artistique entre digital street art et Alternative Reality Game (ARG) » chapitre dans l'ouvrage « Frontières Numériques & Artefacts », éditions l’Harmattan – Local et global. 23 pages (2015).

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Handford, Martin., Où est Charlie ?, Edition : Nouv. Éd. Paris : GRUND, 1998-2017.

Invaders., L’invasion de Pais : Volume 1, La Genèse, Contrôle P. Paris, Franck Salma, 2009.

Invaders., L’invasion de Pais : Volume 2.0, Contrôle P. Paris, Franck Salma, 2012.

Jenkins, Henry., La culture de la convergence:Des médias au transmédia, Paris: Armand Colin, 2013.

Références

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