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MISE AU POINT

Injections intradiscales : mise au point sur les différentes techniques et indications

Intradiscal injections: update about different techniques and indications

H. Gouze*, S. Rozenberg*

* Service de rhumatologie, groupe hospitalier de la Pitié-Salpêtrière, Paris ; université Paris-VI.

La lombalgie chronique affecte une part crois- sante de la population, et les méthodes diagnostiques se sont beaucoup améliorées ces 20 dernières années, permettant une meilleure caractérisation des lésions rachidiennes, y compris les atteintes discales, également mieux définies par l’IRM. La prise en charge du patient lombalgique chronique nécessiterait de préciser la nature de l’at- teinte anatomique et, dans le cas des discopathies, il s’agirait ensuite de proposer un traitement efficace et bien toléré. Les méthodes de première intention restent le traitement antalgique, la kinésithérapie, et les infiltrations rachidiennes. Cependant, il arrive que ces traitements soient insuffisants, et les injec- tions intradiscales de corticoïdes ont été proposées pour la prise en charge de ces lombalgies rebelles au traitement de première intention (1-5).

Quant au traitement des lomboradiculalgies par hernie discale, les injections intradiscales ont consisté historiquement en l’injection de chymo- papaïne intradiscale, qui a montré une efficacité à long terme, mais qui, par la suite, n’a plus été produite ni commercialisée (6). La triamcinolone a elle aussi démontré une efficacité, mais des effets indésirables ont conduit à l’arrêt de son utilisation.

Cela a poussé à rechercher des alternatives pour le traitement des lomboradiculalgies, consistant en l’utilisation d’autres procédés comme l’injection d’oxygène-ozone ou de DiscoGel®.

Nous présentons ici une mise au point sur les injec- tions intradiscales de corticoïdes réalisées dans le cadre des lombalgies chroniques par atteinte discale, sur les autres procédés proposés dans les lombo- radiculalgies chroniques par hernie discale, ainsi que sur les complications décrites liées à ces injections rachidiennes.

Injections intradiscales cortisoniques

Les injections intradiscales les plus utilisées pour le traitement de la lombalgie chronique sont les infil- trations cortisoniques, pour lesquelles on retrouve le plus de données dans la littérature (tableau).

Les études observationnelles sont nombreuses et relatent pour la plupart des résultats encourageants quant à l’efficacité des injections intradiscales de corticoïdes (4). F. Fayad et al. ont rapporté une diminution du score VAS (Visual Analogue Scale, coté de 0 à 100) à 1 mois d’une injection de corti- coïdes chez 74 patients souffrant de lombalgie par atteinte discale : la diminution était de 30,2 dans le groupe Modic 1, de 29,4 dans le groupe Modic 1 prédominant, versus 5,3 dans le groupe Modic 2 (p = 0,009 et p = 0,017, respectivement). L’effica- cité à 3 et 6 mois semblait être meilleure dans les groupes Modic 1 et Modic 1 prédominant, sans être statistiquement significative (4). L’étude de J. Beaudreuil et al. a mis en évidence une réduc- tion importante de la douleur à court terme après injection de corticoïdes chez des patients avec discopathie de type Modic 1 : 24 heures après l’injec- tion, une amélioration était constatée chez 90 % des patients avec discopathie Modic 1 et 71 % de ceux avec discopathie Modic 1 et antécédent de chirurgie ; chez les sujets sans discopathie recevant l’injection de corticoïdes, seuls 30 % rapportaient une amélioration (7).

Ces études évaluatives semblent montrer une efficacité accrue dans les discopathies Modic 1 et apportent un fondement à la réalisation d’essais chez les patients atteints de discopathie Modic 1 ou Modic 1 prédominant. Ce résultat est d’ailleurs

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La Lettre du Rhumatologue • N° 440 - mars 2018 | 9

» Pour les lomboradiculalgies par hernie discale, d’autres types d’injections intradiscales ont été proposés. Lomboradiculalgie Modic

Highlights

»Determine the right anato­

mical feature involved in chronic low back pain or lumbar radi­

culalgia is essential to propose an appropriate treatment.

»Studies about intradiscal injections of corticoids showed positive results at short­term evaluations but need additional studies.

»As for radiculalgia caused by herniated disc, intradiscal injections of other techniques have been evaluated.

Keywords

Intradiscal injections Chronic low back pain Radiculalgia

Modic conforté par l’équipe de C. Nguyen et al., qui avait

fait état d’un cas de régression d’une discopathie Modic 1 après infiltration de corticoïdes, lors d’une IRM de contrôle à 1 mois mettant en évidence une conversion d’un Modic 1 en Modic 0 chez un patient de 31 ans souffrant de lombalgie depuis 1 an (1).

L’efficacité clinique était aussi présente et se maintenait 9 mois après l’injection. Ces résultats confortent l’hypothèse d’une réaction inflamma- toire de l’os sous-chondral adjacent aux plateaux vertébraux dans les atteintes Modic 1, et étayent l’utilisation de corticoïdes intradiscaux.

L’étude prospective de P. Cao et al. est en faveur d’une efficacité des injections de corticoïdes, mais elle est plus controversée : cet essai randomisé contrôlé en double aveugle ciblait des patients âgés de 20 à 60 ans, atteints de discopathies invalidantes Modic 1 ou 2, résistantes au traitement médical, avec un test discographique positif (3).

Les patients étaient séparés en 2 groupes : Modic 1 ou Modic 1 prédominant (groupe 1), et Modic 2 ou 2 prédo minant (groupe 2). Chacun des groupes était rando misé pour recevoir soit une injection de sérum physiologique, soit une injection de corti- coïdes ou une injection de corticoïdes et d’extraits synthé tiques d’herbes chinoises aux caractéristiques anti-inflammatoires (cervus et cucumis). L’évalua- tion portait sur les scores VAS et ODI (Oswestry Disability Index) à 3 et 6 mois. L’essai a montré une effica cité des injections de corticoïdes : le score VAS initial de 6,5 diminuait à 1,8 à 6,0 mois pour les Modic 1, et passait de 6,8 à 1,6 pour les Modic 2 (sans réduction dans le groupe placebo). Le score ODI passait de 35,7 % à 14,7 % dans le groupe Modic 1 et de 31,5 % à 13,8 % pour les Modic 2, versus 37,9 % à 44,4 % dans le groupe placebo. Les résultats des scores VAS et ODI étaient similaires dans le groupe corticoïdes et herbes médicinales et dans le groupe

Tableau. Études évaluant l’efficacité des injections intradiscales de corticoïdes.

Étude Type d’étude Critères d’inclusion Critères

d’évaluation Nombre

de patients Résultats p

Fayad, 2007 (4) Observationnelle

rétrospective Lombalgie par atteinte discale,

> 3 mois

Baisse du score

VAS à 1 mois 74 Modic 1 : 30,2 %

Modic 1 prédominant : 29,4 % Modic 2 : 5,3 %

p = 0,009 p = 0,017 Beaudreuil, 2012 (7) Observationnelle

rétrospective Lombalgie par : Modic 1, Modic 1 et rachis opéré, pas de Modic

Baisse du score

VAS à 24 heures 97 Modic 1 : 90 %

Modic 1 + antécédent de chirurgie lombaire : 71 % Lombalgie sans Modic : 30 %

p < 0,05

Nguyen, 2011 (1) Cas clinique Lombalgie par discopathie

Modic 1 depuis 1 an IRM à 1 mois Score VAS à 9 mois

1 IRM : transformation Modic 1 en Modic 0

VAS : 0 Cao, 2011 (3) Randomisée

prospective 20­60 ans

Lombalgie par discopathie Modic 1 ou 2, > 6 semaines

Diminution des scores VAS et ODI à 6 mois

120 Corticoïdes

• Modic 1 : VAS : – 4,7, ODI : – 21,0 %

• Modic 2 : VAS : – 5,2, ODI : – 17,7 %

• Contrôle : VAS : 0, ODI : + 6,5 %

p = 0,12

Nguyen, 2017 (2) Randomisée

prospective Lombalgie par discopathie

Modic 1, score NRS > 40/100 Score NRS < 40/100

à 1 mois 135 À 1 mois :

• groupe corticoïdes : 55,4 %

• groupe placebo : 33,3 % À 1 an : pas de différence significative

p = 0,09

VAS : Visual Analogue Scale. NRS : Numerical Rating Scale.

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MISE AU POINT

Injections intradiscales : mise au point sur les différentes techniques et indications

corticoïdes. Cependant, il n’est noté aucun effet placebo dans le groupe sérum physiologique, ce qui est étonnant dans ce genre d’essai où le patient reçoit une discographie et étant donné également l’évolution naturelle des discopathies, qui, en général, s’améliorent après plusieurs mois. Par ailleurs, les résultats étaient similaires dans les groupes Modic 1 et Modic 2, ce qui n’est plutôt pas le cas dans les autres essais.

L’équipe de C. Nguyen et al. a réalisé un essai publié en 2017, prospectif, randomisé multicentrique en double aveugle, regroupant 128 patients (2). Ces derniers présentaient une lombalgie depuis plus de 3 mois, avec un score NRS (Numerical Rating Scale) supérieur à 40/100, et une discopathie de type Modic 1 à l’IRM. Le critère de jugement prin- cipal était le pourcentage de patients présentant un score NRS inférieur à 40 dans les 48 dernières heures, à 1 mois de l’injection de corti coïdes.

L’effica cité était ensuite évaluée à 12 mois. Les critères secondaires évaluaient également, à 1 et 12 mois, les limitations d’activité liées aux lombalgies (estimées par le score Quebec Back Pain Disability Scale), un score de qualité de vie, le score Hospital Anxiety and Depression Scale (HADS), le recours à des traitements médicamenteux (antal- giques, anti-inflammatoires non stéroïdiens), et le statut professionnel. Au total, 135 patients ont été randomisés : 67 dans le groupe corticoïdes et 68 dans le groupe placebo. L’âge moyen était de 46 ans, le ratio femme/homme était de 2/1 ; les patients souffraient de lombalgie depuis en moyenne 1,4 an, et 37,0 % des patients étaient en arrêt maladie ou en invalidité. Un mois après l’injection, 55,4 % des patients du groupe corti- coïdes étaient répondeurs (score NRS < 40), versus 33,3 % des patients du groupe placebo (p = 0,009). À 3 mois, le score NRS était supérieur dans le groupe corticoïdes par rapport au groupe placebo. Les résultats n’étaient pas significatifs à 1 an. La limitation d’activité liée aux lombalgies était diminuée de façon significative au bout de 1 mois dans le groupe corticoïdes par rapport au groupe placebo (84,6 % versus 54,0 %, respective- ment ; p < 0,001), mais il n’y avait pas de différence à 12 mois. Les groupes ne différaient pas pour les autres critères secondaires, notamment la reprise du travail, ni à 1 mois ni à 12 mois. Le manque d’effica cité à long terme pourrait également s’expli- quer par un effet rebond des corticoïdes, à l’origine d’une réaugmentation de la douleur à 3 mois, ou par une population de patients très sélectionnés, subissant une atteinte chronique, sévère, et un

retentissement sur la qualité de vie, sur l’humeur, et déjà conséquent dans le cadre de leur profession au moment de l’inclusion.

L’aspect physiopathologique des injections de corti- coïdes concorde avec l’hypothèse selon laquelle les discopathies de type Modic 1 sont liées à un méca- nisme inflammatoire pour lequel les corti coïdes ont un rôle à jouer. Cette notion que les injections de corticoïdes sont efficaces à court terme pour contrer le mécanisme inflammatoire des discopathies est confortée par l’étude de C. Nguyen de 2017 (2), mais, dans cette étude, l’effica cité ne se confirme pas à plus long terme. Il semble nécessaire de réaliser d’autres études randomisées d’injections intradis- cales, incluant éventuellement des patients sélec- tionnés différemment et plus récemment atteints, afin de pouvoir démontrer une efficacité à plus long terme des injections de corticoïdes, dans les disco- pathies Modic 1.

Injections intradiscales d’oxygène-ozone

Ces injections consistent en l’administration d’un mélange d’oxygène et d’azote. Le mécanisme physiopathologique repose sur les propriétés de l’ozone, par le biais d’une interaction avec les protéoglycanes pour former des protéoglycanes plus petits, permettant ainsi de provoquer une réduction de la taille du disque intervertébral par déshydratation de la matrice extracellulaire du nucleus pulposus (8). L’ozone est également un puissant gaz oxydant possédant diverses propriétés anti-inflammatoires : immunomodulatrice, analgé- sique et antiseptique. Il est injecté sous forme d’un mélange d’oxygène et d’ozone, à des concentra- tions non toxiques de 1 à 40 µg/ml d’oxygène. Le mélange est visualisé au cours du contrôle scopique, lors de l’injection. L’essai de M. Gallucci et al. a comparé l’injection d’oxygène-ozone et l’injection de corticoïdes au cours d’un essai prospectif avec randomisation, en simple aveugle de 159 patients souffrant de lomboradiculalgie : le score ODI utilisé pour l’évaluation de l’efficacité à 6 mois était infé- rieur à 20 % chez 74 % des patients ayant reçu le mélange oxygène-ozone, contre 47 % des patients dans le groupe corticoïdes (p < 0,01), les auteurs suggérant une efficacité plus prolongée de l’oxy- gène-ozone (9). L’équipe de Z. Wu et al. a comparé l’injection d’oxygène-ozone et un traitement chirur- gical montrant de meilleurs résultats, toutefois non significatifs, et sans information sur les “perdus de

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La Lettre du Rhumatologue • N° 440 - mars 2018 | 11 vue” dans le groupe traitement (10). La revue de

littérature sur les injections d’oxygène-ozone réa- lisée par l’équipe de F.N. Magalhaes et al. fait état de plusieurs essais randomisés et études observation- nelles, plutôt en faveur d’une efficacité des injec- tions, mais les études sont très disparates, avec des critères parfois discutables (11). Une étude rando- misée menée sur une population homogène retrou- vait une efficacité de l’injection d’oxygène-ozone, d’ailleurs comparable à l’injection de corticoïdes.

Injections intra-discales de DiscoGel® (gel d’éthanol)

Le DiscoGel® est un composé de gel d’éthanol.

L’éthanol induit un effet de chimionucléolyse sur le disque visé, mais il doit être intégré à un gel pour éviter toute diffusion en dehors du disque, et notamment au contact des nerfs, car il est neuro- toxique. Les études observationnelles ont montré des résultats discordants (12, 13) : l’étude de de Sèze et al. a évalué l’efficacité des injections intradiscales de DiscoGel® chez 79 patients souffrant de lombo- radiculalgie par hernie discale : 2 mois après l’injec- tion, le niveau de douleur avait diminué de 74,0 % en moyenne, et l’efficacité semblait se maintenir après un suivi moyen de 8 mois : 60,7 % des patients n’avaient plus de douleur, 76,0 % évaluaient l’effica- cité de l’injection de bonne à très bonne, et 74,0 % avaient pu reprendre leur travail (12). À l’inverse, l’équipe de A. Léglise et al. rapporte un taux d’échec de 16 patients sur 25 ayant reçu une injection intra- discale de DiscoGel® ; l’analyse en sous-groupes montre une plus grande proportion d’échecs chez les patients avec discopathie de type Modic 2 (13).

L’étude prospective de S. Touraine et al. sur les injections intradiscales de DiscoGel® incluait des patients souffrant de lombosciatique depuis plus de 6 semaines, malgré un traitement médical comportant au moins 2 infiltrations épidurales, sur hernie discale concordante (14). Après 3 mois, la douleur était abaissée de 62,4 % (p = 0,007) ; l’évaluation par le rhumatologue montrait une amélioration de 71,0 % à 1 mois et de 85,7 % à 3 mois, et l’évaluation par le patient montrait une amélioration de 73,8 % à 1 mois et de 78,6 % à 3 mois ; 63,6 % des patients ont pu reprendre leur travail dans un délai moyen de 8,7 mois. Des études prospectives avec groupe contrôle (ces études en étaient dépourvues) seraient nécessaires pour prouver l’efficacité des injections intradiscales de DiscoGel®.

Autres types d’injections intradiscales

Une étude a proposé l’injection de ciment intra- discal, dont l’objectif était de mimer un geste chirur- gical par une voie percutanée moins invasive. Cette étude concernait des sujets âgés présentant une lomboradiculalgie chronique par hernie discale, pour lesquels la chirurgie était risquée. L’équipe de P.P. Varga et al. a de ce fait proposé de réaliser un équivalent de stabilisateur discal en injectant du ciment par voie percutanée. L’étude concernait 47 patients âgés en moyenne de 69,2 ans, qui recevaient des injections de ciment de 1 jusqu’à 6 étages discaux (15). Après le geste, les patients rapportaient une diminution des douleurs lombaires et radiculaires de 69 % et 66 % respectivement (p < 0,02). Le score ODI était abaissé d’au moins 10 points au bout de 6 mois chez 61 % des patients. Cette étude était dépourvue de groupe contrôle ; on peut également noter l’absence de données sur les complications possibles à long terme, notamment le risque de tassements vertébraux chez ces sujets âgés.

Quelques études ont proposé les injections de Pla- telet-Rich Plasma (PRP), mélange de concentrés plaquettaires et de facteurs de croissance, plai- dant en faveur de la capacité de cicatrisation de ces éléments pour la régénération discale. L’équipe de Y.A. Tuakli- Wosornu et al., prospective, ran- domisée, en double aveugle, a inclus 29 patients recevant le PRP et 18 patients dans le groupe placebo : l’impact sur les scores de douleur et de fonction était significatif à 8 semaines : le score NRS Best Pain était réduit de 2,8 à 2,0 contre une augmentation de 2,1 à 2,7 dans le groupe placebo (p = 0,02) ; le score FRI (Functional Rating Index) baissait de 51,5 à 38,0 versus 45,4 à 44,2 dans le groupe placebo (p = 0,03) [16]. Le suivi à 1 an, qui concernait uniquement les patients ayant reçu le PRP, semblait montrer une amélioration persistante, bien que difficilement interprétable.

Les injections au bleu de méthylène, peu étudiées, aboutissent à des résultats discordants ; une étude randomisée montre une grande efficacité, mais peu étayée par d’autres études (17, 18).

L’injection intradiscale d’étanercept a été proposée par l’équipe de T. Sainoh et al. dans un essai pros- pectif randomisé, contrôlé, en simple aveugle, de 77 patients souffrant de lombalgies (19). Le score NRS était plus bas dans le groupe étanercept : 4 versus 7 à 4 semaines, puis 6 versus 7 à 8 semaines (p < 0,05), cette différence étant faible et donc cli- niquement peu pertinente. Bien qu’une baisse du

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MISE AU POINT

Injections intradiscales : mise au point sur les différentes techniques et indications

score ODI soit observée dans le groupe étanercept à 4 semaines, il n’y avait pas de différence à 8 semaines.

Les résultats actuels sont insuffisants pour influer sur la pratique courante.

Risques liés aux injections intradiscales

Les injections intradiscales occasionnent des effets indésirables principalement bénins, à type de cépha- lées, exacerbation des lombalgies ou radiculalgie, malaise vagal au décours du geste, et flush facial lors de l’injection de corticoïdes. Les événements indési- rables graves sont très rares. Quelques cas de para- plégie ont été décrits après l’infiltration : les facteurs favorisants de cette complication seraient l’existence d’anomalies anatomiques vasculaires, engendrant alors un risque d’ischémie médullaire (20). La plupart des cas concernent des patients ayant un antécédent de chirurgie lombaire. Les précautions pour éviter ces événements graves sont une bonne formation à la pratique du geste et le contrôle sous scopie et scanno-guidage. Effectuer un reflux avant l’injection du produit n’est pas une méthode parfai- tement fiable, car il y peut y avoir des faux positifs, mais il reste primordial de réaliser un reflux pour limiter le risque d’injection intravasculaire.

Un risque de spondylodiscite, non chiffré, existe. Les complications à long terme des injections ne sont pas démontrées. L’étude de C. Eder et al. suggé- rait une accélération de la dégénérescence discale post-infiltrative, après avoir observé une réduction du nombre de cellules et de la prolifération in vitro sur des modèles bovins, à la suite de l’injection de corticoïdes, de lidocaïne et d’iopamidol dans le nucleus pulposus (21). Des études ont évalué le risque de calcifications et d’affaissement du disque à long terme : l’équipe de R. Benyahya a réalisé des radio- graphies 6 mois et 1 an après injection intradiscale chez 68 patients et n’a pas constaté de calcifications ; on retrouvait 2 disques affaissés, l’un de 20 % à 6 mois, l’autre de 25 % à 1 an (22). Inversement, F. Debiais et al. ont observé 10 cas de calcifications sur 26 examens par scanner rachidien, 2 à 3 ans après l’injection de corticoïdes, mais il s’agissait d’injections de triamcinolone (23).

Conclusion

La preuve de l’efficacité des injections intradiscales n’a pas été démontrée de façon reproductible dans toutes les études. Des discordances persistent entre des études randomisées contrôlées bien conduites, et la reproductibilité externe n’est pas scientifiquement démontrée. Cependant, plusieurs essais contrôlés randomisés, réalisés en double aveugle, ont montré une efficacité de ces injections, au minimum à moyen terme et, à un moindre degré, à plus long terme (2, 3).

Ces études concernent principalement l’utilisation des corticoïdes, les données pour les autres types d’injections étant plus discordantes (9, 14).

Les injections intradiscales présentent des risques de complications graves très faibles : peu d’événements indésirables graves ont été décrits, et ils étaient majoritairement tempo raires (20).

Cela est à pondérer par rapport aux gestes chirur- gicaux, pour lesquels les risques per- et postopé- ratoires sont plus élevés pour les patients, et dont l’efficacité n’est pas non plus complète. Il faut garder en mémoire que ces décisions − injection intradiscale ou injection chirurgicale − doivent concerner une population de patients bien ciblée, pour lesquels la lombalgie chronique par atteinte discale est invali- dante et persiste depuis plusieurs mois, et ce malgré un traitement bien conduit associant antalgiques, rééducation motrice et infiltrations épidurales.

Des études complémentaires sont nécessaires pour démontrer l’efficacité des injections intradis- cales de corticoïdes chez les patients lombal giques chroniques par atteinte discale. De même, dans les lombosciatiques par hernie discale, les injections de DiscoGel® ou d’ozone sont théoriquement sédui- santes, mais nécessitent également d’être évaluées dans des essais randomisés en aveugle.

D’autres travaux sont actuellement plus anecdotiques, comme les injections de PRP, de bleu de méthylène ou d’étanercept, bien que certaines soient intéressantes d’un point de vue physiopathologique (16, 19). Par la suite, le constat d’un mécanisme complexe inflam- matoire et dégénératif pourrait voir apparaître de nouveaux types d’injections : l’utilisation d’anti-TNF, de chondrocytes ou de cellules souches, par exemple, a été évoquée, constituant plutôt pour l’instant des hypothèses physiopathologiques (19). Les auteurs déclarent ne pas

avoir de liens d’intérêts.

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Références bibliographiques (suite, p. 12)

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