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Relations entre utilisation du territoire et alimentation des brebis laitières au pâturage en montagne corse. Des références pour qualifier les façons de produire les laits à fromage de terroir

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Academic year: 2021

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(1)

E

n Corse, les éleveurs organisent leurs activités d'élevage (r

epro-duction du troupeau, produc-tion laitière, allaitement) pour réaliser des projets pouvant combiner le maintien de la production laitière, la valorisation des laits (livraison à des transformateurs ou fabrication fermière) et la commercialisation des jeunes sevrés

[l]. Ils cherchent à disposer de ressources fourragères prélevables par le troupeau de brebis durant toute l'année. Leur manière d'utiliser le territoire destiné à l'alimentation du troupeau laitier est

for-tement déterminée par les caractéri s-tiques naturelles du milieu physique exploité, mais aussi par la maîtrise de

B. Dubeuf: Laboratoire de recherche sur le développement de l'élevage, lnra, quar-tier Grossetti, 20250 Corte, France. <dubeuf@corte.inra.fr>

Tirés à part: B. Dubeuf

Thèmes: Systèmes agraires; Zootechnie, élevage.

Méthodes et techniques

Relations entre utilisation

du territoire et alimentation

des brebis laitières au pâturage

en montagne corse

Des références pour qualifier

les façons de produire les laits

à

fromage de terroir

Brigitte Dubeuf

l'éleveur sur le foncier. Celle-ci est néces-saire pour les investissements en bâti-ment et en matériel et pour l'améli ora-tion pastorale, en particulier la mise en culture [2].

Dans les élevages ovins laitiers, la tr ans-humance, qui constituait la manière la mieux appropriée d'utiliser les ressources fourragères disponibles de l'espace mon-tagnard [3], perd son rôle moteur du

fonctionnement de l'élevage pastoral corse. La sédentarisation des troupeaux, permise en grande partie grâce à la maî-trise du foncier, conduit les éleveurs à complémenter les animaux au pâturage en fourrages secs et en concentrés durant

la période allant des premières mises bas

d'automne au printemps principalement. Elle les conduit également à pratiquer le gyrobroyage sur des portions mécani-sables de parcours et la mise en culture de parcelles (céréales d'hiver, luzerne, graminées fourragères) pour la produc-tion et la reconstitution des ressources fourragères.

Quels rôles alimentaires les éleveurs attr

i-buent-ils aujourd'hui aux ressources

Cahiers Agricultures 2001; 10: 271-81

fourragères spontanées ? La mise en valeur de ces ressources fonde-t-elle les logiques de production de lait ?

Ces questions renvoient aux façons qu'ont les éleveurs de produire du lait durant la campagne laitière en relation avec l'utilisation des ressources fourra-gères. Elles sont pertinentes pour produi-re des réféprodui-rences mobilisables par un col

-lectif d'éleveurs engagés dans un processus de qualification des laits à fro-mage de terroir. Nous trairons ces ques-tions respectivement à travers la diversité des organisations d'utilisation des res-sources fourragères et à travers les rela-tions existant entre la manière d'utiliser ces ressources et la succession temporelle des différentes façons de produire du lait. L'objectif de ce papier est double. Il s'agit, d'une part, de produire des réfé-rences locales qui peuvent aider les pro-ducteurs de fromages typés de Corse à qualifier leurs façons de produire la matière première, et d'autre parc, de rendre compte de la démarche de pro-duction de références, afin de la rendre appropriable dans d'autres situations.

(2)

Méthodologie

Caractériser

l'organisation fonctionnelle

du territoire destiné

à

l'alimentation

du troupeau

de brebis laitières

Nous faisons appel au concept de

« fonctionnement fourrager» [4]. Il ren-voie à celui de fonction parcellaire d'ali-mentation, définie non pas comme l'objectif d'utilisation des ressources

fourragères pour satisfaire à un état phy-siologique du troupeau [5], mais comme

le rôle alimentaire que l'éleveur assigne à une zone de territoire sur laquelle existe une unité de gestion (parcelle) [6]. Cerre

définition traduit donc une succession d'objectifs d'utilisation et de mise en valem de ressources attribués à une zone du territoire destiné à l'alimentation du troupeau dura.nt l'année. Cerre approche fonctionnelle de l'utilisation du territoire

nous permet de caractériser les rôles

ali-mentaires des ressources fourragères

spontanées par rapport aux autres

res-sources fourragères au sein d'un mode d'organisation du territoire.

Pour comprendre le fonctionnement

des élevages utilisateurs de parcours,

une entrée par les pratiques est

indis-pensable [7]. Chaque zone de territoire (parcelle) est caractérisée par le déro

ule-ment successif, sur l'intervalle compris

entre deux mises bas d'automne, des pranques :

- de gestion des ressources fomragères

-périodes de pâturage, mis en défens, temps moyen journalier de pâturage, espace

clôtu-ré ou non;

- et de pilotage du troupeau sur ces res-sources - surveillance ou non du troupeau,

pilotage ou non de l'ingestion du troupeau

sur parcours ;

- d'amélioration des ressources

fourra-gères - irrigation, gyrobroyage,

fertilisa-tion, semis ;

- et de production de foin - période, nombre de coupes.

Ce déroulement de prariques met en évi-dence si la ressource fourragère est pâturée et/ ou fauchée, fait ressortir la période de mobilisation de la ressource pâturée ainsi

que les attentes des éleveurs en matière d'exigence sur l'état de ces ressources. La combinaison de ces trois critères permet

d'identifier les fonctions parcellaires

d'ali-mentation des brebis lairières.

Dans la mesure où les brebis pâturent coute l'année, nous avons différencié les

fanerions parcellaires selon la période de mobilisarion de la ressource pâmrée. La présence/absence de fonctions attribuées

pour chacune de ces périodes constime

une clé de différenciation des modes

d'organisation de l'urilisarion du terricoi-re. Nous l'avons croisée avec le mois où

sont calées les mises bas d'aucomne pour

or~aniser la diversité des modes d' organi-sation.

Relier l'utilisation

du territoire

avec l'alimentation

des brebis laitières

L'interaction - utilisation du territoire et alimentation du troupeau de brebis lai-tières au pâmrage - est analysée pour

identifier les logiques de production de lait, dans la mesure où les façons de pro-duire du lait reposent largement sur les

pratiques d'alimentation, caractérisées

par:

- le pilotage du troupeau sur ressources

fourragères ;

- la corn plémen ration au pâturage

-fourrage (nature et périodicité), concentrés (nature et quantité).

En référence au concept de « saiso

n-pra-tiques » [8], nous identifions la succes-sion ordonnée de périodes durant

les-quelles existe une stabilité dans les

pratiques de complémentation. Cette

stabilité est liée à une homogénéité à la fois de l'état physiologique du troupeau

et du contexte saisonnier (par exemple, mises bas d'automne, production laitière d'hiver). Pour chaque classe d'organ isa-tion fonctionnelle du rerricoire, nous analysons les périodes de complémenta-tion. Ceci nous permet de mettre en

relation les quanti tés dis tri buées et la

nature des apports alimentaires pour chacune des périodes avec le mode

d'organisation de l'utilisation du terricoi-re.

Et

par conséquent d'appréhender le

rôle de la complémentation dans

l'ali-mentation des brebis au pâturage cout au long de la campagne laitière.

Le recueil des pratiques a été réalisé chez 23 éleveurs simés en zone de montagne en Haute-Corse et représentant la cotali-té des livreurs de lait de deux petites en creprises fromagères artisanales, qui

transforment le lait collecté en fromages

typés (tableau 1). Il est fondé sur un d

ia-Cahiers Agricultures 2001; 10: 271-81

logue avec l'éleveur sur ses façons d'agir et leur justification. Ce dialogue a été facilité et scrncturé grâce à l'élaboration

par chaque éleveur d'un calendrier

sim-plifié du déroulement du cycle de repro-duction - production de son troupeau

laitier, de l'ucilisacion des surfaces et du pilotage des brebis au pâmrage ainsi que

d'un plan schématique du territoire

affecté au troupeau laitier.

Fonctions parcellaires

d'alimentation

Identification des fonctions

(tableau 2)

Les fonctions parcellaires d'alimentation om été identifiées en combinant crois critères : ressource pâturée et/ou fauchée, attente de l'éleveur en matière d'exigence

sur l'état de la ressource, période de mobilisation de la ressource pâturée.

Au sein du territoire pastoral, les

par-celles exclusivement pâturées sont les

plus nombreuses, mais aussi les plus diverses tant par la nature de la ressource

que par la manière de l'exploiter. Les

parcelles, qui font l'objet d'un renouvel-lement d'une ressource cultivée

pluri-annuelle (celle que la luzerne), sont uni-quemenr fauchées durant l'année de renouvellement. L'année suivante, elles sont pâturées et fauchées.

Les attentes des éleveurs en matière

d'exigence sur l'état de la ressource sont variées. Produire du lait constitue une attente forte qui se traduit par des

inves-rissemen ts en rem ps er/ ou en coûts

importants: nombreuses opérarions

techniques, clôtures, achars de semence, d'engrais et matériel dans le cas de

res-sources cultivées ; surveillance active et

pilotage de l'ingestion du troupeau sur

parcours. En revanche, si les inv

estisse-ments sur la parcelle sont faibles, voire inexistants, l'éleveur attend que les brebis puissent trouver des ressources à prélever pour assurer leur entretien ou pour attendre l'hiver.

À la lumière des différemes fonctions

identifiées, nous faisons ressortir quatre

périodes bien spécifiées durant lesquelles

les éleveurs mobilisent des parcelles pour la pâture des brebis.

La période

des

mises bas d'automne.

Les

par-celles proches de la bergerie som mises en

(3)

Tableau 1

Caractéristiques des élevages et pratiques des éleveurs Variable

Effectifs des brebis traites

Maîtrise du foncier (propriété ou baux)

Surfaces cultivées/brebis traites (ares)

Mises bas d'automne

Traite Irrigation Gyrobroyage Engrais

Achat de foin Production de foin

Distribution d'aliments concentrés préparation mises bas

Distribution d'aliments concentrés du début de la lactation jusqu'au début plein printemps

Distribution d'aliments concentrés du plein printemps au tarissement Préparation à la lutte (pour les 13 qui ne complémentent pas à partir du plein printemps) Distribution de foin Modalités Moins de 100 têtes [100, 200] Plus de 200 têtes Aucune Une partie Tout le territoire 0 [O, 81 [9, 19] Septembre Octobre Novembre Manuelle Machine Non Oui Non Oui Non Sur culture

Sur prairies naturelles Non Oui Oui Non Non < 300 g/j/brebis 400 < 600 g/j/brebis Au moins 600 g/j/brebis < 300 g/j/brebis > 400 g/j/brebis de maïs Effectif 5 13 5 7 12 4 5 13 5 3 15 5 9 14 11 12 6 17 9 12 2 6 17 9 14 6 7 7 3 8 6 avec ou sans aliments du commerce

> 400 g/j/brebis d'aliments 9 du commerce avec ou sans orge

Non 13

< 200 g/j/brebis 10

Oui 3

Non 10

Jamais 7

Régulièrement durant l'hiver 11

Ponctuellement 5

Dairy flocks characteristics and farmers practices

défens dès le début de l'été et jusqu'à cette période. Les ressources pâturées diffèrent selon le mois des mises bas. Par exemple, les mises bas de septembre sur ressources semées au printemps et irriguées pendant l'été, les mises bas d'octobre sur repousse végétative d'automne d'une prairie natw-elle,

les mises bas de novembre dans des chênaies ec/ou des châtaigneraies. L'élevew-attend de ces parcelles qu'elles fournissent une alimen-tation suffisante pour assurer le passage d'une période physiologique délicate. Selon l'état de la ressource et l'évolution du contexte saisonnier, le troupeau peut

Cahiers Agricultures 2001 ; 10: 271-81

con ci nuer à pâturer sur ces parcelles après la période dévolue (par exemple jusqu'à l'arrêt végétatif d'une luzerne). La majorité des parcelles sont fauchées. Les parcelles fauchées font (ou ont fait) l'objet de nombreuses opérations tech-niques : améliorations pasrorales (défri-chage, épierrage ... ), mise en culture, f erti-lisation, irrigation, gyrobroyages fréquents. L'éleveur a de plus la maîtrise foncière (propriétés, baux) de ces surfaces. L'hiver (de mi-décembre à début mars,

arrêt de la pousse de l'herbe). Les parcelles sont le plus souvent mises en culture à l'automne (céréale d'hiver) pour être pâturées durant l'hiver. Suivant l'état de la ressource, elles peuvent être pâturées au printemps ou même fauchées. La période de traite hors estive (d'un mois après les mises bas d'automne à la fermetu-i-e des laitei-ies fin juin). Les parcelles sont pâturées plus ou moins régulièrement mais durant route la période de traite. Il n'existe donc pas de spécialisation saison-nière de ces parcelles. Les attentes en matière d'exigence sur l'état des res-sources sont variées, la gestion de la stra-tégie d'alimentation au pâturage, égale-ment. Ainsi, pour la fonction Fp4, le pâturage durant l'hiver est effeccué de façon très épisodique et relève d'ajuste-ments tactiques, alors qu'il est intégré dans la stratégie d'alimentation pour les fonctions Fpl et Fp7.

L'été. Cette période correspond à celle du tarissement. Les parcelles proches des rivières, les herbages <l'estive sont pâtu-rées par les brebis taries. Un éleveur sur cinq monte son troupeau non tari en estive pour produire du fromage en début de l'été.

Règles d'affectation

des fonctions

aux ressources fourragères

Les ressources fourragères cultivées font l'objet d'investissements importants en coûts et en temps. Elles sont général e-ment semées sur des parcelles où l' éle-veur a la maîtrise foncière (baux, pro-priété) avec parfois la possibilité d'irriguer. Ceci permet d'envisager en coute sécurité d'exploiter ces ressources pour le déroulement de périodes clés et de leur affecter durant plusieurs cam-pagnes laitières les fonctions suivantes : « ... pour le lait», « ... pour assurer le déroulement des mises bas », « ... pour le

lait durant l'hiver », « de l'herbe pour ... ,

(4)

Tableau 2

Fonctions parcellaires d'alimentation des brebis laitières (d'après Girard [81)

Fonction

Du foin pour le lait (Ff1) Deviendra (Fm1)

Du foin pour le lait si possible (Ff2)

Deviendra (Fp2)

De l'herbe pour la période

de mise bas et du foin pour le lait (Fm1)

De l'herbe pour la période de mise bas et du foin pour

le lait si possible (Fm2) De l'herbe pour la mise bas

et durant l'hiver ainsi que du

foin pour pallier le déficit de ressources pâturées (FmJ)

Une nouvelle ressource riche

en énergie pour la mise bas

(Fp9)

De l'herbe pour la mise bas

et durant le printemps et le début de l'été (Fp11)

De l'herbe et du foin pour le lait durant l'hiver (Fm4)

De l'herbe pour le lait durant l'hiver (Fp2)

De l'herbe pour le lait durant le plein hiver (FpJ)

De l'herbe pour attendre le plein hiver (Fp10)

De l'herbe pour le lait durant la lactation (hors estive) (Fp1)

De l'herbe jeune à pâturer

(Fp4)

De l'herbe pour la ration de

base des brebis traites (Fp7)

De l'herbe pour le lait d'été

(Fp5)

De l'herbe pour les brebis taries (Fp6)

Identification de la fonction

Fonction non mobilisée pour une période de pâturage des brebis

Ressource fourragère

Semis de printemps, dès juin à trois coupes de foin, avec irrigation si nécessaire. Irrigation Luzerne l'été pour assurer une production d'herbe de qualité pour la mise bas de septembre.

Foin distribué dès les premières gelées

Semis au printemps, coupe de foin si les conditions climatiques le permettent, sinon pâtura- Ray grass italien (RGI) ge des brebis fin printemps. Pâturage à l'automne.

Foin distribué durant l'hiver

Fonction mobilisée pour la période des mises bas

Irrigation si nécessaire pour assurer une production d'herbe de qualité pour la mise bas de septembre. Pâturage des brebis pendant cette période et jusqu'à l'arrêt végétatif. Mise en

défens au redémarrage de la végétation, 2 à 3 coupes (voire 4) pendant l'été grâce à l'irriga

-tion.

Foin distribué dès les premières gelées

Pâturage des brebis de la mise bas jusqu'à l'arrêt végétatif. Mise en défens au redémarrage

de la végétation, 1 à 2 coupes si pluies suffisantes en juin sinon pâturage par les brebis.

Foin distribué durant l'hiver

Pâturage des brebis de la mise bas à la fin de l'hiver. Mise en défens au moment du redé

-marrage de la végétation puis une coupe de foin (fin mai début juin) pour équilibrer une ration ou comme fourrage principal en cas de fortes pluies ou de neige.

Irrigation possible

L'utilisation d'une ressource cultivée ou spontanée, ciblée pour la période de mise bas.

Semis d'une céréale à la fin de l'été, irrigation, utilisation lors des mises bas d'automne

Pâturage à partir de janvier et jusqu'au début de l'été. Mis en défens et irrigation. Pâturage des brebis de la mise bas au sevrage des jeunes

Fonction mobilisée pour la période du pâturage d'hiver

Semis d'automne, pâturage durant l'hiver puis mise en défens au redémarrage de la végéta

-tion et, si les conditions climatiques le permettent, une coupe de foin au printemps Semis d'automne, pâturage dès le début de l'hiver et durant le plein hiver. Selon l'état de la ressource, pâturage jusqu'à la transhumance d'été ou le tarissement.

Semis d'automne et mis en défens jusqu'au plein hiver (janvier) du fait de mises bas tar

-dives (novembre) et de la possibilité d'utiliser d'autres ressources au début de l'hiver

Pâturage des brebis après retrait des jeunes et jusqu'à janvier. Ce type de surface permet à

l'éleveur de réserver une autre ressource pour le plein hiver. Ces surfaces sont

suffisam-ment stables tant au niveau de la nature de la ressource qu'au niveau du foncier, pour que l'éleveur l'intègre dans sa stratégie d'organisation du territoire

Fonction mobilisée pour la période de pâturage durant la période de traite hors estive

Pâturage des brebis durant toute la lactation tout en optimisant la qualité de la pâture - Multiplication des opérations (labour, semis, fertilisation, gyrobroyage, etc.)

- Pilotage actif du troupeau tout au long de la journée par le berger

Pâturage pendant l'automne et au printemps. Pour la surveillance des mises bas d'automne

la fonction est attribuée à une parcelle clôturée de prairie naturelle

Pâturage des brebis durant la lactation. Ces surfaces ne font pas ou peu l'objet d'améliora

-tions pastorales. Leur durée d'utilisation journalière varie selon l'état de la ressource. La qualité de la ressource dépend des facteurs naturels

NB: dans le cas d'un parcours, remobilisation à la fin de l'été par les brebis taries

Fonction mobilisée pour la période de pâturage d'été

Montée en estive en juin du troupeau. Traite durant 1 à 1,5 mois puis pâturage pour brebis

taries jusqu'à la descente du troupeau à partir de septembre

Pâturage d'été Luzerne Luzerne Prairie naturelle Prairie naturelle Sorgho, céréale Châtaigne, glands Prairie naturelle

Céréale d'hiver (annuel)

Céréale d'hiver RGI (bi-annuel)

Céréale d'hiver RGI

Prairie naturelle

Parcours, prairies naturelles,

dactyle

Parcours, prairies naturelles

Parcours, prairies naturelles

Estive (entre 750 à 1 600 m d'altitude)

Estive, parcours

Dairy ewes feeding fonctions of grazing areas (from Girard [81)

fourragères cultivées ont un statut fonc-tionnel bien identifié et partagé par les

éleveurs. Les règles d'affectation des fonctions aux ressources cultivées

découlent de ce statut.

Comparativement, il existe w1e diversité dans les règles d'affectation des Fonctions aux ressources fourragères spontanées, mettant en jeu quatre familles de condi

-tions :

Cahiers Agricultures 2001 10: 271-81

- la topographie des parcelles (proximité de la bergerie, proximité de source d' irri-gation, possibilité d'entretien, altitude) ; - la namre de la ressource fourragère

(5)

Catégorie 1 : 10 éleveurs (soit 43 %)

Période de mobilisation des fonctions oarcellaires

Fonctions parcellaires Mises bas de septembre Hiver Printemos 1 Eté

Fm1 ~ Fc2 1 l Fp1 1 Fo7 Fp5/Fp6 1

Période de mobilisation des fonctions oarcellaires

Fonctions oarcellaires Mises bas d'octobre Hiver Printemos 1 Eté

Fm1 V,i ~ u Fm2 "" ou Fc9 Fo2 11111 Fp7 Fp4

..

1. . . .

r---v

l,

j

Fp5/Fp6 1

Période de mobilisation des fonctions parcellaires

Fonctions oarcellaires Mises bas de novembre I Hiver Printemos 1 Eté Fm1

~

~

"'

""

ou Fm3

""'

ou Fo9 Fo3 Fo7 1 Fp5/Fp6

Catégorie 2 : 8 éleveurs (soit 35 %)

Période de mobilisation des fonctions parcellaires

Fonctions parcellaires Mises bas d'octobre Hiver Printemps 1 Eté

Fp2 1 ~ ou Fm4 Fp7 .. -i.r-1/ Il Fo4

..

Fp5/Fp6 1

Période de mobilisation des fonctions oarcellaires

Fonctions parcellaires Mises bas de novembre Hiver Printemps 1 Eté Fp3

Fc7

Fp5/Fp6 1

Catégorie 3 : 3 éleveurs (soit 13 %)

Période de mobilisation des fonctions oarcellalres

Fonctions parcellaires Mises bas d'octobre Hiver Printemps 1 Eté

Fp7

Fo4 IÏi

..

Il Il Il

avec ou sans Fo1 1

Fp6 1

Catégorie 4 : 8 éleveurs (soit 9 %)

Période de mobilisation des fonctions oarcellaires

Fonctions parcellaires

1

·-~·-··

1

Hiver Printemps 1 Eté Fo9

Fc11

• •

--Fp10 l

Fo3 FpS

ID

Ressource spontanée, parcelle ouverte • Ressource spontanée, parcelle fermée

D

Ressource cultivée

I

- Mise en défens - Irrigation

D

Coupe

Figure 1. Organisations fonctionnelles du territoire destiné aux brebis laitières.

Figure 1. Organizations of land use for dairy ewes feeding.

glands, etc.) et la diversité des ressources prélevables au cours de l'année (fruits, jeunes pousses, feuilles jeunes, feuilles persistances, etc.) ;

- l'invesrissemenr en temps que souhaite

ou peur réaliser l'éleveur sur ces

res-sources (pilotage actif du troupeau, voire

sur parcelles clôturées) ;

- la conduire de la parcelle (mise en défens suffisance des ressources pour être

en état d'être pâturées durant les

périodes ciblées).

Les éleveurs affectent aux ressources

four-ragères spontanées des fonctions multiples

er variées. Ils arrenden r peu de ces

res-sources pour la période de lactation

d'hiver, en raison d'une pousse hivernale quasiment nulle. Elles sont principalement

pâturées à l'automne (dmre des glands et

repousse de la strate herbacée liée aux

pluies), au printemps (redémarrage de la

végéraùon, jew1es pousses de ligneux) er

durant l'été (déplacements de troupeaux dans les différents étages végétatifs).

Cahiers Aaricultures 2001 10: 271-81

Utilisation

du territoire

pour l'alimentation

des brebis

Critères de choix

de la période

des mises bas d'automne

La région montagneuse, où se réparcissenr la majorité des éleveurs choisis pour l'étude, présenre des conuaimes physiques bien idenrifiées par les éleveurs : zones

sèches er/ou froides en hiver (limitant

for-cement la pousse hivernale) avec des gelées précoces dès le début de l'hiver, ainsi que

des sols empierrés peu fertiles.

Les

an1élio-racions pastorales permercenr d'y remédier

en partie. La possibilité de mettre en cul-ture er/ou d'irriguer devient une condition nécessaire pour envisager une période

pré-coce de mises bas de septembre, durant

laquelle la production de ressources four-ragères spontanées est quasiment nulle.

C'est pourquoi, seulement 13 % des él

e-veurs choisissem comme période de mises

bas le mois de septembre, alors que deux

éleveurs sur trois choisissent le mois

d'octobre qui coïncide avec la repousse végétative d'automne.

La vente du laie est la principale source

de revenu des éleveurs de brebis. Cepen-dant 22 % des éleveurs, soucieux de bien valoriser leurs agneaux, recherchent les mises bas tardives de novembre, pour les vendre durant la période de Noël.

Modes d'organisation

de l'utilisation du territoire

(figure

1)

Les modes d'organisation de l'utilisaùon

du cerr.itoire one été répartis en quatre

catégories en référence à la

présence/absen-ce de parcelles mobilisées pour la pâture des brebis spécifiquement pour le déroule-ment des mises bas d'automne, pour l'hiver, pour toute la période de tra.i ce hors

estive, pour l.'écé. Le mois où sont calées

les mises bas d'automne permet d'organi-ser la diversité des modes d'organisation pour d1aque catégorie.

La catégorie l est caractérisée par une

organisation de l'urilisaùon du territoire

fondée sur l'affectation de parcelles pour

(6)

de chacune des quarre périodes. Les

mises bas de septembre, d'ocrobre er de novembre sont représentées. Les éleveurs

font pâturer leurs brebis lors des mises bas sur des parcelles fauchées au prin-temps. Ils cherchent à développer la mise en culture pour le bon déroulement des

mises bas (luzerne) et de la lactation

d'hiver (céréales er RGI), et dans le cas

de mises bas précoces de septembre,

éga-lement pour le déroulement de route la

période de lactation (dactyle). Dans le cas de mises bas tardives, les fonctions

spécifiques pour la période des mises bas

sont affectées principalement à des

res-sources fourragères spontanées.

La catégorie 2 se différencie de la

pre-mière par l'absence de parcelle pour laquelle l'éleveur attribue une fonction

spécifique pour le passage de la période

des mises bas. Les éleveurs ne produisent pas de foin, et aucun d'entre eux ne pra-tique de mises bas précoces de

sep-tembre. Six éleveurs sur huit utilisent pour la période des mises bas des

par-celles clôturées souvent proches de la

bergerie, dont la fonction est avant tour

de contenir et surveiller les animaux. Les

éleveurs affectent les fonctions

spéci-fiques pour le passage de l'hiver à des céréales, qui sont pâturées dès le début

de l'hiver dans le cas de mises bas d'octobre, durant le plein hiver pour des mises bas de novembre.

La catégorie 3 est caractérisée par

l'absence de parcelle pour laquelle l'él

e-veur attribue une fonction spécifique

d'alimentation au pâturage pour le

déroulement des mises bas d'automne er

pour l'hiver. Les éleveurs ne pratiquent que des mises bas d'octobre er organisent

l'ucilisation du territoire sur la base de

deux parcelles : l'une pâturée durant

toute la période de traite, l'autre durant

l'été. Les éleveurs ne pratiquent pas la mise en culture et n'exploitent que des ressources fourragères spontanées sur

parcelles ouvertes, soir utilisées régulière-ment durant toute la période de traire,

soir principalement à l'automne er au

printemps, périodes d'offre maximale en ressources fourragères.

La catégorie 4 est caractérisée par

l'absence de parcelle pour laquelle l'é le-veur arrribue une fonction spécifique

pour la période de traire. Il n'existe donc pas une base alimentaire sans spéciali

sa-tion saisonnière. Les éleveurs affectent

des parcelles pour le déroulement des mises bas qui ont lieu en octobre et pour

la lactation d'hiver. Ils utilisent aussi des

fonctions de soudure ne relevant pas

d'ajustements tactiques, mais qu'ils

intè-grent dans leur stratégie d'utilisation du

territoire (FplO). Ils exploitent

principa-lemenr des ressources fourragères sponr

a-nées sur parcelles clôrurées.

Rôles alimentaires

des ressources fourragères

spontanées au sein

du territoire

Cette approche fonctionnelle de l'utili

sa-tion du territoire met en évidence les rôles alimentaires des ressources

fourra-gères spontanées par rapport aux autres

ressources (figure 1).

Les ressources fourragères spontanées

assurent la ration alimentaire des brebis

au pârurage durant la période allant du début du printemps aux mises bas d'automne. En revanche, pour la période

des mi es bas d'automne à la fin de

l'hiver, la part de ces ressources dans la ration des brebis et par conséquence les rôles alimentaires qui leur sont attribués

diffèrent entre les éleveurs selon l' impor-tance des ressources cultivées et le mode d'organisation de l'urilisarion du territoi

-re.

En effet, 78 % des éleveurs utilisent au

moins une parcelle de céréale ou de ray grass italien (RGI) durant le pâturage d'hiver. L'usage de la céréale est très

répandu. Les éleveurs mettent en avant sa

rusticité ainsi que sa rapidité et sa facilité d'implantation. De même, 43 % des él

e-veurs utilisent des ressources cultivées

(luzerne, céréale, sorgho) pour la période

des mises bas. La luzerne est tour

particu-Encadré

lièrement appréciée pour sa résistance à la

sécheresse, ses apports nutritifs azotés

pour des brebis en début de lactation,

mais aussi car c'est une culture

pluri-annuelle qui ne nécessite pas de travaux

culruraux importants chaque année. La mise en culture d'une partie du territoire reste forremenr associée à la maîtrise du foncier et dans une moindre mesure à la possibilité de mise en pratiques de tech-niques culturales (irrigation).

Les ressources fourragères spon canées

occupent une place centrale :

- lors du déroulemenr de la campagne

laitière, parce qu'elles sont utilisées régu-lièremenr durant toute cerce période;

- lors du déroulement d'une journée, parce qu'elles sont mobilisées durant une

grande partie de la journée. La durée

d'exploitation est liée à l'importance des

surfaces cultivées pâturées, importance

toutefois tempérée par le souci de

préser-ver la ressomce (céréale) ou d'éviter des problèmes de météorisation (luzerne), ainsi

qu'à l'organisation du temps de travail.

Cinq éleveurs exploitent un territoire

constitué exclusivement de ressources

fourragères spontanées. Au sein de ce

groupe, les quatre modes d'organisation

de l'utilisation du territoire formalisés ci

-dessus sonr représentés mettant ainsi en

évidence une grande diversité dans la

manière d'exploiter ces ressources. Le fait

de complexifier cette organisation

(caté-gorie 1) e r dicté par la mise en œuvre

de logiques de production de lait fondées

sur l'exploirarion des ressources

fourra-gères par des troupeaux sédentarisés.

Ceci permet de gérer l'incerrirude liée aux aléas saisonniers (encadré).

Une organisation complexe de l'utilisation

d'un territoire constitué exclusivement

de ressources fourragères spontanées

- Une prairie naturelle pour le déroulement de la période des mises bas

d'automne, la période de lactation d'hiver (pâturage et foin) (Fm3),

- une châtaigneraie renforçant le passage de la période des mises bas (Fp9),

- une prairie naturelle clôturée renforçant le passage du plein hiver (Fp3),

- le parcours assurant l'alimentation au pâturage pendant la période de traite (Fp7),

- l'estive (800 m d'altitude) pour la période de traite en montagne durant

le début de l'été (Fp5).

A complex organisation of land use in a region composed exclusively of

natural fodder crops

(7)

Relations

entre alimentation

des brebis

et utilisation

du territoire

Des logiques

de complémentation

différentes selon les modes

d'organisation du territoire

Nous caractéri ons la campagne laitière par une succession ordonnée de cinq

périodes, durant lesquelles existe une

sta-bilité dans les pratiques de

complémen-tation, à savoir dans la nature des

apporcs alimencaires (concentrés et foin) et la quantité distribuée des concentrés :

- P 1 : quelques semaines avant le début ~es mises bas jusqu'au début de la l

acta-non;

- P2 : du début de la lactation jusqu'au début du plein hiver;

- P3 : plein hiver; - P4 : début printemps ;

- P5 : du plein printemps jusqu'au taris-se1nenc.

Pour Pl et P2, les pratiques de compl

é-mentation sont déterminées à la fois par la période des mises bas d'automne et

par l'attribucion ou non des fonctions

parcellaires spécifiques suivantes : « des ressources pour les mises bas », « de l'herbe

pour le fait durant l'hiver » et « de l'herbe pour le lait durant fa période de traite». Ces pratiques, à travers leurs détermi-nants er leurs modalités, permettent d'appréhender les rôles alimentaires

attribués à la complémenrarion pour

chacune de ces périodes et donc de dégager les logiques de compl émenca-tion (tableau 3).

Pour P3, P4 et P5, les déterminants des pratiques relèvent, en référence à P2,

d'ajustements tactiques liées aux

change-ments du contexte saisonnier et à leurs conséquences sur l'évolution des

res-sources fourragères. Ceci se traduit

concrètement, pour 78 % des éleveurs,

par un réajustement de la compl

émenta-tion mise en place durant P2 :

- augmentation de la quantité rustribuée

et apport de foin pour remplacer le pâm-rage de manière ponctuelle (cas d'intem-péries) ou de manière régulière (foin de

luzerne pour remplacer la luzerne pâtu-rée) pour P3 ;

- diminution de la quantité distribuée er suppression de la luzerne déshydratée

pour P4.

Cinq éleveurs ne modifient toutefois pas

la complémentation sur la période

cou-vrant P2, P3 et P4.

La période P5 esr caractérisée par un

arrêt de la complémentarion, excepté

pour les éleveurs trayant à la machine.

Conséquences

sur les rôles alimentaires

des ressources fourragères

pâturées par rapport

aux apports alimentaires

La quantité d'aliments distribuée aux

brebis laitières au pâturage durant Pl et

P2 esr liée aux rôles alimentaires que les

éleveurs attribuent aux ressources

fourra-gères pâmrées. En effet, les apports

ali-mema ires sont plus faibles et moins diversifiés dans leur nature que la mani è-re d'utiliser le terriroire conduit à une

organisation plus complexe mais aussi à

une meilleure gestion de l'incertirnde liée

aux aléas saisonniers (tableau 4).

Complexifier l'organisation de l' urilisa-rion du rerriroire renvoie à un

renforce-ment de la base alimentaire par des

res-sources fourragères réservées au pâturage

à des périodes bien ciblées (mises bas d'auromne, hiver).

Ceci s'accompagne d'un développement de la mise en culrure souvent mieux appropriée pour remplir des fonctions à

des périodes où le déficit fourrager

devient imporrant er d'un apport

moindre d'aliments disrribués aux brebis

laitières au pâmrage. Comparativement, au sein de territoires peu gérés dans leur

mise en valeur (utilisarion des ressources non ciblée dans le temps er l'espace, peu

d'investissement en temps er en coûts sur

les parcelles), les brebis reçoivent des quantités importances d'aliments en

période de fort déficit fourrager.

Le fait de complexifier l'organisation de l'utilisation du territoire rend vers une diversification des rôles attribués aux

res-sources fourragères spontanées, qui sonc amenées à remplir des fonctions à des périodes ciblées. La limirarion de leur

dégradation er la gestion de leur reproduc-tion deviennent des conrutions nécessaires pour freiner leur substitution par des r es-sources cultivées qui remplissent mieux

certaines fonctions attribuées généralement

Cahiers Agricultures 2001 ; 10 : 271-81

aux ressources fourragères spontanées (cas

de la Fp l, par exemple) {tabl.eau 4). Et,

par conséquent, pour les conforter comme ration alimentaire des brebis au pâturage durant la campagne laitière.

Discussion

et conclusion

Des logiques de production

de lait fondées

sur la mise en valeur

des ressources fourragères

Bien que les éleveurs érurués ne transfor-ment pas et vendent jusqu'à présent le laie à un prix fixe au litre, leurs pratiques ne

visent pas à obtenir la quantité maximale de lait, même en hiver où les apports ali-mentaires sont importants, comme c'est le cas dans certains bassins de production de laie de petits ruminants [10, 11

J.

Ils ne

cherchent ni à optimiser un ajustement

permanent entre les apports alimentaires

et les besoins de leur troupeau laitier, ni à

descendre en dessous d'un seuil de pro-duction l'hiver, qui serait critique pour la

suite de la lactation. Ils arrendent des res-sources fourragères spomanées qu'elles fournissent le principal de l'alimentation

des brebis coure l'année au pârnrage pour

l'encretien, voire plus, pour le laie ou pour

soutenir la période des mises bas er de début de lactation. Ils ne jouent donc pas la carre de la sécurité à partir des apports

alimentaires comme dans les systèmes pro-ducrivistes, mais celle de la gestion de la

ruversité des ressources fourragères

sponta-nées et cultivées dans le temps et l'espace, héritage des systèmes pastoraux [12, 13]. De fait, leurs systèmes sont très marqués par les variations importantes incra- et

incerannuelles du contexte saisonnier. La

capacité de ces systèmes à absorber ces variations sans endommager la cohérence

de leur fonctionnement et la stabilité des pratiques d'élevage est la clé de leur viabi

-lité et de leur reproductibilité. Cette

capa-cité résulte davanrage dans l'archiceccure même du système que dans la finesse de

l'ajustement entre la rusponibilité en

res-sources fourragères et les besoins du trou-peau ou dans les règles de pilotage [14]. Dans ce sens, comprendre comment les éleveurs articulent la distribution de l'apport alimentaire avec l'organisation de

(8)

Tableau 3

Logiques de complémentation

Période P1

Apport alimentaire

Nature orge orge orge

ou maïs ou maïs ou maïs ou orge+ ou orge+ luzerne luzerne déshydratée déshydratée ou maïs+ aliments du commerce Quantité de concentrés (g/j) ·:.,; 300 400 $ • < 600 600:.,; •

Mois des mises bas octobre septembre octobre octobre

novembre novembre

Attribution des fonctions parcellaires oui oui non non

« de l'herbe pour les mises bas » oui non

« de l'herbe pour le lait durant l'hiver»

« de l'herbe pour le lait durant la non

période de traite »

Rôle alimentaire attribué aucun complément préparer préparer

à la complémentation au pâturage les mises les mises

bas bas

et combler

le déficit en ressources

fourragères Logique de complémentation

-Au pâturage

{

Pour les mises bas

et le lait

{

-Pour les mises bas et le lait

{

-et pour pallier le déficit

-fourrager

Logic of supplementation of grazing dairy ewes l'ucilisacion des ressources fourragères pour

alimenter leur troupeau sur ressources

fourragères durant toute la campagne l

ai-tière rend compte de la manière dont les éleveurs gèrent l'incertitude liée aux aléas saisonniers. Les éleveurs jouent à la fois sur l'agencement du territoire en diffé

-rentes fonctions parcellaires et sur l'affecta -tion des fonctions aux ressources fourra

-gères spontanées et cultivées (tableau 4).

En effet, d'une logique d'adaptation

maximale aux caractéristiques du milieu [3], leurs pratiques d'utilisation et de

mise en valeur du territoire se sont p ro-gressivement articulées autour d'une

double logique de mobilisation des r es-sources fourragères spontanées et de mise en culture. En zone de montagne, la mise en cultw·e s'est développée princi

-palemenc pour pallier le déficit en

res-Cahiers Agricultures 2001 l O: 271-81

P2

orge aliments maïs ou maïs du commerce + + aliments ou aliments + orge du commerce du commerce + luzerne + foin pour

± orge déshydratée pallier le

ou luzerne (après arrêt déficit en déshydratée de pâturage ressources

+ orge + foin sur fourragères de prairie luzernière)

naturelle

•:.,; 300 400 $ • 400:.,; •

septembre octobre octobre octobre novembre novembre novembre

oui oui non

oui oui non

oui (ressource de qualité)

oui oui variable

oui oui oui

oui

oui non non

oui non non

complément complément complément au pâturage pour le lait pour le lait

pour le lait et maintien corporel

--

-sources fourragères spontanées en pen

o-de hivernale et pour soutenir la période

des mises bas. Toutefois, l'étude fait apparaître que le développemenc de la

mise en culture s'accompagne, dans la

majorité des cas, d'une diminution de la

quantité d'aliments distribuées durant la

période allant des mises bas au début du plein printemps. Les éleveurs se fondent

(9)

Tableau 4

Relations entre quantités d'aliments distribuées et utilisation du territoire

Quantités d'aliments Utilisation du territoire

distribuées durant Attribution de fonctions parcellaires Ressources Fonctions attribuées Fonctions attribuées les périodes

« de l'herbe « de l'herbe « de l'herbe fourragères mobilisées aux RFS pour : aux RC pour:

pour les pour le lait pour le lait • la mise bas • la mise bas

mises bas» durant la durant • l'hiver • l'hiver

période de l'hiver» • la période de traite • la période de traite

P1 P2 traite »

Nulle Faible Oui Oui Oui RFS, Lz, C, RGI • Fm2 ou Fm3 ou Fp • Fm1 ou Fm3 ou Fp9

à faible (ressource de •Fm3 • Fp2

qualité) • Fp1, Fp4, Fp7 • Fp1

Moyenne Oui Non Oui RFS, Lz, C • Fm2 ou Fm3 • Fm2

•Fm3 • Fp3

• Fp4, Fp7

Forte Oui Aucune Oui RFS,C • Fp9, Fp11

fonction pour • Fp3, Fp10 • Fp3

la période

.

.

Moyenne Forte Non Non Variable RFS,C

.

.

à forte

.

• Fp2 ou Fm4 ou Fp3

• Fp4, Fp7

.

RFS : ressources fourragères spontanées.

RC: ressources cultivées { C: céréales d'hiver Lz : 1 uzerne

RGI : ray grass d'Italie

Relationships between feed supply and land use

ressources fourragères dans le temps er

l'espace pour produire leurs laits.

Des références

pour qualifier les façons

de produire les laits

De nombreux travaux mettent en

éviden-ce des relations enu·e des caractéristiques

de fromage et des caractéristiques d'

herba-ge [15, 16]. Dès lors que les ressources

fourragères spontanées consommées par

les animaux constituent un des éléments

de caractérisation du lien entre le fromage

et son terroir d'élevage, les éleveurs

peu-vent faire valoir l'originalité des laits, issus

du lieu où ils sont produits, à travers la

mobilisation de ces ressources. Et ainsi,

conférer à leurs laits un caractère non

substituable par des laits produits dans

d'autres lieux [17]. Ceci implique que les

éleveurs fassent le choix de conforter l'

uti-lisation er la mise en valeur des ressources

fourragères spontanées comme fondement

des logiques de production des laits.

Cerre confortation n'est pas concradicroire

avec la mise en culrure de parcelles nj avec

la complémentation au pâturage, dans la

mesure où les pratiques ne visem pas à

sub-stituer des apports a]jmentaires et des

res-sources fourragères cultivées aux ressources

fourragères spontanées. Mais, dans la

mesu-re où elles visent à combler le déficit en

res-sources fourragères spontanées à des

périodes bien précises et à offrir une plus

grande souplesse dans la gestion de l

'incerti-tude liée aux aléas saiso1miers. Cerre

confor-tation passe en grande partie par une

orga-nisa rion de l'utilisation des ressources

fomragères dans le temps er l'espace, qw

anticipe sur la disponibilité en ressources

Résumé

fourragères et sur la pérennité de la mise en

valeur des ressources spontanées.

En caractérisant, d'une part, les rôles a

li-m en rai res des ressources fourragères

spontanées par rapport aux ressources

cultivées et, d'autre pan, les rôles de la

complémentation dans l'alimentation des

brebis laitières au pâturage durant la

campagne laitière, nous éclairons les

éle-En Corse, l'élevage ovin laitier est conduit au pâturage durant toute l'année.

Aujourd'hui, la sédentarisation des troupeaux amène les éleveurs à complémenter

les animaux au pâturage et à développer la mise en culture de ressources

fourra-gères. Quels rôles alimentaires les éleveurs attribuent-ils aux ressources fourragères

spontanées ? La mise en valeur de ces ressources fonde-t-elle les Logiques de

produc-tion de lait? Ces questions deviennent pertinentes pour aider des éleveurs, engagés

dans un processus de quali6catioo des laits à fromage de terroir, à faire valoir un

caractère non substituable aux laits qu'ils produisent.

La caractérisation de l'organisation de l'utilisation des ressources fourragères

desti-nées à l'alimentation des troupeaux de brebis laitières permet d'identifier les rôles

alimentaires des ressources fourragères spontanées par rapport aux ressources

culti-vées. Pour chaque mode d'organisation de l'utilisation des ressources fourragères,

nous identifions la succession ordonnée de périodes durant lesquelles existe une

stabilité dans les pratiques de complémentation. Ceci permet d'appréhender le rôle

de la complémentacion dans l'alimentation des brebis laitières durant la campagne

laitière.

Ce sont des références mobilisables pour qualifier les façons de produire les laies

dans le temps et l'espace.

(10)

Summary

Relationships between the land use and dairy ewes feeding on Corsica mountain pasture: references

in

order to qualify farmers practices of mille. production for cheese of terroir

B. Dubeuf

ln Corsica, sheep farming is managed on pasture ail around the year. What feeding ru/es do the farmers give ta the native forage resources? Are the /agies of milk production founded on the development of these resources? These

questions are fundamental, in sa far as the farmers wish ta produce a milk which cannot be substituted by any milk produced in other areas.

The practices of farmers are analysed in order ta understand how they organise the land use for feeding dairy ewes

f/ocks (Table 1 ). The organisation of land use is characterised on the basis of feeding functions of various grazing

areas. The analysis of practices during the dairy year shows: i) if forage resources are grazed or grazed and eut for hay, ii) period of mobilisation of pasture, iii) requirements expected by the farmers on the condition of these resources. These three criteria allow ta identify the different feeding functions affected ta grazing areas. The confron

-tation of functions shows periods during which the farmers attribute grazing feeding functions ta grazing areas. Four periods are identified: autumn lambing period, winter, mi/king period except summer mountain pasture, summer. The functions are classified according ta these periods (Table 2). The organisations of land use are classified by the presence/lack of functions attributed during these periods (Figure 1 ).

The characterisation of the organisation of land use allows ta identify the feeding ru/es which the farmers attribute ta the native forage resources around the dairy year compared with forage crop. Farmers give various functions ta the native forage resources (Table 2). Ewes were sole/y grazed on native forage resources from the beginning of spring ta the lambing period in autumn. From this period to the end of winter, the part of these resources in feed ration depends on the importance of forage crop and on the organisation of land use.

The analysis of farmers practices of ewes feeding on pasture shows that the dairy year is characterised by a succes

-sion of homogenous periods of supplementation of grazing ewes. There are five supp/ementation periods: from some weeks before lambing ta the beginning of the lactation; from the beginning ta the lactation ta the depth of winter, the dept h of winter, the beginning of spring, from the depth of spring ta the drying off. For the two first per

-iods, the farmers manage supplementation feeding differently according ta the organisation of land use and the lam-bing month (September, October or November) (Table 3). For the other periods, they adjust supplementation feeding ta the seasons. During these two first supplementation periods, feed supplies depend on feeding functions given ta forage resources. ln fact, feed supplies are fesser and more homogenous as the organisation of land use is more camp/ex and induces a best management of climatic uncertainty (Table 4). Forage crop has been developed in order ta sustain lambing and ta fil/ the grazing deficit in winter. The development of forage crop is associated with a decreasing of feed supplies for the lambing period and until the depth of spring. Sa, farmers grounds for producing milks are the use of forage resource diversity in time and space.

The characterisation of feeding ru/es for native forage resources compared with forage crop and for supplementation compared with forage resources informs on farmers grounds for producing milks in relation with native forage resource use. These knowledge conduce ta produce references for a farmer group who undertake to formalise the local knowledge of native forage resource use as basis of original character of milk. One way ta produce these ref

e-rences is ta confront two formalisations of milk categories in relation with native forage resource use, the first based on the farmers practices analysis, the second on their representations.

Cahiers Agricultures 2001; 10: 271-9.

veurs sur les logiques de production des

laits en rapport avec la mise en valeur des ressources fourragères spontanées.

Cet éclairage contribue à la production de

références mobilisables par un collectif d'éleveurs qui s'engage dans une dyna-mique d'explicirarion des savoirs locaux d' exp loi rarion des ressources fourragères

spontanées comme fondement du

caractè-re original des laits produits. Une piste

pour produire ces références consiste à

confronter deux successions de catégories de laits produits en rapport avec l'utilisa-tion des ressources fourragères, l'une for-malisée à partir de l'analyse des pratiques

des éleveurs, l'autre à partir de leurs

repré-sentations (18].

Pour des producteurs de lait, l'engage-ment dans un processus de qualification

des façons de produire la matière pre-mière des fromages de terroir peur

s'accompagner d'un changement de leur

statut, dans la mesure oü ils font valoir

leur contribution à la définition de la

typiciré du fromage. Il s'agir pour eux de

se considérer comme des producteurs de

lait à fromage typique, voire comme des producteurs de fromage typique (19] •

Remerciements

L'auteur remercie Jean-Philippe Choisis et

Jean-Christophe Paoli pour leur lecture

critique.

Cahiers Açiricultures 2001 ; 10 : 271 -81

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Figure

Figure  1 .  Organisation s  fonctionnelles  du  territoire  destiné  aux  brebis  laitières

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