Félicité
ou
Le Merveilleux Théâtre
d'Art et de Science
du Docteur De Groningue
comédie scientifique
en un acte, 31 séquences et 29 effets magiques
Françoise Thyrion, Daniel Raichvarg, Michel Valmer
Introduction et commentaires: D. Raichvarg
SOMMAIRE
HISTOIRE THÉÂTRALE DE FÉLiCITÉ
5
Les auteurs
5
Félicité
au Théâtre de la Main d'Or
7
INTRODUCTION:
Science, cerveau et racisme en scène
9
TEXTE de Félicité ou Le Merveilleux Théâtre d'Art
et de Science du Docteur De Groningue
15
DOCUMENTATION
113
Thèmes de Félicité et bibliographie
113
Sources
117
Textes historiques commentés
119
FÉLICITÉ
ou
Le Merveilleux Théâtre d'Art et de Science du Docteur De Groningue
Pièce de Françoise THYRION, Daniel RAICHV ARG et Michel VALMER,
représentée du 18 novembre 1992 au 9 janvier 1993 au Théâtre de la Main d'Or (Paris)
Nous sommes en 1912.
La fable met en scène deux «savants»...
Le Docteur Grenouilleau, personnalité en vue du monde scientifique, est
membre honoraire de la Faculté de Médecine de Paris et professeur au Muséum
d'Histoire Naturel1e. Sa passion frénétique, voire incontrôlée, pour l'anthropologie
et la craniométrie l'entraîne parfois
à des conclusions controversées. Vieux garçon,
misogyne, il élève le fils de son frère, son neveu Paul, jeune homme intelligent et
enthousiaste qui se prépare également
àembrasser la canière médicale.
Le
Docteur Eustache-Antoine De Groningue a, lui aussi entamé des études de
médecine mais le hasard de la vie l'a amené
àse reconvertir dans le théâtre et la
magie. Devenu directeur d'une baraque foraine, il se ruine en achat de cires et de
crânes afin de réunir une merveilleuse col1ection d'attractions «biologiques et
anatomiques» qu'il exhibe dans les foires et les fêtes de quartier. Font aussi partie
de son «cheptel», Madame Amanda, une femme
à barbe, contente de son sort, un
homme-chien Adrian Ieticheff qui, frappé de mélancolie, espère que la science
remédiera un jour à son infirmité et une mystérieuse Princesse Cafre dont on ne dira
rien au risque de trahir l'intrigue!
Les deux «savants» vont se rencontrer sur un quai de Calais, car tous deux se
rendent à Londres pour assister à la formidable découverte de l'Homme de
Piltdown, «le» fossile anglais (qui se révélera être une supercherie)... La rencontre
ne sera pas sans effets car s'en suit une «discussion» sur la «bromidrose fétide»,
sur les différences entre les peuples et les races, sur le rapport entre la grosseur du
cerveau et l'intelligence, une «discussion» agrémentée de démonstrations et d'effets
de magie, entre «savants», vrais ou faux, entre les «monstres» et le marin «qui
passait par là, entre Paul et... Félicité...
Des «discussions» et aussi des «histoires d'amouf» ... car nous sommes au
théâtre et au théâtre, tout est possible!
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N 249 DECEMBRE19q2THÉÂTRE DE SCIENCE
Le théâtre de la Main d'Or, à Paris présente Félicité, une pièce qualifiée de«théâtre descience» par ses auteurs,
Française Thyrian, Michel Val-mer et Daniel Raichvarg. Ce dernier, historien des sciences, est notamment ca-auteur avec le chimiste Jean Jacques de
Savants et ignorants: une
his-toire de la vulgarisation des sciences, Seuil, 1991.
L'histoire se passe en 1912, un savant qui cherche â dé-montrer "existence de races humaines, et la supériorité de certaines d'entre elles, grôceà des mesures anthropomé-triques de tous ordres, notam-ment le volume du cerveau, se rend en Angleterre pour étu-dier «l'homme de Piltdown •. Il rencontre en chemin un ma-gicien, montreur de monstres épris de vulgarisation scienti-fique comme il en existait à celte époque (inlerprété par G. Majax). Félicité est une jeune femme noire de 1992 que la magie du théâtre envoie troubler la rencontre de ces deux hommes. Avec ses connaissances modernes et surtout avec l'aide du magi-cien, elle tentede monlrer au
scientifique l'irrationnel de ses théories.
S'il s'agit de théôtre de science parce que la science est constamment présente dans celte histoire, les auteurs n'ont voulu faire ni de la vulga-risation ni de la didactique. Leur propos estavant tout de
divertir, et ils y parviennent. Cela monlre, une fais de plus, après des pièces récentes comme Les palmes de Mr.
Schutz de J.-N. Fenwick, que le
théôtre, avec sa distance poé-tique et magique, peut
soule-ver de nombreuses questions
d'ardre scientifique etdonc
avoir aussi un rôle à jouer dons la diffusion de la culture scientifique.
Pour aller ou-delà du diver-tissement, le lexIe de la piéce, accompagné de documents re-plaçant l'intrigue dans son contexte historique, vient éga-Iement d'être publié: Félicité ou /e merveil/eux théâtre de
science du docteur De
Gro-ningue, l'éditions, coll. science, technique, culture, Nice, 1992.
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1A VOIR
1Félicité ou le merveilleux
théâtre d'art et de science
, du docteur De Groningue.
Las! jamais le ProCesseur Grenouilleau et le docteur De Gro:lingue ne gagne-rontle Sussex. A Calais, en 1912, ils resteront en rade. Jamais ils ne verront le çrâne Cossile dit de Piltdown, celui qui pennettrait peut-être aux Anglais de faire la nique aux .Allemands et à leur homme de Néanderthal, décou-vert en 1856. Jamais ils ne mélange-rontleurs sciences.
Car que se passe-t-illorsqu'un savant reconnu du Muséum d'histoire natu-relle, éminent spécialiste de questions d'anthropologie, rencontre un savant de foire, flanqué d'un homme-ehien et d'une femmeà barbe, dans une pièce de théâtre? Nous, on rit. Eux, ils se
ta-pent sur le crâne. D'un CÔlé, Gre-nouilleau (le comédien Daniel Soulier, très convaincant en scientifique agité des neurones), l'homme de certilude, maniaque de craniométrie, et adepte d'un certain D' Berillon. Ce .scienti-fique», qui vécut, pour de vrai, au dé-but de ce siècle, écrivit d'élOnnantes théories sur la«race allemande",
pré-tendument atteinte d'une triste affec-tion baptisée.polychésie" ou
<excré-lioll exagérée de
En Cace,De Groningue le magicien (interprété par Gérard Maja.><, très à l'aise), incapable de résister à des en-vies de jouer avec ses bougies qui flot-tenl dans l'air, ses ampoules qui s'al-lument. Au centre de leurs verbales empoignades: la taille des crânes el
des cerveaux - notamment sur la
gros-seur de celui de Gauss et la petilesse de celui de Gambelta et des Hollen-tols -, et toutes les allégations racistes qui peuvent en découler. Toule simi-1
litude avec des faits existants au-jourd'hui étant largement soulignée.1
Et tout aussi voulue parb auteurs de la pièce. Françoise Thyrion. Michel Valmer, et l'historien des sciences Da-niel Raichvarg. Ça fait du hienà nos circonvolutions cérébrales età nos zy"
gommiques.
.1".\1
De François/!- Thyrion. Dal/iel
Rl/Ù·/t-varg elMicllel Valmer. MiJr:t'IIJcèll<'
de Micllel Valmer.JUSqU"llllJjanl"i('/" alllhéâlrede la Maind'Or(7501 / Pa-r".» Til: 48 05 6789.
Félicité
• Sous-titrée
Le MerveilleUJ:
Théâtre d'art et
de science du
Docteur de Groningue,
uneai-mable fable toute en magie (grâce
à
Majax) et en pieds de nez aux héros scientistes, glori· ficateurs de la race blancheà
l'époque bienheureuse des colo-nies. Entre Grand-Guignol (découpe de main, décapita-tion et décervelage
à
l'appui...) et théâtre forain (ah! le plaisir des toiles peintes), entre femmeà
barbe (ou homme chien) et professeur fou, la charge contre le racisme se fait gaillarde, portée par des ac-teurs comme Daniel Soulier, le«professeur fou ", ou Fran-çoise Thyrion, femme
à
barbe sur le plateau, mais aussi coau-leur de la piéce avec Daniel Raichvarg et Michel Valmer (qui signe la mise en scéne). Et si quelques pesanleurs se font parfois sentir dans le jeu et le664
discours,
il
n'y a pas de quoi faire fIDe la bouche.Théâtre de la Main-<!'Or à Pa-ris. %0 h 30. Rens. : (1)