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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Un nouvel outil pour l'éducation à la santé chez l'enfant : le corps

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Academic year: 2021

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UN NOUVEL OUTIL POUR UNE ÉDUCATION À LA SANTÉ :

LE CORPS

Jean-Paul PES

UMR ADEF, Département des Sciences de l’Éducation, Aix-Marseille 1

MOTS-CLÉS : CONSCIENCE – CORPS – ÉDUCATION – VERBALISATION -

COOPÉRATION

RÉSUMÉ : Dans la plupart des campagnes d’éducation à la santé, la prise de conscience représente

le facteur de succès de la demande. Cette prise de conscience, tombe-t-elle sous le sens ? L’étude développementale nous permet de saisir les différents niveaux de cette construction du moi conscient. Mais en même temps les éclairages différents nous montrent toutes la complexité et les discontinuités de cette construction. Notre étude sur la conscience corporelle chez l’enfant de 3 à 7 ans tentera de montrer qu’elle devrait constituer le fil conducteur des activités motrices.

ABSTRACT : In the majority of the education campaigns to health, the awakening represents the

factor of success of the request. s this awakening, fall under the direction ? The study développementale enables us to seize the various levels of this construction from self conscious. But at the same time different lightings show us all the complexity and discontinuities of this construction. Our study on the body conscience in the child from 3 to 7 years will try to show that it should constitute the discussion thread of the motor activities.

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1. INTRODUCTION

D’un côté un ensemble de problèmes de société a aujourd’hui franchi les portes de l’école, violence, santé, problèmes d’addictions… et d’un autre une éducation à la santé qui elle aussi est entrée dans l’école. Les ressorts majeurs des campagnes d’éducation à la santé font appels à la prise de conscience. Les jeunes doivent se renseigner et être informé sur les MST, « ils doivent prendre conscience des dangers qu’ils en courent et qu’ils font encourir aux autres ». Ils doivent « prendre conscience des dangers de la route ». Puis tout au long de la vie, les messages vont continuer à faire appel à cette prise de conscience. Les femmes doivent « prendre conscience de l’importance du dépistage précoce ». Les adultes doivent « prendre conscience du bon suivi des traitements médicaux ». Les campagnes qu’elles soient destinées aux plus jeunes et même aux plus âgés font appel à la prise de conscience individuelle : sans prise de conscience, pas de changement. Donc l’actualité le rappelant sans cesse, un certain nombre de problèmes de société deviennent des interrogations pour l’école. Les problèmes de sociétés sont entrés dans l’école, pauvreté, violence, drogue. On attend de l’enseignant qu’il réussisse « là où les parents, les institutions religieuses où les pouvoirs publics ont échoué » (Cornu, 2000). Les questions d’éducation à la santé sont souvent traitées sous l’aspect de prévention ou du moins traitées dans un temps correspondant au moment de la visibilité des problèmes : Conduites à risques (produits toxiques, accidents en tous genres, suicide…), agression contre autrui, violence en général, autant d’exemples de phénomènes préoccupants… L’arrivée des techniques nouvelles, internet, l’utilisation de baladeurs, les jeux vidéo… font également l’objet d’un constat de la nécessité d’actions de prévention pour la protection de l’enfant.

Mais comment faire émerger cette conscience ? Leçons de morales à l’école, discours plus où moins bien élaboré par des publicistes, Clip ou vidéo choc ? …

Vus les investissements importants engagés et la modestie des résultats, n’est-on pas en droit de s’interroger sur ce que Piaget (1998) pointait : le verbalisme.

Nous émettons l’hypothèse que chez l’enfant les activités motrices peuvent constituer un moment capital pour constituer ce auquel on fait tant appel : la prise de conscience.

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d’infraction aux règles, il n’arrive pas à incorporer à sa personnalité une loi qu’il ne comprend pas du dedans et continue à être dominé par les tendances naturelles de sa mentalité. Seule la collaboration des enfants et la pratique de la discussion organisée donnent à chacun le sens de l’objectivité. Seule l’action commune fait comprendre à l’enfant ce qu’est le mensonge dans la réalité et quelle est la valeur sociale de la véracité ». Il nous semble en effet qu’un discours ne peut s’inscrire que dans une expérience vécue. N’entend-on pas souvent « je vous comprends, je l’ai moi-même vécu lors de… ». Bien évidemment nous ne pensons pas qu’il faille vivre toutes les expériences telles quelles mais qu’il s’agit de mécanismes de transfert. Or comment ce transfert pourrait-il s’organiser ? Nous pensons qu’il reposerait sur les sensations, les émotions, vécues dans l’action. Par exemple, un violoniste pourrait saisir ce que veut dire un alpiniste non pas sur sa technique pure mais sur les sensations passées à travers le corps. Le langage n’est pas exclu au contraire nous le préconisons, il est complémentaire de l’action motrice sans la remplacer.

Le cadre des groupes d’activités sportives nous paraît intéressant pour le développement que nous recherchons car « L’individuel, c’est l’égocentrisme enfantin, l’universel c’est la coopération, c’est-à-dire la solidarité « interne » » (Piaget, 1998). Notre travail se situera donc dans la mise en place de situation de travail ensemble, nous dirons de « vécu ensemble ». « Pour que se constituent les réalités morales, il faut une discipline normative, et pour que se constitue cette discipline, il faut que les individus entrent en rapport les uns avec les autres » (Piaget, 1998). Nous proposerons dans les activités motrices un travail sur le corps en coopération avec verbalisation. « La réflexion n’est autre chose qu’une discussion intérieure, que l’on soutient avec soi-même, par opposition à l’impulsivité des croyances immédiates qui caractérisent la pensée égocentrique. Dans la mesure où ils travaillent en commun, les enfants prennent conscience de la solidarité intellectuelle des individus, en même temps qu’ils élaborent leur propre raison. Bien plus, par le fait même qu’une discussion entre égaux exclut tout élément d’autorité et de soumission, elle développe le sens critique et constitue la meilleure éducation de l’objectivité. Enfin et surtout, l’échange des points de vue entraîne la constitution de c cette logique des relations qui est l’instrument par excellence de la réciprocité intellectuelle » (Piaget, 1998).

On pourrait objecter que le fait d’insister sur la verbalisation pourrait revenir au verbalisme que nous avons critiqué. La différence se situe sur quoi et quand porte le discours. La verbalisation suit la réalisation motrice. Le vécu corporel est essentiel. Entre verbalisme et verbalisation nous ferions la même différence qu’entre le sensori-moteur (Paillard, 1990) et le sensori-psycho-moteur (Pes et Feldman, 1995).

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3. ÉTUDES CHEZ L’ENFANT DE 3 À 7 ANS

Nous avons mené deux études chez l’enfant de 3 à 7 ans dans le cadre des activités motrices (Pes, 2007). Nous avons essayé de découvrir si les éducateurs sportifs faisaient un lien entre un travail sur la conscience corporelle et l’éducation à la santé, ce qui est notre première hypothèse. Alors que le développement de la conscience corporelle semble être reconnu comme le facteur principal d’amélioration durable du potentiel physique, pour la majorité des éducateurs, il n’est pas à privilégier dans le travail ! L’activité se justifie donc par elle-même pour développer ce qui est recherché. De plus la conscience corporelle ne peut uniquement être le résultat de la mise en place de telle ou telle activité. Il semble que l’activité repose essentiellement sur la qualité du parcours ou de la situation mise en place. Quant à l’éducation à la santé, elle est vue comme un travail plutôt dans les conseils donc dans le discours, sans lien réel avec l’activité motrice.

Notre seconde était qu’on pouvait aider le développement de la conscience corporelle en faisant verbaliser l’enfant son vécu corporel. Nous avons mené une enquête par observation.

46,1 %, des observations traduisent une simple mission d’animation voire d’occupation des jeunes

sportifs puisqu’aucune intervention ne concerne la production motrice des enfants.

65,5 % (soit quasiment 2 séances sur 3 observées), montre le faible investissement cognitif et

psychomoteur demandé aux enfants l’approche qui leur est proposée étant sociale (s’occuper par le sport) ou techniciste (imiter l’éducateur modèle).

L’approche techniciste représente même 84,6 %. En effet, l’aide de l’enseignant porte uniquement sur la « production mécanique » de l’enfant.

Comme le précise Giordan (1996), une pédagogie fondée sur la seule action reste le plus souvent stérile. Cette dernière est incontestablement un passage obligé, mais on ne peut l’envisager, même pour les plus jeunes, comme la panacée. L’action doit être fortement contextualisée (l’action pour l’action peut même s’avérer préjudiciable et décourageante). De plus elle doit être couplée à d’autres relations (d’expression, d’écoute, d’échange) propres à l’apprendre et passer par des phases de confrontation.

Dans les 15,2 % des séances où l’éducateur cherche à guider le jeune pour qu’il produise de lui-même une réponse adaptée. Cette orientation de la réflexion de l’enfant par la discussion témoigne d’une volonté « psychomotrice » où l’éducateur incite l’élève à traduire par le langage ses sensations corporelles. L’enfant évolue alors vers une conscience corporelle et une unité corps - esprit. Il faut cependant souligner que dans 11,4 % la marge de réflexion personnelle de l’enfant est

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L’analyse détaillée des grilles d’observation montre que lors de séances d’entraînement de spécialistes (en rugby et en tennis), enseignants et élèves disposent ici d’un langage technique et corporel commun, ce qui facilite toute discussion sur les productions motrices.

Deuxièmement, l'éducateur évolue ici dans une optique de stratégie d'enseignement définie au départ par le but à atteindre puis guidée par les moyens (réponses motrices) utilisés par les sportifs. Nous ne sommes donc plus dans une logique d'application d'un programme d'enseignement fixé par les textes officiels.

88,6 % des enfants n’ont développé qu’une capacité de réaction aux exigences du monde extérieur,

alors que les 11,4 % restants ont développé un répertoire interne de capacités d’actions leur donnant une certaine liberté d’action personnelle ne dépendant pas uniquement des contraintes extérieures.

4. CONCLUSION

Travailler auprès des enfants a toujours une visée sur l’avenir, sur les adultes qu’ils seront un jour. Notre travail sur la conscience ne peut encore moins qu’un autre échapper à cet objectif.

« Selon la personne et selon le moment, la conscience de soi (appréhension plus ou moins globale des multiples dimensions de l’être) et le souci de soi (souci de cohérence, de permanence, de reconnaissance) peuvent se situer à des niveaux de prise de conscience assez différents. C’est ainsi que la connaissance de soi peut être essentiellement intuitive, dès lors qu’elle s’ancre dans un vécu qui est surtout « agi » et dont le sens reste largement implicite. Mais il y a, à l’opposé, une connaissance de soi qui est activement travaillée par le discours intérieur, et qui se cherche et se construit dans un vécu qui est - autant que faire se peut - délibérément « créé » et vise de façon explicite à faire surgir du sens » (Karli, 2002). Il s’agit d’une reconstruction perpétuelle où on doit s’auto-évaluer régulièrement.

« Ces processus psychiques concernent les trois sphères intimement liées de la réalité humaine : la sphère de la « corporéité », celle des relations sociales et celle d’une « intériorité » construite par le sujet. Face à une situation donnée, les prises de conscience portant sur les possibilités et les limites du corps propre, sur les attentes d’autrui et les compétences sociales disponibles, ainsi que sur les désirs et contraintes de l’intériorité personnelle, interagissent de façon complexe. On peut souligner, à cet égard, qu’un handicap physique ou un processus pathologique qui « défigure » avec l’« anxiété corporelle » qui peut l’accompagner, ne modifie pas seulement la façon dont le sujet prend conscience de son corps (du « corps en soi ») ; mais il affecte aussi la façon dont ce même sujet imagine et vit ses relations avec autrui comme celle dont il réfléchit sur son identité plus personnelle, avec ses aspirations et ses projets. Il n’est pas douteux que la réalité subjective du corps

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« perçu » (du « corps pour soi ») contribue à préserver l’équilibre affectif, la nécessaire estime de soi, et un concept de soi stable » (Karli, 2002). Nous plaçons le corps au centre de cette construction de soi et en même temps comme un indicateur de sa difficulté à se construire.

Nous pensons qu’apprendre à parler de son ressenti corporel, par la mise en mot éventuellement des maux, permet une préparation à l’échange avec l’autre. Nous pensons à toutes les difficultés qu’éprouvent à parler les enfants maltraités. On peut distinguer les chocs aigus et les « petits » chocs répétés qui le plus souvent ne peuvent pas être conscientisés. Car « une fois le sentiment de soi imprégné, il laisse dans la mémoire des traces non conscientes. Le reste n’est qu’affaire d’événements qui arriveront un jour ou l’autre » (Cyrulnik, 1999).

Selon la formule de Zazzo (1981), « l’expérience du corps propre, c’est la conscience avant la conscience… ». À la suite des travaux de Wallon (1982) sur l’émotion et la posture nous proposons un travail précoce d’expression verbale de ce que l’enfant vit dans son corps comme moyen d’éducation à la santé.

BIBLIOGRAPHIE

Cornu M., Le nouveau métier d’enseignant. Commission nationale française pour l’UNESCO. Paris, La documentation française, 2000.

Cyrulnik B., Un merveilleux malheur, Paris, O. Jacob, 1999. Giordan A., Apprendre ! Paris, Belin, 1996.

Karli P., Les racines de la violence, Paris, O. Jacob, 2002.

Paillard J., Dialogues sensori-moteurs et représentation mentale : un problème d’interface, pp. 19-51, In Seron X. Psychologie et cerveau, Paris : P.U.F., 1990.

Pes J.-P., Développer la conscience corporelle chez l’enfant de 3 à 7 ans pour une éducation à la

santé, Marseille, Solal, 2007.

Pes J.-P., Feldman D., Performances sportives et psychomotricité, Genève, Jouvence, 1995. Piaget J., De la pédagogie, Paris, O. Jacob, 1998.

Wallon H., La vie mentale. Paris, Éditions sociales, 1982.

Zazzo R., Miroirs, images, espaces, pp. 77- 110, Mounoud, P. & Vinter, A. La reconnaissance de

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