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Le discours interne en contexte sportif : analyse auprès de joueurs de tennis d'élite et de leur parent en tournoi

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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© Véronique Boudreault, 2018

Le discours interne en contexte sportif : analyse auprès

de joueurs de tennis d'élite et de leur parent en tournoi

Thèse

Véronique Boudreault

Doctorat en psychologie - recherche et intervention (orientation clinique)

Philosophiæ doctor (Ph. D.)

(2)

Le discours interne en contexte sportif : analyse

auprès de joueurs de tennis d’élite et de leur parent

en tournoi

Thèse

Véronique Boudreault

Sous la direction de :

Martin D. Provencher, directeur de recherche

Christiane Trottier, codirectrice

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iii

Résumé

Alors que plusieurs chercheurs se sont intéressés au discours interne comme stratégie pour améliorer la performance sportive, peu d’études ont porté sur le discours interne automatique des athlètes juniors d’élite en compétition. De plus, bien que l’expérience des parents s’avère importance à étudier, le contenu de leur discours interne lors des compétitions de leur enfant n’a pas été documenté jusqu’à présent. Cette thèse se penche sur le discours interne automatique des joueurs de tennis juniors d’élite et de leur parent le plus impliqué, en lien avec les émotions vécues pour les événements jugés importants des matchs d’un tournoi de tennis. En guise de premier article, une synthèse critique de l’état de la littérature sur le discours interne en contexte sportif a été réalisée. Il a identifié les principales conclusions et les limites des recherches afin de soulever les avenues de recherche future. L’importance d’étudier en profondeur le discours interne automatique en contexte de compétition a notamment été mise de l’avant. Le deuxième article rapporte une analyse thématique du discours interne automatique de joueurs de tennis juniors d’élite pour des événements jugés importants d’un tournoi de tennis. Des entretiens semi-structurés ont été réalisés auprès de six joueurs de tennis âgés de 14 à 17 ans, après le dernier match disputé lors d’un tournoi d’envergure. Durant ces entretiens, les participants ont été interrogés au sujet de leur discours interne et de leurs émotions pour les événements jugés importants de leurs matchs. L’analyse thématique, guidée par l’approche de Miles, Huberman, et Saldaña (2013), a révélé la présence de huit catégories de discours interne : (a) émotion positive (b) inquiétudes (c) ruminations (d) pression de performance (e) désengagement (f) motivationnel (g) cognitif et (h) contrôle émotionnel. L’importance accordée aux émotions a permis de relever que certaines catégories de discours interne représentent l’expression de l’émotion vécue (p. ex. ruminations) alors que d’autres formes de discours interne sont utilisées par l’athlète dans le but de s’autoréguler et gérer une émotion (p. ex. contrôle émotionnel). Parmi les catégories identifiées, deux d’entre elles (c.-à-d. les ruminations et le discours interne lié à la pression de performer) n’avaient pas été observées jusqu’à présent dans la littérature sur le discours interne. La présence de nouvelles catégories pourrait s’expliquer notamment par la réalité propre à l’expérience unique et au contexte des joueurs de tennis interrogés, de même que la méthodologie novatrice employée. Le troisième article présente une étude de cas multiple portant sur le contenu du discours interne automatique de joueurs de tennis junior d’élite et de leur parent durant les matchs d’un tournoi. Les entretiens individuels semi-structurés réalisés auprès de deux cas contrastes parmi les six joueurs (un cas étant représenté par un joueur de tennis et son parent le plus impliqué) ont été sélectionnés pour cette étude. Les résultats ont été analysés suivant la stratégie de l’étude de cas multiple (Yin, 2014) combinée à l’enquête de

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narration (Polkinghorne, 1995). L’analyse du discours interne révèle que son contenu est lié à l’expérience émotionnelle des joueurs et des parents selon les événements jugés importants durant les matchs. Les analyses intracas révèlent qu’il existe une similarité quant à l’importance de gagner les matchs dans le discours interne du premier cas alors qu’une tendance plus prononcée à s’autoréguler se reflète dans celui du second cas. Ces similarités amènent à s’interroger sur l’influence des parents dans l’importance que les athlètes accordent à gagner et dans les stratégies qu’ils utilisent pour s’autoréguler. Les analyses intercas révèlent la présence de différences entre les joueurs et entre les parents, pouvant être comprises à la lumière de leur profil respectif. Sur la base de ces résultats, il semble important de s’intéresser aux différences individuelles dans l’étude du discours interne. Ce projet de thèse est, à notre connaissance, le premier projet à étudier le phénomène du discours interne automatique chez des joueurs de tennis juniors d’élite et de leur parent à l’aide d’une méthodologie novatrice. Ce projet offre un portrait riche et détaillé du discours interne automatique des joueurs et des parents interrogés.

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Table des matières

Résumé ... iii

Table des matières ... v

Liste des annexes ... vii

Liste des tableaux ... viii

Liste des figures ... ix

Liste des abréviations ... x

Remerciements ... xi

Avant-propos ... xiii

Chapitre 1 : Introduction ... 1

Discours interne... 5

Conceptualisations du discours interne ... 6

Principaux résultats des études sur le discours interne ... 14

Bilan de la littérature sur le discours interne ... 22

Considérations pour les études futures ... 23

Expérience des parents ... 27

Objectifs de la thèse ... 29

Position épistémologique ... 30

Chapitre 2 : Discours interne en contexte sportif : synthèse critique des connaissances... 32

Résumé ... 33

Abstract ... 34

Introduction ... 35

Définition du discours interne ... 36

Conceptualisation du discours interne... 38

Principales méthodes de mesure du discours interne ... 41

Principaux résultats de recherche sur le discours interne ... 44

Perspectives de recherche future ... 54

Conclusion et implications pratiques ... 55

Références ... 57

Chapitre 3: Investigation of the self-talk of elite junior tennis players in a competitive setting ... 63

Résumé ... 64 Abstract ... 66 Introduction ... 67 Method ... 71 Results ... 75 Discussion ... 81 References ... 85

Chapitre 4 : Automatic self-talk of elite junior tennis players and their parents: A multiple-case study ... 88

Résumé ... 89

Abstract ... 91

Introduction ... 92

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Results ... 98

Discussion ... 110

Chapitre 5 : Discussion générale ... 119

Synthèse des principaux résultats ... 120

Principales contributions à l’avancement des connaissances ... 127

Principales contributions sur le plan des implications pratiques... 128

Principales limites des études ... 130

Avenues de recherche future ... 131

Chapitre 6 : Conclusion... 132

Bibliographie de la thèse ... 136

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Liste des annexes

Annexe 1. Première page de l’article publié dans la revue STAPS ... 148

Annexe 2. Fiche d’identification des participants ... 151

Annexe 3. Grille d’autonotation du discours interne ... 154

Annexe 4. Guide des entretiens... 158

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Liste des tableaux

Chapitre 2

Tableau 1. Questionnaires autorapportés pour l’étude du discours interne ... 42

Chapitre 3

Table 1.Self-talk categories reported by the study participants ... 76

Chapitre 4

Table 1. Content of Anna’s and her father’s self-talk and emotions for important events. ... 101 Table 2. Content of Tom’s and his mother’s self-talk during for important events. ... 105

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Liste des figures

Figure 1. Classification du discours interne, inspirée de Latinjak et al. (2014) et Van Raalte et al. (2016) ... 6 Figure 2. Modèle conceptuel du discours interne selon Hardy et al. (2009). ... 7

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Liste des abréviations

ASTQS: Automatic Self-Talk Questionnaire for Sports FSTQ: Functions of Self-Talk Questionnaire

PSIFS: Psychological Skills Inventory for Sports SSTPQ: Soccer Self-Talk Pattern Questionnaire STAGRS: Self-Talk and Gestures Rating Scale

STAPS : Revue Internationale des Sciences du Sport et de l’Éducation Physique S-TQ: Self-Talk Questionnaire

STUQ: Self-Talk Use Questionnaire

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Remerciements

Tout d’abord, je tiens à remercier sincèrement mes superviseurs, Martin Provencher et Christiane Trottier, pour leur soutien et leur disponibilité tout au long de la réalisation de cette thèse. Martin, je tiens à te remercier pour tes encouragements constants et la confiance que tu m’accordes. Grâce à ton ouverture et ton écoute, il m’a été possible d’initier ce projet de thèse en psychologie du sport. À de nombreuses occasions dans mes études en psychologie, j’ai senti que tu croyais en mes projets et cela a favorisé ma motivation, ma confiance et ma détermination. J’apprécie également beaucoup ton humour et ton accessibilité, qui m’ont aidé à prendre du recul lors des défis rencontrés. Malgré tes responsabilités importantes à la direction de programme, j’ai toujours senti que je pouvais compter sur ton soutien. Christiane, tu m’as initié à la recherche et à l’intervention en psychologie du sport. Tu as su me guider au travers ce domaine de recherche qui était nouveau pour moi. Ta rigueur scientifique, ton encadrement constant et tes commentaires toujours constructifs m’ont aidé à développer mes compétences en recherche. Tes attentes élevées, mais claires et réalistes m’ont permis d’amener ce projet à la hauteur d’une thèse doctorale. Je tiens à te remercier pour les heures que tu as consacrées à passer au peigne fin chacun de mes articles. Tu m’as transmis les valeurs de la rigueur scientifique en méthode qualitative. Malgré tes obligations familiales et l’encadrement des autres étudiants de l’équipe, je pouvais compter sur ta disponibilité dans les moments les plus importants. Ta passion pour les relations humaines et ton ouverture envers l’expérience de chacun se traduit dans tes recherches, mais également dans ta manière de superviser. Vous représentez tous les deux des modèles de détermination pour moi. J’espère sincèrement avoir la chance de collaborer avec vous dans le futur.

Je tiens également à remercier les membres de mon comité de thèse et les membres du jury, Tamarha Pierce, Jean Fournier, Frédéric Guay et Diane Culver, pour les commentaires très constructifs m’ayant permis d’améliorer la qualité du projet. Un grand merci à Daniel Fortin-Guichard pour son implication rigoureuse dans les analyses et Emanuelle Bisson-Bernatchez, pour l’aide à la retranscription des verbatims.

J’aimerais aussi remercier les joueurs de tennis et les parents qui ont accepté de prendre part à cette étude. Merci de m’avoir donné accès à votre réalité et de m’avoir partagé vos pensées et vos sentiments.

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Enfin, je tiens à remercier les membres de ma famille. Plus particulièrement, merci à mes parents et mon copain qui m’ont offert un appui inconditionnel à travers ces études ambitieuses. J’ai toujours senti que vous étiez derrière moi et fiers de mes accomplissements.

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Avant-propos

Cette thèse de doctorat est rédigée avec l’insertion de trois articles. Le premier chapitre est une introduction générale menant aux objectifs des trois articles de la thèse. Les chapitres 2, 3 et 4 sont des articles scientifiques. Dans l’ordre, voici les auteurs des trois articles : Véronique Boudreault, Christiane Trottier et Martin. D. Provencher. L’article du chapitre 2 a été publié dans la Revue

Internationale des Sciences du Sport et de l’Éducation Physique (STAPS) au printemps 2016.

L’article du chapitre 3 a été accepté pour publication dans la revue International Journal of Sport

Psychology le 13 juin 2018. L’article faisant l’objet du chapitre 4 a été soumis dans la revue Qualitative Research in Sport, Exercise and Health le 31 août 2018. Outre la mise en page, les

articles insérés dans cette thèse sont identiques aux versions soumises et publiées et respectent les normes de rédaction de la revue ciblée. Le chapitre 5 présente une discussion générale résumant les principaux résultats et les contributions des trois articles, des implications pratiques, les limites de la thèse et des avenues de recherche future. Enfin, le chapitre 6 fait l’objet d’une conclusion qui porte sur le partage de l’expérience de l’étudiante-chercheure dans la réalisation de la thèse.

En tant que première auteure de ces trois articles, Véronique Boudreault a effectué la recension de la littérature, le recrutement des participants, la collecte des données, les analyses et l’interprétation des données et la rédaction des trois articles. Une assistante de recherche a procédé à la transcription des verbatim des entretiens. Un second assistant de recherche a participé de manière indépendante au codage des entretiens dans le cadre des articles du chapitre 3 et 4. Les directeurs de recherche, Christiane Trottier et Martin D. Provencher, ont offert une assistance constante et ponctuelle à Véronique Boudreault à toutes les étapes de la réalisation du projet de thèse.

Il est à noter que les annexes sont présentées à la fin du document à la suite de la bibliographie (c.-à-d. Annexe 1. Approbation éthique ; Annexe 2. Première page de l’article publié dans la revue STAPS ; Annexe 3. Fiche d’identification des participants ; Annexe 4. Grille d’autonotation du discours interne ; Annexe 5. Guide des entretiens ; Annexe 6. Formulaires de consentement. Enfin, les normes anglophones de l’American Psychological Association (APA 6e édition) sont respectées pour les références, à l’exception des références de l’article faisant l’objet du quatrième chapitre de la thèse. L’article du chapitre 4 respecte le style bibliographique Chicago (Chicago Manual of Style 16e édition), respectant ainsi les normes de la revue dans laquelle l’article a été soumis pour

publication (Qualitative Research in Sport, Exercise and Health). La mise en page de la thèse correspond aux règles de la Faculté des études supérieures et postdoctorales de l’Université Laval.

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Nicolas est un athlète de tennis âgé de 17 ans. Il s’apprête à participer aux championnats canadiens dans la catégorie des 15 à 16 ans (catégorie U16). Dans les semaines avant cette compétition importante, Nicolas a perdu plusieurs matchs en tournoi. Il éprouve de la difficulté avec son service et commet plusieurs erreurs qu’il ne faisait pas avant. Nicolas s’inquiète de continuer à perdre en tournoi et sa confiance est fragilisée. Son discours interne à l’entraînement est de plus en plus négatif et critique (p. ex. « Je n’ai plus de talent »). Cette attitude se répercute également dans le langage non verbal de Nicolas, qui devient parfois agressif sur le terrain. La mère de Nicolas, qui l’accompagne aux entraînements et aux matchs, constate que l’attitude de son fils s’est détériorée. Ce dernier semble triste et il se fâche dès qu’elle veut lui parler de son attitude. La mère de Nicolas se préoccupe de voir son fils dans cet état et elle s’inquiète pour son bien-être. Parallèlement, elle se dit qu’avec tout l’argent et le temps qu’elle investit dans le tennis de Nicolas, il devrait faire preuve d’une attitude plus positive.

L’heure du premier match de Nicolas aux championnats canadiens est arrivée. Il se sent nerveux, mais se dit : « Cette fois, c’est la bonne ». Malgré son optimisme, Nicolas perd les deux premiers jeux de la première manche ; c’est 30-0 pour son adversaire. Sa confiance diminue, son discours interne devient négatif et il devient tendu. Il tente de se contrôler en se disant : « Ce n’est que le début du match », « Je dois relaxer ». Il perd de nouveau et son adversaire remporte la première partie. Nicolas se décourage et ne peut s’empêcher de penser : « Je vais encore me faire battre ». La mère de Nicolas, assise dans les estrades, observe son fils et analyse ses réactions. Elle se dit : « Nicolas mérite de gagner ». La mère de Nicolas se sent anxieuse et anticipe les réactions de son fils en cas de défaites. En observant son fils qui perd sur le terrain, elle le voit se décourager de plus en plus. Elle se sent impuissante et elle aimerait que son fils change d’attitude : « S’il te plaît Nicolas, reste positif ! ».

L’adolescence est une période déterminante dans le développement des athlètes d’élite (Vealey, 2007). Pour certains sports, cette période représente une fenêtre pour le développement d’aptitudes physiques et psychologiques jugées indispensables à l’atteinte d’une performance optimale (Lauer, Zakjarsek, & Lauer, 2017). Pour d’autres (p. ex. gymnastique), elle correspond à l’atteinte de la maturité physique et psychologique jugée optimale à la performance. Parallèlement, l’adolescence est une période très importante pour le développement de l’identité (Erikson, 1959). Notamment, l’adolescent est confronté à des responsabilités plus importantes et doit assumer la transition vers l’âge adulte en faisant des choix déterminants pour son avenir. Ainsi, une importante littérature scientifique s’est développée entourant l’expérience sportive des athlètes juniors depuis la fin des années 1990.

Cette littérature s’inscrit autour de deux principaux champs d’intérêt. Un premier champ concerne le développement du talent dans le sport alors que le second porte sur le développement positif des jeunes au travers du sport. Le premier champ de recherche est guidé par la philosophie selon laquelle il importe de développer l’excellence puisque le succès des athlètes professionnels et olympiques contribue à la prospérité économique et au pouvoir politique des provinces et pays (p.

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ex. Martindale, Collins, & Abraham, 2007). Dans le second champ de recherche, le sport constitue un véhicule pour aider les adolescents à se développer positivement, à se maintenir en santé et à s’adapter efficacement aux transitions de la vie (p. ex. Fraser-Thomas, Côté, & Deakin, 2005). Malgré les débats entourant l’importance accordée à la performance versus au développement positif, il importe d’étudier l’expérience des jeunes athlètes en compétition afin de mieux comprendre ce qui contribue à leur succès et leur bien-être (Fraser-Thomas & Côté, 2009).

Le fait de participer à des compétitions de haut niveau s’avère particulièrement exigeant pour les adolescents-athlètes (Nicholls, Hemmings, & Clough, 2010). En effet, les athlètes compétiteurs consacrent plusieurs heures à l’entraînement et aux compétitions. Ceux-ci doivent gérer leurs études en fonction de leur sport et ils ont parfois à s’éloigner de leur famille pour rejoindre les centres d’entraînement. Ainsi, ces jeunes font souvent face à des défis supplémentaires tant au niveau social, familial que scolaire pour remplir les exigences du sport de compétition. De plus, ils sont exposés à la pression de performer et aux attentes élevées de la part de leur entourage (Ommundsen, Klasson-Heggebø, & Anderssen, 2006). Ainsi, ces athlètes doivent apprendre à gérer leurs émotions et la pression ressentie (Lauer et al., 2017). Pour ces raisons, des chercheurs s’intéressent à l’expérience des athlètes d’élite en compétition de même qu’à l’efficacité de certaines interventions pour optimiser leur bien-être et leur performance.

Certains membres de l’entourage de l’athlète jouent également un rôle clé dans la qualité de l’expérience des adolescents-athlètes. Notamment, l’entraîneur et les parents représentent des personnes significatives dans l’accompagnement et l’encadrement des jeunes sportifs (Harwood & Knight, 2015 ; Thelwell & Hill, 2017). Étant donné leur rôle et l’influence qu’ils exercent sur les athlètes, il est important que les membres de l’entourage contribuent à favoriser l’expérience des athlètes. Ainsi, la qualité de l’expérience des personnes impliquées auprès de l’athlète est également importante à étudier.

De façon plus spécifique à l’expérience des athlètes juniors, les parents sont reconnus comme jouant un rôle clé dans la participation sportive de leur enfant (Wiese-Bjornstal, LaVoi, & Omli, 2009). Notamment, ils sont reconnus comme étant la principale source d’influence de l’implication sportive de leurs enfants. De plus, le soutien et les encouragements reçus de la part des parents sont associés à la perception de compétence, au plaisir et à l’investissement sportif de l’enfant (Knight, Berrow, & Harwood, 2017). En contrepartie, les attentes irréalistes des parents et une attitude critique sont associées à moins de plaisir et de motivation, une perception de compétence plus faible et un plus haut niveau d’anxiété. Ainsi, afin de mieux comprendre ce qui détermine la nature de

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l’influence qu’ont les parents sur l’expérience des athlètes juniors d’élite dans le sport, des chercheurs se sont intéressés plus spécifiquement à leur expérience. Les résultats de ces études démontrent que la nature et la qualité de l’expérience des parents en compétition ont une influence sur celle de leur enfant (Knight et al., 2017). Par exemple, le stress vécu par les parents lors des compétitions de leur enfant influence leurs comportements et les interactions avec leurs enfants (Burgess, Knight, & Mellalieu, 2016 ; Harwood & Knight, 2015). Les résultats témoignent également de l’ampleur de l’investissement émotionnel de certains parents lors des compétitions de leur enfant. Par exemple, des auteurs s’étant intéressés aux émotions vécues par des joueurs de tennis et leurs parents ont observé que certains parents vivent des émotions similaires à celles de leur enfant (Dorsch, Smith, & McDonough, 2009 ; Harwood & Knight, 2009a, 2009b ; Wiersma & Fifer, 2008). La complexité de la relation entre les athlètes et les parents en contexte de compétition invite les chercheurs à poursuivre les recherches en s’intéressant à l’expérience des athlètes juniors en compétition en parallèle avec celle de leurs parents.

Une avenue de recherche afin de mieux comprendre l’expérience des athlètes et de leur parent en compétition est de s’intéresser à leur discours interne automatique. En contexte sportif, le discours interne automatique reflète l’émotion vécue par l’athlète et renseigne sur la manière dont il gère ses pensées, émotions et comportements (Latinjak, Zourbanos, Lopez-Ros & Hatzigeorgiadis, 2014; Van Raalte, Vincent, & Brewer, 2016a). Ainsi, en questionnant les athlètes et leur parent sur leur discours interne automatique durant une compétition, il est possible de mieux comprendre leur expérience. De plus, étant donné son influence sur les émotions et les comportements, le discours interne représente une cible d’intervention pour améliorer la performance et le bien-être psychologique des athlètes (Anderson, 2009). Dans le but de contribuer à l’avancement des connaissances sur le discours interne automatique et sur l’expérience des athlètes et de leur parent en compétition, cette thèse s’intéresse au discours interne automatique de joueurs de tennis juniors d’élite et de leurs parents en compétition.

Dans ce premier chapitre, un résumé de l’état des connaissances sur le discours interne en contexte sportif et sur l’expérience des parents est présenté. Puisque le second chapitre de cette thèse est une synthèse critique de la littérature sur le discours interne publiée en 2016, ce premier chapitre est un résumé critique de la littérature et inclut certains résultats publiés depuis la publication de la synthèse critique (c.-à-d. de 2016 à mars 2018). Plus précisément, ce chapitre se concentre sur la définition, la conceptualisation et les principaux résultats de recherche sur le discours interne afin d’introduire le rationnel menant aux objectifs des trois articles de la thèse. Certains résultats

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concernant l’expérience des parents en contexte sportif sont aussi présentés afin de justifier la pertinence de s’intéresser à leur discours interne en parallèle avec celui de leur enfant.

Discours interne

Plusieurs définitions du discours interne ont été proposées au sein de la littérature scientifique (p. ex. Hackfort & Schwenkniezger, 1993; Hardy & Hall, 2006; Hardy & Zourbanos, 2016; Theodorakis, Weinberg, Natsis, Douma, & Kazakas, 2000; Van Raalte et al., 2016a), dénotant l’absence d’unanimité au sein des chercheurs sur la façon d’opérationnaliser le concept. Certains chercheurs définissent le discours interne comme un phénomène survenant à chaque fois qu’une personne pense à quelque chose (p. ex. Wiliams, Zinsser, & Bunker, 2014). Par exemple, selon Theodorakis et ses collaborateurs (2000), le discours interne représente ce que les individus se disent à eux-mêmes, exprimé sous la forme d’une petite voix dans leur tête ou sous la forme de verbalisations à voix haute. Pour leur part, Van Raalte et ses collaborateurs (2016a) définissent le discours interne comme « l’articulation d’un état interne pouvant être exprimée verbalement ou intérieurement, dont l’émetteur du message est également le destinataire » (traduction libre, p. 141). Plus récemment, prenant en considération la littérature, Hardy et Zourbanos (2016) ont énoncé une définition à jour du discours interne. Selon ces auteurs, le discours interne représente les « énoncés, phrases ou mots clés adressés à soi-même, pouvant survenir de façon automatique ou être utilisés à des fins stratégiques, formulées à voix haute ou sous la forme d’une voix interne, de façon positive ou négative, ayant une fonction cognitive ou motivationnelle, dont le contenu est matière à interprétation et s’apparente à la forme grammaticale du langage quotidien » (traduction libre, p. 450). Ainsi, selon cette définition, le discours interne est un concept multidimensionnel pouvant se présenter selon différentes formes (p. ex. phrases ou mots clés, positif ou négatif) et dont le contenu est matière à interprétation par l’athlète. De plus, le discours interne peut être utilisé à des fins stratégiques ou survenir de manière automatique.

À ce propos, dans le but de faciliter la compréhension des lecteurs, une distinction entre deux avenues de recherche est effectuée dans ce chapitre : (a) le discours interne stratégique et (b) le discours interne automatique (Hardy & Zourbanos, 2016). Le discours interne stratégique représente le discours interne utilisé volontairement par l’athlète dans un but précis (p. ex. favoriser la concentration, la technique ou la motivation) et qui est planifié d’avance (p. ex. « Tourne les épaules »). Pour sa part, le discours interne automatique représente les pensées que l’athlète entretient automatiquement durant la pratique de son sport et qui ne sont pas déterminées à l’avance. Il existe deux formes de discours interne automatique : le discours interne spontané et le

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discours interne orienté vers les buts. Le discours interne spontané représente l’expression automatique de l’émotion que vit l’athlète. Le discours interne orienté vers les buts est utilisé par l’athlète dans un but précis sans toutefois être planifié d’avance. La classification du discours interne selon sa forme stratégique ou automatique s’appuie sur la conceptualisation proposée par Latinjak et ses collaborateurs (2014), le modèle développé par Van Raalte et ses collaborateurs (2016a), ainsi que sur la base des études récentes sur le discours interne (p. ex. Latinjak 2018). Une représentation visuelle de la classification du discours interne, inspiré de Latinjak et ses collaborateurs (2014) et Van Raalte et ses collaborateurs (2016a) est présentée dans la Figure 1 afin d’en faciliter la compréhension.

Figure 1. Classification du discours interne, inspirée de Latinjak et al. (2014) et Van Raalte et al.

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Conceptualisations du discours interne

À notre connaissance, trois conceptualisations du discours interne ont été proposées jusqu’à présent au sein de la littérature. La première a été proposée par Hardy, Oliver et Tod en 2009, en réponse à l’absence de théories pour l’étude du discours interne. La seconde représente une initiative de Van

Discours interne stratégique Intervention planifiée (système 2 proactif) Le discours interne Discours interne automatique

Discours interne qui survient de façon automatique (non

planifié) Cognitif Motivationnel Spontané Expression d’une émotion (système 1)

Orienté vers les buts

Autorégulation des émotions (système 2 réactif)

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Raalte et ses collaborateurs en 2016 pour bonifier le modèle de Hardy et ses collaborateurs. Ces deux premières conceptualisations sont présentées en détail dans le second chapitre de cette thèse. Malgré tout, dans l’optique de présenter un portrait suffisamment clair et détaillé de la littérature dans ce premier chapitre d’introduction, ces deux premières conceptualisations sont présentées et critiquées une première fois dans ce premier chapitre. Enfin, la troisième conceptualisation est propre à la forme automatique du discours interne et a été initialement proposée en 2014 par Latinjak et ses collaborateurs, puis préciser dans un article publié en 2017. Étant donné l’intégration récente de la conceptualisation de Latinjak et ses collaborateurs dans les études sur le discours interne, celle-ci n’est pas abordée dans la recension critique faisant l’objet du deuxième chapitre de la thèse.

Modèle conceptuel du discours interne de Hardy et ses collaborateurs (2009)

Hardy et ses collaborateurs (2009) ont développé un modèle conceptuel du discours interne sur la base de certains résultats de recherche dans le but de fournir un cadre de travail aux chercheurs. Ce modèle est présenté dans la Figure 2. Afin de développer leur modèle, les auteurs se sont inspirés du modèle développé pour l’imagerie mentale en contexte sportif par Hall, Mack, Paivio et Hausenblas en 1998.

Figure 2. Modèle conceptuel du discours interne selon Hardy et al. (2009).

Facteurs personnels - Personnalité - Croyances en l’influence du discours interne - Préférence de traitement de l’information Facteurs situationnels - Difficulté de la tâche - Circonstances - Entraîneur - Contexte Mécanismes cognitifs - Attention - Concentration Mécanismes motivationnels - Motivation - Confiance en soi Mécanismes comportementaux - Techniques Mécanismes émotionnels - Émotions - Anxiété Performance sportive Discours interne

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Selon ces auteurs, le discours interne de l’athlète est influencé par deux principaux types de facteurs : (a) des facteurs personnels et (b) des facteurs situationnels. Les facteurs personnels incluent la personnalité de l’athlète, sa croyance par rapport au degré d’influence du discours interne et sa modalité préférentielle de traitement de l’information (auditive ou visuelle). Les facteurs situationnels incluent la difficulté de la tâche, circonstances situationnelles (p. ex. le fait d’avoir perdu une manche), contexte de compétition (p. ex. tournoi de tennis) et attitude de l’entraîneur (p. ex. rétroaction positive). Les auteurs précisent également par l’entremise de quels mécanismes le discours interne peut avoir une influence sur la performance. Ainsi, ces auteurs ont identifié quatre principaux mécanismes d’influence : (a) cognitifs (e.g, optimisation de la concentration) (b) motivationnels (p. ex. amélioration de confiance en soi) (c) comportementaux (p. ex. amélioration de la technique) et (d) émotionnels (p. ex. gestion de l’anxiété).

Critique du modèle conceptuel de Hardy et ses collaborateurs

Il importe d’abord de souligner l’apport significatif des travaux de Hardy et ses collaborateurs sur le discours interne en contexte sportif. En effet, le modèle développé par les auteurs représente une première tentative pour proposer un modèle conceptuel et faire avancer la recherche sur le discours interne. D’ailleurs, Hardy et ses collaborateurs précisent que leur modèle devrait servir d’outil de travail pour les chercheurs pour contribuer à l’avancement des connaissances. De plus, une force de ce modèle repose sur l’identification de facteurs qui influencent le contenu du discours interne. La reconnaissance de ces facteurs a contribué au développement de la recherche au sujet de l’influence que peuvent avoir certains facteurs personnels (p. ex. la personnalité de l’athlète) et situationnels (p. ex. le rôle de l’entraîneur) sur le discours interne.

Malgré ces contributions, le modèle de Hardy et ses collaborateurs peut être critiqué notamment sur le fait qu’il repose sur un modèle développé pour une habileté mentale différente (l’imagerie mentale). Ainsi, les fondements théoriques du modèle ne sont pas spécifiques au discours interne et leurs origines ont été critiquées dans le domaine de l’imagerie (Fournier, Deremaux, & Bernier, 2008). De plus, bien que la fonction d’autorégulation du discours interne est centrale dans le modèle, les auteurs ne précisent pas s’ils font référence au discours interne stratégique ou automatique. Par ailleurs, malgré la pertinence des antécédents du discours interne proposés par les auteurs, d’autres facteurs pourraient être inclus parmi ceux-ci. Notamment, alors que l’entraîneur apparaît comme un antécédent possible du discours interne, les parents ne sont pas inclus dans le modèle malgré leur rôle crucial auprès de l’athlète à l’adolescence (Knight et al., 2017). Enfin, ce modèle a été développé pour expliquer l’influence du discours interne sur la performance sportive.

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Il ne prend donc pas en considération que le discours interne peut jouer un rôle non seulement sur la performance de l’athlète, mais également sur son bien-être.

Modèle conceptuel du discours interne de Van Raalte et ses collaborateurs (2016a)

(Sport-Specific Model of Self-Talk)

Van Raalte et ses collaborateurs (2016a) ont récemment proposé une bonification du modèle de Hardy et ses collaborateurs (2009) et ont développé le Sport-Specific Model of Self-Talk. Dans leur modèle, les auteurs considèrent les facteurs du modèle de Hardy et ses collaborateurs, mais s’inspirent principalement des théories sociales reliées au discours interne (Dual Process Theories ; Kahneman, 2011 ; Stanovich & West, 2000). Selon ces théories sociales explicatives du comportement humain, il existe deux formes de systèmes cognitifs qui transforment l’information traitée de l’environnement en contenu cognitif articulé dans la conscience (c.-à-d. le discours interne). Ainsi, Van Raalte et ses collaborateurs conceptualisent le discours interne selon ces deux systèmes de langage interne distincts dont les mécanismes diffèrent : (a) le système 1 et (b) le système 2. Le premier système est intuitif, rapide, ne requiert pas d’effort et n’implique pas la mémoire de travail. Le second système est plus conscient, lent et il implique le raisonnement volontaire et la mémoire de travail. Le système 1 ramène l’expérience actuelle chargée émotionnellement à la conscience sous forme de discours interne spontané. Le système 2 est responsable de la planification ainsi que de la régulation et engendre le discours interne utilisé par l’athlète afin de s’autoréguler.

De plus, Van Raalte et ses collaborateurs (2016a) précisent que le discours interne du système 2 peut être réactif ou proactif. Le discours interne réactif survient en réaction à une interprétation de l’information générée par le discours interne spontané (c.-à-d. système 1). Par exemple, le discours interne spontané exprimant une frustration (« Je n’y arrive pas ») pourrait engendrer un discours interne cognitif dans le but de se reconcentrer (« Détends les épaules ») ou un discours motivationnel afin de maintenir un effort (« Ça va bien aller »). Ce discours interne correspond au discours interne orienté vers les buts. Le discours interne proactif serait quant à lui utilisé de façon planifiée par l’athlète sous la forme d’une stratégie cognitive pour atteindre un but précis. Ainsi, un athlète pourrait employer un mot clé ou une phrase spécifique à des moments précis dans le but de favoriser l’exécution adéquate d’un mouvement (c.-à-d. discours interne cognitif) ou de favoriser un état mental optimal (c.-à-d. discours interne motivationnel). Cette dernière forme de discours interne (c.-à-d. proactif) correspond au discours interne étudié sous la forme d’une stratégie cognitive assignée à l’athlète (discours interne stratégique).

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En ce qui a trait au contenu du discours interne, les auteurs avancent qu’il peut varier selon différentes caractéristiques telles que la fonction (c.-à-d. cognitive et motivationnelle), la valence (positive et négative) et l’ouverture (internalisé ou verbalisé). Ils reconnaissent aussi que certaines formes de discours interne ne peuvent être classées selon ces caractéristiques. Par exemple, lors d’une performance sportive impliquant l’endurance physique, le discours interne peut être associatif (c.-à-d. relié aux sensations physiologiques) ou dissociatif (c.-à-d. non relié à la tâche en cours). Van Raalte et ses collaborateurs (2016a) soulignent également l’importance des antécédents personnels et contextuels ainsi que les mécanismes du discours interne initialement proposés par Hardy et ses collaborateurs (2009). Ainsi, les auteurs reconnaissent que le discours interne est influencé par des facteurs personnels et situationnels (contextuels) et influencerait les comportements par l’entremise des mécanismes cognitifs (représentés par le système 2), motivationnels et affectifs (reliés à la fois aux systèmes 1 et 2). Toutefois, les auteurs proposent que la relation entre ces facteurs et le discours interne soit dynamique et réciproque, postulant qu’il existe une interinfluence entre les éléments du modèle. Par exemple, les auteurs soutiennent que le discours interne affecte les comportements qui, à leurs tours, peuvent avoir une influence sur le discours interne par l’intermédiaire des systèmes 1 et 2. Ainsi, un discours interne spontané (p. ex. « J’ai peur de manquer ») pourrait influencer un comportement (p. ex. un coup raté au tennis). Ce comportement pourrait ensuite influencer le discours interne subséquent, générant un nouveau discours interne spontané (système 1) (p. ex. « J’ai encore raté ! »), pouvant conduire l’athlète à générer un discours interne réactif (système 2) pour s’autoréguler (p. ex. « Regarde la balle »). Van Raalte et ses collaborateurs précisent que le discours interne régulé par le système 2 implique les processus conscients du système cognitif dont les ressources sont limitées. Ainsi, lors de la réalisation d’une tâche exigeante au plan cognitif (c.-à-d. demandant beaucoup de concentration), moins de ressources cognitives sont disponibles pour permettre à l’athlète d’autoréguler son discours interne par l’entremise du système 2. Les auteurs avancent que cette proposition fournit une explication plausible au phénomène d’affaissement (choking) parfois observé en contexte de performance. En effet, les auteurs soutiennent que les demandes attentionnelles élevées en contexte de performance pourraient se traduire par une surutilisation du système 2, conduisant à un épuisement des ressources nécessaires à l’autorégulation. Lorsque les ressources cognitives impliquées dans le discours interne régulé par le système 2 sont épuisées, le discours interne engendré par le système 1 prend la relève. Le système 1 étant plus inconscient, rapide, intuitif et lié aux émotions, il peut générer un discours interne spontané nuisible qui s’avère difficile à modifier dans ces circonstances (p. ex. « J’abandonne »). Il pourrait alors s’en suivre une baisse du contrôle

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attentionnel combinée à une augmentation de la saillance d’un discours interne spontané contreproductif qui influencerait négativement la performance. En résumé, les auteurs avancent que lorsque la demande attentionnelle est moins importante, le discours interne utilisé pour s’autoréguler (c.-à-d. système 2) permettrait de diriger l’attention vers l’action ou la stratégie appropriée et contribuerait ainsi à améliorer la performance. En contrepartie, lorsque la demande attentionnelle est importante, il y a un risque que le processus de régulation du système 2 flanche. Lors d’une telle circonstance, le système 1 prend la relève par défaut (c.-à-d. l’expérience émotionnelle empreinte de biais), ce qui risque de contribuer à une baisse de la performance.

Critique du modèle de Van Raalte et ses collaborateurs (Sport-Specific Model of Self-Talk)

Une force importante de ce modèle repose sur la distinction claire entre le discours interne automatique spontané des athlètes (système 1), le discours interne automatique orienté vers les buts (système 2 réactif) et le discours interne stratégique (système 2 proactif). De plus, ce modèle est cohérent avec certaines théories attentionnelles importantes (p. ex. ironic process theory) permettant d’expliquer que le discours interne peut parfois s’avérer nuisible à la performance. De plus, un apport important du modèle repose sur la reconnaissance du lien étroit entre le discours interne et les émotions. En effet, bien que le rôle du discours interne dans la régulation des émotions est généralement reconnu au sein de la littérature scientifique, sa fonction d’expression des émotions n’avait jusqu’alors pas été clairement explicitée. Enfin, sur la base du modèle, les auteurs fournissent des pistes d’applications pratiques pertinentes pour l’intervention auprès des athlètes. Ces pistes d’interventions font l’objet d’un article publié par les auteurs (Van Raalte, Vincent, & Brewer, 2016b) et certaines d’entre elles sont présentées dans le chapitre deux de la thèse. Ce modèle est donc susceptible de contribuer au développement de la recherche appliquée au sujet du discours interne en contexte sportif.

Quelques limites du modèle peuvent toutefois être soulevées. Puisqu’il s’agit d’un modèle récent, peu d’études ont jusqu’à présent été réalisées sur la base de ce cadre conceptuel. Ainsi, la principale limite de ce modèle représente le manque de soutien empirique reçu pour le discours interne en contexte sportif (pour une exception, voir Latinjak, 2018). La pertinence de ce modèle pour l’étude du discours interne repose donc sur des postulats basés sur la logique d’un modèle inspiré de théories connexes à la littérature sur le discours interne en sport. De plus, les terminologies employées (système 1, système 2 réactif et système 2 proactif) rendent la compréhension du modèle complexe dans le contexte du discours interne.

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Conceptualisation de Latinjak et ses collaborateurs (2014) (goal-oriented self-talk)

Latinjak et ses collaborateurs (2014) ont développé une conceptualisation concernant spécifiquement le discours interne automatique. Reposant sur une théorie du domaine plus large de la psychologie (undirected et goal-direct thoughts ; Christoff, Gordon, & Smith, 2012), ces auteurs distinguent deux types de discours interne automatique : (a) le discours interne spontané et (b) le discours interne orienté vers les buts. Selon ces auteurs, le discours interne spontané survient à l’esprit de façon non intentionnelle et sans effort et n’est pas utilisé à des fins d’autorégulation par l’athlète. Cette forme spontanée de discours interne représente l’expression automatique de l’émotion que vit l’athlète (p. ex. « J’ai peur de perdre »). De façon distincte, le discours interne orienté vers les buts consiste à des phrases adressées à soi-même dans le but de modifier ou promouvoir un état affectif, ou se donner des instructions concernant l’action. Ce discours interne peut prendre la forme de consigne ou de critique que l’athlète s’adresse à lui-même (p. ex. « Il faut que tu te concentres »).

Latinjak et ses collaborateurs distinguent le discours interne orienté ou non vers les buts en regard du contenu, de la structure et de la formulation (wording). D’abord, en ce qui concerne le contenu, le discours interne non orienté vers les buts concerne principalement la description, l’évaluation ou la recherche de sens d’événements passés ou encore la prédiction concernant des événements futurs. De façon distincte, le discours interne orienté vers les buts consiste généralement à des phrases adressées à soi-même dans le but de modifier ou promouvoir un état affectif, ou se donner des instructions concernant l’action. Ensuite, sur le plan de la structure, le discours interne non orienté vers les buts peut varier selon la valence à-d. positif ou négatif) et la perspective temporelle (c.-à-d. rétrospectif ou anticipatoire). La dimension de perspective temporelle permet de faire une distinction entre le discours interne qui concerne un événement qui a eu lieu dans le passé (p. ex. « J’ai bien joué ») ou qui se produira dans le futur (p. ex. « Je vais gagner »). Le discours interne orienté vers un but peut quant à lui varier selon l’orientation temporelle (c.-à-d. orienté vers le passé ou le futur) et l’activation (c.-à-d. vise à augmenter ou à diminuer l’activation). Concernant l’orientation temporelle, elle permet de distinguer quatre formes de discours interne : (a) orienté vers le présent (p. ex. « N’aies pas peur ») (b) orienté vers un état affectif survenu dans le passé qui perdure dans le présent (p. ex. « Ce n’est pas grave ») (c) orienté vers un état affectif du moment présent qu’on souhaite conserver dans le futur (p. ex. « C’est va bien ») et (d) orienté vers le futur (p. ex. « Ça va bien aller »). Concernant l’activation, le discours interne peut viser à diminuer l’activation (p. ex. « Relax ») ou à l’augmenter (p. ex. « Donne ton 100 %). Enfin, en ce qui concerne la formulation, le discours interne non orienté vers les buts est presque toujours formulé à

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la première personne et rarement à la deuxième personne alors que celui orienté vers les buts est presque toujours formulé à la deuxième personne et rarement à la première personne.

Critique du modèle de Latinjak et ses collaborateurs (goal-oriented self-talk)

Une contribution de la conceptualisation proposée par Latinjak et ses collaborateurs (2014) est qu’elle s’avère spécifique au discours interne automatique, ce qui représente un premier pas vers une meilleure distinction entre les deux avenues de recherche (c.-à-d. discours interne automatique et discours interne stratégique). En effet, il existe maintenant une conceptualisation propre à la forme automatique du discours interne, ce qui permet aux chercheurs de s’y référer pour mieux circonscrire leurs travaux à l’intérieur de cette avenue de recherche. Une seconde contribution représente l’importance accordée aux émotions. En effet, s’inspirant de Van Raalte et ses collaborateurs (2016a), les auteurs précisent que le discours interne non orienté vers les buts représente une expression des émotions vécues par l’athlète alors que le discours interne orienté vers les buts est utilisé volontairement par les athlètes dans le but d’autoréguler les émotions. De plus, quelques recherches s’appuyant sur cette conceptualisation ont été publiées récemment et supportent sa pertinence pour l’étude du discours interne (p. ex. Latinjak et al., 2017 ; Latinjak, 2018).

Malgré ces forces, la terminologie des concepts proposée par Latinjak et ses collaborateurs gagnerait à être clarifiée. En effet, selon ces auteurs, le discours interne spontané et le discours interne orienté vers les buts sont deux sous catégories appartenant à l’avenue de recherche sur le discours interne automatique. Cependant, la distinction que font les auteurs entre « spontané » et « automatique » n’est pas clairement expliquée. Sans explication, cette distinction terminologique peut porter à confusion. Malgré tout, il s’agit de la conceptualisation la plus à jour dans la littérature, c’est pourquoi elle est adoptée dans le cadre de cette thèse.

Résumé des principales conceptualisations du discours interne

En résumé, les trois conceptualisations présentées apparaissent complémentaires et apportent des contributions pertinentes à la littérature sur le discours interne. Bien que les auteurs emploient des terminologies différentes et s’appuient sur des fondements théoriques différents, la conceptualisation de Van Raalte et ses collaborateurs (2016a), et celle de Latinjak et ses collaborateurs (2014) offrent une compréhension similaire du discours interne qui s’avère logique et cohérente avec la littérature. Par exemple, une distinction claire est faite entre le discours interne stratégique et le discours interne automatique, ce qui permet de mieux circonscrire les deux avenues

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de recherche. De plus, ces deux groupes de chercheurs font la distinction entre deux sous catégories de discours interne automatique, une première forme qui représente l’état émotionnel des athlètes (discours interne spontané ou système 1) et une seconde forme utilisée automatiquement par l’athlète dans un but précis (discours interne orienté vers les buts ou système 2 réactif).

Étant donné les différences entre le discours interne stratégique et le discours interne automatique, les résultats des études propres à chacune des deux avenues de recherche sont présentés séparément dans la section qui suit, en commençant par le discours interne stratégique, puis par le discours interne automatique.

Principaux résultats des études sur le discours interne

Discours interne stratégique

Étant donné l’intérêt des intervenants et des chercheurs pour l’optimisation de la performance sportive, la majorité des études réalisées jusqu’à présent a porté sur la forme stratégique du discours interne. À titre de rappel, le discours interne stratégique représente les mots clés ou phrases employés de manière planifiée par l’athlète dans un but précis (Theodorakis, Hatzigeorgiadis, & Zourbanos, 2012). Le discours interne stratégique vise généralement l’atteinte d’une performance optimale par l’entremise d’une consigne ciblant l’exécution appropriée d’une action ou la régulation d’un état affectif. La plupart des études réalisées jusqu’à présent sur le discours interne stratégique concernent l’efficacité de cette stratégie sur des variables en lien avec la performance sportive. Il s’agit donc pour la plupart d’études expérimentales, quasi expérimentales ou d’interventions testant l’efficacité de phrases ou mots, déterminés la plupart du temps par les chercheurs, lors d’une performance réalisée par des athlètes de différents niveaux compétitifs.

Discours interne positif et négatif

S'appuyant sur la croyance populaire en psychologie du sport selon laquelle les pensées positives influencent positivement la performance, des études ont porté sur l’effet du discours interne stratégique positif et négatif sur la performance. L’efficacité d’un discours interne stratégique positif pour améliorer la performance a été démontrée dans certaines études avec différentes tâches et niveaux de difficulté (p. ex. Masciana, Van Raalte, Brewer, Branton, & Coughlin, 2001; Rushall, Hall, Roux, Sasseville, & Rushall, 1988). Par exemple, Rushall et ses collaborateurs (1988) ont observé que les fondeurs de l’équipe nationale canadienne utilisant un discours interne stratégique positif ont significativement amélioré leur performance comparativement à une condition contrôle. D’autres auteurs ont cependant obtenu des résultats n’appuyant pas l’utilisation d’un discours

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interne stratégique positif. Par exemple, Harvey, Van Raalte et Brewer (2002) n’ont pas observé de différence significative entre les participants utilisant un discours interne stratégique positif assigné et ceux utilisant un discours négatif dans une tâche évaluant la précision d’un coup au golf. Ainsi, bien que certains résultats d’étude appuient l’utilisation d’un discours interne stratégique positif sur la performance (p. ex. Hamilton, Scott, & McDougall, 2017), d’autres ne sont pas parvenues à démontrer l’efficacité supérieure de ce type de discours (p. ex. Harvey et al., 2002). Ces résultats inconsistants ont amené les chercheurs à établir deux précisions importantes d’intérêts pour les chercheurs et les intervenants (Bell & Hardy, 2009 ; Hamilton et al., 2007 ; Theodorakis et al., 2012). Premièrement, le discours interne stratégique dont le contenu est négatif peut s’avérer motivationnel pour certains athlètes. Deuxièmement, il importe de bien distinguer le contenu du discours interne stratégique (positif ou négatif) de son effet sur la performance sportive (facilitant ou nuisible).

Discours interne cognitif et motivationnel

Des auteurs ont quant à eux cherché à tester l’efficacité des fonctions cognitives et motivationnelles du discours interne stratégique. Les résultats de ces études, menées principalement en contexte de laboratoire, indiquent que le discours interne stratégique peut s’avérer efficace pour améliorer la performance. Par exemple, l’influence du discours interne stratégique a été démontrée notamment sur la performance à une tâche précise (p. ex. Araki & Mintah, 2006), sur l’apprentissage d’une nouvelle tâche (p. ex. Aghdasi & Touba, 2012), sur le focus attentionnel (p. ex. Hatzigeorgiadis, Theodorakis, & Zourbanos, 2004), sur le sentiment d’efficacité personnelle (p. ex. Kolovelonis, Goudas, & Dermitzaki, 2012), sur le temps de réaction (p. ex. Boroujeni & Ghaheri, 2011; Hanshaw & Sukal, 2016) et sur l’anxiété (p. ex. Hatzigeorgiadis, Zourbanos, Mpoumpaki, & Theodorakis, 2009). Dans la majorité de ces études, l’efficacité du discours interne a été évaluée pour des tâches requérant de la précision ou de l’habileté ou pour des sports d’endurance et de puissance musculaire.

Des chercheurs ont également voulu comparer l’efficacité du discours interne stratégique motivationnel au discours interne cognitif sur la performance. Les résultats de ces études suggèrent que certains facteurs modèrent la relation entre le discours interne stratégique et la performance sportive telle que la nature de la tâche exécutée et le niveau d’expertise de l’athlète. Par exemple, certains résultats d’études indiquent que le discours interne stratégique motivationnel s’avère plus efficace pour les tâches d’endurance et de puissance (p. ex. cyclisme, course à pied, ski de fond, saut en longueur) alors que le discours interne stratégique cognitif est plus efficace pour les tâches

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de précision et d’habiletés (p. ex. lancer de fléchette, golf). D’autres études n’ont toutefois pas observé de différences entre ces deux types de discours interne stratégique sur l’une ou l’autre type de tâche (p. ex. Hatzigeorgiadis, Zourbanos, Goltsios, & Theodorakis 2008; Kolovelonis et al., 2012).

Des auteurs ont également observé que le discours interne stratégique cognitif peut s’avérer nuisible pour les athlètes expérimentés lorsque le mot clé employé dirige l’attention sur l’exécution du mouvement (Hardy, Begley, & Blanchfield, 2014). Ces auteurs expliquent cet effet potentiellement nuisible du discours interne stratégique par un réinvestissement des connaissances procédurales qui nuiraient à l’exécution automatique du mouvement.

Résumé des études sur le discours interne stratégique

En résumé, les études jusqu’à présent tendent à appuyer l’utilité du discours interne stratégique sur la performance sportive (Hatzigeorgiadis, Zourbanos, Galanis, & Theodorakis, 2011). L’efficacité du discours interne stratégique semble reposée sur son effet d’autorégulation sur la concentration et la motivation. Cependant, certains résultats suggèrent que le discours interne stratégique n’est pas efficace en toutes circonstances et que l’efficacité peut varier selon la tâche exécutée et le niveau d’expertise. Étant donné les différences importantes entre les demandes des différents sports et contextes, il est difficile de parvenir à des conclusions de recherche universelles s’appliquant à l’ensemble des sports, niveau et contexte. De plus, les résultats révèlent qu’il existe des différences individuelles quant à l’interprétation que fait un athlète du discours interne stratégique assigné (Bell & Hardy, 2009 ; Hamilton et al., 2007 ; Theodorakis et al., 2012).

Ces considérations invitent les intervenants à être prudents dans l’application des recommandations issues des différents résultats de recherche et à être attentifs aux différences individuelles quant à l’interprétation que fait l’athlète du discours interne stratégique. Puisque la majorité de ces études ont été réalisées en contexte de laboratoire, davantage d’études réalisées en contexte réel sur le terrain sont nécessaires pour tester l’efficacité écologique de cette stratégie en situation de compétition réelle.

Le discours interne automatique

Le discours interne automatique représente les phrases ou les mots clés que les athlètes s’adressent à eux-mêmes et qui surviennent sans être planifiés d’avance (Latinjak et al., 2014; Van Raalte et al., 2016a). Tel que mentionné précédemment, rappelons qu’il existe deux types de discours interne automatique : (a) le discours interne spontané et (b) le discours interne orienté vers les buts. Le

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discours interne spontané survient à l’esprit de façon non intentionnelle et sans effort et n’est pas utilisé à des fins d’autorégulation par l’athlète. De façon distincte, le discours interne orienté vers les buts consiste en des phrases adressées à soi-même dans le but de modifier ou promouvoir un état affectif, ou se donner des instructions concernant l’action à réaliser. Jusqu’à présent, quelques études ont porté sur le contenu du discours interne automatique et d’autres sur les facteurs qui influencent le contenu.

Contenu du discours interne automatique

Les études sur le contenu du discours interne automatique ont initialement permis de le catégoriser selon la valence (contenu positif ou négatif ; Van Raalte, Brewer, Rivera, & Petitpas, 1994) et la fonction (motivationnel ou cognitif ; Hardy et al., 2001). D’une part, en ce qui concerne la valence, le discours interne automatique peut être positif (p. ex. « C’est bien ! » ou négatif (p. ex. « Je suis nul ! »). D’autre part, pour ce qui est de la fonction, celle-ci peut être motivationnelle, c’est-à-dire qu’elle réfère au discours interne orienté vers les buts qui permet de réguler l’effort, se motiver, construire la confiance, contrôler les réactions émotionnelles et cognitives, contrôler l’anxiété et se calmer (Theodorakis et al, 2000). La fonction peut aussi être cognitive, c’est-à-dire qu’elle permet d’améliorer la concentration, se donner des rétroactions, diriger l’attention et favoriser l’exécution automatique du mouvement (Hardy, Hall, & Hardy, 2001 ; Theodorakis, Hatzigeorgiadis, & Chroni 2008).

Des chercheurs ont également entrepris de documenter le contenu du discours interne automatique entretenu par les athlètes à l’aide de questionnaires administrés rétrospectivement (Hatzigeorgiadis & Biddle, 2000; Zourbanos, Hatzigeorgiadis, Chroni, Theodorakis, Papaioannou, 2009). Par exemple, Zourbanos et ses collaborateurs (2009) ont développé l’Automatic Self-Talk Questionnaire

for Sports (ASTQS) et ont identifié huit principales catégories de discours interne : quatre positives

(motivation, confiance en soi, contrôle de l’anxiété et instruction) et quatre négatives (inquiétudes, désengagement, fatigue somatique et pensées impertinentes). Pour leur part, dans le but d’étudier le discours interne d’athlètes d’élite compétitionnant spécifiquement lors de tâches d’endurance, Van Raalte, Morrey, Cornelius et Brewer (2015) ont demandé à des marathoniens élites et non élites de fournir des exemples de leur discours interne automatique à l’aide de questionnaires. Les auteurs ont classé le discours interne automatique en huit catégories : (a) associatif (b) dissociatif (c) motivationnel positif (d) motivationnel négatif (e) mantras/chants (f) spirituel et (g) fixation d’objectifs à court terme. De plus, les auteurs ont identifié des formes de discours interne automatique qui n’avaient pas été identifiées précédemment dans la littérature (p. ex. spiritual

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self-18

talk, mantras), ce qui, selon les auteurs, pourrait s’expliquer par les particularités du contexte

étudié. Les différences de taxonomies retrouvées au sein des études suggèrent que le discours interne automatique est susceptible de varier selon le sport pratiqué et le contexte de l’étude.

Facteurs qui influencent le discours interne automatique. Des auteurs se sont intéressés aux facteurs

qui influencent le contenu du discours interne automatique des athlètes. Jusqu’à présent, la personnalité de l’athlète et les émotions vécues seraient considérées comme des facteurs personnels qui influencent le discours interne automatique alors que les circonstances de la compétition (p. ex. marquer un but) et le rôle de l’entraîneur (p. ex. son attitude) seraient des facteurs situationnels déterminants.

La personnalité. D’abord, concernant la personnalité de l’athlète, Harwood, Cumming et Fletcher

(2004) ont observé qu’une personnalité enthousiaste et orientée vers l’accomplissement des buts est associée à un discours interne automatique positif. Pour leur part, Burton, Gillham et Glenn (2012) se sont intéressés à l’influence de la personnalité selon l’orientation motivationnelle d’athlètes féminines de soccer faisant partie d’un programme de développement olympique. Les auteurs ont observé que les participantes avec un style motivationnel orienté vers la maîtrise et orienté vers le succès ont tendance à avoir un discours interne automatique plus positif comparé au groupe de participantes ayant un style motivationnel orienté vers l’évitement de l’échec.

Le sport et le contexte de compétition. Hardy et ses collaborateurs (2005) ont étudié le contenu du

discours interne automatique des athlètes selon le type de sport et le contexte d’entraînement ou de compétition. Ils ont observé que les athlètes pratiquant un sport individuel ont davantage tendance à entretenir de discours interne automatique que les athlètes évoluant au sein d’un sport d’équipe. De plus, les athlètes rapportent entretenir davantage de discours interne automatique en contexte de compétition qu’en entraînement. Afin d’expliquer ces résultats, Hardy et ses collaborateurs avancent que les athlètes qui pratiquent un sport individuel ressentent davantage le besoin de se parler puisqu’ils sont les seuls responsables de leur performance. De plus, le contexte de compétition susciterait davantage de réflexions puisqu’il revêt généralement une plus grande importance pour l’athlète que les entraînements.

Le niveau des athlètes. Dans le but d’étudier le discours interne automatique d’athlètes

compétitionnant spécifiquement lors de tâches d’endurance, Van Raalte et ses collaborateurs (2015) ont demandé à des adultes marathoniens d’élite et non-élites de fournir des exemples de leur discours interne par écrit (in an open-ended written format) immédiatement après le marathon de Boston. Les auteurs ont relevé quelques différences entre les athlètes d’élite et non-élites dans le

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contenu de leur discours interne automatique. Par exemple, les athlètes élites ont rapporté plus de discours interne automatique associatif (liées à la tâche en cours) que les athlètes non-élites.

Les émotions. Étant donné le lien entre le discours interne automatique et les émotions, des auteurs

ont exploré le lien entre les émotions d’anxiété et de colère vécues en compétition et le discours interne automatique entretenu par les athlètes (Hatzigeorgiadis & Biddle, 2000 ; Latinjak et al., 2017). Par exemple, Latinjak et ses collaborateurs (2017) ont exploré la différence dans le contenu et l’occurrence du discours interne automatique lors de situations générant de l’anxiété ou de la colère en compétition. Les auteurs ont demandé à des athlètes de différentes disciplines sportives de rapporter par écrit toutes les pensées entretenues durant deux situations vécues au cours des deux dernières semaines, l’une générant de la colère et l’autre de l’anxiété. Les résultats ont indiqué que le contenu du discours interne automatique des athlètes concerne principalement l’évaluation, la description ou l’explication d’événements passés (p. ex. « Je n’ai pas été chanceux ») ou la prédiction d’événements futurs (p. ex. « Ça va bien se passer »). En ce qui concerne la valence du discours interne automatique, les auteurs ont observé qu’en situation de colère, le discours interne rapporté par les athlètes est généralement négatif alors qu’il peut être à la fois positif ou négatif en situation d’anxiété. En regard de la dimension de perspective temporelle, les auteurs ont observé que le discours interne automatique en situation d’anxiété est principalement anticipatoire alors que celui en situation de colère est principalement rétrospectif.

Les circonstances de la compétition. D’autres chercheurs se sont intéressés au lien entre le contenu

du discours interne automatique des athlètes et les circonstances vécues en compétition (Van Raalte, Cornelius, Brewer, & Hatten, 2000 ; Miles & Neil, 2014 ; Zourbanos, 2015). Par exemple, dans le cadre de trois études réalisées auprès de joueurs de tennis d’élite adultes et de joueurs non élite juniors, des auteurs (Van Raalte et al., 1994 ; Van Raalte et al., 2000 ; Zourbanos et al., 2015) ont mesuré en temps réel le discours interne automatique observable prenant la forme de verbalisations ou de gestuelles des joueurs durant un match de tennis. Les résultats de ces études ont notamment révélé que les circonstances du jeu, tel que le fait d’avoir marqué un point ou d’être responsable du service, sont associées au discours interne automatique subséquent. Plus précisément, la valence du discours interne automatique concordait habituellement avec la nature de la circonstance vécue (positive ou négative). Ces études ont toutefois porté uniquement sur le discours interne automatique observable (c.-à-d. verbalisé des athlètes), ce qui représente une faible proportion du discours interne des athlètes (Dickens, VanRaalte, & Hurlburt, 2017 ; Hardy et al., 2005).

Références

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