Christiane PERNOT
L.I.R.E.S.T. Université Paris-Sud, Orsay Alan PRITCHARD
School of Education, Southampton University, co-directeur de I.T.Ceres, Infonnation Technology Centre for Educationa! Research and Development inthe Environmental Sciences
MOTS - CLES : RESEAU EUROPEEN - FORMATION/EDUCATION A L'ENVIRONNE-MENT - BANQUES DE DONNEES - TECHNOLOGIES DE DIFFUSION
RESUME: L'objectif du projet I.T. CERES est d'implanter dans des universités européennes, en collaboration avec l'industrie et les gouvernements, un réseau de centres de conception et diffusion de moyens de formation et/ou d'éducationàl'environnement.Le réseau fournit aux utilisateurs des moyens didactiques et l'infrastructure technique pour créer, diffuser et utiliser des banques de données environnementales. Un cours européen modulaire et multidisciplinaire, ECOMASTER, sera accessibleàpartir de n'importe quel centre et devra correspondre dans l'aveniràun diplôme.
SUMMARY : The object of I.T.Ceres is to establish in European universities, in collaboration with industry and govemment, a network of centres concerned with the development and diffusion of environmental education and training. The network will develop teaching strategies as weIl as the technical infrastructure, for the creation, diffusion and use of environmental databases. A European level, modular, multidisciplinary course, ECOMASTER, will become available through each of the centres, corresponding to a masters level qualification.
Cet atelier-forum a réuni une vingtaine de participants originaires d'Allemagne, Angleterre, Belgique, Espagne, France, Italie, Suisse. Nous avons présenté le projet et la discussion a porté sur
une critique de la façon d'utiliser ce projet dans l'enseignement. Le problème technique de l'implantation et du fonctionnement des centres I.T.Ceres a été discuté, ainsi que celui de l'accès aux informations ( banques de données, formations existantes en éducation, réalisation de projets). Les propositions de stratégies d'enseignement ou de contenus ont été également critiquées. Les points particuliers soulevés lors de ces échanges entre les participants et les présentateurs apparaissentà la fm de ce compte-rendu.
1. STRUCTURE DU RESEAU EUROPEEN
Le projet de création des centres I.T.Ceres est une initiative de l'Université de Southampton dans le cadre d'une UETP (UniversitylEnterprise Training Partnership) des Sciences de l'Environnement (programme européen des commissions COMETT II ).
Départ du projet : septembre 1990, avec la réunion de travail des premiers partenaires européens, c'est-à-dire les universités de :
Southampton (Royaume Uni) initiatrice et centre pilote, Barcelona (Espagne), Bergen (Norvège), Minho (Portugal), Namur (Belgique), Utrecht (Pays-Bas), Paris Sud (France). Les disciplines concernées sont la chimie, la biologie, la physique, la géographie, la géologie, l'informatique.
D'autres centres ont été contactés et une extension "Tempus project" existe avec les pays de l'est (pour l'instant la Pologne et la Hongrie).
Les industries et les gouvernements sont également impliqués et les sources de financement actuelles et pour trois ans viennent de l'UNESCO, Erasmus, UNEP-GRill et d'industriels ( IBM Europe, Southern Electric, British Council, mM Bergen Science Centre, Maxwell, Pedigree Petfood, British Gas, HP, Warner-Lambert Pharmaceutical, Campus 2000, National Power, Videotel, etc ... )
2. LES OBJECTIFS
Créer un réseau de centres d'expertise dans les différents pays européens en vue de :
*
mettre en évidence les besoins dans l'industrie, l'éducation et les instances gouver-nementales ;*
satisfaire ces besoins en développant des projets éducatifs en collaboration entre les différents centres;*
produire et évaluer des matériels et des stratégies pour l'éducation et la formation;*
rendre accessibles pour l'éducation et la formation les banques de données mondiales sur l'environnement et les utiliser dans des cours;*
développer les techniques d'enseignement "muIti-médias" etàdistance;*
créer des cours et des diplômes;*
participer à des projets médiatiques d'information du public dans les différents pays.3. LES OBSTACLES ET CONTRAINTES A SURMONTER
Ceux qui sont énoncés ci-dessous sont représentatifs de la situation française, mais la discussion entre les participants de l'atelier a permis de conclure qu'ils le sont aussi des autres pays.
Ce sont:
- la place et la reconnaissance de l'environnement dans l'enseignement des sciences, trop souvent sous-évaluées;
-la nature des diplômes sanctionnant une formation en sciences de l'environnementà définir et les débouchésàétudier;
-la difficulté de gérer l'interdisciplinarité nécessaire dans un enseignement centré sur l'environnement;
-l'apprentissage des techniques d'accès, d'utilisation, de création, de diffusion des banques de donnéesà généraliser;
-la recherche des compétences et des moyens financiers pour mettre en place le matériel d'enseignementàdistance et maîtriser les technologies de communication modernes;
-la multiplicité de matériels informatiques qui rend difficile une unicité d'utilisation de logiciels; -la pratique de langue(s) étrangères pour garantir l'efficacité des échanges;
-la création de liaisons entre universités, industries et instances gouvernementales; -la cohérenceà trouver dans la dispersion des projets.
4. LES AVANTAGES D'UN PROJET EUROPEEN
Les pays qui démarrent un projet éducatif en sciences de l'environnement bénéficient de l'expérience des pays plus avancés dans la réflexion et la pratique. Ceci leur permet de déposer un projet national avec l'atout des réalisations positives dans les autres centres. La recherche d'un diplôme commun résoud en même temps le problème local et celui de l'équivalence européenne. La réalité européenne introduit une cohérence dans les relations avec le droit, l'économie et la
géopolitique qui interviennent dans toute fonnation "environnementale". La dimension européenne impose une recherche de moyens technologiques communs ou les plus adéquats pour l'échange et le développement des techniques de diffusion de données et d'enseignementàdistance. Une recherche d'hannonisation de ces technologies doit paraître un objectif prioritaire.
Enfin un tel projet aboutit à une collaboration dans des décisions sur les conceptions et stratégies d'enseignement et une prise en compte de l'environnement des "autres". Cette réflexion sur un enseignement à créer devrait éviter le casse-tête que sera l'aménagement de cours préexistants, pour les rendre accessibles aux étudiants de n'importe quel pays d'Europe.
5. LE PROJET ECOMA8TER
Il s'agit de créer un cours d'enseignement supeneur (masters level) en Sciences de l'Environnement, ouvert conjointement à des personnes de l'industrie, du gouvernement et de l'éducation.
Ce cours conçu en collaboration aura lieu dans les différents centres, avec une période à l'étrangeràconcevoir. Une partie du contenu sera une réponse spécifiqueàla demande d'une des organisations soutenant le projet.
La réflexion commune a pennis d'émettre quelques principes de base; une structure modulaire semble particulièrement bien adaptée à la souplesse d'utilisation nécessaire pour un échange ou une diffusion entre pays. Les stratégies et didacticiels doivent circuler et être testés dans les différents centres.
L'Université de Southampton a élaboré un premier cours modulaire basé sur "infonnatique et éducationàl'environnement". Son contenu estlesuivant :
*Politique européenne en ce qui concerne l'environnement; *Rôle du contrôle écologique à long terme;
*Contrôle biologique et agriculture ;
*Infonnatique et contrôle rationnel de la lutte contre les insectes;
*Rôle de l'infonnatique dans les prises de décisions en ce qui concerne l'environnement; *Emploi de logiciels d'information perfomnants (SPANS) dans l'éducation à l'environnement. Lastratégie d'enseignement utilisée "interactive responsive teaching" est schématisée ci-après:
observation directe enregistrement
expérience
discussion de groupe
6. EXEMPLES DES PROJETS A DEVELOPPER
banques de données réseaux
détectionàdistance
réflexion individuelle
Pour caractériser les axes et les possibilités de collaboration dans ce projet de fonnation européenne il est utile d'avoir un aperçu des orientations des différents partenaires. Ci-dessous une liste non exhaustive des réalisations ou projets pennet de mieux comprendre ce qui a réuni les universités dans un objectif commun.
6.1 Projets dont la réalisation a commencé à Paris-Sud :
- Recherche sur les concepts de chimie nécessaires dans une éducation à l'environnement. L'objectif est d'introduire l'éducation environnementale dans le cursus des études en chimie du primaire au supérieur.Lethème de l'eau sert d'élément de cohérence. Cette recherche est financée par le ministère de l'Education Nationale.
- Création d'un DESS de Génie de l'Environnementàl'Université Paris-Sud dans le cadre I.T.Ceres (utilisation de la technologie de Ceresdata, stages dans les différents pays en milieu universitaire ou industriel, cours assurés par les enseignants des différents centres, stages de langues financés par le projet...).
6. 2 Projets dont la réalisation a commencé à Southampton
- Ceresdata qui fournit l'infrastructure technique pour créer des banques de données importantes sur l'environnement et les rendre accessibles pour un emploi en éducation;
- Contrôle : éducation pour l'environnement en agriculture - développement de matériel d'enseignement pour les systèmes de contrôle biologique employant "hypenext" (ou multimédia). Application au contrôle rationnel de la lutte contre les insectes;
- Europe school watch :utilisation de la surveillance de sites scolaires et industriels comme ressources scientifiques (géographiques, écologiques, mathématiques, biologiques...) de données pour l'éducation à l'environnement;
- European greenspace : développement de matériels pédagogiques utilisant les multimédias
pour étudier et comparer la relation entre contrôles de planification et de qualité de l'environnement dans les diverses parties de la communauté européenne;
- Eanhcare : programme de formationàl'usage de l'industrie, utilisant les ordinateurs, ayant pour objectif une sensibilisation à l'environnement ;
- Treewarden : programme de formation pour des écoles ou des volontaires s'intéressantàla conservation des arbres;
- Climate-training materials elaboration : pour étudier les processus de changement de climat et
leur impact sur l'environnement.
6.3 Projet commencé à Barcelone
- Chemistry for public understanding (CEPUP) - projet d'utilisation de la chimie dans les
actions et décisions concernant l'environnement, s'appuyant sur un programme démarré en Californie et développéàl'Université de Barcelone pour les écoles et la formation des enseignants.
6.4 Projet commencé à l'Université de Bergen
Un projet de coopération (WANDA) entre l'université et les écoles secondaires pour le traitement informatique des données en sciences de l'environnement. Chaque école participant au
projet "adopte" un lac et assure un suivi de son étude écologique.
6.5 Projet commencé à l'Université de Minho
Création decours defonnation pour des enseignants en sciences de l'environnement.
6.6 Projet commencé
à
l'Université de NamurEntre autres des projets d'éducation dans les écoles, utilisantune responsabilisation des enfants envers l'environnement (voir l'article de A.Defeyt-Royaux : Ethique et environnement dans les actes
de ces 13èmes IlES)
7. LES CHOIX A FAIRE
a) Pour chacun des partenaires : celui de la structure nationale dans laquelle mettre en place et diffuser un cours européen. Faut-il en créer une "exprès", ou est-il plus judicieux et efficace de partir de structures existantes?
b) Les critèresàretenir pour définir un contenu. Faut-il envisager une spécialisation ou plutôt un cours général? Comment tenir compte de façon efficace des débouchés pour ceux que nous formerons?
n
faut envisager des échanges entre les pays dans la recherche de marché de l'emploi.c) Les diplômesà mettre en place. Quels diplômes? nationaux avec une partie "collaboration internationale", ou délibérément européens?
8. LES PREMIERES ACTIONS DE COLLABORATION
a) La création d'un réseau électronique entre les différents partenaires avec l'étude des systèmes existant dans les différents pays et la prise de décision sur le choix du "meilleur" système. Le master-project d'I.T.Ceres, Dave Simmons, spécialiste en informatique a réalisé cette étude. Tous les centres sont sur le réseau Earn, l'objectif est d'utiliser ultérieurement le réseau Greennet.
b) Une enquête sur les banques de données accessibles dans chaque pays et des "serveurs" en permettant l'accès.
c) Une étude du matériel informatique utilisé dans chaque université et des logiciels couramment utilisés pour mettre en interaction plusieurs banques de données (par exemple le logiciel SPANS utilisé en géographie) est menée après enquête réalisée par D.Simmons. Elle permettra le choix des moyens de diffusion.
d) Plusieurs des projets élaborésà Southampton et pouvant être étendus à l'Europe sont à l'étude dans les différents centres.
e) La mise en place de séminaires sur un même sujet dans les différents pays a été décidée. Le thème des pesticides sera traité en 1992 .
f)Les actions ponctuelles dans chaque université, cours, collaboration avec des industries ou des gouvernements, sont diffusées auprès des autres centres.
g) Le bilan des actions communes se fait lors de réunions (entre centres préoccupés par un même projet ponctuel quand c'est nécessaire et au moins une fois par an entre tous les partenaires).
9. DISCUSSION
Une critique positive a été faite sur le contenu du cours proposé par Southampton: ce cours présente l'avantage d'une formation générale bien définie ( contrôle écologique liéàla politique européenne etàl'utilisation de l'informatique) avec un exemple d'application possible (la lutte contre les insectes).Onconçoit toutàfait que d'autres "applications-spécialisations" pourrontêtrechoisies et s'intégrer naturellement dans ce cycle de formation en évitant la création d'une multiplicité d'enseignements (exemple de combinaison entre qualité et efficacité)
Une deuxième réflexion a été lancée sur la façon originale et efficace d'utiliser l'ordinateur dans la stratégie d'enseignement, comme un outil parmi d'autres et de telle façon que la discussion, la
réflexion et l'expérimentation soient privilégiées et l'informatique à leur service (bien souvent la stratégie inverse est pratiquée).
Un échange a eu lieu avec les partisans d'une introduction de l'éducation à l'environnement "générale" et le plus tôt possible, qui devrait être l'objectif prioritaire d'un projet européen. Si, bien évidemment, cela nous semble un objectif des plus importants, nous pensons qu'il est tout à fait efficace d'utiliser les structures de l'université et de créer des diplômes sans attendre qu'une réforme des programmes n'introduise l'environnement dans les cursus du secondaire et du primaire. Le terrain n'est pas "complètement vierge" et bien des laboratoires de recherche travaillent sur des projets liésàl'environnement. D'autre part des maîtrises d'écologie, de sciences physiques, de géologie, etc. abordent de façon plus ou moins fragmentaire l'étude des pollutions ou des ressources naturelles. Si une étude auprès des industries ou des organisations gouvernementales permet de mettre en évidence que la formation universitaire que nous proposons répond à une demande professionnelle, cela ne pourra que favoriser une réflexion des différents gouvernements sur la nécessité d'inclure l'environnement dans tous les programmes d'études. D'autre part, la structure universitaire est, en France tout du moins, celle qui offre la plus grande souplesse quant aux contenus, aux horaires, aux créations modulaires et aux échanges d'enseignants et d'étudiants.
Un dernier argument avancé est que les futurs enseignants étant essentiellement formés à l'université, l'existence de formations universitairesàl'environnement devraient être une incitationà introduire la dimension environnementale dans tout le système d'éducation.
La nécessité d'introduire le droit a été soulevée par plusieurs des participants. Bien entendu le projet ECOMASTER ne peut se concevoir sans l'enseignement correspondant. Mais la structure de nos universités fait que cette discipline existe rarement "sur place".
De nombreux participants ont demandé comment être au courant des enseignements existants ou en création dans le domaine de l'environnement. Une réponse est donnée en France par le document élaboré par le SUIO(l)· Une autre préoccupation est d'accéderà des listes de banques de données; nous avons donné la référence de la liste des banques de données professionnelles en France publiée chaque année(2).
BIBLIOGRAPHIE
GOLDSMITH (F.B.), 1991.-Monitoring for conservation and Ec%gy, Ed., Chapman and Hall,
London.
PEARCE(0),MARKANDYA (A) AND BARBIER (E), 1989.-B/ueprintfor a Green Economy
-Report for the UK department of the Environment Earthscan Publications LId, London.
WESTMAN (W.E.), 1985.-Ec%gy, Impact Assessment and Environmental Planning. John Wiley
HUSEN (T.) and KEEVES (J.P.), University of Stockholm, 1991.-Issues in Science Education· Science Competence in a Social and Ecological Context. published by Pergamon Press.
IRDAC, 1990.-Slcill Shonages in Europe - Published by the Industrial Research and Development
Committee of the Commission of the European Communities.
UK National Cuniculum Council York, 1990.-Curriculum Guidance 7 - EnvironmentIJl Education.
(1) LAIR (N) et PATUREAUC), 1990.-Enseignements sur l'environnement. SUIO, 36 bis,
boulevard Cote-Blatin -63000Clermont-Ferrand).
(2) ADBS, 1990.-Répertoire des banques de données professionnelles 1990. Ed. Lavoisier, coll.
