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Déterminants biologiques et maternels des problèmes de comportement chez l'enfant inuit d'âge scolaire

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Academic year: 2021

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Déterminants biologiques et maternels des

problèmes de comportement chez l'enfant inuit

d'âge scolaire

Mémoire doctoral

Gabrielle Bégin

Doctorat en psychologie

Docteur en psychologie (D. Psy.)

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Déterminants biologiques et maternels des

problèmes de comportement chez l'enfant inuit

d'âge scolaire

Mémoire doctoral

Gabrielle Bégin

Sous la direction de :

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Résumé

Le présent projet de recherche propose de documenter l’association entre certains déterminants biologiques et psychosociaux et l’apparition de difficultés de comportement chez des enfants inuits d’âge scolaire. Les objectifs sont d’une part de documenter la présence de ces facteurs de risque au moyen de statistiques descriptives et d’autre part, de vérifier l’association avec l’apparition de problèmes de comportements externalisés et internalisés chez les enfants âgés de 11 ans. 294 enfants inuits âgés entre 8 et 14 ans vivant au Nunavik ont été invités à participer à cette étude longitudinale. Le Teacher’s Report Form du CBCL a été télécopié à l’école de l’enfant pour que son enseignant le complète. Des corrélations de Pearson ont été réalisées, puis des régressions multiples ont été effectuées sur les variables significativement associées aux PC. Les résultats des corrélations montrent que les déterminants biologiques ne sont pas associés à l’apparition des problèmes de comportement internalisés (PCI), et que deux variables sont corrélées avec l’apparition des problèmes de comportement externalisés (PCE), soit le sexe et la consommation de tabac de la mère durant la grossesse. De plus, la consommation de drogue prénatale de la mère ainsi que l’allaitement, présentent des corrélations marginalement significatives avec les PCE. Les analyses de régression montrent des effets du sexe de l’enfant, de l’exposition prénatale au tabac, le score à la matrice de Raven et l’insécurité alimentaire sont significativement associés à l’apparition des PCE, tandis que le score au Raven et la langue lors de l’entrevue, lorsque combinés, expliquent l’apparition des PCI à 11 ans. À la lumière de ces résultats, des questions demeurent et sont discutées en conclusion.

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Abstract

This research project aims to document the association between multiple biological and psychosocial determinants and the emergence of behavioural problems among school-aged Inuit children. The objectives are firstly to document the presence of these risk factors through descriptive statistics and secondly, test the association with the development of externalizing and internalizing behaviour problems in a sample of eleven-year-old children. 294 Inuit aged between 8 and 14 years living in Nunavik were invited to participate in this longitudinal study. The Teacher's Report Form of the CBCL was faxed to the child's school for his teacher to complete. Pearson correlations and multiple regressions were performed on variables significantly associated with behaviour problems. The results of the correlations show that biological determinants are not associated with the occurrence of internalizing behaviour problems (IBP), and that gender and tobacco consumption during pregnancy are correlated with the appearance of externalized behaviour problems (EBP). In addition, prenatal drug use and breastfeeding have marginally significant correlations with EBP. Regression analyzes show the effects of child gender, prenatal exposure to tobacco, the Raven score and food insecurity are significantly associated with the occurrence of EBP, while the score at Raven and language during the interview, when combined, account for the emergence of IBP. In light of these results, questions remain and are discussed in conclusion.

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... vii

Remerciements ... ix

Avant-propos ... xiii

Introduction ... 1

Objectif ... 1

Les problèmes de comportement internalisés et externalisés ... 2

Définitions et descriptions ... 2

Prévalences ... 4

Étiologies ... 5

Difficultés dans l’étude des PC ... 7

Déterminants biologiques... 8 Plomb ... 9 BPC ... 10 Mercure... 11 Omégas-3 ... 12 Tabac ... 13 Alcool et drogues ... 15 Prématurité ... 16 Allaitement ... 17 Conclusion ... 18 Déterminants psychosociaux ... 19 Facteurs socioéconomiques ... 20 Facteurs relationnels ... 21 Facteurs maternels ... 23 Conclusion ... 25 Matériel et Méthode ... 26 Participants... 26 Procédures ... 27 Instruments de mesure ... 28 Analyses statistiques ... 32 Résultats ... 33 Statistiques descriptives ... 33 Analyses corrélationnelles ... 36

Analyses de régression linéaires ... 38

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Discussion ... 42

Conclusion ... 42

Forces et limites de l’étude ... 45

Directions futures ... 47

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Liste des tableaux

Tableau 1. Caractéristiques des participants (mères et enfants) ... 34 Tableau 2. Matrice de corrélations des sous-échelles du TRF ... 36 Tableau 3. Corrélations entre les sous-échelles internalisées et externalisées du TRF et

les déterminants biologiques ... 37 Tableau 4. Corrélations entre les sous-échelles internalisées et externalisées du TRF et

les déterminants maternels et psychosociaux ... 39 Tableau 5. Régressions hiérarchiques des PCE avec les facteurs biologiques, les

facteurs psychosociaux et la combinaison des deux ... 40 Tableau 6. Régressions hiérarchiques des PCI avec les facteurs psychosociaux ... 41

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Remerciements

Puisque les occasions se font rares, j’aimerais profiter de cette tribune officielle qui m’est offerte pour remercier tous ceux que j’ai côtoyés – souvent assidûment- durant les treize dernières années. Treize années d’études universitaires durant lesquelles j’ai beaucoup appris (et beaucoup ri et beaucoup pleuré et surtout, beaucoup déménagé) et qui feront maintenant partie de ce que j’appellerai « le premier tiers de ma vie » ou « dans l’temps que j’étudiais ». À maintenant 33 ans, je suis prête à passer à autre chose. Ça m’aura pris toutes ces années avant me faire à l’idée que les études se terminent un jour.

C’est avec un bon mélange d’excitation et de soulagement que je réalise qu’aujourd’hui est la fin d’un long processus durant lequel il s’est passé tant de choses que de résumer les dernières années en disant simplement que je « faisais mon doc » serait bien réducteur. Mes années universitaires m’auront permis de me former, non seulement intellectuellement, mais aussi socialement et émotionnellement.

Je tiens d’abord à remercier les participants de l’étude inuite, mères, pères et enfants, qui ont généreusement donné de leur temps pour nous permettre de mieux comprendre leur réalité singulière. Merci aux Instituts de Recherche en Santé du Canada pour la très appréciée bourse de recherche qui m’a été octroyée pendant trois ans.

Merci à Dre Gina Muckle de m’avoir permis d’utiliser les données recueillies par son équipe durant plus de 10 ans dans le Nord québécois, sans lesquelles je n’aurais pu faire cette étude si pertinente et intéressante. Je la remercie également pour les occasions qu’elle m’a données de devenir une meilleure chercheuse.

Merci grandement à Dre Jocelyne Gagnon qui m’a aidée à comprendre comment la banque de données du laboratoire de l’Unité de Recherche en Santé

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publique était construite (je lui lève d’ailleurs mon chapeau d’avoir réussi à la décoder!).

Merci à Dr Pierrich Plusquellec, qui m’a offert une première expérience très inspirante comme auteur scientifique.

Un merci particulier à Dre Nadine Forget-Dubois pour son support moral, fourni entre deux analyses statistiques et discussions de voyage. Je suis très heureuse d’avoir pu partager ces moments avec toi et je suis contente de poursuivre notre relation en jardinant.

Merci à mes collègues du cégep Limoilou qui ont été pour moi une inspiration et un modèle de rigueur, autant au niveau de l’éthique que du professionnalisme. J’ai été accueillie dans une grande et belle famille que j’espère pouvoir côtoyer encore longtemps.

Merci à mes superviseurs cliniques : Stéphanie Murray, Marie-Hélène Méthot, Alain Paré, Dr Richard Couture, Dre Lina Normandin et Dr Stéphane Sabourin. Merci d’avoir été autant de boussoles qui m’ont permis de comprendre le travail du thérapeute et qui ont tous été d’une grande inspiration.

Un grand merci à Dre Marie-Hélène Gagné, membre du comité d’encadrement, pour ses commentaires et suggestions avisés lors de la lecture de mes documents de recherche. Merci à Dr Carl Lacharité d’avoir accepté d’évaluer mon mémoire.

Je ne peux passer sous silence la reconnaissance sans bornes que j’éprouve pour mon directeur de recherche. Merci à Dr George M. Tarabulsy de m’avoir accueilli à bras ouverts dans son laboratoire, sans condition. Ta présence éclairante, chaleureuse, ton écoute, ton support, ton encadrement efficace m’ont permis de compléter ce doctorat sans trop de souffrances. Merci surtout pour ton humanité et ta

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Ce doctorat m’a également permis de rencontrer des gens merveilleux avec qui une amitié sincère s’est bâtie : Caroline, Marie-Hélène, Claudia, Jean et Annie. Merci Annie, petit rayon de soleil, qui, avec Jean, a formé l’équipe de travail la plus désordonnée, jamais connue au troisième cycle. Merci Jean. Tu vois, j’ai terminé! Je ne pense pas que tu aies réellement douté de moi, mais maintenant, ton scepticisme est confondu! Merci Claudia pour toutes les belles discussions et les soirées de fête. Merci Marie-Hélène pour ton cerveau. Et ton humour qui vient avec. J’ai réellement eu un coup de foudre amical en te rencontrant! Un merci spécial à Caroline Desrosiers, qui a su, dans les derniers instants de rédaction, garder une main de fer dans un gant de velours pour me guider vers la réussite. C’est exactement de ça que j’avais besoin. Tu ne peux pas savoir à quel point je suis contente de t’avoir parlé au déjeuner de bienvenue du bacc, en août 2004! Ton amitié m’est très précieuse.

À Valériane, Jean-François, Annabelle, Véronique, Mélany, Caroline, Julie, Emmanuel, Elisa, Sébastien et Sophie qui m’ont tous, à leur manière, supportée dans mon projet de doctorat. Un merci tout particulier à Valériane d’être une amie aussi extraordinaire et fidèle. Merci pour ton positivisme et ta générosité, tu es une inspiration pour moi. Je nous souhaite encore de longues années de partage, de support mutuel sans condition et qui sait, peut-être de nombreux autres voyages!

À ma famille, Pierrette, Robert, Steve, Geneviève, Sébastien, Jean-Simon, David et Laurence, à Mimi et Marc, et à ma belle-famille Linda, Marc, Bob, Line, Mélissa et Sylvain, qui ont su bien m’encourager à leur façon et qui ont toujours cru que je pouvais y arriver. Merci spécialement à ma mère Pierrette d’avoir toujours soutenu ma curiosité intellectuelle et d’avoir cru en mes capacités (merci aussi pour les déménagements). Merci à ma sœur, mon amie Geneviève, qui a tout partagé avec moi et grâce à qui ma vie est plus agréable.

J’ai également eu l’extraordinaire privilège de donner naissance à deux êtres merveilleux durant mes études. À mes filles, Charlie et Dali, qui ont fait partie

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heureuse de vous avoir avec moi. Je suis vraiment fière d’être votre maman. J’espère de tout cœur que vous connaîtrez la satisfaction du travail accompli et que vous développerez une belle curiosité intellectuelle et surtout, beaucoup de persévérance, qui vous permettra de réaliser vos rêves. Je vous aime grand comme l’univers.

Pour finir, j’aimerais remercier mon chéri Marc pour son support inconditionnel et sa grande patience. Il est évident que mon projet en a été un de couple et de famille également. Nous avons formé une extraordinaire équipe durant toutes ces années et cela m’a permis de passer au travers mes études avec le sourire (ou presque)… À partir de maintenant, nous pourrons nous concentrer sur d’autres projets, dont certains déjà bien entamés, qui nous tiennent à cœur. C’est à mon tour de te supporter. Je t’aime.

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Avant-propos

Gabrielle Bégin a rédigé ce mémoire doctoral. Elle a également réalisé les analyses statistiques et l’interprétation des résultats sous la supervision de George M. Tarabulsy, Ph. D., directeur de recherche et professeur titulaire à l’École de psychologie de l’Université Laval. Dr Tarabulsy a collaboré à toutes les étapes du projet, de sa conception à sa révision.

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Introduction

Les Inuits du Nunavik (région du Québec située au nord du 55e parallèle) sont

exposés à plusieurs difficultés psychosociales susceptibles de mettre en péril le développement optimal des enfants. Parmi celles-ci, nous retrouvons des prévalences élevées de monoparentalité, de grossesses adolescentes, de violence conjugale et d’abus d’alcool, une grande pauvreté ainsi que l’un des taux de suicide les plus élevés au monde (Conseil national du bien-être social, 2007; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, 2007). Les jeunes inuits sont ainsi à risque d’être exposés à ces facteurs de vulnérabilité qui sont associés au développement de difficultés telles que les problèmes de comportement (PC) externalisés (PCE) et internalisés (PCI). Au Nunavik, presque la moitié des références faites aux Directions de protection de la jeunesse concernent des jeunes ayant un problème de comportement sérieux (Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, 2007). De plus, un article récent fait état de prévalences élevées du trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (21.5%) et du trouble oppositionnel avec provocation et du trouble des conduites (22%), évalués par l’enseignant à l’aide du Disruptive Behavior Disorder Checklist, chez 277 enfants du Nunavik âgés de 11 ans (Boucher et al., 2012). Malgré la présence de nombreux facteurs de risque connus reliés au développement de difficultés chez l’enfant dans cette population, les facteurs associés à l’apparition des problèmes de comportement chez les jeunes inuits restent peu documentés. Par ailleurs, une revue de la littérature traitant de la santé mentale chez les jeunes des régions arctiques indique que les études dans cette population se limitent principalement aux troubles de l’abus de substance et aux comportements suicidaires, et que peu d’information est disponible concernant les causes de ces difficultés (Lehti, Niemela, Hoven, Mandell, & Sourander, 2009).

Objectif

Le présent projet de recherche propose de documenter la présence des PC internalisés et externalisés chez les Inuits du Nunavik d’âge scolaire et d’examiner leur lien avec les facteurs de risque biologiques et psychosociaux auxquels les enfants âgés de 11 ans sont exposés. L’objectif de cette étude est de brosser un portrait le plus complet possible entourant la présence des PC dans cette population, dans une optique

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d’épidémiologie descriptive. Il est attendu que les associations entre les facteurs biologiques et psychosociaux et les PC seront similaires à celles trouvées dans des populations dites « à risque », par exemple les mères adolescentes ou les gens à statut socioéconomique défavorisé. Il est également attendu qu'un haut niveau de contaminants tel que le plomb (pré et postnatal), le mercure et les BPC (prénatal), l'alcool (prénatal), le tabac (prénatal), la prématurité et les omégas-3 (relation inverse) soient associés à une augmentation des PCE et PCI chez les enfants de notre échantillon. De plus, les familles vivant davantage dans la pauvreté, celles au sein desquelles est perpétrée de la violence entre conjoints, celles où davantage de détresse psychologique maternelle est présente et celles où les mères ont eu leur enfant à l’adolescence devraient présenter davantage de PC chez leur enfant que celles qui ne possèdent pas ces facteurs de risques.

Ce mémoire est divisé en six parties : premièrement, les PC et les facteurs liés à leur apparition seront décrits. Deuxièmement, les facteurs de risque biologiques, psychologiques et sociaux présents dans la population du Nord seront dépeints. Troisièmement, la méthodologie de la présente étude sera expliquée. Quatrièmement, les résultats seront décrits. Cinquièmement, une discussion à propos de ces résultats suivra. Sixièmement, une conclusion générale expliquant la portée des résultats obtenus terminera ce mémoire.

Les problèmes de comportement internalisés et externalisés

Définitions et descriptions

Les PC à l’enfance peuvent être classifiés de deux façons : de manière catégorielle et diagnostique, telle que présentée dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, cinquième édition (DSM-V; American Psychiatric Association (APA), 2013); de façon dimensionnelle, à l’aide d’échelles indiquant la position d’un individu sur un continuum de dysfonctionnement, allant d’absent à sévère (Bartlett, Holditch-Davis, & Belyea, 2005).

L’approche catégorielle établit les critères selon lesquels un individu est considéré comme ayant ou n’ayant pas le trouble. Pour qu’un diagnostic soit établi, l’individu doit d’abord satisfaire au nombre de symptômes minimaux requis pour chaque trouble, puis

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cliniquement significative. Dans le DSM-V, les problèmes de comportement à l’enfance comprennent six affections : le trouble oppositionnel avec provocation, le trouble des conduites, le trouble intermittent explosif (intermittent explosive disorder), la pyromanie, la kleptomanie et le trouble de personnalité antisociale. Le trouble de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDA/H) fait quant à lui partie des troubles neurodéveloppementaux. Ces diagnostics sont souvent comorbides avec les troubles anxieux et de l’humeur, ainsi qu’avec les troubles de consommation de substances et d’apprentissage (Loeber, Burke, Lahey, Winters, & Zera, 2000).

Le TDA/H se définit comme un patron de comportements inattentifs et/ou hyperactifs et impulsifs, présent de façon plus sévère que ce qui est attendu pour un niveau de développement donné, et ce, dans au moins deux environnements (maison, école, etc.). Il est habituellement diagnostiqué avant l’âge de sept ans, mais de plus en plus d’études montrent que le TDA/H perdure à l’adolescence et à l’âge adulte (Willoughby, 2003). Les enfants atteints de ce trouble sont souvent décrits comme turbulents et bruyants; ils interrompent les gens lorsqu’ils parlent, dérangent leurs camarades de classe, et on doit souvent leur répéter les consignes. Le DSM-V propose trois sous-types de TDA/H, soit le type inattention prédominante, le type hyperactivité-impulsivité prédominante, et le type mixte.

Le trouble oppositionnel avec provocation est caractérisé par une variété de comportements négativistes, hostiles et opposants face aux figures d’autorité (APA, 2013; Wakschlag, Pickett, Leventhal, 2000). Il est vu comme un précurseur d’une affection plus grave, le trouble des conduites. Ce dernier est décrit comment un patron persistant et répétitif de comportements antisociaux et de violation des droits des autres et des normes sociales (APA, 2013; Wakschlag et al., 2000).

À l’enfance, il n’y a pas de critères spécifiques pour évaluer les troubles anxieux ou de l’humeur, mis à part le trouble d’anxiété de séparation. Par contre, un diagnostic peut être posé lorsqu’un enfant ou un adolescent satisfait aux critères indiqués pour les adultes (APA, 2013). Dans le DSM-V, les principaux troubles anxieux comprennent les troubles

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paniques, phobiques, obsessionnel-compulsif, du stress post-traumatique et d’anxiété généralisée; les troubles de l’humeur comprennent quant à eux les problèmes émotionnels ayant comme caractéristique principale un dérangement de l’humeur. Ils incluent les troubles de dépression majeure, bipolaire et dysthymique.

La seconde approche de classification des PC distingue les individus sur un continuum, allant d’une absence de problème à une atteinte grave. Cette approche, dite empirique ou dimensionnelle, est basée sur une analyse statistique d’items permettant de distinguer des patrons de comportements retrouvés chez les jeunes, patrons qui sont parfois reliés entre eux. Deux grandes dimensions ou clusters des troubles psychopathologiques des enfants sont reconnus dans les études : les problèmes externalisés et internalisés (Bartlett et al., 2005). Les problèmes externalisés affectent le comportement observable de l’enfant, tandis que les comportements internalisés ne sont pas manifestes (Bartlett et al., 2005). Les comportements externalisés, également appelés trouble des conduites ou comportements sous-contrôlés (undercontrolled behaviors), comprennent des symptômes d’hyperactivité, de manque de contrôle et d’agressivité. Ils sont caractérisés par des bagarres, de la désobéissance, des crises de colère et des comportements destructeurs. Les comportements internalisés, aussi nommés anxieux/retirés ou surcontrôlés (overcontrolled behaviors), sont caractérisés par des manifestations plus passives incluant l’anxiété, la dépression, le retrait, la timidité et les plaintes somatiques (Achenbach & Edelbrock, 1978; Bartlett et al., 2005).

Prévalences

Le TDA/H est l’un des troubles pédiatriques les plus diagnostiqués, apparaissant chez environ 5% des enfants (APA, 2013). Les garçons semblent plus à risque de développer un TDA/H, avec des taux de prévalence de 2 fois supérieurs à ceux des filles. Selon les études, le trouble oppositionnel avec provocation est quant à lui retrouvé chez 1 à 11% des enfants, avec une moyenne de 3.3%. Le ratio garçon fille serait de 1.4 :1. Par ailleurs, le DSM-V établit la prévalence du trouble des conduites entre 2 et 10%, avec une médiane de 4%. Davantage de garçons que de filles démontreraient des symptômes

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l’enfance et à l’adolescence est de 5 à 20% pour les troubles anxieux et de 5 à 8% environ pour les troubles de l’humeur (Angold & Costello, 1995; Essau, Conradt, & Petermann, 2000). Une récente enquête américaine évaluant la prévalence des troubles psychiatriques dans la population, effectuée auprès de 10 123 adolescents âgés entre 13 et 18 ans, a montré que 31.9% des adolescents souffraient d’un trouble anxieux et 14.3% souffraient d’un trouble de l’humeur, les filles étant davantage touchées par ces deux troubles que les garçons (Ries Merikangas et al., 2010). Dans cette enquête, les troubles du comportement étaient retrouvés chez 23.5% des garçons et 15.5% des filles et la comorbidité avec au moins un autre trouble de santé mentale était retrouvée chez environ 40% des participants.

La prévalence des PC externalisés se situe entre 4 et 13%, avec environ 3 fois plus de garçons que de filles atteintes. Les filles sont donc moins à risque d’être impliquées dans des comportements délinquants (e.g. Gorman-Smith & Loeber, 2005). Cinq à dix pour cent des enfants et adolescents auraient quant à eux un trouble internalisé, avec presque deux fois plus de filles que de garçons (Bartels et al., 2003; Hill, 2002).

Les garçons auraient le plus souvent des troubles du comportement perturbateur tel que le TDA/H (e.g. Gorman-Smith & Loeber, 2005). Ils seraient donc plus souvent référés en clinique, comparativement aux femmes pubères qui démontreraient davantage de problèmes internalisés, comme la dépression (e.g. Angold, Costello, & Worthman, 1998; Broderick & Korteland, 2002). Davantage de recherches sur le comportement sont effectuées chez les jeunes garçons que chez les filles. Cet état de fait peut en partie expliquer les différences de prévalences entre les genres. Par conséquent, les études tirent des conclusions sur les PC qui sont biaisées par le manque de représentativité de l’échantillon (Wicks-Nelson & Israel, 2003). Davantage de recherches sur les différences entre les PC internalisés et externalisés entre les garçons et les filles semblent donc nécessaires.

Étiologies

Les facteurs étiologiques des PC sont multiples. Les rôles possibles de l’hérédité, des tératogènes, de la famille, des pairs, de la relation parent-enfant et du tempérament de

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l’enfant ont été documentés dans plusieurs études (Wolfe, Crooks, Lee, McIntyre-Smith, & Jaffe, 2003). Ainsi, les PC internalisés ou externalisés pourraient émaner d’influences familiales ou extrafamiliales négatives comme le stress parental (Benzies, Harrison, & Magill-Evans, 2004), la psychopathologie parentale (Kahn, Brandt, & Whitaker, 2004) ou les conflits maritaux (Cui, Donnellan, & Conger, 2007). Ils pourraient également venir de pratiques parentales déficientes (Feng, Shaw, & Silk, 2008; Trautmann-Villalba, Gerhold, Laucht, & Schmidt, 2004) ou de la monoparentalité et du jeune âge de la mère (Trautmann-Villalba et al., 2004). Un faible statut socioéconomique (SSÉ) (Goosby, 2007) et la dangerosité ou la pauvreté du voisinage (Shaw, Winslow, Owens, & Hood, 1998) ont également été reliés aux PC. Finalement, un attachement insécurisant (Lyons-Ruth, Easterbrooks, & Cibelli, 1997), une association avec des pairs délinquants (Hoge, Andrews, & Leschied, 1994), le modeling (Wiener & Dulcan, 2004), et une exposition à un tératogène (Wright et al., 2008) sont aussi documentés. Les causes des PC semblent multifactorielles et interreliées (Lahey et al., 1999; Mullen & Hendren, 2003; Wicks-Nelson & Israel, 2003).

Les PCI et PCE peuvent apparaître très tôt dans l’enfance et mener à des trajectoires durables de délinquance, de criminalité, de rejet par les pairs, de dépression et d’anxiété (Keiley, Lofthouse, Bates, Dodge, & Pettit, 2003; Kovacs & Devlin, 1998), mener à des troubles du comportement perturbateur, du contrôle des impulsions, et des troubles des conduites (diagnostic du DSM-V) et à des troubles émotionnels ou sociaux (par exemple, le rejet) plus tard dans l’enfance ou à l’adolescence. Plus spécifiquement, les PC externalisés sont des précurseurs de troubles adultes plus graves comme le trouble de la personnalité antisociale (Burke, Loeber, & Birmaher, 2002), les troubles d’abus de substance (Molina & Pelham, 2003), les troubles de l’humeur et les troubles anxieux (Lee, Lahey, Owens, & Hinshaw, 2008; Petty et al., 2008). Les jeunes ayant des troubles internalisés sont quant à eux plus à risque de développer un trouble dépressif ou anxieux à l’âge adulte que des enfants du groupe contrôle (Petty et al., 2008). Aucune étude traitant des facteurs psychosociaux associés aux PCE et PCI chez les Inuits ne semble avoir été publiée jusqu’à présent.

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Difficultés dans l’étude des PC

Bien qu’il soit bien établi qu’un ensemble de facteurs de risque soient en lien avec les PC, il est également important de stipuler que les liens de causalité, hormis certains facteurs clés, sont difficiles à identifier. En effet, la vaste majorité des travaux est de nature corrélationnelle. Dans de tels contextes, il est possible que des facteurs confondants ou des processus de médiation, non mesurés, soient en cause. Par exemple, il est possible que la pauvreté soit associée aux PC, mais que le simple fait d’allouer davantage de ressources financières ne modifie pas les taux de prévalence du phénomène, car ce type d’intervention n’aborde pas les médiateurs du lien entre la pauvreté et les PC. Ces médiateurs restent intouchés par un ajout de ressources financières. Dans un tel cas, on pourrait concevoir que la pauvreté est associée à des environnements plus néfastes au développement de l’enfant, en lien avec une exposition élevée au stress prénatal, aux tératogènes, à des conduites parentales plus coercitives et contrôlantes par exemple, ce qui nuance beaucoup les liens qui sont obtenus dans certaines études. Certaines études de type expérimental ou quasi expérimental, impliquant un devis d’intervention (par exemple qui tente de modifier des conduites parentales dans le but de diminuer les PC), permettent davantage de tirer des liens de causalité (Cicchetti, Rogosch, & Toth, 2006). Dans le cadre de la présente étude, qui est corrélationnelle et longitudinale, il est important de procéder avec nuance dans l’interprétation des liens qui seront observés. Cela est également le cas pour la plupart des travaux qui seront recensés.

Dans la prochaine section, une recension de différents facteurs prédictifs des PC est présentée afin de préparer l’examen de prédicteurs des PC auprès d’une population inuite. Lorsque des études précises portant sur cette population auront été réalisées, elles seront décrites en détail.

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Déterminants biologiques

La recherche dans le domaine des PC propose que les prédicteurs importants, surtout dans le contexte de populations vulnérables sur le plan social, concernent les facteurs biologiques en lien avec les tératogènes et les nutriments. Deux grandes sources sont proposées : celles liées aux habitudes de vie de la mère en cours de grossesse, qui comprend la consommation d’alcool, de tabac et de drogues, et celles liées à l’environnement physique, soit les contaminants et nutriments présents dans la chaîne alimentaire. Les contaminants incluent les biphényles polychlorés (BPC), le mercure et le plomb; les nutriments comptent les acides gras polyinsaturés (omégas-3).

Les contaminants environnementaux présents dans la chaîne alimentaire proviennent de différentes sources. Les BPC ont été grandement utilisés en Europe et en Amérique du Nord de 1930 jusqu’à la moitié des années ’80 dans l’agriculture et l’industrie, mais ils sont de nos jours bannis d’utilisation dans la plupart des pays. Étant donné leur résistance à la dégradation et leur susceptibilité à la biomagnification, ils se retrouvent encore aujourd’hui dans les organismes vivants (Duffard & Duffard, 1996). Le mercure est retrouvé à l’état naturel dans la croûte terrestre et provient également d’activités humaines, principalement de la combustion de carburants fossiles et de l’incinération des déchets. Le plomb, un métal retrouvé à l’état naturel, a été utilisé dans plusieurs produits domestiques comme la peinture ou l’encre. Dans le passé, la plus grande source de contamination à ce produit a été l’essence.

La population inuite est très exposée aux contaminants environnementaux qui sont transportés du sud au nord par les courants atmosphériques et océaniques et ensuite bioamplifiés dans la chaîne alimentaire. Les niveaux de BPC, de mercure et de plomb dans le sang des Inuits sont plus élevés que ceux du reste de la population au Québec, principalement en raison de la fréquente consommation d’aliments d’origine marine tels que le poisson et les mammifères marins. Chez les femmes inuites en âge de procréer, les concentrations de BPC sanguins de 14% d’entre elles sont plus élevées que la limite de dangerosité établie par Santé Canada. Pour le mercure et le plomb, 72% et 2%

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respectivement des femmes en âge de procréer dépassent la limite (Dewailly, Ayotte, Muckle, Dery, & Furgal, 2004).

Dans plusieurs études, la consommation d’alcool, de tabac et de drogues durant la grossesse a été reliée à l’occurrence de PC, tant à la petite enfance qu’à l’âge scolaire et à l’adolescence. Une revue de littérature récente fait état des résultats de recherches qui ont étudié le lien entre les tératogènes et les symptômes de TDAH chez les enfants. Les associations les plus solides sont celles impliquant une exposition prénatale au tabac et à l’alcool et postnatale au plomb (Yolton et al., 2014). De plus, des associations significatives sont trouvées dans une moindre mesure pour l’exposition à la cocaïne, à l’héroïne et aux pesticides organochlorés.

Plomb

La population du Nord-du-Québec est particulièrement à risque de contamination par le plomb, étant donné leur grande consommation de mammifères marins. Une association entre la présence de plomb dans le sang de cordon et certaines manifestations des PC a été démontrée chez des enfants âgés de 11 mois et de cinq ans (Plusquellec et al., 2010; Plusquellec et al., 2007). Parmi ces manifestations, notons l’impulsivité, l’irritabilité et l’inattention. Très peu d’études confirment la présence d’un lien entre l’exposition prénatale au plomb et le comportement au-delà de la petite enfance. L’étude de Plusquellec et collègues démontre que des enfants inuits âgés de 11 mois ayant des niveaux de plomb faibles ou moyennement élevés documentés dans le sang de cordon montraient davantage d’inattention au même âge que ceux dont les niveaux de plomb sont très faibles (Plusquellec et al., 2007). Dans cette étude, le comportement de 110 enfants âgés de cinq ans a été évalué par deux expérimentateurs à l’aide d’une version modifiée du Infant Behavior Ratings Scale de l’échelle de mesure comportementale du Bayley (BRS). De plus, le comportement de ces mêmes participants alors âgés de 11 mois a été codifié par deux assistants de recherche à l’aide d’enregistrements vidéo. L’association entre l’exposition pendant l’enfance à des niveaux de plomb faibles, modérés ou élevés et des effets adverses sur des comportements tels l’attention, les troubles de la conduite, l’anxiété et l’activité est bien documentée (Burns, Baghurst, Sawyer, McMichael, & Tong, 1999; Chandramouli,

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Steer, Ellis, & Emond, 2009; Fraser, Muckle, & Despres, 2006; Liu, Liu, et al., 2014; Neugebauer et al., 2015; Szkup-Jablonska et al., 2012; Wasserman, Liu, Pine, & Graziano, 2001; Wasserman, Staghezza-Jaramillo, Shrout, Popovac, & Graziano, 1998). Par exemple, Chiodo, Jacobson et Jacobson (2004) rapportent qu’une exposition faible à modérée au plomb mesurée à 7,5 ans est associée avec des difficultés d’attention et des comportements de retrait au même âge.

Dans une méta-analyse de 2013 sur 33 études regardant le lien entre l’exposition au plomb et le TDAH, les auteurs ont trouvé une association de petite à moyenne amplitude pour les symptômes d’inattention et d’hyperactivité/impulsivité. De plus, ils ont trouvé que la force de l’association entre la contamination au plomb et les symptômes du TDAH était semblable à celle entre plomb et problèmes des conduites et entre plomb et diminution du QI chez l’enfant (Goodlad, Marcus, & Fulton, 2013). D’autres études ont montré que la présence de plomb dans le sang des enfants était associée à davantage de PC, et ce même à de très faibles doses (<10g/dL). Liu et ses collègues ont trouvé que pour chaque augmentation de un g/dL de la concentration de plomb dans le sang, des scores mesurés avec le Child Behavior Checklist (CBCL) et le Teacher’s Report Form (TRF) de réactivité émotionnelle, anxiété/dépression et problèmes de développement envahissant augmentaient respectivement de 0.32, 0.25 et 0.30 (p < 0.05) (Liu, Liu, et al., 2014).

BPC

Plusieurs études de cohortes publiées à ce jour ont trouvé un lien entre une exposition prénatale aux BPC et des effets délétères sur le comportement de l’enfant : celles du Michigan, de Oswego, des Pays-Bas et du Japon (Chen, Yu, Rogan, Gladen, & Hsu, 1994). Une étude publiée en 2003 par Jacobson et Jacobson (cohorte du Michigan) a montré que l’exposition prénatale aux BPC est associée à une diminution de la capacité de concentration et à une augmentation de l’impulsivité à 11 ans. L’exposition aux BPC était documentée par l’analyse du sang de cordon ombilical et du lait maternel, les composantes neuropsychologiques étaient évaluées entre autres par la WISC-R et le Continuous performance test (CPT) et l’impulsivité était évaluée par le CPT et le Wisconsin Card

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qui n’avaient pas été allaités. Une des hypothèses est que les enfants allaités bénéficient d’un apport en nutriments transmis dans le lait maternel, qui protégerait des effets neurochimiques et neurostructuraux des BPC (Jacobson & Jacobson, 2003). Une seconde hypothèse est que les mères qui allaitent offrent davantage de stimulation intellectuelle à leur enfant (Jacobson & Jacobson, 1992).

Sagiv et ses collègues ont trouvé une association entre de faibles taux d’exposition aux BPC (0.01-4.41 ng/g sérum) et la présence de symptômes du TDAH chez des enfants âgés de 7 à 11 ans, mesurés à l’aide du Conners’ Rating Scale for Teachers (CRS-T) (Sagiv et al., 2010). Une étude récente appuie ce lien et trouve une association entre la présence de BPC prénatals et des difficultés au niveau de l’attention divisée dans un sous-test du KITAP (Computer-based test battery of attention performance) à l’âge scolaire (Neugebauer et al., 2015). Une étude américaine faite auprès 250 enfants âgés de 7 à 9 ans de descendance afro-américaine et dominicaine, a trouvé un lien significatif entre un haut niveau de contamination prénatale et postnatale au BPA (bisphénol A) et les scores de PCE et PCI mesurés à l’aide du CBCL (Roen et al., 2015). Dans cette recherche, des effets du sexe de l’enfant sont observés. Les garçons seraient en effet plus à risque que les filles d’obtenir de hauts scores à la fois aux PCE et aux PCI, tandis que les filles étaient plutôt à risque pour les PCI. En 2015, une étude s’intéressant au lien entre l’exposition prénatale et postnatale aux BPC dans la population inuite et la présence de difficultés d’attention chez les enfants a trouvé que l’exposition précoce postnatale aux BPC augmentait le risque d’inattention à cinq ans (Verner et al., 2015). Les 110 participants de cette étude avaient cinq ans lors de l’évaluation, mais avaient été recrutés lors de la grossesse de leur mère et avaient bénéficié d’un suivi à l’âge d’un an. Le comportement avait été évalué à l’aide d’une codification vidéo effectuée par deux assistants de recherche aveugles au niveau d’exposition de l’enfant.

Mercure

L’exposition prénatale au mercure a été associée à des effets neurocomportementaux, surtout en ce qui a trait aux capacités d’attention (May, 2000). Debes, Budtz-Jørgensen, Weihe, White et Grandjean (2006) ont réalisé un suivi auprès de

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815 enfants des îles Féroé âgés de sept et quatorze ans; ils ont montré que l’exposition prénatale au mercure est associée à des capacités d’attention non optimales, mesurées par le Continuous Performance Test et des items de la WISC-R. Le mercure était mesuré dans le sang de cordon et dans les cheveux de la mère ainsi que dans le sang et les cheveux de l’enfant à 7 et 14 ans. La seconde étude d’envergure sur le mercure, réalisée auprès de Seychellois, n’a pas confirmé l’association entre l’exposition pré- ou postnatale au mercure et le comportement (Davidson et al., 1998; Myers et al., 2000).

Les résultats des études sur l’association entre une exposition prénatale ou postnatale au mercure sont inconsistants. Les études des Iles Seychelles ne trouvent pas d’effet délétère de l’exposition au mercure prénatal sur le comportement des enfants, adolescents ou jeunes adultes, mais trouvent certains effets significatifs entre la présence de mercure dans le sang des enfants et la performance à certains tests neuropsychologiques (Finger tapping et Kaufman Brief Intelligence Test ou K-BIT) (van Wijngaarden et al., 2013). Sagiv et ses collègues ont également trouvé une association positive significative entre une exposition faible (en moyenne 0.45 g/g mesuré dans les cheveux de la mère) et les symptômes d’inattention et d’impulsivité et hyperactivité (Sagiv, Thurston, Bellinger, Amarasiriwardena, & Korrick, 2012). À l’opposé, Cao et ses collègues n’ont pas trouvé d’effet de l’exposition postnatale au mercure avec les PC mesurés à 5 et 7 ans avec le Conners’ Parents Rating Scale Revised (CPRS-R) et le Behavioral Assessment System for Children - Parents Rating Scale (BASC-RS) (Cao et al., 2010).

Omégas-3

Les omégas-3, un type d’acides gras polyinsaturés (PUFA), sont des acides gras essentiels à la structuration du cerveau et du système visuel, et présents dans les huiles végétales, les noix, la viande, les produits laitiers et les produits de la mer. De par son alimentation traditionnelle (poissons et mammifères marins), la population du Nord-du-Québec est davantage exposée à la fois aux contaminants environnementaux, mais également aux acides gras présents naturellement dans la chair des animaux marins, bénéfiques pour la santé. Ces nutriments sont retrouvés entre autres dans la graisse des

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préliminaires indiquent qu’un déficit ou un débalancement dans les niveaux de PUFA dans le sang serait relié à certaines difficultés chez l’enfant, tels des comportements associés au TDA/H, à l’agressivité et à la dépression (Oken & Bellinger, 2008; Stevens, Zentall, Abate, Kuczek, & Burgess, 1996). Par ailleurs, les Inuits sont de grands consommateurs de mammifères marins riches en omégas. Or, les niveaux de ce nutriment retrouvé dans le sang augmentent avec l’âge et sont présents en plus grande quantité chez les femmes (Dewailly et al., 2001). Ainsi, le lait maternel regorgerait d’omégas qui seraient transmis à l’enfant lors de l’allaitement et pourraient servir de facteur de protection pour leur développement.

Une étude de 2012 a trouvé un lien entre la consommation de deux portions de poisson ou plus par semaine et un effet protecteur pour les symptômes de TDAH, particulièrement l’hyperactivité/impulsivité (Sagiv et al., 2012). Une étude de 2011 s’intéressant à l’effet protecteur des acides gras sur le développement des PCE et PCI mesurés à l’aide du Strenght and Difficulties Questionnaire (SDQ) a trouvé que lorsque la quantité de DHA (un acide gras de type oméga) dans le sang de cordon augmentait de 1%, alors il y avait 0.93 fois moins de risque d’avoir des difficultés de comportement externalisés et 0.94 fois moins de risque d’avoir des symptômes d’inattention et d’hyperactivité (Kohlboeck et al., 2011). Les symptômes émotionnels étaient quant à eux présents en moindre quantité avec de plus hauts taux d’acides gras de type LC-PUFA (long-chain polyunsaturated fatty acid) dans le sang de cordon. Ces résultats ont été reproduits dans une étude de 2014 où la concentration plus élevée d’omégas-3 durant la grossesse a été associée à une diminution du risque de symptômes émotionnels mesurés à l’aide du SDQ chez des enfants de cinq ans (Loomans, Van den Bergh, Schelling, Vrijkotte, & van Eijsden, 2014).

Tabac

La population inuite est très exposée à la cigarette, avec des taux de consommation de tabac de l’ordre de 70% dans la population du Nord-du-Québec (Plaziac, 2007). Dans cette population, plus de 80% des femmes enceintes rapportent avoir fumé la cigarette pendant leur grossesse, 65% à chaque jour et 17% occasionnellement (Plaziac, 2007). Selon

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Muckle et collègues, cette proportion atteint 92% lorsque les femmes sont interviewées alors qu’elles sont enceintes (Muckle et al., 2011). Cette grande prévalence rend les enfants à naître à risque de contamination aux nombreux produits chimiques présents dans fumée de cigarette. Dans un document émis en 2005 par l’Institut national de la santé publique, on rapporte qu’au sud de la province, les taux de tabagisme durant la grossesse sont de l’ordre de 27.6% pour les femmes ayant été enceintes au cours des cinq dernières années (Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, 2005, citée dans Institut national de santé publique du Québec, 2008). Desrosiers et ses collègues ont trouvé une association entre une exposition prénatale au tabac dans la population inuite du Québec, et la présence de PCE et de problèmes d’attention à 11 ans, mesurés à l’aide du Teacher’s Report Form (TRF) et du Disruptive Baehavior Rating Scale (DBD) (Desrosiers et al., 2013). Les participants de cette étude étaient 271 enfants recrutés à partir de la grossesse de leur mère pour documenter la présence de tératogènes prénataux. Les contaminants étaient évalués à l’aide d’un échantillon de sang de cordon ombilical et de sang de l’enfant, et la consommation de tabac était évaluée au moment de la grossesse et rétrospectivement lors du suivi à 11 ans par une entrevue maternelle. Des résultats similaires ont été répliqués à plusieurs reprises depuis (Chastang et al., 2015; Fitzpatrick, Barnett, & Pagani, 2014; Liu, Leung, McCauley, Ai, & Pinto-Martin, 2013). Chastang et collègues ont étudié l’association entre la présence de fumée secondaire pré ou postnatale et l’apparition des PC mesurés par le SDQ chez des enfants d’âge scolaire (âgés entre 8 et 14 ans). Les résultats indiquent que l’exposition pré et postnatale augmente de presque deux fois (1.72 et 1.94) le risque d’apparition des PCI (symptômes émotionnels du SDQ) et des PCE (symptômes de problèmes des conduites dans le SDQ), respectivement. Une autre étude faite avec des enfants âgés de 5 et 6 ans appuie les résultats précédant. Les enfants exposés à la fumée secondaire durant la grossesse obtenaient des scores plus élevés à l’échelle externalisée du CBCL et le risque relatif (odds ratio), après la prise en compte des variables confondantes, était deux fois plus élevé que pour les enfants de mères n’ayant pas été exposées à la fumée secondaire (Liu et al., 2013). De la même façon que pour la fumée secondaire, l’exposition directe in utéro de par la consommation de tabac de la mère est associée à davantage d’impulsivité chez les enfants à l’âge scolaire (Fitzpatrick et al., 2014).

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Alcool et drogues

Dans une étude de 2011, on rapporte que 60% des femmes inuites consomment de l’alcool durant leur grossesse (Muckle et al., 2011). Ces femmes consomment à l’occasion, mais les quantités d’alcool absorbées sont importantes avec 54% de femmes qui prennent plus de 5 consommations par épisode. En comparaison, 10.7% des Canadiennes auraient consommé de l’alcool durant leur grossesse entre 2005 et 2008 (Agence de la Santé publique du Canada, 2013), et 3% seulement rapportent avoir consommé au moins 5 verres d’alcool lors d’au moins une occasion durant leur grossesse (Santé Canada, 2000).

La consommation d’alcool durant la grossesse peut affecter grandement le développement du fœtus et peut causer de graves problèmes neurologiques par exemple dans les cas de syndrome d’alcoolisation fœtale. Une récente méta-analyse s’intéressant à l’hypothèse de la programmation fœtale en lien avec la sécrétion de cortisol d’enfants de moins de 60 mois a trouvé de grandes tailles d’effets (d = .81, p < .01, k = 17) entre la consommation d’alcool maternelle prénatale et de hauts taux de cortisol chez les bambins (Pearson, Tarabulsy, & Bussieres, 2015). Une étude s’est intéressée aux facteurs de protection de l’apparition des PCE chez les enfants de mères présentant un problème d’alcool et ils ont trouvé que les enfants dont les mères avaient des symptômes d’alcoolisme à cinq ans étaient plus à risque de présenter des PCE à 11 ans que les enfants dont les mères ne présentaient pas ces symptômes (Conners-Burrow et al., 2015). Par ailleurs, lorsque la mère était chaleureuse et qu’elle n’utilisait pas de pratiques parentales sévères, alors cette association diminuait, ce qui indique que la qualité de la relation mère-enfant peut influencer l’association alcool-PCE. Une autre étude a trouvé que la prévalence d’alcoolisme était plus élevée chez des adultes ayant eu un parent alcoolique dans leur enfance, peu importe la quantité d’autres évènements stressants vécus dans leur vie, ce qui indique que de vivre avec un parent alcoolique dans son enfance influencerait les enfants au long cours (Anda et al., 2002).

De nombreuses études ont trouvé une association entre la consommation de drogues illicites de la mère durant de la grossesse et des effets délétères sur le développement de son enfant. Parmi celles-ci, la consommation de marijuana (ex. El Marroun et al., 2011), de

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(ex. Eiden, Godleski, Colder, & Schuetze, 2014) et de poly-drogues (ex. : Eiden, Coles, Schuetze, & Colder, 2014) est liée à davantage de PC chez des enfants d’âge préscolaire (18 à 48 mois).

Prématurité

La prématurité est un facteur de risque des PC largement étudié depuis plusieurs années. De nombreuses études démontrent une forte association entre les naissances à moins de 37 semaines de gestation et la présence de PC à l’enfance (Aarnoudse-Moens, Weisglas-Kuperus, van Goudoever, & Oosterlaan, 2009; Bhutta, Cleves, Casey, Cradock, & Anand, 2002; Perkinson-Gloor et al., 2015; Potijk, de Winter, Bos, Kerstjens, & Reijneveld, 2015; Reveillon, Borradori Tolsa, Monnier, Huppi, & Barisnikov, 2015; Samara, Marlow, Wolke, & Group, 2008). Deux méta-analyses ont été publiées dans les années 2000 sur le lien entre la prématurité ou un très petit poids de naissance et la présence de PC chez les enfants (Aarnoudse-Moens et al., 2009; Bhutta et al., 2002). Les neuf études concernant le comportement, relevées par Aarnoudse-Moens et collègues, ont mis en lumière l’association entre une naissance extrêmement prématurée et des problèmes d’attention et des PCI chez des enfants âgés entre 7 et 17 ans. L’association avec les PCE était quant à elle très faible. Bhutta et collègues ont quant à eux évalué les résultats de 16 études traitant du lien entre la prématurité et les PC. De ces études, 81% trouvaient un effet de la prématurité sur les deux types de PC (69% pour les PCE et 75% pour les PCI).

D’autres études récentes semblent confirmer les résultats des deux méta-analyses. Par exemple, une durée gestationnelle de 32 à 36 semaines a été associée au développement de troubles externalisés et internalisés à l’âge préscolaire (Potijk et al., 2015). Les enfants nés entre 26 et 31 semaines de gestation auraient quant à eux 10 fois plus de risque de développer un PC à l’âge de 10 ans. Dans une autre étude, on comparait le comportement des enfants nés extrêmement prématurés (moins de 26 semaines de gestation) à des enfants nés à terme, à l’aide du Strengths and Difficulties Questionnaire (SDQ). Les auteurs rapportent des taux de problèmes de comportements « envahissants » (indiqués par l’obtention de scores de PC au-delà du 90e percentile) de 19,4% pour les enfants

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cette étude, les garçons étaient plus à risque que les filles d’obtenir des scores élevés aux mesures d’hyperactivité, d’inattention et de problèmes prosociaux que les filles. Une autre étude a trouvé une association entre les enfants âgés de 7 à 9 ans ayant un très petit poids à la naissance, et davantage de problèmes de comportement que les enfants ayant un poids normal, plus spécifiquement des problèmes sociaux et d’attention. Les enfants à faible poids de naissance avaient également des niveaux de cortisol plus bas que les enfants à poids normal, sans toutefois que cette différence ne soit significative statistiquement (Wadsby, Nelson, Ingemansson, Samuelsson, & Leijon, 2014).

Allaitement

Les tératogènes présents dans l’environnement maternel peuvent être transmis à l’enfant par l’allaitement, à travers le lait maternel. Dans une récente enquête, 30,3% des femmes inuites avaient allaité leur enfant exclusivement, et 40,4% avaient utilisé une combinaison allaitement maternel-lait maternisé (Dodin & Blanchet, 2007). Par ailleurs, 29% des enfants dans cette population sont adoptés, le plus souvent par un membre de leur famille immédiate, ce qui ne permet pas d’allaitement maternel (Dodin & Blanchet, 2007). Quelques études ont mis de l’avant le lien entre l’allaitement maternel et le développement des PC. Parmi celles-ci, Kwok et collègues ont trouvé que l’allaitement partiel et l’allaitement exclusif de moins de trois mois étaient associés à des scores plus élevés au test de Rutter, donc à de moins bons comportements chez les enfants âgés de 11 ans, ainsi qu’à une estime de soi moins élevée (Kwok, Leung, & Schooling, 2013). Une étude récente a trouvé un lien entre la qualité de la présence maternelle lors de l’allaitement et les PCI. Ainsi, les enfants dont les mères démontraient une plus grande qualité du lien affectif (active bonding) lors de l’allaitement, éprouvaient moins de PCI à six ans, contrairement aux enfants allaités dont les mères ne démontraient pas cette qualité du lien ou aux enfants non allaités (Liu, Leung, & Yang, 2014). L’étude de Park et ses collègues a quant à elle montré une association positive entre une absence d’allaitement et la présence de PCE, PCI et un diagnostic de TDAH à l’âge de 8-11 ans, même après l’ajustement pour le QI de la mère et de l’enfant (Park et al., 2014). Dans une étude de 2008 s’intéressant au lien entre l’allaitement et le comportement ultérieur de l’enfant effectuée auprès de 17 046 dyades mères-enfants de la Biélorussie, Kramer et ses collègues n’ont pas trouvé d’association

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entre la durée de l’allaitement et les scores des enfants au Strengths and Difficulties Questionnaire, ainsi qu’à certaines questions provenant du National Longitudinal Survey of Children and Youth du Canada (Kramer, Fombonne, et al., 2008). Ainsi, cette large étude randomisée n’a pas permis de conclure à un lien entre l’allaitement et le comportement des enfants âgés de 6 ans. L’allaitement est également associé au développement cognitif de l’enfant (Kramer, Aboud, et al., 2008).

Par ailleurs, dans une population où l’on retrouve à la fois de hauts niveaux d’omégas et de tératogènes dans le lait des mères, comme c’est le cas chez les Inuits, le rapport coûts-bénéfices demeure incertain. Ainsi, une question persiste dans cette population : l’allaitement maternel est-il un élément protecteur ou néfaste dans le développement des enfants? Une étude récente portant sur le lien entre la présence d’omégas prénataux et diverses mesures neurophysiologiques et neurocomportementales d’enfants inuits âgés de 11 ans a trouvé que la présence d’omégas maternels était bénéfique pour la performance aux évaluations neurocomportementales de la mémoire (Boucher et al., 2011). Dans une autre étude, les omégas ne semblaient pas apporter un effet bénéfique sur le fonctionnement neuromoteur des enfants âgés de cinq ans exposés au pré ou postnatal à divers contaminants environnementaux (Despres et al., 2005). Les effets de l’allaitement se présentent potentiellement sur deux faces : d’une part un déterminant biologique, soit la présence protectrice des omégas et, d’autre part un élément psychosocial, soit la qualité de la relation mère-enfant. Les conclusions qu’il est possible de tirer du peu d’études s’étant intéressées au lien entre l’allaitement et le comportement de l’enfant sont limitées (Kramer, Fombonne, et al., 2008). D’autres recherches devront avoir lieu pour vérifier cette association.

Conclusion

Plusieurs tératogènes ont été associés à l’apparition des PCI et PCE et ce dans une population normale. La présence de plomb pré et postnatal serait associée à davantage de PCE et de PCI, tandis que le BPC et le mercure prénataux seraient associés à la présence de symptômes de type inattention et impulsivité (PCE). Les tératogènes présents dans

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développement des PC. L’exposition prénatale au tabac et à l’alcool est reliée à davantage de PCE (impulsivité et inattention) chez les enfants, et la prématurité est associée à l’apparition de PCE et PCI. De plus, l’allaitement maternel et la présence de haut niveau d’omégas-3 dans le sang de l’enfant semblent diminuer les risques de développer un PCE et un PCI à l’enfance.

Déterminants psychosociaux

Les caractéristiques psychosociales susceptibles d’influencer l’apparition des PC sont nombreuses. Parmi celles-ci, on retrouve plusieurs indicateurs socioéconomiques, relationnels et maternels, tels que la grande pauvreté économique, une maison surpeuplée, la violence conjugale, les problèmes de santé mentale, le statut d’adoption, le jeune âge de la mère, l’éducation et les habiletés de raisonnement de la mère. Dans la population générale, la violence conjugale et la présence de détresse psychologique chez la mère sont deux facteurs de risque ayant été reliés aux PC chez les enfants d’âge scolaire et ce, autant dans les études de nature transversale que longitudinale (Wolfe et al., 2003). Or, il est documenté que ces deux facteurs de risque se retrouvent dans les familles inuites (Bjerregaard, Young, Dewailly, & Ebbesson, 2004); Kirmayer & Paul, 2007; Lavoie, Muckle, Fraser, & Boucher, 2007).

La revue de Burke et collaborateurs (2002) cite certaines études ayant montré une association entre un faible statut socioéconomique (SSÉ) souvent associé à plusieurs difficultés psychosociales comme le fait de vivre dans un environnement empreint de violence et la présence de PC externalisés à l’enfance et à l’adolescence (Burke et al., 2002). Dans leur étude sur les comportements perturbateurs à l’enfance, Trauttmann-Villalba et ses collègues (2004) ont documenté un lien entre le jeune âge de la mère à la naissance de l’enfant et une fréquence plus élevée de PC externalisés à 8 ans. Le jeune âge de la mère était relié à plusieurs autres facteurs de risque dans cette étude : le peu d’éducation, un nombre élevé de personnes par pièce dans la maison (overcrowding), une grossesse non désirée, des difficultés de vie chroniques et sévères, la monoparentalité et de pauvres habiletés de coping des parents.

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Facteurs socioéconomiques

Les conditions économiques de la population du Nunavik sont difficiles; le revenu médian des hommes inuits est de 14 582$ et celui des femmes est de 15 083$. En 2011, le taux de chômage au Nunavik était de plus de 16%, avec un taux d’emploi de 54% dans la population. Ainsi, le taux des ménages à faible revenu s’élevait à 16,6% et le revenu médian des ménages pour la même année était de 20 156$ (Statistiques Canada, 2011). Pourtant, bien que leur revenu soit beaucoup moins élevé qu’au Québec, les coûts à la consommation (véhicule, nourriture, essence, etc.) sont beaucoup plus élevés que la moyenne québécoise (Duhaime, 2004). Ils seraient 57% plus chers dans le Nord. Le lien entre la pauvreté et l’apparition des PC dans une population extrêmement défavorisée comme celle des Inuits pourrait ne pas s’établir aussi clairement. En effet, il se peut que le peu de variabilité entre les différentes classes économiques ne permette pas de distinguer cette population sur la base de son revenu, en ce qui a trait à l’apparition des PC. De plus, les Inuits ayant un meilleur revenu sont davantage portés à consommer de grandes quantités d’alcool (Muckle et al., 2011). Ainsi, le fait d’avoir un statut socioéconomique plus avantagé et d’être mieux acculturé serait des facteurs de risque pour l’alcoolisme dans cette population.

Les études sur les populations générales indiquent que les enfants qui grandissent dans un environnement défavorisé sont plus à risque de développer des PC à l’enfance ou à l’adolescence que les bambins vivant dans un environnement économiquement favorisé. Une étude de 2015 a trouvé des taux de PC chez des enfants de milieux défavorisés de plus de 17%, tels que mesurés par le Early Childhood Behavior Screen, un questionnaire rempli par la mère (Holtz, Fox, & Meurer, 2015). Potijk et ses collègues ont trouvé une association entre un statut socioéconomique défavorisé et la présence de PC évaluée avec le CBCL chez des enfants âgés de quatre ans (Potijk et al., 2015). Dans cette étude, chaque diminution d’un écart-type de la moyenne du statut socioéconomique de l’échantillon augmentait de 42% la probabilité de présenter un PC à quatre ans (OR 4.23; 95% CI (3.79-4.72)) (Potijk et al., 2015). Une étude sur près de 40 000 enfants australiens âgés de 4 à 7 ans a permis de conclure qu’un statut économique défavorisé était le plus fort prédicteur

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2015). Un enfant dont la maisonnée possédait une « carte de concession » (concession card, aidant à l’achat de biens ou de services) du Gouvernement était presque trois fois plus à risque d’obtenir des scores élevés au SDQ qu’un enfant n’en possédant pas.

La population inuite vit dans des logements surpeuplés, caractérisés par la présence de plus d’une personne par pièce de la maison. Selon un sondage effectué en 2004, il se trouve 4.7 personnes par ménage au Nunavik, comparativement à 2.4 dans le sud du Québec (Rochette, St-Laurent, & Plaziac, 2007). De plus, 31.4% des maisonnées abritent plus d’une famille, comparativement à 0.8% des habitations dans le reste du Québec. Ainsi, 36% des Inuits vivent dans une maison surpeuplée. L’accessibilité à la propriété est très difficile dans le Nord (24% y ont accès comparativement à 74% dans le reste du Québec), et les logements locatifs manquent (Statistiques Canada, 2015). Cet état de fait est une conséquence de la pauvreté économique générale au Nunavik, mais aussi de l’isolement géographique, les matériaux et la main-d’œuvre pour construire les maisons n’étant pas facilement accessibles. En général, une maisonnée surpeuplée est un indice supplémentaire de risque socioéconomique, ainsi qu’un facteur de stress accru pour les habitants qui y vivent (Evans & English, 2002).

Facteurs relationnels

La violence entre conjoints affecte bien souvent tout le système familial et non pas seulement les parents. En effet, vivre dans une maison où il y a de façon récurrente des actes de violence peut avoir des conséquences délétères sur les individus qui en sont témoins, particulièrement chez les jeunes enfants âgés de cinq ans ou moins (Fantuzzo, Boruch, Beriama, Atkins, & Marcus, 1997). Dans l’Enquête de santé auprès des Inuits du Nunavik (Lavoie et al., 2007), presque six femmes sur dix (57.2%) et cinq hommes sur dix (50%) disent avoir été victimes de violence à l’âge adulte. Pour 70% des femmes, et pour 30% des hommes, l’agresseur est le conjoint. Selon cette enquête, les individus le plus à risque d’être victimes de violence dans cette population sont les femmes et les adultes de moins de 45 ans. Il semble également que les taux élevés de violence soient reliés à l’accessibilité de l’alcool dans la communauté. Jusqu’à ce jour, les effets de cette violence sur le développement de PC chez les enfants n’ont pas été documentés.

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Depuis le milieu des années ’80, beaucoup de recherches ont été effectuées sur les conséquences de la violence sur le développement de l’enfant. Un consensus semble avoir émergé : l’exposition à la violence a des effets délétères sur le fonctionnement des enfants et sur l’apparition des problèmes de comportements autant internalisés qu’externalisés. Plusieurs méta-analyses, méga-analyses ou revues de littérature ont été publiées sur le sujet depuis les années 2000 et concluent toutes à des effets de petites à moyennes tailles (Holt, Buckley, & Whelan, 2008; Kitzmann, Gaylord, Holt, & Kenny, 2003; Wolfe et al., 2003). Que la violence soit subie ou observée ne semble pas avoir d’effet sur l’apparition des PCE et PCI, selon une méga-analyse faite sur 15 études totalisant 1870 participants (Sternberg et al., 2006). Les auteurs de cette analyse n’ont pas trouvé d’effet clair du sexe de l’enfant sur l’apparition des PC. Evans et ses collègues ont quant à eux évalué 60 études et ont trouvé des tailles d’effet modérées pour le lien entre une exposition à de la violence conjugale et le développement de PCI et PCE (de l’ordre de 0.48 et 0.47, respectivement). Ils ont également trouvé un effet modérateur du sexe, où les garçons seraient plus à risque de développer des PCE lorsqu’ils étaient en présence de violence conjugale (Evans et al., 2008). Chan et Yeung ont effectué une méta-analyse sur 37 articles publiés entre 1995 et 2006 et concluent quant à eux à une petite taille d’effet de la violence familiale sur l’ajustement de l’enfant (de l’ordre de 0.2). Ainsi, leurs conclusions vont dans le même sens que celles de Kitzmann et Wolfe (Kitzmann et al., 2003; Wolfe et al., 2003). La relation entre la violence et le développement de l’enfant ne serait pas modérée par le sexe, l’âge ou le type de comportement de l’enfant (Kitzmann et al., 2003; Wolfe et al., 2003).

Un autre facteur relationnel singulier chez les Inuits du Nunavik est l’adoption intrafamiliale (généralement par la grand-mère, la tante, la sœur, etc.), qui toucherait environ le tiers des enfants, selon une récente étude (Rochette et al., 2007). Cette caractéristique culturelle distinctive ne serait pas reliée à l’apparition des PC à 11 ans (Decaluwe et al., 2015). En effet, dans cette étude auprès de 277 enfants (46 adoptés et 231 non adoptés) portant sur l’association entre l’adoption traditionnelle inuite et l’apparition des PCE et PCI à 11 ans tels que mesurés à l’aide du Teacher Report Form du CBCL, aucune association significative n’a été trouvée. Par ailleurs, les enfants ayant été adoptés à

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Tableau 1. Caractéristiques des participants (mères et enfants)
Tableau 2. Matrice de corrélations des sous-échelles du TRF
Tableau 3. Corrélations entre les sous-échelles internalisées et externalisées du TRF et les  déterminants biologiques
Tableau 4. Corrélations entre les sous-échelles internalisées et externalisées du TRF et les  déterminants maternels et psychosociaux
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