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LABORATOTRE DE GEOGR.APHIE PHY§TQUE
et
LABORATTIRE
DE GEOMORPHOLCIGIE ET DE GECILOGIE DU
QUÂTERNAIRE
Université de
LiègeCENTRE BELGE
D'ETUDE§
KÂR§TOLOGIQUES
Groupe de contaet du F.N.R.§.
COMPTE§ RENDU§
DU
CÛLLOQUE
FRÂNCO-BELGE
DE
KARSTÛLOGIE
APPTTQUEE
mf
tEL
LIEGE
24-27
MAI
1979
Edité et coordanné
pat
C.EK
§ecrétaire de rédaction : J.
GRIMBERIEUX
Extrait
du
tome
102 desAnnales
de la
Sociétégéologique de Belgique
Annales de la Société Géologique de Belgique, T. 102
-
L979,pp. 13 - 26 décembre 1979LES PHENOMENES KARSTIQUES DANS LES ROCHES PALEOZOIQUES
DE
LA
BELGIQUE.
PROCESSUSACTUELS, PROBLEMES ACTUELS
par
Camillb EKI (4 figures)
RESUME.-
Les formations paléozoiques karstifiablesde
la
Belgiquesont
essentiellement d'âges dévonien,carbonifère
et permien.
Iæs calcaires dévoniens et carbonifères sont souvent des calcaires purs; le Permien,lui,
com-porte un conglomérat à ciment calcaire. Toutes nos formations calcaires constituent des karsts barrés.
Parmi les processus actuels,
la
dissolution n'est pas seulementle
plustypique,
mais, dans le karst belge, c'est aussile
mode d'évolution quantitativementle
plusimportant.
Iæs équilibres de dissolution sont rarement réalisés dans les eaux de surfaceet
dans les eaux souterraines peu profondes. Iæs fluctuations saisonnières de températuresont de faible importance, dans les variations de
la
dissolution, devant les changements de débitindüts
par lespré-cipitations et l'évaporation.
Les effondrements sont également
un
processus actuel, constaté dans lesgrottes. Ils
se transmettent parfois jusqu'à la surface du sol("puits
naturels" du Tournaisis). La gélifraction est un autre mode d'évolution des entrées de grotte et des parois calcaires. Les pertes des ruisseaux, dans les vallées calcaires, reculent parfois rapidement(par-fois de 400 m par siècle).
L'évolution actuelle du karst est mise en rapport avec les conditions climatiques.
[æs problèmes humains, économiques
et
techniques des régions karstiques sont brièvement passés en revue :problèmes des puits naturels
du
Tournaisis, en voied'évolution
accél&ée, partiellement en rapport avec lerabatte-ment de
la
nappe aquifère; problèmes d'approvisionnement en eau,et surtout
de qualité d'eau; problèmes liés aupassage des frontières par les réserves d'eau karstiques; problèmes de génie civil.
ABSTRACT.-
Karst landformsin
the Palaeozoicof
Belgium are limited esssentiallyto
rocksof
Devonian,Car-boniferous and Éermian ages. Devonian and Carboniferous limestones are mainly pure; Permian formations, largely
detrital, include a conglomerate
with
a calcareous cement.All
karsted formations are karsts barrés i.e. topographically confined by insoluble strata.Amongst current erosion processes operating on the Belgian karsts, solution is the most trypical and quantitati-vely
the
mostimportant.
Solutions at equilibriumwith
dissolved species are rutely found amongst surface waters orthose at shallow
depth.
Seasonal variationsof
solute concentration are explained primarily by precipitation-evapora-tion ratios; seasonal changes of temperature are much less important as a factor influencing CaCO3 solubility.Gravitional collapse
of
rock is also an active process, as witnessedin
many caves.It
sometimes extendsto
the surface e.g.,the "natural
pits"
of
the Toumaiarea.
Frost shattering isstill
active at cave entrances and uponlimes-tone
cliffs.
In limestone valleys swallowholes are receding rapidly, sometimes as much as 400 m per century.The modern evolution of the karst is well related to modern climatic conditions.
Man's problems, economic and
iechnical,
in
the karst areas arebriefly
reviewed:
problemsof
the
" naturalpits" of
the Tournai district, which may appearwithin
seconds and extendto
tensof
metresin
diameter, 12 metresin
depth;their
developmentis
in
part
associatedwith
the drawdownof
the karst aquifer dueto
overpumping;pro-blems
of
the distributionof
water resources and,particularÿ, of
the maintenanceof
water quality; problems ofpoli
tical boundaries intersecting karst water reserves; and problems of engineering.Camille EK t4
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I
lÿr,
LES PHENOMENES KARSTIQUES DANS LES ROCHES PALEOZOIQUE§ DE LA
BELGIQUE
15T. LES FORMATTONS PALEOZOIQUES KARSTIFIABLES
Dans les
formations géologiquesqui
affleurenten
Belgique,les
carbonatessont les
seuls compo#s solubles présentsen
quantités suffisantespour
donnerà certaines régions une hydrologie
et
une morphologie nettement influencéespar
des phénomènesde
disso'lution.
Tout
récemment cependant, de I'anhydrite vient d'être signalée dansla
région deMons.
Iæ sondage deSt-Ghislain, implanté
en
1972 par le Service géologique, a, en effet, recoupé, de 1900 à 2513 m, soit sur plus de600 m, un dépôt où domine l'anhydrite et à la base du' quel s'observent des circulations karstiques importantes. Cette découverte permet d'expliquer par
la
dissolutionde l'anhydrite des structures déjà connues, mais jusqu'ici
inexpliquées, dans
le
Calcaire carbonifère dans lequelsont logées ces évaporites, là où ce calcaire affleure dans
la région du sondage
(4.
DELMER, 1978).Cette
découverte importante concernela
régionde
Mons,et
les carbonates gardentjusqu'ici,
dans lereste
du
pays,le
monopole des phénomènes karstiques notables.Là où
ils
sont
suffisamment prédominants dansles roches, les carbonates se présentent sous forme de
craies, de calcaires ou de dolomies.
[æs craies
qui
abondent dans notre Crétacé pré' sentent,du fait
notamment de leur peu de cohérence,des
problèmestrês
différents.
Quant aux
calcairesmésozoiques
et
cénozoïques, sansêtre
négligeables,ils
constituent des formations beaucoupmoins
puis-santes
et
dans I'ensemble beaucoup moins pures queles
épaissesformations
calcaireset
dolomitiques du Paléozoique.Dans celui-ci, les calcaires
et
dolomiesdu
Dévo' nien moyenet
supérieuret
du
Dinantien constituentde très loin
lesdeux
ensembles les plus puissants etaffleurant sur les
surfaces les plusvastes.
Leursaf-fleurements représentent
en effet
plusde
1600 km2de superficie. Iæ
périmètre dans lequelon
les obser've, parmi
d'autres formations, enserreune
région deplus de 6000 km2.
Nous ne considérerons pas
ici
les quelques bancs calcairesplus
anciens,qui ne
donnent paslieu à
unemorphologie karstique,
ni
la
minceformation
carbo-natée
qui,
sousla
forme
d'un
conglomérat trèscal-careux, occupe le milieu des dépôts permiens
du
"Pou-dingue de Malmédy"
(l).
La figure
I
montre la localisation d'ensemble desformations carbonatées de la Belgique.
Au
point
de vue structural, on peut situer comrnesuit les quatre unités
où
se localisent les principalesséries calcaires et dolomitiques du Paléozoique :
l.
Immédiatementau bord de
I'Ardenne,et
appuyésur
elle,
s'étendle
Synclinoriumde
Dinant.
C'estl'unité
structurale dans laquelletoutes les
forma-tions carbonatées du Dévonien moyen et supérieur etdu Dinantien atteignent leur maximuûl de puissance:
c'est celle aussi
où
ces formations affleurent sur la plus grande superficie.2.
Au nord du Synclinorium de Dinant s'allonge le vasteSynclinal
de
Namur, séparédu
précédentpar
uneétroite bande de formations siluriennes
et
dévonien-nes non calcaires. Dans le Synclinal de Namur, com' me dans les deux unités suivântes, les épaisseurs desformations calcaires sont moindres que dans
le
Syn-clinorium de Dinant.
3.
A
I'estdu
Synclinal de Namur s'étendle
Massif de la Vesdre, plus court et plus étroit.4.
Enfïn, enclavée dans les terrains cambrienset
dévo-niens inférieurs
de
l'Ardenne, apparaît,au
sud duMassif de la Vesdre, la Fenêtre de Theux.
Ces quatre unités
structuralescomportent
latotalité
des affleurementsde
calcaires mésodévoniens, néodévonienset
dinantiens de notrepays.
Elless'éten-dent cependant sur une petite partie du territoire
fran-çais proche
de
la
frontière
(Synclinoriumde
Dinant)et
sur quelqueskm2
enterritoire
allemand (Massif dela Vesdre).
[æs
calcaires dinantiensaffleurent
le
plus
fré-quemment
dans des
synclinaux entourésde
roches arénacées du Famennien supérieur.Plus des
trois
quartsde
la
super{ïcietotale
desaffleurements de Calcaire carbonifère répondent au
sché-ma ci-dessus. Chacun des synclinaux constitue donc un
petit
karst barré:
isolé de toutes parts par des forma-tions non karstiques (fig. 2).D'une façon générale d'ailleurs, et sous des
moda-lités structurales diverses, tous les calcaires paléozoiques
constituent en Belgique des karsts
barrés.
C'estlà
un trait important de la région étudiée.(l)Au
suietdu
"Poudingue de Malmédy" et des phénomènes karstiques qui s'y développenî, on trouÿera plus loin dans les présents comptes rendus une communication deA.
OZER.t6 Camille EK
l0lm
hrutourr
rrrglrôrr.
Figure
2.-
coupe nord-sud, passant por ciney, dons le synclinorium de Dinant.caire Carbonifère constituent des karsts barrés.
N
On voit que les synclinaux de
Cal-I
I
i L
IT. LES FACTEURS STRUCTURÀUX DE
LA
KARSTIFICATIONI1 est impossible de discuter des processus actuels
et
de la dynamique de la karstification sans passerbriè-vement en revue les données structurales. Comme
celles-ci
ne constituent pasl'objet
propre de nospréocorpa-tions
dansle
présent exposé, nous nous contenteronsde
résumer les résultats de nos observationset
de nosexpériences, successivement
aux points de
vuede
lacomposition des roches et de leur disposition structurale.
1. COMPOSITION CHIMIQUE ET MINERAI.,OGIQUE;
LITHOLOGIE
l,a plus
grandepartie
des calcairesdu
Dévonienmoyen et supérieur
et
du Carbonifère sont des calcairespurs (plus de
90 o/o
de CaCO3). Dans cette catégoriede roches, les roches micritiques s'avèrent très
générale-ment plus sensibles à
la
corrosion que les parties cons-tituées de calcite grenue.La
dolomite est beaucoup moins attaquée que lacalcite
et,
lorsque les deux minéraux sont en présence,le premier diminue la solubilité du second; mais lorsque,
comme c'est fréquent, la dolomite est présente au taux
de quelquespourcentsseulement dans une roche calcaire, son importance est fortement diminuée dès que d'autres
constituants
-
surtout
les minéraux argileux-
entrenten jeu.
Les minéraux argileux
ont
des effets opposéssui-vant qu'ils
sontdiffus
dansla
roche calcaireou
qu,ilsforment un
joint
entre
deuxbancs.
Dansle
premier cas,ils
ralentissentla
dissolutionen
protégeant (plusou
moins,et
souvent temporairement) les élémentsso-lubles; dans
le
second cas,leur
imperméabilité mêmedonne
un effet
inverse : lejoint
force l'eau à cheminerle
long de la discontinuitéqu'il
forme dans la structureet
favorisela
concentration de I'eauet
l'accroissement de dissolution, soit à sontoit,
soit à son mur.Après l'argile,
qui
constituele
résidu dedissolu-tion
le
plus
abondant,il
faut
signaler, spécialementdans
le
Tournaisien,les
articlesde
crinoïdes:
bienqu'ils ne
soient pasun
" résidu insoluble",
ils
consti-tuent
parfois un abondant résidu de dissolution, quira-lentit
l'eau et favorise son contact avec le calcaire et par là l'augmentation de la dureté de I'eau.L'hémaüte
et
la limonite
freinentla
dissolution,surtout
quand ellessont en
quantité suffisante pour formerun
enduit (même très mince) surla
surface dela roche attaquée.
Enfin, nos observations microscopiques ont
mon-tré
que l'influence de la structure pétrographique de laroche n'est
guère perceptibleque
dans des calcairestrès purs, car
la
présence, même en quantités faibles,(10
o/o
et moins),d'autres minéraux, efface rapidement,par exemple, la différence que nous avons signalée entre micrites d'une part et calcaires grenus d'autre part.
Des expériences en eau absolument calme,
effec-tuées en collaboration avec
H.
ROQUES, nousont
con-firmé
que les micrites étudiées se dissolvent plus vite que les roches en calcite grenue (C. EK&
H. ROeUES, 1972;H. ROQUES & C. EK, 1973).Ces expériences
ont
montré aussi que, même eneau calme,
la
dissolution donne toujours lieu à desdé-parts de corpuscules par gravité; dans
la
natvte, afor-fiort,
i
est donc illusoire de croire à un phénomène depure dissolution
:
toujours une partie du matériel, non dissoute bien que soluble, tombe aufond
dela
cavité.On ne peut donc, dans les calcaires, calculer des bilans de matière à
partir
des produits de solubilité : ilsdonne-ront toujours des chiffres de départ de matière inférieurs
à la réalité, même en eau calme (2).
(2) Eyt 9au absolument calme, les ftagments peuÿent tomber du
plafond et des paro_is mais ne sonl évidemment pas
transpor-tés; ils n'entrent alors pas en ligne de compte ilans le bitan. Même dans ce cas, néanmoins, il y a une modification qui a
son importance sur le plan morphologique, et créatian d,un
LES PHENOMENES KARSTIQUES DANS LES ROCHES PALEOZOIQUES DE LA BELGIQUE
La
vitessede
désagrégation granulaire s'est révé' lée, dans les mêmes expériences, beaucoup plus variable que la vitesse de dissolution. C'est donc la vitesse de dé-sagrégationqui introduit la
plus grande différenciationdans l'usure des calcaires paléozoïques étudiés.
Enfin,
dans les calcaires impurs,et
à facteurs ex' térieurs constants,la
dissolution, quand elle agit seule,ralentit progressivement, par mise à nu et éventuellement
accumulation des constituants insolubles ou moins vite
solubles.
Mais
le
Dévonien et le Calcaire carbonifère belgescomportent tous deux d'épaisses formations où les cal-caires purs dominent très largement.
Aussi est-ce
à juste titre
qu'après avoir placé lekarst des
calcaires dévonienset
dinantiens dans lesmérokarsts,
J.
CVIJIC (1960,
p.
163)
note
qu'il
serapproche
en
fait
des types de transition entreméro-karst
et
holokarst(3).
C'est, en effet, dans les forma-tions à calcaires purs que sont localisées la grandemajo-rité
des grottes de notre pays. Ceci montre l'importance que la dissolution a dans la genèse des grottes et conser-ve durant leur évolution.Non seulement c'est dans les formations les plus solubles que s'observent le plus de grottes
-
fait attendu-mais notre travail nous a montré que presque toutes les
grandes grottes
y
sont cantonnées:
ce n'est donc passeulement
à
l'origine que
la
solubilité importe, maisaussi
lors
du
développementultérieur,
alors que descours d'eau puissants parcourent
la
cavité.
Il
n'estpas question
ici
de sous-estimer les actions physiques,mais de constater une étroite corrélation entre les
loca-lisations des calcaires purs et des grandes cavités. Toute-fois, dès qu'un calcaire comporte 90 à 95
o/o
decarbo-nate, nous n'avons pas remarqué que les grottes se
dé-veloppent davantage dans les bancs les plus purs,
com-portant par exemple 98 ou 99
o/o
de carbonates : quel-ques pourcents d'impuretés peuvent localementinfluen-cer les détails de la morphologie, mais n'entravent pas en général le développement du karst.
En ce qui concerne la dolomie, le Paléozoique de
Belgique
ne vérifie
guèrel'idée de P. BIROT
(1966) que " les dolomies se montrent très favorables à lacréa-tion
de
cavités souterrainesde
dimensions moyennes"
(p.221\.
Au
contraire, on n'y trouve guère en Belgiqueque des cavités modestes sinon très petites (à
Marche-les-Dames, par exemple). L'altération de
la
dolomie ensable favorise
la
naissancede
remplissagesqui,
sansarrêter I'eau,
la
ralentissent considérablement;et
laperméabilité
en
petit
des dolomies,bien que
faible, est beaucoup plus élevée, dans notre Paléozoïque, quecelle des calcaires, ce
qui ne
favorise pas laconcentra-tion de I'eau.
2.
LA STRUCTURETECTONIQUE[æs calcaires paléozoïques de Belgique se
caracté-risent par une structure plissée qui les oppose aux grands karsts tabulaires classiques. Les plis imposent à I'eau en
bien des endroits sa direction d'écoulement, parfois sa
pente. Et
la complexité de la tectonique fait quedirec-tion et
pente semodifïent
rapidementd'un endroit
àl'autre d'une même région. Mais la structure a une autre conséquence encore plus importante : les affleurements
des calcaires sont séparés par des anticlinaux, et parfois par des synclinaux, de roches siliceuses ou silicatées qui interrompent
la
circulation karstique;ce
caractère dekarst barré se répercute directement sur la géochimie des
eaux et par là sur l'évolution des cavités : les circulations qui ne suivent pas exactement la stratilïcation des
calcai-res, mais
qui
traversent au contraire ceux-ci, oblique-mentou
perpendiculairement, quittent le calcaire aprèsun parcours de peu de kilomètres, et parfois d'une ou de
quelques centaines de
mètres.
Ces eauxn'ont
dès lorspas
le
temps de æsaturer.
Il
en découle que la vitessede dissolution est alors plus importante que les
condi-tions
d'équilibre.
C'est cequi
expliquele
développe-ment
que nous avonscru
devoir donner dans nos re-cherches à la cinétique de la dissolution.Nos
analyses d'eaunous
ont
conduit,
dans cedomaine,
à
trouverl'explication
d'une importante dif-férenceentre
la
karstification
des calcaires dévoniens et celle des calcaires dinantiens.Il
y
a, eneffet,
nettement plus de grandes grot-tes dansle
Dévonien(en
particulier dansle
Frasnien,mais aussi dans
le
Givetien supérieur) que dansle
Di-nantien (où elles sont surtout dans le Viséen).Or,
nous avons montré, dansla
deuxième partie denotre
thèse de doctorat, que les formations les plus pures du Dinantien, qui sont dans le Viséen, comportent globalement moins de produits insolubles que les forma-tions les plus pures du Dévonien, qui sont surtout dans le Frasnien et à un moindretitre
dans le Givetien.(3) J. CVUrc oppose
l'
holokarst "karst complet, dans lequel toutes les formes karstiques sont parlaitement développées..."au mérokarst, où "ne sont développés que certains traits du relief karstique";c'est le cas pour notre région, mais
ilasso-cie cela à des "roches impures" (op. cit.,
p.
155). Ce n'estpas le cas de nos calcaires, et cette délinition trop complexe
du mérokarst de»rait être sirnpliftée pour être d'un emploi pratique.
t8 Camille EK
Nous ne pouvons donc accepter sur cette question les vues de J. CVIJIC (1960,
p.
165) qui lie 14 différence entre Dévonien et Dinantien aufait
que les calcairesdé-voniens
"par
leur pureté se prêtent le mieux à l,actiondissolvante des eaux"
En fait,
cette diffférence n,a jamais, à notre con-naissance, étéexpliquée. La
lithologiey
joue un rôle,du
fait
de l'inégale répartition des niveaux de dolomieet de schistes.
La
dolomie est présente dans les deux ensemblesmais, dans
le
Dinantien, elle constitue généralement un niveau assez épais et, dans la situation la plus fréquente _celle où le Dinantien affleure sous forme d'un synclinal entouré
et
dominépar
des reliefs psammitiques-
cettedolomie
forme une
ceinture entourant les niveaux decalcaires
purs
qui
forment
le
coeurdu
synclinal:
leseaux allogènes qui pénètrent dans le synclinal traversent
cette ceinture,
y
sont ralenties parle
sable dolomitique qui encombre les conduits, ety
acquièrent une certainedureté, sans donner lieu à de grandes cavités; cette
dure-té diminue fortement leur agressivité avant que les eaux
parviennent aux calcaires purs, qui sont ainsi moins
at-taqués.
Iæs niveaux dolomitiquesdu
Dévonien sontplus
souvent constitués de calcaires dolomitiques,sus-ceptibles
de
karstification,et
les niveauxde
dolomieproprement
dite
sont
dans l'ensemblemoins
épais.Par contre, le Givetien et le Frasnien calcaires
com-prerment
plus
de niveaux schisteux quele
Viséen (4); mais ces niveaux ne sont pasun frein
àla
dissolutioncar ils provoquent
-
soit autoit,
soit au mur, suivant lessituations hydrogéologiques
-
des concentrations d,eauet
des cheminements d'eau le long des surfaces de stra_tification qui délimitent les schistes.
Mais,
bien plus
quela
composition des assises,la
structure géologique (avec les grandstraits du
reliefqui
en découlent) est le facteur primordial de differen-ciation des deux ensembles karstiques.a) Nous avons montré dans la première partie de notre thèse
(C.
EK,
1969) I'effet
dela
structure surla
du-reté
deseaux
:
lestrois
quarts des affleurements duCalcaire carbonifère constituent des synclinaux
entou-rés des " psammites
du
Condroz"
qui sonteux-mêmes
calcareux
et
foumissentau
Calcaire carbonifère uneeau par avance três dure; la très grande majorité des af_
fleurements de calcaires dévoniens jouxtent au contraire d'un côté des roches plus jeunes
:
des schistes,générale-ment en dépression par rapport à
la
bande calcaire, etde l'autre côté
des roches plus anciennes:
schistes etroches siliceuses, situées topographiquement en contre-haut de la bande calcaire; ce sont ces roches qui la
four-nissent en eau, une eau très douce. Nous ne reviendrons pas
ici
sur les modalités de cette différence, maisil
fal-lait
rappeler que c'est une conséquence directede
la structure (comparerla
fig.
Z,pour le
Carbonifère, à lafig. 3, pour le Dévonien).
(4) Nous envisageons
ici
les niveaux ayant au moins quelques mètres de puissance, car les lits de quelques décimèties n'bnt guère d'influence hydrogéologiqueà
l,échelte régionale.m 100. 300. 200. I 00. 0. BEAURAING
Coa
Bt
Cb3 2Kmæ
calcaires-
Schisres
G:::=r
ffi
schisres
ergrès
m
oràs
Figure3.-
Coupe nord-sud, près de Beauraing, dans la bande calcaire dévonienneet
les formations qui l'entourent.On
voit
que les calcaires reçoivent les eaux des roches schisteuses et gréseuses de l'Ardenne (dessin parE. POTY, d'après la carte géologique à 1140.000). N
WANCENI{ES
I
Cob
LES PHENOMENES KARSTIQUESDANS LES ROCHES PALEOZOIQUES DE
LABELGIQUE
19b) Le
Dinantien est d'autrepart
couvert sur des surfa-ces assez importantes par des sédiments tertiaires, doncdiscordants sur
la
structure hercyniennedu
Paléozoï-que, sediments
qui
sont plus rares sur les calcairesdé-voniens, surtout
tout le
long dela
zone d'affleurementla
plus importantede
ces calcaires:
la
longue bandequi borde l'Ardenne au nord.
Iæs placages tertiaires
ont
surle
karst un
effet inhibiteur, en empêchant l'écoulement des eauxmétéo-riques sur
le
calcaire, en écartantla
végétationdu
cal-caire, en retenant une partie de l'eau.Ce facteur
joue
donc également en faveur d'uneplus grande action de I'eau sur les calcaires mésodévo' niens et néodévoniens.
c) Par contre,
le
Dinantienpeut
présenter, dans lesfonds
de
ses synclinaux,de
grandes réseryes d'eau.Mais les phénomènes karstiques
qui
pourraient s'y pré' senter sont pratiquement, dans leur ensemble, impossi-bles à explorer; d'autre part,il
découle de nos études deseaux
(C. EK,
1973) que celles-ci sont, dansla
natureactuelle, saturées
en
carbonates bien avant d'atteindreces profondeurs.
Ainsi, la structure, qui a imprimé au karst des cal-caires paléozoïques de la Belgique son unité de caractère
(influence des pendages
forts et
des failles), a aussidé-terminé sa division
en
deux
ensembles majeurs bien différenciés.M.
PROCESSUS ACTUELS. PROBLEMES ACTUEI,S I. DISSOLUTION ET PRECIPITATIONDans les calcaires de la Belgique, la dissolution est, sous terre surtout, le processus le plus typique; pour les
eaux, c'est le processus le plus actifen général, dépassant de
loin
dans I'ensemble,le
transport de matières solides(inhibé par les étroitures, les anastomoses et les siphons
des réseaux souterrains).
Elle est
loin
cependant d'être également répartie :elle varie d'une formation à l'autre, elle varie fortement d'amont en aval, elle varie aussi dans le temps. Tout ceci
justifie
un examen attentif de ce processus. [æsconsidé-rations
qui
suivent sont essentiellement basées sur lesanalyses faites
pour notre
thèsede
doctorat(C.
EK, 1969)er
dont les
résultatsont
été
publiés(C.
EK,1973 b).
a.
Traits généraux de l'évolution des eaux à la traverséedes formations calcaires
[æs eaux
qui
arrivent douces ou peu dures sur lecalcaire acquièrent assez rapidement une teneur en
cal-caire nettement
plus forte;
ensuite I'augmentation dela dureté devient de plus en plus lente.
Les cas extrêmes, en ce
qui
concernele
gain deteneur calcaire, sont respectivement celui des eaux
per-colant à
travers des fissuresqui, pour
des débitsélé-mentaires généralement inférieurs
à
I
ml/s,
peuventaugmenter
leur dureté de
quelque250 mgll
sur unecinquantaine de mètres
et,
à l'opposé, le gain des eauxde
rivières, audébit
supérieurà
I
m3/s,qui
prennent 50à
100mgil
en traversantl0
à 20 km de formationscalcaires.
Dans les rivières, I'eau cesse pratiquement
d'évo-luer à
partir
d'un moment où pourtant, d'après lescour-bes de saturation, l'équilibre n'est pas encore
atteint
:les
réactions ralentissenttrès
notablementau
fur
età
mesure que diminuele
déséquilibre qu'elles tendentà
supprimeret,
au
lieu
d'une
courbe d'équilibre dedissolution,
il
serait plusjuste
de considérer, dans lesfaits, une zone d'équilibre.
D'autre
part,
il
arrive
aussi dansnos
régionsqu'une eau traverse une zone calcaire si étroite qu'elle
la
quitte
avantque l'équilibre de
dissolutionut
étéatteint.
Plus souvent encore, les conditionsd'équili-bre
dansla
zone calcaire même semodifient
rapide-ment
:
l'eau,
à
sa
source,sort d'un milieu
confinépour être
miseen
contact avec I'atmosphèrelibre,
àbasse teneur
en
CO2;elle
coulesur un trajet
parfoiscourt
avantde
s'engouffrer sous terre, éventuellementen
conduite forcée donc sans aucun contact avec unephase gazeuse,
donc
sans possibilité d'acquisition ou d'évasionde
CO2; finalement, l'eau se retrouve àl'air
libre
: à chacun de ces changements de milieu, fréquentsen
Belgiquesur de
courtes distances, correspond unemodification des conditions d'équilibre
de la
solution desbicarbonates. Celle-ci n'a
souvent pasle
tempsd'atteindre
les
équilibres
successivement imposés.D'où
I'importancede la
cinétique des réactions dansla considération des processus karstiques de nos régions.
Depuis nos travaux
à
ce sujet (C.EK,
1969; voirC.
EK,
1973a),M.
KUPPER a reprisle
problème parde nombreuses mesures (voir entre autres M. KUPPER,
1975
a et b) et
montré, notamment, l'influence de lavitesse de l'eau sur la vitesse de dissolution. Ses mesures
ont
montré aussi que la vitesse de dissolution peut êtretrès
élevée,par
exemplesur
les pierres calcaires desbarrages,
où
elleatteint 30 mm
par siècle dans desri-vières à pH à peu près neutre et 90 mm par siècle dans
les eaux
acides(pH
4)
d'une rivière
ardennaise (M. KUPPER,l975a).20 Camille EK
souterraines
et, plus
rarement, dans les rivièressubaé-riennes,
du
calcaireprécipite.
Ce n,est pas dans l,eaumême que réside
la
cause de ce phénomène, mais dansun
changement des conditions dela
phase g,Lzeuse en présence; par exemple, changement de pression partiellede CO2 dans
l'air;
ou passage de la solution d'un milieusans phase gzüeuse à un milieu aéré. Dans l,ensemble,le dépôt de carbonate dans la région étudiée ne représente
qu'une fracüon très minime
du
carbonatequi
a
été dissous.læ
mécanismede
la
formation des travertins defond
de valléeen
Belgique a été récemment étudié parM.-A. GEURTS.
Celle-ci a distingué un faciès meubledétritique, s'accumulant dans les zones peu turbulentes
des petits cours d'eau, et un faciès cohérent s,établissant dans les cascades et rapides. Ce dernier faciès est rubané,
constitué d'une alternance de fines couches construites,
essentiellement par des algues, et de minces
lits
poreux,formés par une précipitation essentiellement inorganique
de la
calcite.
La couche construite par les algues s,édifie essentiellement au printemps, l'autre en été et en autom-ne (M.-A. GEURTS, 1976aerb).
b.
Variations saisonnièresLa
duretéet la
quantitétotale
de calcairetrans-porté par
les cours d'eau, sont essentiellementdépen-dantes
du
régime des dits coursd'eau.
La températureelle-même,
en
tant
que facteur physique influençantla
solubilitédu
gaz carboniqueet
celle des sels étudiésa un rôle absolument effacé.
C'est ce
à
quoi
nousont
conduit nos
quelquesept
cents analyses d'eaux des calcaires paléozoiques de Belgique (C. EK, 1973).Une évolution saisonniêre dans la teneur en
bicar-bonate, en calcium
et
en magnésium, n,apparaîtnette-ment
que dansle
collecteur principal que constitue laMeuse.
Encore cette évolution est-elle, à l,échelle del'année, rigoureusement
fonction
du
débit;
et
commela
dureté varie à peu près du simple au double en sensinverse du débit qui varie du simple au centuple, on voit que
la
dissolution est incomparablernent plusforte
entemps
de crue qu'en
tempsnormal
(contrairement àl'opinion de J. TRICART, 1965).
Dans les cours d'eau moins importants,
y
com-pris
les principales rivières affluentesde
la
Meuse, lecycle annuel est beaucoup moins visible, car les fortes
variations
de débit
oÇcasionnéespar
chaque périodepluvieuse,
ou
même
chaque orage, prennentle
passur l'évolution saisonnière et la masqueni.
La
températuren'a
par
elle-même aucunein-fluence notable sur l'évolution de
la
teneur
en
selsdissous. Or,
c'est actuellementune
des questions lesplus importantes de
la
karstologie de savoir quels sontles climats les plus favorables à
la
dissolution des cal-caires et ce problème est souvent posé sous la forme de l'alternative:
chaudou
froid
?
Iæs comparaisons depays
à
pays sonten
fait
presque impossibles,du
fait des disparités dela
nature lithologique des bassins, dela
couverture végétale,du
relief, de l'écoulement, etc...C'est
pourquoi
nous avonsvoulu
comparer dans unemême région
(la
régionoù
affleurenten
Belgique lescalcaires paléozoïques) les mois d'hiver aux mois d,été;
l'amplitude de quelque
l8o
entrele
mois le plus froidet le
mois
le
plus
chaud correspondà
une variationdu
coefficient de dissolution du simple au double, et àune variation théorique de
la
vitesse de dissolution del'ordre du simple au triple.
Iæs
résultatsdes
mesuresnous
permettent , deconclure
que
ces facteurs sonttout à fait
négligeablesdevant les effets directs des précipitations
et
du régime des coursd'eau.
Par contre,la
température aévidem-ment
un
certaineffet
indirect surle
régime en réglantl'évaporation.
c.
Influence des types de tempsIæs types de temps, et aus.si
la
fagon (progressiveou
soudaine)dont
se produisentles
changements detemps
ont
des effets directs considérables sur la duretéet sur la quantité de calcaire dissous transporté par unité
de
temps.
C'est
un
autre
résultatde nos
analyses.Une
sécheresse continue entraîne uneaugmenta-tion
progressive asymptotique dela dureté;
l,affaiblis-sement
du
débitinduit
unediminution
dela
quantitétotale de
calcaire dissous transporté, mais cettedimi-nution est plus lente que
l'affaiblissementdu
débit.La
pluie,tout
en diminuantla
dureté, augmentela
quantité
de
calcaire transporté; aprèsun
certaintemps,
le
débordement de la nappe aquifère amène deseaux plus dures dans les artères de drainage et, pratique-ment, stabilise ou tend à stabiliser la dureté.
Pourtant, c'est généralement au début des pluies que la
teneur
en
CO2
augmente dans les cours d,eau, mais celan'a
pasd'effet
visible sur la mise en solution dans la région étudiée.Iæs orages provoquent une augmentation parfois extraordinaire
de
la
quantité de
calcaire dissous; deplus, l'entraînement
du
CO2
accurnulésub-superfi-ciellement amène ce gaz darrs des cavités où une partie
doit
probablement,du fait
de sa trèsforte
teneur dansl'eau, s'évader dans des poches
d'air
en foncüon de laloi
de Henry; c'est là une mise en réserve d,un gazLESPHENOMENES KARSTIQUESDANS LES ROCHES PALEOZOIQUES DE LA
BELGIQUE
21loi jouera dans I'autre sens; enfin, les eaux d'orage
pous-sent
à
un
moment
devant elles les eaux accumuléesdans des
cavités-réservoirs(nos
analysesnous l'ont
prouvé)
et
entraînent ainsi des matières dissoutes aucours
d'un long
séjourde l'eau
dans ces réservoirs,eau remplacée
par
des apportsfrais
suceptibles d'une plus grande agressivité.Iæ gel concentre les solutions,
le
dégel les dilue; maissi
unetrop forte
concentration provoquela
pré'cipitation,
la
réactionn'est
pas immédiatementréver-sible (cf. C.
EK,
1964, et C. EK&
A. PISSART, 1965).La
neiç
rr'a
cheznous qu'une
influence très modeste et variable.d. Influences
structuralessur
la
dissolution actuelle Dans le chapitre consacré aux facteurs structurauxde la karstification, on a Yu combien ces.facteurs avaient
marqué
l'évolution
géomorphologique des formationskarstiques de la Belgique.
Ces facteurs
se
reflètent actuellementde
façon très nette dans les analyses d'eaux.Des différences lithologiques assez modestes ont
un
retentissement considérablesur
le
chimisme deseaux : quelques pourcents de carbonates dans les
"Psam-mites du Condroz
"
suffisent à rendre très dures les eaux avant même qu'elles n'atteignent le Calcaire Carbonifère.L'abondance des crinoïdes dans
le
Tournaisien facilitela
saturation des eauxqui le
traversent. Ainsi s'indivi-dualisent deux types d'eaux alimentant les formationscalcaires
eaux
"ardennaises",eaux
"condrusiennes"et
deux types
d'eaux karstiques:
eaux des calcaires dévoniens, eaux des calcaires dinantiens.A
I'exception des grands cours d'eau (allogènes, etdont
nous avons montré l'inertie vis-à-vis des carbona'tes), les cours d'eau
qui
traversent les calcairespaléo-zoïques viennent
surtout
d'Ardenneet
du
Condroz.lps
formations ardennaisesqui
entourentet
dominentla
bandede
calcaires dévonienssont
essentiellement arénacéeset
pélitiques; les formaüons de Calcaire Car' bonifère sont, elles, très généralement entourées par desformations surtout arénacées. Or l'Ardenne
foumit
deseaux très douces tandis que des croupes condrusiennes
viennent au contraire des eaux dures, généralement
sa-turées en carbonates. La cause en est dans les carbona'
tes
que
contiennentles
formations
quartzitiques et psammitiques du Condroz.Dans les couches dites " de Montfort
",
par exem' ple,la
teneur en carbonates est compri§e, en moyenne(d'après des mesures faites
par
nous dansle
Condrozoriental), entre
l0
et 20
pourcents pour l'ensemble dela formation.
Cela explique que les synclinaux de Cal-caire Carbonifère reçoivent en général des eaux " condru' siennes" ayant une dureté de80 à240
mg/I, alors queI'Ardenne
fournit
à la bande de calcaires dévoniens une eau comportant environ 30 à 55mg/I.
Comme les eauxquittent en général les calcaires avec une dureté inférieu'
rc
à
240 mg/I,on voit
que la dissolution effectuée parles eaux
" condrusiennes"
dansles
formations dinan-tiennes est souvent faible, parfois nulle.C'est
là
une
différence hydrogéologique fonda' mentale entre les formations calcairesdu
Dévonien et celles du Carbonifère.Une autre opposition entre ces deux séries
calcai-res réside dans
le fait
que les eauxqui
résurgent desformations dévoniennes sont sous-saturées, alors que des assises dinantiennes les eaux sortent saturées ou
sursatu-rées. Ceci s'explique en partie par une certaine persistan-ce de la faible dureté des eaux ardennaises dans les larges
conduits des formations
dévoniennes(cf.
les
courssouterrains
de
la
Lesseà
Han,du
Rubiconà
Remou-champs, dela
Rivière de la Grotte de Rochefort, de laChawresse
à
Tilff, etc...);
dansle
Dinantien, les che'naux sont
généralementnombreux mais
beaucoupmoins vastes, souvent
étroits.' En
outre,le filtre
cons'titué par
les débris crinoïdiqueset
autresdu
Tournai-sienralentit
les courants dansles
synclinauxcarboni-fères
et,
par
là,
favoriseune dissolution
" diffuse",
largement répartie, mais donc
peu
favorableà la
réa-lisation de chenaux importants.
Enfin, si
l'on
considère les petites rivièreset
lesruisseaux
-
car les grands cours d'eau sont de simplesdrains sans guère
d'action
chimiquesur les
calcairestraversés
- il
apparaît unenette
différence entre les réseaux hydrographiquesqui
traversent les deux sériescalcairei
:
les calcaires dévoniens sont traversés par descours d'eau, venant surtout
d'Ardenne,qui
coulent généralement perpendiculairementà la
direction
descouches et les traversent donc assez rapidement; au
con-traire, la plupart des synclinaux dinantiens du Condroz,
qui sont
en dépression dansle
relief, sont drainés parun
cours d'eau suivantplus ou
moinsl'axe
synclinal,et
coulent donc sur une plus longue distance dans lesformations dévoniennes
(voir
aussià
ce sujetY.
QUI-NIF,
1977).2.
TRANSPORT§ SOLIDES ET EFFONDREMENT§a.
Argile et limonks
cours d'eau des
régions karstiques belgestransportent
évidemmentdes matériaux
à
l'état
actuelle-22 Camille EK
ment,
le
plus
souvent restreintà
des sédiments fins. Iæs siphonset
les fortes variations de section descon-duits
souterrainsfont
que, sauf dans des grottescour-tes,
il
ne
passe généralement guère que des argiles et deslimons.
Ceux-ci
se retrouvent sous forme dedé-pôts de
cruepaifois très abondants.
A
la Grotte
deRochefort comme
à
celle de Remouchirmps, parexem-ple,
chaque crueet
surtout
chaque période hivernalede
hautes eaux laissent d'énormes quantités d,argile et de limon dans la cavité.b.
EffondrementsToutes les
plus
vastes salles des grottesde
Bel-gique
ont
leur plancher jonché de blocs écroulés.A
laGrotte
du
PèreNoël
(à
Waweille),par
exemple, leséboulements occupent plus de 6.000
m2
d,un seul te-nant.Iæs éboulements
sont difficiles à
dateret,
pourbeaucoup, nous n'avons aucun indice de leur âge.
Dans
diversesgrottes, nous
avonspu
releverl'action de
processus divers, postérieurs aux effondre-ments observés:
le
plafond de
la
sallea
subi, aprèseffondrement, des actions importantes
de
dissolution,à
la
Grotte de
la
Fontainede Rivîre
(Hamoir);à
laGrotte du Père Noël (Wavreille), ce sont les blocs
ébou-lés
qui
ont
été attaqués parla
dissolution; dansbeau-coup
de grottes,un
concrétionnement important are-couvert des éboulis; un tassement sous-jacent à l,effon-drement
a
secondairementmodifié
la
disposition desblocs, à la Grotte du Père Noël, par exemple . . .
Iæs éboulements observés
sont
doncloin
d,être tous récents. Toutefois, dans beaucoup de zonesd'ébou-lements, nous avons reconnu au plafond des cassures ri-goureusement fraîches
et
observé des chutes de blocs(parfois importants)
actuelles,ou
des signes certainsd'un
affaissement actuel dela
voûte (Trou duTry
aux Fosses, à Marche; Grottes de Remouchamps, deRoche-fort,
du Père NoëI, . . . ).Iæ processus des effondrements bloc par
bloc
etl'affaissement des voûtes
sont donc
des phénomènesactuellement actifs.
c.
Effondrements en surfaceIæ
trait
le plus apparent de l'évolution des dolinesest
le
momentoù
elles naissentou
bien s'approfondis-sent soudainementà
la
suited'un effondrement.
Cephénomène
est
actuellement assezfréquent
dans les formations calcaires à travers toute la Belgique.Il
est
cependant spécialement spectaculaire dansle
Tournaisisoù
l'évolution des " puits naturels"
a prisune grande ampleur
:
des affaissements d'une ou deplu-sieurs dizaines de mètres de diamètre et de dix mètres de
profondeur sont courants. Ils sont là en relation étroite
avec le rabattement dela nappe phréatique (actuellement d'origine anthropique), et avec divers autres facteurs
hu-mains (vibrations, . . .
).
On trouvera plus derenseigne-ments
à
ce
sujet dans l'exposéde
M.
F.
DERYCKE, publié dans ce même volume à la suite du présent exposé.3.
CRYOCLASTIELa
gélifraction est active enBelgique.
Dans sonmémoire de licence, J. SCHROEDER (1963) avait
mon-tré
que
la
cryoclastiemodifie
l'aspectde
beaucoup d'abris sous roches et d'arches naturelles.Nous avons noté l'action actuelle de la cryoclastie dans plusieurs entrées de grottes, et en particulier dans
des puits ouverts à
l'air
libre et menant donc à des cavi-tés oùl'air froid
peut s'accumuler. Dans le Trou du Try aux Fosses (Marche) par exemple,qui
estun
véritablepiège
à air froid,
cavité en cul-de-sac s'ouvrantà
sonplafond par une lucarne de quelque 30 m2, on n,observe
pratiquement
plus
aucuneforme
de
corrosion, maisuniquement
une
morphologiedue
à
la
désagrégationmécanique sous
la
formed'un
débitagedu
calcaire en menus fragments.Sur les
parois calcaires aussi,la
gélifraction estimportante. R.
MICHEL (1978a)
a
vérifié que
sonaction est le plus efficace lorsque les altemances de gels
et
dégels coïncident avec des périodes de forte humidi-té et, au cours de l'hiver1970-l97l,le
volume de débrisrécolté au pied d'une paroi calcaire favorablement
orien-tée (SW) a correspondu à un débitage de près de 40 cm3
pat
m2
de paroi, soit à un recul
moyende
celle-ci équivalent à près de4
mm par siècle (ce chiffre donnépour
permettre les comparaisons, caril
est évident quenous
ne
désirons pas extrapoler ainsi les observationsd'une
seuleannée). Iæ
mêmetravail a montré
que,lorsque les alternances de gels
et
dégels sont précédéesou accompagnées d'une période très pluvieuse, elles pro-voquent la naissance d'une quantité importante d'ébou-lis d'assez grande taille et peu aplatis. Une période
d'al-ternances sans humidité, même lorsque le gel est
inten-se,
produit
des débris plus menuset
plus aplatis, maisLES PHENOMENES KARSTIQUES DANS LES ROCHES PALEOZOIQUES DE LA BELGIQUE
Figure
4.-
La vallée sèche de Sprimont à Chanxhe.L'évolution
des phénomènes karstiques superficielsentre
1898et
1971(tiré de
C.EK,
1976, d'aprèsdes observations de R. MICHEL, 1971).
23
4.
RECUL DE§ POINTS DE PERTEDans les vallons à drainage karstique, le recul des
points de perte, c'est-à-dire leur migration vers l'amont, est un
fait
d'observation constante. Dans un vallon sursubstratum calcaire carbonifère, la vitesse d'évolution a
été mesurée par
R.
MICHEL (1971) qui a comparé sesobservations à la situation connue en 1898 par un travail
de
E.VAN
DEN BROECK,E.
MARTELet E.
RAHIR(1910).
Surdix
points de pertes connus en 1898, cinqne
se sont pas déplacéset
les cinq autresont
subi unrecul qui
a été d'environ de 300 mètresen 73
ans enmoyenne,
soit à
peu près 400 mètres parsiècle.
Desreculs variables mais
tout
aussi netsont été
observésdans
plusieursautres vallons
calcairesde
Belgique'Dans beaucoup, cependant,
le
nombrepeu
élevé depoints
d'enfouissement,ou
le
nombrepeu
élevé delocalisations anciennes précises
de
cespoints
empê-chent d'établir un recul moyen.Enfin,
il
estun
exempleclair d'un
vallonoù
il
ne
s'observe pratiquementpæ de recul
des points deperte
:
c'estle
casdu
Vallon des Chantoirsà
Remou'champs, bien connu pour le nombre et l'intensité de ses
phénomènes karstiques. Dans ce vallon, Presque tous les points de perte principaux sont déjà localisés à la bordu-re du calcaire où un recul plus rapide qu'en d'autres
en-droits du pays les a portés dès avant les premières
obser-vations géomorphologiques précises
:
il
n'y
a donc plusde recul parce que l'évolution est terminée à cet égard.
Dans
le
recul
des " chantoirs"
comme dans leseffondrements
de
dolines,il
ne faut
évidemment pasperdre de vue que la dissolution actuelle n'est pas seule
en cause.
Il
peut intervenir-
etil
intervient-
un autre processus qui est celui du décolmatage de conduits déjà anciens mais obturésjusqu'ici.
Ce processus estproba-blement
le
facteurprincipal de
beaucoup d'effondre'ments de dolines. En ce qui concerne le recul des points
de perte, nous pensons que la part de la dissolution
ac-tuelle est importante, mais les deux phénomènes ne peu-vent, jusqu'ici, être départagés.
5.
CONDTTIONS ACTUELLES DE L,ERO§ION KÀR§TIQUELes processus karstiques sont,
on le voit,
impor-tants dans l'évolution géomorphologique actuelle de laBelgique. La dissolution est active, le recul des points de
perte important, les effondrements parfois spectaculaires.
Cette activité est étroitement liée aux conditions
climatiques.
C'est surtoutla
relative abondance de lapluviosité (de l'ordre d'un mètre par an) qui est
favora-8..
Énn
f
sprtmolr a...
ft.nlt olfnsIr
ootltE Rtcut fis Ptnrt§ NESUROETCÉG8orrt 0U AEB| SoU§ i00tt
lltrllTt 0U CAtCAlit
24 Camille EK
ble au
développementdes
phénomènes karstiques. L humidité,jointe
à des températures modérées (moyen-ne annuelle de I'ordre de 9oC), favorisela
végétation et celle-ci fournit un CO2 assez abondant.læs variations saisonnières de la dissolution ne sont pas liées à la variation de la température elle-même, mais
à
la
variation que celle-ci entraîne dans l'évaporation. Dans l'ensemble, l'eau s'enfouit, et descendbeau-coup plus vite que la surface du sol : c'est le propre d'un karst actif.
6.
PROBLEMES D'AUJOURDTIUISi le karst belge est actuellement
actii
il
est aussila source de beaucoup de problèmes qui ont des
répercus-sions sociales
et
économiques directeset
importantes. Plusieursde
ces problèmes,et
des plus préoccupants, sont liés aux processus actuels.Parmi les problèmes
de
I'heure,il
faut
en effetciter en
premierlieu celui
despuits du
Tournaisis :ces effondrements,
au rythme
de plusieurs par année,n'ont
jusqu'ici, par une très grande chance,fait
aucunevictime; comme
ils
sont
statistiquement prévisibles et que leur zone d'extension est limitée,il
serait judicieuxd'essayer
de les
minimiseren
stabilisantautant
quepossible
le
niveaude
la
nappe,en
nemultipliant
pas sans nécessité absolue les vibrationsà
leur proximité;il
seraitutile
aussi d'empêcher à l'avenir de construire-sauf avec des précautions spéciales
-
dans l'aire de dis-persion de ces puits.D'autres problèmes, moins nouveaux, mais plus
généraux, sont ceux de
la
qualité et dela
quantité desréserves d'eau
karstiques.
Iæs calcaires sont en effet, et de loin, nos premiers foumisseurs en eaux souterraines.Ils sont par contre loin d'être les premiers quant à la
qua-lité des eaux. Ceci est dû en partie à l'utilisation
simulta-née des réseaux karstiques comme adduction d'eau
po-table et
comme drains naturels des eaux usées.Il
estindispensable
et
urgent
d'assignerà
chaque tronçondes réseaux karstiques une seule de ces deux fonctions incompatibles.
[æ karst
vient
de faire àla
Belgique un nouveaucadeau appréciable
dans
le
domaine
hydrologique, sousla
forme de la
source thermale artésienne deSt-Ghislain,
qui
peut débiter 100 m3/h
d'eauà
70oCenviron. Le
problème est maintenant de savoir à quel usageil
serale
plusjudicieux
d'affecter cette eau, etcomment
on
pourrale
faire
sans provoquer de baissedu débit ni de la température.
Cette
question nous ramèneà un
autreproblè-me
hydrologique général:
celui de
la
traversée desfrontières
par
les aquifères karstiques.La
Meuseelle-même est
en
connexion avec plusieurs aquifèreskars-tiques
et
ceci n'est pasfait pour
simplifier les problè-mes entrela
Belgiqueet
la
France au zujet del'utili-sation des eaux du bassin.
Enfin,
la
présencede
formations karstiques estune donnée
de
première importance dansle
domainedu
géniecivil.
Quelques-uns des principaux problè-mes dansce
domainesont
énumérésplus
loin
dansce même volume dans des exposés de MM.
L.
CALEM-BERT
&
A.
MONJOIEet
de MM. C.
POPESCU&
J.
PEL.
Quelques techniques appliquées à la détectionet
à
l'analyse des problèmes karstiques seront décritesdans
le
mêmevolume
égalementpar
A.
MONJOIE. Nous avonsvoulu
illustrer-
et
rencontrer-
parlà la
nécessité dela
collaboration entre chercheurs dedisciplines différentes.
Nous croyons fermement d'autre part qu'au stade
actuel des connaissances, les recherches fondamentales
peuvent
et
doivent elles-mêmes déboucher sur des pro-positions d'actions fermes et précises, pour une meilleureutilisation et une meilleure conservation de nos
ressour-ces naturelles.
DISCUSSION
J. NICOD :
Vous avez parlé des conditions actuelles de
l'éro-sion karstique. Mais qu'en est-il des conditions périgla-ciaires ?
C.EK:
Les périodes périglaciaires
ont
eu de nombreusesinfluences
sur le karst
:
la
congélifluxion a provoquél'obstruction
des ponors,la
cryoclastiea modifié
lesorifices
des cavités, des bouchonsde
glaceont
aussipu
se
former.
Dans l'ensemble, les périodes froidesont
dû aboutir
à
des blocagesde
la
circüation
kars-tique
et
probablement, dansbien
des cas,au
colma-tage de larges parties des cavités.A. PISSART :
Sur
les
formations
calcaires paléozoïques deBelgique,
le
drainageest
généralement désorganisé,les eaux disparaissent en profondeur en donnant
nais-sance
à
des vallées aveuglesqui
se
poursuivent versl'aval par
des tronçonsde
vallées sèches. Ces vallées sèches sont, de nos jours, lors de pluies violentes,LESPHENOMENES KARSTIQUESDANS LES ROCHES PALEOZOTQUES DE LA
BELGIQUE
2sphénomène se
produit
parfois suite à l'engorgement dechantoirs plus
ou
moins obturés par des branchesd'ar-bres
ou
d'autres apportsdivers.
Ces débordementssont,
le
plus souvent, possibles parce que les chantoirssont peu encaissés par rapport au fond de la vallée qui se poursuit vers
l'aval.
Cette situation résultedu
fait que, dans un passé géologiquementfort
proche, un écou' lement généralisé se produisaità
la
surfacedu
sol, ladisparition
des cours d'eauen
profondeurayaît
étébloquée suite à I'existence de conditions périglaciaires'
L'obturation
des chantoirslors
des climats froidsa
pu
sefaire
suiteà
deux causes différentes,à
savoir1)
I'apparition
d'un
pergélisol,
2)
le
colmatage du fond de la vallée par des dépôts périglaciaires. Iæspreu-ves
de
I'existenced'un
pergélisol au coursdu
Quater-naire abondent dans notre PaYs.Des structures
de
fentes de gel à'remplissage deglace
ont
été
reconnues dansde
nombreuses coupesde limon
et
ce
à
différents
niveaux stratigraphiquesdistribués au cours de
la
dernière glaciation aussi bienavant
qu'après I'interstaded'Arcy Stillfried
B.
IæsActes
du
colloque Périglaciaireet
Paléogéographie du Quaternaire qui s'est tenu en Belgique en 1978, rassem' bleront dansle
prochain numéro du Biuletyn Peryglac'jalny
de très nombreuses données à ce sujet. Les viviersdes Hautes Fagnes, traces de buttes périglaciaires, qui viennent
d'être
datésdu
dernier Dryas, apportent lapreuve
de
I'existenced'un
pergélisolà
cette époque'Il
est aussi évidentqu'un
pergélisol a existé au coursde l'avant-dernière glaciation, pendant laquelle
l'inland-sis scandinave s'est avancé jusqu'à quelques dizaines de
kilomètres de la Belgique . . .
Or,
un
pergélisol,pour
autantqu'il soit
continu, imperméabilisele
sol sur lequelil
apparaît. C'est ainsique
normalementon peut
concevoirl'obturation
deschantoirs,
I'apparition
et la
persistance d'écoulementsubaérien pendant les périodes les plus froides du Qua'
ternaire.
Dansl'état
actuel des connaissances,il
n'est cependant pas possible d'apporter des précisionsà
cesujet.
Il
n'est d'ailleurs pas absolument certafrr, lorsqueles chantoirs
ont
subi cette évolution, que tousont
étéobturés.
Ainsi, des accumulations de neige ont pumain-tenir
aufond
de certaines dépressions des zonesdége-lées en protégeant ces endroits des gels les plus
rigou-reux
del'hiver.
Mais, si I'existence prouvéed'un
per-gélisol permet raisonnablement d'avancer que c'est une
cause
de
l'abandon des
chantoirs,cette
cause n'esttoutefois pas indispensable
pour
expliquer I'obturation de ceux-ci.La
connaissancede l'évolution,
en
climat péri
glaciaire, des petites vallées permet,
en effet,
d'affir-mer
qu'indépendammentde
tout
bouchonde
glaceet
même de l'existenced'un
pergélisol, bien deschan-toirs ont été colmatés. En effet,
sousce
climat, lesdébits des cours d'eau, malgré les fortes crues de fonte
des neiges, sont incapables d'emporter les apports con-sidérables qu'amènent les agents de transport en masse.
Des débris arrachés aux versants, mélangés avec des
li-mons éoliens arrivaient alors, en
effet,
en très grandesquantités dans les
talwegs.
Dans la partie aval des val' lées,les débits étaient généralement suffisants pouréva-cuer les matériaux qui arrivaient. A l'amont, par contre, les dépôts
de solifluxion
s'accumulaient dansle
fond des vallées donnant des épaisseursnon
négligeables dedépôts
quaternaires.
Cetteévolution a été
identiquepour toutes
les vallées, indépendammentdu fait
queles cours d'eau coulent ou non sur des roches calcaires.
Lorsque les conditions climatiques se sont améliorées,
les parties amont
et
aval ont, de cefait,
subi des évolu' tions très différentes.A
I'aval, les cours d'eau, prochesdu
substratum calcaire,ont
presqu'immédiatement re-trouvé les pertes etont
repris un écoulement souterrain.A
l'amont, par contre, c'est sur des dépôts quaternaires épais que les eaux se sont écoulées' Le calcaire n'a étéatteint de nouveau par le cours d'eau qu'après un temps plus ou moins long, après une érosion latérale et verticale
plus
ou
moinsimportante.
De nos jours, après 10.000 ans de climat tempéré, bien des ruisseaux coulent encore dans leur partie amont sur ces épais dépôts périglaciairesqui
les isolent des roches calcaires sous-jacentes. Bienentendu, cette disposition est précaire
et, au fur et
àmesure des progrès de l'érosion fluviatile, les pertes dis' paraissent
de plus en
plusloin
versl'amont,
commeC. EK le montrait très bien dans le vallon de Sprimont. L'obturation des chantoirs, qui s'est
incontestable-ment produite chez nous en climat périglaciaire, résulte
donc de deux actions différentes. D'une part, elle pro' vient
peut4tre
de la formation de glace à I'emplacementdes
pertes.
D'autrepart,
même sans ce facteur, étant donné que le ruisseau était incapable detout
emporter,le
remblaiementde
la
partie
supérieure dela
vallée aentraîné le colmatage des pertes. Si
l'effet
des bouchons de glace est hypothétique, le remblaiement périglaciaire,quant à
lui,
ne
laisse aucundoute.
Ces dépôts sontd'autant mieux
visibles que les ruisseauxs'y
sont en'caissés au cours de
l'Holocène.
L'évolution des phéno'mènes karstiques
paraît
souvent cheznous
extrême-ment