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La gestion des conflits : à travers la Médiature du Tchad

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-02150333

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Submitted on 23 Jul 2019

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Mahamat Yacoub Ahmat

To cite this version:

Mahamat Yacoub Ahmat. La gestion des conflits : à travers la Médiature du Tchad. Sociologie. Université du Maine, 2018. Français. �NNT : 2018LEMA3003�. �tel-02150333�

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LE

MANS

UNIVERSITE

COMUE UNIVERSITE BRETAGNE LOIRE

ECOLE DOCTORALE N°604

Sociétés, Temps, Territoires

Spécialité : Sociologie

Par

Mahamat Yacoub Ahmat

La gestion des conflits

A travers la Médiature du Tchad

Thèse présentée et soutenue à Le Mans, le 21 septembre 2018 Unité de recherche : ESO UMR 6590 CNRS

Thèse N° : 2018LEMA3003

Rapporteurs avant soutenance : Rhita BOUSTA

Ragendra Parsat GUNPUTH Composition du Jury :

Gilles FERREOL Professeur des universités, Université de Bourgogne Franche-Comté Philip MILBURN Professeur des universités, Université de Rennes 2

Ragendra Parsat GUNPUTH Professeur des universités, HDR, Université de Maurice Rhita BOUSTA Maitres de conférence, HDR, Université de Lille 2

Dir. de thèse :

Servet ERTUL Maître de conférence, HRD émérite, Université du Mans

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SOMMAIRE

Introduction Générale ... 19

PARTIE I ... 2 7 Des conflits aux médiations... 2 7 Chapitre I – Historique du Tchad ... 29

Chapitre II – Les conflits, nature, typologie, causes, sources et résolution ... 41

Chapitre III – La médiation, une institution en développement ... 49

Chapitre IV – L’Ombudsman, de sa création à son évolution ... 73

Chapitre V – Les « Médiations » et le conflit des méthodes ... 93

Chapitre VI – Statut, mission, pouvoir, rôle, saisine, confidentialité de l’OmbudsMédiateur ... 97

PARTIE II ... 1 3 1 L’institut ion Tchadienne : nature juridique et traiteme nts des conflits ... 1 3 1 Chapitre VII – La nature juridique de la « Médiature » : Le cas du Tchad ... 133

Chapitre VIII – L’évolution de la Médiature au Tchad sur le plan institutionnel et international ... 161

Chapitre IX – La Gestion des conflits ... 179

Chapitre X – Le rôle de la médiation face aux litiges irrésolus par les tribunaux ... 215

PARTIE III ... 2 6 9 L’inst it ut ion t c ha die nne : Évolut ion e t pe rspe c t ive s. Résolution, prévention des conflits, culture et c onsolidation de la paix ... 2 6 9 XI - Résolution, prévention des conflits, culture et consolidation de la paix ... 271

Chapitre XII – L’OmbudsMédiateur d’un pays à l’autre : étude comparative des institutions de médiation ... 295

Chapitre XIII – Les enjeux de la présence de l’Ombudsmédiateur sur les réseaux sociaux ... 309

Chapitre XIV – Diverses réflexions ... 315

Chapitre XV. Dépendance politique de l’institution ... 335

Conclusion Générale... 357

Bibliographie ... 363

Sigles et Abreviations ... 377

Annexes ... 381

Annexes Partie I. ... 381

Annexes Partie II. ... 429

Annexes Partie III. ... 433

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Remerciements

C’est avec un réel plaisir que je tiens à remercier tous ceux qui ont apporté leur contribution intellectuelle et morale à mon travail. A commencer par mon directeur de thèse : Servet ERTUL et les membres du Comité de Suivi de Thèse : Jean-Philippe Melchior et Mme Sandrine Drapier. C’est grâce à leurs conseils éclairés et à leur suivi rigoureux que ce travail a pu aboutir.

Je présente é gal em ent mes remerciements à M. Gilles Ferréol, à M. Philip Milburn, à M. Parsad Gunputh Rajenda, à Mme Rhita Bousta ainsi qu’à M. Gerald Billard, directeur du laboratoire ESO Le Mans, et aux membres de ce laboratoire, pour leur accueil et leur disponibilité. T o u s se reconnaitront dans ce travail.

Un g r a n d merci a u s s i aux autorités de la République d u T c h a d qui m’ont accordé leur soutien, surtout la Médiature qui m’a ouvert ses archives. Je n’oublie pas non plus mes collègues de cette institution qui m’ont apporté leur précieux concours.

Je présente enfin ma gratitude à ma famille et à mes amis, sans citer de nom, pour leurs encouragements.

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Avant-propos

L’historiographie de la médiation à travers sa typologie et ses différentes étapes nous a donné l’envie de travailler sur une thématique d o n t n o u s c r o y o n s q u ’ e l l e a p p o r t e r a d e s é l é m e n t s p o s i t i f s à la gestion des conflits. La médiation est plus que jamais nécessaire. Loin de posséder un bâton magique, elle contribue à éloigner les conflits en proposant des solutions négociées et consensuelles aux parties en conflit. Dans le cas du Tchad et comme partout ailleurs, l’efficacité de l’institution depend avant tout de son adaptation aux valeurs socioculturelles du temps et de l’espace. Q u’il s’agisse des conflits impliquant administration et administré(s), inter ou intracommunautaire, ce sont après tout des conflits de sociétés.

Des réformes en réformes, des pays comme l’Espagne, le Portugal puis la France, ont adopté une stratégie qui a consisté à fusionner plusieurs Autorités Admministratives Institutionnelles (AAI) pour en faire une importante Autorité Administrative Indépendante Spécialisée (AAIS) dont l’objet principal, justifient-ils, le renforcement de l’institution dans le domaine de l’hybridité et de l’indépendance aux pouvoirs. Ce point reste d’ailleurs discutable. Avec cette nouvelle vision, l’institution s’adapte au développement socioculturel de l’espace européen pour se charger de la protection non juridictionnelle des droits fondamentaux de la personne. Et c’est au moment où nous bouclons notre travail sur la gestion des conflits à travers l’institution tchadienne que le destin a voulu que la médiature de la République tchadienne soit supprimée par le Forum chargé des réformes institutionnelles qui a eu lieu à N’Djamena (Tchad) du 19 au 27 mars 2018.

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LA GESTION DES CON FLIT S

A TRAVERS LA MEDIAT URE

DE LA REPU BLIQUE DU

TCHAD

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(Carte -1). Du Tchad

Libye

Niger

Soudan

Nigeria

Cameroun

Centrafrique

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Résumé

A travers cette thèse qui a pour objet d’analyser la médiation comme autorité administrative indépendante (AAI), impartiale, ayant pour mission le traitement de conflits entre les administrés, usagers et les différents organes de l’administration publique, nous allons nous intéresser dans un premier temps aux origines principales des conflits, en particulier au sens normatif et sociologique du terme, en revisitant le concept de justice sociale.

Dans un deuxième temps, nous justifierons le rôle de la médiation face aux litiges et différends irrésolus par les tribunaux, avant de conclure cette partie par une interprétation des statistiques de la Mediature de la République du Tchad sur la période de 2000-2010. Nous nous appuierons aussi pour cela sur l’étude d’échantillons de questionnaire p o r t a n t sur l’ombudsman et ses aspects spécifiques dans certains pays.

Il s’agira de se livrer à un examen attentif des moyens par lesquels l’institution d’Ombudsman/Médiateur conçoit, répond et élabore la question de la médiation entre l’administré et l’administration et au-delà. Ce sera aussi l’occasion d’examiner, dans les situations conflictuelles, le rôle de la médiation d a n s s o n r a p p o r t a u droit coutumier et d’aborder « les forces et faiblesses des pratiques qui irriguent la médiation »1 parlementaire depuis son apparition.

1

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Dans une troisième partie, nous allons nous intéresser au développement de l’institution, en particulier au cas de la Médiature de la République du Tchad.

Puis, nous ferons une typologie des conflits en nous attachant aux dossiers (réclamations) arrivés ou transmis à cette Mediature. Nous allons consacrer quelques exemples à la Médiation contemporaine et aux traits communs de certains types d’institutions. Nous aborderont aussi les enjeux culturels, la consolidation de la paix et le rôle de la ‘Médiatologie’ sociologique particulièrement dans l’espace scolaire.

Tout au long de l’analyse, les questions en rapport avec les conflits et les techniques de l’Ombudsman seront abordées à la lumière de la recherche, des enquêtes, échanges et informations recueillis auprès des professionnels, directement ou indirectement, en rapport avec le sujet. Ainsi, au fur et à mesure, se dessineront des éléments de compréhension qui permettront de mieux cerner le sujet.

Enfin, dans notre démarche, nous consacrons un chapitre sur la jeunesse, l’extrémisme et le rôle que peut jouer la ‘Médiatologie’ sociologique dans la prévention du conflit violent. Nous allons aussi nous interroger sur l’utilité de l’institution alors qu’il existe d’autres organismes en charge de la protection non juridictionnelle des droits fondamentaux.

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Abstract

First and foremost, in order to highlight this thesis which aims to analyze impartially mediation as an independent administrative authority (AAI), whose mission is to treat conflicts between citizens, users and the various bodies of the public administration, we will be devoting ourselves first of all to the main origins of conflicts and specifically in the normative and sociological sense of the term, by revisiting the concept of social justice.

Secondly, we are going to justify the role of mediation and specifically in disputes and unresolved disputes by the courts, before concluding this part with an interpretation of the statistics of the ‘Mediature’ of the Republic of Chad during the period of 2000-2010 supported by the study of a sample questionnaire dealing with the function of ombudsman and its aspects in some countries.

It will involve a careful examination of the means by which the Ombudsman / Ombudsman institution conceives, responds and elaborate on the issue of mediation between the public and the administration and beyond. Plus, it is an opportunity to examine the role of mediation in situations of conflict with regard to customary law and to address "the strengths and weaknesses of the practices that have irrigated parliamentary mediation" since its creation.

In the third part, we are going to focus on the development of the institution, in particular on the case of the Mediature of the Republic of Chad.

Then, we will make a typology of conflicts by studying the files (claims) addressed or conveyed to the Mediature. We will dwell upon some examples of contemporary mediation and the common features of certain types of institutions. Then we will discuss culture, peace building and the role of sociological mediology, specially in the school area.

Throughout the analysis, the conflict-related issues and techniques of the Ombudsman are addressed in order to highlight research, surveys, exchanges and information gathered from professionals, explicitly or implicitly, related to the topic. Thus, to do so, a structure of comprehension will be created to better understand the topic.

Finally, in our approach, we dedicate a chapter to youth, extremism and the role that sociological mediology can play in the prevention of violent conflict. We will also examine the usefulness of the institution while there are other bodies in charge of the non-judicial protection of fundamental rights.

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Introduction Générale

Depuis la nuit des temps, la notion de conflit est intrinsèquement liée à la société. On la trouve à tous les niveaux de la vie courante qui oppose deux ou plusieurs parties. Elle est présente dans un couple, une famille, une communauté sociale, clanique, ethnique, religieuse, politique ou encore entre deux ou plusieurs pays, etc. « Le conflit est virtuellement ou visiblement présent dans tous les actes de la vie, de l’individu, de la famille, de la collectivité,

de l’entreprise ou de l’État »2 . En général, les conflits trouvent leurs origines dans la

compétition, le désir ardent de l’Homme à régner en maître sur les autres, le moi de l’être humain, le refus de partager, de distribuer, l’envie de tout garder, de tout gagner. Les conflits les plus meurtriers étaient, par le passé, des différends communautaires autour de la terre et des sources d’eau, entre agriculteurs et éleveurs. D’une manière générale, toute société, selon Kag Sanoussi, « est un espace social traversé par plusieurs interactions pouvant

déboucher sur des crises, risques et conflits »3.

Malgré le développement rapide des progrès technologiques et des moyens de communication qui rapprochent le monde et facilitent les échanges, les relations se complexifient encore plus entre des sociétés en pleine mutation qui, au fur et à mesure,

2 http://institut-international-gestion-conflits.org/index.php/contenus-generaux.

3 Kag Sanoussi, expert, président-fondateur de l’Institut international de gestion des conflits (IIGC), « Prévention et gestion des risques, crises et conflits : les 10 clés de l’intelligence négociationnelle » (1), extrait de La

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remettent « en question des cultures et des valeurs (Lévesque, 1993) »4 pour privilégier la quête d’une vie meilleure5. Au lieu que le développement décomplexifie les relations sociales, il crée au contraire des conflits difficilement gérables. « Comment se fait-il que des groupes

sociaux qui sont supposés constituer une unité sont en fait divisés par des luttes internes ? ».

Dans un tel contexte, pour gérer les conflits aussi complexes qui ébranlent la coexistence sociétale autrefois pacifique, bouleversent les relations et divisent les sociétés, on a toujours besoin – en complémentarité des mécanismes de protection juridictionnelle, d’autres organes de protection non juridictionnelle des droits fondamentaux de la personne. Ce faisant, la société a envisagé un éventail de mécanismes des règlements des conflits qui reposent sur trois méthodes :

• La violence, • La justice,

• La solution à l’amiable.

➢ La première option consiste à obtenir ou arracher ce que l’on veut par la force, jusqu’à violer - s’il le faut - les droits fondamentaux de la personne. C’est s’imposer par la brutalité pour réaliser une revendication justifiée ou injuste. Cette manière de faire engendre des conséquences imprévisibles dont même les superpuissances comme la Russie et les États-Unis d’Amérique évitent d’en arriver là. L’Union soviétique par exemple avait choisi d’exclure cette option en lançant l’idée de la coexistence pacifique, une doctrine formulée pour la première fois en 1952 par Joseph Staline, et reprise par Malenkov en 1953 puis dans le discours de Nikita Khrouchtchev6 en 1956. Le but de cette doctrine soviétique était d’éviter un affrontement nucléaire avec les États-Unis d’Amérique car la détention par les deux superpuissances d’armes de destruction massive pouvait menacer sérieusement l’existence de l’humanité. Même si, quelques fois, il n’existe pas d’autres options que celle de l’utilisation de la force a f i n d ’ éviter l’anéantissement total, comme cela a pu se passer durant la Seconde guerre mondiale, on risque de se trouver face à une politique belliqueuse et conquérante cherchant à soumettre militairement le globe terrestre. Bien que ce genre de conflit soit rare, c’est un exemple de nature à justifier l’utilisation de la force pour éviter le pire tout en sachant que celle-ci peut être un mal nécessaire pouvant engendrer destruction et mort d’hommes.

4LEVESQUE, A. Partenaires multiples et projets communs, cité par Babu Annie, Bounnoure-Aufiere Pierrette, Berube Linda, Lambert Daniel Guide la médiation familiale. Etape par étape, Erès, Coll. Question de Société, Toulouse 2010, p. 19.

5Ibid. 6

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➢ La deuxième option que la société a envisagé pour résoudre des conflits est un mécanisme de protection juridictionnelle des droits fondamentaux. C’est la justice. Pour convaincre les Hommes de la vertu de la justice, des lois sont conçues pour permettre une protection juridictionnelle des droits et libertés capable de répondre à des critères d’indépendance et d’impartialité. Accepter de se conformer aux lois en vigueur consiste à accepter le verdict prononcé en faveur d’une partie. Il y aura alors un gagnant et un perdant tout en sachant que la procédure pourrait être très longue et très couteuse G énéralement, celui qui gagne ne serait - pas dans tous les cas - celui qui a le dessus ou qui a le moyen et/ou le pouvoir. En plus de la perte du temps et du résultat qui consiste à désigner un gagnant et un perdant, il y a aussi « la prolifération des lois, d’amendements aux lois existantes, de normes secondaires, de règlements, etc. D’où, par exemple, l’invention de nouvelles définitions du fait juridique dans le droit pénal, et de formes de dommages indemnisables dans le droit civil. Et, de là, la recherche de nouveaux

instruments de gestion de contentieux, parmi lesquels la médiation » 7.

➢ La troisième option de résolution des conflits est un mécanisme qui se base sur la protection non juridictionnelle des droits fondamentaux. Il se fait à l’amiable par la voie de négociation, arbitrage, conciliation, médiation ; des pratiques qui se ressemblent mais qui présentent cependant des différences notoires. Cette option exige dans la plupart des cas la présence d’un tiers qui se saisit du dossier dans le but de jouer un rôle de bons offices, de rapprocher les points de vue des parties en conflit afin de trouver un terrain d’entente. Ce tiers peut être un arbitre, un négociateur, un médiateur, un conciliateur. On peut déduire qu’il y a un conflit, des parties impliquées dans ce conflit et un tiers qui est censé gérer ce conflit. Il y a, alors « Gestion/ règlement/ résolution/ traitement de conflit », avec différents modes opératoires mais qui doivent correspondre au cadre spatio-temporel, adapté selon la situation, la mentalité, les circonstances, la tradition, les

us et coutumes »8 dans certains espaces. Bref, tout « règlement approprié des litiges (ARL)

se réfère à l’éventail de méthodes disponibles pour la résolution des différends : On les

7 Gaddi Daniela, « Les effets indésirables du processus d’assimilation de la médiation au droit », Information

sociales, 2012/2 n° 170, p. 28-36.

8

Jérôme Luther Viret, Le sol & le sang, la famille et la reproduction sociale en France du Moyen Age au XIXe

siècle, CNR éditions 2014, p.47: « La coutume est un phénomène d’imitation et de répétition dans le temps (…) c’est l’imitation des ancêtres et l’exemplarité qui fondent l’opinio necessitatis, le sentiment partagé qu’il faut suivre la règle (…) Jean Carbonnier insiste sur l’habitude. La coutume est analysée comme une multiplication

d’habitudes que l’on suit, car c’est, dit-il, la voie du moindre effort, de la commodité. Il y a aussi la sécurité générale qu’apporte la réciprocité (…) le sacrifice supposé est donc compensé par un avantage à venir ».

(21)

appelle Règlement approprié des litiges (ARL), Mode alternatif de règlement des litiges, (MARL), Règlement extraordinaire des litiges (REL), Modes alternatifs de règlement des conflits (MARC), Modes alternatifs de résolution des conflits (MARC) ou encore

Règlement proportionnel des litiges (RPL) »9. Chacun de ces mécanismes répond, malgré

des nuances insignifiantes, au même objectif, à savoir aider les parties litigieuses à atteindre par le dialogue une solution à l’amiable, acceptée mutuellement, contrairement à la justice où l’on n’a pas besoin du consentement des deux parties pour juger et prononcer le verdict. Dans ce procédé qui est beaucoup plus avantageux en terme des dépenses et plus rapide que la justice, il n’y aura pas de perdant puisque les parties en conflit sortent tous gagnantes. Ce procédé est moins couteux et plus rapide que la justice. Surtout, il n’y aura pas de perdant puisque les parties en conflit sortent toutes gagnantes. Parmi les différents organes de protection non juridictionnelle, il y a la médiation ; nous étudierons la mission de gestion des conflits à travers la Médiature de la République du Tchad.

Problématique : Il s’agit de chercher d’une manière objective à retracer l’évolution de la Mediature du Tchad, ses expériences, ses difficultés et les transformations sociétales dues aux conflits. Il convient en outre de s’interroger sur « la nature des pratiques de

médiation au sein » 10 de l’institution tchadienne et au-delà. Nous examinerons ainsi la

procédure de traitement des différents types de conflits. Comprendre comment réfléchit le médiateur dans la gestion des conflits.

Dans la lignée d’une démarche recherche-action11, un des premiers objectifs de notre travail est, autant que faire ce peut, d’étudier le degré de l’importance voire la nécessité de l’institution qui joue un rôle dans la recherche des solutions consensuelles, surtout en s’adaptant à l’espace socio-temporel ; et en aidant la justice à se désengorger de plus en plus à travers le renforcement de la mission de la médiation, afin de respecter le principe du délai raisonnable. Ce principe est à titre d’exemple imposé par la Cour Européenne des Droits de l’Homme, ce qui s’applique par analogie à tous les pays (c’est exactement le but de la nouvelle loi française du 18 novembre 2016 intitulée Loi portant sur la modernisation de la justice du 21ème siècle).

9

Règlement des litiges, Attestation de formation aux pratiques d’Ombudsman, Origine de l’Ombudsman moderne, African Ombudsman Research Centre (CROA), 13-19 novembre 2013, Luzaka, Zambie, 189 pages.

10

Revillard Anne, « une expérience de médiation institutionnelle : le Médiateur de la république », Informations

sociales, 2012/2 n° 170, p. 91-98

11

A propos de « recherche – action », voir notamment Brasseur Martine, « L'interaction du chercheur avec son terrain en recherche- action : deux cas d'accompagnement individuel des managers », Recherches en Sciences de

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Aussi, les incohérences relevées visent à contribuer à l’amélioration d’une part, des textes de l’ombudsman et d’autre part, ceux de l’administration, pour se rapprocher encore plus de l’objectif, celui de jouer un rôle plus performant dans la paix sociale en protégeant les droits fondamentaux.

Il y a lieu de souligner que la première difficulté à laquelle fait face notre étude est la porosité des frontières entre les différents types de médiation, une porosité reconnue par plusieurs indications, notamment la haute instance internationale : « Nous avons assisté ces

dernières années à une prolifération des médiateurs »12, a relevé le Président de l’Assemblée

générale des Nations unies. Avec l’émergence de la médiation institutionnelle, il y a eu en France « un flottement jusqu’en 1970 [car] une partie des animateurs ont été rebaptisés

médiateurs, d’où des confusions possibles »13. Ancien protecteur du citoyen du Québec et

ancien président de L’AOMF, Daniel Jacoby propose le nom OmbudsMédiateur, comme « un néologisme qui regroupe les caractéristiques fondamentales de l’ombudsman et du médiateur

institutionnel de type parlementaire ». Fathi ben Mrad disait « de nombreux enjeux

professionnels et de territoire existent autour des appellations »14. Dans son ouvrage, Michèle

Guillaume-Hofnung a indiqué que : « avec le recul, vingt-cinq ans après le début de la ‘décennie de la médiation’, la perception de l’originalité profonde de la médiation impose

pour se consolider d’utiles mises au point »15. Bonafé-Schmitt Jean-Pierre a même proposé

« la création d’un Observatoire de la médiation » dans le but dit-il, de « dresser un état des

lieux de la médiation, mais aussi d’analyser ce phénomène de la médiation »16. Ce qui veut

dire qu’il faut un éclaircissement sur la terminologie, l’originalité et la contrefaçon. Dimitri Löhrer évoque le terme d’ombudsman spécialisé « Human right ombudsman » mais qui le limite à trois pays (Portugal, Espagne et France). Nous en reviendrons sur ce type d’ombudsman dit contemporain adopté par l’Espagne et le Portugal, suivis par la France en 2008 qui a créé le Défenseur des Droits.

12

Nations unies, Département de l’information, Service des informations et des accréditations, New York, Assemblée générale, 66e session, Débat thématique informel, op.cit.

13 Stimec Arnaud, La Médiation en entreprise, Paris, éd. Dunod, 2004-2007, p. 6.

14

Mrad fathi Ben, « Définir la médiation parmi les modes alternatifs de régulation des conflits », Informations

sociales, 2012/2 n° 170, p. 11-19. « il convient de rappeler que de nombreux enjeux professionnels et de

territoire existent autour des appellations. Dans certains champs, elles permettent de revaloriser des fonctions en mal de reconnaissance, certains médiateurs sociaux, ou se démarquer pour affirmer la fermeture du champ professionnel, à l’instar des avocats qui ont rebaptisé leurs fonctions de médiation, autrefois revendiquées en tant que telles, en droit collaboratifs, aujourd’hui délimité à leur expertise ».

15

Guillaume-Hofnung Michèle, La médiation, PUF, 1995, p. 3. 16

Bonafé-Schmitt Jean-Pierre, « Evaluation des effets des processus de médiation », Informations sociales, 2012/2 n° 170, p. 122-129

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Pour éviter la porosité négative, et « pour éviter la prolifération de gourous

incontrôlables », nous préférons désigner la médiation administrative/parlementaire par la

‘Médiatologie’ et le médiateur par le Médiatologue. Espérant ainsi se rapprocher des

différentes réactions. Michèle Guillaume-Hofnung disait : « la disparition de la Médiature de la République (en France) va libérer la réflexion terminologique et permettre au Club des

médiateurs de se rapprocher du modèle de médiation »17 même si le doute plane encore sur le

nouveau concept, s’il peut ou non remplacer la Mediature de la République car « le défenseur

des droits » se compose de plusieurs associations dont la plupart n’ont aucun rapport avec les

concepts de la médiation parlementaire que nous osons appeler la ‘Médiatologie’. Dans notre travail, sont utilisées des différentes terminologies pour désigner la médiation institutionnelle : Médiateur de la République, Défenseur des droits, Ombudsman, OmbudsmanMédiateur, Ombusperson, Défenseur du Peuple, Avocat du peuple, Protecteur du citoyen, ou encore médiatologue et médiatologie. A la fin de notre étude, nous avons cherché à savoir si l’institution telle quelle est aujourd’hui, reste encore intéressante, après un siècle d’existence, ou si elle nécessite une réforme à l’instar de la péninsule Ibérique.

Evolution méthodologique de la recherche : Avant d’aborder les thèmes essentiels de notre recherche, et comme il est question de la résolution du conflit à travers la Mediature de la république du Tchad, nous nous sommes rapprochés de l’historiographie du Tchad axée sur trois périodes ayant marqué son existence.

Nous avons analysé tout d’abord le sens des deux mots (Gestion et Conflit) avant de revenir à l’institution qui reste l’épicentre de notre recherche. La première étape de notre travail a consisté à lire, durant six mois, des ouvrages en rapport avec la sociologie, la médiation, la philosophie, le droit, puis nous avons réalisé dix fiches de lecture que nous avons présentées au comité de suivi de thèse.

La deuxième étape, à compter de mars 2015, a consisté à effectuer des enquêtes et à prendre des notes. Nous avons concentré nos recherches sur des revues, des documents, des rapports, des articles, des communiqués, des analyses sur l’Ombudsman en ayant à l’esprit ce qui touchait à la médiation au sens normatif sans toutefois se livrer à une «

gloutonnerie livresque »18.

17

Guillaume-Hofnung Michèle (1995), op. cit.

18

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A partir de septembre 2015, nous avons commencé la rédaction en respectant le planning que nous avions adopté. Et, dès novembre 2016, nous sommes passés à la relecture et la correction de notre travail.

Pour effectuer des recherches sur le thème que nous avions choisi, nous avons établi un plan de travail dont l’exécution n’a pas été aisée en raison de multiples entraves. Les conditions dans lesquelles nous avons travaillé n’étaient pas si faciles mais nous n’avons pas manqué de persévérer pour obtenir ce résultat. Le délestage d’électricité a été un élément perturbateur pour notre travail de recherche. Le coût excessif de la connexion Internet nous a obligé à réduire notre accès à la toile. Il nous arrive pour envoyer un fichier par mail de se restaurer dans un hôtel connecté ou se déplacer jusqu’à la petite ville camerounaise de Kousseri puisque le débit est très faible au Tchad. Mais nous avons toujours saisi l’occasion de combler notre retard en tirant profit de nos différents séjours à l’étranger, surtout en France où les conditions de travail sont normales et encourageantes dans le laboratoire et la bibliothèque universitaire ou la médiathèque du quartier. Afin de rattraper le temps perdu, nous avons tâché de venir en France tous les deux mois, à la fois pour travailler et pour nous entretenir avec notre directeur de thèse, profitant de ses conseils et mettant en application ses orientations. Outre les difficultés ci-dessus énumérées, nous avons également eu à faire face à deux autres au niveau de notre institution même. La première tient à l’absence totale de statistiques, la seconde relevant de la crise financière auquel fait face le pays.

Pour pallier ce manque de statistiques, et après l’autorisation de la direction de la Mediature de la République du Tchad à nous accorder l’accès aux archives, nous avons entrepris une démarche en deux temps : De juillet à septembre 2016, la consultation des archives des années 2000 à 201019, et de septembre à décembre 2016, l ’ analyse des données collectées20 et l’établissement des premières statistiques de l’institution cible.

En mars 2017, nous avons présenté à une assemblée de la Mediature le résultat des statistiques avec un poster que nous avons réalisé. Pour affiner notre travail, nous avons accordé à la télévision nationale tchadienne un entretien en arabe de 45 minutes sur la médiation, une autre interview en arabe à la télévision Qatari Al Jazeera sur le conflit de Boko Haram et le rôle que la Mediature joue dans l’encadrement des jeunes repentis au Lac

19

Concernant les quatre années 2003-2004-2005-2006 elles avaient été détruites à la suite d’une fuite d’eau survenue en 2010, selon la secrétaire de l’institution.

20 La consultation des archives a pris fin le vendredi 30 septembre 2016. Les données collectées sont des 46

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Tchad. Une autre interview en français à la télévision Africa 24 sur le conflit entre éleveurs et agriculteurs et les causes des conflits. Un point de presse en français (maison des Médias, N’Djamena) sur les statistiques de la Mediature entre 2000 et 2010), puis une interview en arabe à la radio nationale tchadienne (RNT), le 8 octobre 2017, sur le conflit des jeunes dans les établissements scolaires. Durant notre travail, nous avons assisté à deux congrès et un atelier. Le premier congrès était au Québec (Canada) en octobre 2015 où nous avons assuré une communication sur la présence des Médiateurs sur les réseaux sociaux. Le deuxième congrès était celui organisé début juillet 2016, à Montréal, par l’Association internationale des sociologues francophones (AISF) où nous avons accordé une communication sur le rôle de la ‘Médiatologie’ sociologique dans la prévention des conflits en milieux scolaires. Puis une intervention dans un atelier organisé par le PNUD, à N’Djamena, au Tchad, en août 2017 sur « la prévention de l’extrémisme violent chez les jeunes ».

Enfin, nous estimons que le travail effectué en trois chapitres apporte un éclairage suffisant sur notre démarche et l’objectif recherché.

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PARTIE I

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Chapitre I – Historique du Tchad

Avant d’aborder la médiation au Tchad, il convient de présenter pour commencer un aperçu sur quelques indicateurs socioéconomiques. Au moment de son indépendance, en 1960, le pays comptait 3 001 593 habitants avec 313 582 727 de PIB (en dollars courants) soit moins de 110 dollars de PNB par habitant. Cette tendance économique en matière de PNB n’a enregistré qu’une légère évolution durant quatre décennies (1960-2000) soit 1,385 Milliards en 2000 avant de repartir en hausse à partir de 2002, après la découverte du pétrole. Si le pays n’a pas connu une avancée spectaculaire sur le plan économique c’est aussi en grande partie en raison de l’instabilité qu’il a connu, car quelques années après l’indépendance, et surtout en raison des pratiques « à l’égard des habitants du Nord une politique de discrimination systématique dans tous les domaines : linguistiques, scolaire,

économique et politique »21, le Tchad était à partir de 1965 « en proie à des graves conflits

armés de caractère interne »22. Le 22 juin 1966 s’est créée au nord du pays une rébellion

armée dénommée le Frolinat (Front de libération national du Tchad), constituée majoritairement de musulmans. Le Frolinat opérait à l’Est et au centre Est, et pour affecter l’économie, elle s’attaquait aux principales sources économiques surtout le coton qui

« constitue le principal produit d’exploitation ». C’était une des cibles de la rébellion armée

21 Pledge, Robert. "Le Tchad ou la théorie française des dominos africains." Esprit (1940-) 389 (2 (1970): 371- 380. (Parmi les causes de la rébellion, il y a aussi : « perception des impôts deux ou trois fois l’an par les représentants d’une administration corrompue, sans compter les vexations et les exactions commises par ces mêmes représentants et par l’armée ; sous-scolarisation de certaines régions au bénéfice d’autres ; suppression de toute expression politique légale ; violations répétées de la constitution ; détention arbitraire, voire liquidation physique des opposants, etc… »

(29)

qui intercepte les camions transportant du coton et les incendie, faisant subir au pays des pertes financières énormes.

Toutefois, la période la plus faste de l’histoire récente du Tchad p e u t ê t r e s i t u é e entre 2002 (1,988 milliards) et 2014 (13,922 milliards) de PNB, avec 6,9% (2014) le Taux de croissance réelle23 contre 1,1% (2016) et 1,8% (2015), sur une démographie multipliée pratiquement par cinq atteignant, d’après la Banque Mondiale en 2016, 14 452 543 habitants24, dont « 38,4% vivant encore sous le seuil de pauvreté en 2011 »25, « 50%

d’actifs ruraux jeunes de moins de 25 ans » 26, avec une espérance de vie qui connait une

augmentation décennale de 5 points de plus, on peut l’estimer à 58 en 2018 ( 53 en 2016

contre 38 en 1960), et un taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans (en 2010) de 9,9%,

selon les indicateurs de développement de la Banque Mondiale.

Le PIB annuel par habitant a atteint 940 en 2014, avant de rechuter à 720 en 2016, puis progresser « à 811 dollars en 2018 »27, un chiffre qui vaut au pays la 20ème place des 25 pays les plus pauvre et le 6ème pays le moins riche de la planète (PIB par habitant : 25ème le Népal 883 ; le Mali 837 ; les Comores 837 ; la Guinée Bissau 832 ; 21ème le Yémen 830) 28

. Le soudan du Sud qui a à peu près le même nombre d’habitants que le Tchad (13,81 millions) conserve le premier rang des 25 pays les plus pauvres du monde avec 223 dollars

par habitant et un PIB de 3,09 milliards de dollars (2018)29. Ce pays nouvellement crée

s’est enfoncé, juste après son indépendance, dans la guerre civile et ethnique opposant les

Dinkas et les Nouer.

L’économie reste toujours dominée par l’élevage et l’agriculture. Dans le domaine de l’élevage, le dernier recensement général (2018) indique que le Tchad est un des trois pays d’Afrique à comprendre un cheptel important, soit « plus de 113 millions de têtes de bétail »30 contre 7 850 000 têtes en 2014 et 2 970 000 en 1974. Cette nouvelle compétence lui a permis d’exporter de la viande vers pays voisins notamment le Nigeria, même si le trafic a connu une

23 CIA World Factbook - Version du Mars 11, 2017, https://www.indexmundi.com/g/g.aspx?c=cd&v=67&l=fr 24 https://donnees.banquemondiale.org/pays/tchad. (Alors que la Banque Mondiale affiche le chiffre de la population à 14 452 543 (2018), Le Journal du Net l’affiche à 12,49 millions de tchadiens avec un produit

intérieur brut de plus de 10 milliards de dollars (2018).

25 https://www.journaldunet.com/patrimoine/finances-personnelles/1208753-pays-pauvres-classement/1208798- tchad 26 http://french.china.org.cn/foreign/txt/2018-05/10/content_51205365.htm 27 https://www.journaldunet.com, op.cit. 28 https://www.journaldunet.com/patrimoine/finances-personnelles/1208753-pays-pauvres-classement/1208798- tchad 29 Ibid. 30 http://french.china.org.cn/foreign/txt/2018-05/10/content_51205365.htm

(30)

baisse en raison des activités du groupe extrémiste Boko Haram. L’agriculture qui reste encore rudimentaire à l’heure de l’or noir, est caractérisée par le coton, la céréale, la gomme arabique et le sésame. « Le Tchad dispose de 39 millions d'hectares d'une diversité agro-écologique favorisant une pluralité de cultures, dont 13,3 millions d'hectares défrichés propres à l'agriculture, 5,6 millions d'hectares irrigables comprenant 330.000 hectares situés à proximité de cours d'eau, 19,2 milliards de mètres cubes par an de réserves renouvelables

en eaux souterraines, ainsi que plus de 21 millions d'hectares de forêts naturelles »31.

A partir de 2003, le Tchad est devenu un pays pétrolier grâce à la formation d’un consortium « 2001-2004 » qui a procédé au forage « de plus de 300 puits et construit un oléoduc de 1070 kilomètres pour l’évacuation du pétrole jusqu’à Kribi sur la côte atlantique

du Cameroun »32. L’avènement du pétrole a conforté le budget tchadien par la création des

activités commerciales et économiques au détriment bien sûr des terres agricoles où on y trouve des « installations modernes, des stations de pompage et de surveillance, des pistes

d’atterrissage, des dépôts et ateliers de réparation »33. La relance des activités commerciales

d’une part, et du développement des infrastructures d’autre part, a produit des retombées économiques qui ont changé l’habitude de l’administration dans la gestion financière. Pris de cours en 2015 par la brusque détérioration de la situation économique en raison de la dégringolade du prix du baril sur le marché mondial, le Tchad qui a beaucoup compté sur les revenus de l’or noir - sans avoir pensé à diversifier ses sources de revenu - a subi de plein fouet la crise économique avec un manque à gagner et par conséquent un déficit budgétaire de

496,625 Milliards de FCFA «déficit prévisionnel»34.

Face à cette situation, le gouvernement a imposé aux fonctionnaires une baisse de salaire, une politique qui a suscité des mouvements sociaux. Les syndicats qui accusent le gouvernement de mal gouvernance dans la gestion des revenus pétroliers refusent de payer les frais d’une erreur de gestion dont ils ne sont pas responsables. Ils exigent la saisie des biens mal acquis, la restitution des fonds publics et le jugement des auteurs.

31 Ibid

32 Martin PETRY et Naygotimti BAMBE, le pétrole du Tchad Rêve ou cauchemar? éd. KARTHALA, 2005, Essaie (brochet)

33

Ibid

34 Sources : Le projet de lois des finances pour l’exercice 2018, Ministère des finances. La situation budgétaire s’est améliorée cette année avec l’augmentation du prix de baril du pétrole « Les recettes : 846, 408 milliards de

FCFA en 2018 contre 690,773 Milliards de FCFA du collectif Budgétaire 2017 et les dépenses à 1.343,033 Milliards de FCFA contre 966,110 Milliards de FCFA en 2017 »

(31)

général

L’éducation qui est la base du développement économique a connu un retard considérable en raison d’une période marquée par des conflits politico-militaires (1963-2010) ayant déstructuré le système éducatif mis en place par la colonisation française et qui n’a pas connu une évolution à la hauteur de ce qui se passe ailleurs. « On y observe également un retard du développement humain, une persistance de l’insécurité alimentaire et un impact très limité des projets et interventions de développement depuis quarante ans, relève Mme

Ndiaye35. L’éducation de la petite enfance à titre d’exemple est très peu développée. « Seuls

1,73 % des enfants participent à ce niveau d’enseignement destiné aux enfants de 3 à 5 ans. 37 % des écoles sont à N’Djamena. Des 267 écoles qui accueillaient 21.209 enfants du préscolaire en 2009/2010, 61% sont des écoles privées, 26% sont des écoles communautaires

et seules 13% sont publiques »36. Cette dernière tendance illustre le faible investissement de

l’Etat dans l’éducation de base. Le tableau suivant donne une idée générale de l’éducation au Tchad (Source : UNESCO)37.

Enfants non scolarisés (âge enseignement primaire) 801 961 37,1% (2011) 485829 21,1% (2013)

Taux d’alphabétisation 38,77 % (2015) 30,79 % (2016)

Population analphabète 1 733 809 (2015) 2 012 956 (2016)

Taux d ’ a b a n d o n du 1er cycle de l’ens. sec. 47,25% (2011) 15% (2012)

Enfin, pour conclure l’aperçu sur les indicateurs économiques, il convient de rappeler que malgré la période faste (2002 – 2014) marquée par l’avènement du pétrole et l’augmentation des recettes, les indicateurs sociaux sont « relativement faibles ». La pauvreté touche « plus de 55,0% de la population », selon l’ECOSIT

(L’Enquête sur la Consommation et le Secteur informel au Tchad).38

Après cette brève introduction sur les indicateurs économiques, il nous semble aussi heuristique de revenir sur la genèse de l’histoire du Tchad pour contextualiser les différentes

35 Tacko Ndiaye, Fonctionnaire, principale sur le genre, l’égalité et le développement rural du bureau régional de la Fao pour l’Afrique.

36 Pour plus d’informations voir https://www.wathi.org/laboratoire/initiatives/election_tchad/situation-de- leducation-tchad/

37 http://data.uis.unesco.org/?lang=fr&SubSessionId=786644d0-98a5-4421-bb83-2350565583f9&themetreeid=- 200

38 Rapport de surveillance multilatérale (CEMAC), BEAC, FMI (PERSPECTIVES 2CONOMIQUES R2GIONALES ; AVRIL éà&è° et

(32)

étapes ayant conduit à la création de la Médiation/Médiature, en commençant par la période précoloniale.

I.1. La période pré-coloniale

Qualifié de berceau de l’humanité après la découverte du crâne de Toumaï, le Tchad est situé au cœur de l’Afrique. L’histoire contemporaine de ce pays indique qu’au XIXe siècle, les guerres et les crises bouleversent les pays tchadiens : famines des années 1830, développement de la traite négrière après 1840, sécheresses qui obligent les Ouaddaïens à déplacer leur capitale de Wara à Abeché en 1850. Dans le Sud, les grandes chefferies Sara de Bedaya et Moundang de Léré se renforcent, les rites d’initiation se répandent, puis des chefferies de razzia (Laï, Koumra, Kim) se structurent. Le royaume d’Ouaddaï s’impose sur tout le Sahel, le Salamat et le Dar Kouti, le Maraoné, le Kapka et une partie du Sahara. Alors que, à l’Ouest, naît l’Empire peul de Sokoto à partir des cités Haoussa et que le Borno résiste un temps sous la férule d’El-Amin el-Kanemi, le Ouaddaï sous le règne de Saboun, pille Massenya en 1806 puis, sous le règne d’Ali, la rase en 1871. La fin du XIXe siècle voit s’affronter quatre puissances pour le contrôle de la région du Lac-Tchad : Le Ouaddaï, le Bornou de Rabah, la Senoussia et la France39.

Le Ouaddaï repousse, au Sud, l’attaque des troupes de Rabah qui se tourne vers l’Ouest, disperse des vestiges du Baguirmi, fait voler en éclat l’armée du Bornou et établit sa capitale à Dikoa. La confrérie musulmane Senoussia s’implante à Gouro et installe des centres (Zawiya) à En-Galakka et Bir-Alali. Senoussistes et Ouaddaïens, malgré leurs accords, ne peuvent pas empêcher les Français de s’imposer après 190040.

39 Yacoub Ahmat, Les Relations franco-tchadiennes, éd. Publibook, p. 25. 40

Encyclopaedia Universalis Corpus 22, « Tchad, Le pays et les hommes », Une histoire mouvementée, Editeur à Paris S.A., 1996, p. 91.

(33)

I.2. La Période de la colonisation (de la pénétration1900 à l’indépendance

1960

)

Avant la pénétration française au Tchad à la fin du XIXe siècle (Voulet-Chanoine41), anglais et français, afin d’éviter tout risque de confrontation militaire, ont signé « une

première convention (1898) » à Londres, grâce à laquelle, les français ont marqué leur

territoire de ‘pacification’ « des côtes atlantiques (Guinée, Sénégal et Mauritanie) au Tchad ».

(Carte -2) de partage coloniale (source : Grégoire E.) 42

Si les anglais ont cédé la partie saharienne à la France, c’est parce qu’ils estiment que ces zones enclavées sont sans aucun intérêt économique ; « on laisse au coq gaulois ce qu’il

lui faut pour gratter le sable »43, disait avec une sorte de raillerie Lord Salisbury, un homme

d’État anglais. A cette époque, ce qu’on appelle actuellement le Tchad était scindé en trois parties administrées par trois royaumes : le Ouaddaï, le Kanem et le Baguirmi. Chacun d’eux s’identifiait par ses groupes sociaux, ses us et coutumes et définissait son périmètre territorial. C’était un vaste territoire sans aucune structure administrative, occupé par plus de 170 tribus divisées, qui s’entretuaient (voir en annexes) « La répartition ethnique au Tchad selon les

41

Les Relations franco-tchadiennes, op.cit.

42 Tous les documents présentés ici en forme de photocopie (noir et blanc) sont issus des sources originales. 43

Grégoire Emmanuel, Touaregs du Niger, le destin d’un mythe, éd. Karthala, 1999, collection Homme et société, conseil scientifique sous la direction de Jean Copans, p. 27.

(34)

régions Dumont, Gérard-François 2007 »44. Mais, existe dans chaque périmètre, une sorte de comité des sages dont le rôle est de juger, réconcilier, châtier, punir et faire de la médiation. « Toutes les sociétés connaissent une forme de hiérarchie sociale » 45 et les sociétés tchadiennes sous le pouvoir des trois royaumes qui géraient leurs territoires avant la pénétration coloniale, n’ont pas échappé à la règle. Le règlement des conflits étaient entre les mains des comités des sages dont les membres sont issus de la société mais choisis par les Rois/Sultans. Ce sont des notables et des chefs traditionnels.

Farouchement opposés à la conquête coloniale, les systèmes traditionnels surtout ceux du Ouaddaï, à l’Est du pays, se sont battus, recourant à tous les moyens, voire à la force. Ils estiment que non seulement ils ne doivent pas être gouvernés par des Koufar (mécréants), mais ces derniers n e doivent p a s profaner des t e r r e s saintes. À l’époque, c’était une honte de laisser des « Nassara »46 fouler le sol du royaume du Ouaddaï. « S’il y a bien une situation impensable en Islam, c’est de voir des musulmans gouvernés par un non-musulman, c’est vraiment l’humiliation la plus terrible. Et cela remet complètement en question leur

identité et le sentiment qu’ils ont de leur dignité »47. La position du Ouaddaï n’était pas un cas

isolé en Afrique. La communauté de Touaregs s’est soulevée contre la conquête française par les armes « puis s’est révoltée en 1917 »48 contre l’autorité française.

En revanche, la colonisation a donné l’impression qu’elle adoptait une stratégie

de respect envers les systèmes traditionnels ; e l l e n’a pas voulu les dissoudre, mais

plutôt les contrôler, les diviser et les organiser pour mieux les exploiter. « L’administrateur, souvent militaire, se trouve devant une société à commander, à organiser

sur des bases nouvelles »49. Cette stratégie qui est conçue pour amener les autochtones à

composer ne vise qu’à diviser a f i n d e mieux régner. Les royaumes/sultanats et leurs instances traditionnelles de gestion des conflits se sont adaptées. « L’homme n’existe que dans sa société ; que celle-ci se transforme ou se désagrège, il se transforme ou se

désagrège »50. Pour mettre au pas les instances

44 Dumont, Gérard-François. « Géopolitique et populations au Tchad », Outre-Terre, vol. 20, no. 3, 2007, pp. 263-288.

45 Etienne Jean et Mendras Henri, Les grands thèmes de la sociologie par les grands sociologues, Paris, Armand

Colin, 1999, p. 39.

46 Nassara ou Toubab, signifie blanc mais non-musulman. Le mot Nassara est utilisé dans le Coran mais Toubab

est très souvent employé en Afrique de l’ouest.

47

Remacle Xavier, Comprendre la culture arabo-musulmane, Bruxelles, CBAI et Vie Ouvrière, p. 97.

48

Meillassoux Claude, « L’esclavage en Afrique précoloniale. L’autorité coloniale et l’esclavage », in

Bibliothèque d’anthropologie dirigée par Maurice Godelier, François Maspero éditeur, Paris, p. 40.

49

Ibid.

50

(35)

traditionnelles et superviser leurs actions, les autorités militaires coloniales ont procédé à la réduction de leurs pouvoirs en incitant les parties en conflit de saisir la justice sans empêcher les autorités traditionnelles de continuer de rendre la justice. « Le sultan continue de rendre la justice sous le contrôle du Commandant français d’Abéché ; mais il s’engage à faire approuver par cet officier toutes les amendes et toutes les afflictives qu’il prononcera et à ne pratiquer dans aucun cas de prévarications. Les parties ont le droit de saisir la justice

française par voie d’appel »51.

L’objectif clairement affiché de la colonisation était de créer un pays pacifié, uni, doté désormais d’un drapeau, d’un gouvernement, d’une monnaie unique, d’une structure administrative pour réduire l’écart entre les différentes régions, maîtriser les dérives tribales et mettre en valeur les potentialités humaines au service d’un seul peuple. Elle a lancé les activités économiques pour développer la colonie car par le passé, l’échange traditionnel qui s’appelait le troc se faisait entre éleveurs et cultivateurs. A titre d’exemple, les éleveurs Toubous prenaient « le sel extrait dans les salines des oasis (...) l’amènent dans la région du

Ouaddaï pour l’échanger « contre les besoins alimentaires des éleveurs »52. Désormais, cette

pratique fait partie du passé avec l’arrivée de la colonisation qui œuvre pour la surveillance et la maitrise des échanges commerciaux qui doivent servir ses propres intérêts. « Les colonies sont des sources de matières premières ; elles constituent des marchés pour les placements de

capitaux, les industries et le commerce français »53. Dans le journal Le Renouveau, le général

Charles de Gaulle déclare : « Notre pays a fourni, naguère, un immense et glorieux effort pour

conquérir, organiser, mettre en valeur, l’ensemble de ses dépendances »54.

Il convient de rappeler que le colonisateur a, au Tchad, intelligemment réduit le pouvoir des instances traditionnelles gérées par les royaumes dont une partie s’occupait de la gestion des conflits sociaux et armés. En 1909, après la pénétration de la colonisation, « le Ouaddaï était resté sans sultan jusqu’au 15 octobre 1935, date de la réhabilitation du Sultan

du Ouaddaï par la France »55. Pendant cette période de flottement où le royaume du Ouaddaï

- qui éprouve « d’énormes difficultés à s’inscrire dans cette nouvelle matrice politique et

51 Oumar Almahy Abdelrahman Président de l’université Roi Faysal, Tchad, de la colonisation à l’indépendance

(1894-1960), Convention entre le Colonel LARGEAU, Représentant le Gouvernement français et le Sultan ACYL du Ouadai le 27 janvier 2012, p. 270, Alhara Almasrya, Al Ama lilkitab, 1982, Caire, Egypte

52 Bodoumi Ahmat Saleh, La victoire des révoltés, témoignage d’un enfant soldat, Yagabi, 2013, page 267 53 Olivesi Antoine et Nouschi André, La France de 1846 à 1914, Paris, Edition Nathan, 1997, p. 370.

54 De Gaulle Charles, Mémoires d’espoir, Le Renouveau, 1958-1962, Tome 1, Paris, Edition Plon, 1970, p. 41. 55 Entretien avec Abbo Yacoub Ourada, fils du Sultan du Ouaddaï Mahamat Ourada. N’Djamena le 25 février 2015 dans mon bureau de la Médiature de la République.

(36)

économique dont les valeurs ne sont pas en phase avec référents sociaux-culturels et ses

pratiques » - a été disloqué « de sa puissance guerrière » 56, privé de son Sultan, la

colonisation a commis les pires atrocités à l’encontre d’un peuple qui s’est rebellé contre ce qu’il a qualifié d’occupation de la terre sainte par des mécréants. En 1917, c’est ‘l’année

des coupe-coupe57’, où des têtes d’un grand nombre de religieux ont été tranchées. Rappelons

qu’entre 1980-1982, la région du Ouaddaï a subi le même sort, mais cette fois-ci par l’occupation libyenne. Contrairement à la colonisation française qui a massacré des religieux, les libyens s’en s ont pris beaucoup plus aux intellectuels : « les libyens avaient assassiné sans aucune forme de jugement, des hommes importants, des imams, des hommes politiques, des intellectuels surtout francophones, des notables de renom ou des commerçants

qui avaient une assise matérielle ».58

Avec la colonisation, le pays découvre le droit écrit, les tribunaux administratifs et militaires créés pour gérer les conflits. Au Tchad, dès 1912, « un cadi est accrédité auprès de chaque Commandant de subdivision qui lui prête l’appui de son autorité à charge pour

lui de soumettre ses jugements à l’examen »59. Le droit coutumier (droit non écrit), sans

être abolit par le colonisateur, il commence à s’éloigner du paysage traditionnel.

« Dans la plupart des sociétés africaines pré-coloniales, (…) on était en présence d’un ensemble de règles qui constituaient un ordre coordonné et hiérarchisé, qui étaient susceptibles d’exécution forcée, sanctionnées selon les procédés propres au monde juridique, c’est-à-dire des procédés qui pouvaient atteindre l’individu dans ses biens, dans sa liberté ou

dans sa vie »60. Bref, on dit que « la colonisation est venue brouiller les pistes ». Comme chez

les Kanak, « l’État français a créé les ‘chefferies administratives instituant un transfert de pouvoir au profit de celles-ci, censées maintenir l’ordre établi. En échange elles étaient

reconnues par l’État »61.

La situation a ainsi continué jusqu’à l’indépendance en 1960. Mais les structures chargées de jouer la médiation n’ont pas été totalement supprimées. Leur pouvoir est, certes, réduit mais elles sont exploitées pour servir l’administration néo-coloniale. « Le pouvoir

56Grégoire Emmanuel, Touaregs du Niger, le destin d’un mythe, op.cit.

57Coupe-coupe : instrument ayant servi à trancher les têtes dans le royaume du Ouaddaï

58Bodoumi…op.cit.

59 Almahy Abdelrahman Oumar, Président de l’université Roi Faysal, Tchad, de la colonisation à

l’indépendance (1894-1960), op.cit.

60 Durieux André, Droit écrit et droit coutumier en Afrique centrale, Académie royale des sciences d’Outre-Mer, Classe des sciences morales et politiques, N.S., XXXVI-2, Bruxelles, 1970, p. 3.

61Frezet Pierre, « Justice française en Nouvelle-Calédonie. La fin du rêve tropical », Droit et cultures [En ligne], 51 | 2006-1, mis en ligne le 21 avril 2009, consulté le 31 juillet 2015. URL : http://droitcultures.revues.org/952

(37)

‘notabiliaire’ constitue un mode d’articulation spécifique de l’État sur la société et de la société sur l’État dans lequel les segments terminaux des bureaucraties servent de support à

la neutralisation de leur propre centre » 62 . A vrai dire, les pouvoirs des juridictions

existantes, populaires, sociales ou coutumières ont été supprimés, réduits ou ont « survécu

sous les autres appellations nouvelles de tribunaux de résidence et de province »63 comme

c’est le cas au Cameroun.

I.3. La période post-coloniale (de l’indépendance à nos jours)

Après l’indépendance, les instances traditionnelles sont progressivement réhabilitées mais sans pouvoir réel leur permettant de reprendre la place qu’elles occupaient avant la colonisation. Il y avait certes les sultans des trois royaumes et des chefs de cantons mais sans pouvoir effectif puisque le jeune État indépendant compte bien poursuivre et renforcer les structures administratives héritées de la colonisation. En l’absence par exemple des structures réorganisant l’espace et les couloirs de transhumance, les conflits de nature inter et intracommunautaires traditionnellement connus - surtout ceux en rapport avec le terroir ou ceux impliquant éleveurs et agriculteurs - refont surface. La loi reste généralement muette et les mécanismes juridico- administratifs mis en place par le colonisateur répondent vaguement à ces genres de conflits. Lorsqu’ils interviennent, ils aggravent le conflit par des verdicts contradictoires (voir affaire Chigueg c.f. infra). En effet, la colonisation qui n’a pas voulu renforcer les mécanismes traditionnels de gestion des conflits, ni améliorer la loi écrite pour répondre aux conflits courant, a laissé derrière elle un vide.

Face à cette situation, le jeune État qui cherche à renforcer ses pouvoirs à travers les nouvelles instances juridico-administratives héritées de la colonisation, n’a toutefois pas empêché un retour timide et contrôlé des mécanismes coutumiers de gestion des conflits. Ces mécanismes sont l’œuvre des chefs traditionnels et religieux qui cherchent à travers « L’arbre de palabre » des arrangements. Au fur et à mesure que nous avançons dans l’étude de la thématique, les mécanismes de la médiation traditionnelle et leurs effets s’éclaircissent. Le prochain chapitre étudie les conflits et ses aspects. Mais avant tout, nous estimons nécessaire de présenter un aperçu biographique (voir encadré ci-dessous) des cinq chefs d’Etat ayant dirigé les destinées du Tchad de l’indépendance à nos jours (1960-2018).

(38)

Aperçu bibliographique des cinq chefs d’Etat ayant dirigé le Tchad (1960 – 2018)

François Tombalbaye, né en 1918 à Bessada au sud du pays, il était de confession protestante. De

1942 à 1947, il était instituteur et militant syndicaliste, il a participé en 1947 à la création d’un parti politique le PPT (parti progressiste tchadien). En 1952, il occupe le poste de conseiller territorial du Moyen-Chari puis en 1957, il devient vice-président du Grand Conseil de l’Afrique- Equatoriale française avant de devenir en 1959 Président du Conseil des ministres. Au lendemain de l’indépendance du Tchad le 11 août 1960, il accède au poste de premier président de la République du Tchad. Il a exercé le pouvoir d’une main de fer jusqu’à son assassinat en 1975, à la suite d’un coup d’état militaire.

Le Général Félix Malloum Ngakoutou Bey-Ndi64 est arrivé au pouvoir à la suite d’un coup d’état

militaire en 1975. Il est né le 10 septembre 1932 à Fort-Archambault (actuel Sarh). Il entre dans l’armée française en juillet 1951. Après avoir participé à la guerre d’Indochine (1953 – 1955). En 1962 après l’indépendance du Tchad, il a rejoint la jeune armée tchadienne avec le grade de capitaine. Promu général en janvier 1973, il est accusé s i x m o i s p l u s t a r d de complot puis arrêté le 24 juin 1973. Il a été libéré le 13 avril 1975 à la suite du coup d’état militaire à la faveur duquel il est désigné par ses frères d’armes président du Conseil supérieur militaire (CSM) puis Chef de l’Etat quelques mois plus tard. Il s’exila en 1979 au Nigeria. Le 31 mai 2002, il a regagné le pays et est décédé le 12 juiin 2009.

Goukouni Oueddei, né en 1944 au Tibesti, il rejoint la rébellion du Frolinat en 1968 et devient en

octobre 1976, Commandant en chef de la deuxième armée du Nord du Frolinat soutenu par la Libye. En Août 1979, il devient par consensus (Accord de Lagos-Nigeria) Président du gouvernement d’union nationale du Tchad (GUNT) jusqu’en juin 1982, où il fut renversé par les forces armées du Nord (FAN) de M. Hissène Habré qui a bénéficié du soutien franco-américain. Il s’est exilé en Libye puis en Algérie et en France, avant de décider de regagner le pays en Août 2009 après 22 ans d’exil.

Hissène Habré65, né au Nord du Tchad à Djourab dans la région du B.E.T, Habré a dirigé le Tchad (1982 et 1990). Diplômé de l’Institut d’Etudes Politiques de Paris, il est le seul président à avoir fait des études supérieures avec une licence en droit et un DES en Droit Public en France. Il rejoint le Frolinat

en 1972 et devient leader de la 2ème armée du Nord avant de devenir Premier ministre dans le cadre

des Accords66 de réconciliation avec le régime militaire dirigé par le général Malloum. En 1979, il

devient ministre de la défense du gouvernement d’union nationale de transition (GUNT) après la guerre de N’Djamena et l’accord de Lagos en août 1979. En juin 1982, il reprend le pouvoir par la

force et devient Président de la république du Tchad. Il est renversé le 1er décembre 1990 par un

mouvement armé dirigé par son ancien conseiller à la sécurité Idriss Déby Itno. Il se réfugie au

Sénégal qui lui accorde le droit d’asile avant d’être rattrapé par la justice. Le 30 mai 2017, « Hissène

Habré a été condamné à la prison à perpétuité pour crimes contre l’humanité et torture, notamment pour viols et esclavage sexuel, ainsi que pour crimes de guerre, par les Chambres africaines extraordinaires au sein des juridictions sénégalaises. Le 27 avril 2017, une Chambre d'appel a confirmé le verdict et a ordonné à Habré de payer près de 123 millions d'euros pour l'indemnisation des victimes »67.

64 http://lespoirdelanation.skyrock.com/2682061090-Feu-General-President-MALLOUM-NGAKOUTOU-BEY- NDI.html

65 http://hisseinhabre.com/hissein-habre-resume-de-la-biographie-de-l-ancien-chef-de-l-etat-du-tchad.html

66 Doual Mbainaissem, Conflits au Tchad et au Darfour, éd. Outre terre, Revue européenne de géopolitique, 2006/4 (no 17), Pages 357 – 370 « Les nouvelles autorités signeront le 22 janvier 1978 à Khartoum, grâce à

l’entremise du Soudan et de la France, des accords avec l’une des tendances du FROLINAT, le CCFAN (Conseil de commandement des forces armées du Nord) de Hissène Habré. Habré devient Premier ministre, et l’armée française entreprend de lui reconstituer une armée, d’entraîner celle-ci et de l’équiper ».

(39)

68 http://www.jeuneafrique.com/personnalites/idriss-deby-itno/

Idriss Déby Itno Actuel Président de la République (1990- 2018). « Né en 1952 à Berboda, Idriss Déby Itno est président de la République du Tchad. Diplômé en aéronautique, il participe au mouvement de rébellion de 1980 à 1984 contre Goukouni Oueddei. Se trouvant en désaccord avec le nouveau pouvoir, il part en exil à partir de 1989 et crée en 1990 le Mouvement patriotique du salut (MPS). La même année, ses forces s'emparent de N’Djamena et chassent Habré du pouvoir, dont il s'empare le 4 décembre. Il est officiellement élu en 1996, 2001, 2006 et en 2011 avec 88 % des voix »

Figure

Tableau 1- Statistiques 2000-2010 – Médiature de la République du Tchad
Graphique 1- typologie de conflits
Graphique 2 – Cercle de conflit Moore 78
Tableau 4- Evolution de l’Ombudsman
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