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CLAUDE GAUVREAU
~TLE PROCÈS DE LA SIGNIFIANCE
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Monique Le ,~,
by
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A thes;s submitted te the '"
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Faculty of Graduate Studies and Research
in partial fulfillment of the requirements fo.r the degree of
Master of Arts Augûst 1981
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Madame. Eva
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c.e.tte Jte.c.heJr.c.he.. Que. .ôo'<'~n..:t égaleme.~ Jte.meJldée.6
Me.ôdame.ô MaJt.yH 8é1and e;t Lou..U e. Gu.LUeme.t qu..ë. on;t b,(en ac.c.epté de dactylog1ta.ph.A.eJt l'enJemble du mémo.<JLe. Ma. Jtec..onl't.Lti.ô.ôa.nc..e. la. piu6 v,(ve •
c.onc..eJr.ne mon époux.' don;t le .6Uppoltit moitai.
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CLAUDE GAUVREAU ET LE PROCES DE LA S IGNI FIANCE' .
,Les diff~rents recueiJs poétique~ de Claude Gauvreau témoignent d'une transgression progressive du symbolique. P'Etal mixte aux Jappe-_ ments
a
la lune! en pa,ssant par Brochuges, Poèmes de d~tention et les,
Boucliers mégalomanes, 'le langage\est peu ~ peu extrait de sa fonction symbolique pour se d~ployer dans une articulation Sémiotique, Ce dé-mantèlement apparatt d~jà perceptible dans les images rythmiques des
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1 ! 1\ premiers poèmes, il s'intensifie dans les images
m~morantes
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:-..~_--,'~--+-L'analyse textuelle, inspir.~e d~s ~tudes critiques de Roland Barthes
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et de JuHa Kristeva. penmet dl ident;jfi er 1 es transgressiolLlhlOs"---"'d-.J'ou.Jr--"dLLr-'"'e_---' _ _ _ _ --' _ _ thétique et de cerner la mimésis obtenue p~r le télescopqse du
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CLAUDE GAUVREAU'ET LE PROCES'DE LA
SIGNIFIA~CE
,-The d ifferent .coll ~ctions of poetry by Cl-audè Gau~reau '!J
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~emonstrate- a progrEr~sîve transg~e_"Ss.ion of the symbol i c,1 fu~cti o~.
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Jappements 1l la lune, as well as Brochuqes'. ,poemes ded~tent ton a"rid Les Boucl fers mêga l omanes ; n between ~ the syrnbo 1 ic . funct;on of the langua,ge is gradually overwh~lmed by fts own semiotic
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Les fonctions s!miotiques prl'!-oedipiennes ...•...•.... ' '
1.2- La glossolalie pulsionnê1le ' ...•...••...
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1.:1. De"1 limage rythmique A 1 limage mêmorante.t<: ... ..
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-' Isotopi~s,constitlltives des champs conflictuels ••...
, ' 2.': Uérations de la dégradation, ... ~ ... ..
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ScMmes' obsessionnel s ... ' •...• ,2:3-'~~s ,p~'radig~t
idéologiques ... . 6. 8 13 21 35 37 47 64 .CHAPITRE III - Rupture êp;stémolog;que .~ .. ~ ...• o • • • • • • • • • • • • • • •--3.1.. tnon~iatiol1 et dénotafion ...•... 81 84
i
3.2- Le njet et la négation ... . 88
'3.3- La chora s~ot i que ..•...•...••... 102
CHAPITRE IV -
Trans~enda~ce
du~liPsisme
... ; ... 1054.1· Du monisme au solipsisme ... 107
4.2- De 11 image transfi gurante Ali image e:xploréenne ... 11 0
.
4.3- Le champ polysémique ... 00117 CONCLUS ION BIB.LIOG_RAPHIE . ... , .•...••... " .. : ... '.125 , ~ ,,-/,.
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Le mythe 'de Gauvreau
~u.bit,
d'epuis que'1.ques années, une désoccul· tat10n prOQ,ressJve. tê prémi.ertAndré-Ge~rg~s
Boura'ssa l, inscrit,J'écolequébécoise issue 'du
mouvemenVsu~réa1iste'
.
dans' la 'vis'ion esthétique et , ' ~ socio·histor.ique 'd'un Québec enébUl1i,ti,?~'
..'\~a$~~Jl'
Imbeau 2. ensuite meta
j()ur la 'biogfaphiè du. puissant conté5tat~frè auquel S,I identifia le, "
. 3 , - ' .
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po~te. Jacques ~\archand· , surtout, ,dan~ un essai tout aussi percutant
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qu' ; ne i S if. s' ac ha rne sans,' r~pit' sur un Gauv,reau-personnage qu'il d; s 1 0 ~ \
, '
que ;nexorabl~ent avant de lever, dMin'itivement le voile mythique sous
lequ~l il se comp.1ais,ait.
Le mérite·de ces études consiste en une synth~se puis en un d~pas-·
sement des critiques parues par bribes au fil des an~es, principalement depuis la disparition du poête'voué, sans doute,
a
une gloire essentielle-ment posthume. L'honrne, attein,t au plus profond de son ego. résiste mal au feu des projecteurs. Ainsi, la critique immar'lente s'attarde-t-ell~1- André-G. Bourassa, Surréalisme et littérature gUébéCo~,(Montréal: L'Etincelle, 1977).
2- Gaston Imbeau. Cl aude Gauvreau. " 'hollll1e et l'oeuvre j essa-i de bi 0-bibl iographie descriptive, mémoire pr.!senté ! la' Facu1U des ' études supérieures de l LUniversitê de Montréal, en ~ue de llob-tention de la maltrise ~s Arts (Etudes françaises), novembre 1975. e240 pages. ,. 'JI. 1111 • , . , .
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,,,3- Jacques Marchand, Claude Gauvreau. poète et mythocrate. essai. (Montr~al: VLB.1979).
1
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, • aux mobiles
i'~CO~~'qUi
auraient vraisemblablement pu inciter lepo~te
•a
élaborer une gigantesque farcea
Ja mesure de sa prétendue mégalomanie. Mais, !l-t-il. vraiment voulu nous duper? Cette auto-suffisance décele~ par· les critiques 'le détermine-t-elle pas une volonté de puissance proprement nietzschéenne? Et 'quand cela serait ...Il demeure indubitable que les informations de nature .~iographique
• désormais ,disponibles gr!ce
a
l'acharnement des chercheurs, contribuénta
•
jeter sur Gauvr~au un nouvel éc1 a irage. Ce ncoeur mi s
a
nu n ternit, en quelque sorte, l'image du poête et refroidit singuliQrement 1 'imp~ct de ses envolées oratoires. Toutefois, llaccusation d'imposture" déja fortexpli-..." f •
cite chez Ferron 4, ne rdsoud en rien la problématique soulevée par une
..
oeuvre marginale et déviante. Sans oser rapprocher Gauvreau de Lautréamont~.
nous 'constatons néanmoins un' accueil similaire des oeuvres qui témoigne intensément des volontés d'acceptation d'une êpoque .
..
.
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Faut-il rappeler que Sade se trouva réhabilité par les critiques de Manchot 5, de Barthes, 6 ou de Sollers 71 Michel Foucault l'a bien
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compris: l'enfermement, le maintien A l'écart des personnages déviants
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ou des oeuvres margi na 1 es concourta
'entreteni r un fa i sceau dl images4-
Jac~rron,
Du fond de monarri~re-cuisine,~tréal,
éd. du Jour,J
1973).5. Maurice Blanchot, Lautréamont et Sade-, (Par1s: éd. de t4inuit; 1963). 6- Ro]and Barthes, Sade, Fourier,'Loyola, (piâ'ris: Seuil,'1971) .
. 7- Philippe Soll'ers: L'écriture 'et l'expérience des limites, (Paris:
( ~ Seuil, 1,868). ''';
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.
~,. " -, t: .. " 3-- mythi,ques. Il n'y a pas loin du prisonnier pol itique au
d~tenu
qui Cnnattt~,us
'les raffinements- des traitements pstYfhiatriques modernes 8. l'ambi-j9u'itêqU~
vêhicul e 1 e titre du recueilP.o~es
de dêtent ion 9 s'avère, selon"'Jacques Marchand 10, particulH!rement
~~~~latrice.
Le spectre de lanor-o '4"
malit~ brandit en force la perspective d'un nivellement idêologique appa-'
remment souhaitable pour le maintien de l'équil ibre social et de la paix collective.
Il tut une époque oDl'on ostracisait publiquement Artaud: Para-doxalement, ceux qui s'en r~clament aujourd'hui voient, dans cet ostracisme, 'une preuve de la consécration_de leur génie. Le combat entre le licite et
\
, ~
l>lindicible s'est mené ~ chaque êpoque avec une vigueur tout révolutionnai-re. Aujourd'hui,! 1 'heure du formalisme dans les arts, on serait tent~
d'exorciser la dêmarche gauvrienne. car l'élab?ration d'une pOétique explo'" ratoire repousse encore plus en avant les fronti~res de l'investigation.
"
Gauvreau semble y croire intens~ment:
Pour aller plus creux dans l'inconscient. pour dynami-t,er certaines barri~res apparemment infranchissables, 11
il faut pr~cisément toute la commotion du volcan êmotif.
,
.
8- Michel/Foucault. 'Eloge de la folie
a
l'âge classique, (Paris: Galli-ma rd. 1 972 ) .9- Cl aude Gauvreau, "Po~mes de d~tention'fI Ù!. Oeuvres crêatrices compl
è-tes, (Montr~al: Parti Pris, 1979). pp. 865-895. , 10- Jacques Marchand. op. cit .. p. 334.
~
.t
11 -Cl aude Gauvreau, "Dix-sept 1 ettres A un fantôme" (Lettre du 13 avril 1950), La Barre du Jour, nos 17-20, janvier-aoOt 1969, p. 358.
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4
-Au del! du dada'sme, du futuro-cubisme, du lettrisme et '!nême du
.
,
surréalisme, nous tenterons de définir certaines composantes de l'automa-tisme de'f1aude Gauv~eau'qui l'a conduit
a
jeter Jes ba~es d'une poésie novatrice qual ;fiée par lui,"d~ploréenne"
12.La mention des influences et det filiations reconnues par Gauvreau lui-même ou ;dentifié~âce ~ la perspicacité des chercheurs qui se sont
..
attardésa
cet aspect, rend inutile une exploration de plus qui relaterait obligatoirement les mêmesr~devances,.
qu'elles soient artistiques ou lit-téraires.Nous n'aspirons pa~. non plus.
a
scruter les secrètes et inavoua-bles pulsions qui o'rit pu guider le poète.,
Jacques Marchand, en 1 'occurren-ce, s'en est admirablement chargé et il n'y aurait H que des redites.
Notre approche méthodologique s'effar~era~onc d'établir une logi-que du signifiant en èGnsidérant dans leur immédiate accessibilité les ma-nifestations textuelles des recueils poétiques de Claude Gauvreau, d'~ ~ aux Jappements
a
la lune, en passant par Brochuges, Po~mes de dé-tention et les Boucliers mégalomanes. Nous tenterons également de cerner~
la mimtsis provoquée par le tt!lescopage du symbo1;que et ~émiotique,
~
l' en nous appuYant sur 1 es études crîti ques de Rol and Barthes et de Ju la Kr; steva .12- Claude Gauvreau, "Dix-sept,lettres
a
un fantôme", 'op. cît., p. 361.\
\1
1
5
-Puisque la sémiotiqU~Jj;ne "l'application de la sémiologie à
une disc~pline particuli~re~ n~s aurons recours
a
l'analyse textuelle~Ui
nousp~rmettra
d'inscrire la perspective sémiot1que~
l'intérieurd'une linguistique descriptive.
'"--... ~'.
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13- Jean Fisette, Le Texte automatiste, (Montréal:
siU du Québec, 1977). p. 23.
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Presses de
"Univer-r
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CHA PIT REl
1
1
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TEXTUALITÉ ET,CONNOTATIONS DIVERSES
Les recueils de ~o~mes r~digês entre 195Q et 1970 témoignent d'une
évolution constante, égàlement perceptible dans les objets dramatiques
écrits durant cette même p~riode d'intense activité intellectuelle.
D'Etal mixte aux Jappements ~ la lune, la fonction symbolique du langage
se trouve progressivement exacerbée jusqu'~ un démant~lement complet.
Le cri retentHsant proféré en 1948 par Pau'--Emil e Borduas
constitue ~ cet égard un pôle de,diffraction privilégié:
Au refus global nous opposons la responsabilité
en-ti~re ( ... ) Fini l'assassinat massif du présent et du
futur ~ coups redoubl és du passé ( ... -)
·Au terme imaginable, nous entrevoyons 1 'homme libéré de ses chafnes inutiles, réaliser dans l'ordre imprévu, nécessaire de la spontanéité. dans l'anarchie resplen-dissante. la plénitude de ses dons individuels ... D'ici
la, sans repos ni halte. en communa~tê de sentiment
avec les assoiffés d'un mieux-être, sans crainte des longues échéances. dans l'encouragement ou". 1 a persécu-tion. nous poursuivrons dans la joie notre sauvage' be-soin de liMration 1.
Aussitôt assumé par Claude Gauvreau. qui se perçoit comme ~un
si-.)
gnata ire conséquent du formidabl e mànifeste de Borduas~ 2, ce texte porte
1- P.-E. Borduas. Refus global et Projections libérantes, frontrêal:
Parti-Pris, 1977). pp. 35-40. )
2- Claude Gauvreau. "Autobiographiell in Oeuvr-es créatrices compl~tes.
(Montréal: Parti Pris. 1977), p.
12.
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7
-en lui les jalons d'une inlassable quê'te. c
1
En effet, ce texte prophétise et résume ~ souhait 11 itinéraire "--.~
poétique de Gauvreau. Du surréalisme, il retient le refus du
convention-nel ai'llsi que
'1
impérieux besoin de l iMrer 1 es forces inconscientes..
,Cependant. alors que Rupture inaugurale consacre en 'France la dissidence et , 'affirmation d'un groupe marginal rassemblé aux côtés d'André Breton, les instances contestataires oppressées par le duplessisme se réunissent,
•
autour du manifeste québécois.
D~s lors, le mo1nde artistique entreprend d'extraire les forces
obscures et chaotiques qui sommeillent enfouies au plus profond de
l'in-.
conscient collectif. A l'inexorabilité du destin, sloppose virtuellement l'arbitraire et la contingence, la suprématie du hasard, la soif dé l'im-prévu et le goOt de l'insolite. ReWs global inaugure donc, en quelque
sorte, le r~gne de la p~nsée sauvage, minoritaire et divergente
en;assi-gnant. du coup, 1 1 irrationnel au pouvoir.
Les objets poétiques de Claude
~uv~eau
corroboreront cette optionmanifeste et autoriseront, conséquemment, la perception de connotations définitivement orientées. Effectivement, l'évocation du "sens second" reconnu par Hjelmslev, assurera une polarisation des signifiés relative-ment au contexte socio-politique de cette époque.
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8-1.1 Les fonctions sémiDtiques pré-oedipiennes
C'est! Jacques Lacan que nous devons 1 'observation du langage perçu en tant que dérive de la pulsion de mort (Todestriebe) 3. Lieu
•
privilégié de la négation et du rejet, le langage porte les traces d'une
quête désespérée subordonnée
a
une volonté réductrice. Le textetêmoi-." ,
,
gne. en effet. des résistances et des stagnations, des ruptures et des dissociations produites sur le mode conceptuel.
De tout temps, reconnatt Jean Rousselot:
Les po~tes et écrivains dignes de ce nom ont
tra-vaillé a perfectionner le langage,
a
lui-faire dire·plus,
a
le faire dire mieux,a
l'agrandir.a
letrans-former de ,!telle sorte que sa rêalîté ne fasse qu'une
avec tout
ce
qu'i1 yaa
voir,'a percevoir,1
com-,prendre et ~ faire en ce mondè et ailleurs.
Cette entreprise légitimée par la pratique d·,'un discours initié
depuis quelques
~cles,
semble d'une redoutable envergure. Les sciencesconnexes constituées par la psychanalyse. la philosophie et la
sociolo-gie, incitent
a
jeter un nouvel éc·lairage. Appréhender un texte poHiqueimplique, dès lors, que 1 'on effectue les recoupemènt~qui
sormais. L'élaboration du langage dans un processus de consolid ion des instances discursives,
conscientes appelées
a
se manifester ouvertem3- Jacques Lacan. Ecrits II. (Paris: Seuil, 1971), pp. 167-168.
4- Jean Rousse10t, Mort ou survje du langage?, (Paris: Sadi, 1969),
p. 13.
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,• • 9
-.
\Jul ia Kri,steva 5 perçoit la
r'r~'volution
amorcée dans le langa.gepoétique depuis la'seconde moitié du XIXe siècl~, pr1ncipalement depuis
Mallarmé, çomme l'inauguration d'un procl~s de'la signifiance qui s'appa-'
,~ ~
rente! une rêvol ution pol iti que et social e,' Si le mode de production
capitaliste contribue
a
produire, provoquer et exploiter 1 '~~latement dudiscours et l'isolement du Sujet"en raison d'une
mOdifièatiO~?n
,statut, ete ses rap~arts avec autrui et le monde, elle «fOnçait,_ par
ail-leurs que. le TEXTE témoigne, en. tant que pratique signifiante, d'un
en-semble de relations inconscientes, subjectives et sociales.
Le langage poétique éclaté depuis le symbolisme rend compte, selon
Kristeva, des modifications provoquéès par les charges pulsionnelles é~er
gétiques et les articulations de la chora sémiotique. Ce moi, emprunté
au Tim~e platonicien désigne. dans cette perspective, la totalité mouvante
constituée par lèS pulsions fondamentales identifiées par la psychanalyse:
pulsion de vie / pulsion de mort, les forces d'assimilation et de destruc-tian. Ces pulsions représentent pour Kristeva, la charniêre entre le psychique et le somatique,
L~ frayage des pulsions dans le syst~me'symbolique du langage
pro-voque un ensembl'e de modi fications qui se situent notamment au niveau de
la syntaxe, des contraintes phoniques et rythmiques et des relations
con-textuelles. Ces niveaux constituent ce qu'il est convenu d'appeler le
dispositif sémiotique du texte.
5- Julia Kristeva, La révolution du langage poétigue, (Paris: Seuil,
1974), pp. 209-291,
t
1
1
(
10
-Ces modifications peuvent ~tre notamment repérêes et observées
dans le ph~no-texte'par le biais d'une nouvelle
organisation.translin-guistfque. De nouvenes figures se disposent, transversales ~ la phase'
thétique, formant un nouveau r~seau.' Explicitons: ce que Kristeva
appel-~.--'
-le -les diffêrentiel-les signifiantes, ce s~nt les êl~ments phonémiques ou
'" /'
phonêtiques r~currents, perceptibles lors de l'audition d'un po~me ou dé'
sa transcription semi-phonétique. Souvent un seul phon~me ou élément
phon~tique peut agir comme différentielle signifiante.
De fait, l a présen~e de ces ~ éments investit de nouvell es
va-l , ,
leurs Sémantiques le texte considêré. Ces valeurs ne co'ncident plus né-.
cessairement avec celles des lexèmes ou morph~mes identifi~s. Comme
preuve de sêmantisation immédiate, Krist~va mentionne les onomatop~es.
Le sujet, ainsi ax~ sur un prOCès pulsionnel inconscient g~nère un
nou-.
veau domaine, un r~seau transversal aux frontières lexicales. La voie
.", t;
ainsi ouverte à l'~criture automatique justifie l'exploration d'un
rythme inconscient, pulsionnel, transJinguistique qui oriente les recher-ches en vue d'une syntaxe nouvelle portée par un rythme de timbres
proso-diques et consonantiques~
Les tèxtes disposent. depuis ce changement radical, de contrain-tes naturelles et non plus de conventions métriques ou prosodiques pour
constituer le.proc~s de la signifiance. La combinaison nablie entre
groupes phoniques et valeurs s~mantiques pour former un,dispositif
com-plêmentaire, demeure selon Kristeva, le seul indice de pOêticité dans les
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11 -\. 6 textes modernes "Afin de pouvoir identifier les charges pulsionnelles présentes
a
1 1 intérieur du tissu te~tuel, nous aurons recours A la notion de
"diffé-rentielle signifiante" telle qu'~tablie par Julia Kristeva. En effet';
~
la s~manalyse recorma'f't 1 1 intérêt de cet "infini-point" qui IIfait
péné-trer le
gén~-texle
dans le phéno-textell7. Ainsi, il ser'a possible de
percevoir au niveau même des signifiants des traces de l 'activité d'en-gendrement du texte. En effet,
Si j'invente un mot ou une construction inexis-tants dans aucune langue et comme tel s étant un dHi
A
tout sens, ~ tout signifiant, alors j'écris 1I1 'im_possibilité de l'impossible" (Badiou) et, par ce geste
m~me, je soumets mon travail aux lois intransigeantes
de la langue. pr~sente ici en face du surréel (du
sur-signifiant) que je force. 8
L'intér~t de cette démarche réside dans le fait que les
trans-gressions et les ééarts observés par rapport au langpge conventionnel,
au-torisent désormais une certaine emprise. C1est notamment le cas de la
production surréaliste.~ [e concept de "différentielle signifiante"
dé-veloppé par Kristeva se rattache "a'u rôle que Lacan attribue ~ l'instance
de la lettre dans l linconscient"
9 Bien qu ' e11e privilégie le recours
6- Julia Kristeva, La révolution du langage poétique, op. cit., p. 217."
7- Julia Kristeva; Sêmêiotikê z Recherches pour une sémanal~se, (Paris:
Seuil, 1969), p.
298:
8- '-
Ibid .• p. 299. 9--
Ibid., p. "300. (.1
/•
(
l " )\
.,
aux ~1 t'!ments phoniques, constituants, Kristeva ne rest~eint aucunement
l'u-sage de
ces~tt'!s.
Dans Lar~volution
du langagepo~tique,
JuliaKris-teva considère
tlProse~1
de Mallarmé 10, I.,.a transcriptionsemi-phonologi-que perml!"t de retracer le rythme phonisemi-phonologi-que et s~mantique du poème et
d·'i-dentif1er l~s investissements pulsionnels qui y figurent. S'agit-il donc
...
"
de d~ce1er diverses strates
a
1 'int~rieur du dispositif sémiotique qui
"'---correspondraient ~ux r~gularités rythmiques et intonationne1les? Une
\
,fois d,issolues, les unités ,lexicales seraient en effèt remplacées par des "glossolalies dont les unités constitutives, asémantiques. supportent· de fortes charges pulsionnelles et des connotations multiples" 11
, /
Bien,que Mallarmé se soit montré particuli~rement vigilant A cet
~gard --
tl
suffit de relire les Mots anglais po~r le vérifier --, ildemeure évident~ue les textes modernes comportent tous -- bien quIA
des degrés divers -- leur réseau parall~le qui se superpose au texte
•
initial pour en corroborer les aspects les plus probl~matiques.
D~jA, dans Etal Mixte, les vocables non-français.vérifient cette
présomption en étayant de façon' rigoureuse les éHments plus convention-nels retenus A dessein.
Ainsi, 'une seconde lecture se superpose ~ la premi~re, empreinte
de connotations nouvelles et pourtant éminemment convergentes. Cette
10- Julia Kri'steva. La rêvo1ution du langage poétigue, (Paris: Seuil,
1974). pp. 239-263.
,
,
.
~ 13
-~. -- <' - . . . . - - - - _ ... _ _ . . . _
-~
approche permet d'apprivoiser ce foisonnement d'images quid~ferlent
!plusieurs niveaux dans ce premier recueil qui porte en lui le germe des
autres ~ venir. Il n'est donc 9lus question d'univocité puisque, de la
<.'l ~~
superposition des lectures, résultera une pérception plus adéquate.
1.2 - La glossolal ie pulsionnelle
. , Se rapprochant du babil enfantin fortement ancr~ dans le
biophy-siologique, le langage auquel recourt J'image rythmique consid!re la
1 all at ion dans un rapport inversé. Le son, "capa bl e de toutes 1 es
sug-gestions" 12, y connaft une amplitude oa ne s'exerce
d~ja
plus un pouvoirdiscriminatoire axé sur le communicatif. L'extase qu~jl procure contient
sa propre finalité.
Tautologie satisfa~~ante, la manipulation de signifiants vides,
purement sonores, devient la tentation ultime, la fascination suprême
a
laquelle cédera définitivement le po~te
a
la fin de son périple. Gauvreaupressent déja que:
Il y a des sons ~ui sont plus durs que d1autrès, plus
doux. plus veloutés, plus· grinçants. plu~ graves, plus
sifflants, plus ternes, plus aigus, plus berceux ( ... ) qu'il n'est pas indifférent pour l'expression qu'une ou d'autres de ces catégories sonores soient ou aient été util i sées. .
L'alternance des rythmes dans la succession des lettres
ou des alliages de lettres est en soi une pui~sanc~ de
sug-gestion ou d'évocation, elle est en soi une puissance de
..
(
(
14
-"~,
',situer (mê'ne sans aidé) ~n climat se'rE!férant
a
n'importe quel sens ••. l' • ,
Le stade oral~ recoupé par le stade du miroir, ~eton que 'l'on
re-prenne la catégoris~tion de Freud ou celle~ de Lacan, valorise une con-'
duite narcissique, UQ engouement du verbe pour le verbe. dan un
proces-s~s d'appropriation et ~'expl~ration du registre phonologi e .
.
D~j~, dans Etal mixte, Gauvreau reprend et systématise les
d~~ou-vertes'réalisées au'plan phonique dans Les entrailles, puis dans Le
-Vampire et la nymphomane. Le d~coupage du recueil en autant de:lex;es
ou d'unités d'analyse permet d'effectuer un relevé qYantitatff en terme d'occurrences manifestées au plan phonétique.
les vingt-sept po~mes d'Etal mixte portent en substance les
re-cueils ultérieurs. au plan de la désintégration atomistique des unit~s
langagi~res. Bien qu'une frénêhe verbale suscite un brouillage deHbé-ré, "comme si l es pistes du sens deva ient @tre systêmati quement brouil-lées. comme si le 'poétique' alimentait une mystique ou une
mystifica-tion" 14, on remarque que "l' ordre
r~gne,
'la structure domine, J acoM-rence interne est parfaite; mais c'est un ordre, une structure, une
cohé-rence qui tentent de légitimer"a compulsion originelle. sauvage
a
l'ana-• h
logie" 15. Ces rHlexions de François Rigolot conviennent parfaitement
1~- Claude Gauvreau, "Dix-sept lettres ~ un fant6me", op. cit., p. 350.
14- François Rigalot, "Le po~tique et l'analogique"
la P9~sie. (PariS: Seuil, 1979), p. 172.
15-
-
Ibid.S
In: Sêmant i gue de
'" ,
l
~l . 1 j1
<(
(
"
- 15
et
caract~r1sent dêj~
l'entreprise gauvrienn4. 'Le pourcentage de n~ologismes lexicaux dans ce premier rec~eil
..
)oscille de 10% A 100% au pro rata de l~ longueur dèS po~mes qui varient
4
d'un seuT terme comme dans l, jusqu'a plus de trois cents, notamment
-
,.
.
dans Ravage cicatrice, Vénit~en danger. ou Gr~gor Alkador SOlidor:~
Les termes non-français
considér~s
incluent,a
l'occasion,~
latin hybride ou un anglais atrophié. Le plus souvent, ils
proVienne~~
de. prouesses linguistiques, d'assocjations libres oa de contagions para-\
grammatiques,
"
\ "
\
Le relevé confirme, certes,
l'impor-tan~e du jeu al~atoire, mais c ncourt ~galement
a
co~roborer lesaffirma-tions troublantes de J)Jlia 'Kristeva, fonnulées
a
la'suite des recherches1
de Fonagy effectu~es
a
partir des observations de Lacan. En décrivant\
.
.
!1
les bases pulsionnelles de la phonation 16. I. Fonagy contribue
a
~tayer
le rOle prédom1nant des différentielles signifiantés perceptibles dans let i ssu textuel.
1
)
1
~!
Ainsi, il est possibl e de rel el/er
a
partir des tennesnon-françai s de Sil ex de Capricéphal e, quarante-deux occurrences de
/a/,
•
trente-cinq occurrences de /1/, trente-deux occurrences de /1/ et de fr/.
Les autres 'phon~mes se 'méritent entre deux et seize occurrences. la haute
16- 1. Fonagy, "les bases pul sionnelles .. 'dEt la phonation", In: Revue
fr~nçaise de psychanalyse, janvier 1970. pp. 101-136; juir1et
1971, pp. 543-591, cité par Julia Kfisteva, L~ rêvoluflon du
langage poêtigue. (Paris: Seuil, 1974). 'p.
2
5.~
i..
r
(
16
-frfquence manifestfe apparatt" ind!niable. Dans CHaine Douze Mp;f!, on
remarque la nette prêdom1nance de
III
qui totalise vingt-trois occurrences
1-alors que tous les autres phon~es n'exc~dent pas cinq occurrences. Grésor
A1kador Salidor confirme le choix spontan~ du
laI
pour lequel on d~nombrequinze occurrences; /1/ qui en mérite treize;
Izl
qui se laisse entendrea
seize reprises. Berge Bergerac d'Anisette permet d'identifierquarante-huit occurrences du phonème laI trente-.neuf /i/ , trente 101, vingt-sept
1
/lI et vingt-six /n/-. Même dans I, le phonème laI se r~ve1e nettement
sup~riéur puisqu" il cOf\Ce(ne quatre occurrences ~lors que les autres pho.-nèmes constitutifs de l'unique terme ne reviennent qu'une fois, sauf
Itl que l'on observe
a
trois reprises.~
La n~cessité du recours à l'ora1isatinn s'impose pour détecter
les
pré~ominances
ph6nologiques susceptib.1es de tisser les entrelacsd'un système parallele. Certains effets tr~nslinguistiques s'affirment
parmi leyuel s on reti endra :
"-La pul_sion orale des liquides Ill, Irl, Iml et .
des voye" es antérieures fermées; la pulsion anale
des voyell es postérieures ouvertes; la pul sion
uré-trale -aes- constrtctives non-vaisées Ifl, Isl f
ISI
et éventuellement la tendance! la phalliss1sation de
cette pulsion dans les constrictives vois~'es Ivl, Iz/,
IJ/;
la pulsion agressive, de r~jet, dans lesexplosi-v,es sourdes Ipl, Itl, Ikl ou VOl sées Ib/. {dl, Ig/ la
pulsion érectile-phallique du Irl apical. 7 .
En deçà dû mot un proc~s est amorcé, d~chiffrabl e en fonction du
.. f) .. \ •
processus d'engendrement ~ui fa~t_basculer la langue au nlveau
supra-~:;
17- Julia Kristeva, La révolution du]angage poétf9ue~ (Paris: Seuil,
1974), p. 225. 0 ... 1 1 , 1 1
l,
,l
_ _ _ _ _ _ _ _ . . ooiooio!A . . tat . . t~.1I\17
C
Se~,".1;al.
La théorie freudienne des pul sions confl!rea
l'oral it4 1ncorpo-rante etaiTnaTTté destructrice une polar; sation dual iste a\ssociée au prinCipe de' plaisir et aux forces d'autodestruction.S' jl est possible de concevoir une rédistribution de l'ordre phoné-matique
a
partir des" relevês de fréquence êtabl is ~ partir du corpus dufrançais fondamerUal, on constate une nette complaisance
a
l'égard des.
stades pré-oedipiens: stade oral -et stade anal recoupés par re stade du miroir. Complaisance narcissique associée au rejet et ,
a
la' négativité. Les textes regroupés darts Etal mixte ont tousé~~ considér~s,
indépendam-ment de l'importance· quantitative des vocabl es non-frança i s. Cependant~seuls, ces derniers ont pour l'instant retenu notre attention en raison de l'impact qu'il s suse i tent.
1
'1
Les po~mes rédigés uniquement en français n'ont évideillnent pas
don-" '
né lieu ~ une telle ahalyse. Il s'agit de Aurore d~ minuit aux yeux
cre-J,
~, Primemaya et Ange métorfôze sur les dalles dQnt le seul néologisme apparatt dans le titre. Par ailleurs, des trente-six phon~mes' çlu fran-çajis standard, nous n'avons retenu que les dix phonèmes' les plus fré-quents que_nous mentionnons en fonction de leur ord~e décroissant de
fré-quence (Tableau II). Les statistiques recueillie~ pàr Pierre-R __ L~on orientent les comparaisons qui seront ~tablies
a
l'aide du. tableau qui apparatt ~ la page suivante.o
"-.
(
1
18
-TABLEAU l
F Jt..éque.nc.e. du pho nWe6, e.n 6Jta.nç-CU6 18
,
p"on~mes fréquence phon~mes fr~quence
"
.
I~I 8,1 ,I!I
,
2,0IRI
6,9 151 2,0III
'6,8 l 'j 1 l ,7 , lei 6,5 1) 1 1,5 :151
5,8 1[1 l ,4 1 i 1 5,6 1t
1 1 ,3lEI
5,3 1 bl 1 ,2 1 a 1 4,9 1j
1 1 ,°
1 t1
1 4,5 Iwl 0,9 1 " 1 k 1 4,5 1 ~cI; 0,7Ir
l 4,3 1 z.1
0,6 1 do1
3,5 1 ~ 1 0,6 Îml 3,4 1>
1 0,5 lO.I 3,3 , lœl 0,5 , " l'lI ' 2,8 lœl 0,3 / 2,7 , lui 1g
1\ 0,3 .; l'VI,
2,4 1 al 0,2 1..
101 2,21Ir
l 0,1 , 1 ---~ \ ' / '-18- Pierre-R. Léon, Prononciation du français standard', cité par
Jean Pey tard et Emile Genouvrier,
l.!l:
Linguistique et ,nseigne-ment du français, (Paris: Larousse, 1970), p. 42.(
\
(
19
-La plu.part des po~mes contiennent des dominances qui figurent parmi les phonêmes les plus fréquents de la langue française même s'il s'agit ici d'une langue exploréenne. On retrouve, par exemple, le
pho-n~me lai qui est le phonème le plus fréquent, agissant comme dominance
J
dan,~ le vocabulaire exploréen ou les néologismes de plus de la moitié des
poêmes du recuei 1. La même remarque concerne 1 e phonème
1 R /.
Cependant, on peut noter la présence du phon~me Ir l qui, malgré un faible indice ha-bituel, apparaTt privilégié dans ,quatre po~mes. Nous avons d lailleurs souligné d'un trait, parmi les domlnances observées dans chacun despo~-mes, les phonêmes moins fréquents qui se retrouvent ~ une place inhabi-tuelle. Le tableau qui suit demeure, ~ cet I!lgard, fort explicite (Tableau II).
Faut-il conclure qu'une organisation intr;ns~que réglemente puis-samment la langue util isée en modelant ces isotopies de l'expression que sont ces "dlfférentielles signHiantes" sur le fonctionnement normal, ~
l'insu de l'auteur? Bien que des poi nts de rep~re se la i ssent encore dé-celer, il importe de surtout tenir compte du degré d"'impressivité" res-senti par le contact de ces nouvelles formes verbales. En effet, selon Claude Tatillon, des sèmes potentiels leur sont reliés. Complétant les
c
observations de Grammont, ce dernier laisse entrevoir dans l~s consonnes occlusives
Ir:
6,
01, t, k.g It des sèmes de force, de brutalit~, de sou-dainete et de dégoat; dans les constrictives et les nasales, l'id~e de sif-flement 1 si, de liquidité 1 11, de mollesse, de lenteur Im,YI / ou de~, _ _ ... , ~1 - !
1
'i ;
l
,
-.,
f.' \. >"'" t~~
,...
\, . -phonèmes R J po~esa
e 5 1 E ~ t k dominances ,1. Silex de capricêpha1e ,
.
42 32 35 11 4 32 8 7 11 16 a-l-R·j3. Cilaine douze meyfè 3 5 23 3 l 2 3 2 l 3 '1 •
4. Plaine pôle de cordes de piane 11 8 7 7 6 8 10 5 8 2 a -
E-5. Ravage cicatrice 4 12 4 4 3 . 2 2 2 6 4
r -
R
6. Vénitien danger 26 24 13 5 10 20 5 4 11 9 iL-R -1
7. Grégor Alkaddr Solidor 9 r..- 1
....
;..-a-l
15 13 3 2 10
-
6 2-
~8. Berge bergerac d'anisette 48 23 27 19 22 39 9 1 14 21 a - 1
9. 1 : 4
-
--
2-
1-
3 2 a -t
10. Je 1 rize l' 36 27 34 15 13 23 13 6 16 6 a -l
1 13. Sentinelle-Onde 26 . 34 41 18 17 31 13 10 8 24 l - R -i:
ft' 114. Saison post-épilée 4 4 3
-
1 4 2 2 1 1 a -R-i1
15. Saint-Chrème durci au soleil 4 4 2 5 2 5 2 l 5 3 e - i -t ,
R
-:"'-1
1
16. Blafarde perspective 2 10 6 4 5 5 l 2 2
....
217. Tige ~ } 10 15 4 19 5 10 8 5 9 6 e -R
18. Crodziac Dzégoum Apir 06 78 62 87 77 110 42 15 58-
n
i - Cl -e19. Zeuthe ~ 88 73 46 38 30 75 22 27 27 49 a - i -
R
20, Enfance-du duché de Crottemare 30 33 25 14 14 28 9 15 5 21 R -a.-i
~l. Tout est calme sur les moirés 27 33 20 7 f.l 5 21 11 33 15 25
R -
...---....a-a
22., Jacques Dul ume 30 24 30 5 23 39 4 3 5 23 1 - a -J
23. Geu Gleu
\
49 78 63 16 68 72 28 26 36 68R -
i-f-24. Sous Nar 22 23 25 10 28 19 6 6 27 16 s -
t -
1
25. Elongiaque 3 8 8 - 4 2 3 3 l 4
t
-f,
26. Les L de plomb 31 37 33 15 22 24 13 24 25 17
R-l-a.
-,
~7. Jamais le dé noro 18 25 14 l 9 21 7 11 ... 6 39
k
-foR
,..
28. Ode al'
~nem1 .~a
4 3 8-
- 4 l 2 1-
.
l
29. Les plumages d'a 1er, aigus 12 13 10 5 3 8 4 ( 3 7 9
R -
à-1
_if1:.W.1IIItV# if'" ).
... _+ ... M -""nt '. iVe
.'fSr m
•
21
-r
violence IR/ 19. En cela, l'analyse plus, traditionnelle rejoint la(
/
perception de Fonagy entérin~e par Jul ia Kristeva et Jacques Lacan.
l
.3-:
De l'image rythm i que Al' image ménorante,Le let,trisme co~temporain, en raison de la codification établie
rigou~eusement
par Isidore Isou n'a pas tardé! se détacher du dada'smepour aougurer rapidement un nouveau dogma ti sme. Anton in Artaud a effec-tivement vu juste: "Le surr~al isme est mort du sectarisme de ses adeptes" 20. Les poètes qU\S'inScriventdans cette
l~gn~e ~voluent,
\
incon,testablement, A l'int~rieur d'un système clos. Gauvreau le leur reproche impitoyablement:
Pour eux, semble-t-il, la poésie doit r~sider
(et elle le peut, bien sar) exclusivement dans une image rythmi que régul i~re. Et encore, chez eux, l'onomatopée n'est-elle
pas
tellement bizarre etimpr~vue. 21
Tenter de solutionner 1 a po~sie gauvri enne par le recours A une hermêneutique orient~e sur les adéquations vocal iques ou consonantiques établ ies méticul eusement par Is idore Isou, ne saura i t s' av~rer tr~s
productif dans l'imnédiat. On ne saurait, cependant, ignorer que
19- Claude Tatillon, Sonoritês et texte poétigue, (Ottawa: Didier, 1976), pp.
73-74.
.
20- Antonin Artaud, liA la grarftle n~it ou le Bluff surréalist'eu ln:
L'Ombilic des Limbes et autres, teXtei, (Paris: Gallimard,1956), p. 232.
21- Claude Gauvreau, "Dix-sept lettres
a.
un fantôme", op. cit .. p. 357.J
1
1•
.~
- '22 •
1[.
Gauvreau s'est un moment attardé aux théories lettristes et qu'il y a probabl ement rel ev~ un défi A sa mesure. "Le po~me •• cette Ms;ta-j~
.'
(
tion prolongée entre le son et le sens" 22, ainsi que le ",onçoit Valéry n'interdit aucune explo~ation créatr{ce.
Percevant l'étroitesse d'une avenue dépendant de la subordination
~
XPliCite du s:yst~me phonologique de la langue française aux intentionsI."il
du discours, Gauvreau rejette avec le lettrisme toute velléité},de dé-cryptage axée sur des signifiants délibérément soustraits de leur charge émot ive.
La corresponda'lflce
~gagée
puisfid~lement
maintenue avec Jean-Claude 'Dussault concourt oA systématiser l'entreprise gauy,rienne enidentifiant précisément l'objet de sa qu~te. En délimitant quatre caté· gories d'images poétiques, "l'image rythmique, l'image mémorante,
l'ima-23
ge transfigurante et l'image exploréenne" ,Gauvreau nous impose une nouvelle perception de 1 'histoire littéraire.
Il '''y précise notamment ce qu'il entend par "image rythmique":
~ .
Je conçois donc , 'image rythmique en tant qu'es-~sent i e 11 ement une onoma to pée. Ev i demment, il faut
élargir le terme onomatopée au del~ de toutes les
fronti~res admissibl es jusqu'ici: ( ... ) Il y aura onomatopée chaque fois que, par un rythme verbal,
,
22- PaÜl VaH!ry, Tel Quel II, (Paris: Gallimard. 1943), p. 63.
'
-\
23 .. Cl aude Gauvreau, 'J~ix·sept 1 ettres ~ un fantôme". op. cit., p. 349.
/ .J , .n 1;
(
..
(
/ '
23
-une bribe de'r~alit~ (noum~nale ou phanom~nale)
ou un cl imat psychique pourra être conçu. 24
L'image verbale, ainsi définie, "peut-être visuelle, auditive, ou
kinesth~Si\qUe,
graphique ouvocal~
... 1/ 25 En tant qU'l/analogon",l'ima-, ,
gy'suscitée par un impact d'onde~ sonores, s'ins~re
a
l'intérieur d'uneimagerie spécifique effectuant des regroupements par types.
L'image rythmiqu,e n'élude aUfunement l'apport des éléments proso-diques du discours puisqu'elle investit le texte d'une dimension
tabu-laire. La linéarité apparente semble désorlT\ilÎs sacrifiée et s'av~re plus
que jamais tributaire de la compétence du lecteur. L'impact suscité par des syllabes -- éventuellement des lettres -- qui défient toute associa-tion aléatoire mais s'associent de façon libertaire en se heurtant
déli-bérément aux statistiques de fréquence généralement observ~es, accrolt
proportionnellement chez le dest.inataire toute forme d'évocation. Ces images fortement musicales et tributaires de pulsions
in-conscientes amplifiées jusqu'A leur paroxysme, sus~itent une rapide
in-cursion dans le domaine de la signifiance. Les frictions volontaires, 1 es amal games déroutants savamment dosés rendent compte. d'une ineffabl e nécessité. Gauvreau ne tolérera jamais la plus petite infidélité, le
moindre écart lors de l'oral isation des objets pOétiques. car il lui
"
24- Claude Gauvreau, "Dix-sept lettres ~ un fant9me", op. cit .. p.
353.
25- René R. Held. L'oeil du pSYChanaliste, surréalisme et surréalité.
.J>.
i (
v.~
24
-importe de maintenir désespérément en place l'e fragile échafaudage constitué
a
partir d'un réseau de "différentielles signifiantes" 26 selon l ' optique de Kristeva.On se.it que Breton n'aimait gu~re la musique.
Breton et Eluard" po~tes visuels avant tout, avec 1 eurs poèmes en vers 'ou en prose, vou1 a ient donner
a
vo i r ma i s nona
entendre. 27Gauvreau s'inscrit
a
contre courant. Lorsqu'Ivirnig précise que: "Ou premier coup d'oreille, le po~me en prose de Paprikouce (1 ui) semble écrit sans néces'sitd intérieure" 28, il corrobore l' importance du canal acoustique comme mode privilégié d'appréhension. "Il suffit d'écouter B'rochuQes comme on écoute un air de jazz" 'd~c1are pertinemment Janou St -De n i s 29.Cette premi~re exploration ~ l'intérieur de sons produits par juxtaposition de consonnes sifflantes et percutantes auprès de voyelles éclatantes suscite des images incisives provoquées par des onomatopées
j
d'origine pulsionnelle. P,ar ailleurs, l'exaspération de certains
rythnes selon un rituel presque incantatoire rend obsessionnels 1 es ter-mes quotidiens inlassablement répétés jusqu'a la perte totale du signifié.
/ '
26- Julia Kristeva, La révolution du langage poétique. (PariS: Seuil. 1 977 ), p. 213.
j 27- René R. Held, op. cît., p. 164.
28- Claude Gauvreau, "Les oranges sont vertes"
l!!.:
Oeuvres crgaz:riC'escompl~tes, (Montréal: Parti Pris, 1979), p. 1379.
29- Janou St-Denis! Claude Gauvreau. Le cygne, (Montréal: éd. du Noro1't, 1 ~7 8), p. 65.
1
(
~/ ~r
,yi
(
f
- 25Plus tard, llimage exploréenne reprendra, en les exacerbant, les dêcou~es réalisées au plan phonique ~ prppos de l'image rythmique", Le patient labeur de l'artiste actualisera peu
a
peu les formes nouvel-les dêja appréhendées~ •• Ahdré Breton constate que l"'Imagination ,nlest pas don maj s, par excellence, objet de eonquHe" 30 Certes, les mots d'usage courant ont peut-être trop serv;: au po~te de les récupérer et de les purifier de leur gangue originelle en~ourant
incidemmenta
•
l';~'mêmorante.
.' Pans Etal mixte, les,images rythmiques se retrouvent fort
nom-"'
breuses. Apparentées aux onomatopées pl us connues, ell es exc~dent néan-moins les normes conventionnelles. Celles-ci, plus prl!cis~ment "Yanh anhh", "daâhl", "I-a-a-Rourmne", "I-angg-garr", "hih", "pneuh!',
"Vrououououllll111ll" , "Glahha", "glin hoff". "meuch", "ig dâz",
"iaânma~". "grihhhh -- ;oum~", "ouzzze", "fac fine", "pouf", "Sehotte~"
... constitue~t un relevé non-exhaustif pour le seul poème intitulé
Silex de CapriCêphale 31. Cependant, bien que l'image rythmique soit impl icitement contenue dans l'image explôréenne 32, el1 e ri sque. dans
.,
un premier temps de se confondre avec li ima~e transfi gurante constitul!e
30- André Breton. "Le revolver ~ cheveux blancs" In: Cl air de Terre,
(Paris: Gallimard, 1932), p. 99.
-31- Cl aude Gauvreau, Oeuvres compl~tes, OR. cit., p. 213.
32- Claude Gauvreau, "Dix-sept 1 ettres ~ un fantôme"" op. 'cH., p. 353.
i
l
1
(
1
\, Il i'.l./j'
26-de mots-val ises dans l~s les ~lémenfs constitutifs n'apparaissent' pas imnédiatement décelable$ 33. Elle suscite des états, des impres-sions, des sensations relevant tout autant du domaine affectif, oue du psychique ou du physiologique. L'impact considérable qu'elle suscite orchestre donc un certain nombre de pulsions qui envahissent divers si-gnifiants sonores.
Cette étape s'avère déterminante puisqu'elle conditionne déj~
certaines orientations futures. En privilégiant l'image rythmique, Gau,vreau marginalise déj! son entreprise puisqu'il affirme en quelque
' ;
sorte la primauté du signifiant et la prégnance d'un rythme pulsionnel, interne et dépendant des composantes phoniques. Fortement investie de charges énergétiques, l'image rythmique instaure un procès qui cont.ourne la matérialité propre au langage sans toutefois bousculer déj3. ses
structures signifiantes.
La prédilection manifestée
a
l'égard de certains éléments phoni. ques se laisse déceler dans les nombreuses allitérations qui parsèment Etal mixte. Ainsi, nous retrouvons dans Sous nar. "fin du fin de fil a • fré de fol fatchida" 34 et dans Jamais le dé noro, "le devers du devisa des dauves de dradladadilodududuludurucrumulu" 35 D'autres vers,
33- Claude4Gauvreau, "Dix-sept lettres
a
un fant~me", op. cit., p. 353. 34- Claude Gauvreau, Oeuvres créatrices complètes, op. cît., p. 253.35- Ibid., p. 259.
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27
-glan~s
a
travers le recueil têmoignent êgalement de cetteprêoccupa-tion: dans Ravage cicatrice, on p~ut lire:
Ma i s 1 e d ~ c 1 i c des procès
t 't l ' b ' dlt.·.. ' 't d 36
sous ra, au e qUl c:Ja na,ssa l ans ses cerceaux.
et plfs ,loin, "Et les bouts de braches 00 s'inscrivaient les secrets suf-, 37
focants" .
Certaines contagions s~mantiques s'expliquent de cette façon. Ainsi, "Les boeufs beuvent"
3~,
"anniversaire, serre" 39. "mo.rtpar-dessus maure" 40, "ivre de santé de sang de synagogue" 41, "les aisselles. de sauterelle" 42, "un autre être" 43. "les coeurS en ;hoeur" 44. "la
marqu i ses" 46, "1 e jugement des
ju-'" 45
mer est un amer" ,"les exquises
ments" 47. Ces dernières manifestations se retrouvent dans Brochuges et mêne dans les Po~mes de dHention.
On songe. par moments. au fameux Glossaire, j'y serre rues gloses
36- Claude Gauvreau, 37-
l!WL.
p. 220.Oeuvres crhtrices comp1Hes,
op.
cit" p. 219.J "'~> ,'\:; 38-
!!Ù!!.P
p. 263.39-!.!ùi:. •
p. 213. 40- lb;-
d .• p. 217. 41- Ibid. , p. 213. -42- rbid.,-
p. 215. 43-l!U.2..:.,
p. 217. 44 - l b i cl., p. 630 .. 45- Ibid" p. 635. 46-l.ë.llL.,
p. 877. 47- Ibid.-1
'1 4!
! ,1
(
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(
28
-de Michel Le1ris 48 lorsqu'on retrouve dans Etal mixte -des vers
sem-blables
a
ceux-ci:grif1 aarah
Une griffe celle-la un pont une auge 00 mange l'éléphant 49
sangu i na i re.
et plus loin, dans le même po~me intitu1~ Silex de capricêphale:
Ah faire fahir! fac Ôinc
--Ah floung. 'feu d'air. 5
Gauvreau développe ce goat des calembours faciles en s'attardant
aux correspondances graphiques des él~ments sonores. Ce procédé,
essen-tiellement visuel, n~cessite pourtant que l'on assume pleinement ce
constat ~mis par Ars~ne de Hauçauman'dans Le rose enfer des aAimaux:
IIEntendre c'est comprendrel! 51.
C'~st
déja dans l'optique d'undémant~-lement progressif du langage qu'il importe d'appr~hender 1 'ambiguité de
ces énoncés, "descendu des ans fers" 52 "Kandonque" 53, "un pas i s 'teur.,,54.
"s ur les ors rizons" 55, "le tour de la belle" 56, liMé ___ frairr __ " 57
48- Michel Leiris. Mots sans"mwoire, (Paris: Gallimard, 1969).
49- Clauaë Gauvreau, Oeuvres créatrices complètes,
op.
cit .• p. 213.50- Ibid •.
-51- ~. p. 804. 52- Ibid., p. 213. -53- Ibid., p. 112. -54 - lb id.. p . 21 3 . 55- Ibid .. p. 217. 56- Ibid" p. 232. 57· ~, p.' 624. .1 ! 1 1l
!
-
---~----+
29
( "peu ttHre" 58, "Fl ortandre" 59, "Mahion inze" 60.
(
On songe également
a
14iss E1an;ze 61, de Denis Roche lorsqu'on lit selon une isotopie religieuse cet extrait de Brochuges:Limpe o$sible Vers iU Item Miss 62 Ah~s
Les m!taphores.surgiss!ni nombreuses et contribuent ~ faire sur-~- "\~
gir 1 es images m!moral1tes t'ell es que 1 es conço it Gauvre!u. "Les yeux de pêches" 63 et les
"ortei'l~
de'saphirs" 64r~pondent)'aux
"creuses vallfe,s•
de nos songes" 65, aux lIh blots de gib'iers'" 66 t aux "souris de balamulte,,67
et "aux pattes d'archange v issellé" 68. "' Le "pupitre d'effroi" 69 "le erêpuseu1 e 1 spana:' 70 et "1 a \ s e e j reonfl exe" 70 êqu 111 brent "1 es êea il1 es
58- Claude Gauvreau, Oeuvres créatrices compl~tes, op. cît .• p. 627.
1 \ 59-
-
Ibid., p. 629. 60-Ull!L.,
p. 874.."
... ':::--..,..
..
.
'~ 61_0Deni s Roche. s Id!es cent~ma 1 es de Mi 55 Rousselot, Mort ou survie du langage,
. <
62- Claude Gauvreau, ,op. cit., p. 630.
~'-63~ Ibid" p. 259. 64- Ibid .. 65-
llUrL.
p. 223. 66- Ibid., p. 225. -67- Ibid., -68- Ibid., -p. 229. p. 231. 69- ~, p. 233" 70- Ibid ..-
p. 235.i ze, ci té d'an, Jean , Sad";. 1969), p. 267.
(
1 •,
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_ _ _ ~ _ _ _ ~. _ _ _ cl:ocl:oliii!iIIIIII . . . 30 -J, de cristal" 71, "les marbres d'emplâtre" 72 et les lIMill'e
ye~x g~ogra'
phiquesll 73. Ces quelques exemplest~rnoignent
de l'abondance de cette·figure, notamment -dans Etal mixte •. Cependant, déja dans ce premier re- , cuei;, certaines images rythmiques semblent assoc;~es
a
ce procédé:"noche de ponte
~
croix de bid.acq" 74, "le portique sirurien des occlom-bres brumis" 75, "les kultus duss des plinthes plitoche" 76Par "image mémorante", Claude Gauvreau entend "la sllbstance ima-gée d'une poésie qui se borne ~ établir des rapports de comparaison ou de" métaphore entre les divers
~léments
constituants" 77. Bien que ces ima-ges soient produites par des mots famil iers. 1 eur association fortuite amplifie toute possiblité d'évocation. Gauvreau alI1~gue, en effet, que "son invention inou'e réside dans la s.ituatfon de ces mots les uns par rapport aux autres fi 78. Soul ignons cependant que 1 e rôl e prépondérantaccordé
a
la ~étaphore suscite des images poétiques qui s'inscrivent dans la plus pure tradition classique.71- Claude Gauvreau, Oeuvres créatrices compl'êtes. op. cit., p. 237.
72- Ibid,', p. 239. 73- Ibid.,
-
p. 243. 74- lPi
d . , " p. 245. 75- Ibid"-
p. 247. 76- Ibid., p. 251..
.77- Claude Gauvreau, 'lIOix-sept lettres
a
un fantôme", op. cît;, p. 353. 78--
Ibid ..(
(
- 31
,-Ce procédQ este,a rapprocher de delui des IImots-totemsll.79, pour reprendre lJexpression pittoresque d'André-G. Bourassa. En effet, la
dl!-.
marche inverse conduit Gauvreau ~ associer par juxtaposition plusieurs signifiants afin de brouiller provisoirement toute recherche du signif;~. Ainsi, certains néologismes, tels que IIbondieu ll 0
8
°,
"mélmonnoirmanoir" 81 "Telesforedromadaire" 82, "oeilne"8~
ou "rosamiondee" 84, en déniant~.
1 1 importance du blanc typographique, orientent nécessairement
J
lacteper-c
ceptif de la vue! l'audition.
M!me dans 1 es po!mes aD 1 es termes non-fra nçaï s prédomi nent, 1 a structure syntax i que appara ft sauvegardee. Grammati ca 1 ament corrects ,_ les syntagmes nominaux perpétuent l'usage des prépositions,lIalt ou "de"
afin dl introduire des sequences caracterisées par la métaphore filée. Cette remarque prévaut pour là majorite des poêmes d'Etal'mixte, car quelques-uns déja se rév~lent annonciateurs de la langue exploréenne que Gauvreau établira de mani~re définitive dans Faisceau d'épingles de verre et Jappements ~ la lune.
)
, 79- Andre-G. Bourassa, op. dt.,p. 139.
,
80- Claude Gauvreau, Oeuvres compl~tes,
op.
cit., p. 222. 81-lJù!L,
p. 223.82- ~, p. 618.
83- Ibid .• p. 620.
1
(
1 1 i 32 -/Effect ivement, dans des poames tels que Crodz; ac Dz~goum Api r,
Zeuthe ou Jacques Oulume, on perçoit d~jA l'emprise d'images
partielle-ment libêr~es des contraintes syntaxiques habituelles. A ce titre, 1
,
-
~-d~roge de l'ensemble du recueil et prêfjgure véritablement les derniers
poèmes, en vertu de son hermêtisme ~vident.
les objeti dramatifues rèprennent d'ailleurs les procêdês
privil~-,
giés en regard des objets poêtiques. Certaines images formulêes dans
les entrailles retrouvent 11 peine leur êquivalent dans les textes
t.ilté-, 85 0
rieurs: "Les cendriers opal ins se mettent A danser" , "La torpeur
coule du nuage gonflé d'ivraie" 86, "Le soleil s'êlance comme un
crap~~
pOurpre" 87 et "La terre a mugi 11 travers les croix de verre" 88 Les poèmes
d'Etal mixte se rattachent a~ même souffle que Les entrailles, et
c,,,
remarque vaut égal ement pour }es images rythmi ques, proport ionnellement fort nombreuses.
Que le délire verbal pathologique soit associé, dans une certaine
mesure, au délire poétique et que 1 'agrammaticalitê observée tienne compte ,...
de similitudes prononcées en regard des discours aphasiques du
jargono-,
.
phase ou du glossolale, cela nous semble ind~niable. La jargonophas1e
85- Cl aude Gauvreau,
°e·
cit. , p. 29.86- 1 bid .• p. 31.
-87- 1 bid .• p.' 35. -88--
1 bi d .• p. 37. (-'-..
(
(
33
-"laisse tntacte la structure grammaticale et dissout le lexique" 89. Cet exemple tir~ par Marina Yaguel10 du livre de
T.
Alajouanine, Langage nor-mal et langagel pathologique, autorise déja certains rapprochements:"Des costelles qui se frement, ici un racr~me. deux enfourches
a
jaup;~,deux
ch~nes
zobes, un chaudoir qui met le clistone" 90 On croirait re-trouver certains passages d'Etal mixte ou des Boucliers m~galomanes:"le greu'verv~ salve -- palti des crinches -- le col d'acté do~tu d~bréchionte solvé des prêtres" 91
"Et le troponde
f~ru
sillonne au creux des mases" 92"le chutt ricone colle sur le kuttus duss des plinthes pl Hoche"
l3
"les dimfnamouflettes ascrichêzent les touloupounapours
a
oreilles" 94"lès muxmutlus arogdèzent les dufles aux côtes cordiches" 95. La similitude demeure ~tonnante. Le recours
a
l'arbitraire eta
l'alêatoire pour susciter des images plus fortes s'affirme résolument.89- Marina
Yague"o~
Alice au pays dulans~,
(Paris: p. 150. '90- Ibid ..
-Seuil, 1981),
91- Claude Gauvreau, Oeuvres compl~tes, op. cit .• p. 247.
\ 92- Ibid., p. 249. 93-