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Trajectoires de satisfaction conjugale et dissolution d'union

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Academic year: 2021

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Trajectoires de satisfaction conjugale et dissolution

d’union

Mémoire doctoral

Léa Gosselin

Doctorat en psychologie

Docteur en psychologie (D.Psy.)

Québec, Canada

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Résumé

Les modèles d’évolution de la satisfaction conjugale ne font pas consensus et leur relation avec la dissolution d’union est sous-étudiée. Ce mémoire porte sur les mères (n = 1 063) et les pères (n = 998) de l’Étude longitudinale du développement des enfants du Québec demeurés dans des familles biparentales lorsque l’enfant cible est âgé de 29 mois à six ans. Les trois questionnaires remplis par les participants concernent la satisfaction conjugale évaluée annuellement pendant cinq ans, la dissolution d’union lorsque l’enfant cible a 12 ans, et diverses variables sociodémographiques à contrôler. Cette étude identifie quatre trajectoires de satisfaction conjugale chez les mères et les pères. Ces trajectoires prédisent la dissolution d’union au-delà des variables sociodémographiques. Comparativement à la mesure transversale de satisfaction conjugale, les trajectoires de satisfaction conjugale permettent une meilleure prédiction de la dissolution d’union chez les parents.

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Table des matières

Résumé ... iii

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ... ix

Remerciements ... xi

Avant-propos ... xiii

Introduction ... 1

Revue de la littérature et objectifs ... 3

Patron évolutif de la satisfaction conjugale dans le temps ... 3

Première vague : études transversales et rétrospectives ... 3

Deuxième vague : premières études longitudinales et prospectives ... 4

Troisième vague : études de la trajectoire ou des trajectoires de satisfaction conjugale ... 5

Dissolution d’union et trajectoires de satisfaction conjugale ... 9

Objectifs ... 12 Méthode ... 13 Participants ... 13 Instruments ... 14 Type de famille ... 14 Satisfaction conjugale ... 14 Temps ... 15 Dissolution d’union ... 15 Variables à contrôler ... 15 Procédure ... 16 Résultats ... 19 Analyses descriptives ... 19

Premier objectif : trajectoires de satisfaction conjugale ... 21

Deuxième objectif : dissolution d’union et trajectoires de satisfaction conjugale ... 25

Discussion ... 31

Conclusion ... 37

Bibliographie ... 39

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vii

Liste des tableaux

Tableau 1. Statistiques descriptives de l’échantillon. ... 19 Tableau 2. Sélection du modèle chez les mères. ... 22 Tableau 3. Sélection du modèle chez les pères. ... 23 Tableau 4. Régression logistique de la dissolution d’union des mères et des pères en fonction des variables sociodémographiques et des trajectoires de satisfaction conjugale. ... 27 Tableau 5. Régression logistique de la dissolution d’union des mères et des pères en fonction des variables sociodémographiques et de la satisfaction conjugale en 2000. ... 29

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Liste des figures

Figure 1. Trajectoires de satisfaction conjugale des mères. ... 22 Figure 2. Trajectoires de satisfaction conjugale des pères. ... 24

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Remerciements

Je remercie tout d’abord mon directeur de recherche, monsieur Stéphane Sabourin, pour son soutien constant tout au long de ce mémoire doctoral. J’ai grandement apprécié sa rigueur scientifique, son intérêt pour la recherche clinique et ses qualités de pédagogue. Je remercie également monsieur Michel Boivin, mon codirecteur, pour son excellent appui théorique et méthodologique. Je tiens à exprimer ma gratitude à mesdames Catherine Bégin et Ginette Dionne, membres de mon comité d’encadrement, pour leurs commentaires qui ont su bonifier ce mémoire doctoral. Je suis également reconnaissante envers mesdames Hélène Paradis et Bei Feng pour leur aide et leurs conseils précieux quant à l’analyse statistique des données. Je remercie l’Institut de la statistique du Québec de m’avoir permis d’accéder aux données de l’Étude longitudinale du développement des enfants du Québec, ainsi que les participants de cette grande étude sur le développement de l’enfant. Je suis également reconnaissante envers les membres du Laboratoire de recherche et d’intervention auprès du couple et du Groupe de recherche sur l'inadaptation psychosociale chez l'enfant, où j’ai trouvé un milieu de travail qui a stimulé ma réflexion en rapport avec ces problématiques. Enfin, je tiens à remercier mes parents, mes amis et mon amoureux qui m’ont encouragée tout au long de mon doctorat, par leur écoute, leurs sourires et leur confiance en moi.

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Avant-propos

Léa Gosselin, auteure principale, a réalisé la conception de l’article avec la collaboration de Stéphane Sabourin, Ph.D., directeur du mémoire doctoral, et de Michel Boivin, Ph.D., codirecteur du mémoire doctoral, tous deux professeurs à l'École de psychologie de l'Université Laval. Elle a également effectué les analyses statistiques et interprété les résultats issus de ces analyses avec l’aide de statisticiennes, mesdames Hélène Paradis et Bei Feng. Enfin, l’auteure principale a écrit l’article en entier, de l’introduction à la conclusion. L’article intitulé Trajectoires de satisfaction conjugale et dissolution d’union est en voie d'être soumis au moment du dépôt du mémoire.

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Introduction

Une diminution notable de la durée des relations de couple et une diversification croissante des modes d’entrée en union (p. ex., cohabitation, mariage direct, mariage précédé d’une période de cohabitation) ont été rapportées par plusieurs sociologues, notamment au Canada (Ménard, Le Bourdais, & Hamplová, 2011), en France (Bozon & Héran, 2006) et aux États-Unis (Amato, 2012).

Au Canada, le taux de divorces est demeuré relativement stable de 1986 à 2008 et fluctue de 35 % à 42 %. En 20081, on prévoyait que 40.7 % des mariages se termineraient par un divorce avant le trentième

anniversaire de mariage (Ressources humaines et Développement des compétences Canada, 2012). Au Québec, l’indice synthétique de divortialité indique que 50 % des mariages se termineraient par un divorce si les tendances de divortialité de 2008 demeuraient constantes. Ce niveau se maintient depuis 1987, soit l’année suivant la modification à la Loi sur le divorce qui a réduit à un an la période requise de séparation. Le risque de divorcer varie en fonction de la durée du mariage, la divortialité étant la plus élevée après trois ans de mariage (32 pour 1 000 après trois ans comparativement à 4 pour 1 000 au-delà de 30 ans) (Institut de la statistique du Québec, 2011). Qui plus est, les premières unions libres seraient deux fois plus susceptibles de se terminer par une séparation que les premiers mariages, augmentant ainsi la probabilité des conjoints de vivre une seconde union et une seconde rupture. Par exemple, en 2001, la probabilité d’avoir vécu une seconde union (32.6 % versus 10.7 %) et une seconde rupture (13.2 % versus 4.0 %) était trois fois plus élevée chez les Canadiennes de 30 à 39 ans que chez leurs aînées dans la soixantaine. Ces tendances s’observeraient également chez les hommes (Statistique Canada, 2002). Le Québec ne fait pas exception à la règle : en 2002, la prévalence de ruptures s’élevait à 68 % chez les couples en union libre, relativement à 32 % chez les couples mariés (Beaupré & Cloutier, 2006).

En raison de ces chiffres préoccupants, l’identification des précurseurs psychosociaux des désunions a fait l’objet de plusieurs recherches. Parmi ces précurseurs, l’insatisfaction conjugale est le facteur prévisionnel le plus robuste de l’instabilité du couple (Karney & Bradbury, 1995) et elle correspond à une évaluation négative de la relation faite par les conjoints. L’insatisfaction conjugale s’expliquerait quant à elle par un ensemble de stresseurs relationnels (p. ex., violence conjugale, infidélité), de stratégies d’interaction dysfonctionnelles et une constellation de traits de personnalité mésadaptés. Aux États-Unis, 20 % des jeunes couples mariés (en moyenne, depuis deux ans) et 31 % des couples mariés depuis plus longtemps (en moyenne, depuis 15 ans) vivraient de la détresse conjugale (c.-à-d. un niveau élevé d’insatisfaction conjugale), selon des études

1 Les dernières données disponibles sur les divorces sont celles de l’année 2008. Le fichier de données sur

les divorces était produit par Statistique Canada qui a toutefois annoncé sa décision d’en cesser la production pour les années ultérieures.

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taxométriques récentes réalisées avec des échantillons populationnels représentatifs (Beach, Fincham, Amir, & Leonard, 2005; Whisman, Beach, & Snyder, 2008). Bien qu’il n’existe pas d’études taxométriques au Québec, les résultats observés auprès de l’importante cohorte de l’Étude longitudinale du développement des enfants du Québec (ÉLDEQ; Bégin, Sabourin, Boivin, Frénette, & Paradis, 2002) abondent en ce sens. En 2000, la prévalence de la détresse conjugale chez les parents québécois d’enfants âgés d’environ 29 mois était de 15 % chez les mères et de 20 % chez les pères, ce qui représente 27 % des couples où au moins l’un des parents rapportait une détresse conjugale. La détresse conjugale mérite une attention scientifique soutenue puisqu’elle est étroitement liée à la santé mentale (Proulx, Helms, & Buehler, 2007; Whisman, 2007), à la santé physique (Kiecolt-Glaser & Newton, 2001), à la satisfaction au travail (Rogers & May, 2003), de même qu’à diverses issues développementales négatives chez les enfants de ces unions (Amato, 2001; Amato & Anthony, 2014; Kitzmann, Gaylord, Holt, & Kenny, 2003). Malgré ces fortes associations, rarissimes sont les études basées sur des données longitudinales valides qui permettent de décrire et d’expliquer l’évolution de la détresse conjugale, incluant l’identification de ses conséquences sur la dissolution d’union. C’est cette lacune que la présente recherche entend combler.

Depuis les dernières décennies, les chercheurs ont tenu pour acquis que la satisfaction conjugale décroît lentement ou brusquement au fil du temps en fonction d’une série de variables et que cette décroissance explique la rupture des unions (pour des revues de la littérature, voir Bradbury, Fincham, & Beach, 2000; Glenn, 1990; Hicks & Platt, 1970; Karney & Bradbury, 1995; Spanier & Lewis, 1980). L’objectif principal du présent mémoire est de vérifier s’il existe plus d’une trajectoire évolutive. Si cette hypothèse d’une diversité de trajectoires s’avère exacte, il conviendra alors de cerner l’issue (soit le divorce ou la séparation) de chacune de ces trajectoires. L’atteinte de ces deux objectifs nécessite une recension des travaux empiriques effectués dans le domaine. Cette recension portera d’abord sur les modèles évolutifs de la détresse conjugale, pour ensuite s’attarder à leur relation avec la dissolution d’union.

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Revue de la littérature et objectifs

Patron évolutif de la satisfaction conjugale dans le temps

La satisfaction conjugale (ou bonheur conjugal) peut se définir comme une évaluation subjective par les conjoints de leur relation (Fincham & Beach, 2006; Glenn, 1990). Les modèles descriptifs de son évolution ne semblent pas faire consensus. Trois vagues d’études qui correspondent à des périodes historiques différentes ont proposé respectivement trois modèles : un modèle curvilinéaire, un modèle linéaire négatif et, plus récemment, un modèle en trajectoires.

Première vague : études transversales et rétrospectives

Les premières études transversales et rétrospectives, menées principalement avant les années 1980, ont comparé la satisfaction conjugale d’individus classés en huit stades du cycle de la vie familiale (Duvall, 1957) : le couple sans enfants, la famille avec de très jeunes enfants, la famille avec des enfants d’âge préscolaire, la famille avec des enfants d’âge scolaire, la famille avec des adolescents, le départ des enfants, le nid vide et le couple à la retraite. Elles concluent généralement en une relation curvilinéaire (courbe en U) entre le stade du cycle de la vie familiale et la satisfaction conjugale, où le plus bas niveau de satisfaction conjugale est retrouvé chez les familles avec des enfants d’âge scolaire ou des adolescents (S. A. Anderson, Russell, & Schumm, 1983; Burr, 1970; Figley, 1973; Rollins & Feldman, 1970). Occasionnellement, des relations autres que curvilinéaires ont été obtenues (Axelson, 1960; Blood & Wolfe, 1960; Luckey, 1966), comme une relation linéaire descendante ou l’absence de relation. La diversité des instruments de mesure retenus (Rollins & Cannon, 1974), les composantes étudiées du cycle de la vie familiale (Nock, 1979; Spanier, Sauer, & Larzelere, 1979) et la nature des échantillons recrutés (Spanier, Lewis, & Cole, 1975) comptent parmi les facteurs pouvant expliquer ces différents types de relation observés. En outre, il apparaît que la courbe en U de la satisfaction conjugale pourrait constituer un artefact des études transversales et rétrospectives (Karney & Frye, 2002; Vaillant & Vaillant, 1993; VanLaningham, Johnson, & Amato, 2001), en raison d’un biais rétrospectif, d’un effet de cohorte ou de l’attrition des couples malheureux par le divorce. En effet, les individus qui se remémorent rétrospectivement et de façon transversale leur satisfaction conjugale passée se rappellent des déclins survenus tôt dans leur relation et qui sont suivis de récentes améliorations, bien que les données prospectives de ces mêmes individus montrent que leur satisfaction tend à décliner linéairement dans le temps. Également, les plus vieilles cohortes d’individus mariés rapportent des niveaux plus élevés de bonheur conjugal que les plus jeunes cohortes, notamment en raison de leurs attitudes et croyances envers le mariage (p. ex., le mariage pour la vie). Enfin, la courbe en U obtenue dans les études transversales pourrait être attribuable au fait que les couples malheureux divorcent au fil du temps et ne sont plus échantillonnés dans

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ces études, résultant en une augmentation artefactuelle du bonheur conjugal parmi les participants mariés depuis longtemps.

Deuxième vague : premières études longitudinales et prospectives

Les premières études longitudinales et prospectives menées entre 1980 et 2000 se sont intéressées aux transitions liées au mariage (Kurdek, 1991, 1998, 1999; Pineo, 1961) et surtout à la parentalité. Ces études portant sur la transition à la parentalité sont caractérisées par un petit nombre de temps de mesure (entre 2 et 4) et de participants (une centaine de couples en moyenne). Elles révèlent généralement un déclin de la satisfaction conjugale pour les deux parents entre le troisième trimestre de la grossesse et la période postpartum. Ces études peuvent être réparties en deux groupes.

Dans le premier groupe d’études, la satisfaction conjugale de nouveaux parents a été mesurée avant et après la naissance de leur premier enfant, ce qui amène une certaine confusion dans l’interprétation des résultats. En effet, en l’absence d’un groupe de comparaison, il est impossible de vérifier si le déclin de la satisfaction conjugale observé chez les nouveaux parents est attribuable à un changement normatif dans le mariage partagé par les couples sans enfants ou à des modifications spécifiquement associées à la transition à la parentalité (Ahlborg, Misvaer, & Möller, 2009; Belsky, Lang, & Rovine, 1985; Belsky & Rovine, 1990; Belsky, Spanier, & Rovine, 1983; Feldman & Nash, 1984; Klinnert, Gavin, Wamboldt, & Mrazek, 1992; Miller & Sollie, 1980; Waldron & Routh, 1981). Selon une méta-analyse de 37 études prospectives ayant échantillonné de nouveaux parents (Mitnick, Heyman, & Smith Slep, 2009), il semble toutefois possible qu’un faible déclin significatif de la satisfaction conjugale soit observable chez les femmes (g = -0.27) et les hommes (g = -0.23) entre la grossesse et la période post-partum, ce déclin étant un peu plus marqué dans les études ayant suivi les couples après la première année de vie de l’enfant.

Dans le deuxième groupe d’études, des couples avec ou sans enfants ont été échantillonnés, afin de mieux départager les effets du mariage de ceux de la parentalité. Certaines de ces études indiquent que ces couples voient leur satisfaction conjugale décroître de façon équivalente durant les premières années de mariage (Kurdek, 1993a; MacDermid, Huston, & McHale, 1990; McHale & Huston, 1985; Mitnick et al., 2009; L. K. White & Booth, 1985). Cependant, en comparaison aux couples sans enfants, les parents rapportent de façon générale une moins grande satisfaction conjugale. La taille d’effet associée à cette différence est toutefois faible (d = -.19, r = -.10) (voir la méta-analyse deTwenge, Campbell, & Foster, 2003).

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Troisième vague : études de la trajectoire ou des trajectoires de satisfaction

conjugale

Dans leur revue de la littérature portant sur la satisfaction conjugale dans les années 90, Bradbury et al. (2000) soulignent que l’un des développements les plus prometteurs dans la conceptualisation et la mesure de la qualité des relations de couple s’appuie sur la notion de trajectoires distinctes de satisfaction conjugale. Selon cette perspective, la satisfaction conjugale peut être conceptualisée comme un phénomène évolutif suivant une trajectoire qui reflète les fluctuations des évaluations de la satisfaction des conjoints dans le temps. Cette perspective renforce l’importance de la recherche longitudinale en plusieurs vagues, contrairement aux devis longitudinaux à deux vagues qui sont jusqu’alors prédominants (voir la section « Deuxième vague : premières études longitudinales et prospectives »).

En dépit de ces recommandations, un très petit nombre de chercheurs ont utilisé les analyses des courbes de croissance pour évaluer la variabilité individuelle dans les niveaux initiaux et les taux de changements de la satisfaction conjugale durant la transition à la parentalité (Lawrence, Rothman, Cobb, & Bradbury, 2010). Certains chercheurs ont seulement échantillonné de nouveaux parents et rapportent des résultats divergents. À titre d’exemple, Lawrence, Nylen et Cobb (2007) ont mesuré 56 couples de nouveaux parents à trois reprises (1 mois prénatal, 3 et 6 mois postpartum) et observent un déclin marqué de la satisfaction conjugale pour les hommes et les femmes au postpartum, suivi d’une stabilisation chez les hommes et d’un déclin léger chez les femmes. Étudiant les couples de nouveaux parents sur une plus longue période, Cox, Paley, Burchinal et Payne (1999) ont obtenu un patron évolutif en U de la satisfaction conjugale durant la transition à la parentalité, c’est-à-dire que les niveaux élevés de satisfaction conjugale avant la naissance du premier enfant diminuent au début de la période postpartum (à 3 mois et à 12 mois) pour ensuite augmenter légèrement (à 24 mois). D’autres chercheurs ont échantillonné des couples sans enfants et des couples parentaux. Ils concluent que les parents montrent un déclin plus soudain, plus fréquent et plus prononcé de leur satisfaction conjugale (Doss, Rhoades, Stanley, & Markman, 2009; Lawrence, Rothman, Cobb, Rothman, & Bradbury, 2008 ; Shapiro, Gottman, & Carrére, 2000). Toutefois, les analyses de courbes de croissance tracent une trajectoire moyenne, homogène, de l’évolution de la satisfaction conjugale dans le temps, sans égard aux sous-groupes potentiellement présents dans la population. Or, un petit nombre d’études récentes laisse croire en la présence de certains groupes d’individus présentant des trajectoires distinctes de satisfaction conjugale.

Huit études de trajectoires de satisfaction conjugale ont été publiées. Trois de ces études s’appuient sur les données de la Marital Instability over the Life Course Study, une cohorte nationale basée sur un échantillon probabiliste dont les participants (N = 2 033) représentaient en 1980 l’ensemble des individus mariés, de 55 ans ou moins et résidant aux États-Unis. Ces participants sont évalués à six reprises de 1980 à 2000. La

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thèse doctorale d’Anderson (2007) porte sur un sous-groupe de l’échantillon (n = 284 sur 2 033), soit les individus mariés tout au long de ces 20 années et présentant en 1980 un niveau de bonheur conjugal sous la moyenne observée chez l’ensemble des participants. L’auteur identifie trois trajectoires de bonheur conjugal chez ces individus : (1) une trajectoire de satisfaction élevée2 et ascendante (46,3 %), (2) une trajectoire de

satisfaction modérée et constante (43,2 %), et une trajectoire de satisfaction faible et en déclin (10,5 %). Anderson, Rysin et Doherty (2010) obtiennent cinq trajectoires de bonheur conjugal chez l’ensemble des individus continuellement mariés au cours de ces 20 ans (n = 706 sur 2 033), soit des trajectoires de satisfaction : (1) très élevée et constante (21,5 %), (2) élevée et constante (46,1 %), (3) curvilinéaire (10,6 %), (4) faible et constante (18,3 %), ainsi que (5) faible et en déclin (3,6 %). Enfin, Kamp Dush, Taylor et Kroeger (2008) observent trois trajectoires de bonheur conjugal chez les individus dont le bonheur conjugal a été évalué au premier temps de mesure (n = 1998 sur 2 034), soit des trajectoires de satisfaction : (1) élevée et constante (38 %), (2) modérée et globalement constante (41 %), ainsi que (3) faible et en déclin durant les douze premières années de l’étude et en hausse durant les huit dernières années (21 %). Contrairement à Anderson et al. (2010) qui n’ont retenu que les individus continuellement mariés et qui ont utilisé le nombre d’années de mariage comme unité temporelle, Kamp Dush et al. (2008) ont utilisé les données de tous les individus de la Marital Instability over the Life Course Study et l’année civile du début de l’étude comme unité temporelle. Or, comme Anderson et al. (2010) le rapportent, la généralisation de la recherche longitudinale repose sur une unité temporelle qui doit être interprétable. Par conséquent, dans l’étude d’un phénomène conjugal, les années de mariage semblent plus appropriées que les années civiles pour rendre compte de l’évolution de la satisfaction conjugale.

Birditt, Hope, Brown et Orbuch (2012) ont examiné la satisfaction conjugale de 373 couples (dont 199 couples afro-américains) durant les 16 premières années de mariage à six reprises de 1986 à 2001. Les femmes se répartissent en quatre trajectoires : (1) faible (faible niveau initial et déclin marqué; 7 %), (2) modérée (niveau initial modéré et trajectoire curvilinéaire; 39 %), (3) modérée-élevée (niveau initial élevé et faible déclin; 30 %), et (4) élevée (niveau initial très élevé et faible déclin; 24 %). Quant aux hommes, ils peuvent être catégorisés dans trois trajectoires : (1) faible (faible niveau initial et trajectoire curvilinéaire; 9 %), (2) modérée (niveau initial modéré et déclin; 61 %), et (3) élevée (niveau initial élevé et déclin léger; 31 %).

Lavner et Bradbury (2010) ont mesuré la satisfaction conjugale chez 232 couples nouvellement mariés à huit reprises sur quatre ans. Les résultats illustrent cinq trajectoires de satisfaction conjugale : (1) élevée et

2 Les individus inclus dans la première trajectoire ont les niveaux initiaux les plus élevés de bonheur conjugal

(M = 27,77) parmi les trois trajectoires, d’où le terme « satisfaction élevée ». Toutefois, comparativement au niveau initial de bonheur conjugal chez tous les individus continuellement mariés de la cohorte (heureux et malheureux) (M = 29,24), les individus de la première trajectoire ont un niveau initial de bonheur conjugal légèrement sous la moyenne.

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7 constante (12,9 % des hommes et 20,1 % des femmes), (2) modérément élevée et en léger déclin (35,7 % et 33,4 %), (3) modérée et en léger déclin (32,4 % et 28,0 %), (4) modérée et en déclin substantiel (12,7 % et 12,4 %), et (5) faible et en déclin substantiel (6,4 % et 6,1 %). Dans un second article (Lavner, Bradbury, & Karney, 2012), ces auteurs rapportent que les études précédentes portant sur les trajectoires de satisfaction conjugale (J. R. Anderson et al., 2010; Kamp Dush et al., 2008; Lavner & Bradbury, 2010) observent généralement des niveaux élevés et stables de bonheur conjugal chez la majorité des couples, mais qu’approximativement 20 % des couples vivraient de faibles niveaux initiaux de bonheur conjugal et des déclins modérés à substantiels de la satisfaction conjugale dans le temps. Ce second article a permis de reproduire les résultats des études précédentes avec une autre mesure de satisfaction conjugale et un autre échantillon de couples de nouveaux mariés (N = 251) évalués à huit reprises sur quatre ans. Ainsi, trois trajectoires de satisfaction conjugale sont retrouvées chez les hommes et les femmes : (1) un niveau initial élevé et une trajectoire stable (58 % des hommes et 69 % des femmes), (2) un niveau initial modérément élevé et un faible déclin linéaire (29 % et 21 %) et un faible niveau initial et un déclin substantiel de satisfaction (13 % et 10 %).

Deux dernières études ont examiné les sous-groupes potentiels de changement de la satisfaction conjugale chez des parents. Desrosiers et Simard (2010) ont dressé des trajectoires de satisfaction conjugale à partir des données de l’ÉLDEQ. Dans cette enquête longitudinale et prospective réalisée par l’Institut de la Statistique du Québec, 2 120 enfants nés en 1997-1998 ont été évalués annuellement de 1998 à 2006, puis de façon bisannuelle entre 2006 et 2010. Chez les mères des familles biparentales de 1998 à 20043,

quatre trajectoires évolutives de satisfaction conjugale ont été mises en lumière : (1) satisfaction élevée et constante (34 %), (2) satisfaction modérée et constante (42 %), (3) insatisfaction modérée et déclin de la satisfaction dans le temps (19 %), et (4) insatisfaction élevée et déclin de la satisfaction dans le temps (4 %). Enfin, Don et Mickelson (2014) ont identifié les trajectoires de satisfaction conjugale chez 206 nouveaux parents évalués à quatre reprises durant la transition à la parentalité (troisième trimestre de grossesse, 1 mois, 4 mois et 9 mois postpartum). La majorité des mères (79.4 %) débutent avec une satisfaction conjugale élevée et vivent des déclins modérés de satisfaction, alors qu’un second groupe de mères (20.6 %) rapportent une satisfaction conjugale modérée durant la grossesse et accusent des déclins plus marqués après la transition à la parentalité. Trois trajectoires sont observées chez les pères. La majorité des pères (51.0 %) ont une satisfaction conjugale élevée qui décline modérément après la naissance de leur premier enfant, alors que les autres pères vivent des déclins prononcés de leur satisfaction conjugale après des niveaux initiaux élevés (38.3 %) ou modérés (10.7 %).

3 Les parents demeurés dans des familles biparentales entre 1998 et 2004 représentent 72,2 % de l’ensemble

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Les trajectoires de satisfaction conjugale constituent donc une voie prometteuse pour décrire les dynamiques conjugales dans le temps puisqu’elles sont les seules à traduire les variations prototypiques des échantillons populationnels. De plus, elles paraissent confirmer et englober les précédents modèles (vagues 1 et 2) qui identifiaient des patrons curvilinéaire, linéaire négatif et parfois stable de la satisfaction conjugale dans le temps. Toutefois, les huit études de trajectoires de satisfaction conjugale présentent quelques limites. Premièrement, six d’entre elles reposent sur des échantillons d’individus mariés et américains (J. R. Anderson, 2007; J. R. Anderson et al., 2010; Birditt et al., 2012; Kamp Dush et al., 2008; Lavner & Bradbury, 2010; Lavner, Bradbury, et al., 2012), ce qui limite la généralisation des résultats à la population québécoise où plus du quart des familles est formé de couples en union libre (L'Institut Vanier de la famille, 2010). De plus, les nouveaux parents ont peu été étudiés explicitement (mis à part dans les études de Desrosiers & Simard, 2010; Don & Mickelson, 2014), alors qu’il a été établi que leur satisfaction conjugale est plus faible que celle des couples sans enfants (Twenge et al., 2003). Deuxièmement, les résultats pourraient traduire un effet de cohorte, puisque trois de ces études ont utilisé les données de la Marital Instability over the Life Course Study (J. R. Anderson, 2007; J. R. Anderson et al., 2010; Kamp Dush et al., 2008). Troisièmement, ces études ont surtout échantillonné des individus mariés plutôt que des couples, ce qui ne permet pas de comparer les partenaires d’un même couple, alors que Desrosiers et Simard (2010) ont décidé de se concentrer uniquement sur les données des mères et de ne pas traiter celles des pères. Or, Lavner et Bradbury (2010) rapportent que les hommes et les femmes semblent se répartir différemment dans les différentes trajectoires de satisfaction conjugale. Les individus appartiennent généralement à une trajectoire de satisfaction conjugale similaire à celle leur partenaire (Don & Mickelson, 2014). De plus, les trajectoires élevées de satisfaction se retrouvent généralement chez les deux partenaires du couple, alors que les faibles trajectoires sont présentes chez l’un d’eux (Birditt et al., 2012). Quatrièmement, certains échantillons de ces études sont souvent d’une taille relativement petite, comme l’étude de Don and Mickelson (2014).

Pour pallier ces limites et étudier la pertinence de l’utilisation d’un modèle de trajectoires de la satisfaction conjugale, il serait important de vérifier la présence de ce modèle chez des individus d’une autre population, provenant d’une cohorte plus récente, en incluant les deux partenaires du couple et en ayant recours à un grand échantillon. Or, les données de l’ÉLDEQ permettraient de compenser ces limites, puisque cette vaste cohorte représentative des enfants nés au Québec en 1997-1998 a mesuré simultanément la satisfaction conjugale des mères et des pères (mariés ou en union libre) lorsque l’enfant cible est âgé de 29 mois à 6 ans. Ainsi, la présente étude pourrait étendre les travaux de Desrosiers et Simard (2010) aux pères et ceux de Don et Mickelson (2014), aux années suivant à la transition à la parentalité.

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Dissolution d’union et trajectoires de satisfaction conjugale

Plusieurs conséquences semblent découler du divorce, tant chez les partenaires du couple que chez leurs enfants. Comparativement aux individus mariés, les individus divorcés rapportent de plus faibles niveaux de bien-être psychologique et de satisfaction sexuelle, ainsi que des niveaux plus élevés de problèmes de santé, de mortalité, d’isolation sociale, de difficultés économiques et de difficultés dans l’éducation des enfants (pour des recensions des écrits, voir Amato, 2000, 2010; Kitson & Morgan, 1990). De même, une documentation abondante témoigne des relations négatives entre le divorce et le bien-être des enfants. Ainsi, un plus faible niveau de bien-être dans plusieurs domaines (réussite scolaire, comportement, ajustement psychologique, concept de soi, ajustement social, relation parent-enfant) est observé chez les enfants de familles divorcées, comparativement à ceux de familles biparentales intactes (Amato, 2001; Amato & Anthony, 2014; Amato & Keith, 1991b). Ces relations avec le bien-être psychologique, familial, socioéconomique et physique paraissent persister à l’âge adulte (Amato & Keith, 1991a). Qui plus est, le nombre de transitions familiales semble aussi associé négativement aux indices d’ajustement scolaire (Cooper, Osborne, Beck, & McLanahan, 2011; Heard, 2007), comportemental (Brown, 2006; Cavanagh, 2008; Cavanagh & Huston, 2006; Magnuson & Berger, 2009; Osborne & McLanahan, 2007), social (Cavanagh & Huston, 2008), sexuel et amoureux des enfants et des adolescents (Albrecht & Teachman, 2003; Cavanagh, Crissey, & Raley, 2008; Wu & Martinson, 1993; Wu & Thomson, 2001). Compte tenu de l’ensemble de ces conséquences, il est important d’étudier les déterminants du divorce, surtout chez les partenaires ayant des enfants susceptibles de vivre eux aussi les effets négatifs d’une désunion.

Dans une revue des études longitudinales sur le mariage, Karney et Bradbury (1995) identifient les différentes variables associées à la satisfaction et à la stabilité conjugales, ainsi que leur taille d’effet. Ils observent que la satisfaction conjugale est l’une des variables ayant le plus grand effet sur la stabilité conjugale. Cependant, la taille d’effet n’est pas particulièrement grande (la taille d’effet totale pour la satisfaction conjugale et sexuelle s’étend de .06 à .42). De plus, il existe des exceptions à cette relation, car, d’une part, certains couples insatisfaits demeurent mariés (Clements, Stanley, & Markman, 2004; Davila & Bradbury, 2001; Heaton & Albrecht, 1991; Rogge, Bradbury, Hahlweg, Engl, & Thurmaier, 2006) et, d’autre part, le divorce survient même chez des couples satisfaits (Amato & Hohmann-Marriott, 2007; Lavner & Bradbury, 2012). Enfin, cette association repose principalement sur des études ayant examiné la satisfaction conjugale mesurée à un ou deux temps de mesure et la décision subséquente des conjoints de rompre leur union (Gottman & Levenson, 1992, 2000; Kurdek, 1993b). Par exemple, White et Booth (1991) ont mesuré à trois reprises (1980, 1983, 1988) un échantillon national de personnes mariées (N = 2 033). Ils observent que les répondants ayant divorcé peu de temps après leur mariage (au cours des huit premières années de mariage) rapportent un score significativement plus élevé de bonheur conjugal en 1980 que ceux ayant divorcé plus tardivement

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10

(après huit ans de mariage). Les auteurs concluent que les personnes dans les mariages durables sont moins susceptibles de divorcer, à moins que leur mariage soit vraiment malheureux.

C’est ainsi que Rodrigues, Hall, & Fincham (2006), dans leur revue de la littérature sur les prédicteurs du divorce, suggèrent comme piste de recherche future que « perhaps it is not marital satisfaction in an absolute sense that predicts divorce, but, rather, the trajectory of marital satisfaction throughout the course of a relationship ». Pour supporter leur hypothèse, les auteurs citent les résultats de l’étude de Karney et Bradbury (1997). Grâce à une analyse des courbes de croissance, ces derniers ont trouvé que le taux de changement est un médiateur de l’association entre le niveau initial de satisfaction conjugale et le divorce. Autrement dit, comparativement aux individus satisfaits, les conjoints qui commencent leur mariage avec de faibles niveaux de satisfaction conjugale expérimentent des déclins plus prononcés de leur satisfaction conjugale et, ultimement, des taux plus élevés de divorce. Par la suite, quelques études de trajectoires ont confirmé que les taux de divorce diffèrent significativement entre les trajectoires de satisfaction conjugale. Par exemple, Lavner et Bradbury (2010) rapportent que les taux de divorce chez les hommes s’étendent de 4 % (pour la trajectoire de satisfaction conjugale élevée et constante) à 36 % (pour la trajectoire faible et en déclin substantiel) après quatre ans de mariage4, alors qu’ils se situent respectivement entre 4 % et 54 % chez les femmes. De même,

dans la seconde étude des auteurs (Lavner, Bradbury, et al., 2012), ils confirment que les trajectoires de satisfaction conjugale diffèrent quant à leur taux de dissolution, tant chez les hommes (où la dissolution varie de 13 à 33 %) que chez les femmes (11 % à 46 %). Enfin, Birditt et al. (2012) notent aussi que les hommes et les femmes appartenant à la trajectoire faible de satisfaction conjugale détiennent les taux les plus élevés de divorce, suivis des hommes et des femmes dans la trajectoire modérée, comparativement aux partenaires dans la trajectoire élevée.

Les trajectoires de satisfaction conjugale semblent être une voie prometteuse pour prédire la dissolution d’union, puisqu’elles tiennent compte à la fois des niveaux initiaux de satisfaction conjugale et des changements de cette variable dans le temps. Toutefois, seulement trois des huit études de trajectoires de satisfaction conjugale ont vérifié les différences entre les taux de divorce des trajectoires, mais leurs résultats ne sont pas nécessairement généralisables à la population québécoise et aux nouveaux parents. De plus, ces études n’ont pas contrôlé pour d’autres prédicteurs du divorce, afin de s’assurer que les trajectoires de satisfaction conjugale offrent une prédiction de la dissolution d’union plus valide. Parmi ces prédicteurs, les facteurs démographiques suivants sont fréquemment associés au divorce (Amato, 2010; Braver & Lamb, 2013; Rodrigues et al., 2006; L. K. White, 1990) : le jeune âge, le faible niveau de scolarité, la cohabitation avant le mariage, le faible revenu du ménage, le remariage, la naissance d’enfants avant le mariage (issus de la présente union ou d’une union précédente) et la courte durée du mariage. Certaines de ces caractéristiques

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11 démographiques ont même été associées à la probabilité que l’enfant cible de l’ÉLDEQ vive la séparation précoce de ses parents, entre sa naissance et l’âge d’environ 29 mois (Marcil-Gratton, Le Bourdais, & Lapierre-Adamcyk, 2002). Ainsi, la probabilité des enfants de voir leurs parents se séparer précocement est étroitement associée à l’âge des mères au moment de la naissance de l’enfant (association négative), à l’écart de scolarité entre les parents (niveau supérieur pour la mère ou aucun écart), au type d’union au sein de laquelle l’enfant naît (mariage précédé d’une union libre ou union libre), au revenu du ménage (moins de 20 000 $), aux unions antérieures des parents (parents ayant tous deux vécu en couple avec un autre partenaire), aux enfants issus d’une union antérieure (vivant à l’extérieur du ménage) et à la durée de l’union à la naissance de l’enfant (moins de deux ans après la mise en union des parents). Conséquemment, les facteurs démographiques seront pris en compte dans la présente étude, contrairement aux précédentes études de trajectoires. De surcroît, il serait important de vérifier si la prédiction de la dissolution d’union réalisée à partir des trajectoires de satisfaction conjugale est supérieure à celle basée sur une mesure transversale de la satisfaction conjugale, ce qui n’a jamais été réalisé jusqu’à présent. En effet, cela permettrait de déterminer si les données longitudinales à plusieurs temps de mesure, plus coûteuses et difficiles à obtenir que les mesures transversales, sont à privilégier plutôt que les mesures uniques de la satisfaction conjugale, généralement utilisées dans le domaine pour prédire la dissolution d’union. Le premier temps de mesure de la période d’observation a été choisi (évaluation effectuée en 2000, lorsque l’enfant cible était âgé de 29 mois) parmi les autres temps de mesure, puisqu’il permet de faire la prédiction la plus hâtive de la dissolution d’union. Enfin, seulement une étude de trajectoire s’est intéressée à la concordance entre les trajectoires de satisfaction conjugale des hommes et des femmes. Dans l’étude de Lavner & Bradbury (2010), 10.8 % des couples où l’homme et la femme sont dans une même trajectoire divorcent après quatre ans de mariage5, contre 9.5 % des couples où l’homme est dans une trajectoire plus faible que la femme et 17.7 %

des couples où la femme est dans une trajectoire plus faible que l’homme. Ces différences ne sont pas statistiquement significatives, ce qui pourrait s’expliquer par l’utilisation d’un petit échantillon (N = 232 couples). Cependant, des auteurs ont obtenu des résultats contraires à ceux de Lavner & Bradbury (2010) en utilisant les données de la National Survey of Families and Households, une étude ayant mesuré à deux reprises 1 721 couples (1987-1988; 1992-1994). De fait, Gager et Sanchez (2003) observent que les couples où aucun des conjoints ne rapporte que le mariage est « très heureux » ont plus de chances (320 %) de divorcer ou de se séparer que les couples qui s’entendent pour dire que leur mariage est « très heureux ». Parmi les partenaires qui divergent quant à leur évaluation du bonheur conjugal, les couples où l’homme est plus malheureux que la femme ont une plus forte probabilité de vivre la dissolution conjugale, alors que ceux où l’homme est plus heureux que la femme ont une probabilité similaire de connaître la dissolution conjugale par rapport aux couples très heureux. Comme les résultats entre ces deux études divergent, il serait

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intéressant de vérifier à nouveau les taux de divorce selon la concordance entre les trajectoires de satisfaction conjugale des mères et des pères, en utilisant cette fois un grand échantillon représentatif.

Objectifs

Le premier objectif de ce mémoire est de décrire les trajectoires de satisfaction conjugale chez un vaste échantillon de parents québécois de l’ÉLDEQ demeurés dans des familles biparentales lorsque l’enfant cible est âgé de 29 mois à 6 ans. Le deuxième objectif est d’en cerner l’issue (soit le divorce ou la séparation). Deux sous-objectifs s’y rattachent. D’une part, cette étude tente de vérifier si l’appartenance à une trajectoire de satisfaction conjugale permet de prédire la survenue de la dissolution d’union au-delà de certaines variables sociodémographiques, généralement associées à la dissolution d’union, et si cette prédiction est supérieure à celle réalisée avec une mesure transversale de la satisfaction conjugale au premier temps de mesure de la période d’observation. D’autre part, elle vise à examiner les taux de dissolution d’union selon la concordance entre les trajectoires des mères et des pères.

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Méthode

Les données de l’ÉLDEQ sont utilisées pour répondre aux objectifs du présent mémoire. Seuls les participants, les instruments et la procédure relatifs à ce mémoire sont décrits dans la prochaine section. Des renseignements additionnels sur l’ÉLDEQ sont accessibles sur son site Web (ÉLDEQ, 2011).

Participants

La population visée par l’ÉLDEQ est composée de l’ensemble des enfants âgés de 59 ou 60 semaines d’âge gestationnel6 à chaque vague de collecte du volet7 1998, issus de naissances simples et nés de mères

résidant au Québec. Les enfants sont exclus lorsque (1) la durée de la grossesse est manquante ou lorsque (2) les mères vivent sur des réserves indiennes et dans les régions sociosanitaires 10 (Nord-du-Québec), 17 (territoire cri) et 18 (territoire inuit). L’échantillon conservé pour le suivi longitudinal est de 2 120 enfants (ou ménages dans ce texte); il était représentatif de la population visée en 1998.

Puisque le présent mémoire doctoral porte sur les trajectoires de satisfaction conjugale et la dissolution d’union, certains de ces 2 120 ménages ont été exclus dans la présente étude. Ce choix repose sur la complexité de l’étude des variables conjugales à partir des données d’une recherche portant sur le développement de l’enfant. En effet, dans le domaine de la recherche auprès du couple, les participants ne sont plus évalués après leur dissolution, ce qui fournit l’assurance que les variables mesurées concernent uniquement les deux partenaires du couple étudié. Au contraire, dans l’ÉLDEQ, la mère (et le nouveau conjoint de la mère) ou le père (et la nouvelle conjointe du père) continuent d’être évalués après la dissolution d’union des parents biologiques de l’enfant cible, notamment en ce qui a trait à leur satisfaction conjugale. Il est ainsi impossible de tracer des trajectoires de satisfaction conjugale en faisant fi du type de famille à l’enquête, car ces trajectoires pourraient inclure la satisfaction d’un parent biologique quant à sa relation conjugale avec plusieurs partenaires distincts. En bref, afin de s’assurer que la satisfaction conjugale porte sur le même partenaire tout au long des trajectoires, seules les familles biparentales (intactes ou recomposées) ont été conservées pour les analyses.

Deux méthodes ont été utilisées pour retenir ces familles biparentales. Dans la première méthode, l’échantillon conservé pour les analyses représente les mères (n = 1 063) et les pères (n = 998) demeurés dans des familles biparentales (intactes ou recomposés) tout au long des trajectoires de satisfaction conjugale, soit lorsque l’enfant cible est âgé de 29 mois à 6 ans. Ces mères et ces pères forment 995 couples (où les données de la mère et du père sont disponibles) et 1 066 ménages (où les données de la mère ou du père

6 L’âge gestationnel représente la somme de la durée de gestation et de l’âge chronologique du bébé. Un âge

gestationnel de 59 ou 60 semaines correspond à un âge chronologique d’environ 5 mois.

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14

sont disponibles)8. Une deuxième méthode a été utilisée pour vérifier si les trajectoires demeuraient les

mêmes en incluant les couples divorcés au cours des trajectoires. D’abord, seules les familles biparentales (intactes ou recomposées) lors du premier temps de mesure de la satisfaction conjugale (lorsque l’enfant cible est âgé de 29 mois) ont été retenues. Pour les temps de mesure subséquents de la satisfaction conjugale (lorsque l’enfant cible est âgée de 41 mois, 4 ans, 5 ans et 6 ans), la satisfaction conjugale a été recodée comme une donnée manquante lorsque le type de famille à l’enquête était manquant ou non biparental. Des trajectoires de satisfaction conjugale ont été tracées en acceptant jusqu’à trois données manquantes par parent (n = 1 608 mères et 1 516 pères). Ainsi, cette deuxième procédure a permis d’inclure les parents biologiques de l’enfant cible ayant mis fin à leur union au cours des trajectoires.

Instruments

Type de famille

Pour retenir uniquement les familles biparentales (intactes ou recomposées), la variable « type de famille à l’enquête » a été utilisée. Elle comprenait initialement six catégories de famille : (1) la famille biparentale intacte qui inclut l’enfant cible et ses deux parents biologiques sans enfants issus d’unions antérieures des parents, la famille biparentale recomposée qui inclut l’enfant cible, ses deux parents biologiques et des enfants issus d’unions antérieures (2) de la mère seulement, (3) du père seulement ou (4) de la mère et du père, (5) la famille recomposée qui inclut l’enfant cible, un parent biologique et le nouveau conjoint du parent biologique et (6) la famille monoparentale qui inclut l’enfant cible et un parent biologique. Par la suite, le type de famille a été recodé en deux catégories pour identifier les familles où les deux parents biologiques sont présents : la famille biparentale intacte ou recomposée (regroupant les catégories 1 à 4) et la famille non biparentale (les catégories 5 et 6). Seules les familles biparentales (intactes ou recomposées) ont été conservées pour les analyses.

Satisfaction conjugale

La satisfaction conjugale est évaluée à l’aide de l’échelle d’ajustement dyadique en huit items (DAS-8), une version abrégée de l’échelle originale à 32 items (Spanier, 1976) traduite en français (Baillargeon, Dubois, & Marineau, 1986). Dans la DAS-8, les huit items sont mesurés sur une échelle de type Likert de six à sept points. Ces items portent sur (voir Annexe A) : (1) l’accord au sujet des manifestations d’affection, (2) le fait d’avoir déjà envisagé un divorce, une séparation ou une rupture, (3) la perception que les choses vont bien entre les partenaires, (4) les confidences au partenaire, (5) les regrets de s’être marié, de vivre ensemble ou d’être en relation, (6) la fréquence des discussions calmes avec le partenaire, (7) la fréquence du travail avec

8 Autrement dit, la banque de données ne contenait pas de renseignements sur l’autre parent pour trois pères

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15 le partenaire, (8) le degré de bonheur dans le couple. À partir de ces huit items, un score global a été calculé sur une échelle allant de 0 (très insatisfait) à 41 (très satisfait), le seuil critique de la détresse conjugale étant fixé à 28 sur la base de sa signification clinique (c’est-à-dire en comparant une population clinique en thérapie conjugale à la population générale). Une série d’analyses (analyses d’items non paramétriques, analyses factorielles exploratoires et confirmatoires, analyses de fidélité dont les résultats peuvent être obtenus auprès des auteurs de la publication) a permis de vérifier les qualités psychométriques de la DAS-8 lors du volet 2000 (Bégin et al., 2002).

Temps

Pour l’analyse des trajectoires, le temps est une variable importante à préciser. Nagin et Tremblay (2001) soutiennent que : « it is important that time be measured from a natural starting point like commencement of

treatment for depression. Otherwise, a trajectory in time is not interpretable. ». Le début de l’ÉLDEQ (soit

l’année civile 1998) n’est pas un point de départ naturel pour les couples. Il s’agit plutôt d’un moment arbitraire fixé par les chercheurs pour commencer leur étude. Dans le contexte d’une étude ayant recruté des couples à un âge précis ou après une durée d’union donnée, la variable temporelle aurait pu être l’âge des parents ou la durée du mariage. Cependant, dans ce mémoire, les couples variaient de façon trop importante sur ces variables au début de l’étude. Par conséquent, le temps écoulé depuis la naissance de l’enfant cible ou l’âge moyen de l’enfant cible (en années) à chaque volet est retenu puisque tous les parents sont évalués aux mêmes unités temporelles et en même temps.

Dissolution d’union

À chaque temps de mesure, une question sur la survenue d’une séparation ou d’un divorce chez les parents de l’enfant cible est posée. Les parents ayant affirmé s’être séparés ou divorcés lorsque l’enfant cible était âgé de 8 ans, 10 ans, ou 12 ans sont considérés comme ayant vécu une dissolution d’union.

Variables à contrôler

Plusieurs variables sociodémographiques constituent des prédicteurs potentiels de la dissolution conjugale et sont donc retenues comme des variables à contrôler : (1) l’âge de la mère et du père au début de l’étude (1998), (2) le statut socioéconomique en 1998 (score z calculé d’après le niveau d’éducation de la mère et du père, le prestige de la profession de la personne qui connaît le mieux l’enfant cible et de son conjoint, ainsi que le revenu du ménage), (3) la situation conjugale des parents à la naissance de l’enfant cible (mariage direct ou non9), (4) la présence d’unions antérieures de la mère ou du père (aucune union, union(s)

9 Les situations conjugales à la naissance de l’enfant cible qui ne sont pas un mariage direct peuvent être : un

mariage précédé d’une union libre, une union libre, les parents séparés ou les parents n’ayant jamais vécu ensemble.

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antérieure(s)), (5) la présence d’enfants issus d’unions antérieures de la mère ou du père (aucun enfant, enfant(s) issu(s) d’unions antérieures) et (6) la durée de l’union avant la naissance de l’enfant cible (en mois).

Procédure

La base de sondage de l’ÉLDEQ est constituée des informations contenues dans le Fichier maître des naissances de 1997-1998 du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). Le plan de sondage utilisé comporte trois degrés de stratification : (1) les régions sociosanitaires (RSS ; les RSS échantillonnées sont deux des quatre RSS éloignées – les RSS 8 et 11 – et les onze RSS non éloignées – soit les RSS 2, 3, 4, 5, 6, 7, 12, 13, 14, 15 et 16), (2) une ou deux municipalités régionales de comté (MRC) pour chaque RSS sélectionnée, et (3) un nombre variable d’enfants à l’intérieur des MRC sélectionnées.

L’ÉLDEQ évalue les enfants cibles à trois phases. Les deux premières phases se déroulent pendant la petite enfance (1998-2002) et l’âge scolaire (2003-2010). La troisième phase de l’ÉLDEQ compte deux collectes en 2011 et 2013, et en prévoit une en 2015. L’ÉLDEQ vise à suivre les jeunes pendant leur passage à l’école secondaire, soit de l’âge de 13 à 17 ans. Les données de cette dernière phase ne seront pas utilisées dans le présent mémoire puisqu’elles n’étaient pas disponibles au moment des analyses statistiques. La première phase comprend cinq volets : 1998, 1999, 2000, 2001 et 2002. Chacun des quatre premiers volets de la première phase se déroule sur une période de six mois qui inclut six vagues de collecte. Ainsi, les enfants sont âgés d’environ 5 mois, 17 mois, 29 mois et 41 mois à chaque vague de collecte des volets 1998, 1999, 2000 et 2001, respectivement. À partir du volet 2002, les enfants sont évalués au même moment, pour se conformer au système scolaire. Ainsi, les enfants sont âgés de 44 à 56 mois (ci-après 4 ans) au dernier volet de la première phase. La deuxième phase de l’ÉLDEQ est composée de six volets : 2003, 2004, 2005, 2006, 2008 et 2010. À chacun de ces volets, les enfants sont respectivement âgés de 56 à 68 mois (5 ans), de 68 à 80 mois (6 ans), de 80 à 92 mois (7 ans), de 92 à 104 mois (8 ans), de 116 à 129 mois (10 ans) et de 140 à 152 mois (12 ans).

Enfin, les variables utilisées dans la présente étude sont tirées de trois questionnaires : le questionnaire informatisé rempli par l’interviewer (QIRI), le questionnaire autoadministré de la mère (QAAM) et le questionnaire autoadministré du père (QAAP). Le QIRI est administré à la personne qui connaît le mieux l’enfant cible, soit la mère dans la quasi-totalité des cas. Comme leur nom le suggère, le QAAM et le QAAP sont respectivement administrés à la mère (ou à la conjointe du père) et au père (ou au conjoint de la mère). Concernant les temps de mesure des variables, la satisfaction conjugale a été estimée à cinq reprises entre 2000 et 2004 chez les mères (QAAM) et chez les pères (QAAP), alors que l’âge des enfants et le type de famille sont évalués à chaque temps de mesure dans le QIRI. La dissolution d’union des parents (séparation

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17 ou divorce) a été rapportée au cours des années 2006, 2008 et 2010 (QIRI). Les variables à contrôler ont toutes été mesurées en 1998 (QIRI).

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Résultats

Analyses descriptives

La majorité des mères et des pères demeurés dans des familles biparentales (lorsque l’enfant cible est âgé de 2 ans et demi à 6 ans) est originaire du Canada (91.35 % et 90.27 %, respectivement), diplômée d’études postsecondaires (62.56 % et 58.92 %), a le français comme langue maternelle (83.07 % et 83.89 %) et un revenu familial de 50 000 $ et plus au volet 1 (50.14 % et 51.16 %). Les statistiques descriptives des variables utilisées dans ce mémoire sont présentées au tableau 1.

Tableau 1. Statistiques descriptives de l’échantillon.

Mères (n = 1 063) Pères (n = 998)

M (ET)

Satisfaction conjugale

Enfant cible de 2 ans et demi 28.46 (3.92) 27.79 (4.01)

Enfant cible de 3 ans et demi 28.22 (4.37) 28.81 (3.97)

Enfant cible de 4 ans 28.08 (4.34) 28.52 (4.23)

Enfant cible de 5 ans 27.86 (4.33) 28.30 (4.16)

Enfant cible de 6 ans 27.96 (4.52) 28.29 (4.13)

Âge 29.93 (4.81) 32.39 (5.17)

Statut socioéconomique (en score z) 0.22 (0.94) 0.23 (0.93)

Durée de l’union avant la naissance de l’enfant cible (en mois) 67.87 (43.39) 68.07 (43.33) %

Dissolution d’union lorsque l’enfant cible est âgé 12 ans 17.92 16.67 Situation conjugale des parents à la naissance de l’enfant cible

Mariage direct 16.46 15.83

Pas de mariage direct 83.54 84.17

Unions antérieures de la mère ou du père

Aucune union 63.61 63.54

Union(s) antérieure(s) 36.39 36.46

Enfants issus d’unions antérieures de la mère ou du père

Aucun enfant 89.28 89.62

Enfant(s) issu(s) d’unions antérieures 10.72 10.38

L’échantillon conservé pour les analyses statistiques diverge significativement de l’échantillon du suivi longitudinal de l’ÉLDEQ. Huit analyses de variance (ANOVA) ont été effectuées chez les mères, avec un niveau de signification de .006 ajusté à l’aide d’une correction Bonferroni. Ainsi, comparativement aux mères qui ne sont pas demeurées dans des familles biparentales lorsque leur enfant était âgé de 2 ans et demi à 6 ans (n = 1 057)10, les mères de familles biparentales ont une plus grande satisfaction conjugale lorsque leur

enfant a 29 mois (F (1,1730) = 19.12, p ˂ .006) et 41 mois (F (1,1712) = 7.81, p ˂ .006), sont plus âgées

10 Ce nombre est obtenu en soustrayant le nombre de mères de familles biparentales (n = 1 063) du nombre

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(F (1,2117) = 31.93, p ˂ .006), ont un statut socioéconomique plus élevé (F (1,2093) = 111.31, p ˂ .006) et sont en union depuis plus longtemps à la naissance de l’enfant cible (F (1,1944) = 19.73, p ˂ .006). Les tailles d’effet associées à ces différences sont toutefois très petites (d = .011 pour la satisfaction conjugale lorsque l’enfant a 29 mois; d = .005 pour la satisfaction conjugale lorsque l’enfant a 41 mois; d = .015 pour l’âge de la mère; d = .05 pour le statut socioéconomique; d = .010 pour la durée de l’union). Il n’y pas de différences statistiquement significatives entre les deux groupes concernant la satisfaction conjugale aux autres temps de mesure (4 ans, 5 ans et 6 ans).Trois tests de khi-carré d’indépendance statistique avec un niveau de signification de .05 ont permis de constater de plus fortes proportions de couples sans unions antérieures (χ2(1) = 6.83, p ˂ .05) et sans enfants issus de ces unions (χ2(1) = 27.19, p ˂ .05) chez les mères de familles biparentales, comparativement aux mères qui ne sont pas demeurées dans des familles biparentales. Aucune différence n’est toutefois observée entre ces deux groupes quant à la situation conjugale à la naissance de l’enfant cible.

Huit ANOVA ont également été effectuées chez les pères en appliquant un seuil de signification de .006. Comme chez les mères, comparativement aux pères qui ne sont pas demeurés dans des familles biparentales lorsque leur enfant était âgé de 2 ans et demi à 6 ans (n = 1 122)11, les pères des familles biparentales ont

une plus grande satisfaction conjugale lorsque leur enfant a 29 mois (F (1,1588) = 13.83, p ˂ .006) et 41 mois (F (1,1488) = 11.24, p ˂ .006), un statut socioéconomique plus élevé (F (1,2093) = 113.45, p ˂ .006) et sont en union depuis plus longtemps à la naissance de l’enfant cible (F (1,1944) = 19.19, p ˂ .006). Les tailles d’effet associées à ces différences sont aussi très petites (d = .009 pour la satisfaction conjugale lorsque l’enfant a 29 mois; d = .007 pour la satisfaction conjugale lorsque l’enfant a 41 mois; d = .05 pour le statut socioéconomique; d = .010 pour la durée de l’union).Il n’y pas de différences statistiquement significatives entre les deux groupes selon l’âge du père, ni selon la satisfaction conjugale aux autres temps de mesure (4 ans, 5 ans et 6 ans). Trois tests de khi-carré d’indépendance statistique avec un niveau de signification de .05 ont permis de constater de plus fortes proportions de couples sans unions antérieures (χ2(1) = 5.72,

p ˂ .05) et sans enfants issus de ces unions (χ2(1) = 28.34, p ˂ .05) chez les pères de familles biparentales, comparativement aux pères qui ne sont pas demeurées dans des familles biparentales. Aucune différence n’est toutefois observée entre ces deux groupes quant à la situation conjugale à la naissance de l’enfant cible.

Conséquemment, les mères et les pères demeurés dans des familles biparentales lorsque leur enfant était âgé de 2 ans et demi à 6 ans (l’échantillon conservé pour les analyses statistiques) pourraient ne pas être représentatifs des parents d’enfants issus de naissances simples et nés au Québec en 1997-1998 (la population visée par l’ÉLDEQ).

11 Ce nombre est obtenu en soustrayant le nombre de pères de familles biparentales (n = 998) au nombre de

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Premier objectif : trajectoires de satisfaction conjugale

Afin de décrire les trajectoires de satisfaction conjugale et de répondre au premier objectif, deux analyses de trajectoires sont effectuées (Jones, Nagin, & Roeder, 2001; Nagin, 1999; Nagin & Odgers, 2010), l’une pour les mères et l’autre pour les pères demeurés dans des familles biparentales (intactes ou recomposées) lorsque l’enfant cible est âgé de 2 ans et demi à 6 ans. Pour ce faire, la procédure « proc traj » du logiciel SAS est utilisée. Ces analyses permettent d’identifier des groupes de participants ayant des patrons similaires d’évolution de la satisfaction conjugale. Pour chaque groupe, le modèle définit la forme de la trajectoire (montante, descendante, stable ou curvilinéaire) et la proportion estimée de la population appartenant à ce groupe. Le Bayesian Information Criterion (BIC) permet de sélectionner le modèle qui représente le mieux les données : le modèle avec le BIC minimal en valeur absolue est sélectionné comme modèle optimal. Également, les probabilités moyennes d’au moins 0.80 à l’intérieur de chaque trajectoire, ainsi que la proximité des probabilités estimées et observées pour chaque trajectoire, indiquent un bon ajustement du modèle aux données (Nagin & Odgers, 2010). Le seuil clinique de détresse conjugale (fixé à 28) a permis d’étiqueter les groupes comme satisfaits (satisfaction conjugale située au-dessus du seuil), peu satisfaits de leur relation de couple et vulnérables à vivre certaines difficultés conjugales (ci-après peu satisfaits; satisfaction conjugale située près du seuil clinique) ou insatisfaits (satisfaction conjugale située sous le seuil clinique).

Chez les mères (n = 1 063), un modèle à une trajectoire est d’abord estimé. La trajectoire générale chez les mères est linéaire négative. Lorsque leur enfant a 29 mois, la satisfaction conjugale des mères est légèrement au-dessus du seuil clinique de détresse (M = 28.46) et diminue durant les années subséquentes (les moyennes sont égales à 28.22, 28.08, 27.86 et 27.96 lorsque l’enfant est âgé de 3.5, 4, 5 et 6 ans, respectivement). Par la suite, le nombre de groupes et la forme des trajectoires ont été identifiés. Le tableau 2 rapporte les BIC pour des modèles variés en termes du nombre de groupes et de la forme des trajectoires. Les modèles à cinq groupes n’ont pas été retenus étant donné les faibles proportions de la population observées dans ces groupes. Par exemple, le plus petit groupe des cinq groupes comprenait 2.9 %, 3.1 % et 3.3 % de population dans les modèles 11, 12 et 13, respectivement. Ainsi, d’après le critère du BIC, les mères sont classifiées en quatre trajectoires (voir Figure 1). Chez les mères appartenant à la trajectoire « très insatisfaite-curvilinéaire » (n = 44 ; 4.14 %), la satisfaction conjugale est nettement sous le seuil clinique de détresse (M = 20.16) lorsque l’enfant cible a 29 mois. Par la suite, elle décline pour atteindre son plus bas niveau lorsque l’enfant a 41 mois (M = 16.77), puis remonte jusqu’à ce que l’enfant ait 6 ans (M = 18.46). Ces mères sont tout de même en forte détresse conjugale tout au long de la période d’observation. Les mères appartenant à la trajectoire « insatisfaite-linéaire négative » (n = 202 ; 19.00 %) ont une satisfaction conjugale légèrement au-dessous du seuil clinique de détresse lorsque l’enfant cible a 29 mois (M = 25.22). Leur satisfaction conjugale décline au cours des années suivantes pour atteindre son plus bas niveau lorsque

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l’enfant a 6 ans (M = 23.03). Chez les mères appartenant à la trajectoire « peu satisfaite-constante » (n = 396 ; 37.25 %), la satisfaction conjugale lorsque l’enfant cible a 29 mois est égale au seuil clinique de détresse (M = 28.00) et reste stable par la suite. Enfin, les mères appartenant à la trajectoire « satisfaite-constante » (n = 421 ; 39.60 %) ont une satisfaction conjugale supérieure au seuil clinique de détresse lorsque l’enfant cible a 29 mois (M = 31.42), laquelle demeure stable au cours des quatre années suivantes. La prévalence de la détresse conjugale chez les mères (ayant un score < 28 au DAS-8) selon l’âge de l’enfant cible est de 36.1 % (29 mois), 36.0 % (41 mois), 36.3 % (4 ans), 39.5 % (5 ans) et 39.3 % (6 ans).

Tableau 2. Sélection du modèle chez les mères.

Modèle Nombre de groupes Ordre BIC

1 2 0 0 -13416.10 2 2 1 1 -13403.09 3 2 2 2 -13406.56 4 3 0 0 0 -13052.83 5 3 1 1 1 -13037.58 6 3 2 2 2 -13035.14 7 4 0 0 0 0 -12913.23 8 4 1 1 1 1 -12891.96 9 4 2 1 0 0 -12880.88 10 4 2 2 2 2 -12895.44 11 5 0 0 0 0 0 -12851.48 12 5 1 1 1 1 1 -12830.89 13 5 2 2 2 2 2 -12837.42

Note : L’ordre représente la forme des trajectoires, soit constante (0), linéaire (1) ou quadratique (2).

Figure 1. Trajectoires de satisfaction conjugale des mères.

31,42 31,52 31,47 31,15 31,51 28 28,07 27,84 27,88 27,8 25,22 24,36 24,07 23,22 23,03 20,16 16,77 17,4 17,51 18,46 15 20 25 30 35 40

2 ans ½ 3 ans ½ 4 ans 5 ans 6 ans

Sa tisfactio n con ju ga le

Âge de l'enfant cible

Satisfaite-constante (39.60 %) Peu satisfaite-constante (37.25 %) Insatisfaite-linéaire négative (19.00 %) Très-insatisfaite-curvilinéaire (4.14 %)

Figure

Tableau 1. Statistiques descriptives de l’échantillon.
Figure 1. Trajectoires de satisfaction conjugale des mères.
Tableau 3. Sélection du modèle chez les pères.
Figure 2. Trajectoires de satisfaction conjugale des pères.
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